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Full text of "Colas et Colinette ou Le bailli dupé [microforme] : comédie en trois actes, et en prose, mêlée d'ariettes"

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IMAGE  EVALUATION 
TEST  TARGET  (MT-3) 


1.0    ^^  1^ 


1.1 


Ut  m 

£  U£    12.0 


■22 


l^^s   IrII^b   PIMi 


Photographie 

Sdmoes 

Corporation 


23  WBT  MAIN  STRIIT 

WIBSTIR,N.Y.  14iM 

(71é)l7a-4S03 


^$> 

^4^ 

V 


CIHM/ICMH 


Séries. 


CIHM/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Caiwdlan  lnt«tu»  «or  Mlttorloal  Mlcror.productloi..  /  liwthut  ciMdiw.  d*  mterocproductlon.  hluOflquM 


Tcehnical  and  Bibliographie  Notaa/Notaa  tachniquaa  «t  bibliographiquas 


Th 
to 


Tha  inatituta  haa  attamptad  to  obtain  tha  baat 
original  copy  availabla  for  filming.  Faaturaa  of  thia 
copy  which  may  ba  bibliographieaily  uniqua, 
which  may  altar  any  of  tha  imagaa  in  tha 
raproduption,  or  which  may  aignificantly  changa 
tha  uaual  mathod  of  filming,  ara  chackad  balow. 


D 
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D 


Coiourad  covara/ 
Couvartura  da  eoulaur 

Covara  damagad/ 
Couvartura  endommagea 

Covara  raatorad  and/or  laminatad/ 
Couvartura  raatauréa  at/ou  paliiculéa 

Covar  titia  miasing/ 

La  titra  da  couvartura  manqua 

Coiourad  mapa/ 

Cartaa  géographiques  en  couleur 


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^ncra  «la  couleur  (i.e.  autre  que  bleue  ou  noire) 

r~n   Coloured  plates  and/or  illuatrationa/ 


D 


Planchée  et/ou  illuatrationa  en  couleur 

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Relié  evec  d'eutrea  documents 

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L'Institut  e  microfilmé  le  meilleur  exemplaire 
qu'il  lui  a  été  poaaible  de  se  procurer.  Les  déteils 
de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  Image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modificatton  dana  la  méthode  normele  de  f limage 
sont  indiqués  ci-dessous. 


r^  Coloured  pages/ 


D 


Pagae  da  couleur 

Pegea  damagad/ 
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Pages  restored  and/oi 

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ry}  Peges  damagad/ 

I — I  Pages  restored  and/or  lamineted/ 

r~71  Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 

I     I  Peges  detached/ 

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Pages  wholiy  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refllmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totelement  ou  pertieiiement 
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Ce  document  eet  filmé  eu  teux  de  réduction  indiqué  ci-deaaoua. 

10X  14X  ItX  22X 


28X 


aox 


• 


12X 


16X 


20X 


aéx 


2tX 


32X 


TIm  eopy  fllmad  h«r«  hM  b««n  raproducMl  thanks 
to  th«  a«n«rosity  of  : 

National  Ubrary  of  Canada 


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généroaité  da: 

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possibla  conaidaring  tha  condition  and  lagibility 
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tha  last  paga  with  a  printad  or  illustratad  impras- 
•ion,  or  tlM  bacic  covar  whan  appropriata.  Ail 
othar  original  copias  ara  fiimad  baginning  on  tha 
first  paga  with  a  printad  or  Illustratad  Impras- 
sion,  and  anding  on  tha  last  paga  with  a  printad 
or  Illustratad  Imprassion. 


Las  Imagas  suhrantas  ont  été  raproduitas  avac  la 
plus  grand  soin,  compta  tanu  da  la  condition  at 
da  la  nattaté  da  l'axamplaira  filmé,  at  an 
conformité  avac  las  conditions  du  contrat  da 
filmaga. 

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papiar  ast  Impriméa  sont  filmés  an  commençant 
par  la  pramiar  plat  at  an  terminant  soit  par  la 
darniéra  paga  qui  comporta  una  amprainta 
d'impraaaion  ou  d'illustration,  soit  par  la  sacond 
plat,  aalon  la  cas.  Toua  las  autras  axamplairas 
originaux  sont  filmés  wn  commançant  par  la 
pramiéra  paga  qui  comporta  una  amprainta 
d'imprassion  ou  d'illustration  at  an  terminant  par 
la  darniéra  paga  qui  comporta  una  taiia 
amprainta. 


Tha  last  racordad  frama  on  aach  microficha 
shall  contain  tha  symbol  — ►  (maaning  "COIV- 
TINUEO"),  or  tha  symbol  V  (maaning  "END"), 
whichavar  applias. 


Un  daa  symbolas  suivants  apparaîtra  sur  la 
darniéra  imaga  da  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  -^  signifie  "A  SUIVRE",  le 
symbole  y  signifie  "FIN". 


Maps.  plates,  cherts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  Included  in  one  exposure  are  filmed 
beginning  In  the  upper  left  hand  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  f  rames  as 
required.  The  following  diagrams  lllustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmée  é  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  pour  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  é  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  é  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrant  la  méthode. 


1  2  3 


1 

2 

3 

4 

5 

6 

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xivî 


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^ 


/^». 


COLAS  ET  COLINETTE 


OU 


LE  BAILLI  DUPE. 


éj 


COMEDIE 


<_  t 


SN  TKOIS  ACTES,  ET  EN  PROSE,  MKLEE  D'ARIETTES  ; 


'-'Les  Paroles  et  la  Musique  bar  M,  Q. 


'/Af^^  Ç. 


ycC/i^i>'r^ 


71  /^/A. 


^^ 


A  QUEBEC: 
Chez  JoHK  Neilson,  Imprîmeur-Libraîre  ;   Ru«  la  Mon* 


tagne.  No»  3. — 1808. 


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''  ^ttmétiti^^S^  i 


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"^ 


.^jAVIS  DE  L'EDITEURk/.:: 

C^ETTE  pièce  écrite  depuis  près  de  20  ans, 
fut  représentée  pour  la  première  fois  en  1790 
à  Montréal  sur  un  Théâtre  de  Société.  L'in- 
tention de  l'Auteur  n'étoit  pas  de  lui  donner 
une  plus  grande  publicité,  mais  vivement  sol- 
licité depuis  plusieurs  années,  par  des  Ama- 
teurs éclairés,  de  la  laisser  Imprimer,  nous 
avons  eu  enfin  son  agrément  pour  cela,  et  nous 
l'avons  entrepris  à  nos  frais.  ^^ 

Quoique  nous  n'ayons  rien  épargne  pour 
rendre  cette  Edition  correcte,  il  s'est  glissé 
plusieurs  fautes  de  ponctuation  et  même  d'or- 
thographe j  auxquelles  nous  prions  les  Lecteurs 
de  vouloir  suppléer.  --|-|.  r 


•,r>    \A 


.fc' 


ACTEURS. 

M.  DOLMONTi  Seîgneur  de  Vzrckse^f ha- 
bit de  drap  gris  à  boutons  dorés ^  veste  de 
soie  verte,  culattet  de  même  drap  que  l*ka» 
bit,  perruque  ronde  et  poudrée,  longue  cra* 
vatte  blanc/te  et  bas  de  soie  blancs,  sans  cha- 
feau,  excepté  ait  troisième  acte,  bouquet  à 
ton  habit») 

LE  BAILLI  DU  VILLAGE— ("^^3//,  veste, 
culottes  et  bas  noirs,  manteau  court  de  même 
couleur,  grosse  perruque  à  la  conseillère^ 
Bien  poudrée,  canne,  et  chapeau  retapé,  J 

COLINETTE,  jeune  paysanne,  élevée  chez 
M.  Dolmont — (robe  de  mousseline,  tablier 
de  soie  verte,  mouchoir  de  gaze,  chapeau  de 
paille  sans  plumes  et  orné  d'une  simple  boih 
de  de  ruban,  les  mains  nues,J 

COLAS,  jeune  paysan,  amoureux  de  Colî- 
nexte-"(gilet  et  culottes  courtes  de  nanquin^ 
bas  de  fi  blanc  et  boucles  de  ruban  à  la 
jarretière,  cheveux  bouclés  et  poudrés,  cha- 
peau de  paille  relevé  d'un  côté,  ruban  vert 
autour  du  chapeau,) 

L'EPINE,  domestique  de  M.  Dolmont — Cgi- 
let  et  culottes  de  drap  gris,  collet  rouge  au 
gilet,  bas  de  fil  blanc,  sans  chapeau  et  les 
cheveux  poudrés.) 


La  Scène  est  à  la  Campagne,  chez  M,  Dolmont» 


FAUTES  rMENTIELLia  A  CORRIGER. 


Page  20,  ligne  7ine.  C'est  qu'y  vat  lisez  Cett  qu'y  va 


ne  l'avois^je  pas  lisez  Nt  faveh^ye  fat 

de  m'avoîr  lisez  de  m'voir 

Je  ne  vous  dis  pas  que  non,  lisez  Je  ne  vem 
âh  fat  noHf 

Plein  de  peines  et  de  rig^nrs  ;  lisez  de  feine 
et  de  rigueurt  s 

C'est  bien  penser  !  lisez  Cett  bien  finti  ! 

•—  57,  Après  ce  vers  du  Duo  dans  la  partie  de  Cola  • 
Tsavons  morgue  bien  c'qu'il  en  est. 

Ajoutez 
J'tavent  itn  te  ju*  c'ett. 

*.   58,  ligne  17me.  j'ons  pris  not  partis  lisez  font  frit  ntt  farti 
iM  C7,   «—    20e.      Tu  m'as  l'air  d'un  frip<Hi.  lisez  Tu  m*at  Fait 
d'être  un  Friftit. 


—  24,    —  12e. 

—  42,    —  21e. 

—  49,    —  14e. 

—  51,   —  14e. 

—  5S,    —  17e. 


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4: 


COLAS  ET  COLINETTE 


OU 


LE  BAILLI  DUPE 

COMEDIE. 
ACTE  PREMIER. 

Le  Théâtre  représente  l* avenue  du  Jardin  de 
M.  Dolmont, 

SCENE  PREMIERE. 

COLINETTE  entrant  par  le  fond  du  Théâtre, 
avec  une  poignée  defieurs  à  la  main, 

J-je  Soleil  est  déjà  bien  haut  et  Colas  ne 
vient  point  !  Il  devoit  se  rendre  ici  de  grand 
matin  pour  cueillir  ensemble  le  bouquet  que  je 
veux  présenter  à  M.  Dolmont,  dont  c'est  de- 
main la  fête...  auroit-il  oublié  ce  matin  ce  qu*il 
désiroit  hier  avec  tant  d'empressement ?.... Hé 
bien,  en  l'attendant  faisons  toujours  le  bouquet. 

Elle  s'assied  à  gauche  du  Théâtre,  pose  les  fieurs 
sur  ses  genoux  et  travaille  à  faire  un  bouquet. 

Arriette. 

Cher  protecteur  de  mon  enfance, 
C'est  pour  toi  seul  qu'en  ce  bosquet, 
Ma  main  façonne  ce  bouquet. 
Que  t'offre  la  reconnoissance  ; 


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11 


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mr^f^m- 


COLAS  ET  COLINETTE. 


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Du  sort  éprouvant  la  rigueur, 
En  naissant  je  perdis  mon  père, 
Sans  toi  quel  étoit  mon  malheur  ! 
Mais  tu  me  vis,  je  te  fus  chère. 
Et  tu  devins  mon  bienfaiteur. 
Cher  protecteur  de  mon  enfance. 
C'est  pour  toi  seul  qu'en  ce  bosquetf 
Ma  main  façonne  ce  bouquet, 
Que  t'offre  la  reconnaissance. 


«M    •»  *  À  \.^  K^ 


ï 


Mais  ce  négligent  de  Colas,  qui  peut  donc 

l'avoir  arrêté  ! Oh,  je  veux  le  quereller,  le 

quereller Pourtant  je  sais  qu'il  m'aime  et  il 

n'ignore  pas  aussi  mes  sentiments  pour  lui.  Il 
est  si  bon  Î....I1  est  si  franc,  si  sincère  !....Une 
chose  pourtant  me  déplait  en  lui,  il  est  jaloux. 
C'est  un  défaut  que  je  hais  et  dont  je  voudrois 
qu'il  se  pût  corriger.. ..je  ne  crois  pas  qu'on 
puisse  être  heureuse  en  ménage  quand  la  jalou- 
sie vient  en  troubler  la  paix.  Allons,  il  est  temps 
bientôt  d'aller  présenter  ce  bouquet  à  M.  Dol- 
mont,  car  les  Miliciens  vont  venir  et  en  voilà 

pour  toute  la  matinée Ah,  Ah!...  j'entends 

quelqu'un!     C'est  sans  doute  Colas Non, 

c'est  M.  Le  Bailli  qui  vient  encore  m'ennuier 
de  ses  propos.  Oh  !  que  je  voudrois  qu'il  fut 
loin  d'ici  ! 


SCENE  IL 
COLINETTE,  LE  BAILLL 


LE    BAILLI. 

He  bon  jour,  belle  Colinette. 

COLINETTE. 

Bon  jour,  Monsieur  Le  BaiUi. 


COMEDIE* 


J  K-y/R-turj.Y 


LE  BAILLI. 

Que  fais-tu  donc  ici  si  niatin  ^ 
coLiNETTE,  ie  UvatiU 

*  Vous  le  voyez  ;  je  fais  un  bouquet. 

LE  BAILLI. 

Sera  t*îl  pour  moi  ? 

COLINETTE*^ 

Pour  vous  ? 

LE  BAILLI. 

Oui.  J'aimerois  beaucoup  un  bouquet  de  ta 
jolie  main.     (Il  veut  lui  baiser  la  matn,J 

^  COLINETTE. 

'     Finissez.  * 

LE  BAILLI. 

Dis-moi,  seras-tu  toujours  aussi  farouche  ? 

COLINETTE. 

Aussi  farouche?  Qu'est  ce  que  cela  veut  dire? 

L£  BAILLI. 

*  C'est  que  si  tu  voalois  m'aimer,  je  saurois 
te  rendre  fort  heureuse  ;  tu  ne  sais  pas  tout  le 
bien  que  je  pourrois  te  faire. 

COLINETTE,  ironiquement. 
Je  vous  suis  obligée  de  votre  bienveillance. 

LE  BAILLI.  ^ 

C'est  répondre  assez  mal  à  mon  empresse- 
ment^ tu  n'ignores  pas  que  je  t'aime,  et  tu  ne 
fais  que  rire  de  mon  amour. 

COLINETTE,  Hont, 

Eh,  que  voulez-vous  donc  que  je  fasse  ? 

LE  BAILLI. 

Tu  badines  toujours,  mais  je  te  parle  sérieu- 
sement moi,  il  ne  tiendroit  qu'à  toi  de  devenir 
en  peu  ma  petite  femme. 


'■■ff'^^T-i 


COLAS  ET  COLINETTE. 


COLINETTE. 

Votre  petite  femxiiie  ?  ;^  r..^  r^^j.  .^t^^ 

L£  BAILLI. 

Oui,  je  te  donnerois  mon  cœur  et  tout  ce  que 
je  possède. 

COLINETTE.  „      ' 

Vous  avez  bien  de  la  bonté.  '  "**^ 

LE  BAILLI. 

Je  me  flatte  que  M.  Dolmont  n'y  mettroit 
point  d'obstacles. 

COLINETTE. 

Vous  vous  flattez  peut-être  un  peu  Icgèrt^ 
ment. 

LE  BAILLI.  ^ 

Pourquoi? 

COLINETTE. 

Parceque  M.  Dolmont  pourroit  bien  n'y  pas 
consentir. 

LE  BAILLI. 

Il  n'y  consentiroit  pas  ? Mais  si  tu  y  con- 

sentois-toi  ? 

COLINETTE. 

Oh  !  pour  cela  non»  je  vous  assure. 

LE  BAILLI. 

Diantre  !  tu  me  parois  bien  décidée,  est-ce 
que  tu  serois  assez  folle  pour  refuser  la  main 
d*un  homme  qui  t'aimeroit  ? 

COLINETTE,  .1 

Je  serois  du  moins  assez  sage  pour  ne  pas  ac- 
cepter celle  d'un  homme  que  je  n'aimerois  pas. 

LE  BAILLI.  , 

C'est  parler  clairement,  mais  j'espère  que  tu 
deviendras  moins  insensible,  et  que  tu  pourras 
m' aimer  quelque  jour.  .,....„-, 


^^ 


COMEDIE. 


COLINETTB. 

Cela  pourra  venir, 

LE  BAILLI. 

Eh  bien  !  tâches  donc  que  cela  vienne,  et 
considère  que  je  suis  riche,  et  que  ce  n*est  pas 
une  chose  à  dédaigner. 

coLiNETTE,  à  part.  ■ 

Voici  de  quoi  faire  à  Colsis  une  histoire  assez 
jolie. 

LE  BAILLI. 

Tu  n'ignores  pas,  mon  eofant,  que  l'argent 
dans  le  ménage.... 

COLINETTE,  I* interrompant,      ' 

Tenez,  M.  Le  Bailli,  je  ne  songe  point  à  me 
marier,  souffrez  que  je  vous  quitte,  pour  aller 
porter  ce  bouquet  à  M.  Dolmont,  avant  l'ar- 
rivé des  Miliciens.  , 

LE  BAILLI. 

Eh  !  quoi,  si  pressée  ?  reste  donc  encore  un 
moment  ;  les  enrôlemens  ne  commencent  pas  si 
matin  et  nous  pouvons  causer  encore. 

COLINETTE. 

Je  n'en  ai  pas  le  tems.     fEIie  s'enfuit. J 


SCENE  iir. 


■..Vl'ff     fts 


LE  BAILLI. 

ii<LLE  est  charmante,  mais  c'est  dommage 
qu'elle  ne  m'aime  pas  ;  cependant  ne  désespé- 
rons de  rien.  Le  cœur  d'une  jeune  fille  est 
comme  ramadou,  une  étincelle  suffit  pour 
l'embraser,  j'espère  qu'elle  s'apprivoisera.  Cil 
rêve)  Je  me  croirois  heureux  avec  cette  enfant 
là  !  c'est  un  cœur  tout  neuf,  cela  s'attachera  à 


6 


COLAS  ET  COLINETTE. 


m  ' 


..) 


