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Full text of "Jurisprudence de la cour impériale de Douai .."

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JURISPRUDENCE 


DEU 


COUR  IMPÉRIALE  DE  DOUAI. 


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DOUAI.  —  IMPRIMERIE   DEGHRISTE. 


JURISPRUDENCE 


DE  LA 


COUR  IMPÉRIALE  DE  DOUAI, 

XwXiU  pal-  un  JWocat , 

sous  LES  AUSPICES  DE  LA  MAGISTRATURE  ET  DU  BARREAU. 


TOME  XVIII  —  ANNÉE  1860 


-«Di-^K^^>3^ 


DOUAI, 

Chez  TEditeur  ,  rue  des  Chapelets  ,47.  ^sf 

— 1860.  —  Ç^'^wM 


1- 


JURISPRUDENCE 


DK  L\ 


COUR  IMPÉRIALE  DE  DOUAI. 


BAIL  SANS  ÉCRIT.  —  durée.  —  congé. —  vente  de 

l'immeuble  loué.  —  expulsion. 

Doit  être  réputé  fait  sans  écrit,  le  bail  qui  n'est  constaté 
que  par  un  acte  sou^  seing-privé,  revêtu  de  la  signature 
unique  du  bailleur,  le  preneur  ne  sachant  ni  écrire  ni 
signer. 

Quoique  le  preneur  soit  entré  en  jouissance  des  lieux  loués, 
le  bailleur  a  pu  signifier  congé  en  considérant  la  location 
comme  verbale  et  faite  à  Vannée. 

Si,  postérieurement  au  congé,  l'immeuble  a  été  vendu,  V ac- 
quéreur a  le  droit  d'expulser  le  locataire,  conformément 
àVart.i74ê.  G.  Nap.  (1) 

(Brebant  C.  Mabille.) 

Le  leravrill857,  le  sieur  Michel, propriétaire  à  Feignies, 
donna  à  bail  pour  neuf  années,  au  sieur  Brebanl,  ouvrier, 
une  partie  de  maison,  composée  de  plusieurs  pièces,  moyen- 
nant le  prix  de  60  francs.  Il  fut  convenu  que  si  Michel  ne 
demeurait  plus  avec  Brebant,  le  prix  du  loyer  serait  porté 
à  72  francs  par  an.  Ce  bail,  constaté  par  un  acte  sous  seing- 
privé  écrit  d'une  main  étrangère,  ne  fut  revêtu  que  de  la 
signature  de  Michel,  Brebant  ne  sachant  ni  écrire  ni  signer. 

(1)  V.  Toullier,  t.  9.,  n»  32.  —  Duvergier  (conlin.  Toullier),  t.  18,. 
p.  258;  Troplong,  du  Louage,  no  il8;  Delvincourt,  t.  3,  p.  418.  —  V. 
aussi  Coiniar,  15  mars  1843,  Pal.,  3e  édit.,  à  sa  date.  —  Consult.  De- 
birpinbière,  Traité  des  OhUg.\  Gemmera,  de  l'art.  i338  C.  Nap.,  n»  12, 
" —  id.  Répert.  Pal.,  vo  Acte  s. -s.  privé,  nos  52  et  soiv.. 


(6) 

Pendant  un  an,  Michel  continua  à  demeurer  chez  Brebant, 
et  toucha  en  conséquence  deux  semestres  de  loyer  à  raison 
de  30  francs.  Plus  tard,  il  quitta  l'habitation  louée  et  perçut 
deux  semestres  de  36  francs  chacun.  Ultérieurement,  il 
forma  le  projet  de  vendre  le  bien  loué,  et  afin  d'obtenir 
un  prix  plus  avantageux,  il  songea  à  donner  congé  à  son 
locataire.  Il  prétendit  que  le  bail  n'ayant  pas  été  signé  de 
Brebant,  ce  dernier  n'était  entré  dans  sa  maison  qu'avec  un 
bail  verbal  et  en  vertu  d'une  location  à  l'année.  Un  huis- 
sier signifia  un  congé  le  22  décembre  4  858  ;  Brebant  pro- 
testa contre  ce  congé,  '^n  faisant  enregistrer  le  bail  du 
leravriH857.  Cette  formalité  fut  remplie  le  20 janvier  1859. 
Huit  jours  après,  Michel  vendait  sa  demeure  à  un  sieur 
Mabille.  L'acte  de  vente,  reçu  par  M.  Gravis,  notaire,  por- 
tait que  l'acquéreur  était  obligé  d'entretenir  tous  baux 
verbaux  qui  pourraient  exister, 

Brebant  n'ayant  pas  voulu  abandonner  la  demeure  à  lui 
louée,  malgré  le  congé  qui  lui  avait  été  notifié,  Mabille  l'as- 
signa en  déguerpissement  devant  le  Tribunal  civil  d'Avesnes. 
A  Taudience  du  25  juin  4859,  Brebant  prétendit  que  la 
demeure  dont  on  voulait  le  faire  sortir  lui  avait  été  louée 

Siour  neuf  années,  par  bail  écrit  et  signé  de  la  main  de 
lichel  ;  qu'à  la  vérité  l'acte  sous  seing-privé  n'avait  pas  été 
signé  par  lui ,  Brebant,  mais  que  cette  circonslance  était 
sans  importance  pour  la  solution  de  la  difficulté,  et  ne 

[)ouvait  transformer  son  bail  en  bail  verbal.  Il  ajoutait  que 
'acte  du  4er  avril  4857  ayant  été  enregistré  avant  la  vente 
consentie  au  profit  de  Mabille,  avait  acquis  date  certaine  et 
formait  un  obstacle  insurmontable  à  ce  que  cet  acheteur 
pût  obtenir  une  expulsion  aux  termes  de  l'art.  4743  C.  Nap. 
Ce  système  de  défense  ne  fut  pas  accueilli  par  le  Tribu- 
nal ,  qui  condamna  Brebant  à  vider  les  lieux ,  dans  les 
termes  suivants  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  l'écrit  présenté  à  Tenregisti'ement,  le  20 
janvier  4859,  comme  acte  de  bail,  étant  resté  imparfait  par 
le  défaut  de  signature  de  l'une  des  parties,  il  n'y  a,  en  fait, 
qu'un  bail  verbal; 

»  Que  si  l'écriture  n'est  point  en  général  de  l'essence  des 
conventions,  n'étant  requise  que  pour  la  preuve,  il  est  cer- 
tain qu'il  résulte,  de  l'art.  4743  C.  Nap.,  que  l'acquéreur 


(7) 
ne  pouvait  être  tenu  d'entretenir  un  bail  verbal  que  dans  le 
cas  où  il  en  aurait  été  chargé  par  le  vendeur  ; 

>  Attendu  que  ce  dernier  a  si  peu  entendu  soumettre 
l'acquéreur  à  cette  obligation  que,  dès  avant  la  vente ,  il 
avait  lui-même  signifié  un  congé  au  défendeur  pour  le  i^ 
avril  1859 ,  manifestant  par  là  son  intention  de  mettre  fin 
au  bail  verbal  dont  il  s'agit  ; 

>  Le  Tribunal,  statuant  en  matière  ordinaire  et  en  pre- 
mier ressort,  déclare  le  défendeur  non  fondé  à  opposer  son 
prétei\du  bail  au  demandeur  ; 

>  Dans  tous  les  cas,  sauf  son  recours  contre  son  bailleur, 
s'il  s'y  croit  fondé,  etc.  > 

Appel  par  Brebant,  qui  obtient  le  bénéfice  de  l'assistance 
judiciaire  ;  comme  il  l'avait  déjà  obtenu  en  première  ins- 
tance. 

Devant  la  Cour  on  reproduit  pour  lui  les  moyens  plaides 
devant  le  premier  juge.  On  soutient  que  Mabille,  ayant- 
cause  de  Michel ,  ne  peut  avoir  plus  de  droits  que  son  au- 
teur. Or,  ce  dernier  avait  accordé  un  bail  de  neuf  années  ; 
ce  bail  avait  été  constaté  par  acte  sous  seing-privé ,  et  le 
défaut  de  signature  de  Brebant  avait  été  réparé  par 
l'exécution  du  bailleur  et  du  preneur.  —  Pour  Mabille,  on 
conclut  à  la  confirmation  du  jugement  du  Tribunal  d'A- 
vesnes.  On  établit  que  l'acte  sous  seing-privé  du  l^r  avrir 
1857  est  un  acte  incomplet.  Il  n'y  a  pas  eu  bail  consenti 
régulièrement  pour  neuf  ans,  comme  l'alfirme  l'appelant. 
L'absence  de  signature  de  Brebant  a  laissé  la  convention 
du  bail  à  l'état  d'offre  adressée  au  preneur,  jusqu'à  ce  que 
ce  dernier  eût  fait  constater  juridfiquement  son  adhésion, 
soit  par  une  signification,  soit  par  le  dépôt  de  l'écrit  en 
l'étude  d'un  notaire,  et  Michel  était  en  droit  de  retirer  son 
offre.  A  la  vérité,  Brebant  occupait  la  demeure  de  Michel, 
mais  cette  occupation  n'était  que  le  résultat  d'une  location 
verbale,  d'une  location  opérée  sans  écrit.  Si,  dans  cette 
hypothèse  qu'on  peut  admettre,  Brebant  eût  pris  sa  demeure 
en  aversion  et  eût  voulu  la  quitter  nonobstant  le  prétendu 
bail  invoqué,  Michel  n'avait  aucun  moyen  juridique  de  le 
contraindre  à  l'exécution  de  ce  bail,  puisqu'il  était  dans 
'  rimpossibilité  légale  d'en  fournir  la  preuve,  aux  termes  de 
l'art.  1715  G.  Nap.  Le  congé,  signifié  le  22  décembre  1858 
par  Michel  à  Brebant,  a  enlevé  à  ce  dernier  le  droit  qu'il 
avait  jusqu'à  ce  jour  de  faire  constater  légalement  son  adhé- 


(8) 

sion  à  l'acte  du  i^^  avril  1857.  Le  bail  de  cette  dernière 
date  était  resté  bail  sans  écrit,  et  comme  tel  soumis  à  Tu-, 
sage  des  lieux  :  c'était  une  location  à  l'année. 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  — Adoptant  les  motifs  des  premiersjuges,  met 
Tappellation  au  néant,  ordonne  que  le  jugement  dont  est 
appel  sortira  effet,  etc. 

Dul^  janvier  4860.  S^cfeamb.  Présid.,M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Berr,avoc.  gén.  Conclus,  conf.  Avoc,  M®»  Clavou 
et  Duhrem  ;  avou.,  Mes  Lavoix  et  Huret. 


FAILLITE. — EXCUSABILITÉ.  —  BONNE  FOI.  — CONDAMNATIOl!^ 
CORRECTIONNELLE.  —  BANQUEROUTE  SIMPLE.  —  CIRCULATION 
DE  VALEURS  FICTIVES.  —  INSOLVABILITÉ.  —  PRÉJUDICE  AUX 
TIERS.  — FUITE  DU  FAILLI.  —  SPÉCULATIONS  HASARDEUSES, 
—  DÉPENSES  EXCESSIVES.  —  LIVRES  ET  INVENTAIRES.  ' — 
AVIS  DES  CRÉANCIERS. 

Le  bénéfice  de  V  excusabililé  est  exclusivement  réservé  au 
débiteur  malheureux  et  de  bonne  foi,  (l^e  et  2«  es- 
pèces.) (1). 

Si  la  condamnation  correctionnelle  du  failli  pour  banque- 
route simple  n'est  pas  un  obstacle  légal  à  Vexcusabilité 
du  failli,  elle  ne  doit  cependant  pas  être  prononcée  dans 
les  circonstances  suivantes  : 

Si  le  failli  a  eu  recours  à  la  mise  en  circulation  de  valeurs 
fictives  (Ire  et  2®  espèces)  ;  si,  au  lieu  de  s'arrêter  quand 
il  connaissait  son  insolvabilité,  il  a  continué  ses  opéra- 
lions  au  préjudice  des  tiers  (l^e  espèce)  ;  si,  par  la  fuite, 
il  s'est  dérobé  aux  poursuites  de  ses  créanciers  et  aux 
explications  qu'il  pouvait  leur  fournir  sur  sa  situation 
(Ire  espèce);  s'il  s'est  livré  à  des  spéculations  hasardeuses 
et  à  des  dépenses  excessives  (2e  espèce)  ;  s'il  a  fait  des 
acquisitions  d'immeubles,  alors  qu'il  était  obéré,  des 
marelles  en  disproportion  avec  sa  fabrication,  de  manière 
à  payer  des  différences  considérables  (2e  espèce)  ;  s'il  n'a 

|1  -2)  Consult.  sur  les  circonstances  qui  peuvent  faire  prononcer  ou 
rejeter  l'excusabilité.  Douai  19  juin  1841.  (Man.  5, 170);  11  mai  1814, 
30  août  1845,  9  juiU.  1846,  28  janv.,  13  mai  et  14  décemb.  1^848  ;  19, 
juin.  1858,  et  8  juin  1859.  (Jump.  %  228;  3,  39S;  4,  351;  7,  2a  ©fc 
21;  6, 399;  17,  161.) 


(9) 
pas  tenu  de  livres,  ou  s'il  ri  a  pas  dressé  d'inventaires 
régvliers  (2®  espèce).  (2). 

//  riimporte  que  la  majorité  des  créanciers  en  nombre  et  en 
sommes  aient  donné  un  avis  favorable  à  Vecccusabiliié, 
(l'-e  espèce.  —  C.  com.,  art.  537,  538,  540).  (3). 

Ire  espèce. 

(Windsor  C.  Lahousse  et  Grandel-Parvillers.) 

Une  décision  du  Tribunal  de  Lille,  du  49  juillet  4859, 
est  ainsi  conçue  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  plusieurs  créanciers  se  sont  opposés  à 
l'excusabilité  et  ont  fait  valoir,  à  Tappui  de  leur  opposition, 
la  mauvaise  gestion  du  failli ,  l'absence  de  tout  dividende 
pour  les  créanciers  chirographaires ,  et  une  condamnation 
correclionnelle  prononcée  contre  le  failli  pour  banque- 
route simple  ; 

î  Attendu  qu'indépendamment  de  ces  motifs  qui  n'ont 
pas  été  contestés,  il  résulte,  du  rapport  de  M.  le  juge- 
commissaire  ,  qu'Eugène  Windsor  s'est  soustrait ,  par  la 
fuite,  à  l'exécution  du  jugement  déclaratif,  n'a  prêté  au 
syndic  aucun  concours  et  n'a  comparu  à  aucune  des  opé- 
rations de  la  faillite  ;  que  ses  écritures  étaient  irrégulière- 
ment tenues,  et  ne  constataient  pas  la  véritable  situation, 
active  et  passive,  des  affaires  du  failli; 

»  Attendu  que  tous  ces  faits  placent  Eugène  Windsor  en 
dehors  de  la  situation  qui  permet  l'admission  de  l'excu- 
sabilité ; 

»  Le  Tribunal  déclare  le  failli  non  excusable.  » 

Appel  deVaM  la  Cour,  qui  a  confirmé  le  jugement  dans 
les  termes  suivants  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu,  en  droit,  que  le  bénéfice  de  Tex- 
cusabilité  ne  doit  être  accordé  qu'au  débiteur  malheureux 
et  de  bonne  foi,  et  qu'il  apl^artient  aux  Tribunaux  d'appré- 
cier si  le  failli  est,  ou  non,  dans  ces  conditions  ; 

Attendu,  en  fait,  qu'il  résulte,  de  tous  les  documents  de 

(3)  V.  Spétial,  Douai,  13  mai  1848.  {htrisp.  7, 21.) 


(10) 
la  cause,  que  les  pertes  de  rappelant  n'ont  pas  été  occa- 
sionnées dans  des  conjonctures  accidentelles,  indépendantes 
de  sa  volonté  ;  par  un  malheur  qu'il  ait  pu  prévenir,  tel 
qu'un  incendie  ou  autre  sinistre,  une  crise  commerciale, 
l'insolvabilité  de  ses  débiteurs  ;  que  sa  faillite  n'a  été  que 
l'inévitable  conséquence  de  son  imprévoyance,  de  sa  témé- 
rité, et  du  défaut  absolu  d'ordre  et  de  surveillance,  dans 
l'exploitation  de  son  usine  ; 

Attendu  que  s'il  n'a  commis  aucun  détournement  frau- 
duleux et  si  la  condamnation  correctionnelle  contre  lui 
prononcée,  pour  banqueroute  simple,  ne  met  pas  légale- 
ment obstacle  à  ce  qu'il  soit  déclaré  excusable,  il  n'en  est 
pas  moins  constant  que,  pour  dissimuler  ses  embarras,  il 
a  eu  recours  à  la  mise  en  circulation  de  valeurs  fictives  ; 
et  qu'au  lieu  de  s'arrêter,  quand  son  insolvabilité  évidente, 
pour  lui ,  devait  rendre  impossible  une  libération  même 
pailiolle,  il  a  néanmoins  continué,  au  préjudice  des  tiers, 
ses  opérations  jusqu'au  jour  où,  par  sa  fuite,  il  s'est  dérobé 
tout  à  la  fois  aux  poursuites  de  ses  créanciers  et  aux  expli- 
cations que  pouvait  nécessiter  le  règlement  de  sa  faillite  ; 

Qu'il  ne  saurait,  en  de  telles  circonstances ,  être  réputé 
débiteur  malheureux  et  de  bonne  foi  ; 

Attendu  qu'il  importe  peu  dès  lors  que  la  majorité  des 
créanciers,  en  nombre  et  en  sommes,  appuie  sa  demande 
que  d'autres  combattent  d'ailleurs  énergiquement ,  des 
considérations  supérieures  d'ordre  public  devant  guider 
les  magistrats  dans  l'appréciation  des  faits  et  l'application 
des  principes  et  des  dispositions  légales  en  cette  matière  ; 

Qu'il  y  a  donc  lieu  de  maintenir  la  décision  par  laquelle 
les  premiers  juges  ont,  à  bon  droit,  déclaré  l'appelant  non 
excusable  ; 

Par  ces  motifs ,  donne  acte  au  syndic  de  la  faillite  de  sa 
déclaration  de  s'en  rapporter  à  justice  ; 

Met  l'appellation  au  néant,  confirme  le  jugement,  ordonne 
qu'il  sortira  effet  et  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  3  janv.  1860.  I^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  !««• 

Brésid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  1er  avoc.-gén.  ;  avoc, 
[es Dupont  et  Flamant;  avou.,  M^sDussalian  et  Lavoix. 


(H) 

2e  espèce. 

(Faille  C  Ruez-Delsaux,) 

Un  jugement  du  Tribunal  de  Cambrai,  du  30  mai  1859, 
a  admis  Ruez-Delsaux  au  bénéfice  de  Texcusabilité.  Sur 
appeï,  la  Cour  a  réformé  ce  jugement  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu,  en  droit,  que  le  bénéfice  de  Tex- 
cusabilité  doit  être  exclusivement  réservé  au  débiteur  mal- 
heureux et  de  bonne  foi  ; 

Attendu,  en  fait,  qu'il  résulte,  de  tous  les  documents  de 
la  cause,  que  la  faillite  de  l'intimé  ne  saurait  être  attribuée 
à  des  conjonctures  accidentelles,  indépendantes  de  sa  vo- 
lonté ;  qu'elle  n'a  été ,  au  contraire ,  qu'une  conséquence 
inévitable  de  son  impéritie,  de  son  imprévoyance  et  d'un 
défaut  absolu  d'ordre  et  de  surveillance  dans  l'exploitation 
de  son  usine; 

Attendu  qu'il  s'est  livré  à  des  spéculations  hasardeuses 
et  à  des  dépenses  excessives,  faisant,  quoique  gravement 
obéré,  des  acquisitions  d'immeubles  ;  qu'en  contractant  des 
marchés  pour  des  quantités  sans  proportion  avec  les  pro- 
duits de  sa  fabrication,  l'impossibilité  de  livrer  l'a  entraîné 
à  payer  des  différences  qui  se  seraient  élevées  à  75,000  fr.; 
qu'afin  de  dissimuler  ses  embarras,  il  a  mis  en  circulation 
des  traites  fictives ,  dont  le  montant  aurait ,  durant  les 
quatre  derniers  mois ,  atteint  le  chiffre  de  579,000  fr.  ; 
que,  dans  le  but  de  retarder  sa  faillite,  il  abusait  ainsi*  les 
tiers  sur  son  insolvabilité  réelle  à  la  faveur  d'un  crédit 
apparent;  qu'enfin  l'absence  de  livres  et  d'inventaires  ré- 
guliers a  rendu  plus  difficile  le  contrôle  de  ses  actes  et 
l'apurement  définitif  de  sa  situation  ; 

Attendu  que  l'ensemble  de  ces  faits, constatés  par  le  rap- 
port des  syndics  et  par  le  juge-commissaire  de  la  faillite, 
a  été  apprécié  avec  une  juste  sévérité  par  la  juridiction 
correctionnelle;  qu'un  arrêt  de  la  Cour,  du  22  avril  1856, 
confirmatif  d'un  jugement  du  Tribunal  de  Cambrai,  a  con- 
damné l'intimé  à  six  mois  d'emprisonnement  pour  banque- 
route, et  que  cet  arrêt,  en  adoptant  les  motifs  des  premiers 


(12) 

juges,  ajoute  que  Ruez-Delvaux  a  eu  recours  à  des  moyens 
ruineux  dans  l'intention  de  retarder  sa  faillite  ; 

Qu'il  ne  se  trouve  donc  dans  aucune  des  conditions  né- 
cessaires pour  obtenir  un  bénéfice  que,  par  des  considé- 
rations de  moralité  publique ,  et  dans  Tintérèt  même  du 
commerce  ,  il  importe  de  ne  point  étendre  au-delà  des 
limites  légales; 

Par  ces  motifs ,  la  Cour  infirme  le  jugement ,  déclare 
Ruez-Delsaux  non  excusable ,  et  le  condamne  aux  dépens 
de  la  cause  d'appel. 

Du  45  févr.  1860.  i^^  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  1er 

Brésid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.;  avoc, 
[es  Talon  et  Duhem  ;  avou..  M®»  Legrand  et  Lavoix. 


ÉTABLISSEMENT  INCOMMODE .  —voisinage. — vibrations 

ET  ÉBRANLEMENTS.  —  BRUIT  DE  MACHINES.  —  PRÉJUDICE.  — 
SITUATION  TRANSITOIRE.  — DOMMAGES-INTÉRÊTS. 

Peuvent  donner  lieu  à  des  dommages-intérêts  commue  nui- 
sant au  voisinage  : 

Les  vibrations  et  ébranlements  causés  par  le  jeu  des  appa- 
reils industriels  (1); 

L'incommodité  plus  qu'ordinaire  d'un  bruit  continuel  occa- 
sionné par  la  machine  qui  meut  l'usine  (2)  ; 

Il  appartient  au  juge,  à  raison  du  caractère  transitoire  de 
la  sitU4ition,  de  substituer,  aux  travaux  indiqués  par  les 
eocperts,  une  somme  d'argent  à  titre  de  dommages- 
intérêts  (3). 

(Morel  et  Çfi  C.  Yvo  Vandenheede.) 

Les  sieurs  Morel  et  C®  ont  loué,  d'une  dame  Verbrouck, 
une  propriété  sise  à  Roubaix  et  contiguë  à  celle  d'un  sieur 
Yvo  Vandenheede,  boucher.  Ils  ont  étaoli  dans  cette  maison, 
qui  jusqu'alors  était  à  usage  de  rentier,  une  peignerie  de 
laines,  par  suite,  des  ateliers  de  préparations,  et  une 
machine  à  vapeur.  Vandenheede  fit  assigner  Morel  et  C®  de- 

(1)  Douai  10  janv.  1843  {Jurisp.  1,  52  et  la  note). 

(2)  Mémeairôtetdeplus:  Douai,  6  déc.  1856;  Douai  30  déc.  1856. 
{Junsp,  15,  49  et  la  note.) 

(l-z-3.)  Voyez  aussi,  sur  la  question,  un  arrêt  de  la  Cour  d'Agen , 
7  fév.  1855  (S.-V.  1855, 2,  311)  et  la  note  qui  accompagne  cet  arrêt. 


i 


(13) 

vant  le  Tribunal  de  Lille,  en  se  plaignant  du  bruit  de  leur 
machine,  des  ébranlements  qu'elle  produisait,  et  du  préju- 
dice qui  lui  avait  été  causé,  surtout  en  ce  qu'il  n'y  avait 
aucun  rapport  entre  la  force  des  machines  et  la  solidité  des 
constructions.  Il  demandait  qu'on  remît  chez  lui  les  lieux 
en  bon  état  ou  qu'on  lui  payât  6,000  fr.  de  dommages- 
intérêts.  Le  19  mai  1859,  un  jugement  d'avant  dire  droit 
nomma  trois  experts,  MM.  Farinaux,  Sauvage  et  Hudelo. 
Leur  rapport  fut  déposé  le  26  juillet  suivant.  Il  indiquait 
que  les  lézardes  dont  se  plaignait  Vandenheede  étaient  cau- 
sées par  l'ébranlement  que  produisait  le  jeu  des  appareils, 
et  que  le  bruit  continuel  existant  donnait  une  incommodité 
plus  qu'ordinaire.  Il  indiquait  aussi  certains  travaux  à 
effectuer  pour  faire  cesser  le  dommage.  —  A  l'audience, 
Morel  et  C«  dirent  qu'ils  n'étaient  que  locataires  et  que  leur 
bail  allait  cesser.  Ils  niaient  d'ailleurs  le  dommage. 

A  la  date  du  27  août,  le  Tribunal  rendit  le  jugement 
suivant  : 

JUGEMENT, 

«  Attendu  que  l'expertise  a  constaté  que  les  maisons  de 
Vandenheede,  celles-ci  occupées  par  des  ouvriers,  éprou- 
vent des  ébranlements  par  le  jeu  des  appareils  de  Morel  et  G^; 

»  Qu'en  outre  les  habitants  de  ces  maisons  éprouvent 
l'incommodité,  plus  qu'ordinaire,  d'un  bruit  continuel  oc- 
casionné par  la  machine  qui  meut  cette  usine  ; 

»  Attendu  que,  comme  remède  à  cette  situation,  les  ex- 
perts ont  indiqué  des  moyens  radicaux,  tels  que  la  section 
d'un  sommier,  etc.,  moyens  dispendieux  auxquels  équita- 
blement  il  n'y  aurait  lieu  à  recourir  qu'autant  que  la  situa- 
tion actuelle  paraîtrait  devoir  se  prolonger  pendant  un  assez 
long  temps  ; 

»  Mais  attendu  que  Morel,  qui  n'est  que  locataire  de  l'u- 
sine, a  déclaré  que,  dans  huit  mois,  son  bail  prenant  fin, 
Tusine  dont  le  matériel  lui  appartient  cessera  d'exister,  et 
qu'ainsi,  à  cette  époque,  tout  dommage  cessera  pour  Van- 
denheede ; 

»  Attendu  qu'en  donnant  acte  de  cette  déclaration  il  n'é^ 
chet,  eu  égard  au  caractère  transitoire  de  la  situation ,  de 
prescrire  l'exécution  des  moyens  radicaux  indiqués  par  les 
experts,  d'autant  mieux  qu'il  ne  s'agit  point  d'incommo- 


{U) 

dites  inlolérables,  ce  qui  permet  dès-lors  de  mesurer  tran- 
sitoiremeht  aussi  la  réparation  due  à  Vandenheede,  à  raison 
de  ce  dommage  passager; 

,  »  Le  Tribunal,  en  donnant  acte  aux  parties  de  la  décla- 
ration de  Morel  que  dans  huit  mois,  date  du  présent  juge- 
ment, l'usine  dont  s'agit  cessera  d'être  exploitée  par  lui  et 
qu'il  en  retirera  le  matériel,  et  en  réservant  à  Vandenheede 
ses  droits  et  actions  au  cas  où  il  en  serait  autrement,  con- 
damne Morel  et  C^  à  lui  payer,  à  titre  de  réparation  du 
dommage  à  lui  causé  jusqu'à  ce  jour,  ou  qu'il  éprouvera 
pendant  huit  mois  encore  par  les  causes  sus-énoncées,  la 
somme  de  cinq  cents  francs  avec  intérêts  judiciaires,  et  les 
dépens  en  iceux  compris,  etc.  » 

Appel  par  Morel  et  C®.  Il  est  soutenu  dans  leur  intérêt 
que  les  incommodités  qui  résultaient  pour  Vandenheede  de 
leur  usine  n'étaient  ni  graves  ni  anormales  ;  qu'elles  n'ex- 
cédaient pas  les  obligations  ordinaires  du  voisinage  ;  que 
cela  ressortait  de  l'expertise  elle-même. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges , 
met  l'appellation  au  néant,  ordonne,  etc. 

Du  31  ianv.  1860.  i^^®  chamb.  civ.  Présid.,  M.  de  Moulon, 
ier  présid.;  avoc.-gén.,  M.  Morcrette,  d^r  avoc.-gén.;  avoc. 
Me»  Legrand,  Duhem  et  Flamant;  avou.,  Mes  Lavoix  et 
Dussalian . 


QUOTITÉ  DISPONIBLE.  —  donation  entre  époux.  —  usu- 
fruit. —  ENFANT  LÉGATAIRE.  —  LEGS  CADUC. 

Doit  être  réputée  caduque  et  de  nul  effet  la  disposition  tes- 
tamentaire par  laquelle  V époux ,  ayant  trois  enfants, 
donne  à  l'un  d'eux  l'usufruit  d'un  immeuble,  pour  en 
jouir  à  partir  du  décès  de  son  conjoint^  sauf  réduction, 
si  la  quotité  disponible  était  dépassée,  au  qu,art  en  usu- 
fruit de  la  totalité  de  ses  biens;  alors  que  le  testateur, 
dans  le  même  acte,  donne  d'abord  à  son  conjoint  la  moi- 
tié de  tous  ses  biens  m  usufruit.  (C.  Nap.,  art.  913  et 
1094.)  (1). 


•*M«M 


(1)  La  combinaison  des  art.  913  et  1094  a  donné  lieu  à  de  nom- 
breuses controverses,  et  plusieurs  systèmes  ont  été  adoptés,  par  la  doc- 


(15) 

(Les  époux  Judet  C.  la  veuve  Blanchard.) 

Un  sieur  Blanchard  a  épousé  une  dame  Maillard,  et  de  ce 
mariage,  régi  par  la  communauté  légale,  sont  issus  trois 
enfants.  Blanchard  est  décédé  en  485o  ;  il  a  laissé  un  tes- 
tament olographe  dans  lequel  on  lit  les  dispositions  sui- 
vantes : 

«  Je  donne  et  lègue  à  Marie- Joseph  Maillard,  mon 

trine  comme  par  la  jurisprudence,  sur  Tinterprétation  des  dispositions 
qu'ils  renferment.  L*art.  913  fixe  la  quotité  laissée  disponible  au  père  de 
famille,  Fart.  1094  la  détermine  pourFépoux.  D'un  côté,  quotité  variable 
suivant  le  nombre  des  enfants  existants  ;  de  Tautre,  quotité  également 
variable,  suivant  qu'il  exïiie  ou  n'existe  pas  d'enfants,  abstraction  faite 
de  leur  nombre.  Ces  deux  dispositions,  distinctes  en  elles-mêmes,  doi- 
vent«elles  toujours  être  appliquées  séparément,  Tune  sans  l'autre,  ou 
bien  peuvent-elles  se  cumuler?  Et,  dan»  le  eas  de  etim  iri  possible,  com- 
ment devra-t-il  se  faire?  A  la  quotité  de  l'art.  913,  pourfa-t-on  ajouter 
celle  de  l'art.  1094  et  réciproquertient?  Ou  bien  faudra-t-il  toujours 
rester  dans  les  limites  de  la  plus  forte  quotité  et  faire,  dans  ces  limites, 
des  attributions  proportionnelles  et  respectives  aux  donataires?  —  Ces 
questioas  ont  reçu  des  solutions  diverses.  Nous  indiquerons  les  deux 
principales. 

II  a  été  jugé  que  la  faculté  de  disposer  au  profit  des  époux,  accordée 
par  l'art.  1094,  n'a  pas  établi  une  seconde  quotité  destinée  à  concourir 
et  à  se  cumuler  avec  celle  de  l'art.  913,  mais  a  seulement  introduit  un 
privilège  exclusif  dont  l'époux  seul  peut  se  prévaloir  et  dont  les  antres 
donataires,  héritiers  ou  étrangers,  ne  doivent  pas  tirer  avantage.  En 
conséquence,  lorsque  la  quotité  disponible  fixée  par  l'art.  913  a  été 
épuisée  par  une  première  donation,  il  n'y  a  plus  de  libéralité  possible  à 
l'égard  des  enfants  ou  des  étrangers  ;  l'époux  seul  peut  encore  recevoir 
tout  ce  qui  reste  libre  dans  la  quotité  disponible  étendue  en  sa 
seule  faveur  par  l'art.  1094.  —  Spécialement,  et  comme,  dans  l'espèce 
de  notre  arrêt,  l'époux  qui,  ayant  trois  enfants,  a  donné  à  son  conjoint 
la  moitié  de  ses  biens  en  usufruit,  ne  peut  plus  disposer  d'un  quart  en 
nue  propriété  (dans  notre  espèce,  c'est  un  quart  en  usufruit)  au  profit, 
soit  de  l'un  desdits  enfants,  soit  d'un  étranger.  Orléans  28  déc.  1849 
(Pal.  2,  1849,  406);  Aix23  mai  1851  (Pal.  1 ,  1853,144);  Gre- 
noble 11  fév.  1852  (Pal.  1,  1853,  144);  Cass.  11  janv.  1853  (Pal.  1, 
1853,  129);  Toulouse  23  nov.  1853  (  Pal.  2,  1853  ,  124);  Agen7janv. 
1852  (Pal.  2,  1852,  341V,  Cass.  2  août  1853  (Pal.  2,  1855,  575);  Agen 
lOjuill.  1854  (Pal.  2,  1854,  586).  Consult.  encore  de  nombreuses  au- 
tontés  indiquées  Pal.,  Répert.,  v*».  Quotité  disponible,  n»  342. 

Mais  il  a  été  également  jugé  que  les  quotités  disponibles  constituées  parles 
art.  913  et  1094  devant  être  combinées  de  manière  à  toujours  atteindre  la 
plus  forte  de  ces  deux  quotités,  il  en  résultait  que  l'époux  qui,  par  son 
contrat  de  mariage  ou  autrement,  a  disposé  de  la  moitié  de  sec  biens 
en  usufruit  en  faveur  de  son  eonjoint,  peut  encore,  dans  le  cas  où  il 
laisserait  trois  enfants  ou  plus,  disposer,  en  faveur  de  l'un  d'eux  ou  bien 
d'un  étranger,  d'un  quart  en  nue  propriété.  Toulouse  24  juin  1852  (PaL 
1,  1853,  145);  Riom  21  mai  1853  (Pal.  2,  1855,  576);  Gonsult. 
pour  les  autres  autorités  Pal,  Répert.,  loco  cUato,  nos  ^06  et  341. 

Aux  auteurs  cités  comme  professant  la  même  opinion,  le  supplément 


(16) 

»  épouse,  r usufruit,  pendant  sa  vie,  de  la  quotité  la  plus 
»  forte  dont  la  loi  me  permet  de  disposer  en  sa  faveur,  tant 
»  en  biens  meubles  qu'en  biens  immeubles.  Cet  usufruit 
»  frappera  d'abord  sur  ma  pail  dans  la  ferme  d'Avesrielles, 
»  composée  d'une  maison,  etc.  (suit  la  désignation  du  bien)^ 
3)  jusqu'à  concurrence  de  la  quotité  disponible. 

»  Je  la  dispense  de  donner  caution. 

»  Je  donne  et  lègue,  par  préciput  et  hors  part,  à  Mar- 
»  tialine  Blanchard,  épouse  de  M.  Charles  Judet,  lieutenant 
»  au  6^  régiment  de  ligne,  ma  fille,  l'usufruit,  pendant  sa 
D  vie,  de  la  ferme  d'Avesnelles  ci-dessus  désignée,  pour, 
»  par  elle,  commencer  à  en  jouir  à  compter  du  jour  du 
»  décès  de  sa  mère  seulement,  si  elle  me  survit.  Je  la  dis- 
»  pense  de  fournfr  caution.  Et,  dans  le  cas  où  cet  usufruit 
»  excéderait  le  quart  dont  je  puis  disposer  en  propriétéj 
»  ledit  legs  sera  réduit  au  quart  en  usufruit  de  la  totalité 
»  de  ma  succession.  » 

La  fortune  délaissée  par  Blanchard  s*élevait  à  environ 
440,000  fr.  A  l'inventaire,  la  dame  Judet  prit  la  qualité 
d'héritière  et  légataire,  et  alors  vint  la  question  de  savoir 
si  le  legs,  qui  lui  avait  été  fait  au  testament  qui  précède, 
pouvait  être  valable,,  en  même  temps  que  celui  fait  à  la 
dame  Blanchard.  Une  instance  s'en  suivit,  dans  laquelle  les 
autres  héritiers  de  Blanchard  résistaient  à  la  délivrance  du 
legs  demandée  par  la  dame  Judet.  Ils  raisonnaient  ainsi  : 
a  Le  testateur  n'a  voulu  léguer  qu'un  usufruit  ;  il  a  dit  ex- 
pressément que  si  son  legs  excédait  un  quart  en  pleine 
propriété,  il  léguait  un  quart  de  la  succession  en  usufruit. 
Si  le  testateur  avait  voulu  restreindre  ses  dispositions  à  un 


àuRépertoire  du  Palais  indique  (loccitjno  34 1^  jjim^^  Guilbon,  Donat,  entre-r 
vifs,  no  268  ;  Duport-Lavilelle ,  quest.  de  droit,  v»  Quotité  diwonibk, 
t.  5,  p.  715;  Vazeille,  Domt.  et  testam,  sur  l'art.  10&4,  n®  7;  fienech^ 
Quotité  disponible  entre  époux,  2^  édit.,  p.  194,  298,  323  et  324;  Pont, 
Revue  de  legisL,  t.  16,  p.  215^  et  t.  19,  p.  260;  Molinier,  Revue  de  droit 
étranger,  t.l,p.  10;Marcadé  sur  Tart.  1100;  Zachariœ,  édît.  Aubryet 
Rau,  t.  5,  §  689,  p.  210;  Taulier,  Théorie  du  Cod.  ùiv„  U  2,  p.  242  ; 
Yalettejoumal  le  Droit,  du  11  mars  1846;  Ballot,  fiet/tté  de  droit  franc., 
t.  4,  p.  420  ;.  Deyilleneuve,  Collect.  nouv,,  t.  7,  1,  363,  el  Rdcmil  pé- 
riod.  1844,  1,  p,  69,  et  1846„  p..  iiS;  Gilbert^.  Cod.  €iv.>ann.  sur  l*ait. 
1094,  nô  14.  . 

V.  encore  :  Pal.  Rèpert.,  sm^L  hco  dt.,  no  341, 2o,. sur  k  distinction 
indiquée  par  Harcadé  entre  la  donation  en  propriété  ^tki  doniiftioH>eil 
ùsuiruit.  Add,  dissertât.,  en  note  sous  Cassât.,  H  jaUY.  1853.  (I^al. 
1,  1853,  130.) 

Là  Cour  de  Dauaij^ans  Taffaire  DamereyezC.  Debil  (Man.  t.  4,  108), 
avait  déjA  jugé  dans  le  iens  4e  »otr<e  ârrét  d*aMjourd-hui.    . 


(47) 

quart  en  propriété,  c'est-à-dire  à  la  portion  disponible  fixée 
par  l'art.  91â  C.  Nap.,  il  avait  épuisé  cette  quotité  de  droit 
commun  en  laissant  à  sa  veuve  une  moitié  ae  ses  biens  en 
usufruit,  c'est-à-dire  l'équivalent  d'un  quart  en  pleine  pro- 
priété. Or,  dans  son  testament,  Blanchard  avait  formelle- 
ment exprimé  l'intention  de  ne  disposer  qu'en  usufruit,  et 
l'extension  de  disponibilité  autorisée  par  l'art.  1094  Cod» 
Nap.  ne  pouvait  profiter  à  autre  personne  qu'à  l'époux.  La 
disposition  faite  en  faveur  de  la  dame  Judet  ne  venait,  d'ail- 
leurs, dans  l'intention  du  testateur,  qu'à  la  suite  et  comme 
subsidiairement  au  legs  fait  à  la  dame  Blanchard. — La  dame 
Judet  prétendait,  de  son  côté^  que  les  deux  legs  d'usufruit 
étaient  parfaitement  distincts  l'un  de  l'autre ,  celui  dont 
elle  était  gratifiée  ne  devant  commencer  qu'au  moment  où 
l'autre  prendrait  fin.  Elle  ajoutait  que  son  usufruit  ne  pour- 
rait être  réduit  que  si  la  valeur  en  excédait  le  quart  de 
toutes  les  propriétés  délaissées  par  Blanchard,  et  que  cette 
,  réduction  ne  pouvait  d'ailleurs  s'opérer  que  si  les  héritiers 
abandonnaient  la  quotité  disponible,  suivant  le  vœu  de  l'art. 
917  G.  Nap. 

Le  Tribunal  civil  d'Avesnes,  saisi  de  la  contestation,  ren- 
dit, le  9  août  1859,  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 

c  Attendu  que,  sans  cumuler  les  quotités  disponibles  des 
art.  913  et  1094,  il  est  admis,  en  jurisprudence  et  en  doc- 
trine, que  l'on  peut  donner  la  quotité  la  plus  forte,  pourvu 
que  la  disposition  soit  faite  au  profit  d'une  personne  capable 
de  la  recevoir; 

>  Attendu  que,  par  testament  olographe  du  1er  septem- 
bre 1851,  Blanchard,  après  avoir  donné  à  son  épouse  toute 
la  quotité  disponible  en  usufruit,  a  cru  pouvoir  disposer 
encore  de  l'usufruit  d'un  quart  au  profit  de  sa  fille  Martia- 
line,  femme  Judet,  appelée  à  en  jouir  seulement  lors  du 
décès  de  la  veuve  Blanchard,  sa  mère  ; 

»  Que  ces  libéraUtés,  bien  que  contenues  dans  le  même 
testament,  mais  avec  un  droit  de  priorité  et  de  préft'iï  ence 
marquée  pour  l'une  d'elles  sur  toutes,  ne  peuvent  recevoir 
toutes  deux  et  successivement  leur  exécution  (art.  927 

C.  Nap.); 
»  Que  si  la  disposition  dont  se  prévalent  les  demandeurs 

TOME  xvm.  2 


(18) 
ne  constitue  pas  une  substitution  prohibée  par  Tart.  896  G. 
Nap.,  elle  ne  doit  pas  néanmoins  être  confondue  avec  la 
disposition  faite  au  profit  de  la  veuve  Blanchard  pour  le 
calcul  de  la  quotité  disponible  ; 

».Quela  disposition  en  usufruit,  autorisée  entre  époux 
par  Vart.  lOO^,  ne  pourrait,  sans  violer  la  lettre  aussi  bien 
que  l'esprit  de  la  loi,  s'étendre  à  d'autres  personnes  qu'il 
plairait  au  disposant  de  l'en  gratifier  après  son  conjoint; 

»  Que  la  liberté  de  disposer  de  ses  biens  rencontre  ici, 
pour  limite  légale,  le  droit  des  héritiers  à  réserve; 

»  Qu'il  faut  donc  reconnaître  qu'après  la  donation  faite 
à  son  épouse,  le  testateur  avait  épuisé  toute  la  quotité  dis- 
ponible, soit  au  profit  de  ses  enfants,  soit  au  profit  d'étran-  . 
gers,  et  qu'ainsi  le  legs  réclamé  par  les  époux  Judet  se 
trouve  caduc  et  de  nul  effet  ; 

»  Attendu  que  chacun  des  héritiers  pouvant  demander  sa 
part  en  nature  des  biens  de  la  succession,  il  n'y  aurait  lieu 
d'ordonner  la  licilation,  etc.  ; 

»  Dit  que,  dans  le  jour  de  la  prononciation  du  jugement, 
les  défendeurs  et  les  époux  Judet  devront  consentir  à  la 
veuve  Blanchard  la  délivrance  du  legs  fait  à  son  profit,  etc.; 

>  Dit  caduc  et  de  nul  effet  le  legs  fait  par  le  même  testa- 
ment à  Martialine  Blanchard,  femme  Judet,  etc.; 

»  Qu'il  sera  procédé  à  la  liquidation,  etc.  » 

Appel  par  les  époux  Judet.  Devant  la  Cour,  il  est  soutenu 
pour  eux  que  les  deux  dispositions  successives  en  usufruit, 
qui  ont  été  faites  par  le  testament  de  Blanchard  au  profit 
de  sa  veuve  et  de  sa  fille,  sont  deux  dispositions  distinctes 
et  indépendantes  l'une  de  l'autre,  qui  sont  à  recueillir  suc- 
cessivement par  chacune  des  légataires  de  son  chef  person- 
nel, et  par  suite  complètement  valables.  D'un  autre  côté, 
ces  deux  dispositions,  faites  dans  le  même  acte,  n'excèdent 
pas  la  quotité  dont  on  peut  disposer  en  vertu  des  art.  913 
et  1094  combinés  du  C.  Nap.  N'est-il  pas  admis,  en  effet, 
par  la  doctrine  comme  par  la  jurisprudence,  que  les  deux 
quotités  peuvent  exister  simultanément,  pourvu  que,  réu- 
nies, elles  n'excèdent  pas  la  quotité  disponible  la  plus  forte. 
Or,  dans  l'espèce,  la  quotité  disponible  la  plus  forte  n'est 
pas  épuisée  ;  car  si  le  mari  a  donné  à  son  conjoint,  non  un 
guart  en  propriété  et  un  quart  en  usufruit,  mais  là  moitié 


(19) 

de  tous  ses  biens  en  usufruit,  il  n'a  donné  à  sa  fille  que  le 
quart  en  usufruit,  alors  qu'il  pouvait  donner  le  quart  en 
propriété.  —  A  ce  système  adopté ,  du  reste ,  par  plusieurs 
auteurs,  on  oppose  celui  qui  consiste  à  dire  que  la  quotité 
disponible,  telle  qu'elle  est  fixée  par  l'art.  1094  G.  Nap., 
constitue,  en  faveur  des  époux,  un  privilège  personnel  qui 
ne  peut  profiter  qu'à  eux  seuls  et  dont  le  bénéfice  ne  saurait 
dès-lors  être  revendiqué,  soit  par  les  enfants,  soit  par  les 
étrangers.  L'intention  du  testateur  a  été  manifeste,  d'ail- 
leurs :  il  n'a  voulu  faire  de  legs  m'en  usufruit.  Comment 
pourrait-on  compléter  la -quotité  dont  il  a  disposé  par  un 
quart  en  propriété,  sans  aller  contre  sa  volonté? 

La  Cour  a  confirmé  la  sentence  des  premiers  juges,  par 
les  motifs  qui  suivent  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  les  art.  91 3  et  suivants  C.  Nap. 
déterminent  dans  quelles  proportions  doivent  être  renfer- 
mées ,  selon  les  divers  cas  qu'ils  énumèrent ,  les  libéralités 
par  actes  entre-vifs  ou  testamentaires; 

Qu'après  avoir,  par  ces  dispositions  fondamentales,  con- 
cilié ,  dans  une  mesure  pleine  de  sagesse  et  de  prévoyance , 
l'intérêt  de  la  famille  et  la  part  de  liberté  du  disposant,  le 
législateur  a  voulu  faciliter  ,  en  faveur  du  mariage ,  les 
avantages  que  pourraient  se  faire  mutuellement  les  époux; 
que  ces  règles  sont  consignées  dans  l'art.  1094,  aux  termes 
duquel  notamment  l'époux,  en  cas  d'existence  d'enfants  ou 
descendants,  peut  donner  à  l'autre  époux  un  quart  en  pro- 
priété et  un  quart  en  usufruit,  ou  la  moitié  de  tous  ses 
biens  en  usufruit  seulement;  que  ces  libéralités  privilé- 
giées, justifiées  à  plus  d'un  titre,  par  l'affection  des  époux, 
par  l'éventualité  du  retour  des  biens,  aux  enfants  dans  la 
succession  de  leurs  père  et  mère,  ne  sauraient,  sans  une 
confusion  que  la  loi  interdit,  s'étendre  à  d'autres  personnes, 
l'art.  1094  s'appliquant  exclusivement  aux  dispositions  entre 
époux  ; 

Attendu  cependant  que,  par  son  testament  olographe  du 
l«r  septembre  1851,  Blanchard ,  père  de  trois  enfants,  a 
légué  d'abord  à  sa  femme  l'usufruit  de  la  moitié  de  tous 
ses  biens  et  disposé  ensuite,  au  profit^e  la  dame  Judet, 


(20) 
Tune  de  ses  filles ,  de  Tusufruit  de  Fimmeuble  déjà  donné 
à  sa  mère  ,  pour  en  jouir  à  partir  du  décès  de  celle-ci  et 
sauf  réduction  ,  si  la  quotité  disponible  était  dépassée  ,  au 
quart  en  usufruit  de  la  totalité  de  la  succession  ; 

Attendu  que  cette  seconde  disposition  du  testament  doit 
être  réputée  non  écrite  et  ne  saurait  légalement  produire 
aucun  effet; 

Qu'on  'se  prévaudrait  en  vain,  pour  la  faire  valider,  de 
rintérêt  qu'inspirent  les  dispositions  testamentaires,  et  de 
ce  qu'ici,  le  droit  de  la  fille  ne  devant  s'ouvrir  qu'au  décès 
de  sa  mère,  l'avantage  qu^^elle  est  appelée  à  recueillir  éven- 
tuellement n'excéderait  pas,  eu  égard  à  Testimalion  ou  à  la 
réduction  de  cet  usufruit,  la  portion  dont  le  père  de  famille 
pourrait  disposer  en  nue-propriété  ; 

Attendu  que  la  juste  faveur  qui  s'attache  aux  actes  de  der- 
nière volonté  doit,  avant  tout,  se  concilier  avec  le  respect 
de  la  loi  ;  que  nul  ne  peut  disposer  de  ses  biens  en  dehors 
des  conditions  ou  en  s'affranchissant  des  formes  que  le 
législateur  a  prescrites  par  des  considérations  prédominantes 
d'ordre  public;  qu'on  ne  saurait  ici  dénaturer,  sous  prétexte 
de  l'interpréter,  l'intention  du  père  de  famille  et  créer  ar- 
bitrairement au  profit  de  sa  fille,  par  un  mode  d'évaluation 
qu'aucun  texte  de  loi  ne  justifie  ,  et  fondé  sur  des  données 
purement  conjecturales,  une  quotité  disponible  en  usufruit, 
d'une  valeur  représentative  présumée  équivalente  à  la  paH 
en  nue-propriété  dont  elle  n'a  pas  été  gratifiée  ;  qu'il  res- 
sort en  effet  de  l'ensemble  du  testament,  d'abord  que  Blan- 
chard a  été  guidé,  dans  sa  libéralité,  par  une  pensée  mani- 
feste de  préférence  à  l'égard  de  sa  femme;  et,  de  plus,  qu'il 
n'a  entendu  donner  qu'en  usufruit; 

Attendu  qu'il  est  d'ailleurs  impossible  d'admettre,  sans 
méconnaître  à  la  fois  l'esprit  et  le  texte  de  l'art.  4094  Cod, 
Nap.,  que  l'époux,  après  avoir  usé,  dans  toute  sa  plénitude, 
en  faveur  de  son  conjoint,  de  la  faculté  .accordée  par  cet 
article,  puisse  encore,  à  l'aide  d'une  sorte  de  substitution 
ou  de  Survivance,  ou  par  une  voie  quelconque,  faire  parti- 
ciper des  tiers,  fussent-ils  même  ses  propres  enfants,  au 
bénéfice  d'une  disposition  qui ,  par  sa  nature  exception- 


m 

nelle,  ne  comporte  aucune  extension;  surtout  lorsque, 
comme  dans  l'espèce,  le  testateur  a  même  épuisé,  par  son 
legs  d'usufruit,  la  quotité  déterminée  par  l'art.  913; 

Qu'ainsi  les  premiers  juges  ont  sainement  appliqué  les 
principes  et  la  loi  de  la  matière,  en  décidant  que  Blanchard 
ayant  épuisé  son  droit  au  profit  de  sa  femme,  le  legs  fait  à 
sa  fille  était  caduc; 

Par  ces  motifs,  met  l'appellation  au  néant,  confirme  le 
jugement,  ordonne  qu'il  sortira  effet  et  condamne  les 
appelants,  etc. 