■'7 

•  f 

'T. 


son  mari  ;  cela  se^  feroit  à  mes  caresses,  et  dans 
peu,  elle  m'aîmeroit  à  la  folie,  mais  d'autre 
part,  épouser  une  fille  si  jeune  à  mon  âge  1....I1 
y  a  bien  quelques  risques  à  courir ceci  de- 
mande quelques  réflexions. 

Pendant  la  ritournelle,  il  se  promène  sur  le  bord 
du  Théâtre  d'un  air  pensif, 

Arriette.  '*  "^ 

Colinette  est  jeune  et  jolie, 
De  l'épouser  ferai-je  la  folie, 
L'Amour  dit  oui,  mais  hélas  la  raison 
£n  l'écoutant  me  dira  toujours  non. 

Non,  non,  non,  non, 

Pourtant,  pourtant  sa  mine 

Sa  mine  est  si  mutine  ! 
Si  fine  ! 
Non,  non,  mon  cœur  n'y  sauroit  résister. 
Lequel  des  deux  dois-je  écouter  ! 
C'en  est  fait  elle  à  su  me  plaire. 
Oui  je  veux  hâter  cette  affaire, 
Colinette  sera  mon  lot. 
Sitôt  que  l'amour  dit  un  mot 
C'est  la  raison  qui  doit  se  taire.  ,       ,V 

-.  Me  voila  tout-à-fait  décide,  à  quoi  sert  de 
-délibérer  ?  Je  n*ai  pas  de  tems  à  perdre  pour 
prendre  un  parti,  mais  je  me  crois  encore  très 
propre  à  faire  le  bonheur  d'une  femme,  il  s'a- 
git seulement  de  lui  plaire,  et  quand  j'aurai 
gagné  ce  point  là,  il  me  sera  facile  de  renverser 
les  obstacles  que  M.  Dolmont  pourroit  mettre 
à  notre  mariage.  C'est  une  espèce  de  misan- 
trope  que  ce  M.  Dolmont.... Eh  puis,  la  petite 
friponne  n'est  peut-être  pas  sans  avoir  déjà 
quelqu'amoureux,  je  l'ai  vu  qu'^lquefois  avec 


bord 


COMEDIE.  ;  t 

un  certain  Colas  des  environs.... La  jeunesse  a 
de  grands  avantages,  et  cela  ne  laisse  pas  que 
de  me  donner  quelqu'inquiétude. 

Colas  chantant  sans  être  apperçu. 
Allons  danser  sous  les  ormeaux,  &c. 

Mais  le  voici  !   tachons  de  découvrir  ce  qui 

en  est. 

SCENE  IV. 
COLAS,  LE  BAILLL 


,>fn 


COI.AS.  „  r 

OERViTEUR  à  M.  Le  Bailli.  >  ^n:i, 

LE  BAILLI. 

Ah!  te  voilà,  maitre  Colas,  tu  me  parois 
bien  gai  ce  matin. 

COLAS. 

Pas  beaucoup,  M.  Le  Bailli. 

LE  BAILLI. 

Comment  ?  il  me  semble  qu'on  n'est  pas 
triste  quand  on  chante. 

COLAS.  j^^    '>}■ 

Je  ne  sis  pourtant  pas  ben  content,  je  vous 
assure. 

LE  BAILLI. 

Ou'as-tu  donc,  es-tu  m-^.lade? 

COLAS.  '  *>*  «-7 

Je  m*porte  assez  ben,  mais  je  n'mange  ni 
ii*dors,  et  pis  par  fois  j 'poussons  des  soupirs 
comme  si  m'étions  arrivé  queque  malheur.   ■J 


s 


COLAS  ET  COLINETTE. 


LE  BAILLI. 

Maïs  c'est  être  malade  que  de  ne  pouvoir 
manger  ni  dormir. 

COLAS. 

C'est  une  maladie  sans  mal,  je  sentons  seu- 
lement là  dedans  queque  chose  qui  m'tarabuste 
furieusement,  et  je  viens  pour  en  parler  à  M. 
Dolmont, 

LE  BAILLI.  --'''^i'  ù^ 

A  M.  Dolmont  ?  est  ce  qu'il  est  médecin  ? 

COLAS. 

Non,  c'est  l'Seigneur  du  village. 

LE  BAILLI. 

Et  bien  !  que  peut-il  faire  à  cela  ? 

COLAS.  j-  ' 

Ly  !  y  pourrions  d'un  seul  mot  m'rendre 
gay  comme  un  Pinçon. 

LE  BAILLI,  à  part. 

Je  crains  bien  d'avoir  deviné,  (haut)  sais-tu 
que  je  suis  un  peu  devin,  moi,  et  que  je  puis  te 
dire  d'où  vient  cette  langueur  !  Voyons,  mon- 
tre moi  tes  yeux.. 

COLAS. 

Regardez. 

LE  BAILLI,  le  regardant  fixement. 
C'est  cela  même.    Hé  bien,  je  connois  à  pré- 
sent la  cause  de  ton  mal. 

COLAS..  ...xij-;-,#- 

Vous  badinez  ?  ^' 

LB  BAILLI.        >    .  1/Mv     .;  > 

Je  te  parle  sérieusement.  '' 

COLAS. 

.   Oui  ?  Eh  bien,  comment  appellez-vous  ça  \ 
C'est  ty  dangereux  ? 


COMEDIE. 


LE  BAILLI. 

Non,  c'est  ce  qu'on  appelle  la  maladie  de 
Tamour. 

COLAS  riant  niaisement. 

De  Tamour.     Hé  à  quoi  diantre  connoissez- 
vous  ça  vous  ? 

LE  BAILLI. 

je  ne  m*y  trompe  jamais,  et  je  te  dirai  de 
plus  le  nom  de  celle  que  tu  aimes. 

COLAS. 

Oh  bien,  ça  seroit  drôle,  voyons,  dites-le 
moi. 

LE  BAILLI. 

C'est  Coiinette. 

COLAS.  ,      "l 

Coiinette  ? 

LE  BAILLI.  •  ''""^t\  ' 

Oui,  l'Orpheline  de  M.  Dolmont.  *  P 

COLAS  riant.  ■ '-^ 

Mais   mais,    vous  êtes  pire  qu'un  Sorcier.    P 

LE  BAILLI,  à  part. 
Voilà  mes  soupçons  confirmés  ChatitJ  Eh 
bien  !  n*ai-je  pas  devine  ?  * 

COLAS. 

Tenez,  je  n'voulions  pas  l'dire,  mais  mor- 
gucnne  v'zavez  mis  l'nez  dessus  drès  l'premier 
coup.     Est-ce  que  vous  la  connoissez  ? 

LR  BAILLI. 

Comme  ça,  je  l'ai  vue  quelquefois,  chez  M. 
Dolmont.  V  ; 

COLAS. 

Et  bien?  comment  la  trouvez-vous  ?  j  ,•■  : 

LR  BAILLI.        . ,,      - 

Mais  assez  gentille.  j^o-  :4f .  :•, 


;^' 


10 


COLAS  ET  COLINETTE. 


f^. 


COLAS. 

Dites  plutôt,  quelle  est  bien  Jolie.. 

LE  BAILLI. 

Eh  bien  soit,  jolie  si  tu  veux..  Y  a-t^l  long* 
tems  que  tu  la  connois  ? 

COLAS., 

Pardine  drès  toute  petite,  j'àvons  été  étevés 
par  ensemble,  sa  mère  et  mon  père  étions  amis; 
et  voisins,  y  s'étions  ben  promis  d'nous  marier 
un  jour  par  ensemble,  mais  malheureusement,;, 
je  les  avons  perdu  tous  deux.. 

LE  BAILLI. 

Et  c*est  sans  doute  pour  cela  que  tu  veux 
parler  à  M.  Dolmont. 

COLAS.. 

Justement,  mais  c'est  que  j*suis  si  honteux 
que  ça  m'coute  à  Ty  en  parler,  j'ons  été  ben 
souvent  au  Château  dans  c't'intention,  mais  drès 
que  j*suis  à  la  porte  le  cœur  me  bat,  j'nose- 
entrer,  et  j'm'en  reviens  sans  avoir  rien  dit., 

LE  BAILLI.. 

Le  Pauvre  Colas  !  mais  crois-tu  que  ColinettG' 
ait  aussi  de  l'amitié  pour  toi  ?. 

COLAS.  ''->  ■  -^' 

Oui,  je  l*trois. 

LE  BAILLI. 

Comment  t'en  es-tu  apperçu  ? 

COLAS..  ^-ni^^:;'.'  l 

Oh!  dame,  à  ben  des  choses., 

LE  BAILLI., 

T'at'elle  dit  quelquefois  qu'elle  t'aimoît.?' 

COLAS. 

Si  elle  me  l'a  dit  î!  Oh  ouï,  pus  de  cent  fôife. 


f 


OOMÊDÏE. 


-^ 


n 


Et  jamais  tu  ne  t'es  brouillé  avec  die  ? 

COLAS. 

Oh  !  pour  ^a,  si  fait;  mais  tant  y  a  toujours, 
que  si  j'nous  brouillons  par  ensemble  je  n'tar- 
dons  pas  à  nous  raccommoder,  enfin  tenez  M. 
Le  Bailli. 

Air: 

Colinette  est  un  vrai  trésor, 
Toift  plaît  en  c'te  jeune  bergène, 
Joli  minoiS)  taille  légère, 
On  n'pcut  s'teoir,  d'Iaimer  d*abord« 

C'est  comme  un  sort. 
Pour  moi  que  l'amour  engage, 
A  Songer  au  mariage. 
Je  sens  bien,  sauf  vot  respet,* 
Que  Colinette  est  tout  mon  fait.     (hu.J 

Quand  aux  bois  elle  va  sautant,  j^     |  jQ    - 

t  .Te  l'a  guettons  pour  aller  avec  elle,         '  '"  ; 

-      '-    Elle  r'fuse  d'abord,  d'abord  ell'me  querelle. 

Mais  j'I'en  prions  si  poliment,  '  ;.  ' 

Quelle  y  consent.  "'■'*•! 

Pour  moi  que  l'amour  engage, 

A  songer  au  mariage, 

•Te  sens  bien,  sauf  vot  respet,  ^ 

Que  Colinette  est  tout  mon  fait.     (lts>) 

Si  queuq'fois  j'ia  veux  embrasser, 

Contre  moi  elle  s'met  en  colère. 

Mais  j'crois  pourtant  qu'elle  m'iaisseroit  faire, 

Si  j 'osions  un  peu  la  presser,  -  •.    .,  ^^^j- 

Et  r'commencer. 
Pour  moi  que  l'amour  engage, 
A  songer  au  mariage. 
Je  sens  bien,  sauf  vot  respet. 
Que  Colinette  est  tout  mon  fait,     (bis.) 

*  Chaque  fois  que  Colas  dit  ces  mots  «*  sauf  vot  respet,  "  il  ote 
son  chapeau  et  salut  profondément  le  Bailli. 

B 


IS 


COLAS  ET  COtlNETTE. 


ht 


LE  BAILLI,  â  part. 
Je  vois  bien  qu'il  n*est  que  trop  vrai  qu'elle 
raime,  (haut)  Mon  cher  Colas  je  m*interresse 
à  ton  amour,  et  comme  je  connois  M.  Dolmont, 
je  lui  parlerai  pour  toi  si  tu  veux. 

COLAS. 

Ah  !  si  vous  vouliez  faire  ça,  qu'elle  obliga- 
tion je  vous  aurois. 

LE   BAILLI. 

Oui  da,  je  le  ferai  ;  je  crois  que  ce  parti  là  te 
convient  beaucoup,  mais  je  ne  me  chargerai 
de  parler  pour  toi  qu*à  certaines  conditions  ; 
M.  Dolmont  n'est  pas  un  homme  fort  traitable, 
il  faut  savoir  le  prendre,  ainsi  il  faut  que  tu  me 
promettes  d'être  soumis  à  tout  ce  qu'il  te  dira. 

COLAS. 

Qu'à  ça  n'tienne,  je  vous  l'promets, 

LE  BAILLI. 

Et  de  ne  rien  répliquer  à  tout  ce  que  je  ferai 
pour  toi  ? 

COLAS. 

Oui,  oui,  j'frons  tout  ce  que  vous  voudrez 
pourvu  que.... 

LE  BAILLI, 

Tu  me  le  promets  ? 

COLAS. 

Oui  d'un  grand  cœur. 


m 


Duo. 

LE  BAILLI. 

Tu  peux  compter  sur  moi, 
Je  parlerai  pour  toi. 

COLAS. 

Voue  savez  mon  affaire. 


»>*■  ■••i*^ 


COMEDIE. 


13 


LE  BAILLI. 

Oui,  oui)  laisse  moi  faire» 
Je  parlerai  pour  toi. 

COLAS. 

Ah  !  si  de  ma  maitresae 
Vous  m'obtenez  la  main, 
Je  veux  par  politesse. 
Vous  prier  du  festin. 

4                i 

LE  BAILLI. 

Par  mon  heureuse  adresse  ; 
De  ta  jeune  maitresse 
Je  t'obtiendrai  la  main, 
Serai-je  du  festin  ? 

t 

»    )       r  '-  ■: 

COLAS. 

Vous  serez  du  festin. 

-■-«.i. 

LE  BAILLI. 

Tu  peux  compter  sur  moi. 

COLAS. 

Parlerez-vous  pour  moi  ? 

LE  BAILLI. 

Je  parlerai  pour  toi. 

COLAS. 

Vous  savez  mon  affaire  ? 

■p  y 

'"ru;-'. 

LE  BAILLI. 

Oui,  oui,  laisse  moi  faire. 

i 

Tu  peux  compter  sur  moi. 

COLAS. 

Vous  parlerez  pour  moi  ? 

LE  BAILLI. 

Je  parlerai  pour  toi. 

v-1'        ^'    'i 

r 

-  LE  BAILLI. 

Oh  ça  tu  te  souviendras  de  ce  que  tu  m'as 
promis? 

COLAS.  >!     ) 

Oui,' oui.  Monsieur  Le  Bailli. 

LE  BAILLI. 

Car  autrement  je  ne  me  mêlerai  pas  de  ton 
affaire. 

A2 


*4>»  l.fi'  !■!  : 


m 


R 


14         COLAS  ET  COURETTE. 

COLAS. 

Vous  serez  content  de  moi,  je  voû8  assure. 

LE  BAILLI. 

Tu  sens  bien  que  ce  que  j'en  fais  n'est  que 
pour  t'obliger  et  te  rendre  service. 

COLAS. 

Oui  certes,  et  j'vous  en  remerck. 

LE  BAILLI. 

Eh  bien  !  écoute  moi,  je  serai  chez  M.  Dol- 
mont  dans  une  demie  heure  ;  tu  n'as  qu'à  venir 
m'y  trouver  et  je  te  présenterai  à  lui. 

COLAS. 

Ca  suffit,   M.  le  Bailli,  grand  merci,    de 
vot  bonté. 


SCENE  V. 

COLAS,  seul, 

IVIorgue'  j'suis  ben  heureux  d'avoir  rencontré 
M.  L 'Bailli,  si  à  propos  pour  m 'aider  à  parler 
à  M.  Dolmont  !  C'est  une  chose  qui  coûte 
tant  que  d'aller  demander  queuqu'un  en  ma- 
riage, surtout  qu'en  on  n'a  pas  la  parole  en 
bouche. 


M 


i.., 


'   -^  -^  SCENE  VL  '  ■ 
COLAS,  COLINETTE.  .   . 

:;40 -,    .  J 
COLINETTl. 

X  E  voilà  donc  enfin  !    Il  est  bien  tems  de  vç- 
nir  quand  l'ouvrage  est  fait.  »^<-*- 


ÇQM5DIÏ- 


1^ 


coiAa. 
Quoi  donc? 

COLINKTTB. 

Le  bouquet  que  nous  deviços  présenter  ï 
M.  Dolmont. 

COLAS.  -  "    ^ 

Ah! Mais  c'est  que  je  n'y  ons 

pas  songé  du  tout. 

COLINBTTE. 

Belle  excuse  !  voilà  comme  tu  es,  tu  ne  son- 
ges à  moi  que  quand  tu  me  vois. 

COLAS. 

Tu  savons  ben  Tcontraire. 

COLINETTE. 

Voila  un  amoureux  bien  empressé;  îl  me 
donne  un  rendez-vous  et  U  n'y  vient  pas  ! 

COLAS. 

C'est  ben  vrai,  je  n'sais  pas  comment  j'ons 
pu  oublier  ça. 

COLINETTE. 

Ni  moi.  J'aurois  été  bien  aise  que  tu  fus 
venu,  mais  cependant  je  n*y  ai  rien  perdu,  car 
pendant  que  j*étois  seule  ici  un  beau  Monsieur 
m'est  venu  trouver  qui  m^  bien  désennuiée. 

COLAS. 

Que  veux-tu  dire  ?  ^^ 

COLINETTE. 

Je  te  dis  que  j'ai  fait  la  connoîssance  d'un 
Monsieur  bien  riche  et  qui  ma  dit  qu'il  m'aî- 
moit. 

COLAS. 

Via  un  beau  coQte  que  tu  m'fais  là  ! 


IB 


COLAS  ET  COUNETTE. 


;-f 


II 


'  1  v- 


I 
1 


-:t..,^,jU 


COLINITTI. 

Ce  n'est  point  un  conte. 

COLAS. 

Tout  de  bon? 

COLINBTTI. 

Oui.  Il  m'a  même  fait  des  propositions  de 
mariage. 

COLAS. 

Des  propositions  de  mariage  !  Et  que  l'y 
as-tu  répondu  ? 

COLINITTB. 

Eh  dame,  j*airépondu....j'ai  répondu  comme 
îl  convenoit  de  répondre. 

COLAS. 

Mais  sans  doute  que  tu  ne  l'y  as  pas  donné 
d'espérances?  /    . 

COLINBTTE. 

J'ai  fait  plus,  car  je  lui  ai  presque  donné  ma 
parole. 

COLAS. 

Tu  l*y  as  donné  ta  parole  ? 

COLINBTTE. 