Du  23  janv.  1860.  d^e  chamb.  Présid.,  M.de  Moulon,  i^^ 

Brésid.;  minist.  publ.,M.  Morcrette,  l^^avoc-gén.;  avoc, 
[es  Duhem  et  Talon;  avou.,  M©»  Debeaumont  et Lavoix. 


lo  COMPÉTENCE  CIVILE.  —  routes  impériales.  —  écou- 
lement DES  EAUX.  —  PROPRIÉTÉS  VOISINES. 

2o  VOIRIE.  —  ROUTES  IMPÉRIALES. — EXÉCUTION  DE  TRAVAUX. 
—  OUVRAGES  TEMPORAIRES.  —  ÉCOULEMENT  DES  EAUX.  — 
SERVITUDE.  —  CONTRAVENTIONS.  —  RÉPRESSION  ADMINIS- 
TRATIVE. —  DROIT  DE  PROPRIÉTÉ. 

3^  ACTION  EN  GARANTIE.  —  JUSTES  MOTIFS.  —  FRAIS  ET 
DÉPENS. 

1»  Les  Tribunaux  sont  compétents  pour  connaître  des  pré- 
tentions de  l'Etat  au  droit  d'assujétir  les  propriétés 
voisines  des  rouies  impériales  à  une  servitude  particu- 
lière d'écoulement  des  eaux  (1). 

^^  Si  l'administration  a  le  droit  d'effectuer,  sauf  l'indem- 
nité prescrite  par  les  lois  spéciales,  temporairement  et 
accidentellement,  sur  les  propriétés  particulières,  en  état 
jde  viabilité,  de  sûreté  et  de  salubrité  publique,  les  ouvra- 
ges qu'elle  juge  nécessaires  à  l'exécution  de  ses  travaux 
sur  les  routes  impériales  ^  die  ne  peut  néanmoins  ,  sans 
constituer  une  servitude  à  jitstifier,  conformément  au 
droit  commun,  grever  gratuitement  et  d'une  manière 
permanente,  le  fonds  d' autrui  de  la  charge  de  recevoir 
des  eaux  pluviales,,  industrielles  et  ménagères,  artiftciel- 


(1)  V.  pourîa  compétence  MT.  Cotelle,  Cours  de  droit  administ.,  2eéd., 
t.  3,  p.  327,  np«  24  et  25  ;  V.  aussi  Pal.  Répert. ,  vo  Aqueduc ,  no  31,  et 
Yo  Routes,  no  102. 


(22) 

lement  déversées  et  accumulées  sur  un  même  point.  (Cod. 
Nap.,  art.  640).(4). 

n  n'importe  que  les  propriétaires  des  immettble^  sur  les- 
quels l'écoulement  des  eaux  a  été  pratiqué,  aient  été  con- 
damnés par  les  Tribunaux  administratifs  ou  consenti  au 
paiement  d'amendes  encourues  pour  entraves  apportées 
aux  ouvrages  exécutés  par  V administration. 

3®  Les  acquéreurs  des  propriétés,  ainsi  menacés  de  voir 
s'établir  une  servitude,  sont  fondés  dans  leur  recours 
contre  leurs  vendeurs,  et  ne  doivent  pas  supporter  les 
frais  de  leur  appel  en  garantie.  (C.  Nap.,  art.  1638.) 

(L'Etat  C.  les  époux  Sergeant,  veuve  Dévot  et  consorts.) 

La  dame  veuve  Dévot,  mère  de  M^^^  veuve  Legros-Devot, 
était  propriétaire  d'un  terrain  situé  à  Saint-Pierre-lez-Calais, 
et  formant,  au  midi  et  au  levant,  l'angle  de  la  rue  Eustache- 
de-Saint-Pierre  et  la  route  impériale  n^  43 ,  devenue ,  dans 
la  circonscription  de  la  commune  de  Saint-Pierre-lez-Calais  ^ 
la  rue  Lafayette. 

Cette  propriété  était  plus  élevée  que  la  route  et  fermée 
par  un  gazonnement  ou  bourrelet,  au-delà  duquelse  trou- 
vait un  fossé  qui  recevait  les  eaux  de  cette  route  et  les  con- 
duisait parla  rueEustache-de-Saint-Pierre  jusqu'à  la  rivière 
de  VAbyme. 

M«ïe  veuve  Dévot  fît  construire  sur  ce  terrain  une  maison 
de  campagne,  sans  rien  changer  au  niveau  des  terres,  qu'elle 
entoura  de  palissades  pour  remplacer  le  gazonnement. 

M™e  Legros-Devot ,  comme  héritière  de  sa  mère ,  était 
devenue  propriétaire  de  cette  même  maison  de  campagne, 
lorsque  l'administration  des  ponts-et-chaussées,  pour  élargir 
la  route  n»  43,  fit  combler  les  fossés  et  établit  des  trottoirs 
de  chaque  côté  de  cette  route,  qui  se  trouva  alors  en  suré- 
lévation du  terrain  de  M.  Legros. 

L'élargissement  de  la  route  eut  lieu  moyennant  Taban- 
don  fait  gratuitement  à  l'administration  des  ponts-et-chaus- 
sées,  par  M.  Legros,  d'une  bande  de  terre  quilui  appartenait. 

Les  eaux  s'écoulèrent,  par  suite,  le  long  des  trottoirs,  et 
continuèrent  néanmoins  de  se  rendre  par  la  rue  Eustache- 
de-Saint-Pierre  à  la  rivière  del'Abyme. 

En  1848,  la  rue  Eustache-de-Saint-Pierre  fut  exhaussée, 
ce  qui  amena  la  suppression  de  l'écoulement  des  eaux  par 

(1)  V.,  sur  récoulement  des  eaux  le  long  des  routes  et  raggravation 
de  la  servitude  naturelle,  M.  Cotelle,  C.  de  Dr.  adm.,  t,  1,  p.  381.—  V. 
encore  Pal.  Réperjt.,  vo  Routes,  n»  101. 


(23) 

cette  rue  etrinondationde  la  propriété  de  M.  Legros,  qui, 
pour  y  faire'  obstacle,  fit  élever  une  digue  le  long  de  la 
route. 

De  son  côté,  l'administration  des  ponts-et-chaussées avait 
fait  d'abord  pratiquer,  dans  les  deux  trottoirs,  deux  puits 
absorbants  qui  furent  bientôt  comblés  ,  et  reconnaissant  ce 
moyen  insuffisant  pour  débarrasser  la  route  des  eaux  qui 

Îf  séjournaient,  elle  établit  bientôt,  à  travers  le  trottoir  et 
a  digue  de  M,  Legros,  des  conduits  en  bois  qui  rejetèrent 
les  eaux  sur  la  propriété  de  ce  dernier. 

M.  Legros  fit  boucher  cet  aqueduc.  Procès-verbal  fut 
dressé  à  sa  charge,  et  un  arrêté  du  Conseil  de  préfecture, 
en  date  du  3  octobre  1850,  le  condamna  à  25  fr.  d'amende, 
aux  frais,  à  l'enlèvement  du  remblai  et  à  la  remise  des  lieux 
dans  leur  état  primitif,  dans  le  délai  de  quinzaine.  M.  Dévot 
paya  l'amende  prononcée  contre  lui. 

Sur  ces  entrefaites  ,  les  époux  Legros  vendirent  leur 
propriété  aux  sieurs  et  dame  Sergeant-Bimont.  Le  contrat 
porte  que  la  vente  est  faite  aux  charges  de  prendre  la  pro- 
priété dans  l'état  où  elle  se  trouve  et  de  supporter  les  ser- 
vitudes passives,  apparentes  ou  occultes  dont  elle  pouvait 
être  grevée,  sauf  aux  acquéreurs  à  s'en  défendre  et  à  pro- 
filer des  servitudes  actives  qui  pourraient  exister. 

L'administration  des  ponts-et-chaussées  voulut  alors  en- 
lever la  digue  qui  bordait  cette  propriété  le  long  de  la 
route;  les  époux  Sergeant  s'y  opposèrent,  et  les  agents  des 
ponts-et-chaussées  firent  procéder  d'office  à  cet  enlèvement. 

En  suite  d'un  mémoire  adressé  au  préfet  du  Pas-de-Calais, 
Sergeant  releva  la  digue.  Il  s'en  suivit  procès-verbal,  arrêté 
du  piréfet  qui  mit  Sergeant  en  demeure  d'enlever  la  digue. 
— ^Destruction  d'office  de  cet  ouvrage. — Opposition  de  la  part 
du  propriétaire.  —  Signification  de  l'arrêté  du  préfet  par 
Sergeant  aux  époux  Legros-Devot,  ses  vendeurs,  avec  som- 
mation de  le  garantir  du  préjudice  qu'il  pourrait  éprouver. 

Le  4  mai  1852,  arrêté  du  Conseil  de  préfecture,  conçu 
en  ces  termes  : 

«  Considérant  que  la  propriété  sise  à  Saint-Pierre-lez- 
3>  Calais,  aux  droits  de  laquelle  se  trouve  aujourd'hui  le 
>  sieur  Sergeant,  forme  un  fonds  inférieur  au  terrain  voisin 
j>  et  qu'il  est  ainsi  assujéti  à  recevoir  les  eaux  qui  en  dé- 
»  coulent  naturellement  ; 

»  Considérant  que  le   sieur  Sergeant  convient  d'avoir 


(24) 
»  cherché   à  arrêter,  interdire  et  empêcher  sur  sa  pro- 

>  priété  l'écoulement  des  eaux  provenant  d'une  partie  de 

>  la  route  n»  43  ;  que  ce  fait,  régulièrement  constaté,  cons- 

>  titue  une  contravention,  bien  qu'il  résulte  de  Finstruc- 
»  tion  que  le  corps  du  délit  ait  disparu  par  la  remise  des 
1  lieux  en  leur  état  primitif; 

»  Considérant  enfin  que  cette  contravention  rentre  dans 

>  celle  comprise  au  décret  d'amnistie  ci-dessus  visé  ; 

«  Arrête  :  Le  sieur  Sergeant  est  condamné  auxfrais,etc.  i 

Les  époux  Sergeant  font  alors,  après  le  préliminaire  de 
conciliation,  citer  les  époux  Legros-Devol  devant  le  Tribu- 
nal civil  de  Boulogne,  en  payement  d'une  indiemnilé  de 
12,000  fr.,  conformément  aux  dispositions  deTart.  1638, 
C.  Nap. 

Après  jugement  d'avant  faire  droit  et  descente  sur  les  lieux, 
le  Tribunal  a  ordonné  la  mise  en  cause  de  l'Etat,  qui  a 
prétendu  avoir  sur  le  terrain  de  la  veuve  Legros-Devot  (Le- 
gros  étant  décédé)  la  servitude  conférée  par  les  ordon- 
nances des  Trésoriers  de  France,  des  3  février  1741,  22 
juin  1751,  29  mars  1754  et  30  août  1772,  et  par  l'art.  640 
C.  Nap.,  servitude  d'ailleurs  reconnue  par  les  époux  Legros- 
Devot,  puisqu'ils  ne  s'étaient  pas  pourvus  contre  les  arrêtés 
de  préfecture  qui  les  avaient,  en  se  fondant  sur  l'existence 
de  la  servitude,  condamnés  à  détruire  les  obstacles  par  eux 
apportés  à  l'écoulement  des  eaux.  L'Etat  soutenait  encore 
qu'il  y  avait,  à  cet  égard,  chose  jugée,  et  que  le  Tribunal 
civil  ne  pourrait,  sans  empiéter  sur  les  attributions  de  la 
juridiction  administrative,  mvalider  les  décisions  du  Conseil 
de  préfecture,  et  déclarer  que  la  servitude  n'existait  pas  ;  que 
s'il  y  avait  aggravation  de  cette  même  servitude ,  par  suite 
des  travaux  opérés  par  l'administration  des  ponts-et-chaus- 
sées  ou  de  l'exhaussement  de  la  rue  Eustache-de-Saint- 
Pierre,  exécuté  par  la  ville  de  Saint-Pierre-lez-Calais,  ces 
circonstances  ne  pouvaient  que  constituer  un  dommage 
permanent  et  donner  lieu  à  une  action  vis-à-vis  l'adminis- 
tration des  ponts-et-chaussées  ou  de  la  ville  de  Saint-Pierre; 
que  cette  même  question  d'aggravation  était  d'ailleurs  ré- 
servée à  l'autorité  administrative ,  en  exécution  des  lois 
des  28  pluviôse  an  8  et  16  septembre  1807. 

Le  Tribunal  de  Boulogne,  à  la  date  du 31  décembre  1856, 
rendit  un  jugement  par  lequel  il  déclara  les  époux  Sergeant 
^ 'al  fondés  en  leur  demande  en  garantie  centime  les  époux 


(25) 

Legros-Devot,  se  déclara  compétent  sur  la  question  pen- 
dante entre  toutes  les  parties  en  cause;  dit  l'Etat  mal  fondé 
en  sa  prétention  à  une  servitude  d'égoût  des  eaux  sur  la 
propriété  des  époux  Sergeant ,  au  profit  de  la  route  impé- 
riale no  43,  devenue  en  cet  endroit  la  rue  Lafayette  ,  con- 
damna les  époux  Sergeant  aux  dépens  envers  la  veuve  et 
les  héritiers  Legros ,  et  l'Etat  envers  toutes  les  parties. 

Appel  par  l'Etat.  Devant  la  Cour,  il  soutient  l'incompé- 
tence de  la  juridiction  civile  et  le  droit  à  la  servitude  d'é- 
goût  des  eaux  sur  les  propriétés  riveraines  de  la  route  im- 
périale. Les  époux  Sergeant  maintiennent  le  bien  jugé  sur 
la  compétence  et  la  servitude,  et  demandent  la  garantie 
vis-à-vis  des  époux  Legros-Devot. 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; — Attendu  la  connexité  des  appels,  en  ordonne 
la  jonction ,  et  statuant  par  un  même  arrêt  entre  toutes  les 
parties , 

En  ce  qui  touche  la  compétence  : 

Attendu  qu'il  résulte  des  circonstances  de  la  cause  et  des 
conclusions  des  parties,  notamment  de  celles  prises  par  le 
Préfet  du  Pas-de-Calais,  le  19  novemb.  1856,  que  le  litige 
porté  devant  le  Tribunal  de  Boulogne  avait  pour  objet  la 
prétention  de  l'Etat  à  un  droit  de  servitude  sur  le  fonds  acquis 
par  les  époux  Sergeant  ;  qu'il  s'agissait ,  par  conséquent , 
d'une  question  de  démembrement  de  la  propriété  dont  la 
connaissance  appartient  exclusivement  à  l'autorité  judi- 
ciaire ;  qu'ainsi  les  premiers  juges  ont  compétemment  sta- 
tué sur  la  contestation  soumise  aujourd'hui ,  par  suite  des 
appels  ,  à  la  décision  souveraine  de  la  Cour  ; 

Attendu  ,  au  fond  ,  que  la  demande  de  l'Etat  tendant  à 
assujétir  l'immeuble  dont  Sergeant  est  aujourd'hui  pro- 
priétaire ,  à  recevoir  toutes  les  eaux  découlant  de  la  route 
impériale ,  n'est  justifiée  sous  aucun  rapport  ; 

Qu'on  ne  saurait  d'abord,  ici,  se  prévaloir  des  dispositions 
de  l'art.  640  C.  Nap.,  parce  qu'il  est  incontestable  que  l'ir- 
ruption des  eaux  sur  le  terrain  de  Sergeant  ne  peut  être 
attribuée  à  leur  écoulement  purement  naturel  ;  que  le  trou- 


(26) 
blc  dont  il  se  plaint  a  élé,  au  contraire,  le  résultat  des  mo- 
difications qu'ont  apportées  dans  l'état  des  lieux  les  travaux 
exécutes  par  les  ordres  de  l'administration  ; 

Attendu  que  l'Etat  ne  produit  aucun  titre  à  l'appui  du 
droit  de  servitude  d'égoût  qu'il  entend  exercer; 

Qu'il  ne  peut  se  fonder  sur  une  prescription  efficace  , 
l'état  des  choses  qui  motive  le  litige  ne  remontant  qu'à 
peu  d'années  ; 

Attendu  que  les  anciens  règlements  invoqués,  en  les  sup- 
posant en  vigueur  ici ,  constatent  seulement  le  droit ,  non 
conteste  à  l'administration  ,  de  faire  effectuer  dans  un  état 
de  viabilité  ,  de  sûreté  ou  de  salubrité  publiques  ,  les  tra- 
vaux qu'elle  juge  nécessaires  ,  suivant  l'exigence  des  cas  , 
sauf  à  indemniser  ,  selon  les  conditions  et  dans  les  formes 
prescrites  par  les  lois  spéciales  ,  les  propriétaires  que  ces 
travaux  auraient  assujétis  à  une  occupation  temporaire  , 
mais  qu'on  ne  saurait  confondre  ces  mesures  tout  acciden- 
telles et  passagères  avec  la  prétention  de  grever  gratuite- 
ment et  d'une  manière  permanente  le  fonds  d'autrui  de  la 
charge  de  recevoir  des  eaux  pluviales,  industrielles  et  mé- 
nagères ,  artificiellement  déversées  et  accumulées  sur  un 
même  point  ;  qu'une  faculté  si  exorbitante  constituerait 
une  servitude  à  justifier  conformément  au  droit  commun  , 
et  que  cette  preuve  n'a  pas  été  faite  ;  qu'ainsi  les  premiers 
juges  ont,  avec  raison,  rejeté  cette  demande; 

Attendu  que  l'Etat  n'est  pas  fondé  à  tirer  une  induction 
favorable  du  paiement  d'amendes  antérieurement  encou- 
rues pour  entraves  apportées  à  des  travaux  opérés  sur  les 
lieux  par  les  ponts-et-chaussées  ;  que  cette  exécution  de 
condamnations ,  compétemment  prononcées  pour  des  con- 
traventions que  les  tribunaux  administratifs  ont  mission  de 
réprimer,  n'implique  aucun  assentiment  à  une  prétention 
touchant  à  un  droit  de  propriété ,  aucune  renonciation  ^à 
déférer  la  question  aux  tribunaux  ordinaires,  à  qui  seuls  il 
appartient  d'en  connaître  ; 

Sur  le  recours  en  garantie  contre  les  héritiers  Legros- 
Devot  : 
Attendu  que  ,  si  par  suite  du  rejet  des  conclusions  de 


J 


(27) 

l'Etat,  ce  recours  n'a  plus  d'objet,  et  si,  par  le  môme  mo- 
tif, la  preuve  offeile  par  les  héritiers  Legros  est  désormais 
inutile,  on  ne  peut  méconnaître  que  l'action  en  garantie  des 
époux  Sergeant  était  fondée;  qu'en  effet,  même  en  admet- 
tant qu'ils  aient  eu  connaissance  du  débat  précédemment 
engagé  entre  les  vendeurs  et  l'administration ,  à  l'occasion 
de  faits  qu'ils  pouvaient  croire  d'abord  accidentels  ,  ils  ont 
dû,  quand  le  dommage  s'est  perpétué  comme  conséquence 
de  Texercice  d'une  prétendue  servitude  d'égoût,  concevoir 
la  juste  crainte  de  se  voir  dorénavant  troublés  par  une  telle 
charge  dans  la  paisible  jouissance  de  l'immeuble  par  eux 
acquis;  que  cette  appréhension  motivait  l'action  par  eux 
légitimement  dirigée  ,  en  vertu  du  principe  consacré  par 
Tarticle  1625  C.  Nap. ,  et  qu'à  tort  les  premiers  juges  ont 
déclaré  ce  recours  mal  fondé  ; 

En  ce  qui  touche  les  dépens  : 

Attendu  que  l'Etat  succombant  dans  la  prétention  qui 
seule  a  donné  naissance  à  ces  diverses  contestations ,  doit 
en  supporter  les  frais  à  l'égard  de  toutes  les  parties  ; 

Par  ces  motifs , 

La  Cour,  sans  qu'il  y  ait  lieu  de  s'arrêter  aux  conclusions 
subsidiaires  des  intimés, 

Emendant ,  infirme  au  seul  chef  par  lequel  le  Tribunal 
repoussait  la  demande  en  garantie  des  époux  Sergeant,  en 
mettant  à  leur  charge  des  frais  de  ce  recours  ; 

Confirme  le  jugement  dans  toutes  ses  autres  dispositions; 

Ordonne  la  restitution  de  l'amende  consignée  sur  l'appel 
des  époux  Sergeant,  et  condamne  le  Préfet  du  Pas-de-Calais, 
en  la  qualité  qu'il  agit ,  en  l'amende  et  aux  dépensjde  la 
cause  d'appel,  envers  toutes  les  parties. 

Du  23  janv.  4860.  I^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  4er 

Srésid.;  minist.  pubL,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.;  avec, 
[es  Dupont  et  Talon  ;  avou.,  Mes  La  voix,  Estabel  et  Legrand. 


(28) 

FAILLITE.  — MISE  EN  LIQUIDATION  ANTÉRIEURE  A  LA  DÉCLA- 
RATION.— TRAITÉ  SPÉCIAL  AVEC  LES  CRÉANCIERS. —  REPORT 
d'ouverture. — DROITS  DES  CRÉANCIERS. —  PRÉFÉRENCE. — 
MASSE  UNIQUE. 

Lorsqu' avant  la  déclaration  d'une  faillite  et  dam  Vinter- 
valle  de  temps  qui  remonte  de  cette  déclaration  à  V ouver- 
ture de  cette  même  faillite,  dé/initivemeM  fixée  sur  de- 
mande en  report ,  il  y  a  eu  mise  en  liquidation  de  la 
maison  du  commerçant  en  vertu  d*un  traité  qui  contient 
—  le  dessaisissement  des  biens  du  débiteur,  la  fusion 
de  l'actif  et  du  passif,  Tobligalion  de  procéder  à  une  vé- 
rification des  créances,  une  union  en  direction ,  le  rem- 
placement des  syndics  par  un  liquidateur  et  un  liquida- 
teur-adjoint ,  et^  le  transport  des  attributions  du  juge- 
commissaire  à  une  commission  de  surveillance  (1) , — 
les  créanciers  de  cette  liquidation  ont  un  droit  de  préfé- 
rence sur  les  créanciers  signataires  du  traité  (2) ,  et  les 
créamiers,  non  signataires  du  traité,  dont  les  créances 
sont  antérieures  à  V ouverture  de  la  faillite,  doivent  re-- 
cevoir  leur  dividende  au  marc  le  franc,  comme  tout  créan^ 
cier  delà  faillite,  sans  participer  au  privilège  de  ceux  qui 
ont  traité  avec  les  liquidateurs,  ni  sans  souffrir  de  la  pré-, 
férence  que  les  créanciers  signataires  doivent  subir, — Il 
n'y  a  pas  lieu  non  plus  à  constituer  pour  eux  une  masse 
distincte  qui  serait  formée  avec  les  éUmenis  existant  avant 
la  conclusion  du  traité  ou  à  V ouverture  de  la  faillite  (3). 

(Syndics  Halette  fils  C.  Dassier.) 

La  faillite  Halette  fils ,  déclarée  au  mois  de  janvier  1848  y 
a  été,  sur  demande  en  report,  définitivement  fixée  au  30 
juin  1846  (V.  l'arrêt  de  la  Courilu  2  août  4850  — Jurisp. 

■  — — ^—         .jii^^^— — »— ^— » 

(1)  V.  les  arrêts  indiqués  au  sommaire  des  faits.  Comparez  Tarrêt  du 
11  déc.  1848  avec  les  motifs  de  Tarrêt  du  2  août  1850  (toc,  cit.)  V. 'aussi 
la  note  qui  accompagne  ce  dernier. 

Pour  arriver  aux  conséauences ,  équitables  d'ailleurs,  de  la  décision 
que  nous  publions  aujourd'hui ,  lorsque  la  cessation  de  paiement  a  été 
fixée  antérieurement  a  la  mise  en  liquidation ,  sur  le  motif  que  ce  traité 
n'avait  pas  constitué  un  atermoiement ,  il  faut  fictivement  considérer  la 
liquidation  comme  ayant  été  une  régie  de  la  faillite  même  sous  la  direc- 
tion de  liquidateurs  qui ,  par  le  fait,  tenaient  lieu  de  syndics. 

(2)  La  question  était  déjà  ainsi  résolue  par  les  arrêts  des  26, 27  août 
et  22  décembre  1853  (loc,  cit.) 

(3)  V.  dans  le  même  sens  Farrét  du  11  déc.  1848  (toc.  cit.) 


(29) 

3.  354).  Dans  cet  intervalle  de  temps ,  et  du  45  février  484-7 
au  mois  de  janvier  1848,  par  suite  d'un  traité  passé  entie 
le  débiteur  et  le  plus  grand  nombre  de  ses  créanciers ,  traité 
dont  le  caractère  et  les  conditions  ont  été  appréciés  par  plu- 
sieurs arrêts  de  la  Cour  (voyez  ces  arrêts  des  il  décemb. 
4848 ,  2  août  4850,  26 ,  27  août ,  22  déc.  4853  et  30  juin 
4855.— Jurisp.  6.  364;  8,  354;  42,  445  et 43,  306),  avait 
eu  lieu  une  mise  en  liquidation  dont  l'effet  a  été  de  faire 
payer  par  préférence  aux  créanciers  signataires  de  cet  acte, 
ceux  qui  se  trouvant  créanciers  de  la  liquidation  elle-même, 
avaient  suivi  la  foi  de  ce.  traité.  Bien  qu'il  ne  dût  y  avoir 
qu'un  failli  et  qu'une  faillite ,  il  n'en  avait  pas  moins  été 
jugé  "que  cette  préférence  devait  exister  vis-à-vis  de  la 
masse. 

Mais  que  devait-on  décider  quant  aux  créanciers  dont 
les  titres  avaient  date  antérieure  à  la  mise  en  liquidation  et 
qui  n'étaient  pas  signataires  du  traité? 

Le  sieur  Dassier ,  l'un  de  ces  créanciers  dont  la  créance 
de  30000  f.  avait  été  payée  entre  le  30  juin  4846  et  le  45 
février  4847,  date  du' traité,  a  été  condamné  a  rajjporter 
cette  somme.  Redevenu  créancier  de  la  masse,  après  le 
rapport  qu'il  avait  fait,  il  l'était  avec  un  titre  antérieur  au 
traité  dont  il  n'était  pas  signataire.  Dans  ces  circonstances, 
et  sur  le  motif  qu'il  ne  pourrait  pas  souffrir  des  pertes  que 
les  opérations  de  la  liquidation  avaient  pu  faire  éprouver 
à  la  masse  créancière,  il  a  prétendu  que ,  pour  lui  et  ceux 
qui  pouvaient  se  trouver  dans  la  même  catégorie ,  il  devait 
être  constitué  une  masse  particulière  au  jour  du  traité  ou 
de  la  cessation  de  paiement  qui  avait  fait  fixer  l'ouverture 
de  la  faillite  au  30  juin  4846.  On  lui  répondit  qu'il  n'y  avait 
qu'une  seule  faillite ,  qu'il  ne  pouvait  y  avoir  qu'une  seule 
masse  créancière  ;  qu'en  fait ,  d'ailleuirs ,  le  préjudice  qu'il 
alléguait  n'existait  pas;  gue  les  opérations  de  la  liquida- 
tion avaient ,  au  contraire ,  atténué  les  désastres  de  la 
faillite  Halette,  en  permettant  des  recouvrements,  l'achève- 
ment de  travaux  qui ,  sans  elle ,  eussent  été  impossibles. 
Dasâer  constestait  les  faits  et  insistait  en  prétendant  qu'au 
moins  il  avait  le  droit,  puisqu'il  n'était  pas  signataire  engagé 
envers  les  créanciers  de  la  liquidation,  d'être  payé  sur  le 
même  pied  que  ceux-ci ,  les  créanciers  signataires  du  traité 
n'ayant  pu  lui  nuire  par  leur  fait.  Les  syndics  opposaient 
à  cette  deuxième  prétention  cette  réponse  que  si  les  signa- 
taires dé  Tacte  du  45  février  4847  avaient,  dans  l'intérêt  de 
laxnasse,  engagé  les  valeurs  delà  liquidation,  ils  ne  s'étaient 


(30) 

pas  engagés  personnellement  envers  ceux  qui  traiteraient 
avec  les  liquidateurs. 

Le  Tribunal  d'Arras  décida  que  Dassier  serait  admis  à  la 
distribution  sur  le  même  pied  que  les  créanciers  de  la  li- 
quidation. 

Appel  par  les  syndics.  Appel  incident  par  Dassier  qui  de- 
mande toujours  qu'il  soit  formé  pour  lui  une  masse  créan- 
cière séparée. 

La  Cour  a  réformé  le  jugement  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; — donne  acte  à  Dassier  de  son  appel  incident, 
et  statuant  sur  les  appels  respectifs  des  parties  : 

Attendu  que  Texistence  commerciale  d'Halette  s'est  pro- 
longée jusqu'à  sa  mise  en  faillite; 

Qu'il  a  été  souverainement  jugé  par  arrêt  de  la  Cour  de 
Douai,  du  14  décemb.  4848,  qu'il  n'y  avait  qu'un  seul  failli, 
une  seule  masse  ; 

Que  les  biens  du  failli  sont  le  gage  commun  de  ses  créan- 
ciers et  qu'ils  y  ont  tous  un  droit  égal,  quelles  que  soient 
la  date  et  l'origine  de  leurs  créances  ,  sauf  les  privilèges 
créés  par  la  loi  ou  les  engagements  d'actes  passés  entre  eux  ; 

Attendu  que  la  prétention  de  Dassier  de  se  faire  payer 
sur  les  valeurs  existant  au  45  février  4847 ,  en  reconsti- 
tuant l'actif  à  celte  époque  et  sans  égard  aux  dettes  posté- 
rieures ,  n'est  autre  chose  que  la  prétention  déjà  élevée 
d'une  double  faillite  et  d'une  double  masse  ; 

Attendu  que  si  les  arrêts  de  la  Cour  des  26,  27  août ,  22 
décemb.  4853  et  30  juin  4 855  ont  accordé  à  certains  créan- 
ciers qui  avaient  traité  avec  la  liquidation  un  droit  de  pré- 
férence sur  les  signataires  de  l'acte  du  45  février,  c'est 
qu'ils  devaient  compter  sur  les  valeurs  de  la  liquidation  ; 
qu'Halette  avait  reçu  des  créanciers  signataires  tout  pou- 
voir pour  les  engager,  ces deiniers déclarant  seulement  par 
l'art.  28  de  l'acte  du  45  février  ne  vouloir  pas  être  enga- 
gés personnellement  ; 

Attendu  que  la  créance  de  Dassier  remonte  à  une  date 
antérieure  au  4  5  février  4847  et  qu'il  n'a  pas  dès-lors  traité 
avec  la  liquidation  ; 


(31) 

Attendu  qu'il  soutient  en  vainque  les  signataires  deTacle 
du  15  février  lui  ont  porte  préjudice  en  disposant  de  Taclif 
et  en  continuant  les  opérations  ,  et  qu'il  doit ,  par  motif 
d'équité,  être  assimilé  aux  créanciers  de  la  liquidation  ; 

Qu'il  se  borne  à  cet  égard  à  de  simples  allégations,  tan- 
dis que  les  syndics  prétendent  de  leur  côté  que  la  liquida- 
tion a  été  favorable  à  la  masse  en  permettant  à  la  maison 
Halette  d'opérer  des  livraisons  qui  ont  dépassé  un  million, 
de  profiter  du  bénéfice  de  ces  livraisons  et  surtout  d'éviter 
les  dommages-intérêts  considérables  que  l'inexécution  des 
marchés  passés  par  la  maison  Halette  eût  entraînés; 

Attendu,  au  surplus,  que  les  signataires  de  l'acte  du  15 
février  ,  agissant  dans  l'intérêt  de  tous  ,  ne  sauraient  être 
responsables  des  événements  fâcheux  qui  seraient  venus 
diminuer  le  gage  commun  ; 

Attendu  que  Dassier,  étranger  à  l'acte  du  15  février  qu'il 
n'a  pas  signé,  doit,  comme  tout  créancier  de  la  faillite  Ha- 
lette, recevoir  son  marc  le  franc  ainsi  que  les  syndics  y  ont 
conclu,  sans  participer  à  la  position  privilégiée  des  créan- 
ciers qui  ont  traité  avec  la  liquidation,  ni  sans  souffrir  de  la 
préférence  que  les  créanciers  signataires  de  l'acte  du  45 
féviîer  devront  subir  ; 

Par  ces  motifs,  met  le  jugement  dont  est  appel  au  néant, 
émendant  et  faisant  ce  que  le  premier  juge  aurait  dû  faire, 
dit  que  Dassier  prendra  son  marc  le  franc  dans  la  masse  au 
même  titre  que  tout  autre  créancier  d'Halette  ; 

Le  déclare  mal  fondé  à  plus  avant  prétendre ,  condamne 
Dassier  à  l'amende  de  son  appel  et  aux  dépens  de  première 
instance  et  d'appel,  etc. 

Du  14janv.  1860.  Présid.,  M.  Danel;  minist.  pub.,  M. 
Berr ,  avoc.-gén.  ;  avoc. ,  Mes  Duhen  et  Talon;  avou. ,  M^» 
de  Beaumont  et  Legrand. 


TESTAMENT  OLOGRAPHE.— légataire  universel.— hé- 
ritier LÉGAL. — DÉNÉGATION  d'ÉÇRITURE.  —  PRÉSOMPTION 
CONTRAIRE. — PREUVE  A  CHARGE  DE  L'HÉRITIER. — VÉRIFI- 
CATION PAR  LE  JUGE. 

C'est  à  Vliéritier  légal  et  non  au  légataire  institué  par  tes-- 


(32) 

tament  olograplie  et  envoyé  en  possessimi,  quHncombe  la 
preuve  de  la  imi-sincérité  du  testament — alors  que  les 
circonstances  de  la  cause  élèvent  des  présomptions  en 
faveur  de  sa  sincérité  (C.  Nap. ,  art.  970,  999, 1323 
et  1324)  (1). 

Le  juge  peut,  sans  expertise,  vérifier  par  lui-mêms  la  sin^ 
cérité  du  testament  olographe  (C.  Nap.,  art.  1323, 1324, 
et  C.  pr.,  art.  195)  (2). 

(Gillon  et  consprts  C.  Carpentier  f^  Thomas  et  Duwart). 

Une  dame  Lancien ,  femme  Duwart  est  décédée  à  Boulogne* 
sur-Mer,  le  1^^  août  1858.  Elle  laissait  pour  héritiers  natu- 
rels un  neveu  et  trois  nièces  le  sieur  et  les  dames  Gillon , 
enfants  d'une  sœur  qui  demeuraient  à  Roubaix,Tourcoing , 

(1)  Cette  décision  est  contraire  à  la  iurisprudence  que  la  Cour  de  Douai 
avait  adoptée  jusqu'aujourd'hui.  Le  dernier  arrêt  qu'elle  avait  rendu  (8 
février  1855,  Nourtier  et  Tirmache  C.  Daullé,  2e  ch.—Jurisp.  13. 125), 
était  fortement  motivé  dans  un  sens  contraire ,  et  bien  que  la  jurispru- 
dence de  la  Cour  de  Cassation  fût  jusqu'alors  contraire  à  la  doctrine^ 
adoptée  par  la  Cour  de  Douai,  le  pourvoi  formé  contre  cet  arrêt  avait  été 
rejeté.  V.  C.  rej.  6  mai  1856  {Jurisp.  16. 167).  Il  est  vrai  de  dire  que  la 
Cour  suprême,  pour  prononcer  ce  rejet,  s'était  appuyée  sur  une  circons- 
tance de  fait  qui  pouvait  rendre  le  testament  suspect.  11  est  cependant 
facile  de  se  convaincre ,  à  la  lecture  de  l'arrêt  du  8  février ,  que  l'inter- 
prétation de  la  loi  était  pour  la  Cour  de  Douai  toute  contraire  à  celle 
que  professe  généralement  la  Cour  suprême. 

Quoi  qu'il  en  soit ,  l'arrêt  d'aujourd'hui  n'en  rapproche  pas  moins  la 
jurisprudence  de  la  Cour  de  Douai  de  œlle  de  la  Cour  de  Cassation. 

V.  pour  autorités  à  consulter  ,  les  notes  qui  accompagnent  les  arrêts 
de  Douai  du  10  mai  1854  {Jurisp,  12.  241)  et  du8fév.  1855  (loc.  cit.) 
Jung.  C.  rej.  6  mai  1856y/oc.  cit.) 

Adde  pour  la  jurisprudence  générale  dans  le  sens  de  Parrêt  d'aujour- 
d'hui Houen ,  15  fév.  et  16  mars  1853.  Pal.  2. 1853.  329.  Cass.  23  août 
1853.  Pal.  1. 1854.  577.— Bonnier,  Traité  des  preuves,  no  575;  Boîleux, 
sur  les  art.  970  in  fine  et  1008  ;  Teulet,  d'Auvillers  etSulpicy,  sur  l'art. 
1008  ,  nos  38  et  suiv.  ;  Rolland  de  Villargues,  v»  testament,  n<w  353  et 
suiv.  ;  Coin  de  Lisle  ,  tievue  crit. ,  t.  3  ,  p  369. 

Adde  contra.  Vazeille,  Donat  et  test.,  sur  l'art.  1008,  n»  7  ;  Marcadé , 
Cours  de  Dr.  civ, ,  sur  l'art.  1008 ,  n»  2.  Revue  du  Droit  franc,  et  étr., 
année  1849,  p.  933 ,  et  Revue  crit.,  t.  1.  p.  277.  t.  2.  p.  329  et  707,  et 
t.  3.  p.  946  ;  Taulier,  Théor.  du  C.  civ.,  t.  4.  p.  149  ;  Mourlon,  sur  l'art. 
970.  2û  exam.  p.  335  et  336  ;  Coulon  ,  Quest.  de  dr. ,  1. 1.  p.  368 ,  dial. 
29  ;  Massé  et  Vergé ,  sur  Zachariae ,  t.  3.  p.  97.  §  438.  not.  2. 

(2)  Jurisp.  constante  sur  la  matière  générale  de  la  vérification  d'écri- 
tures. V.  autor.  indiq.  Pal.  repert.  v»  vérification  d'écritures  et  suppl. 
no  24. 

V.  pour  la  jurisprudence  spéciale  de  la  Cour  de  Douai ,  appliquée  à 
la  vérification  des  testaments  olograp.  Douai,  27  fév.  1840.  Man.  4.  177. 
28  juin  1841.  Man.  6. 1.  et  l^r  août  1848.  Jurisp.  6.  305.  ♦ 


'(33) 

Lille  et  Montreuil-sur-Mer.  Elle  laissait  encore  une  autre 
nièce,  Virginie  Carpentier,  femme  Thomas,  demeurant 
avec  son  mari,  à  Montreuil.  La  succession  avait  une  impor- 
tance de  40  ou  50  mille  francs. 

La  femme  Thomas,  au  décès  de  la  dame  Duwart,  produi- 
sit un  testament  olographe  qu'elle  dit  être  émané  des  der- 
nières volontés  de  sa  tante  et  par  lequel  elle  était  instituée 
sa  légataire  universelle. 

En  vertu  dé  cet  acte ,  elle  a  été  envoyée  en  possession  de 
la  succession. 

Les  héritiers  Gillon  prétendirent  que  ce  testament,  daté 
du  3  juillet  1855  et  déposé  en  Tétude  de  M^  Sauvage ,  no- 
taire â  Boulogne ,  en  vertu  d'une  ordonnance  du  président  du 
Tribunal ,  n'était  pas  écrit  de  la  main  de  la  dame  Duwart. 

Par  suite,  et  après  avoir  obtenu  l'assistance  judiciaire,  ils 
demandèrent  la  nullité  de  ce  testament  devant  le  Tribunal 
de  Boulogne. 

Aux  termes  des  art.  1323  et  1324  G.  Nap.  disaient-ils, 
quand  des  héritiers  ou  ayants  cause  déclarent  ne  pas  recon- 
naître la  signature  ou  l'écriture  de  leur  auteur ,  la  vérifi- 
callion  en  est  ordonnée  en  justice,  et  cette  vérification  qui 
doit  avoir  lieu  suivant  les  règles  tracées  parle  code  de  procé- 
dure est  obligatoire  et  le  TYibunal  ne  peut  y  procéder  lui- 
même.  Cette  obligation  existe  même  pour  le  cas  où  il  y  a 
envoi  en  possession  du  légataire:  point  de  doctriïie  qui 
s'appuye  particulièrement  sur  la  jurisprudence  de  la  Cour 
de  Douai.  D'autres  Cours  d'appel  et  la  Cour  de  Cassation*  ont 
pu  quelquefois  juger  dans  un  sens  contraire ,  mais  la  Cour 
suprême  paraît  au  moin^,  depiiis  quelque  temps,  subor- 
donner la  question  de  preuve  à  faire  aux  rails  qui  se  produi- 
sent. Ôr,  dans  l'espèce,  ajoutait-on ,  les  circonstances  ren- 
dent suspect  le  testament  attaqué.  On  demandait  donc  d'abord 
la  nullité  du  testament  et  subsidiairement  on  offrait  de  prou- 
ver, en  cours  de  vérification,  plusieurs  faits  qui  tendaient 
à  démontrer  que  lé  testament  n'avait  pu  être  écrit  par  la 
dameDuwàrt.  Oh  concluait  encore  à  la  vérification  de  l'écritu- 
re tant  par  titre  que  par  experts  et  témoins. 

Lëtribûûâl  deBoûtôgne  a  rendu  le  jugement  suivant  à 
la  date  du  1SàoùH859  : 

JUGEMENT. 

<r  Atteriàu  qiie  lès  detnaiidèûrs  déclarent  ne  pas  recon- 
naître récriture  et  la  signature  Au  testament  olographe,  en 

TOME  XVIII.  3 


(34) 
date  da  3  juillet  1855,  attribué  par  les  défendeurs  à  la 
feue  dame  Duwart,  et  aux  termes  duquel  elle  aurait  insti- 
tué la  femme  Thomas  sa  légataire  universelle  ; 

»  Attendu,  dès -lors,  qu'il  devient  indispensable  de  recou- 
rir à  une  vérification  d'écriture  ; 

3)  Attendu  que,  des  documents  et  circonstances  de  la 
cause,  il  est  dès  à  présent  acquis  au  procès  que  la  femme 
Duwart  avait,  en  juillet  4853,  l'intention  de  tester,  ainsi 
qu'elle  Ta  fait  ;  qu'elle  était  en  relations  habituelles  avec 
la  femme  Thomas  et  lui  donnait  des  témoignages  d'affec- 
tion, tandis  que  les  demandeurs  lui  étaient  devenus  plus 
ou  moins  étrangers  ;  en  un  mot  que  toutes  les  présomptions 
sont  en  faveur  de  la  sincérité  du  testament  et  du  droit  in- 
voqué par  les  défendeurs; 

»  Attendu  que  si,  en  général,  c'est  à  celui  qui  veut  faire 
valoir  un  titre  à  en  démontrer  la  validité ,  ce  principe  ne 
saurait,  dans  l'espèce,  être  appliqué  d'une  manière  trop 
absolue,  de  façon  que  la  vérification  d'écriture  soit  néces- 
sairement mise  à  la  charge  des  défendeurs,  sans  avoir  au- 
cun égard  aux  diverses  circonstances  du  procès  ; 

y>  Attendu  qu'il  doit  être  tenu  compte  aux  défendeurs, 
tout  à  la  fois  des  présomptions  qui  militent  dans  leur  inté- 
rêt, et  du  caractère  ainsi  que  de  la  force  d'exécution 
reconnus  au  testament  olographe  par  les  art.  969  et  970 
C.  Nap.;  qu'on  ne  saurait  légèrement  et  sans  motifs  d'une 
valeur  particulière,  mettre  en  question  l'exiistence  et  l'effi- 
cacité d'un  mode  de  disposer  qui  est  sanctionné  par  la  loi, 
et  que  des  considérations  puissantes  de  famille  rendent  si 
usuel  dans  la  pratique  ; 

»  Attendu,  dès-lors,  qu'il  y  a  lieu  de  laisser  à  la  charge 
des  demandeurs  le  soin  d'établir,  au  moyen  d'une  vérifica- 
tion, que  le  testament  est  à  tort  attribué  à  la  feue  dame 
Duwart  ; 

»  Attendu,  d'autre  part,  que,  dans  le  cours  du  procès, 
les  demandeurs  eux-mêmes  ont  fourni  des  documents  qui 
paraissent  pouvoir  servir  de  termes  de  comparaison,  et 
qu'en  l'état  le  Tribunal,  croit  de  l'intérêt  des  parties  de 
vérifier  lui-même  les  écritures,  sauf  à  prescrire  ultérieure- 
ment d'autres  mesures  d'instruction,  si  le  cas  échéait; 


(35) 

»  Par  ces  motifs ,  jugeant  en  premier  ressort  et  en  ma- 
tière ordinaire,  le  Tribunal  dit  que  les  deux  testaments 
olographes,  le  premier  du  44  mai  1824,  le  second  du  3  juil- 
let 1855,  qui  ont  été  déposés  en  l'étude  de  Me  Louis  Sau- 
vage, notaire  à  Boulogne,  et  qui  sont  attribues  à  la  femme 
Duwart,  seront,  dans  les  derniers  jours  d'octobre  prochain, 
déposés  au  greffe,  sur  récépissé  du  greffier,  pour  y  demeu- 
rer jusqu'à  ce  qu'il  en  soit  autrement  ordonné;  que  les 
demandeurs  seront  tenus  de  comparaître  en  personne  à 
l'audience  du  4  novembre  prochain,  pour  s'expliquer  tant 
sur  les  documents  produits  au  procès  que  sur  toutes  autres 
pièces  dont  ils  entendraient  tirer  parti,  comme  termes  de 
comparaison  et  comme  moyen  de  démontrer  l'invraisem- 
blance des  écritures  attribuées  à  la  testatrice,  pour,  examen 
fait  desdites  pièces  et  des  deux  testaments,  soit  à  ladite 
audience,  soit  à  l'une  des  audiences  suivantes,  être  par  les 
parties  de  nouveau  conclu,  s'il  y  a  lieu,  et  par  le  Tribunal 
statué  ce  qu'il  appartiendra  ;  dit  que  la  signification  du 
présent  jugement  à  M^  Louis  Sauvage  sera  faite  àla requête 
des  demandeurs  ;  donne  acte,  au  surplus,  à  François  Duwart 
de  ce  qu'il  s'en  rapporte  à  justice  sur  les  conclusions  des 
demandeurs,  et  de  ses  protestations  et  réserves  contre  le 
testament  de  1853;  dépens  réservés.  & 

Appel  par  les  héritiers  Gillon.  Devant  la  Cour,  on  sou- 
tient de  nouveau  que  le  testament  olographe  étant  un  acte 
sous  seing-privé  aux  termes  de  l'art.  999  C.  Nap.,  celui 
qui  l'invoque,  quand  la  signature  et  l'écriture  en  sont  dé- 
niés, doit,  aux  termes  des  art.  1323  et  1324  du  même  Code, 
en  prouver  la  sincérité  à  l'aide  des  moyens  de  vérification 
établis  par  la  loi.  L'ordonnance  d'envoi  en  possession,  dit- 
on,  ne  statue  ni  ne  préjuge  rien  sur  la  sincérité  des  écriture, 
et  signature  :  elle  n'a  et  ne  peut  avoir  pour  objet  que  la . 
possession  provisoire  de  l'hérédité,  et  le  légataire  universel 
qui  veut  conserver  cette  possession,  en  présence  d'héritiers 
naturels  qui  dénient  le  testament,  est  oblige  de  prouver 

Îu'il  émane  véritablement  du  testateur.  C'est  donc  à  la  dame 
'homas,  se  disant  légataire  universelle,  que  doit  incomber 
la  charge  d'établir  la  sincérité  du  titre  dont  elle  argue,  et 
en  obligeant  les  héritiers  Gillon  à  prouver  la  fausseté  du 
testament,  le  jugement  du  Tribunal  a  violé  la  loi.  Quant  au 


(36) 

mode  de  vérification,  le  Code  de  procédure  civile tiace^ dans 
un  litre  spécial,  les  règles  à  suivre  pour  là  vérification  des 
écritures. privées.  Si  les  voies  d'instruction  indiquées  par  là 
loi  ne  sont  pas  les  seules  que  le  juge  puisse  suivre,  le  mode 
de  vérification  adopté  par  le  jugement  ne  peut  aboutir  à 
aucun  résultat  sérieux  ;  il  doit  eïi  ressortir  des  embarras 
plus  graves  et  des  frais  plus  considérables  que  de  Tpbser- 
vation  des  formes  légales.  Il  importe  par  suite,  dans  la 
cause,  de  procéder  à  une  expertise  régulière.  On  reproduit 
d'ailleurs  Tarticulalion  des  faits  produits  en  première'ins- 
tance,  lesquels  peuvent  rendre  dès  maintenant  le  testament 
suspect. 
La  Cour  à  confirmé  le  jugement  de  première  instance. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Adoptaùt  les  motifs  des  premiers  juges , 
met  rappéllatiôn  atl  néaiit,  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  soii  plein  et  entier  effet,  coùdamfie  les 
appelants,  etc. 