Oui,  ma  parole,  mon  consentement. 

COLAS. 

Seroit  t'y  possible  que  tu  pourrois  en  aimer 
un  autre  après  toutes  les  promesses  que  tu  m'as 
faites?  ^  ; .    / 

COLINBTTE. 

Il  est  vrai,  je  ne  sais  pas  comment  j'ai  pu 
oublier  cela. 

COLAS. 

Je  l'sais  ben  moi.  C'est  que  ton  amitié  est 
pus  changeante  que  l'vent.  Mais  dis-moi,  est 
t'y  convenable  à  une  fille  d'écouter  les  cajolle- 


V|     voi 
pas 


■À^ 


4     du 
me 


^« 


COMEDIE. 


17 


îue  l'y 


comme 


donné 


ne  ma 


aimer 
1  m'as 


ai  pu 


ic  est 
i,  est 
ijolle- 


■È 


ries  d'un  queuqu'un. quand  elle  s'ctons  promise 
à  un  autre  ?  Comment  as-tu  pu  oublier  c'que 
tu  m'a  dit  cent  fois,  c'que  tu  m'disons  tous 
les  jours?  Ahl  Colinette  je  n'te  croioi^  pas 
capable  de  ça. 

COLIN£TTK. 

Allons,  voilà  encore  les  reproches.  Hc 
n'as-tu  pas  toi-même  oublié  qu'hier  au  soir 
tu  me  demandas  avec  empressement  la  per- 
mission de  venir  ce  matin  me  trouver  au  jar- 
din ?    £toit-ce  aussi  une  chose  à  oublier  ? 

COLAS. 

Tu  as  raison.  Mais  dis-moi  donc,  est-ty  ben 
vrai  qu'un  Monsieur....? 

COLINETTE  l'interrompant. 

Tiens,  c'est  une  petite  vengeance  dont  j'ai 
voulu  avoir  le  plaisir,  pour  t'apprendre  à  ne 
pas  manquer  une  autre  fois  au  rendez-vous. 

COLAS. 

Tu  es  trop  méchante  aussi  de  m'faire  endé- 
ver  comme  ça. 

COLINETTI. 

Hé  ben  laissons  cette  plaisanterie  qui  te  cause 
du  chagrin  et  sois  sur  que  je  suis  toujours  la 
même  pour  toi. 

COLAS. 

Tu  me  remets  le  cœur.  Hc  ben  puisque  tu 
n'est  point  fâchée,  dis-moi  donc  encore  une 
fois  que  tu  m'aimes. 

COLINETTE. 

Je  te  l'ai  répété  cent  fois,  mais  je  veux  bien 
encore  t'assurer  de  mes  sentimens. 


18         COLAS  ET  COLINETTE. 


Ariette. 


,.  I  I         :     i      -.i 


!  . 

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h, 

i 

.'  il 


Le  tendre  amour  qui  pour  Colas  m'engage» 

Ne  changera  jamais  A'objet  ; 

Lies  vaiins  deiiors  d'un  brillant  étalage, 

Sur   moi   ne  font  aucun  effet, 

Ton   cœur  constant,  ton  cœur  fidèle, 

Pour  le  mien   èït  un  don  flatteur. 

C*eât  dans  une  ardeur  mutuelle         '     .  '^ 

Que  l'on  peut  goûter  le  bonheur. 

COLAS. 

Chère  Colinette  !    Tu  me  rends  le  bonheur^ 

COLINBTTE. 

Es-tu  content  de  cette  assurance  ?  et  cela  te 
guérira-t-il  de  la  jalousie  ? 

COLAS. 

Pardonnes-moi,  ma  chère,  c'est  par  ce  que 
j'taimons  que  j*ons  toujours  peur  de  t'perdre, 
et  pisque  tu  m'aimes  aussi  n'me  donne  donc 
pus  d'chagrin  :  mais  à  propos,  y  faut  que  j'te 
conte  queque  chose  qui  nous  regarde  tous  deux. 

COLINETTE, 

Qu*est-ce  que  c'est  ? 

COLAS. 

C'est  pour  à  l'égard  de  not  mariage. 

COLINETTE. 

As-tu  parlé  à  Mr.  Dolmont  ? 

COLAS. 

Non,  mais  j'ai  trouvé  qu'euqu'un  qui  s'est 
chargé  de  l'y  en  parler  avec  moi,  et  j'y  vas 
aller  tout-à-I' heure. 

COLINETTE. 

Que  veux-tu  dire  ?    Colites  moi  donc  cela. 

COLAS. 

Tiens,  v'iacom  ça  s'est  passé,  je  m'suis  levé 


tÔMEDÎÈ. 


id 


c'matîn  tout  triste  com  d'ordinaire,  et  j*ai  dit 
en  moi-même  :  c'est  demain  la  fête  à  Mr.  Dol- 
mont,  faut  pas  que  je  manque  d'aller  l'voir  j 
c'est  un  bon  jour  pour  l'y  demander  une  grâce, 
faut  que  je  l'y  conte  mon  amiquié  pour  Coli- 
nette,  et  que  je  la  l'y  d'mande  en  mariage  ; 
il  a  l'cœur  bon,  il  est  g^  néreux,  peut-être  qui 
m' l'accordera» 

COL  IN  ET  TE, 

Et  tu  ne  songeois  point  au  bouquet  ? 

COLAS. 

Pas  un  brin,  j 'avions  trop  d'choses  en  tête, 

COLINETTE. 

Hé  bien.   ; 

COLAS. 

J'ons  donc  é  té  au  château,  mais  com'y  n'é- 
toit  pas  l'vé  j'nons  pu  l'y  parler,  et  j'en  avois 
ben  du  chagrin  ;  maia  en  revenant  j'ons  ren- 
contré Mr.  L'Bailli  qui  m'a  dit  com'ça  :  D'où 
qu'tu  viens  Colas?  Moi  j'I'y  ai  dit  que  j've- 
nois  d'cheux  Mr.  Dolmont  ;  v'ia  t'y  pas  qui 
s'est  mis  à  deviner  à  mes  yeux  que  j 'avions 
dTamour  pour  toi.  Ahî  m'a  t'y  dit  j'sais 
bien  c'que  tu  as,  t'es  amoureux  d'Colinette  ; 
moi  quand  j'ai  vu  ça,  j'ai  dit  tout  ingénument 
que  c'étoit  vrai,  mais  que  j'n'osions  l'y  en  par- 
ler. Eh  bien  !  Colas,  y  ma  dit,  j'veux  m'in- 
teresser  pour  toi;  viens  tantôt  m'trouver 
cheux  Mr.  Dolmont,  et  j'I'y  en  parlerai  ;  moi 
bien  content  j'I'ons  remercie,  et  j 'sommes  ac- 
couru t'chercher  pour  te  conter  ça. 

COLINETTE. 

Tu  as  fait  là  une  belle  afîiiire. 


20 


COLAS  ET  COLINETTE. 


1 


.1 


^l' ^ 


sh.i 


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y  11-  V 

: 


COLAS. 

,  Vas-tu  point  encore  me  quereller  ?    .      ..^ 

COLINETTE. 

Qu'avois  tu  besoin  de  t'aller  confier  à  ce 
vilain  Bailli  ? 

COLAS. 

C'est  qu*y  vat  parler  pour  nous..  r 

COLINETTE. 

Qu*avois  tu  besoin  d*lui  parler  de  cela  ? 

COLAS. 

J*te  l'dis,  y  m*a  promis  d*prendre  nos  in- 
térêts, et  pis  c'est  que  c'est  un  homme  qu'a 
la  langue  ben  pendue,  va. 

COLINETTE. 

Je  te  dis  moi  qu'il  ne  faut  point  s'y  fier.  Il 
faut  que  tu  lui  parles  toi-même,  ou  ne  plus 
songer  à  notre  mariage,  mais  voyez  un  pea 
quelle  confiance  ! 

COLAS.. 

Pardine  j'ons  ben  du  guignon  !  Je  n'puis 
jamais  t'contenter  ;  ne  vois-tu  pas  qu'c*est  un 
service  que  voulions  m'rendre  Mr.  L*Bailli  ^ 

COLINETTE. 

Et  moi  je  ne  veux  pas  que  tu  lui  aye  cette  o- 
bligation. 

COLAS. 

J'noseraî  jamais  1  y   en  parler. 

COLINETTE. 

As-tu  peur  qu'il  te  mange  ?  Fi  donc,  tu 
n*as  pas  plus  de  courage  qu'une  poule. 

COLAS. 

Allons,  je  vas  prendre  ma  resolution  et  aller 
l*y  parler,  coûte  qui  coûte»  mais  comment 
que  j'dirai? 


3r 


COMEDIE. 


21 


COLINETTE. 

Il  faut  premièrement  demander  à  lui  parler, 
€ts*il  n  est  pas  occupé,  tu  te  feras  introduire, 
tu  le  salueras,  et  tu  lui  diras:  Monsieur,  j'ai 
pris  la  liberté  de  vous  troubler  pour  avoir  l'hon- 
neur de  vous  souhaiter  une  bonne  fête.  La 
dessus  il  te  répondra  quelque  chose,  et  aussitôt 
tu  lui  demanderas  son  consentement  pour  notre 
mariage.  if  "  .     -  • 

COLAS. 

C'est  bon  jemî'y  en  vas. 

COLrNETTE. 

Tu  te  souviendras  bien  de<:ela? 

COLAS.  : 

Oh  !  que  Oui. 

COLINETTE. 

Hé  bien,  voyons,  répètes  moi  ce  que  je  viens 
de  te  dire. 

COLAS.         * 

Tiens,  je  suppose  que  tu  es  Mr  Dolmont  ; 
jote  mon  chapeau,  et  j*Py  dis  :  Monsieur;  je 
prends  l'honneur  d  avoir  la  liberté 

;      .COLINETTE,  Ic  contrefaisant. 

L'honneur  davoir  la  liberté Quel  gali- 
matias fais-tu  donc  ? 

COLAS. 

Hé  diune  aussi  il  y  en  a  si  long  !  j'puis  t'y 
me  souvenir  de  tout  ça,  moi  ? 

COLINETTE. 

Comment,  ne  peux-tu  pas  repeter  mes  pa- 
roles ? 

'  '■:^~  .,    îlv  COLAS. 

£t  sarpedié  j'Ies  dis  toutes  les  paroles. 


COLAS  ET  COLBTETTir. 


iP   i 


•i     ! 


H 


COLINETTB. 

Oui,  tu  les  arranges  joliment.         i  ^n  II 

COLAS. 

Tiens  laissons  ça,  vaut  bien  mieux  que  j'I'y 
^e  tout  franchement  c'que  j'ai  dans  Tame.- 

COLINfiTTE. 

Oui,  inais  tâches  de  t*expliquer  le  plus  poli- 
ment que  tu  pourras,  et  cours  vite,  car  il  sera 
occupé  toute  la  matinée.  ;    :..' 

COLAS. 

Je  dirai  com'tu  m*as  dit,  et  j'y  cours  tout  de 
suite,  mais  où  te  trouverai-je  ? 

COLINBTTE. 

Je  vais  t'attendre  là  bas  dans  le  jardin,  mais 
ne  vas  pas  faire  comme  ce  matin. 

COLAS      '  ■ ■ 

N'y  a  pas  d 'risque,  attends-moi,  je  sVons 
bientôt,   r'venu. 


4 


u 


ACTE  SECOND. 

Le  Théâtre  représente  ï* appartement  de  M,  Dol- 
mont,  on  y  voit  une  table,  du  papier^  des 
plumes  ^c, 

SCENE  I. 

M.  DOLMONT,  écrivant  à  son  Bureau. 

v><iNQ  et  cinq  font  dix  et  dix  font  vingt,  vingt 
quatre  et  six  font  trente,  et  sept  font  trente 
sept  et  huit  font  quarante  cinq  et  deux  font 
quarante  sept.  Voilà  toujours  quarante  sept 
Miliciens  d'enrôlés  depuis  deux  joiurs.    Ma  pa- 


i 


l\\ 


COMEDIE. 


23 


)Ius  poli- 
ril  çer* 


s  tout  de 


m,  mais 


B   srons 


M.  DoU 

pier,  des 


ureau. 

jt,  vingt 
t  trente 
ux  font 
inte  sept 
Ma  pa- 


roisse en  doit  fournir  cinquante  c'est  encore 
trois  qu'il  me  faut,  je  les  aurai  aujourd'hui 
j'espère,  et  le  nombre  sera  complet  pour  de- 
main, qu'ils  doivent  partir  après  la  revue.  ("11 
regarde  à  sa  montre. J  Comment  déjà  neuf 
heures  !  il  devroit  s'être  déjà  présenté  quel- 
qu'mi,  et  j'ai  donné  ordre  à  mon  imbécile  de 
Valet  de  les  faire  entrer,  mais  il  n'en  aura 
rien  fait. 


SCENE  IL 
M.  DOLMONT,  L'EPINE. 

M.  DOLMONT. 


L*  EPINE.       ^ 


■4 


1-<'epine. 
Monsieur. 

M.  DOLMONT. 

Est-il  venu  quelqu'un  ce  matin  se  présenter 
pour  la  Milice  ? 

l'épine.    "^ 
Oui,  Monsieur,  il  en  est  venu  queuqu'uns. 

M.  DOI.MONT. 

Où  sont-ils  ? 

l'épine. 
Je  leur  ai  dit  de  revenir  tantôt. 

M.   DOLMONT. 

Pourquoi  cela  ?     ne  t'avois-je  pa^  donné  or- 
dre hier  au  soir  de  les  faire  entrer  ? 

l'épine. 
Oui,  Monsieur. 


-■ 


S4 


COLAS  ET  COLINETTE, 


M.  DOLMONT. 


^-'iS 


c 


i 


à 


Pourquoi  donc  ne  l'as-tu  pas  fait  l  ^ 

l'épine. 
C'est  que  je  n'y  ons  pas  songé  Monsieur.. 

M.  DOLMONT. 

Tu  n'as  pas  plus  de  mémoire  qu'un  lièvre^ 
et  mon  cabinet  que  je  t'ai  dit  d'arranger,  cela 
est  il  fait  ? 

l'épine. 
Non,  Monsieur. 

M,  DOLMONT. 

Pourquoi  non  encore  ?  ne  l*avois-je  pas  aussi 
donné  cet  ordre  hier  au  soir. 

l'épine. 
Oui  Monsieur,  c*est  bien  véritable. 

M.  DOLMONT. 

Et  pourquoi  donc  ne  l'as-tu  pas  fait  ? 
l'épine. 

Ah  c'est  que... pour  vous  dire  la  vérité. 
Monsieur,  c'est  que  je  n'y  ons  point  non  plus 
songé. 

M.  DOLMONT. 

Tu  ne  songes  donc  à  rien  ?  quel  ouvrage 
as-tu  fait  ce  matin  ? 

l'épine. 
Quel  ouvrage  ?  Monsieur  ? 

M.  DOLMONT. 

Oui  qu'as-tu  fait  depuis  que  tu  es  levé  ? 

l'épine. 
D'abord  Monsieur  j'ai   déjeuné...,  et   puis 
ensuite. 

M.  DOLMONT. 

Ah  !  tu  as  songé  à  cela  ? 


'M 

y, 


:i:"^- 


:r.     COMEDIE. 


8S 


leur. 


i  lièvre^ 
er,   cela 


oas  aussL 


i  Venté, 
non  plus 


ouvrage 


ivé  ? 


et   puis 


L^EPiNE,  riant  niaisemenU 
Ouï,  Monsieur. 

M.  DOLMOïT, 

Mon  pauvre  l'Epine  tu  es  un  fort  honnê^** 
garçon,  mais  un  fort  méchant  valet  ;  cependant 
je  t'aime  à  cause  de  ton  honnêteté,  mais  je  te 
conseillerois  pour  te  déniaiser  un  peu  et  te 
rendre  plus  actif  de  t'enrôler  dans  la  Milice,  je 
suis  certain  que  tu  t'en  trouverois  bien. 

l'épine. 
Oh  nenni  pas.  Monsieur,  je  n'aime  pas  la 
guerre,  moi. 

M.  DOLMONT. 

Est-ce  que  tu  as  peur  d'un  fusil  ? 

l'épine. 
Oh  non  Monsieur,  mais.... 

M.  DOLMONT. 

Sais-tu  que  rien  n'est  plus  honorable  que  de 
servir  le  Roi  ? 

l'épine.   ' 
Oh  je  crois  bien,  Monsieur,  mais.... 

M.  DÔLMONT. 

Allons,  je  vois  bien  que  tu  ne  serois  pas 
meilleur  soldat,  que  tu  n'es  bon  valet  ;  mais 
dis-moi,  étoit-ce  des  jeunes  gens  qui  se  sont 
présentes  ce  matin  ?  car  il  ne  me  faut  que  de 
la  jeunesse. 

l'épine. 

Oui,  Monsieur,  c'étions  tous  des  jeunes  gar- 
çons ;  il  y  en  avoit  un  surtout,  ben  joli  qui  pa- 
roissions  avoir  grande-hâte  de  vous  parler,  y 
m'a  ben  demande  à  qu'elle  heure  y  pourrions 

C2 


II 


':»'' 


m 


COLAS  ET  COLINETTE. 


t>i^ 


b'V 


m 


vous  voir,  et  j' crois  ben  qui  r* viendra  bentôt. 

M.  DOLMONT. 

Ne  manque  pas  de  faire  entrer  dans  mon 
cabinet  ceux  qui  se  présenteront,  et  tu  m'en 
avertiras  aussitôt. 

l'épine.  -' 

Cà  suffit  Monsieur;  pour  le  coup,  jenTou- 
blierons  pas.  v^^i    .... 


SCENE  m. 

L'EPINE. 