Du  24  janvier  4860.  \^^  chamb.  Présîd.,  M.  de  Moûlon, 
ier  présid.;  minist.  publ.,  È.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.; 
avoc>.  Mes  Lambert  de  Beâùliéu  et  Dùbem  ;  avou.,  W^  Boii- 
naire  etHuret. 


TESTAMENT.—  volontI. — sànité  d'esprit. — présomption 

LÉGALE.  —  ABSENCE  PARTIELLE  DE  RAISON.  —  ÎIÏONQMANIE 
MOMENTANÉE.  —  MOBILITÉ  VÈSPRÏT.  —  AFFAIBLISSEMENT 
DES  ORGAlsÉS.  —  APOPLEXÏE.  —  PREUVE  ADMÏSèÏBtE.  '■ — 
ARTICULATION  PRÉCISE. 

Pour  tester  vaïableifneiû,  il  siiffil,^  au  moment  du  iedammt, 
de  n'être  pas  ;pnvé  d'uHe  vçlon^  intelligente, et  libre,  et 
de  pouvoir  apprécier  la  nature  et  les  conséquences  de 
cet  àcfé, 

La  sànité  d^esprit  est  présumée  en  faveur  de  Vacte. 

Vinsanïié  ne  résulte  nécessairement  ni  d'absences  partielles 
de  rdisQv,,  ni  d'accès  de  morwmàmeçmofnimtanées  ne  se 
rapportant  pa$  à  V instant  ou  à  P époque  deû  confection 
du  testament,  ni  de  la  mobilité  de  là  volonté,  ni  de  Vaf- 
fàiblîssement  des  organes  produit  par  Pâpopkûoie. 

Pour  rendre  la  prmve  d'insanité  d'esprit  adfnissiBè^,  il 
/^^f  .îi^^  l^^.  circonstances  en  èoient  particularisais  et 
précisées  dans  les  articidations . 


(37) 

La  preuve  de  la  suggestion  ou  caplation  tendant  à  démon- 
trer la  fraude  et  le  dol,  comme  causes  de  nullité  d'un 
testament,  n'est  pas  admissible,  alors  que  les  manœuvres 
sont  imputées  à  d'autres  qu'à  ceux  à  qui  elles  auraient 
pu  profiter, 

La  violeme  propre  à  vicier  la  volonté  du  testateur  iie  peut 
être  présumée  et  donner  lieu  à  une  articulation  perti- 
nente, si  Von  allègue  la  séquestration  du  testateur,  alors 
que,  près  dé  lui,  étaient  admises  certaines  personnes, 
comme  son  filleul,  une  religieuse,  un  notaire.  (G.  Nap., 
arl.  904.)(lV 

(Lefebvre  C.  Plnchart  et  consorts.) 

Une  dame  Lefebvre,  habitant  Valençiennes,  y  est  décédée 
septuagénaire,  le  8  novembre  1858,  n'ayant  pour  héritiers 
que  des  collatéraux,  Pluchart  et  consorts,  avec  lesquels  elle 
n'avait  eu  que  très-peu  de  relations.  Elle  laissa  une  fortune 
considérable  qui  était  le  fruit  d^unè  communauté  économe, 
et  qui  n'avait  pas  eu  à  supporter  le  fardeau  de  la  famille. 
Son  mari  lui  avait  donné  tous  ses  biens  par  testament.  Celui- 
ci  avfiit  un  neveu  qui  habitait  Paris  et  qui  vint  quelquefois 
à  Valençiennes  visiter  sa  tante. 

A  là  date  du  20  juin  1858,  la  dame  Lefebvre  fît  un  testa- 
ment olographe  ainsi  conçu  : 

«  J'institue,  par  le  présent  testament,  M.  Louis-Alexandre 
Lefebvre,  mon  neveu,  mon  légataire  universel,  sans  aucune 
réserve  de  tous  les  biens  meubles  et  immeubles  que  je  pos- 
sède, pour  en  jouir  après  mon  décès.  » 

Six  jours  aprèjB,  elle  en  fil  un  autre  rédigé  de  la  manière 
suiyanta  : 

«  Ceci  est  mon  testament. 

»  Je  soussignée  Hénriette-Béatrix  Gonslan,  veuve  Charles- 
Louis  Lefebvre,  ai  fait  mon  testament  olograiphe  ainsi  qu'il 
suit  :  J'institue  monsieur  Louis-Alexandre  Lefebvre,  mon 
neveu,  riibn  légataire  universel,  en  pleine  propriété  de  tous 
les  biens  meubles  et  immeubles  que  je  laisserai  au  jour  de 
mon  décès,  et  qui  composeront  ma  succession,  sans  aucune 
exception  ni  réserve.  Je  révoque  tout  testament  àntériem* 
au  présent.  —  Ainsi  fait  et  rédigé^de  ma  main. 

1  A  Valençiennes,  le  26  juin  1858. 

3>  Signé  veuve  Lefebvre,  née  Constan.  > 

(i)  V.,  pour  la  jurisprudence  de  la  Cour,  notre  Tab.  gén.,  v»  Testa- 
ment, nofi  6et  suiv.  Adde  22  déc.  1852  (Jurisp.  H,  li3);  15  fév.  et  U 
mars  1854  (Jurisp.  12, 203)  ;  4  ao.ût  1855 <Juri?p.  1 3, 343)  ;  12  nov.  1856 
(Jurisp.  15,  71). 


(38) 

Et  le  3  no\embre  suivant,  cinq  jours  avant  sa  mort,  de- 
vant Me  Bultot,  notaire  à  Valenciennes,  était  passé  un  acte 
de  dernière  volonté  dans  lequel  on  lisait  : 

«  Je  déclare  révoquer  tous  testaments  ou  toutes  disposi- 
tions à  cause  de  mort,  même  tous  écrits  qu'on  aurait  pu 
me  faire  signer  sans  m'en  faire  connaître  l'importance, 
que  j'ai  pu  faire  jusqu'à  ce  jour. 

»  Je  prie  M.  le  doyen  de  Saint-Géi7,  M.  Capelle,  de  dire- 
des  prières  pour  moi,  et  je  charge  mes  héritiers  de  faire 
dire,  par  M.  Capelle,  dix  messes  pour  le  repos  de  mon  âme.  » 

Ce  testament  authentique  était  parfaitement  régulier  et 
attestait  la  sanitê  d'esprit  de  la  testatrice  au  moment  de  la 
confection  du  testament. 

Le  sieur  Lefebvre  a  demandé  la  nullité  de  ce  dernier 
acte,  pour  cause  de  dol  et  de  fraude  pratiqués  par  les  hé- 
ritiers Pluchart,  au  moyen  de  suggestion  et  captation,  et 
même  de  violence,  sur  la  testatrice  qui,  d'ailleurs,  suivant 
lui,  n'était  pas  en  état  de  sanité  d'esprit  au  moment  de  la 
confection  du  testament.  En  ce  double  regard,  il  articulait 
les  faits  suivants  : 

io  Que,  dès  sa  jeunesse,  M""e  veuve  Lefebvre,  qui  est 
décédée  à  l'âge  de  75  ans,  avait  rompu  toute  relation  avec 
sa  famille  qui  lui  avait  été  toujours  hostile,  et  que,  depuis 
le  décès  de  sa  mère,  arrivé  en  4831,  aucun  de  ses  collaté- 
raux n'avait  été  reçu  dans  sa  maison,  si  ce  n'est  dans  une 
ou  deux  circonstances  exceptionnelles  et  pour  en  être  aus- 
sitôt repoussé  ; 

2o  Que  la  dame  Lefebvre  avait  si  bien  résolu  de  ne  laisser, 
à  ses  collatéraux  qui  ne  lui  étaient  parents  qu'au  degré  de 
cousins  issus  de  germain,  aucune  partie  de  sa  fortune,  qu'en 
4833  elle  avait  institué,  par  testament,  son  mari  pour  léga- 
taire universel  ; 

3»  Qu'Alexandre  Lefebvre  était,  depuis  son  enfance,.habi- 
tuellement  reçu  par  elle  et  son  mari  dans  les  termes  de  la 
plus  intime  familiarité,  et  que  toutes  les  affections  des 
deux  époux  s'étaient  concentrées  sur  lui  ; 

Que,  par  leur  attitude  à  son  égard,  ils  avaient  fait  naître 
des  espérances  qui  déterminèrent  le  geni'e  d'éducation 
qu'a  reçu  ce  jeune  homme  ; 

4o  Que  la  fortune  patrimoniale  de  la  dame  Lefebvre  avait 
été  augmentée  dans  une  énorme  proportion  par  les  apports 
ou  les  économies  de  M.  Lefebvre,  et  que  celui-ci  ayant,  par 
son  testament,  laissé  tous  ses  biens  à  sa  femme,  elle  devait 
se  croire ,  conformément  au  vœu  exprimé  par  son  mari , 
obhgée  de  les  restituer  à  Alexandre  Lefebvre  ; 


5o  Que  M.  Lefebvre,  étant  décède  le  13  juin  1858,  Sla-" 
nislas  Pluchard,  de  Fontenay-aux-Roses,  se  présenta  le  15, 
à  huit  heures  du  matin,  à  la  maison  mortuaire,  où  il  péné- 
tra malgré  la  résistance  qui  lui  fut  opposée  au  nom  de 
Mme  Lefebvre  ; 

Qu'il  aborda  cette  dame  en  lui  disant  '.  «  Vous  ne  me  re- 
»  connaissez  pas,  ma  tante  ?  Je  suis  votre  neveu  de  Garn- 
ît bi^ai  :  c'est  moi  qui  ai  mené  votre  frère  a  Charenton  ; 
»  on  y  est  bien  soigné;  vous  auriez  raison  d\j  aller  aussi  ;  » 

6^  Que  Fattitude  menaçante  de  cet  homme,  son  langage 
indigne,  adressé  à  une  femme  de  75  ans  qui  venait  d« 
perdre  son  mari,  et  que  son  isolement  et  son  inexpérience 
des  affaires  livraient  sans  défense  à  toutes  les  agressions, 
révolta  la  dame  Lefebvre,  qui  fit  immédiatement  prier  un 
avoué  de  se  rendre  chez  elle,  pour  l'appuyer  de  ses  conseils; 

Que,  dans  sa  conversation  avec  cet  officier  ministériel, 
elle  raconta  ce  qui  venait  de  se  passer,  en  manifestant  toute 
son  indignation,  et  qu'elle  termina  en  disant  :  «  Qu'il 
i>  attende  au  moins  que  je  sois  morte,  pour  s* emparer  die 
»  ma  succession;  » 

7o  Qu'Alexandre  Lefebvre,  que  sa  tante  avait  fait  préve- 
nir, et  que  seul  elle  désirait  voir,  étant  arrivé  le  15  juin, 
se  vit  refuser  l'entrée  de  la  maison,  par  suite  des  mesures 
déjà  prises  dans  Tintérêt  des  collatéraux  ; 

Qu'on  renvoya  chez  M.  Dupire,  notaire,  pour  y  prendre 
l'autorisation  de  voir  sa  tante  ; 

Qu'en  relevant  à  peine  d'une  maladie  grave,  il  fut,  le 
jour  même,  à  la  suite  de  démarches  qui  dépassaient  la  me- 
sure de  ses  forces,  obligé,  par  une  rechute,  de  repartir 
pour  Paris,  sans  avoir  pu  remplir  le  but  de  son  voyage  ; 

Que,  dans  la  soirée,  M^e  Lefebvre  ayant  appris  qu'on  lui 
avait  interdit  sa  porte ,  envoya  une  de  ses  domestiques  à 
sa  recherche,  dans  les  hôtels  où  il  avait  l'habitude  de  des- 
cendre, et  fut  informée  qu'une  indisposition  l'avait  forcé 
de  repartir; 

8»  Qu'aussitôt  après  le  décès  de  M.  Lefebvre,  on  fit  pro- 
céder, dans  sa  maison,  à  l'apposition  des  scellés,  quoique 
sa  veuve  fût  son  unique  héritière,  tant  en  vertu  de  son 
contrat  de  mariage  que  d'un  testament,  qui  tous  deux 
étaient  déposés  dans  l'étude  de  M«  Dupire,  notaire; 

Que  cettte  mesure  fut  prise  sans  qu'aucun  des  héritiers 
de  M.  Lefebvre,  qui  seuls  avaient  ce  droit,  l'eût  demandée  ; 

Qu'elle  fut  provoquée  par  les  héritiers  présomptifs  de 
Mï«e  Lefebvre  et  prise  dans  leur  intérêt  ; 


(40) 

9o  Que  le  18  juin,  Stanislas  Pluchard  arracha  par  Tinti- 
timidation,  à  U^^  Lefebvre,  une  procuration  à  l'effet  de  la 
représenter  aux  opérations  de  l'inventaire,  et  que,  dès  ce 
moment,  il  se  posa  en  directeur  suprême  des  alïkires  de 
cette  dame,  qui  avait  déjà  manifesté  la  terreur  qu'il  lui 
inspirait;      . 

iQo  Que  pendant  les  premières  opérations  de  l'inven- 
taire, Stanislas  Pluchart  ayant  remarqué  que  M^^  Lefebvre 
conservait,  avec  soin,  un  sac  qui  ne  quittait  pas  son  bras, 
ne  craignit  pas  d'y  plonger  la  main  et  en  retira  des  objets 
de  toilette  et  des  billets  de  banque  qu'elle  avait  réservés 
pour  ses  besoins  personnels  ; 

14 o  Qu'Alexandre  Lefebvre  étant  revenu  à  Valenciennes, 
le  20  juin,  put  enfin  pénétrer  jusqu'à  sa  tante  ; 

Que  celle-ci  le  reçut  comme  un  sauveur,  avec  les  marques 
de  la  joie  la  plus  vive  et  de  la  plus  grande  tendresse  ; 

Que  le  même  jour,  elle  faisait  en  sa  faveur  un  testament 
olographe  par  lequel  elle  l'instituait  son  légataire  universel  ; 

42o  Que  pendant  l'entrevue  qui  eut  lieu  le  20  juin,  entre 
Mnie  Lefebvre  et  son  neveu,  Stanislas  Pluchard  survint  et 
fit  des  efforts  désespérés  pour  pénétrer  dans  la  chambre  où 
ils  s'étaient  enfermés  ;  qu'il  frappa  longtemps  à  la  porte  à 
coups  de  pied  et  à  coups  de  poing,  en  poussant  des  cris 
furieux,  et  ne  se  retira  qu'après  que  M.^^  Lefebvre  lui  eut 
signifié  qu'elle  entendait  rester  seule  avec  son  neveu ,  et 
qu'il  se  fut  assuré  que  ses  violences  et  ses  vociférations  ne 
produiraient  qu'un  scandale  inutile  ; 

i3o  Que  le  21  juin,  M"^©  Lefebvre  ayant  manifesté  à 
M.  Dupire  l'intention  bien  arrêtée  de  révoquer  la  procura- 
tion de  Pluchart  et  de  donner  tous  ses  pouvoirs  à  son  neveu 
Alexandre,  ce  notaire  lui  fit  reniarquer  qu'elle  allait  rompre 
avec  sa  famille  et  s'exposer  à  des  désagréments  sérieux  ; 

Que  M™e  Lefebvre  répondit  qu'elle  s'y  attendait,  mais 
qu'elle  n'en  était  pas  moins  déterminée  a  investir  de  ses 
pouvoirs  celui  qui  avait  sa  confiance  ; 

1>  Que  la  procuration  de  Stanislas  Pluchart  étant  révo- 
quée, les  collatéraux  annoncèrent  le  mêmejour  qu'ils  allaient 
mire  pourvoir  M^e  Lefebvre  d'un  conseil  judiciaire,  et  que 
la  demande  fut  formée  le  lendemain  22  juin; 

Qu'aussitôt  la  dame  Lefebvre  réunit  ses  conseils,  au 
nombre  desquels  se  trouvait  Alexandre,  et  annonça  l'in- 
tention de  combattre  une  prétention  dictée  par  la  cupidité 
seule; 

45o  Que,  le  26  juin,  le  bruit  s'étant  répandu  que  la  dame 


(41) 

Lefebvre  venait  de  fai^e  un  testament  en  faveur  de  son  ne- 
veu, les  collatéraux  renouvelèrent  leurs  tentatives  pour 
parvenir  jusqu'à  elle,  et  que  l'un  d'eux  éleva  la  prétention 
d'assister  à  l'inventaire,  prétention  qui  fut  repoussée  ; 

16^  Que  la  dame  Lefebvre  fut  frappée,  le  27  juin,  d'une 
attaque  d'apoplexie  qui  affaiblit  considérablement  ses  facultés 
intellectuelles,  et  qui  la  laissa  paralysée  de  la  moitié  du  corps; 
17o  Que  le  lendemain,  les  collatéraux,  prenant  cette  at- 
taque d'apoplexie  pour  prétexte,  transformèrent  en  demande 
en  interdiction  leur  demande  en  nomination  d'un  conseil 
judiciaire  ; 

Qu'au  moyen  de  ces  deux  actions,  ils  parvinrent  à  faire 
déposer,  entre  les  mains  de  M.  Dupire,  toutes  les  valeurs 
mobilières  composant  la  fortune  de  M«»e  Lefebvre,  et  à  faire 
nommer  ce  notaire  administrateur  de  la  personne  et  des 
biens  de  celle-ci  ; 

18^  Qu'Alexandre  Lefebvre,  qui,  assisté  de  sa  mère,  avait 
soigné  sa  tante  jusqu'au  24  septembre,  fut  obligé,  à  cette 
époque,  de  retourner  à  Paris  pour  rétablir  sa  santé  profon- 
dément altérée  ; 

Qu'au  moment  de  son  départ,  M^^e  Lefebvre  lui  fit  les 
adieux  les  plus  touchants ,  et  lui  donna  ce  qu'elle  avait , 
disait-elle,  de  plus  précieux  :  la  bague  de  sa  mère; 

19<*  Qu'après  le  départ  de  son  neveu,  la  dame  Lefebvre, 
livrée  aux  entreprises  de  ses  collatéraux  ,  fut  soumise  au 
régime  d'une  séquestration  absolue  ; 

Qu'au  milieu  des  privations  auxquelles  elle  était  systé- 
matiquement condamnée,  on  l'entendait  souvent  s'écrier  : 
«  Je  meurs  de  faim  et  de  soif;  » 

20»  Que,  pendant  cette  séquestration,  s' étant  trouvée  un 
moment  seule  avec  Barra,  son  filleul,  elle  lui  dit,  en  par- 
lant de  la  religieuse  qui  avait  été  placée  auprès  d'elle  pour 
la  soigner  :  «  Tu  vois  bien  cette  sœur,  elle  est  cent  fois  plus 
portée  pour  son  couvent  que  toi  pour  ta  maison;  » 

21o  Que ,  la  maladie  ayant  fait  de  rapides  progrès ,  la 
dame  Lefebvre  toinba  dans  un  tel  état  que,  le  3  octobre, 
on  dut  lui  administrer  le  sacrement  suprême  ; 

Que  ce  jour,  la  sœur,  descendant  avec  M.  Dupire,  lui  dit 
en  arrivant  dans  la  cour  de  la  maison,  avec  un  accent 
effrayé  :  «  Qusl  malheur  que  ce  soit  si  tôt!  qu*on  n*  ait  pas 

eu  le  temps  de  faire »  et  ajouta  d'autres  paroles  qui  ne 

purent  être  conîprises  ; 

Que,  depuis  cette  époque,  M""^  Lefebvre  ne  reprit  plus 
l'usage  de  ses  facultés  intellectuelles  ; 


(42) 

22»  Que,  le  11  octobre,  Alexandre  Lefebvre  envoya  à 
Valenciennes  une  lettre  qu'il  priait  de  communiquer  à 
sa  tante; 

Que  cette  lettre  fut,  avec  l'autorisation  de  M.  Dupire  , 
remise  à  la  sœur,  qui  promit  delà  lire  à  M^^  Lefebvre,  mais 
qui  n'en  fit  rien,  et  la  rendit  le  23,  sans  avoir  rempli  sa 
mission  ; 

23o  Qu'Alexandre  Lefebvre,  arrivé  le  23  à  Valenciennes, 
ne  put  pénétrer  jusqu'à  sa  tante  ; 

Que  la  sœur  et  le  médecin  lui  déclarèrent  successivement 
qu'elle  était  dans  un  tel  état  que  la  moindre  émotion  pou- 
vait lui  être  fatale,  et  que  sa  présence  la  tuerait  ; 

Qu'obligé  de  céder  à  ces  instances,  Alexandre  Lefebvre 
parlit  de  Valenciennes  le  27  octobre,  après  avoir  vu  seule- 
ment sa  tante  de  loin  et  pendant  son  sommeil  ; 

24o  Que  l'arrivée  d'Alexandre  Lefebvre  ayant  été  annon- 
cée le  23,  à  onze  heures  du  matin,  aux  personnes  de  la 
maison  de  la  dame  Lefebvre,  les  collatéraux,  dont  cette  ar- 
rivée pouvait  déranger  les  combinaisons,  firent,  dèB  le 
même  jour,  par  assignation  signifiée  à  quatre  heures  du 
soir,  reprendre  les  poursuites  en  interdiction  qui  étaient 
suspendues  depuis  le  30  juillet  précédent; 

25° Que,  du  25  au  30  octobre,  on  remarqua  certaines 
menées  qui  firent  supposer  que  l'on  s'agitait  pour  arracher 
un  testament  à  la  dame  Lefenvre,  et  que  le  mardi  26,  plu- 
sieurs personnes  et  un  notaire  ayant  été  introduits  dans  la 
maison,  le  bruit  se  répandit  que  le  testament  venait  d'être 
fait; 

26°  Que  le  2  novembre,  à  dix  heures  et  demie  du  soir, 
le  prêtre  qui  sortait  de  voir  M«ie  Lefebvre  déclara  qu'elle 
était  à  ses  derniers  moments;  et  que  le  3  novembre,  jour 
de  la  prétendue  révocation,  son  état  était  tel  que,  pour 
empêcher  le  bruit  de  la  rue  d'arriver  jusqu'à  elle  ,  on  dut 
étendre  de  la  paille  devant  la  maison  ; 

27o  Que  la  dame  Lefebvre  étant  décédée  le  8  novembre, 
on  parlait,  le  10,  dans  un  cabaret  de  la  rue  de  Famars,  des^ 
circonstances  de  ce  décès,  et  qu'un  des  témoins  instrumen- 
taires  de  l'acte  du  3  novembre  dit  que,  quand  la  dame  Le- 
febvre avait  signé,  elle  avait  demandé  «  si  ce  n'était  pas 

»  POUR  LA  FAIRE  ENFERMER.  » 

Le  Tribunal  de  Valenciennes,  le  15  avril  1859,  a  rendu, 
dans  la  cause,  la  décision  suivante  : 


(43) 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  les  époux  Lefebvre,  par  contrat  de 
mariage  passé  pardevant Me  Mabille,  notaire  à  Valenciennes, 
le  29  juillet  1809,  ont  déclaré  que  le  survivant  des  futurs 
époux  serait  propriétaire  de  tous  les  biens  meubles  qui  au- 
ront composé  la  communauté ,  et  usufruitière  de  tous  les 
biens  immeubles  délaissés  par  le  prédécédé  ; 

i>  Considérant  que  le  sieur  Lefebvre  est  décédé  le  13 
juin  4858; 

»  Considérant  que  la  dame  Lefebvre,  après  avoir  fait,  le 
26  juin  1858,  un  testament  olographe  par  lequel  elle  ins- 
tituait le  sieur  Alexandre  Lefebvre,  neveu.de  son  mari,  son 
légataire  universel,  a,  par  un  testament  authentique,  passé 
pardevant  Me  Bultot ,  notaire  à  Valenciennes,  le  3  novembre 
1858,  cinq  jours  avant  son  décès,  révoqué  tous  testaments  ou 
toutes  dispositions  à  cause  de  mort,  même  tous  écrits  quon 
aurait  pu  lui  faire  signer  sans  lui  en  faire  comiaître  l'im- 
portance antérieurement  audit  jour  ; 

i>  Considérant  qu'Alexandre  Lefebvre,  demandeur  au  pro- 
cès, attaque  le  testament  révocatoire  du  3  novembre  comme 
étami  Je  résultat  du  dol,  de  la  violence,  de  la  suggestion  et 
de  la  captation,  et  comme  n'ayant  pas  été  fait  dans  les  con- 
ditions exigées  par  l'art.  901  du  Code  Napoléon  ;  que,  de 
plus,  il  articule  des  faits  qu'il  demande  à  faire  déclarer  jj^r- 
tinents  et  admissibles,  et  qui,  s'ils  étaient  prouvés,  entraî- 
neraient, selon  lui,  la  nullité  du  testament  authentique  du 
3  novembre  précité  ; 

î  Considérant  que  si,  d'après  l'art.  901  du  Code  Napo- 
léon, pour  tester  il  faut  être  sain  d'esprit,  cette  disposition 
ne  doit  cependant  être  entendue  qu'en  ce  sens  que,  pour 
tester  valablement,  il  suffit,  au  moment  du  testament,  de 
n'être  pas  privé  de  l'exercice  d'une  volonté  inteUigente  et 
libre,  et  de  pouvoir  apprécier  la  nature  et  les  conséquences 
de  cet  acte  ; 

î  Qu'il  résulte  des  circonstances  du  procès,  que  la  dame 
Lefebvre  n'a  jamais  été  atteinte  d'une  infirmité  d'esprit 
organique ,  mais  qu'elle  aurait  éprouvé  seulement  des  ab- 
sences partielles   de  raison ,  et  des  accès  de  monomanie 


(44) 
momenlanée,  qui  ne  se  rapportent  pas  à  l'instant  ou  à  l'é- 
poque de  la  confection  du  testament  révocatoire  du  8  no- 
vembre 1858; 

3>  Considérant  que,  si  la  loi  confère  aux  tribunaux  le  droit 
de  rechercher  et  d'apprécier,  après  la  mort  du  testateur, 
quelle  était  la  portée  de  son  intelligence  et  s'il  était  sain 
d'esprit,  elle  leur  prescrit  en  même  temps  de  respecter  la 
volonté  du  testateur,  toutes  les  fois  que  cette  volonté  leur 
apparaît,  et  surtout  de  ne  pas  la  livrer,  sans  nécessité,  aux 
chances  toujours  dangereuses  d'une  preuve  testimoniale; 

»  Que  la  présomption  de  sanité  d'esprit  du  testateur  existe 
toujours  en  faveur  de  l'acte  ; 

5>  Considérant  qu'en  examinant  avec  attention,  et  en  ap- 
préciant, à  leur  juste  valeur,  les  faits  articulés,  on  est  forcé 
de  reconnaître  qu'ils  n'ont  pas  le  caractère  de  précision, 
de  netteté,  de  concordance,  nécessaire  pour  être  déclarés 
pertinents  et  admissibles; 

»  Que  de  l'ensemble  de  l'aiticulation,  fut-il  même  établi, 
on  ne  saurait  induire  la  nullité  de  l'acte  testamentaire  atta- 
qué, et  qu'à  défaut  de  pertinence,  la  preuve  n'en  doit  pas 
être  admise;  ' 

T>  Considérant  enfin  que  la  loi  investit  les  magistrats  du 
pouvoir  souverain  de  rejeter  toute  offre  de  preuve,  si  leur 
rehgion  se  trouve  suffisamment  éclairée  dans  l'état  de  la 
cause  ; 

»  Par  ces  motifs  : 

y>  Le  Tribunal ,  sans  s'arrêter  à  la  preuve  offerte,  quMl 
repousse  comme  inconcluante ,  non  pertinente  et  inad- 
missible , 

T>  Déboute  le  demandeur  de  ses  fins  et  conclusions,  et  le 

condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  Lefebvre.  Devant  la  Cour,  on  retrace  pour  lui 
les  faits  produits  et  articulés  eii  première  instance,  et  6'n 
ajoute  que  le  texte  même  de  l'acte  révocatoire  contient  la 
preuve  qu'il  n'émane  pas  de  la  volonté  de  la  testacrice. 
«  Les  expressions  techniques  qui  s'y  rencontrent,  dit-on ,  et 
»  îiôtainnienï  celles  de  dispositions  a  cause  de  mort,  n'oijt 
D  pu  être  dictées  par  une  femme  ignorante  des  affaires  et 
»  du  langage  légal.  Le  soin  de  révoquer ,  outre  l0s  testaments 


(45) 

»  et  les  dispositions  a  cause  de  mort  qu'elle  a  pu  faire,  tous 
j>  écrits  qu'on  aurait  pu  lui  faire  signer  sans  lui  en  faire 
»  connaître  l'importance,  indique  l'intervention  d'une  pen- 
»  sée  qui  ne  peut  être  la  sienne,  et  qui  veut  atteindre  des 
»  actes  qu'elle  ignore  et  dont  elle  suppose  seulement  l'exis- 
»  tence.  Si  la  veuve  Lefebvre  eût  été  capable  de  dicter 
»  cette  révocation,  elle  ne  l'eût  pas  conçue  dans  ces  termes 
»  \agues  et  confus. 

}>  Elle  se  fut  souvenue. qu'elle  n'avait  fait  que  deuxtes- 
»  tàriients  en  faveur  d'Alexandre  Lefebvre,  elle  les  eût  in- 
»  diqués  expressément,  et  elle  se  fût  bien  gardée  d'accuser 
»  les  défaillances  de  son  intelligence  et  de  sa  mémoire,  en 
»  révoquant  des  actes  qui  n'avaient  jamais  eu  d'existence 
»  et  qu'elle  aurait  signés  sans  les  comprendre. 

»  Ces  dernières  expressions  attestent  un  sentiment  de 
»  défiance  injurieuse  contre  Lefebvre,  sentiment  qiii  devait 
D  aiiinier  lés  intimés,  maïs  qui  né  pouvait  entrer  dans  le 
»  cœur  de  M.^^  Lefebvre. 

3>  La  TPédactipn  banale  de  la  révocation  dénonce  un  soin 
»  calculé  de  ne  pas  prononcer  le  çiom  d'Alexandre  Lefebvre, 
i>  gui  eût  pu  réveiller,  dans  l'âme  de  la  mourante,  le  sou- 
»  venir  de  ce  qu'elle  avait  fait,  la  conscience  de  ce  qui  se 
7>  passait,  et  l'avertir  du  danger  de  la  signature  qu'elle  allait 
»  donner. 

3>  Oh  lie  peut  donc  douter  que  cette  révocation,  étran- 
3>  gère  à  U^^  Lefebvre,  soit  l'œuvre  de  personnes  a  qui  le 
y>  PASSÉ  ÉTAIT  INCONNU,  et  qui  voulaient,  dans  leur  pré- 
»  voyante  cupidité,  anéantir  toutes  lés  dispositions  dont  leur 
»  inquiétude  leur  faisait  redouter  l'existence. 

»  Ali  surplus.,  cette  révocation  a  pour  résultat,  de  dé- 
»  pôiiiller  Aiéxanidre  Lefebvre  d'une  fortune  que  lui  réser- 
i>  vaieiit  la  natiire  des  choses,  la  justice  et  raffectjoii  de  sa 
•  »  tante,  au  profit  de  collatéraux  éloignés,  de  çousms  issus 
»  de  germains  que  Mn^e  Lëfebvlrè  n'avait  jamais  connus  ou 
»  dont  elle  avait  toujours  eu  à  se  plaindre,  et  qiii,  depuis 
»  la  mort.de  son  mari,  l'avaient  fait  succomber  a  d'odieuses 
3>  persécutions.  Une  telle  abdication  de  ses  affections  les 
»  plus  chères,  des  engagements  les  plus  ^crés,  des  senti- 
»  ments  lés  plus  naturels,  serait  à  elle  seule  la  preuve  que 
>  Tact è  du  3  novembre  n'avait  pu  être  fait  qu'à  ûiie  heure 
y>  de  démence  ou  d'abandon  de  toutes  les  facultés  de  son 
»  âme ,  bridée  par  la  lutté  trop  loiièiié  q(ù'éllè  avait 
1^  sputeatie.  » 

Si  l'acte  de  révocation  était  nul,  comme  oii  le  prétendait. 


(46) 
le  leslament  olographe  du  26  juin  revivait  dans  sa  force. 
La  Cour  a  confirmé  la  sentence  des  premiers  juges. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  touche  les  reproches  de  sugges- 
tion et  de  captation  : 

Attendu  que  s'il  en  est  question  dans  les  numéros  20  et  21 
de  Tarticulation,  elle  devrait  être  imputée  à  d'autres  qu'aux 
héritiers  du  sang,  et  qu'elle  aurait  été  vainement  tentée 
dans  un  intérêt  opposé  au  leur  ; 

En  ce  qui  touche  le  reproche  de  violence  : 

Attendu  qu'elle  ne  résulte  pas  des  faits  articulés  ; 

Que  la  prétendue  séquestration  est  démentie  par  la  pré- 
sence d'une  reUgieuse,  d'un  sieur  Barra,  filleul  de  la  tes- 
tatrice, et  les  visites  du  notaire  Dupire,  administrateur 
nommé  par  justice,  l'entrée,  dans  la  maison,  du  mandataire 
de  Lefebvre,  du  consentement  du  notaire  Dupire  et  de  Le- 
febvre  lui-même  ; 

Qu'au  surplus,  on  ne  concevrait  guère  la  suggestion  et 
la  violence  employées  par  un  ou  deux  héritiers  dans  l'in- 
térêt de  tous  ceux  qui  doivent  être  appelés  à  la  succession, 
lorsqu'ils  auraient  pu  s'en  servir  dans  leur  intérêt  exclusif; 

En  ce  qui  touche  Tinsanité  d'esprit  : 

Attendu  que  si  la  dame  Lefebvre  a  pu,  à  certaine  époque, 
exhéréder  sa  famille  et  investir  un  neveu  de  son  mari  de 
toute  sa  fortune,  provenant  de  son  patrimoine  et  des  éco- 
nomies considérables  que  cette  fortune  a  permis  d'accu- 
muler, elle  a  pu  également,  si  elle  a  persisté  dans  cette 
volonté  tant  que  le  légataire  institué  a  été  près  d'elle,  dans 
les  derniers  jours  de  sa  vie,  revenir  aux  sentiments  de 
famille,  changer  de  volonté  et  vouloir  que  tous  ses  parents 
profitassent  de  sa  fortune,  en  oubliant  les  motifs  de  reproche 
qu'elle  aurait  pu  avoir  contre  certains  d'entre  eux  ; 

Que  rien  dans  l'articulation,  en  la  supposant  justifiée,  ne 
prouve  la  démence,  lors  de  la  confection  du  testament  du 
3  novembre  1 858  ; 

Attendu  que  la  dame  Lefebvre  n'était  pas  dans  un  état 
habituel  de  démence  ;  (Jue  la  preuve  en  résulte  du  testa- 
ment dont  Lefebvre  prétend  s'armer  ; 


(47) 

Attendu  que  si,  dans  les  n^s  16  et  24,  il  est  dit  que  Tapo- 
plexie  affectait  considérablement  ses  facultés ,  et  que,  de- 
puis le  3  octobre,  elle  n'en  reprit  plus  l'usage,  cette  articu- 
lation manque  de  précision  ; 

Qu'il  faut  dire  en  effet  quels  faits,  quels  actes,  quelles 
paroles  signalent  l'insanité  d'esprit; 
'  Attendu  qu'il  résulte  à  l'évidence  de  l'interrogatoire  de 
la  dame  Lefebvre,  du  27  juillet,  qu'à  cette  époque  elle  jouis- 
sait des  facultés  nécessaires  pour  faire  un  teslament  ; 

Attendu  que,  le  24  septembre,  l'appelant  lui  rendait  des 
comptes  et  en  recevait  décharge  ; 

Attendu  qu'il  résulte,  du  testament  authentique,  que  la 
dame  Lefebvre  savait  qu'elle  avait  précédemment  fait  des 
testaments,  et  qu'elle  pousse  la  précaution  jusqu'à  révoquer 
les  écrits  qu'on  aurait  pu  lui  faire  signer  ; 

Qu'elle  fait  des  dispositions  pieuses  et  en  charge  ses 
héritiers,  en  nommant  l'ecclésiastique  auquel  elle  en  remet 
le  soin; 

Que,  par  lui-même,  le  testament  n'offre  rien  que  de  con- 
forme à  la  raison  ; 

Attendu  que  si  les  craintes  manifestées  suivant  le  n»  27 
de  Tarticulation,  par  la  dame  Lefebvre  à  un  témoin  instru- 
mentaire,  peuvent  faire  croire  qu'elle  était  assiégée  de 
terreurs  chimériques  après  avoir  signé  l'acte  du  3  novem- 
bre, elles  ne  justifieraient  pas  que  cette  femme  n'ait  pas 
voulu  alors  révoquer  ses  testaments  antérieurs  ; 

Que  ce  témoignage  isolé,  démenti  du  reste  par  l'attesta- 
tion du  témoin  lui-même,  dans  l'acte  authentique,  que  la 
testatrice  lui  a  paru  saine  d'esprit,  ne  saurait  suffire  pour 
prouver  l'insanité  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

Sans  s'arrêter  à  la  preuve  offerte  comme  irrelevante; 

La  Cour  met  l'appellation  à  néant,  ordonne  que  le  juge- 
ment dont  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  6  janv.  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  mini«t. 
pubL,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc.  Mes  Théodore  Bac  (du 
barreau  de  Paris),  Duhem  et  Pellieux;  avou. ,  M^s  Legrand, 
Lavoix  et  Estabel. 


(48) 
lo  ABUS  DE  BLANCS-SEINGS.  —  remise.  —  présomption. 

—  NATURE  ET  CONTEXTE  DE  L'ÉCRIT.  —  COMMENCEMENT  DE 
PREUVE  PAR  ÉCRIT.  —  CHOSE  JUGÉE. —  PARENTÉ. — EXCUSE 
LÉGALE. 

2o  ABUS  DE  CONFIANCE.  —  REMISE  DE   TITRE.  —  COMMENCE- 
MENT DE  PREUVE  PAR  ÉCRIT.  — ^^  PRÉSOMPTION.  —  INTERRa- 

GATOIRE  DU  PRÉVENU.  —  PROCÈS-VERBAL.  —  SIGNATURE. 

CARACTÈRE.  —  PRESCRIPTION.  —  INTÉRÊTS  DE  SOMMES  NON 
DUES.  —  PARENTÉ. —  AFFINITÉ.  —  GENDRE. 

80  ESCROQUERIE  (TENTATIVE  D'). — CARACTÈRE. — MANŒUVRES. 

—  PIÈCES  INCRIMINÉES  DE  FAUX.  —  ORDONNANCE  DE  NON- 
LIEU. —  DETTE  SUPPOSÉE  ET  ALLÉGUÉE. —  OFFRE  DE  REMISE 
DE  TITRES. 

¥  JUGE  d'instruction. —  INFORMATION  REQUISE. — ÉTENDUE. 

—  CONSTATATIONS  ACCESSOIRES.  —  DÉLITS  CONNEXES. 

\^  Le  commencement  de  preuve  par  écrit  d'une  remise  de 
blancs-seings,  dont  il  a  été  fait  un,alms  criminel,  peut 
s'établir  sur  des  présomptions  tirées  de  la  nature  et  du 
contexte  de  V écrit  constituant  le  corps  du  délit.  (C.  pén., 
art.  407;  C.  Nap.,  art.  1347.) 

Lorsqu'un  premier  arrêt,  en  matière  de  prévention  d'alms 
de  blanc-seing,  a  jugé  qiCil  existait  un  commencement 
de  preuve  par  éùrit  de  la  remise  du  blanc-seing ,  et 
qu'ainsi  l'action  pvJ)lique  était  recevable,  il  y  a  clwse 
jugée  sur  cette  question  préalable,  et  l'arrêt  de  condam- 
nation qui  intervient  peut  se  baser  uniquement  sur  les 
témoignages  et  présomptions.  (C.  d'inst.  crim.,  art.  416.) 

2°  Peut  être  considérée  comme  commencement  de  preuve 
par  écrit  de  l'obligation  remise  à  celui  qui,  en  raison  de 
cette  pièce ,  est  prévenu  d'abus  de  confiance ^  la  réponse 
faite  par  le  prévenu  dans  un  interrogatoire  judiiiàire , 
de  laquelle  réponse  peut  être  induite  mie  présomption  de 
cette  remise.  — Il  n'irhpôrteque  le  prévenu  ait  refusé  de 
signer  le  procès-verbal  de  l'interrogatoire.  (C.  pén.,  ë!vt. 
408;  C.  Nap.,  art.  1347.) 

Celui  ^qui,  après  avoir  placé  fiypothéçairentent ,  sous, son 
mm  et  à  son  j^rofit  personnel,^  une  somme  qui  hii  avait 
été  remise  à  titre  de  mandat  et  à  charge  d'en  faire  uri 
emploi  déterminé,  a  comniis  un  abus  de  confiance  qu*it 
a  d* ailleurs  prescrit,  ne  se  rend  pas  coupable  d\un  nou^ 
veau  délit  en  percevant  les  intérêts  de  cette  soinme.  (C. 
pén.,  art.  408.) 


(49) 

Le  mari  do  la  belle- fille  de  cdui  au  préjudiee  de  qui  ont  élé 
commis  des  abus  de  confiance  ou  de  blanc-seing,  ire  peut 
être  conddéré  comme  son  parent  ou  son  allié  pour  échap^ 
per  à  la  pé%ialité  de  droit  commun,  et  n'être  soumis  qu'à 
des  réparations  civiles.  (€.  péa.,  art.  380.) 

3*  Doit  être  condamné  comme  ayant  commis  le  délit  de  /en- 
iaiim  dt  escroquerie  celui  qui,  par  des  manœuvres  frau^ 
duleuses,  a  fait  tout  ce  qu  il  a  pu  pour  se  faire  remettre 
et  s'approprier  des  valeurs  et  autrui,  alors  même  que, 
prévenu  de  faux  pour  les  actes  sur  lesquels  il  appuyait 
^es  manœuvres,  il  y  aurait  eu  ordonnance  de  non-lieur, 
quant  à  ce  dernier  délit.  (C.  pén.,  art.  405.) 

Ne  constituent  pas  les  manœuvres  frauduleuses  nécessaires 
pour  établir  la  tentative  d^ escroquerie^  le  }aU  d! avoir 
réclama  des  sommes  dt argent  pour  dommages^intérêts  ou^ 
indemnités,  avec  sommation  et  offre  de  remettre,  en  cas 
de  payement  et  contre  récépissé,  toute  note  ou  document 
établissant  la  dette.  (G.  pén.,  art.  405.) 

4<>  Le  juge  d^  instruction,  ^aisi  if  une  information  pur  le 
procureur  impérial,  peut  instruire  non-seulement  sur  le 
fait  et  les  circonstances  qui  font  V objet  spécial  du  réqui- 
sitoire, mais  encore  constater  tout  ce  qui,  dans  le  cours 
de  ï information,  est  porté  à  sa  connaissance,  alors  sur- 
tout que  les  faits,  révélateurs  de  différents  délits,  ûnt  un 
rapport  direct  avec  le  fait  principal  qui  a  motivé  <xtte 
iïiforwxition.  (G.  inst.  crim.,  art.  61,)  (1), 

(Minii^.  publ.  C,  fieroubaîx.) 

Au  mois  de  ttiai  4859,  vok  réquisitoire  dtt  procureur  im- 
périal, près  le  Tribunal  d'Avesnes,  a  ordonné  une  infcwrma- 
tion  cridMineUe  coiitre  un  sieur  Deroiibaix,  commis  principal 
des  contribulions  indirectes  à  Maubeuge.  L'information 
deraît  porter  sur  des  abus  de  blancs-seings  commis  au  pré^ 
judice  d'un  sie«r  Wayenburgh^  de  Cassel,  dont  la  belle-fifte 
avait  épousé  Deroubaix,  et  d'un  faux  en  écriture  privée 
commis  au  préjudice  d'un  sieur  Lafére,  de  la  même  ville. 

fiaifô  le  «ours  da  J'instruetion  se  révélèrent  des  faits  qui 
parurent,  ^u  juge  d'ineU^uction,  avoir  le  caractère  d'abus 
de  ooi^anee:  et  de  tentative  d'escroquerie.  Par  suite,  le  pré- 
vemL  Deroubaix  fut  renvoyé,  sous  ces  trois  chefs ,  devant 
le  Trâbuftal  :^rrectic«mél  d'Avesnès. 


T  I  t  m         II       I  I     1       II  >■        I   I     I !■   I  II  I  I 

Xi)  V.  Faustifi  Ilélic,  imt.  crim.,  t.  5,  p.  169, 
TOME  XVIII, 


(52) 

»  Qu'ainsi  Wayenburgh,  bfau-père  de  la  itmmé  Derou- 
baîi  cbrtîme  second  mari  de  sa  rnéiej  n'étant  pas  sort  pa- 
rent, mais  seulement  son  âïliè,  il  n'y  a  point  d'affiililè  ou 
alliance  en  ligne  directe  éiitre  lui  et  le  prévenu,  mari  de  sa 
bclle-fiile; 

y>  Que  Deroubaix  ne  pourrait  par  suite,  en  vertu  de  l'art. 
380  C.  pén.,  obtenir  le  bienfait  de  l'impunité  pour  les  abus 
dtî  confiance  et  de  Wancs-scihgs  dont  il  se  serait  rendu 
cèupable  envers  WaSfenburgh  ; 

»  ÀltfendUv  à  la  vérité,  que  les  délits  d'abus  de  confiauce 
et  de  blancs-seings  présupposent  la  reràise  volontaire  de 
valeurs  et  de  blancs-seihg-s  pour  un  usage  quelconque  ; 

))  Que  le  fait  générateur  d'une  obligation  contracluellô 
est  soumise^  pour  sa  preuve,  aux  régies  des  art.  1341  et 
1347  C.  Nap.  ; 

»  Mais  otlettdu,  à  TégTird  dbs  abus  de  confiance  que  le 
prévemi,  tout  en  niant  sa  cuJpabiiifév  a  riecénnu  dans  se» 
interrogatoire  de\'ïint  M.  le  juge  d'insti^uclion,  qWil  recevait 
tout  et  payait  tout  ;  que  l'on  trouve,  chiîis  cette  reconnais- 
sance, tout  au  moins  tïn  commencement  de  preuve  par 
écrit  de  h  rcmifec  volontaire  dés  Sommes  et  valeurs  que 
Deroubaix  se  itérait  appropriées  au  préjudice  de  Wàyen- 
burgh  ; 

1^  Que  le  refias 'de  ^griattiré  du  jpréveûu,  au  procès^vérbal, 
fie  peut  enlèvera  cette  reconnaissance  la  force  légale  qu'elle 
peut  avoir  { 

I  Attendu,  à  l'égard  des  «tra's  èe  blaÉCô-seings,  que  lé 
contexte  embarrassé  et  la  fortaè  étrange  des  biUët-s  remplis, 
les  40  et  15  janvier  1857*,  par  Deroubaix  ou  par  uift  tiers, 
dont  il  s'est  approprié  l'ôeriturc^  sur  des  morceaux  de  pa- 
pier qui  Â'ètàie^nt  évidemment  pas  destinés  à  cet  emploi, 
rendent  extrêmement  vraisemblable  ia  remise  volontaire 
des  blancs-seiftgs  allégués  par  Wayenbûrgli,  pour  un  tout 
autre  issagfe  que  celui  qu'dn  aurait  fait  Deroiibaix; 

ï  Que  l'on  y  trouve  donc  bien  le  commencement  de 
prcAn'e  par  écrit  dotft  parlé  l'art*  1847  G.  Nap.j 

»  Le  TrfWuïial  déclare  reoévable  l'adiéii  du  nàinistèrfe 
JîubUo,  cbnli'e  îe  :^évenu  CerQwbai»,  'sikt  toûé  les  cl»ef$  de 
la  prévention; 


(5â) 

»  Bit  qu'il  sera  passé  onlvQ  au  jugement  sur  le  fopd  ; 

»  Frais  de  Fineident  à  la  charge  du  préveuu,  lui  donnant 

acte  de  ce  qu'il  n'a  entendu  accepter  le  débat  que  sur  lei^ 

fins  de  non-recevoir,  qu'il  qualifie  de  questions  préjudi- 
cielles. > 

Appel  par  Deroubaix.  Pour  lui,  devant  la  Cour,  on  repro- 
duit, dans  des  conclusions  écrites,  les  objections  faites  à  la 
prévention  devant  le  Trjbunal  d'Av^snes* 

La  Cour  a  rendu  la  décision  suivante  : 

'  4  ' 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Sur  la  première  fin  de  non-recevoir  : 

Attendu  que,  dumpmentoù  le  juge  d'instruction  a  été 
requis  parle  procureur  iinpériAl  d'informer  sur  u^  fqit 
déliclif  quelconque,  il  peut,  sans  obligation  rigoureuse  à^ 
communiquer  chaque  fois  au  minjstère  publjc  et  s^ns  nou- 
veau réquisiJtoiro  de  *celui-d,  çoqlinuer  d'informer,  non 
seulement  sur  le  fait  et  Je^  circonstances  qui  fonf.  rol>jôî. 
spécial  du  premier  réquisitoire,  niais  e^icore  constater  tout 
ce  qui,  dans  le  cours  de  l'information,  est  porté  A  sa  con- 
naissance, surtout  lorsque,  confine  dans  l'espèce,  l^s  faits 
ont  un  rapport  direct  avec  le  fait  principal  qui  a  motivé 
J'iiïformalioin  ; 

Sur  la  deuxième  fin  de  ^on-recevoîr  : 

AUejfidu  que  l'art,  4^5  G.  peu,  p'atteipit  pas  peuleo^^rit 
rescro.querie,  maip  çiussi  la  iQntative  do  ee^délk,  et  qu'e» 
dîstingqaJ[rt  aijipi  l'esprogueriç  de  la  t^^i^tiyô,  cet  arliple 
n'a  évideramejat  pas  confondu  et  ne  pouy^,it  confondra  le^  v 
caractères  constitutifs  de  l'un  et  de  l'autre,  pui^ue  l'es- 
croquej^jc  est  le  délit  consommé,  et  que  h  tentative  n'est 
qu'un  coramei3Lcameftt  d'exécution  qui  n'a  été  suspendu  et 
n'a  mauqué  son  effet  que  par  des  circonstances  indépen- 
dantes de  la  yftlonté  de  son  auteur  ; 

Sjut  h  .troisième  fin  de  non-r.eceyoir  : 

;\tte]iidj|  ^H^  la  reconnaissance  du  11  mars  1857,  arguée 
defaux,  bien  qu'écartée  de  ce  obef  Pf^r  rordonuanco  de 
non-lieiudu/Ç  septeopabre  1859  ayant  fp^ce  de  chose  jugée, 
a  pu  cependant  servir  d'élément  à  l'inculpatiop  de  tenta- 
tive d'escroquerie,  et  potiver  ainf  i  de  ce  chef  le  renvoi  laa 
police  correctionnelle; 


(5/0 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

La  Cour  met  l'appellalion  au  néant,  confirme  le  juge- 
ment dont  est  appel,  et  condamne  le  prévenu  aux  frais  de 
rincident  ; 

Ordonne  qu'à  l'audience  du ,  il  sera  plaidé  au  fond. 