C'est  un  ben  brave  homme  que  mon  maître  ! 
du  depuis  quinze  jours  que  j'suis  à  son  ser- 
vice, c'est  vrai  qui  m'a  querellé  un  p'tit  brin, 
mais  y  n'ma  pas  encore  donne  tant  seulement 
une  tappe  ;  aussi  j'fais  t'y  d'mon  mieux  pour 
le  contenter.  Mais  pour  ce  qu'est  d'm'enrô- 
1er  dans  c'te  Milice  com'y  voudroit  me  l'con- 
seiller,  c'est  une  chose  que  je  n'ferai  point, 
quand  on  devroit  m' tuer.  J'n'ons  morgue  pas 
envie  d'aller  m' faire  estropier  pour  l'y  plaire, 
et  d'm'en  r'venir  cheux  nous  avec  une  ou  deux 
3,ambes  de  moins  ;  puis  gagne  ta  vie  com'tu 
pourras.  Non,  non,  je  n'suis  pas  si  fou  qu'ça. 
Ils  ont  beau  dire  que  c'est  une  belle  chose  que 
l'service,  et  qu'un  jeune  homme  fait  ben  d's'y 
mettre  ;  v'ià  d'beaux  contes  !  Eh  ben  quMes 
pus  pressés  courions  d'vant.  Pour  c 'qu'est 
d'moi  je  me  trouve  ben  com'je  suis.  Mais 
j'apperçois  Monsieur  L'Bailli,  faut  que  je 
l'consulte  la  d'sus. 


y 

bi 
es 


f 


SI 

d 


COMEDIE. 


21 


bentôt. 

ns  mon 
tu  m'en 


e  nTou- 


maître  ! 
son  ser- 
*tit  brin, 
?ulement 
.IX  pour 
'm'enrô- 
le l'con- 
ai  point, 
rgué  pas 
y  plaire, 
041  deux 
s  com'tu 
)u  qu*ça. 
lose  que 
en  d's'y 
m  qu'k's 

c 'qu'est 
3.     Mais 

que    je 


SCENE  IV. 
L'EPINE,  LE  BAILLL 


n 


LE  BAILLI. 

JjoNJOUR,  L'Epine,  ton  maître  est-il  ici? 

l'épine. 
Oui  Monsieur,  il  y  est...c*est-à-dire.^..non, 
y  n'y  est  pas. 

LE  bailli. 
Il  y  est,  et  il  n'y  est  pas  !  voilà  une  réponse 
bien  claire. 

l'épine. 
C'est  qu'y  n'est  pas  ici.  Monsieur,  mais  il 
est  dans  sa  chambre. 

LE  bailli.    ■ 
Qu'importe,  est-il  occupé  ? 

l'épine. 
Je  n'peux  vous  dire  ça,  mais  y  m'a  dit  d 'l'al- 
ler avertir  si  v'noit  queuq'zuns. 

le  bailli.  '  '  '  '         ' 

Vas  m'annoncer.  •       î"  •  : 

L 'épine,  s*en  allant. 
J'y  vas.   (revenant*)    J'voudrois  ben.  Mon- 
sieur L'Baillî,   que  vous  m'feriez  l'amiqué  de 
de  m'donner  votre  avis  sus  queuqu'chose  ? 

LE  BAILLI.  -         . 

De  quoi  s'agit-îl  ? 

l'épine. 
Mon  maître  m'conseille  d'm'enroler  dans  la 
Milice  ;  y  dit  com'ça,  qu'ça  m'feroit  du  bien. 

hi  BAILLI. 

Il  a  raison,  rien  ne  convient  mieux  à  un 
jeune  homme.  ■■' 


9â        COLAS  ET  COLmETTE, 


ir 


■•«♦^•^^•"H*^»».    .  ■-» 


L'EPINE. 

Com'c'est  un  homme  qui  m'estime,  et  qui 
m'aimons  voyez-vous  com'son  enfant,  j'vou- 
drois  ben  tacher  de  l'contenter. 


'I 


LE  BAILLI. 

C'est  très-bien  fait  a  toi, 
l'épine. 
Que  m'conseillez-vous  à  cVcgard  là  ? 

LE  bailli. 
Mais  je  suis  fort  de  l'avis  de  Mr.  Dolmont 
et  je  crois  que  tu  ne  saurois  mieux  faire. 

l'épine. 
Croyez-vous? 

v^^   '  LE  bailli. 

Oui.    C*est  aussi  mon  opinion. 

l'épine. 
C'est  que,  voyez-vous,  j'étoîs  ben  aise  de 
savoir  vot  sentiment  sus  ça. 

LE  bailli. 
C*est  te  dis-je  le  meilleur  parti  que  tu  puisse 
prendre. 

l'épine. 
Oh  bien,  j'suis  pourtant  ben  décidé  à  n'ie 
prendre  pas. 

le  bailli. 
Et  pourquoi.  Diable,  t'avises-tu  donc  de  me 
consulter? 

l'bpine. 
C'est  ben  véritable.    Monsieur,  j'n'y  son- 
gions pas. 

LE  bailli. 
Allons  va-t-en.    Je  n'ai  jamais  rien  vu  de 
plus  stupide. 


I 


Ui. 


COMEDIE. 


29 


;» 


et  qui 


,  j  vou- 


)olmont 


aise  de 
Li  puisse 
;  à  n'Ie 
:  de  me 
'y  son- 
vu  de 


SCENE  V. 

LE  BAILLI. 

Je  me  suis  chargé  d'une  singulière  commis- 
sion, mais  j'ai  mes  vues....L' entreprise  est  un 
peu  scabreuse  et  quand  on  viendra  à  décou- 
vrir.... Qu'importe,  tout  moyen  est  bon  quand 
il  conduit  au  but  qu*on  se  propose.  Cepen- 
dant....11  me  faut  sonder  les  sentimens  de  M. 
Dolmont  peut-être  ne  seroit-il  pas  aussi  oppo- 
sé....Et  puis  la  Loi  fournit  des  moyens....Ah  ! 
petite  friponne  vous  aimez  Colas  !  Patience, 
patience,  nous  en  avons  vu  d*autres....On  trou- 
vera le  moyen  de  l'empêcher  de  te  voir  et  si  tu 
m'échappes  tu  seras  bien  fine. 

»  •  ,■■',.    -  •■  '    -'  " 

Ariette. 

En  amour  plein  d'expérience, 
Je  sais  l'art  de  gagner  un  cœur. 
Si  l'on  résiste  à  mon  ardeur 
Il  faut  céder  a  ma  persévérance. 

Ainsi  que  le  chat  qui  guette 
Pour  attraper  la  souris, 
S'il  apperçoit  la  pauvrette, 
D'un  coup,  paf,  autant  de  pris  ; 
De  mûme  près  d'une  belle. 
Jamais  je  ne  perds  mes  pas. 
Devant  moi  la  plus  cruelle, 
Met  bientôt  les  armes  bas. 

En  amour  plein  d'expérience. 
Je  sais  l'art  de  gagner  un  cœur, 
Si  l'on  résiste  à  mon  ardeur. 
Il  faut  céder  k  ma  perse  vérance.. 


ifr 


SO         COLAS  ET  COLINETTE. 

SCENE  VI, 
LE  BAILLI,  M.  DOLMONT. 

M.  DOLMONT. 

Comment  se  porte  M.  Le  Bailli  ? 

LE  BAILLI. 

Pour  vous  rendre  mes  services. 

M.  DOLMONT. 

•   Je  vous  ai  fait  un  peu  attendre  ? 

LE  BAILLI. 

Et  moi  je  vous  ai  interrompu  peut-être  ? 

M.  DOLMONT. 

'  Nullement,  j'ctois  occupé  de  quelques  affaires 
qui  regardent  mes  vassaux. 

LE  BAILLI. 

Toujours  occupé  d'eux  i 

M.  DOLMONT. 

On  fait  ce  qu'on  peut.  Ces  pauvres  gens 
ont  souvent  besoin  de  moi,  et  il  en  coûte  si  peu 
quelquefois  pour  faire  du  bien,  que  c'est  se 
priver  d'un  grand  plaisir  que  de  n'en  pas  faire. 

LE  BAILLI. 

Excellente  morale  !  mais  à  propos  de  plai- 
sir, il  me  semble  qu'on  en  goûte  bien  peu  en 
vivant  aussi  retiré  que  vous,  et  qu'on  doit  fu- 
rieusement s'ennuyer. 

M.  DOLMONT. 

C'est  ce  qui  vous  trompe.  Monsieur,  l'en- 
nui n'est  fait  que  pour  l'homme  désœuvré  ou 
qui  ne  trouve  pas  de  ressource  en  lui-même  j 
au  reste,  chacun  a  ses  jouissances  et  voici  les 
miennes. 


I  ' 


COMEDIE. 


81 


tre? 
s  affaires 


/res  gens 

te  si  peu 

c'est  se 

pas  faire. 

de  plai- 

1  peu  en 

doit  fu- 


ir, Ten- 
îuvré  ou 
-même  ; 
/oici  les 


Ariette. 

De  iMndîgence  autour  de  moi, 
Adoucir  la  peine  extrême, 
Faire  du  bien  voilà  tna  loi, 
Mon  guut  mon  sistéme. 
A  Tubri  des  soins  divers. 

Et  des  revers 

Df  la  fortune,  ^ 

Sans  rechercher  la  grandeur, 
Kii  ces  lieux  je  trouve  le  botiheur. 
Nul  ilcsir  lie  m'importune. 
Ecartant  de  moi  les  soucis. 
Les  chagrins,  les  tristes  ennuis, 
Si  l'on  me  blâme,  je  m'en  ris  ; 
Pour  moi  le  plaisir  suprôme, 
Est  de  me  faire  des  amis. 
Et  de  jouir  de  moi-même. 


.# 


LE  BAILLI. 

Avec  cette  philosophie  on  doit  se  faire  effec- 
tivement beaucoup  d'amis. 

M.  DOLMONT. 

Et  l'on  ne  fait  souvent  que  des  ingrats,  mais 
venons  au  sujet  qui  vous  amène. 

LE  BAILLI. 

Vous  avez  adopté  une  jeune  personne  à  la- 
quelle vous  voulez  du  bien. 

■    •  M.  DOLMONT. 

Vous  parlez  de  Colinette  peut-être  ? 

LE  BAILLI. 

Oui,  c'est  une  aimable  enfant. 

M.  DOLMONT. 

Il  est  vrai  que  j'ai  pris  plaisir  à  l'élever,  et 
j'ai  bien  lieu  de  ne  m'en  pas  repentir. 

LE  BAILLI. 

Vous  avez  dessein  sans  doute  de  lui  procu- 
rer un  bon  établissement  f 


".1 


fi 


COLAS  ET  COLINETTE. 


y 


M.  DOIMONT. 

Je  n*ai  encore  aucune  vue  à  cet  égard,  mî& 
«juand  elle  prendra  un  parti,  je  me  reserve 
seulement  le  droit  de  l'éclairer  sur  son  choix. 

LE  BAILLI. 

J'entends,  c'est-à-dire,  l*empêcher  de  se 
laisser  éblouir  par  le  clinquant  de  la  jeunesse,  et 
la  porter  à  lui  préférer  la  solidité  de  Tage  mur. 

M.  DOLMONT.      ^ 

Il  est  vrai  que  l*amour  et  la  raison  vont  as- 
sez rarement  de  compagnie» 

LE  BAILLI, 

Je  pense  comme  vous  Monsieur,  et  îa  jeu- 
nesse doit  avoir  de  grandes  obligations  à  ceux 
qui  la  détourne  d'un  choix  dont  elle  pourroit 
avoir  lieu  de  se  repentir* 

M.  DOLMONT, 

Cela  est  vrai,  mais  à  quel  propos  me  faîtes 
vous  cette  question  ? 

LE  BAIlLt. 

C'est  une  indiscrétion  peut-être,  et  c'est  ce« 
pendant  en  partie  le  motif  de  ma  visite  :  chargé 
par  quelqu'un  de  vous  faire  une  proposition 
qui  regarde  Colinette,  je  voulois  auparavant 
essayer  de  pénétrer  les  vues  que  vous  avez  sur 
elle,  mais  la  conformité  de  vos  principes  et  des 
miens,  m'enhardit  à  vous  parler  phis  claire- 
ment. 

M.  DOLMONT. 

Qui  est-ce  qui  vous  à  chargé  de  cette  propo- 
sition ? 

LE  BAILLI. 

Un  garçon  d'un  certain  âge,  mais  riche  et 
qui  l'aime  passionément. 


m 


COMEDIE. 


d$ 


îrve 


se 
mr. 
as- 


M.  DOLMONT. 

Quel  est  son  nom  ? 

LE  BAILLI. 

Il  ne  m'a  pas  permis  de  le  nommer  qu'en 
cas  que  la  proposition  fut  agréée. 

M.  DOLMONT. 

Son  amour  est  bien  mistérieux  !  au  reste  je 
n*ai  rien  à  répondre  à  cette  proposition,  car  il 
n'entre  pas  dans  n/^n  plan  de  chercher  à  fixer 
le  choix  de  Colinette  d'après  mon  goût,  mais 
seulement  de  la  guider  dans  celui  qu'elle  pouf- 
roit  faire. 

LE  BAILLI. 

Cependant  vous  convenez  que  la  raison  de 
Tage  mur.... 

M.  DOLMONT. 

N'est  pas  toujours  fort  propre  à  amuser  une 
jeune  femme. 

LE  BAILLI. 

Mais  convenez  du  moins  que  la  richesse.... 

M.  DOLMONT. 

Ne  rend  presque  jamais  heureux  deux  époux 
quand  ils  n'ont  d'autre  félicité  que  celle  qu'elle 
procure. 

LE  BAILLI. 

Ainsi  donc.  Monsieur,  vous  ne  consentiriez 
pas  aux  propositions  que  cette  personne.... 

1  M.  DOLMONT. 

Je  ne  dis  pas  cela,  mais  je  ne  puis  rien  pro.. 
mettre  sans  consulter  auparavant  le  goût  de 
Colinette  dont  j'ignore  les  sentimens  à  cet  é- 
gard,  cependant  je  lui  en  parlerai,  et  nous  en 
causerons  une  autre  fois. 


54 


COLAS  ET  COLINETTE. 


mi      > 


m 


IV- 


LE  BAILLI. 

Cela  suffit.  Je  me  suis  aussi  chargé  de  vous 
parler  pour  un  jeune  homme  qui  désire  beau- 
coup de  s'enrôler  dans  la  Milice,  avez-vous 
encore  besoin  de  quelqu'un  ?         ,    ,,  -, 

M.  DOLMONT. 

Oui  vraiment,  le  nombre  n'en  est  pas  tout- 
à-fait  complet. 

LE  BAILLI. 

Le  jeune  homme  dont  je  vous  parle  fera  je 
crois  votre  affaire,  cela  est  vigoureux,  assez 
bien  pris,  de  bonne  volonté,  et  c'est  de  quoi 
faire  un  bon  soldat. 

M.  DOLMONT. 

Oùest-il? 

LE    BAILLI. 

Il  devroit  être  déjà  ici,  car  je  lui  avois  indi- 
qué l'heure  que  je  devois  m'y  trouver  pour 
vous  le  présenter.  Il  est  un  peu  timide,  mais 
cela  se  dégourdira  dans  le  service. 

M.  DOLMONT. 

Ce  n'est  rien,  l'essentiel  est  qu'il  soit  jeune 
et  de  bonne  volonté.  ; ,  ^ ,  ^  : .     „ 


SCENE  VIL 
M.  DOLMONT,  LE  BAILLI,  L'EPINE. 

,    l'epine^  ■  -'-'.r     ri 

JVloNSiEUR,  le  jeune  homme  de  c 'matin  est 
ici,  j'Pons  fait  entrer  dans  l'cabinet,  et  l'y  a 
longtems  qu'il  attendons  pour  vous  parler. 


•/  • 


■f— 


COMEDIE. 


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33 


M.  DOLMONT.  ^  ^ 

Qu'il  entre.  ,,     ,c:    îiil^r-î 

l'épine. 
De  c'coup  j'nons  pas  oublié.        ,:,^.,    '^- 

M.  DOLMONT. 

Va-t-en. 

l'épine,  s* en  allant. 
Oh  dame,  c'est  que  quand  on  m' charge  de 
queuque  chose,  moi.... 


SCENE  vm. 

M.  DOLMONT,  LE  BAILLI,  COLAS. 

colas,  faisant  des  révérences, 

jyioNsiEUR,    j'ons  pris    l'honneur  de    vous 
troubler  pour....  . 

LE  BAILLI.  •  ,  .        7 

J'ai  parlé  pour  toi  à  Monsieur  Dolmont, 

COLAS.  -  ;■  - 

Grand  merci.  Monsieur  L'Bailli. 
LE  BAILLI,  bas  à  Colas. 
Tu  vois  que  je  ne  t'ai  pas  oublié.  '  '  -'     ' 

COLAS. 

Monsieur,  m'accordons  t'y  la  grâce....? 

M.  DOLMONT. 

Mon  ami,  ceci  n'est  point  une  grâce  ;  je  me 
prête  seulement  à  ton  inclination  et  à  ton  goût. 

COLAS. 

Ah!  pour  c'qu'est  d'ça  Monsieur,  j 'vous 
assure  que  c'est  ben  mon  goût  et  mon  incli- 
nation. 


•  i 


il 


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COLAS  ET  COLINETTE. 


!.'■  t     ■ 


I 


M.  DOLMONT. 

C'est  une  preuve  que  tu  as  du  courage. 

LE  BAILLI. 

Du  courage  !     Oh  cela  ne  lui  manque  pas. 

COLAS. 

Non,  non,  quand  il  faudra  travailler.... 

M.  DOLMONT. 

Sa  taille  est  assez  convenable,  mais  rempli- 
ras-tu bien  tous  les  devoirs  de  l*ctat  où  tu  vas 
entrer  ? 

COLAS,  souriant, 

A  moi  l'soih.  Monsieur. 

M.  DOLMONT. 

Tu  as  besoin.d'une  bonne  santé. 

LE  BAILLI. 

Il  est  très  bien  portant. 

COLAS. 

Je  n*suis  jamais  malade.     • 

M.  DOLMONT. 

Il  faut  de  la  vigueur. 

LE  BAILLI.     . 

Il  en  est  plein. 

COLAS, 

J'en  avons,  Monsieur.      _  , 

M.  DOLMONT. 

Pouvoir  résister  à  la  fatigue  du  jour. 

LE  BAILLI.       ...     _ 

Il  y  est  accoutumé. 

COLAS.     •', 

J'y  sommes  accoutumé. 

M.   DOLMONT.  ;'      ..-,.;; 

Oui,  mais  à  celle  de  la  nuit  ? 


COMEDIE. 


r  <^- 


S7 


COLAS,  un  peu  interdit. 
Si  je  fatiguons  trop  la  nuit  j'nous  r 'poserons 
le  jour. 

M.  DOLMONT. 

Oh,  mon  ami,  cela  ne  s'arrange  pas  de  mê- 
me, et  Ton  a  souvent  dé  repos  ni  le  jour  ni  la 
nuit. 

LE  BAILLI. 

Il  est  jeune  il  résistera  à  toutes  ces  fatigueâ-là« 

COLAS,  riant. 
Oui,  oui,  ça  nous  regarde. 

M.  DOLMONT. 

Allons,  tu  me  parois  avoir  un  goût  décidé 
pour  cet  état  là.  Nous  allons  de  suite  procé- 
der à  ton  affaire.  Ecrivez  M.  Le  Bailli,  la 
formule  est  prête,  il  n'y  a  plus  que  le  nom  à 
mettre. 

LE  BAiLM,  s* arrangeant  pour  écrire* 

Volontiers. 

COLAS. 

Quoi  !  tout  à  l'heure  ?  Ah  que  j 'suis  content! 

M,  DOLMONT. 

Comment  t'appelles-tu  ? 

COLAS. 

Colas  le  Franc,  Monsieur,  pour  vous  servir. 

LE  BAILLI,  écrivant. 
Colas  le  Franc. 

M.  DOLMONT. 

Le  nom  de  ton  père  ? 

COLAS. 

Eustache  le  Franc,  et  ma  mère  Thérèse  Ro- 
bert, ils  étions  tous  de  la  Paroisse;    Oh  les 

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38 


COLAS  ET  COLINETTE. 


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\\ 


bons  parens  que  c*c  toient  !  Et  s*ils  n'étions  pa» 
morts,  qu'il  y  auroit  longtems  que.... 

LB  BAILLI. 

Il  ne  s*agit  point  de  cela. 

M.  DOLMONT.. 

Ton  âge.^ 

COLAS. 

Vingt-deux  ans.        '      - 

LE  BAILLI,  écrivant. 
Agé  de  vingt-deux  ans. 

Nf.  DOLMONT,    -prenant  le  -papier  des  mains  du 

Bailli, 
Voyons  cela. 

COLAS,  bas  au  Bailli, 
Faut  t'y  pas  que  Pnom  d*Colinette  soyons 
sur  ^contrat  ? 

LE  BAILLI.. 

Il  n'est  pas  nécessaire. 

COLAS,  bas. 
Mais  faudroit  t'y  pas  du  moins  qu'elle  fut 
présente? 

LE  BAILLI. 

Tais-toi.     N'interromps  pas  Monsieur. 
M.  DOLMONT,  Hsaut  liaut. 

Le  nommé  Colas  le  Franc  de  la  Paroisse 
Dolmont  âgé  de  vingt-deux  ans,  fbas.J  br. 
br.  br.  br.  br.  br.  (liaut.J  volontairement  et 
de  plein  gré,  (bas.)  br.  br.  br.  br.  br.  br. 
(haut,)  cela  suffit  ;    sais-tu  signer  ? 

COLAS. 

Oui,  Monsieur,  j'fiiisohs  bien  la  Croix. 
M    DOLMONT,  îuî  donnant  le  papier. 

Fais  là  ici ... .  voilà  qui  est  fini,  mon  amî, 
tu  n'as  qu'à  préparer  tes  bardes  et  te  tenir  prêt 
pour  demain. 


''il 


ri 


COMEDIE. 


itions  pas 


mains  du 


e  soyons 


u'elle  fut 


sur. 


COLAS. 

Oui,  Monsieur,  tant  matin  qui  vous  plaira. 
M.  DOLMONT,  tirant  une  Cocarde  de  sa  poche» 
Tiens,  mets  ceci  à  ton  chapeau. 

COLAS. 

Grand  merci.  Monsieur,  Oh  le  beau  rubaa  ! 

LE  BAILLI,  lui  étant  son  chapeau,       î  ■ 
Donne  que  je  t'ai ranges-celà.  .       • 

COLAS. 

Nanni  vraiment,  j'craindrions  de  l'salir,.  ce 
sera  pour  demain. 

M.  DOLMONT. 

Oh  tu  peux  le  mettre  dès  à  présent,  mais  ne 
manque  pas  ce  soir  de  venir  chercher  ton  fusil. 

COLAS. 

Un  fusil  ?  ^        ■ 

lE  BAILLI 

Oui,  c'est  un  fusil,  que  Monsieur  te  donne* 

COLAS. 

Aussi?  •    '   ■ 

M,  DOLMONT. 

Un  fusil  et  un  havresac. 

COLAS. 

Un  havresac  !  et  pourquoi  faire  ? 

M.  DOLMONT. 

Comment  pourquoi  faire  ?  un  havresac  et 
une  giberne,  ce  sont  des  meubles  dont  tu  as 
besoin. 

COLAS,  à  part. 

Ah  !  pour  la  chasse  peut-être. 

M.  DOLMCNT. 

Ne  manque  pas  même  de  prendre  ta  giberne 
dès  le  matin. 

COLAS,  à  part. 
Une  giberne  pour  me  marier  ! 


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40         COLAS  ET  COLINETTE. 

:.,iv:%-.  :^.  -     SCENE  IX.    -^  -■  •  n 

Les  Acteurs  précédents ^  L* Epine, 

L'EPINE. 

JMoNsiEUR,  v*la  des  gens  qui  vous  deman- 
dent. .  *x 

M.  DOLMONT. 

De  quoi  s*agit-il  ?    (au  Bailli,)  Je  reviens 
tout-à-l*heure. 


% 


SCENE  X. 

LE  BAILLI,  COLAS. 

COLAS,  riant, 

iju'EST-ce  qui  veut  donc  dire  avec  c*te  gi- 
berne ? 

LE  BAILLI. 

Tais-toi  tu  le  sauras. 

Duo. 

COLAS. 

Monsieur  L'BaiUi, 
Expliquez  moi 
Cette  afFaire-ci, 
Car  sus  ma  foi 
J'veux  être  un  sot 
Si  j'comprends  l'mot 
A  tout  ceci. 

LE  BAILLI. 

Tais-toi,  Tais-toi, 
Pauvre  étourdi  ; 


* 


e. 


I  deman- 


reviens 


c*te  gi- 


COMEDIE. 

Tu  n'est  qu'un  sot, 
Tu  n'entends  mot  ,. 

A  tout  ceci. 

COLAS. 

Monsieur  L' Bailli» 
Expliquez-moi 

LE  BAILLI. 

Chut,  chut,  tais-toi. 

COLAS. 

Expliquez-moi 
Monsieur  L' Bailli  ? 

LE  BAILLI. 

La  peste  soit  de  l'étourdi 

COLAS. 

C'est  qu' voyez-vous, 
Je  n'comprends  pas. 

LE  BAILLI. 

Eucor  !  tais-toi,  î 

Parles  plus  bas. 

COLAS.  r> 

Monsieur  L' Bailli  ? 

LE  BAILLI. 

Eh  bien.  Eh  bien  ? 

COLAS. 

Excusez  moi. 

LE  BAILLI. 

Tu  n'entends  rien. 
•  ^«'ïï::*'     V     COLAS.  ^ 
C'est  qii'sus  ma  foi, 
J'veux  être  un  sot 
Si  j'comprends  l'mot 
A  tout  ceci. 

LE  BAILLI. 

Tu  n'es  qu'un  sot. 
Je  le  sais  bien 
Tu  n'entends  rien 
A  tout  ceci. 


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42 


COLAS  ET  COLINETTE. 


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SCENE  XI. 
LE  BAILLI,  COLAS,  M.  DOLMONT. 

M.  DOLMONT,  du  foTid  dii  Théâtre, 

(Ju'iLS  attendent  un  instant,  j'y  vais  aller 
bientôt,  (revenant)  Ce  sont  des  jeunes  gens 
qui  demandent  à  me  parler,  (à  Colas)  Oh  ça, 
tu  peux  te  préparer  pour  demain,  et  n'oublies 
pas  ce  que  je  t*ai  dit.  (au  Bailil.)  Je  vous 
quitte  pour  aller  voir  les  gens  qui  m'attendent. 

LE    BAILLI. 

Je  vous  suivrai  s'il  vous  plait. 


It 


SCENE  XII. 

COLAS. 

liiN  v'ia  une  fantaisie  !  me  marier  avec  une 
Giberne  sus  l'dos,  j 'crois  Dieu  m'pardonne 
qu'y  sont  foux ....  Il  y  a  dans  c't'afFaire  là 
un  Micmac  que  j 'n'entends  pas ....  mais  après 
tout  faut  voir  jusqu'au  bout,  car  enfin  j'nons 
t*y  pas  promis  d'ies  laisser  faire,  et  de  n'rien 
leur  répliquer  ?  un  honnête  homme  n'a  qu'sa 
parole,  et  si  ça  leur  faisons  plaisir  de  m'avoir 
avec  c't'accoutrement  là,  Hé  bien  !  qu'est- 
qu'ça  m'fait  à  moi  ?  si  s'mettons  à  rire,  j 'ri- 
rons itou,  mais  rira  bien  qui  rira  rdernier,  car 
enfin  v'ià  toujours  mon  contrat  dressé,  et  de- 
main j 'épousons  Colinette.  Queu  bonheur  ! 
mais  à  propos  elle  m'attend,  faut  l'y  aller  con- 
ter tout  ça. 


ï .  1 


COMEDIE. 


43 


SCENE  XIII. 
COLAS,  L'EPINE. 

L'EPINE. 

JlLt  bien,  qu'est-ce  l'ami  ?  vous  v'ià  d'une 
joie  !  on  croiroit  à  vous  voir,  que  vot  fortune 
t:st  faite.  i    - 

COLAS. 

Je  sis  morgue  pus  content  qu'si  elle  l'étions. 

l'épine 
Grand  bien  vous  fasse,  c'^st  ('.onc  fini  avec 
Monsieur  Dolmont  ? 

COLAS. 

Oui,  c'pst  fini.  Sitôt  qu'il  a  vu  qu'c'étions 
mon  goût  et  mon  inclination,  il  y  a  consenti  et 
j'vas  tout  préparer  pour  demain  au  matin. 

l'épine. 

Bon  voyage  et  ben  du  plaisir. 

COLAS. 

Oh  j'te  reponds  que  j'nons  jamais  eu  l'cœur 
si  content,  j'avois  peur  pourtant  que  Monsieur 
Dolmont  m'allit  refuser,  mais  non,  Dieu  mer- 
ci c'est  fini,  et  pour  toute  la  vie. 

l'épine. 

Comment  pour  toute  la  vie  !  je  croyois  que 
c'n'étoit  qu'pour  trois  ans  coni'les  autres. 

COLAS 

V'ià  d'beaux  contes  !  où  as-tu  jamais  vu  ça 
toi  l 

l'épine. 

Et  dame,  que  sais-je  t'y  moi.  Ma  foi  ils  ont 
beau  dire,  c  t'état  là  n'me  plairions  point,  on  y 


44 


COLAS  ET  COLINETTE. 


court  trop  d'risques,  et  qui  sait  si  toi-même.... 
tu  m'entends  bien  ?  car  enfin  y  ne  faut  qu'un 
malheur 

COLAS.         ''■'       ' 

Parle  donc,  gros  sot,  que  veux  tu  dire? 
c'est  bon  si  c'étoit  toi  entends-tu. 

l'épine. 

Holà!  Holà,  Monsieur  Colas,  n'vous  fâ- 
chez pas,  ne  croyez-vous  pas  d'ctre  pus  exempt 
d'ça  qu'les  autres. 

COLAS. 

Tiens,  toutes  ces  gausseries-là  n'sont  point 
d'mon  goût,  j't'en  avertis,  et  j'm'en  vas,  car 
j  pourrions  ben  te  donner  queuque  niole  qui 
ne  te  couteroit  qu'à  prendre. 

l'épine,  après  que  Colas  est  sorti. 

Qu'a-t-y  donc  à  s'facher!  j'crois  Dieu  m'- 
pardonne  que  y  m'a  menacé.  Cil  court  à  la 
porte)  Dites  donc  l'ami,  à  qui  en  avez-vous  ? 
c'est  t'y  ben  à  moi  qu'vous  parlez,  par  hazard  ? 
Heim  ?  Il  est  parti  !  (revenant  au  bord  du 
Théâtre.)    Il  a  morgue  ben  fait  de  décamper.. 

C'est  qu'je  n'sis  point  endurant  moi 

Mais  voyez  un  peu  c 'grossier  qui  m'cher- 
chons  querelle  à  cause  que  j'I'y  parle  pour  son 
bien  !  aussi  s'il  attrappons  queuque  horion  y 
l'aura  bien  gagné  et  j'en  rirons  tout  mon  sou. 
Mais  j 'm'amuse  trop  longtems  ici  faut  qu'j 'aille 
voir  si  mon  Maître  ou  Mamselle  Colinette, 
n'avons  point  besoin  d'mon  service. 


COMEDIE. 


ACTE  TROISIEME. 

Le  Théâtre  représente  le  même  bois  ou  jardin 
qiCau  Premier  Acte, 

SCENE  I.  .      .        ,  ] 

COLAS,  COLINETTE. 

COLINETTE. 

CJui,  te  dis-je,  c'est  un  tour  du  Bailli,    tu 
vois  que  j*avois  bien  raison  de  me  méfier  de  lui. 

COLAS. 

C'est  bien  vrai,  mais  pouvois-je  t'y  jamais 
penser  ça  ! 

COLINETTE. 

Cela  étoit  pourtant  assez  clair!  le  fusil,  la 
giberne  !  et  même  la  cocarde  à  ton  chapeau  ! 
mais,  mais  en  vérité ! 

COLAS. 

Est-ce  que  j'avons  jamais  vu  faire  d'enrôlé- 
mens,  nous? 

COLINETTE. 

Aller  signer  son  engagement  ! 

COLAS. 

J'te  dis  qu'ils  ont  fait  une  espèce  de  contrat 
où  c'qu'ils  m'ont  fait  signer,  com'quoique. . . 

COLINETTE. 

Comme  quoi  tu  es  un  imbécile. 
COLAS,  avec  colère. 

Laisse  moi,  cruelle,  et  ne  viens  point  aug- 
menter mon  chagrin  par  des  reproches,  j'nons 
déjà  bien  assez. 


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I 


1 

'  î.l! 


46  COLAS  ET  COLINETTE. 

coLiNETTB,  pleurant. 
J'en  ai  moi  même  bien  autant  que  toi. 

COLAS,  avec  attendrissement. 
l'u  pleures  ma  petite  Colinette  !   c'est  donc 
bien  vrai  que  tu  as  du  chagrin  à  cause  de  moi  ! 
hé  bien,  laisse  moi  faire,    j'te  réponds   qu'il 
me,  l 'payera  et  j'vas  de  ce  pas... 

COLINETTE. 

Où? 

COLAS. 

L'aller  chercher,  et  ou  je  l 'rencontrerons 
Trosser  d'importance  jusqu'à  ce  que... 

COLINETTE. 

Arrête  et  calme  toi,  c'est  un  mauvais  parti 
que  celui  là,  et  tu  gàterois  toute  l'affaire. 

COLAS. 

Hé  bien  conseille  moi  donc,  et  dis  moi 
c'qui  faut  faire.     Conterai-je  ça   à  Monsieur 

Dolmont?  voudra  t*y  m'écouter  ? Oui   y 

m'écoutera  et  je  suis  sur  que reste   ici  Co- 
linette, je  vas  l'y  aller  parler. 

COLINETTE,  le  retenant. 

Attends,  il  me  vient  une  idée J'imagine 

que  peut-ctrc Mais    non cependant 

oui,    oui,  j'entrevois  un   bon  moyen  de 

nous  venger  du  Bailli. 

COLAS. 

Dis  moi  donc  c'que  c'est  ? 

COLINETTE. 

Cela  n'est  pas  nécessaire,  mais  tu  n'as  qu'à 
me  laisser  taire,  et  je  te  dirai  mon  dessein 
quand  il  en  sera  tems. 

^  COLAS. 

Quj^que  tu  veux  donc  faire  ? 


COMEDIE. 


4$ 


^  i 


COtÏNÊTTE. 

le  veux  lui  paHcf  seule,  je  sais  qu*il  est  a- 
inoureux  de  moi>  et  j*espère  que... 

COLAS. 

Comment  il  est  amoureux  de  toi?  tu  ne 
m'avions  pas  dit  ça. 

COLIMETTE.  T 

Ne  vas-tu  point  encore  être  jaloux  î  Tiens 
le  voilà  là  bas  qui  vient  vers  nouis,  retire  toi 
promptement. 

coLKs^  appercevant  le  Éailïi,     .    ',^^ 
Le  pcndardl     Oh  si  tu  voulois  me  laisser 
faire  ! 

eoLINEtlTE.  ,~^ 

Décampes  vite. 

COLAS. 

Mais  quelle  affaire. ? 

COLIN ETTE.  "'  '^^*'    ' 

iSauVes-toî,  je  vais  bfientôt  t'alïer  rejoindre, 
et  preftds  bien  garde  de  paroître. 

COLAS,  s* en  allant, 
Queu  chienne  de  manigance.    ,,,^ 


..n 


V  :  t         '4 


SCENE  It. 


COLINETTE. 

X^E  voici  le  fourbe,  s'il  me  parle  encore  de 
son  amour,  feignons  d'y  répondre  et  tendons 
lui  un  piège  à  mon  tour. 

E 


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COLAS  ET  COLINEITE. 


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SCENE  m. 


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COLINETTE,  LE  BAILLI. 


>"i?.V- 


LE  BAILLI. 

JLe  hazard  me  sert  à  souhait^  belle  Colinette, 
je  mouroîs  d'envie  de  te  revoir,  pour  te  parler 
de  mon  amour,  et  des  peines  que  tu  me  cau- 
ses, et  j'ai  en  ce  moment  le  bonheur  de  te 
rencontrer!  Hé  bien,  dis-moi,  seras-tu  tou- 
jours insensible  à  ma  tendresse  ? 

COLINETTE. 