■ 

Du21novemb.  1859.  Chamb.  corr,  Présid.,  M.  Franco- 
ville  ;  rapp.,  M.  Minart,  cons.  ;  minist.  pub.,  M.  Carpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc,  M^s  Talon  et  Pillion(du  barr.  d'Avesnes). 

II  fut  en  effet  plaidé  au  fond,  et  la  Cour  a  prononce  un 
deuxième  arrêt  ainsi  conçu  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'il  résulte  de  la  procédure  et 
des  débats  la  preuve  complète ,  qu'à  diverses  reprises 
Wayenburgh  a  confié  des  blancs-seings  à  Deroubaix  ; 

Que  les  remises  peuvent  d'autant  moins  être  déniées , 
que,  vers  la  fin  de  1856,  la  femme  du  prévenu  elle-même 
a  détruit,  en  présence  de  témoins,  deux  de  ces  blancs-seîngs 
en  même  temps  qu'un  troisième  émanant  de  son  oncle  ,  en 
disant:  «Tenez,  voilà  encore  des  blancs-seings  de  mon 
père ,  de  ma  mère ,  de  mon  oncle  de  Dunkerque  ;  qu'est-ce 
qu'il  voulait  encore  faire  de  cela  ?  )>  ; 

Attendu  que  si  l'on  examine  l'état  matériel  des  pièces 
incriminées,  leur  forme,  leur  contexte  ,  leur  écriture  irré- 
gulière, l'étrange  division  des  conventions  inscrites  sur 
les  deux  faces  du  papier,  sous  là  date  du  10  janvier ,  la  si- 
gnature de  Jean  Wayenburgh,  sans  bon  ni  approuvé,  sur  le 
reçu  du  15  janvier,  ôri  ne  peut  les  regarder  comme  des 
titres  sérieux  et  vrais  ; 

Attendu  que  Je  compte  qui  se  trouve  sur  une  des  faces 
du  papier  daté  du  10  janv. ,  ainsi  que  l'approbation  et  la 
certification  écrites  au  revers  de  ce  compte ,  le  tout  de  la 
main  de  Deroubaix,  sont  à  la  fois  inconciliables  avec  les 
faits  établis  et  destructifs  des  droits  et  des  intérêts  de 
Wayenburgh  qu'il  s'agissait  de  constater  et  de  garantir  ; 

Qu'en  effet  l'on  ne  comprend  pas  comment,  immédiate- 
ment après  avoir  passé  l'acte  authentique  par  lequel  De- 
roubaix se  reconnaissait  débiteur  de  30,100  f., —  conférait 
hypothèque    pour  la  garantie   du  payement ,  —  stipulait 


(55) 
un  terme  de  trois  ans  pour  se  libérer,  —  les  parties  air- 
raient  le  même  jour,  à  Tinstant  même ,  reconnu  que  les 
trente  mille  cerlt  francs  étaient  éteints  à  concurrence  de 
5/6^,:  et  consigné  un  fait  de  êette  importance  dans  Tespaco 
resserre  d'un  papier  étroit  et  informe  ; 

Qu'en  outre  il' résulte  des  renseignements  fournis  et  des 
dépositions  faites  par  le  juge  de  paix  de  Cassel,  que  dans. 
la  réunion  qui  eut  lieu  en  sa  présence,  il  fut  positivement 
convenu  que  lès  30;l()0  f.  ,  dus  par  DcroulDaix,  feraient 
l'objet  d'une  obligation  authentique,  resteraient  en  dehors 
du  compte  à-  faire  entre  les  parties  et  que  ce  compte  porte- 
rait d'une  part^ur  les  deniers  pupillaires  dus  àDerôubaix  du 
chef  de  sa  femme,  et  d'autre  part  sur  les  valeurs  mobilières 
appartenant  aux  époux  Wayenburgh ,  et  que  Deroubaix 
avait  retenues  par  devers  lui  ou  dont  il  avait  fait  emploi  à 
son  profit  personnel,  «  valeurs  plus  que  suffisantes,  esl-il 
dit ,  pour  co^uvrir  toutes  Ses  prétentions  »  ; 

Alteftdu  quelesiarlicles.  du  prétendu  compte  inscrits  au 
passif  de  Wayenburgh  sont  toits  méconnus  et  contestés  par 
lui  cl  qtic  les  faits,  circonstances  et  présonqptions  de  la 
cause ,  notamment  les  dépositions,  et  renseignements  éma- 
nés du  juge  de  paix ,  ainsi  que  les  pièces  qui  se  trouvent 
en  la  possession  de  Wayenburgh ,  tendent  et  concourent  à 
justifier  ses  dénégations; 

Attendu  que  si,  en  plaçant  hypothécairement  sous,  son 
nom  et  à  son  profit  personnel,  une  sominè  qui  lui  avait  été 
remise  à  titre  de  mandiat  et  â  charge  cren  faire  un  emploi 
déterminé,  dans  Tintérêt  du  propriétaire ,  Deroubaix  s'est 
rendu  coupable  du  défit  d'abus  de  confiance  ;  ce  défit ,  com- 
mis en  1855  ,  était  prescrit  bien  avant  réquisitoire  à  fin 
d'instruction  portant  date  du  7  mai  dernier; 

Attendu  que  si  en. exigeant  par  voie  de  commanderiient 
et  en  percevant,  au  mois  de  mars  1859,  deux  années  dés 
intérêts  de  cèttç  somme  alors  échues,  le  prévenu  a  com- 
mis une  action  déloyale,  il  faut  néanmoins  reconnaître  que 
ces  faito  ne  peuvent  constituer  un  nouveau  défit  d'abus  de 
confiance,  les  intérêts  pajc  lui  perçus  ne  lui  ayant  été  reniis 
à  ^ucun  des  litres  spécifiés  en  Tart.  408  C.  Pon.  ni  à 


l 


Kii 


charge  de  les  rendre  ou  représenter  ou  d'en  faire  un  emploi 
dclerminé  ; 

Ou' eu  conséquence  le  chef  d'abus  de  confiance  concer- 
nant les  intérêts  de  la  créance  Priera  doit  être  écarté  ; 

Que  s'il  a  été  clairement  établi  parla  procédure  et  le«  dé- 
bats que  Lafère  n'a  jamais  été  débiteur  envers  Deroubaix 
ni  des  trois  cents  francs  à  titre  de  dommages-intérêts,  ni 
des  deux  cents  francs  pour  indemnité  de  location  faisant 
l'objet  de  la  sommation  du  15  avril  1859 ,  on  ne  peut  léga- 
lement voir  dans  cette  sommation  ni  dans  l'offre  do  remet- 
tre audit  Lafère,  en  cas  de  paiement  et  contre  récépissé,  tou- 
te note  ou  document  établissant  la  dette,  les  manœuvres 
frauduleuses  aux  fins  prévues  et  punies  par  l'art.  405  C.  pén.  ; 

Par  ces  motifs ,  la  Cour  confirme  le  jugement  dont  est 
appel,  en  ce  qu'il  déclare  Deroubaix  convaincu  du  délit 
d'abus  de  blanc-seing,  pour  avoir,  sur  deux  blancs-seings  qui 
lui  avaient  été  confiés  par  Wayenburgh ,  écrit  frauduleuse- 
nient,,  avec  les  dates  des  10 et  15  janvier  1,857,  des  conven- 
tions qu'ils  n^étaient  évidemment  pas  destinés  à  constater 
et  qui  étaient  de  nature  à  compromettre  la  fortune  dudit 
Wayenburgh; 

Déclare  que  le  délit  d'abus  de  confiance,  ainsi  que  le  dé- 
lit de  tentative  d'escroquerie  aidmis  comme  constants  par 
les  premiers  juges ,  ne  sont  pas  suffisamment  établis  ; 

En  conséquence  condamne  ledit  Deroubaix  à  la  peine  do 
2  années  d'emprisonnement  et  par  corps  à  50  f.  d'amende  ; 

Prononce  contre  lui,  à  dater  du  joui*  où  il  aura  subi  sa 
peine,  l'interdiction  pendant  5  ans  des  droits  mentionnés  en 
l'art.  42  C.  pén.; 

Le  condamne  en  outre  aux  frais,  etc. 

Du  20  décemb.  1859.  Ghamb.  correct.  Pi^id.> M.  Franco- 
ville,  conseill.  ;  rapp.,  M.  Minart,  conscill.  ;  minist.  public,, 
M.  Carpentier,  avoc.-gén.  ;  avec,  M^  Talon. 

Poun^oi  en  Cassation.  On  y  faisait  valoir  les  moyens  in- 
voqués contre  le  premier  arrêt  confirmatif  du  jugement  du 
Tribunal  correctionnel  d'Avesnes,  et  on  s'était  pourvu  con- 
tre cet  arrêt  en  même  temps  que  contre  le  second ,  c'est- 
à-dire,  pour  le  premier,  après  lô  délai  imposé  pour  se  pour- 
voir contre  les  arrêts  définitivement  rendus  en  matière  Cri- 


(57) 

minelle.  N'y  avait-il  pas  chose  jugée,  ou  bien  le  droit  de  se 
pourvoir  n'avait-il  pas  été  staspendu  par  l'instance'  criminelle 
touîours  ouverte  jusqu'à  la  prononciation  des  deux  arrêts? 
La  Cour  suprême  a  décidé  qu'il,  y  avait  chose  jugée. 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  —  Sur  la  question  préalable  de  savoir  si  la 
poursuite  du  ministère  public  était  recevable  en  ce  qui  con- 
cerne la  prévention  d*abus  de  blanc-seing,  parce  que  les 
actes  argués ,  portant  sur  des  conventions  d^une  valeur  au 
dessus  de  450  francs,  le  fait  de  leur  remise  ne  pouvait  être 
débattu  par  les  voies  de  preuves  admises  en  matière  Crimi- 
nelle, à  moins  qu'il  n'existât  pas  un  commencement  de 
preuve  par  écrit  ; 

Attendu  que  le  jugement  correctionnel  du  27  septembre 
1859,  décide  qu'il  résulte  àes  faits  et  circonstances  qu'il 
spécifie,  que,  dans  l'espèce,  il  y  a  le  commencement  de 
preuve  par  écrit  déterminé  par  l'art.  1347  C.  Nap.  ; 

Attendu  que  sur  l'appel  interjeté  par  le  prévenu ,  le  juge- 
ment a  été  confirmé  par  arrêt  de  la  Cour  impériale  de 
Douai,  du  21  nov.  1859  ; 

Attendu  que  cet  arrêt  qui  était  définitif  sur  la  question 
de  commeûeeïûent  de  preuve  par  écrit  >  n'a  pas  été  attaqué 
par  la  voie  du  recours  en  Cassation,  dans  le  délai  de  droit; 
d'où  il  suit  qu'il  a  acquis  l'autorité  de  la  chose  jugée  ; 

Attendu,  dès-lors,  qu'il  ne  restait  plus  à  établir  h,  la 
charge  de  l'inculpé,  que  les  preuves  complètes  de  la  remisa 
du  blanc-seing  et  le  lait  de  Tabus  qu'il  en  avait  fait  ; 

Attendu  que  ces  deux  éléments  du  délit  font  l'objet  da 
l'arrêt,  rendu  sur  le  fond,  du  20  dècemb.  1859,  lequel  a 
déclaré  qu'il  résultait  des  circonstances  qu'il  constate  qua 
Deroubaix  était  convaincu  du  délit  d'abus  de  blanc-seing , 
pour  avoir,  sur  deux  blancs-seings  ^ui  lui  avaient  été  confiés 
parWayeBiburgh,  écrit  frauduleusement,  avec  les  dates  des 
40  et  15janv.  1857,  des  conventions  qu'ils  n'étaient  évidem- 
ment pas  destinés  à  constater  et  qui  étaient  de  nature  à  com- 
promettre la  fortune  dudit  Wayenburgh  ; 

Attendu ,  dès-lors ,  que  ôet  arrêt  avait  une  base  légale  et 
qu'il  a  fait  une  appréciation  souveraine  des  circonstances 


(58) 

dans  lesquelles  les  juges  ont  puisé  les  preuves  de  la  remise 
complète  des  blancs-seings  et  de  Fabus  criminel  que  le  pré- 
venu en  avait  fait; 
Par  ces  motifs,  rejette,  etc. 

.  Du  23 février  1860.  Gourde  Cassation.  Présid.,M.  Yaïsse; 
rapp.,  M.Victor  Foucher;  minist.pubI.,M.  Martinet, a voc- 
gén.  ;  avec,  M^  Morin. 


DÉSISTEMENT.  —  réserves. 

Est  nulle  désistement  fait  avec  réserves,  mêmes  générales  ; 
il  doit  être  pur  et  simple,  (G.  pr.,  art.  4?03.)  (1). 

,  (l)  La  Cour  a  déjà  rendu  plusieurs  arrêts  qui  consacrent  ce  principe. 
L'un  d'eux,  du  26  février  1825,  a  été  publié  S.  V.  Coll.  nouv.,  t.  8,  2, 
38,  et  D.,  p.  30,  2,  50.  Deux  autres,  encore  inédits  et  indiqués  à  notre 
Table  générale,  v»  Désistement,  no  7,  peuvent  prendre  place  ici. 

(Simon  C.  Loir.)  •         . 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  que  le  désistement  ^  été  fait  au  procès  par 
pxirtie  capable  et  en  temps  opportun  ; 

Attendu  néanmoins  que,  dans  Télat  do  la  procédure  et  lorsque  run- 
time, par  ses  conclusions  au  fond,  en  avait  avoué  la  régularité,  le  dé- 
sistement était  sans  objet,  quant  à  la  forme; 

Que  les  réserves  insérées  audit  acte  de  désistement  livraient  Tintimé 
à  la  crainte  d'un  nouveau  procès,  et  justifiaient  dôs-lors  le  refus  qu'il 
avait  fait  de  l'accepter  ; 

Par  CCS  motifs,  et  adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  condamne 
l'appelant,  etc. 

Du  12  fév.  1827.  l^-c  chamb.  Présid.,M.  Dcforcst  de  Ouartdevillc,  1er 
présid.;/avoc.,  M«s  Danel et  Leroy  de  Falvy  ;  avou..  Mes.  Pidou  ctGuilmot. 

(Lciiglard  C.  Habourdin.) 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  que  le  désistement  produit  n'est  pas  pur  et 
simple;  que  dès-lors  les  intimés  n'étaient  pas  tenus  de  l'accepter; 

Sans  s'arrêter  au  désistement  qui  est  déclaré  nul  ; 

Ordonne  que  le  jugement  dont  est  appel  sortira  effet,  etc. 

Du  30  mars  1832.  2e  chamb.  Présid.,  M.  DelaêjLre;  avoc. ,  Mes  Roty 
et  Leroy  de  Béthune;  avou.,  Mes  Dclcgorguc  et  Cuvelle. 

Un  quatrième  arrêt  de  cette  Cour  a  également  jugé  nue  le  désistement 
peut  n'étr<î  pas  accepté,  alors  que,  pur  et  simple  dans  la  forme,  il 
maintient  cependant  virtuellement  le  droit  d'introduire  une  nouvelle 
instance  en  laissant  subsister  l'action.  (22janv.  1851.  l^o  chamb.  Jurisp. 
p.  9.  77;  Contra,  Pal.  Rép.,  v»  Désistement,  nés  220,  221  et  298.) 

V.  pour  la  jurisprudence  générale:  Toulouse  18  janv.  1823.  PaL,  2o 
édit.,  à  sa  date;  Bordeaux  22  août  1826  et  6  mars  1830,  id.  ;  Agen  29 
déc.  182^,  id.;  Rennes  IG  janv.  1820,  id.;  Paris  24  aoiU  1810,  id.; 
Bourges  ler  déc.  1821,  id.  —  Carré, n«  1460;  Thominc,  p.  173. 


(59) 
(Garçon  C.  Wacogne.) 

M*  Garçon,  maire  delà  commune  de  Merlincourt,  engagé 
dans  une  instance  contre  M.  Wacogne ,  maire  de  la  com- 
mune de  Verton,  a  fait  opposition  à  un  arrêt  de  la  Cour  qui 
l'avait  condamné  par  défaut,  et  au  jour  de  l'audience,  il  a 
fait  signifier  à  l'avoué  de  son  adversaire  une  renonciation  à 
cette  opposition.  Son  désistement  était  conçu  dans  les 
termes  suivants  : 

«  Déclare  se  désister  de  l'appel  interieté,  renoncer  au 
y>  bénéfice  de  son  opposition  à  l'arrêt  du  23  novembre  1859, 
»  et  acquiescer  en  tant  que  besoin  au  susdit  jugement , 
»  offrant  de  payer  les  frais  ,  tant  de  première  instance  que 
»  d'ap{)el ,  sous  toutes  réserves  de  fait  et  de  droit.  » 

Le  sieur  Wacogne  a  déclaré  ne  pas  accepter  le  désiste- 
ment fait  avec  réserves.  La  Cour  a  prononcé  comme  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  -^  Attendu  que  le  désistement ,  au  lien  d'être 
pur  et  simple ,  contient  des  réserves  qui  le  rendent  inac- 
ceptable ; 

Attendu  que  l'opposition  a  été  faite  dans  les  formes  et 
les  délais  de  la  loi  ;    . 

La  Cour,  sans  s'arrêter  au  désistement,  déclare,  en  la 
forme,  Garçon  recevable  en  son  opposition  à  l'arrêt  par  dé- 
faut du  23  novembre  1859,  l'en  déboute  au  fond  par  les 
motifs  déduits  audit  arrêt,  lequel  sortira,  en  conséquence, 
son  entier  effet ,  et  condamne  Garçon  aux  dépens  occa- 
sionnés.  . 

Du  16  janv.  1860.  l^echamb.  Présid,,  M.  de  Moulon  , 
l®r  présid.  ;  minist.  publ. ,  M.  Morcrette,  1*^^  avoc.r-gén.  ; 
avoc.  M®  Duhem  ;  avou. ,  M^s  Poncelet ,  Villette  et  Lavoix. 


COMPTE  COURANT. — banquier. —  opérations  débourse. 

—  AGENT  DE  CHANGE. —  EXÉCUTION.  —  REPORTS  À  TERME. 

—  MANDAT.  —  COUVERTURE.  —  ACHAT  DE  VALEURS. 

Le  banquier  qui  s'est  chargé  pour  un  tiers  avec  lequel  il  a 
un  compte  courant,  de  faire,  par  Veniremise  d'agent  de 
change,  à  la  Bourse  deParis,  des  reports  à  terme,  peut,  à 
une  liquidation,  exécuter  ^on  client,  en  portant  au,  compte 
de  celui-ci  le  prix  d'acliat  et  le  prix  de  vente  des  valeurs 
en  report,  sans  plus  reporter,  et  peut  exiger  son  solde, 

y..  Alors  qm  V  agent  de  change  exécute  le  banquier  lui-même; 


<00) 

»..Que  le  client  dô celui-ci  n'a  pas  renouvelé  le  mandai  de 
reporter,  et  que,  débiteur  au,  compte  courantj  il  n'a  pas 
couvert  le  banquier  de  valeurs  suffisantes  pour  V achat 
des  valeurs; 

Cernême  client  ne  peut  ultérieurement,  dans  ce  cas,  et  alors 
même  que  son  compte  avec  le  bamjuicr  n'a  pas  cessé  de 
courir,  réclamer  de  celui-ci  la  vente  de  ses  valetirs  à  un 
marclié  qu'il  détermine.  (4) 


l'i     ■! 


(i)  h^^reportsàteme  peuvent,  d'après  iijac  jurisprudence  encore  ré- 
cente, être  considérés  comme  licites,  lorsqu'au //ew  ih  cacher  de&opéra^ 
fions  fictives  et  des  jeux  de  bourse,  ils  ont  pour  objet  un  marché  sérieux 
devant  amener  la  délivrance  réelle  des  titres.  —  V.  nofam.  Cass.,  19  janv. 
1860 ,  alTairc  dite  dca  coullssiers  G.  agents  de  change ,  et  lea  nombreux 
documents  produits  à  cette  occasion.  (RaU.  pér.  iSOO,  1,  A%) 

Mais  lorsqu'à  Tévidence  les  reports  à  temne  n'ont  consisté  que  dans  des 
opérations  de  différences,  sans  couvertures  faites,  sans  litres  déposés  ni 
iTi'émc  possédés,  ils  n'ont  aucun  caractère  de  légalité,  et  les  Tribunaux 
placés  devant  ces  sortes  d'opérations,  alors  môme  qu'on  les  dit  sérieuses, 
ne  doivcDt-^îls  pas  se  refuser  à  les  consaorcr?  C'est  ce  <iui  a  été  jugé. — 
y^  Imieas  i  i  janv.  1851,  Journ..  des  Not,  18u9,  p.  139. 

«  Attendu,  dit  cet  arrêt,  mie  les  opérations  dont  il  est  question  cons- 
y>  lituent  des  infractions  ù  aes  lois  d  ordre  public;  ciue, dés-lors, il  n'est 
»  pas  permis  aui  Tribunaux  de  prononcer  une  conuamnation  pour  des 

>  faits  au  sujet  desquels  il  n'est  accordé  en  justice  aucune  action,  et  qui, 
»  d'ailleurs,  sont  considérées  comme  des  délits  ; 

»  Attendu  qu'il  importe  peu  que,  dans  l'espèce,  G...  ei  H...  n'élèvent 
»  de  contestation  que  sur  la  manière  d'élabUr  leur  compte  avec  X...  ; 
1»  que,  quel  que  soit  le  résultat  de  ce  compte  en  faveur  de  ce  dernier, 

>  le  Tribunal  ne  pourrait  donner  la  sanction  au  payement  d'un  solde 
}>  pour  lequel  la  loi  dénie  toute  action  en  justice.  » 

Quoi  qu'il  ensuit,  les  Tribunaux,  pour  celte  intervention  d'office,  ont 
nécessairement  une  souveraine  appréciation  des  circonstances. 