Que  vous  êtes  pressant  !  cela  dépend-il  de 
moi  ?  vous  savez  ce  que  je  vous  ai  dit  tantôt. 

LE  BAILLI. 

Oui,  chère  mignonne,  tu  m'a:î  parlé  des  obs- 
tacles qui  s'opposent  à  mon  bonheur,  mais 
qu'il  seroit  bien  facile  d'applanir,  si  tu  avois 
quelqu'amitié  pour  moi. 

COLINETTE. 

Que  me-  servlroît  de  vous  aimer,  si  Monsieur 
Dolmont  ne  nous  donne  pus  son  consente- 
ment? 

Le  BAILLI. 

Cet  obstacle  n'est  rien,  mais  c'est  ravorsion 
que  je  t'inspire  que  je  voudrois  essayer  de 
vaincre,  rends  moi  donc  plus  de  justice,  ma 
chère,  et  regardes  moi  avec  moins  de  préven- 
tion, car  enfin,  dis-moi,  qu'ai-je  donc  de  si  dé- 
sagréable dans  ma  personne? 

COLINETTE. 

Je  ne  dis  pas  cela. 


t   I    COMEDIE,  UKO       49 

Le  bailli. 
Y  a-t-il  quelque  chose  sur  iha  phisionomie 
qui  te  puisse  déplaire  ?  ..  ,  ,.....;, 

COi:.INETT«. 

On  pourroit  s*y  accoutumer.     ^5^  ^^"^^p  "^^^^ 

LE  BAILLI.  .      ^ 

N'ai-je  pas  Tair  encore  assez  leste  ? 

COIINÉTTe. 

J  en  conviens. 

LE  BAILll. 

Et  quant  à  mon  âge,  je  suis  peut-être  plus 
jeune  que  tu  ne  penses. 

colinetTe. 
Je  ne  vous  dis  pas  que  nciî  j  il  n'y  a  que  le  pre- 
mier coup  d*oeil  qui  ne  vous  ^^*^  pas  favorable. 

LE  BAILll. 

Hé  bien,  ma  belle  enfant,  t.  '  Vià  donc  sans 
le  savoir  déjà  disposée  à  m'aîmer,  envisages 
maintenant  les  avantages  dont  tu  jouiras,  vois 
Paisance  que  je  te  procurerai,  les  plaisirs  qui 
«uivront  tes  pas,  et  par  dessus  tout,  songes  aux 
soins,  aux  prévenances,  aux  attentions,  à 
Tamour  que  j'aurai  pour  toi,  et  juges  si  tout 
cela  ensemble  ne  te  portera  pas  en  peu  à  m'ai- 
mer  à  la  folie. 

•COLINETTE. 

Cela  pourroit-etre. 

LE  BAILLI. 

Vas,  vas,  Colinette,  tu  m*aimeras  je  t'assure 
et  beaucoup  plus  que  tu  ne  penses. 

COLINETTE. 

Je  commence  à  le  croire. 

E2- 


\é 


Jl 


i 


_ .» 


50^        COLAS  rS  CÔtlNETTE. 

LE  lïAiLLI.  ' 

H  fiuit  pourtant  que  je  te  dise  aiie  petite  in- 
quiétude que  j'ai  eue  à  cet  égard*  -. 

COLIN£TT«>r       ^ 

Sur  quel  sujet?  "^ 

LE  BAILLU 

Je  t*ai  vue  quelquefois  avec  un  certain  Go- 
las... ...... Est-ce  que  tu  aurois  de  l'inclination 

pour  lui  ? 

COLINETTE. 

Pour  Colas  ?  qui  est-ce  qui  vous  a  dit  que 
j'avois  de  l'inclination  pour  lui  ? 

LE  BAILLI. 

Je  ne  te  dis  pas  qu'on  me  l*a  dit,  mais  je  te 
demande  si  cela  est  vrai  ? 

COLINETTE. 

Je  ne  saurois  répondre  de  ses  sentîmens, 
mais  parce  qu'il  est  jeune,  assez  joli  garçon, 
et  qu'on  a  queIqu*attention  pour  lui,  il  s'ima- 
gjne  peut-être  qu'on  l'aime. 

LE  BAILLI, 

Ainsi  donc  tu  ne  l'ccoutes  pas  ? 

COLINETTE. 

Et  que  ferois-je  d'un  jeune  homme  comme 
lui  ?  cela  ne  sait  que  chanter,  danser  et  rire, 
repeter  cent  fois  le  jour  qu'il  m'aime  ;  Oh  que 
je  sais  mieux  ce  qui  me  convient. 

LE  BAILLI. 

Que  je  suis  ravi  de  te  voir  dans  ces  disposi- 
tions !  voilà  ce  qui  s'appelle  penser  en  fille  pru- 
dente, et  je  vois  bien  qu'on  ne  te  connoissoit 
pas  quand  on  m'a  dit  que  tu  n*en  voulois 
qu'aux  jeunes  gens. 


Il  . 


"'^\-^ 


COMEDIE.  c^N 


•.'~s 


J  •..-.,-- 


s» 


n.  COLIN^TTI» 

Mais  qui  e&t<e  qui  a  dit  cela  f*  ^ 

LB  BAILLI, 

U  n'importe,  j'aî  toujours  ea*  de  toi  une 
meilleure  opinion,  car  enfin,  que  ferois-tu  avec 
ce  Colas  ?  ça  n*a  rien  du  tout,  et  l'amour 
comme  Ton  dit  ne  donne  pas  de  quoi  vivre* 
Ecoutes,  ma  chère  enfant,  et  retiens  bien  cecih 


'i  .i-i.ii> 


Sans  argent  dans  le  ménage. 
Il  n'est  aucune  doucottr^         , 
Sans  argent  le  mariage  .     |   ,' 

N*est  qu'un  joug,  qu'an  esclavage  .     .^ 

Plein  de  peines  et  de  rigueurs  ;  -  ■  .L 

Mtiis  dans  l'opulence,  ,  ^'''   '/ 

-  Quelle  différence!  '  "  '  '  '    ■   '> 

L'Hymen  est  un  noeud  âatteouv.    •      v^  -  :.u\.i 
Où  l'on  trouve  le  hoBheur«. 

-»-      Si  quelques  légers  chagrins,  ^^  ■■     -%'  ) 

Troublent  nos  heureux  destins,.      '      ; 
La  fortune  nous  console. 
Avec  les  jeux  badins,     "    •' 
)    Les  danses,  les  festins,  ' 

La  peine  aisément  s'envolew       ifï*  js     ft  ; 
Sans  argent  &c. 

GOLINETTE. 

Je  VOUS  crois,  mais  en  un  mot,  je  dépends  de 
Monsieur  Dolmont,  et  que  voulez-vous  que 
je  fasse  s'il  n'y-  veut  pas  consentir?  ^ 

LE  BAILLI. 

Mais  pourquoi  n'y  consentiroit-il  pas?   ^^' 

COLINETTE, 

C'est  un  homme  si  extraordinaire  qu'il  ne 
fait  presqu'auGun  cas  de  la  richesse,  qui  pense 
qiie  le*  convenances  d'âge,   de  goût  et  d'hu- 


■  N  /;..^..»5« 


COLAS  ET  COLINETTE. 


I 


,  .1- 


>J 


m 


meur  sont  les  choses  que  Ton  doit  le  plus  re» 
<:hercher  dans  le  mariage,  et  qui  n'imagine  pas 
qu'une  jeune  femme  puisse  €tre  parfaitement 
heureuse  avec  un  mari,  dont  l'âge  n'est  pas 
assorti  au  sien. 

LE  BAILX.I. 

Voilà,  il  faut  l'avouer,  un  système  bien  ridi* 
culel 

COLINETTE. 

Oui,  mais  c'est  le  sien,  et  vous  ne  l'en  ferez 
pas  changer.  î  -,>>;■ 

LI  BAILLI.  -;-..■.  j./.. 

Je  le  crains,  car  il  n'est  rien  de  plus  têtu 
<iue  ces  prétendus  philosophes,  mais  enfin  je 
t  aime,  et  je  voudrois  faire  ton  bonheur,  fau- 
^ra-t-il  que  ce  beau  système  te  fasse  perdre  les 
avantages  que  la  fortune  te  présente  ? 

COLINETTE. 

C'est  à  quoi  je  dois  m'attendre,  et  à  rece- 
voir quelque  jour  de  sa  main  un  époux  qui 
n'aura  rien  sans  doute,  et  cela,  sous  prétexte 
qu'il  sera  jeune,  qu'A  m'aimera^  et  que  je 
pourrois  l'aimer  aussi. 

LE  BAILLI. 

Tout  cela  est  bel  et  bon,  mais  enfin  tu  es 
toujours  la  maitresse  d'épouser  ou  de  n'épou- 
ser pas,  je  serois  donc  d'avis  que  tu  lui  par- 
lasses de  mes  intentions,  ensuite... 

COLINETTE. 

Moi  lui  parler  de  cela  ?  C'est  une  chose 
que  je  ne  ferai  pas,  je  serois  trop  mal  reçue. 

LE  BAILLI. 

Je  voudrois  bien  qu'il  s'avisât  de  te  maltrai- 
ter, écoutes,  mon  enfant,  te  voilà  bientôt  ma- 


'--«    ■««u.^.-^.ouJfc.*'-'*  >^»*<eagi;^:  <- 


TTIi/ COMEDIE. 


SS 


jeure  ;  je  connoîs  un  peu  la  loi,  et  l'oa  pour- 
roit  le  forcer  à....... 

CaUNBTTB; 

Oui,  mais  d'ici  à  ce  fiems  là,  il  se  passera 
bien  des  choses. 

LE  BAILLI. 

Tiens,  si  tu  veux  m^en  croire,  tu  lui  de- 
manderas d'aller  passer  quelque  tems  dans  un 
couvent,  où  sur  differens  prétextes  tu  pou 
rois  rester  jusqu'à  ta  majorité.  am*,^r>  -snir, 

COLINETTE. 

Oui,  mais  s'il  vient  à  se  douter  dé  quelque 
chose,  il  me  refusera,  et  me  veillera  ensuite 
de  si , près,  qu'à  l'avenir  vous  ne  trouverez  plus 
l'occasion  de  me  parler. 

LE  BAILLI. 

C'est  bien  penser  !  mais  encore  faut-il  cher- 
cher un  moyen  de  te  soustraire  à  sa  tyrannie. 

■1.1    :«r:'.i«.  :tf.4î.coJE.INETTE.    • 

Pour  moi  je  n'en  connois  aucun«     v^-:      » v? 

LE  BAILLI.  ' 

Hé  bien,  j'en  connois  moi.  Oui,  mon  en- 
fant, il  est  un  moyen  que  Tes  circonstances  jus- 
tifient et  dont  l'exécution  est  très-facile. 

COLINETIE.  ^ 

Quel  est-il  ? 

LE  BAILLI. 

C'est  Je  t'enlever  dès  ce  soir  et  t'cpouser 
secrètement..             •'"'    :-         ,      •'.-', 

COLINETTE,  à  part,  f     ;  . 
Voilà  où  je  Tattendois.          .  - 

LE  BAILLI. 

Que  penses-^tu  de  cela  Colmette  ?  c'est  bien 
là  le  meilleur  parti  que  nous  puissions  prendre. 


Il' 


IN 

4 


1» 


COLAS  rr  COLINETTE. 


».'Yf/'ï?f    r 


COLINETTE.  ■  *=*" 

M'épotiser  ^secrètement  i    m'eniever!    mais 
•n*y  auroit-ii  point  de  mal  à  cela  ? 

1%'        .  LE  BAILLI. 

Quel  mal  peut-il  y  avoir  ?  on  vdt  cela  tovùs 
les  jours. 

COLINETTE. 

Mais  que  dira  Monsieur  Dolmont  ?  que  pen- 
aera-t-il  de  moi^  voudra-t-il  me  pardonner 
cette  démarche  ? 

LE  BAILLI. 

<^  Quand  la  chose  sera  faite,  il  faudra  bien 
tju'il  y  consente,  d'ailleurs  tout  s'arrange,  et 
comme  je  t*ai  dit,  ce  n'est  pas  le  premier  ma- 
riage qui  se  sera  fait  ainsi.  ,ru  .  > 

COLINBTTK. 

Je  crois  cela,  mais 

LM  BAILLI,  (lui  prenant /a  mûinj 

Mais  quoi  ?  songes  donc  mon  enfant  que  le 
tcms  presse,  et  qu'il  faut  prendre  un  parti,  ré- 
fléchis sur  cela. 


SCENE  IV. 

LE  BAILLI,    COLINETTE,     COLAS  au 

fond  du  Théâtre 

COLAS,  a  part* 

vJh  !  Oh  !  qu'est-ce  que  je  vois  I  j'avois  bien 
raison  de  me  méfier  d  eux,  écoutons.  (Il  se 
cache  derrière  un  arbre,)  <■     i 

COLINETTE. 

Mais  qui  vous  répondra  du  succès  de  ce 
projet  ? 


COMEÏ)ÏE/'  ÎO  > 


"■  fi  ne  peut  manquer  4e  réussir,  et  toîcî  com- 
ment j  ce  sofa-  après  le  coucher  du  soJei!  tu 
viendras  te  promener  sous  ces  arbres  ;  je  m'y 
trouverai  avec  ma  voiture,  et  je  te  conduirai  a 
ma  maison  de  campagne,  près  d'ici,  où  se 
trouvera  à  point  un  notaire  affidc  qui  nous  ma- 
riera sur  le  champ. 

COLINETTE.  * 

Vous  ébranlez  ma  résolution,  mais  il  faut 
que  du  moins  j'emporte  les  hardes  dont  j'ai 
besoin  et  je  crains  que  cela  ne  fasse  soupçon- 
ner  •••••• 

LE  BAILLI. 

C'est  ce  qu'il  faut  éviter  avec  soin,  tu  es  assez 
bien  vêtue  comme  cela,  laisse  moi  faire,  je 
pourvoirai  à  tout. 

■r-:j*f4  ,,>Uiv;  ,  COLINETTE.    •fr-'"fr .  .ii.K  N '• 

Oui,  mais  vous  ne  me  donnerez  pas  peut- 
.ctre.i.*.*    ,„ ^,  . 

LE  BAILLI. 

Je  te  donnerai  tout  ce  qui  te  plaira,  et  en  at- 
tendant acceptes  cette  Dourse  de  cent  Louis  pour 
commencer  ta  garde-robe. 

COLINEXTB. 

Hé  bien  !  j'y  consens  ;  mais  pour  éviter  les 
soupçons,  j'irai  me  cacher  ici  aux  environs  à 
l'heure  indiquée,  vous  viendrez  m'y  trouver, 
et  nous  partirons  sans  être  apperçus. 

LE  BAILLI. 

D'accord.  Le  Soleil  va  bientôt  terminer  sa 
carrière,*  et  dans  peu   l'obscurité    secondera 


•  On  commence  Ici  à  diminuer   graduellement  la  lumiàre  du 
TJicârre,  en  comnwiiçant  par  les  coulisses  du  fond. 


56         COLAS  ET  COLINEITE. 

nos  desseins.     Oh  l  que  tu  vas  être  heureuse  ! 
nous  allons  habiter  ma  jolie  maison  de  csmi- 

pagne,   et  là  assis  à  Tombrage ..Mais  à 

propos  laisses  mol  donc  prendre  d'avance,  un 
petit  baiser. 

COLINETTE. 

„    Ohl  non.  ,.,    ,./  ,^ 

LE  BAILLI,   .,. 

Pourquoi  non  ? 

COLINETTE* 

,    Tantôt,  tantôt. 

Ll  BAitLl     - 

Seulement  rien  que 

coLiNETTEy  appercevatit  Colas. 
Retirez-vous,  je  crois  appercevoir  quelqu'un 
là-bas,  et  je  tremble  qu'on  nous  voie  ensemble. 

LE    BAILLI. 

Allons,  jusqu'à  tantôt,  prends  bien  garde  à 
Târgent.     (U  s*  enfuit.  J 


'.    SCENE  V. 
COLAS,  COLINETTE. 


COLAS.^ 

Ah  !  pour  le  coup  perfide  j*t*y  prends, 

COLINFTTE. 

Eh  bien  qu*as-tu  donc  ? 

COLAS. 

J'ons  vu  toute  la  manigance,    mais  tu  ne 
me  tromperas  pas  d*avantage. 

COLINETTE. 

Pourquoi  es-tu  aux  écoutes  ? 


•^^C^  COMEDIE.    -7u]v).3        57 


use! 
cam- 
us à 


ju'un 
iiible. 


'de  à 


II  ne 


COLAS. 

Pourquoi  inerate  ?  Oh  !  tu  croyoîs  d*m*at- 
traper,  mais  je  mMoutions  bien  de  c*qu*cst 
arrivé.  .    .     i 

COLINETTE. 

Et  moi,  je  {ne  doutois  bien  aussi  que  ta  ja- 
lousie  te  feroit  prendre  la  chose  de  travers,  et 
c'est  pourquoi  je  voulois  t* envoyer. 

COLAS 

Pour  me  tromper  plus  à  ton  aise.  Qui  t'au- 
roit  jamais  cru  capable  de  cette  trahison  \     o 

COLINETTE.  r>  >     i     i 

Mais  Colas,    tu  m*oflfenses!  ne  vois-tu  pas 

que  c'est  un  jeu? 


Duo. 


COI-AS, 

Non,  c'en  est  trop,  cnielîe. 
Ah  !  dis  moi  dor.c  pourquoi 
Tu  me  manques  de  fui, 
Tu  te  mot^ucs  de  moi  ? 
Ingrate!  inPdellc! 

C'en  est  trop  infidellc, 

Ah  !   dis  moi  donc  p«)urquoi, 

Tu  me  manques  de  foi  ? 

Non,  laisses  moi, 
Ingrate  !  laisses  moi 

Non,  c'en  est  trop  cruelle, 
Tu  m*as  manque  de  foi. 

J'savon»  morgue  bien  c'qu'il 
en  est. 

Non,  c*en  est  trop  cruelle, 
Ah!  dis-moi  donc  pourquoi 
Tn  me  manques  de  foi. 
Perfide!  ingrate!  infidelle  ! 


COLINETTE. 

Tu  te  fâches  !  pourquoi  ? 
Ce  n'est  qu'un  jeu  crois  moi. 
Je  suis  toujours  fidelle. 
Mais  tu  perds  la  cervelle  ! 
Ce  n'est  qu'un  jeu  crois  moi. 
Je  suis  de  bonne  foi,  f 

Je  suis  toujours  fidelle. 

Ecoutes  moi, 
Colas  écoutes  moi. 
Je  te  suis  toujours  fidelle. 
Ceci  n'est  qu'un  jeu   crois, 
moi, 

Quand  tu  sauras  ce  que  j'ai 
fait 

Ecoutes  voici  le  fait  : . . . . 

Colas  tu  perds  la  cervelle  ! 
Je  suis  pour  toi,  .  -, 

De  bonne  foi, 
Constante  et  fideUe. 


3B         COLAS  ET  CCJtlNÊTtÈ. 


é 


nv 


M 


ï\  ; 


COLîMeTTE. 

Eh  bien  !  venx-tu  m*écoutef  t      "  '     "  "^ 

COLAS. 

Non,  je  nVeux  rien  entendre,  je  n'en  on» 
que  trop  entendu,  partez,  mariez-vous  aveuc 
Un,  pisque  ça  vous  faàt  plaisir,  j'^en  CHevieraî 
d*chagrin,  c*^est  vous  qu'en  serez  cause,  mais 
ça  m'est  égal.  '    "   .        -> 

coLiNETTE,  avec  feu. 

Eh  nort,  tu  te  trompes,  te  dis-je,  c'est  autre 

chose  que  je  veux  te  conter mais  j'ap- 

perçois  Monsieur  Dolmont,  je  n'en  aurai  pas 
le  tems,  et  je  te  laisse  avec  lui,  mais  je  te  prie: 
ne  lui  parles  pas  de  ceci. 

COLAS. 

Allez,  allez,  c'a  m'est  égal,  j'vous  dis  ; 
j'en  suis  bien  consolé,  et  j'ons  pris  not  partis 
là  dessus. 

SCENE  VL 

GOLAS» 

Ah  1  si  Monsieur  Dolmont  sa  voit  (fqyti  s 'pas- 
se !  la  tromperie  que  m'a  fait  L.'Bailli,  et  ses 
manigances  avec  Colinette,  ce  serions  vrai- 
ment de  belles  nouvelles  à  l'y  apprendre,  mai» 
non,  c'est  fini,  et  j'pars  avec  les  Miliciens.. 


Al!  . 


SCENE  VII. 
COLAS,  M.  DOLMONT. 

M.  DOLMONT. 

JCjH  bien  !  Colas,  songes-tu  à  te  préparer  potar 
le  départ  ? 


M 


COMEDIE. 


S9 


COLAS. 

Ouï,  Monsieur,  je  partirai  drès  à  c*t*he\irc 
si  vous  voulez. 

M.  DOLMONT. 

Je  t*ai  dit   que  c'étoit  pour  demain,   mais 
qu'as-tu  ?  tu  me  parois  triste  ? 

COLAS. 

Au  contraire.  Monsieur,  j*suis  bien  aise  de 
quitter  le  pays. 

M.  DOLMONT. 

Tu  ne  le  quittes  pas  pour  toujours  j  tu  re- 
viendras sous  trois  ans. 

COLAS. 

J'en    serois    bien   faché,    et    j'espère  que 
qucuq'bon  coup  d'fusil 

M.  ï)OLMONT. 

Peste  !  comme  tu  y  vas  ?  tu  me  parois  bien 
avide  de  gloire  ? 

COLAS. 

Je  n'suis  point  glorieux.  Monsieur,  mais 

M.  DOLMONT. 

J'espère  bien  moi  qu'il  ne  t'arrivera  aucun 
a;  cident. 

COLAS. 

C'a  m'est  égal,  Monsieur. 

M.  DOLMONT,  à  part. 
Il  a  je  crois  quelque  chagrin   Chaut)  est-ce 
que  tu  serois  faché  de  t'être  engagé  ? 

COLAS. 

Non  Monsieur,   j'en  suis  bien  aise  à  c*t'- 
heure  j'vous  assure. 

M.  DOLMONT. 

Tant  mieux  pour  toi  mon  ami,   tu  as  dû 

F 


60 


COLAS  ET  COLINETTE. 


,J 


faire  tes  réflexions  auparavant,  ceci  n'est  pas 
un  jeu  d'enfant  ;  tu  as  voulu  servir  le  Roi  et 
tu  serviras. 

GOLAS.        '-  ■'      •      ' 

Oui  je  servirons,  et  si  j'suis  tué  fiez-vous 
qu'il  y  a  queuq'z'uns  qu'en  auront  pus  d'cha- 
grin  qu'moi. 

M.  DOLMONT,  à  part. 

Je  ne  sais,  mais  j'ai  des  soupçons.  ChautJ 
Oh  ça  mon  ami  souviens  toi  de  passer  chez 
moi  tantôt,  et  je  te  ferai  délivrer  ce  qu'il  te 
faut  pour  le  voyage. 

COLAS. 

C'a  suffit,  Monsieur,  j'noublierons  pas  ça. 


|t    ; 


SCENE  vm. 

COLAS. 

liiNFiN  v'ia  qu'est  donc  fini,  j'suis  enrôlé 
tout  de  bon,  et  j'vas  m'éloigner  d'Colinette  ! 
Oh  l'ingrate  !  l'engeoleuse  !  me  quitter  pour 
s*enfuir  avec  c'maudit  vieillard  !  après  ça,  fiez- 
vous  à  la  parole  des  filles  !  Allons  faut  pren- 
dre une  résolution  et  n'y  plus  songer.  Je  sc- 
rois  bien  fou  après  tout  de  r'gretter  une  per- 
fide qui  me  trahit  après  m'avoir  emmiaulé,  et 
fait  accroire,  qu'elle  m'aimions.  Non,  non, 
c'est  fini  je  n'I'aimons  plus  du  tout Ce- 
pendant elle  avions  queuque  chose  à  m'dire 

que    peut  être Mais    bah!     queuq*- 

menterie   qu'j'ons  bien  fait  de  n'pas  écouter... 

=Si  pourtant    c'étoit   queuq'bonne 

raison !    c'est  ben  dur  au  moins  d'ia  rem- 


,ri  2      COMEDIE,    c  Ji>;. 


61 


barrer  com  ça  !  Ah  !  si  mes  yeux  m'avions 
trompé  !  Si  c 'n'étions  qu'un  jeu  comme  elle 
dit,  que  j'aurois  de  plaisir  à  me  raccommoder 
aveuc  elle!     C'est  ma  faut^  aussi,  falloit  du 

moins  écouter  ses  raisons,  et  puis Mais 

la  voici,  faisons  toujours  le  fier,  et  voyons  ce 
qu'aile  va  dire. 

'     •*"'-   •      SCENE  IX.-  '  '"     '■    : 

COLAS,  COLINETTE. 

-  ■  ■■> 

COLINETTE. 

J'accours  pour  t'expliquer  enfin  l'affaire  de 
tantôt  :  tu  sais  que  je  dois  partir  ce  soir  avec  le 
Bailli. 

COLAS. 

Hé  bien  !  queq'ça  m'fait  à  moi  ?  '  . 

COLINETTE. 

Plus  que  tu  ne  penses,  car  il  faut  que  tu  sois 
du  voyage. 

COLAS.  ;  . 

J'vois  bien  qu'tu  cherches  à  te  raccommoder, 
mais  j'suis  trop  fâché  pour  ça. 

COLINETTE. 

Tant  pis  pour  toi,  si  tu  te  fâches  mal  à  pro- 
pos. 

COLAS. 

Comment  mal  à  propos  !  après  ce  que  j'ons 
vu  et  entendu 

COLINETTE. 

Ne  vois-tu  pas  que  c'est  une  plaisanterie  que 
j'ai  imaginée  pour  nous  venger  de  lui  ?       ,   . 

F  2 


)    ■ 


-i»BesaMi..%ii:-S»a''a.fe.'l  ■*  '^  — »-- 


..J 


02 


COLAS  ET  COLINETTE. 


V 


COLAS. 

:  Hé  ben,  qoest-ce  que  c'est  donc  ? 

COLINETTE.  ^       * 

Tiens  voici  mon  projet  :  il  va  venir,  il  faut 
que  nous  allions  nous  cacher  là-bas  sous  ce 
éuillage  où  il  doit  venir  me  prendre,  aussitôt 
qu'il  sera  près  de  moi  fais  lui  peur,  tu  as  le 
bras  bon,  prends-le  moi  au  collet  comme  tu 
ferois  à  un  voleur,  et  ne  le  lâches  pas,  en  cas 
qu'il  veuille  faire  résistance  ;  pendant  ce  tems 
là  je  me  sauverai,  et  ne  te  mets  pas  en  peine 
du  reste. 

COLAS. 

Queux  diantre  d'invention!  C'est  t'y  ben 
vrai  ce  que  tu  m*dis-là  ? 

COLINETTE. 

Tu  m'importunes  avec  tes  questions  et  ta 
jalousie.  Il  y  a  une  heure  que  je  veux  t'ex- 
pliquer  cela. 

COLAS. 

Mais  enfin  c't'argent  qui  t'avons  donné  et 
que  j'ons  ben  vu  aussi  ? 

COLINETTE, 

Tiens  le  voilà  ;  serre  cette  bourse  qui  me 
gène,  tu  me  la  rendras  tantôt. 

COLAS. 

Sarpegué  qu'elle  est  pesante  ! 

COLINETTE. 

Je  veux  la  remettre  à  Monsieur  Dolmont. 

COLAS. 

Comment  1  tout  c'complot  de  tantôt ? 

COLINETTE. 

N*est  qu'une  ruse  pour  le  surprendre. 


•taOîCEDJE. 


QS 


ce 


me 


CjQLA». 

Oli!   c'est  ben  différent  f    Mais  que  cfira 

Monsieur  Dolmont  quand  y  saura.. 

cohnette. 

C'est  mon  affaire,  fais  seulement  ce  oue  je 
faidit. 

COLAS. 

Ne  t'embarrasses  pas,  va,  je  rétrilleraî 
d'une  façon 

'       COLIN  ETTE. 

Que  veux  tu  dire  ?  ne  vas  pas  t'aviser  de..... 

COLAS. 

Non,  non,  seulement  queuque  petites  talo- 
ches, sans  que  ça  paroisse. 

COLINETTE. 

Prends  bien  garde,  il  fout  l'arrêter  sans  te 
donner  le  moindre  tort. 

COLAS. 

Mais  OÙ  c'que  tout  ça  aboutira  ?  faudra  t'y 
pas  toujours  partir  demain  pour  c'te  Milice  ? 

COLINETTE. 

Non,  j'espère  que  quand  Monsieur  Dolmont 
sera  informé  de  tout,  il  te  donnera  ton  congé. 

G01.AS. 

Oh  !  ma  chère  Collnette,  si  ça  arrive  comme 
tu  dis,  tâchons  donc  d'nous  marier  bien  vite 
pour  finir  tout  o*train-là. 

COLINETTE. 

Mais  dis  moi,,  quand  nous  serons  mariés, 
crois-tu  que  nous  puissions  être  heureux  ?  car 
enfin  tu  n'as  rien,  ni  moi  non  plus,  et  on  dit 
que  la  misère  engendre  souvent  les  querelles 
du  ménage. 


64 


COLAS  ET  COLINETTE. 


COLAS. 

La  misère  !  Oh  je  n* la  crains  point,  j*ons 
des  bras  pour  travailler  ;  et  pour  les  querelles, 
va,  va,  laisse  moi  faire,  je  trouverons  ben 
l'moyen  d'ies  appaiser. 

Air. 

Dans  not  petit  ménage,        '  '■ 

S'il  survient  queuq'orage. 

C'a  n'peut  durer  long-temps  ; 

Et  mulgré  la  misère, 

Va,  i'aurons  bien  ma  chère, 

Encor  de  bons  petits  moments. 

Ni  l'or  ni  la  richesse. 

Ne  valons  la  tendresse, 

Ca  n'peut  rendre  contents 

Même  dans  la  misère, 

Il  est  encor  ma  chère,       ■ 

Souvent  de  bons  petits  moments. 

COLINETTE. 

Je  Tespère,  mais  après  tout,  j'en  courrai  les 
risques  avec  toi. 

COLAS. 

Comme  je  vas  encore  plus  t*aimer  après 
tout  ça!  et  que  j'aurai  de  plaisir  à  nous 
venger  de  c'coquin  d 'Bailli. 

COLINETTE. 

J'en  aurai  bien  autant  que  toi  ;  mais  voilà 
que  déjà  le  Soleil  est  couché,  c'est  l'heure  du 
rendez-vous  qu'il  m'a  donné,  et  il  ne  doit  pas 
tarder. 

COLAS. 

Comment  morguenne  !  c'est  t*y  pas  lui  qu'on 
voit  là  bas  î  regarde. 


.  a 


COMEDIE. 


65 


ms 
les, 
)en 


COLINETTE*  - 

.  Où  cela?  r       ». 

COLAS. 

Là  bas,  au  fond  de  Tavenue.  C'est  ben 
lui  que  j'vois.  Oh  !  comme  le  cœur  me  bat 
de  plaisir. 

COLINETTE. 

Oui  c'est  lui  même  ;  allons  vite  nous  cacher 
sous  ces  arbres  touffus,  et  souviens-toi  bien  de 
ce  que  je  t'ai  dit.   ^  ,.  r     ^ 

COLAS. 

Bon,  bon,  donne  moi  la  main,  tu  n*as  qu'à 
me  laisser  faire.  Cil  prend  la  main  de  Coli- 
nette,  et  ils  courent  se  cacher  à  l'un  des  bouts 
du  Théâtre,) 


SCENE  X. 

Le  Théâtre  7î*cst  plus  éclairé  que  par  les  lampions 
du  devant  et  la  lumière  des  premières  coulisses. 
Le  Bailli  entre  par  une  des  coulisses  opposées 
au  coté  où  sont  cachés  Colas  et  Colinette.  Il 
a  rair  du  Mystère,  marche  sur  la  pointe  du 
pied  et  parle  à  mi-voix, 

LE  BAILLI. 

Voici  l'heure  du  rendez-vous.  Colinette 
m'attend  sans  doute.  Quel  plaisir  je  goûte 
d'avance  en  songeant  que  par  mon  adresse,  je 
vais  à  la  fois  tromper  un  Argus,  supplanter  un 
rival  et  lui  enlever  sa  maîtresse  !  Jamais,  non 
jamais  on  ne  fut  plus  heureux  que  je  le  suis...! 
Voyons,    cherchons   l'endroit  où  la  fri- 


66 


COLAS  ET  COUNETTE. 


Ili 


h  'f 


ponne  s'est  cachée.     Cil  cherche  Colinette  au 
fond  du  Théâtre  au  côté  opposé  à  celui  oà  Us 
sont  cachés,) 
-.'  LE  BAILLI,  à  voix  basse, 

Colinette,  Colinette  ? 

COLINETTE. 

Ct,  et,  et,  et,  et,  et. 

LE  BAILLI. 

J'entends  quelqu'un  de  ce  côté  là  ! 

COLINETTE,  bas, 
Ct,  ct,  par  ici,  par  ici. 

LE  BAILLI,  bas;.  (A part,) 
C'est  elle-même,  je  reconnois  sa  voix.     Est- 
«e  toi,  Colinette  ? 

COLINETTE,   bas»  , 

Oui,  oui. 

LE  BAILLI,   bas. 

Où  t'es-tu  donc  cachée  ? 

COLAS,  bas. 
Me  voici,  me  voici. 

LE  BAILLI,  courant  vers  l*endroit  où  est  caché 
Colas  ou* a  prend  pour  Colinette. 
Ah  !  te  voilà,  chère  mignonne  !  Il  est  donc 
bien  vrai,  que  tu  vas  combler  mes  vœux  ! 
Viens,  mon  enfant,  viens  ma  petite  ;  viens  et 
fuyons  au  plus  vite,  la  voiture  est  ici  près  qui 
nous  attend.  (Colinette^  voyant  approcher  le 
Bailli i  s* enfuit.) 


Alte  là. 


Qui  va  là  ? 


Duo. 

COLAS. 
LE  BAILLI. 


au 
Us 


Est- 


aché 

lonc 
ux  ! 
s  et 
>  qui 
cr  le 


COMEDIE. 

coLA6t  le  prenant  au  eolUt, 
i.    i       N'avance  pas 

Ou  je  te  romps  les  bras. 

LE  BAILLI,  à  part. 
Quoi,    c'est  Colas  ! 
O  Ciel!  quel  embarras  ! 

COLAS. 

Ici  que  viens-tu  faire  ? 

LE  BAILLI. 

Ce  n'est  pas  ton  affaire* 

COLAS. 

Quel  est  ton  nom  ? 

LE  BAILLr. 

L^sse  moi  donc. 

COLAS. 

Réponds,  réponds. 

LE  BAILLI. 

Non,  non,  non,  non. 

COLAS. 

Tu  m'as  l'air  d'un  fripon. 

COLAS,  lut  donnant  un  coup  de  poing» 
Parle  donc  ou  j't'assomme. 

LE  BAILLI. 

La  peste  soit  de  l'homme  ! 
Ne  me  reconiiois-tu  pasi 
Si  tu  ne  me  lâches  pas 
Coquin  tu  t'en  repentiras. 

COLAS,  feignant  la  surprise. 
Mais  qu'est  ceci  ! 
Comment  c'est  vous  M.  L' Bailli  ? 

LE  BAILLI. 

Hé  oui,  morbleu  oui. 

J'enrage. 
Quel  affront  î  quel  outrage  ! 

COLAS. 

Mais  vous  n'êtes  pas  sage. 


67 


LE  BAILLI. 

Ahi  !  tu  m'ccorches  le  mento». 


COLAS. 

Que  diantre  aussi, 

Que  v'nez-vous  faire  ici  ? 


LE  BAILLI. 

Je  suis  brisé,  meurtri. 
Je  suis  joiié,  je  suis  trahi. 


•.■,'-■  I 

y' 


^^w 


COLAS  ET  COLINETTË. 


LE  BAILLI. 

Ah  coquin  !    Ah  traitre  !    Ah  scélérat  I    tu 
Tas  fait  exprès,  mais  tu  me  le  payeras. 


SCENE  XI. 

COLAS,  LE  BAILLI,    M.  DOLMONT, 

dans  la  coulisse, 

M.  DOLMONT. 

CJu 'est-ce  donc  que  ce  vacarme  !   Comment, 
on  se  bat,  on  se  tue  chez  moi  ! 
COLAS,  à  part. 
C'est  Monsieur  Dolmont  1    décampons.    Cil 
s\n  fuit.) 

LE  BAILLI,  à  part. 
Quel  contretemps  ! 


^•î 


! 


SCENE  xn. 

LE  BAILLI,  M.  DOLMONT. 

•  M.  DoiMONT,  paroissant. 

vjui  sont  donc  ces  coquins  là  ?  Ah  !  c'est 
vous.  Monsieur  Le  Bailli  ?  C ironiquement J  Je 
suis  ravi  de  vous  trouver  ici. 

L£  BAILLI. 

Je  vous  rencontre  aussi  bien  à  propos  pour 
vous  porter  ma  plainte  contre  ce  maroufle  là. 

M.  DOLMONT. 

Contre  qui  ? 


MMwa 


'.:  i 


COMEDIE. 


69 


tu 


h:' ,    .V  lE  BAILLI,  cherchant  des  yeux» 
Où  est-il  allé  ?     Le  drôle  a  décampé,  c'est 
de  ce  coquin  de  Colas  dont  je  veux  parler. 

M.  DOLMONT. 

De  Colas  !     Qu "est-ce  qu'il  vous  a  fait  ? 

LE  BAILLI. 

Ce  qu'il  m'a  fait  ?  le  coquin  m'a  roué  de 
coups,  quelque  chose  que  j'aie  pu  dire  pour 
me  faire  reconnoitre,  et  je  demande  jusdce  de 
son  insolence.      .(y     ••. 

M.  DOLMONT. 

Justice  ?  je  vous  la  rendrai,  Monsieur,  je 
suis  instruit  de  vos  menées. 

LE  BAILLI,  à  part. 
Il  a  tout  découvert  ! 

M.  DOLMONT. 

Nous  verrons  ce  que  mérite  un  séducteur 
qui  avoit  tramé  le  complot  d'enlever  de  chez 
moi  une  fille  sur  laquelle  j'ai  les  droits  d'un 
père.  •     :  ^ 

LE  BAILLI,  à  part. 

Il  faut  payer  d'effronterie,  (haut.)  Qui 
vous  a  dit  cela,  Monsieur  ? 

M.  DOLMONT.  ' 

Elle-même. 

LE  BAILLI, 

Colinette?  * 

M.  DOLMONT. 

Oui    Monsieur,     Colinette,    qui   pleine  de 
mépris  pour   votre   indigne  proposition,    n'a 
feint  d'y  consentir  que  pour  se  jouer  de  vous. 
LE  BAILLI,  à  part. 

La  coquine  !  (haut.)  Cela  n'est  pas  pos- 
sible, sachez.  Monsieur,   qu'elle   m'a  promis 


-tOU-^W-^WAi^-.'*-»*--  ■ 


70 


COLAS  ET  COLINETTE. 


:  }= 


sa  foi,  et  que  c'est  elle  même  qui  pour  s'af- 
franchir de  l'esclavage  où  vous  la  tenez,  a 
volontairement  accepte  la  proposition  que  je 
lui  ai  faite  de  la  soustraire  à  votre  autonté  en 
l'épousant  dés  ce  soir. 

M.  OOLMONT* 

Vous  ? 

LE  BAILLI. 

Moi. 

M.  DOLMONT. 

Allez,  vous  êtes  un  vieux  fou. 

^  LE  BAILLI. 

Comment  Monsieur,  un  vieux  fou  ? 

M.  BOLMONT. 

Oui,  Monsieur,  un  vieux  fou.  Et  de  quel 
droit  avez-vous  osé  présumer  de  la  soustraire 
à  mon  autorité  ? 

LE  BAILLI. 

Du  droit  que  lui  donne  la  loi.  Monsieur, 
nous  la  connoissons  la  loi,  on  n'est  pas  homme 
de  loi  pour  rien,  Côlinette  est  libre  de  se  don- 
ner à  moi,  elle  y  a  consenti,  j'en  ai  une  preuve 
incontestable,  et  personne  n'a  le  droit  de  s'y 
opposer.   . 

M.  DOLMONT. 

Quelle  impudence  !  Hé  bien,  je  vous  dis, 
moi,  que  je  m'y  oppose  formellement. 

L£  BAILLI. 

Cela  m'est  égal,  j'ai  sa  promesse. 


rfiin— »iBMÉ*iru.BT'* 


COMEDIE. 


71 


SCENE  XIII.  ET  DERNIERE. 


M.  DOLMONT,  LE  BAILLI,  COLINETTE, 
COLAS,  L'EPINE. 

;    H  :   ■         )     ■■  .       "  ... 

cotiNETTE,  riant. 

Oh  la  bonne  promesse  qu'a  Monsieur   Le 
BailU  ! 

LE  BAILLI,  à  part. 
La  traîtresse  !  (haut)  N'est-il  pas  vrai,  Co- 

linettc,  que  tu  m'as  promis 

M.  DOLMONT,  ironiquement 
Est-il  quelque   loi  qui  autorise  à  épouser 
quelqu'un  contre  son  gré? 

LE  BAILLI.  ' 

Qu'appellez-vous  contre  son  gré  ?  Une  fille 
qui  vient  se  jetter  dans  mes  bras  ! 

COLINETTE,  du  toM  le  plits  méprisant. 

Me  jetter  dans  vos  bras  î  j'aimerois  mieux 
me  jetter  dans  la  rivière. 

M.  DOLMONT. 

Hé  bien.  Monsieur  ? 

LE  BAILLI,  à  part. 
J'enrage!     (haut.)     Comment  tu  ne  m'as 
pas  dit? 

COLTNKTTB. 

J'ai  dit  ce  que  j'ai  voulu,  pour  me  jouer  de 
votre  crédulité,  et  venger  Colas  de  la  fourbe- 
rie que  vous  lui  avez  faite. 

LE  BAILLI. 

O  serpent  i 

G 


78 


COLAS  ET  COLINETrE. 


Ml 


I       ^i 


r\     1  . 


M.  DOLMONT, 

Comment  ?  quelle  fourberie  ? 

LE  BAILLI,  appercevant  Colas. 
Le  voilà  le  Coquin 

M.  DOLMONT. 

Ah  !  te  voilà.  C'est  donc  toi  qui  t'avises 
de  maltraiter  les  gens,  de  nuit  ? 

COLAS. 

Excusez-moi,  Monsieu,  n'y  a  que  l'bout 
d'moii  bras  qui  l'y  avons  touché  l'dos. 

LE  BAILLI         ! 

Impertinent!       >i  x.>.>:v,  • 

COLAS.  •     i    .  .  ,i 

Et  puis,  Monsieu,  j 'voulions  vous  dire 

M.  DOLMONT. 

Qu'as-tu  à  me  dire  ?  Pourquoi  n'es-tu  pas 
venu  chercher  ton  fourniment,  comme  je  te 
l'avois  ordonné  ? 

COLINETTE. 

Colas  ne  s'est  pas  engagé.  Monsieur, 

>  M.  DOLMONT,  à  Colas. 
Comment  ?  tu  ne  t'es  pas  engagé  ce  matin  ? 

COLAS. 

Oui,  Monsieu,  mais  c'est  ly  qui  m'avons 
joué  ce  tour-là. 

l'épine,  à  part»  -    = 

Ah  ben  v'ià  qu'est  drôle  !  ,'  ? 

M.  DOLMONT,  à  part. 
Le  Misérable!   j'avois  raison  de  soupçon- 
ner  (haut.)  expliques-toi. 

COLAS. 

Hé  bien,    Monsieu,    pis  que   vous  m'per- 

mettez C'est  que  sous   vot  respet, 

j'nous  aimons  Colinette  et  moi. 


8i 


COMEDIE. 


TA 


.  I 


M,  DOLMOKT. 

Est-il  vrai  Colinette  ?  '  ,*. 

COLINETTE. 

C*ctoit,  Monsieur,  le  vœu  de  nos  parens, 
j'espère  de  votre  bienveillance,  qu'elle  ne 
mettra  point  d'obstacle  à  notre  union.     )  .  ,    / 

COLAS.      , 

C'est  là,  Monsieu,  la  grâce  que  j'vous  de- 
mandois  et  j*onsct^  à  c'matin  pour  vous  parler 
à  c'dessein  là,  quand  j'ai  rencontré  c'Monsieur 
L'Bailli  qui  m'avons  promis  d'vous  parler  pour 
moi. 

COI.INETTE. 

Oui,  Monsieur,  il  vous  l'a  présenté  comme 
Milicien,  vous  l'avez  accepté,  et  Colas  a  prie 
son  engagement  pour  un  contrat  de  mariage. 
l'épine,  à  part. 

Ah  ben,  v'ià  une  drôle  d'histoire  ! 

M.  DOLMONT. 

Je  vois  tout  cela.  Cau  Bailli,  J  II  faut  que 
vous  soyez  un  grand  scélérat  ! 

LE  BAILLI.  " 

Je  suis  surpris,  Monsieur,  que  vous  pre- 
niez le  parti  d'un  rival  de  son  espèce.  Au 
reste  ce  n'est  pas  ma  faute  s'il  plaît  à  cette 
perfide  de  se  dédire,  elle  a  présidé  à  son  choix, 
elle  m'a  promis  sa  main,  et  pour  preuve  de 
cela,  c'est  qu'elle  a  accepté  une  bourse  de  cent 
louis  que  je  lui  ai  donnée  tantôt. 

M.   DOL^IONT. 

Tu  as  accepte'  une  bourse  ? 
.    .     .'     '      COLINKTTE,  ricnit. 
Oui,    Monsieur,    c'étoit    pour   acheter  ma 
garde-robe.  G  2 


,  ji 


n 


COLAS  ET  COLINETTE. 


■■.t 


;■  I 


.  lit  i^- 


coirAS,  au  BaHli. 
La  v*là,  la  vMà.  -  t.  ':..'! 

M.  DOLMONT,  Vurrêtant, 
Un  moment,   il  faut  voir  ce  qu'elle  con- 
tient,   (au  Bttillu)    Quelle  somme  <loit-il  y  a- 
voir  dans  cette  bourse  ?    » 

LE  BAILLÎ. 

Cent  louis  d'or  bien  comptes. 

COLAS. 

Ce  qu'étions  d'dans  y  est  ben  encore. 
M.  DOLMONT,  Comptant  V argent. 
Dix,  vingt,  trente,  quarante,  cinquante.... 
et  cinquante  font  cent. 

LE  BAILLI,  tendant  la  main. 
C'est  le  compte  juste. 

M.  DOLMONT. 

Tiens,  Colas,  gardes  ceci  j   cet  argent  t'est 
dû,  et  je  te  le  donne. 

LE  BAILLI. 

Mon  argent  !  je  ne  lui  donne  pas  moi,  en 
voilà  bien  d'un  autre  ! 

M.  DOLMOKT. 

Il   lui  appartient   en    dédommagement  du 
chagrin  que  vous  lui  avez  donné. 

L£  BAILLI. 

Mais  Monsieur,    quand   je   vous  demande 
justice,  de 

M.  DOLMONT. 

Je  vous  la  rends,  Monsieur. 

COLAS. 

Oh  Monsieu,  pour  c'qu'est  dTargent 

COLINETTE. 

Ne  l'acceptes  pas. 


.^-  i»   l 


CDHEDIE. 


:t..... 


7S 


n- 


t'est 


.  en 


du 


mde 


M.  DOLMONT. 

Je  le  veux.  .   ^:   '.        I 

LE  BAILiLI. 

Mais  eiliifi.  Monsieur.. «. ..-••.  '>■ 

M.  DOLMONT.  i". 

Si  VOUS  n'êtes  pas  satisfait  de  ce  jugement, 
ayez  recours  à  h  loi.  Monsieur  l'homme  de 
loi. 

LE  BAIJLLI. 

Je  dis  que  vous  n'avez  pas  le  droit 

M.  DOLMONT. 

Le  droit,  Monsieur?  Le  droit  seroit  de 
vous  chasser  pour  avoir  osé  vous  jouer  de  moi, 
et  de  vous  interdire  un  emploi  que  vous  desho- 
norez ;  ainsi,  croyez-moi,  donnez  lui  cet  ar- 
gent, et  restez-en  là. 

LE  BAILLI. 

Allons.     Puisqu'il  faut  le  donner. 

Colas,  mettant  la  bourse  dans  sa  poche. 
Allons.     Puisqu'y  faut  Tprendre 

M.  DOLMONT. 

C'est  le  meilleur  parti  que  vous  puissiez 
prendre.  Quant  à  moi  je  me  contenterai  de 
vous  rendre  le  témoin  du  consentement  que  je 
leur  donne.  Mariez-vous,  mes  enfans,  et 
soyez  heureux.  Nous  célébrerons  demain 
tout  à  la  fois  et  votre  fête  et  la  mienne. 
COI. AS,  baisant  la  main  de  CoUnette, 
Ah  !  Monsieu  !  Ah  !  Colinette  !  que  j'suis 
heureux  ! 

l'épine. 
Jarni  que  v'ià  qu'est  ben  Jugé  ! 
LE  BAILLI,  à  part. 
Voici  une  aventure  qui  ne  m'a  pas  réussi. 


76 


COLAS  ET  COLINETTE. 


.     COLAS,    r.l 

Mais  c*t'engagement  dans  l'a  Milice ? 

M.  DOLMONT. 

Il  est  frauduleux,  par  conséquent  nul  ;  je 
te  donne  ton  congé. 

^  COLAS.  "  ."' 

Grand  merci  de  tout  mon  cœur.        v 
l'épine. 

Allons,  l'ami,  j'te  félicite  du  bonheur  qui 
t'arrive,  ça  vaut  mieux  que  d's'aller  faire  tuer 
à  la  guerre,  et  j'te  pardonne  de  bon  cœur 
tout  ce  que  tu  m'as  dit  tantôt.         . 

COLAS. 

Et  moi  dans  un  jour  com'celui-ci,  je  n'veux 
point  itou  conserver  d'rancune.  (au  Bailli.) 
J'vous  pardonne  donc  aussi,  mais  à  condition 
que  quand  je  s'rons  mariés,  vous  vous  dis- 
penserez d'nous  faire  des  visites. 


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COMEDIE.    àvIOD 


VAUDEVILLE. 


je 


qui 

uer 

leur 


eux 

tion 

dis- 


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R, 


LE  BAILLI. 


-USE,  détour,  tout  devient  inutile^ 
On  ne  nauroit  frauder  l'amour, 
A  mon  ardeur  Colinette  indocile, 
En  est  une  preuve  en  ce  i'>ur; 
A  mes  dépens  je  viens  d'apprendre,         -•"' 
Qu'en  amour  un  jeune  tendron, 
Peut  toujours  dnper  un  barbon, 
Et  tel  e8t  pris  qui  croyoit  prendre. 

COLINETTE. 

Qu'un  vieux  galant  parle  de  son  martire, 

Qu'il  se  plaigne  de  rtos  rigueurs, 

Sans  se  fâcher,  le  meilleur  est  d'en  rire, 

Et  se  moquer  de  ses  sottes  langueurs  ; 

Mais  lorsqu'il  cherche  a  nous  surprendre. 

On  lui  tait  voir  que  sans  éclat, 

La  souris  peut  duper  le  rhat, 

Et  tel  est  pris  qui  croyoit  prendre. 

COLAS. 

Quand  on  est  franc,  honnête  et  sans  maiice, 
Si  l'on  n'est  pas  un  peu  fûté, 
Vient  un  méchant,  qui,  par  son  artifice. 
Surprend  bientôt  notre  bonté  ; 
Mais  quand  c'tilà  qui  veut  surprendre 
A  son  piège  est  pris  comme  un  sot, 
On  rit  d'bon  coeur,  mais  on  n'dit  mot. 
Car  tel  est  pris  qui  croyoit  prendre. 

M.  DOLMONT    .    •  .  • 

Qu'un  gros  richard  tout  bouffi  d'arrogance, 
Et  cousu  d'or,  aspire  à  la  grandeur, 
Est-il  heureux  ?  Non,  malgré  l'opulence. 
C'est  vainement  qu'il  cherche  le  bonheur  ; 
Mais  sans  orgueil,  si  sa  main  libérale, 
Sur  l'indigent  répand  les  bienfaits, 
Dans  son  cœur  il  trouve  la  paix, 
Est-il  aucun  biea  qui  l'égale  ? 


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19 


COLAS  ET  COLINETTE. 


H. 


t'EPlKE. 

Si  notre  pièce  a  pu  vous  satisfaire. 
Messieurs,  j'vous  prions  d'applaudir» 
De  nos  efforts  c'est  l'unique  salaire» 
Et  pour  nous  le  plus  g^nd  plaisir  ; 
A  v'z'amuser  j'avonsosé  prétendre» 
Mai?  si  i'n'avons  pas  réussi, 
J'pt^ux  ben  dire  à  mon  tour  aussi» 
Que  tel  est  pris  qui  croyoit  prendre. 


CHŒUR. 


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Ri 


COLAS   ET   COLINETTE. 


-IONS,  Chantons,  soyons  joyeux, 
L'amour  enfin  comble  nos  vœux. 

TOUS. 
Riez,  chantez»  soyez  joyeux. 
L'amour  enfin  comble  vos  vœux. 

COLAS   ET   COLTMET-^E. 

Que  de  plaisirs  1  quelle  allégresse. 
Ce  Dieu  couronne  ma  tendresse  1 

COLINETTE. 

Ah  1  quel  jour  heureux  pour  moi  ! 

COLAS. 

Heureux  pour  moi. 

COLIS  ETTE. 

"Tott  Tccenr  va  me  donner  sa  foi  ! 

ENSEMBLE. 

Rions,  chantons,  soyons  joyeux, 
L'amour  enfin  comble  nos  vœux. 

TOUS. 

Riez,  chantez,  soyez  joyeux. 
L'amour  enfin  comble  vos  vœux. 


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