Dans  l'espèce  que  nous  rapportons  aujourd'hui,  tout  tendait  san^ 
doute  à  démontrer,  malgré  la  direction  donnée  à  la  demande  et  les  dé- 
clarations de  l'appekint,  que  les  opérations  de  report  n'avaient  cas  ét6 
des  inurchés  sénoux.  L'agent  de  change  pointé,  suivant  l'^expression  du 
parquet  de  la  Bourse,  demande  couveriure  à  son  mandant,  qui  lui-mc9ie 
dénonce  Y  exécution  à  ses  clients.  Il  n'y  a  là  ni  titre  déposé,  ni  garantie 
donnée  à  l'agoni  de  change,  dont  la  responsabilité  est  évidemment  en- 
gagée dans  un  jeu  de  différences.  \^  Cour  aurait  donc  pu ,  comme  celle 


posant  même  que  le  défendeur  à  Ja  demande  en  soldç  de  com|)le  courant 
eût  voulu  véritablement  faire  une  opération  sérieuse,  une  question  impor- 
l^ante  et  délicate  restait  toujours  i  décider.  Si  les  titres  avgicnt  été  achetés 
pajr  l'agent  de  change,  pour  le  compte  du  banquier,  dès  le  mois  de  juillet 
185A,  ces  titres,  en  vertu  des  principes  qui  régissent  le  conlratcjç  compte 


(61) 

(Carpentier  G.  Pureur,  Donoyelle  et  0»^.) 

"Ml.  Carpenlier,  propriétaire  àSaint-Saulve,  était  en  compte 
courant  avec  la  banque  Viletlc^  Denoyelle  et  C^*',  devenue, 

5 àr  suite  de  liquidation,  la  maison  Pureur,  Denoyelle  et  C*«, 
e  Valèncierines.  Il  coramissionnait  en  même  iemps  cette 
banque  pour  l'achat  de  certaines  valeurs  à  la  Bourse  de 
Paris.  Après  plusieurs  opérations  de  ce  genre,  il  k  chai^ 
gea  de  lui  faire  des  reports  à  (eriwa  sur  cinquante  actions 
du  Crédit  mobilier  et  sur  3,000  fr.  de  re«te  3  p.  ^o-  A 
cliaqtte  liquidation,  le  report  était  effectué  par  Tmlerraé** 
diaire  de  l'agent  de  change  Mahoii ,  et  la  banque  Viletle, 
Denoyelle  etC^^  portait  au  compte  courant  de  Carpentier  Ta- 
chât et  la  vente  des  valeurs  qui  se  faisaient  siratiltafténîènt 
pour  l'opération  du  report  à  ierme^  de  telle  sortie  qu'à  ce 
compte  courant  ressortait  une  différence  eûtre  l'achat  et  la 
vente,  soit  au  débit,  soit  au  crédit,  suivant  que  l'opération 
avait  été  heureuse  ou  malheureuse  ; 

Les  choses  s'étaient  passées  ainsi  depuis  le  mois  de  juil- 
let 1854f3usqu'au  mois  de  janvier  1855,  lorsqu'à  la  Hquida- 
tion  du  15  courant  pour  les  cinquante  mobiliers  et  à  celle 
de  fin  âa  mois  pour  les  3  p.  o/o,  l'ag'ent  de  change  Mahou, 
dani  le  carnet  était  chargé  de  ces  sortes  d'opéra^liionèi,  fut 
exécuté  par  la  chambre  syndicale.  Impuissant  à  faire  les 
versements  qui  lui  étaîenl  prescrits,  il  se  retourna  vers  les 
banquiers  Vilette,  Denoyelle  et  C^^^ses  commettants.  Ceux-ci 
firent  signifier  à  leurs  clients,  assez  nombreux  et  parmi  les- 
quels Côrpentier,  la  sommation  que  leur  adressait  Mahou 
de  fournir  les  fofîds  des  valeuiis  engagées,  ou  de  les  laisser 
vendre  à  la  Bourse  du  lendemain,  La  bstnque  inscrivît  en- 
suite, aux  comptes  courants  des  divers  intéressés  ei<m 
compte  particulier  de  Carpentier,  le  -prix  de  vente  desva^ 
Jeii*rs  àcnéléés  pour  le  dernier  report,  plus  ou  moins 
sérieusement,  mit  ainsi  fin  à  l'opération  dû  report  à  lerme, 
et'àemandaà  ses  clients  ïe  solde  de  leur\îamplc  courant. 

La  plupart  de  ceux-ci  invoquèrent  conti'e  la  banque  Pcx- 
cefHion  de  jeu.  Ils  n'avaient^  ont-ils  dit,  jamais  Versé  de 
fonds  à  la  banque,  »parce  qu'en  effet  ils  n'étaient  pas  ache- 
teurs sérieux.  La  banque,  sous  leur  nom,  ne  faisait  que  defs 
différences  à  la  Bourse. Vilette,  Denoyelle  et  CS^  ne  firent  que 
peu  ô'ù  pôîpt  d^bbjeciîons  à  cette  réjponse. 

Quant  à  Cai'pètftier,  ilnè'se  considéra  pas  comme  touché 
par  là  sôttiriïîfliof*!,  et  laî^a  eourh*  son  compte  ^vec  les  ban- 
quiers. Cedx-bi  insistèrent  MeMôt  pbto  otftenii*  lè  ^ôlde  de 


(5S) 

»  Qu'ainsi  Wayenbuigh,  beau-père  de  la  fèisme  Dcroii- 
bail  cbttîme  second  mari  de  sa  inérej  n'élanl  pas  son  pa- 
rent, mais  seulement  son  âïKë,  il  n'y  a  point  d'aBîiiîlè  ou 
alliance  en  ligne  directe  entre  lui  et  le  prévenu,  hiâri  de  sa 
bèlle-fille  ; 

î  Que  Deroubaix  ne  pourrait  par  suite,  en  vertu  de  Fart. 
380  C.  pén.,  obtenir  le  bienfait  de  l'impunité  pour  les  abus 
dtî  confiance  et  de  htancs-seings  dont  il  se  sérail  rendu 
coupable  envers  Wa^f enburçh  ; 

»  Àltfenduv  à  la  vérité,  que  les  délits  d'abus  de  confiaucê 
et  de  blancs-seings  présupposent  la  reniise  volontaire  de 
valeurs  et  de  bîancs-seihgs  pour  un  usage  quelconque; 

5>  Que  le  fait  générateur  d'une  obligation  contracluellô 
est  soumise^  pour  sa  preuve,  aux  régies  des  art.  4341  et 
4347  C.  Nap.  ; 

y>  Mais  attendu,  à  l'égîird  dbs  abus  de  coufiance  qte  le 
prévenu,  tout  en  niant  sa  culpabilité^  a  riecônnu  dans  so« 
interrogatoire  devant  M.  le  juge  d'instruction,  q'u'il  recevait 
tout  et  payait  tout  ;  que  l'on  trouve,  dans  celte  reconnais- 
sance, tout  au  moins  un  commencement  de  preuve  par 
écrit  de  h  rcmifec  volontaire  des  Sommes  et  valeirrs  qiiè 
Deroubaix  se  serait  appropriée  es  du  préjudice  de  Wàyen- 
burgh  ; 

^  Que  le  refus  de  sigriattîré  du  prévefiu^  au  procès-verbal, 
ne  petit  enlever  à  cette  reconnaissance  la  force  légale  qu'elle 
petit  avoir} 

>  Attendu,  à  l'égard  des  «iras  de  biaâeô-seings,  que  Ib 
contexte  embarrassé  et  la  formé  étrange  des  biUët-s  remplis, 
les  40  et  45  jafnvier  1857«,  par  Dei*ouba&  ou  par  «lâ  tiers, 
dont  il  s'est  approîpHé  i' écriture^  sur  des  morceaux  de  pa- 
pier qui  è' étaient  évidemment  pas  desiiùés  à  k^ét  emploi, 
rendent  extrêmement  vraisemblable  èa  remise  volontaire 
des  blancs-seîftgs  allégués  par  Wayenbuiigh,  pour  un  tout 
autre  usagie  que  celui  qu'dn  aurait  fait  D^biSbaix; 

»  Que  l'on  y  trouve  donc  bien  le  commencemeat  de 
prèAï\'e  j>ar  écrit  doift  parlé  l'art,  4347  G.  Nap.; 

»  Le  Trftbïial  déclare  rèoévable  l'actiôû  du  miDistèrfe 
Jiublio,  wnh^e  le  prévenu  OerQuibaix^ 'sto  \^m  les  chefs  de 
la  prévention; 


(53) 

»  Bit  qu'il  sera  passé  outre  au  jugement  sur  le  fopd  ; 

»  Frais  de  T incident  à  la  charge  du  prévenu,  lui  donnant 

acte  de  ce  qu'il  n'a  entendu  accepter  le  débat  que  sur  le$ 

fins  de  non-recevoir,  qu'il  qualifie  de  questions  préjudi- 
cielles. » 

Appel  par  Deroubaix.  Pour  lui,  devant  la  Cour,  on  repro- 
duit, dans  des  conclusions  écrites,  les  objections  faites  à  la 
préventioa  devant  Iç  Trjhunal  d'Av^snes* 

La  Cour  a  rendu  la  décision  suivante  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Sur  la  première  fin  de  non-recevoir  : 

Atjenduqiie,  dumpmentoù  Je  Juge  d'mstruction  a  été 
requis  pai?  le  procureur  impérial  d'informer  sur  un  fait 
délictif  quelconque,  il  peut,  sans  ohligalion  rigoureuse  djB 
communique^'  chaque  fois  au  niinistère  public  et  s^ns  nou- 
veau réquisitoire  de  ,celui-ci,  continuer  d'informer,  aon 
seulemeut  sur  le  fait  et  lep  circonstances  qui  fonj,  Tobjôt 
spécial  du  premier  réquisitoire,  rnais  etUcpre  constater  tout 
ce  qui,  dans  le  cours  de  Tinformation,  est  porté  i\  sa  con- 
naissance, surtout  lorsque,  comfne  dans  l'espèce,  Ips  faits 
ont  un  rapport  direct  avec  le  fait  principal  qui  a  motivé 
i'informaliojn  ; 

Sur  la  deuxième  fin  de  ?ioji-recevQÎr  : 

Attendu  que  l'art,  4^5  G.  pén,  ^'atteint  pas  ^eulenaeiit 
rescro,querie,  mai^  aussi  la  Iqntative  de  çe^délit,  etqu'eja 
disting^oi?^!!  aippi  resproqueriç  de  la  lentaUve,  cet  article 
n'a  évidemoTieiit  pas  crafondqi  et  ne  pouvait  confondre  le?  > 
caractères  constitutifs  de  l'un  et  de  l'autre,  puisque  Tesr 
croquej^ie  est  le  délit  consommé,  et  que  la  tentative  n'est 
qu'un  côrameftçement  d'exécution  qui  n'a  été  suspendu  et 
n'a  manqué  son  effet  que  par  des  circonstances  indépen- 
dantes de  la  lîfllonté  de  son  auteur  ; 

Sur  }a  .iroisiéme  fin  de  non-recevoir  : 

Attende  gw  la  reconnaissance  du  14  niars  4857,  arguée 
de  faux,  bien  qu'éeaiitée  de  ça  chcrf  par  l'ordonnance  de 
non-lieu  du .6  septeflîbre  4859  ayant  force  de  cho^e  jugée, 
a  pu  cependant  servir  d'élément  à  rinpulpation  de  teçtta- 
tive  d'escroquerie,  et  piotiver  ainf  i  de  ce  chef  le  renvoi  ftu 
police  correctionnelle; 


(U) 
voulu,  depuis  la  connaissance  par  lui  des  reventes  opérées, 
rentrer  dans  les  mêmes  valeurs  à  des  prix  inférieurs  à  ceux 
de  ces  reventes  ; 

y>  Que  sous  tous  les  rapports  Carpenlier  est  donc  non  re- 
cevable  ni  fondé  à  se  plaindre  d<îs  faits  ci-dessus  ; 

»  Qu'il  n'y  a  lieu  en  conséquence  à  aucun  redressement 
du  compte  pour  raison  des  ventes  dont  il  s'agît  ; 

>  En  ce  qui  touche  les  capitalisations  et  commissions  : 
»  Considérant  que  Carpenlier  ne  précise  pas  quelles  se- 
raient les  commissions  indûment  réclamées  et  que  le  Tiibu- 
nal  n'a  pas  les  cléments  nécessaires  pour  les  apprécier  ; 
»  Par  ces  motifs  : 

»  Le  Tribunal,  vidant  son  délibéré,  après  avoir  entendu 
M.  Delame,  juge  commissaire,  en  son  rapport,  dit  qu'il  n'y 
a  pas  lieu  à  redressement  <le  compte  sous  le  rapport  des 
ventes  opérées  les  15  et  31  janvier  4855  ; 

»  Déboute  Carpentîer  de  ses  conclusions  de  ce  chef,  et 
pour  établir  le  solde  du  compte  entre  les  parties  ,  renvoie 
lesdites  parties  devant  M.  Delame  ,  juge  prècéderameiît 
commis,  à  l'effet  par  Carpentier  d'y  préciser  les  difficultés 
qu'il  enteôd  soutever  au  sujet  des  commissions  et  capita- 
lisations portées  au  compte  ; 

»  Condamne  Carpentier  aux  dépens  de  l'incident  de  ren* 
voi  à  Taudience ,  le  surplus  des  dépens  quant  à  présent  ré- 
servés. » 

Appel  par  Carpentier.  Pour  lui,  ^devant  la  Cour,  on  sou- 
tient le  système  que  voici  : 

Par  suite  do  contrats  de  comnaissioU,  il'cMi^ations  de 
banque  et  de  remises  réciproques,  il  s'est  établi  un  compte 
courant  "'       ^     -    -  ^r ,  ..     ^ 

Gi^La 
l'appelant  _ 

il  prétend  que  certaines  ventes  d'actions  «t  de  rentes  au- 
raient dû  être  suivies  d'adhats  ^e  mêmes  valeurs.  Par&uite 
de  ces  achats,  les  titres  seraient  restés  Â  -sa  dtspositioti.  £n 
effet,  les  commissions  données  par  lui,  et  aoceçtées  par 
rintimé,  étaient  celles  d'opérations  complexes  qui.,  sous  le 
nom  de  reports,  à  la  Bourse  de  Parisi,  consistaient  dans  des 
achats  à  terme  et  des  ventes  au  comptant,  opérations  suc- 
cessives etindi-visîMes qui,  pour  être  sérieuses,ne  |rouvàient 
s'arrêter  qu'après  des  achats,  non  après  des  ventes. 


(55) 
un  terme  de  trois  ans  pour  se  libérer,  —  les  parties  au- 
raient le  même  jour,  à  l'instant  même ,  recorwiu  que  les 
trente  mille  ceilt  francs  étaient  éteints  à  concurrence  de 
5/6e,:et  consigné  un  fait  de  cette  importance  dans  Tespacc 
resserre  d'un  papier  étroit  et  informe  ; 

Qu'en  outre  il'irésulte  des  renseignements  fournis  et  des 
dépositions  faites  parle  juge  dô  paix  de  Cassel,  que  dans/ 
la  réunion  qui  eut  lieu  en  sa  présence ,  il  fut  positivement 
convenu  que  lès  30;lÔ0  f.  ,  dus '^Br  Deroubaix,  feraient 
l'objet  d'une  obligation  authentique,  resteraient  en  dehors 
du  compte  à  faille  entre  les  parties  et  que  ce  compte  porte- 
rait d'une  part  hurles  deniers  pupillaires  dus  àDcrôubaix  du 
chef  âe  sa  femme,  et  d'autk*e  part  sur  les  valeurs  mobilières 
appartenant  aux  époux  Wayenburgh ,  et  que  Deroubaix 
avait  retenues  par  devers  lui  ou  dont  il  aiyait  fait  emploi  à 
son  profit  personnel ,  «  valeurs  plus  que  suffisantes ,  est-il 
dit ,  pour  couvrir  toutes  ses  prétentions  »  ; 

Alteftdu  que  lèsiarticlcs  du  prétendu  compte  inscrits  au 
passif  de  Wayenburgh  sont  tous  méconnus  et  contestés  par 
lui  et  qtic  les  faits,  circonstances  et  présomptions  de  la 
cause ,  notamment  les  dépositions,  et  renseignements  éma- 
nés du  juge  de  paix,  ainsi  que  les  pièces  qui  se  trouvent 
en  la  possession  de  Wayenburgh ,  tendent  et  concourent  à 
justifier  ses  dénégations;  .  ' 

Attendu  que  si,  en  plaçant  hypothécairement  sous,  son 
nom  et  à  son  profit  personnel,  une  somme  qui  lui  avait  été 
remise  à  titre  de  mandiat  et  â  charge  d''en  faire  un  emploi 
déterminé,  dans  rintérêt  du  propriétaire ,  Deroubaix  s'est 
rendu  coupable  du  délit  d'abus  de  confiance  ;  ce  délit ,  com- 
mis en  1855  ,  était  prescrit  bien  avant  réquisitoire  à  fin 
d'instruction  portant  date  du  7  mai  dernier  ; 

Attendu  que  si  eu  exigeant  par  voie  de  commandement 
et  en  percevant,  au  mois  de  mars  1859,  deux  années  dés 
intérêts  de  cèttç  somme  alors  échues ,  le  prévenu  a  com- 
mis une  action  déloyale,  il  faut  néanmoins  reconnaître  que 
ces  faits  ne  peuvent  constituer  un  nouveau  déht  d'abus  de 
confiance,  les  intérêts  pajr  lui  perçus  ne  lui  ayant  été  remis 
à^ucun  des  titres  spécifiés  en  Tart.  408  C,  Pon.  ni  à 


(56) 
charge  de  les  rendre  ou  représenter  ou  d'en  faire  un  emploi 
déterminé  ; 

Ou' eu  conséquence  le  chef  d'abus  de  confiance  concer- 
nant les  intérêts  de  la  créance  Priera  doU  être  écarté  ; 

Que  s'il  a  été  clairement  établi  parla  procédure  et  les  dé- 
bats que  Lafère  n'a  jamais  été  débiteur  envers  Deroubaix 
ni  des  trois  cents  francs  à  titre  de  dommages-intérots,  ni 
des  deux  cents  francs  pour  indemnité  de  location  faisant 
l'objet  de  la  sommation  du  15  avril  1859 ,  on  ne  peut  léga- 
lement voir  dans  cette  sommation  ni  dans  l'ofiTre  do  remet- 
tre audit  Lafère,  en  cas  de  paiement  et  contre  récépissé,  tou- 
te note  ou  document  étabUssant  la  dette,  les  manœuvres 
frauduleuses  aux  fins  prévues  et  punies  par  l'art.  405  C.  pén.  ; 

Par  ces  motifs ,  ta  Cour  confirme  le  jugement  dont  est 
appel,  en  ce  qu'il  déclare  Deroubaix  convaincu  du  délit 
d'abus  de  blanc-seing,  pour  avoir,  sur  deux  blancs-seings  qui 
lui  avaient  été  confiés  par  Wayenburgh ,  écrit  frauduleuse- 
nient  ^  avec  les  dates  des  10  et  15  janvier  1857,  des  conven- 
tions qu'ils  n^étaient  évidemment  pas  destinés  à  constater 
et  qui  étaient  de  nature  à  compromettre  la  fortune  dudii 
Wayenburgh;. 

Déclare  que  le  délit  d'abus  de  confiance,  ainsi  que  le  dé- 
lit de  tentative  d'escroquerie  admis  comme  constants  paur 
les  premiers  juges ,  ne  sont  pas  suffisamment  établis  ; 

En  conséquence  condamne  ledit  Deroubaix  à  la  peine  de 
2  années  d'emprisonnement  et  par  corps  à  50  f.  d'amende  ; 

Prononce  contre  lui,  à  dater  du  joui*  où  il  aura  subi  sa 
peine,  l'interdiction  pendant  5  ans  des  droits  mentionnés  eu 
l'art.  42  C.  pén.; 

Le  condamne  en  outre  aux  frais ,  etc. 

Du  20  décemb.  1859.  Chamb.  correct.  Pi-ésid.^M.  Franco- 
ville,  conseill.  ;  rapp.,  M.  Minart,  conseill.  ;  minist. public, 
M.  Carpentier,  avoc-géii.  ;  avec.  M®  Talon. 

Pourvoi  en  Cassation.  On  y  faisait  valoir  les  moyens  in- 
voqués contre  le  premier  arrêt  confirmatif  du  jugement  du 
Tribunal  correctionnel  d'Avesnes,  et  on  s'était  pourvu  con- 
tre cet  arrêt  en  même  temps  que  contre  le  second ,  c'est- 
à-dire,  pour  le  premier,  après  le  délai  imposé  pour  se  pour- 
voir contre  les  arrêts  définitivement  rendus  en  malière  cri- 


(57) 
rainellc.  N'y  avait-il  pas  chose  jugée,  ou  bien  le  droit  de  se 
pourvoir  n'avait-il  pas  été  siaspenduparVinstance*  criminelle 
toujours  ouverte  jusqu'à  la  prononciation  dos  deux  arrêts? 
La  Cour  suprême  a  décidé  qu'il  y  avait  chose  jugée. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Sur  la  question  préalable  de  savoir  si  la 
poursuite  du  ministère  public  était  recevable  en  ce  qui  con- 
cerne la  prévention  d*abus  de  blanc-seing,  parce  que  les 
actes  argués ,  portant  sur  des  conventions  d'une  valeur  au 
dessus  de  450  francs ,  le  fait  de  leur  remise  ne  pouvait  être 
débattu  par  les  voies  de  preuves  admises  en  matière  Crimi- 
nelle, à  moins  qu'il  n'existât  pas  un  commencement  de 
preuve  par  écrit  ; 

Attendu  que  le  jugement  correctionnel  du  27  septembre 
4859,  décide  qu'il  résulte  dos  faits  et  circonstances  qu'il 
spécifie ,  que ,  dans  l'espèce ,  il  y  a  le  commencement  de 
preuve  par  écrit  déterminé  par  l'art.  1347  C.  Nap,  ; 

Attendu  que  sur  l'appel  interjeté  par  le  prévenu ,  le  juge- 
ment a  été  confirmé  par  arrêt  de  la  Cour  impériale  de 
Douai ,  du  21  nov.  1859  ; 

Attendu  que  cet  arrêt  qui  était  définitif  sur  la  question 
de  commeiieeïùeïit  de  preuve  par  écrit  >  n'a  pas  été  attaqué 
par  la  voie  du  recours  en  Cassation,  dans  le  délai  de  droit; 
d'où  il  suit  qu'il  a  acquis  l'autorité  de  la  chose  jugée  ; 

Attendu,  dès-lors,  qu'il  ne  restait  plus  à  établir  ^  la 
charge  de  l'inculpé,  que  les  preuves  complètes  de  la  remisa 
du  blanc-seing  et  le  lait  de  Tabus  qu'il  en  avait  fait  ; 

Attendu  que  ces  deux  éléments  du  délit  font  l'objet  da 
l'arrêt,  rendu  sur  le  fond,  du  20  dècemb.  1859,  lequel  a 
déclaré  qu'il  résultait  des  circonstances  qu'il  constate  que 
Deroubaix  était  convaincu  du  délit  d'abus  de  blanc-seing , 
pour  avoir,  sur  deux  blancs-seings  qui  lui  avaientété  confiés 
par  Wayeuburgh,  écrit  frauduleusement,  avec  les  dates  des 
10  et  15janv.l857,  des  conventions  qu'ils  n'étaient  évidem- 
ment pas  destinés  à  constater  et  qui  étaient  de  nature  à  cora-. 
promettre  la  fortune  dudit  Wayenburgh  ; 

Attendu ,  dès-lors ,  que  ôet  arrêt  avait  une  base  légale  bt 
qu'il  a  fait  une  appréciation  souveraine  des  circonstances 


(68) 

(Arablard  fils  C.  Bruneau,  syndic  de  la  faillite  veuveî 

Leroy-Soyez.) 

Amblard  fils  est  liquidateur  de  la  maison  Courtois,  Am- 
blard  et  fils,  de  Paris.  Il  s'est  présenté  à  la  faillite  veuve 
Leroy-Soyez,  de  Masnières  (arrondissement  de  Cambrai), 
comme  créancier  d'une  somme  de  20,434  fr.,  il  fonde  son 
droit  sur  quatre  lettres  de  change  de  5,000  fr.  chacune , 
causées  valeur  en  compte  et  tirées  de  Masnières  par  Louis 
Leroy,  agissant  par  procuration  de  sa  mère ,  veuve  Leroy- 
Soyez ,  sur  Scribe ,  Leroy  et  Julien,  négociants  à  Rbeims, 
et  qui ,  passées  à  Tordre  Courtois,  Amblard  et  fils,  n'ont 
pas  été  payées  à  l'échéance. 

Louis  Leroy  avait ,  pour  garantir  le  paiement  de  ces  bil- 
lets, donné  en  nantissement,  à  la  maison  Courtoiê,  Arablard 
et  fils,  quarante  actions  de  la  Société  de  carbonisation  des 
mêmes  sieurs  Scribe,  Leroy  et  Julien,  de  Rheims.  Pour 
obtenir  les  20,000  fr.  qui  font  l'objet  de  la  demande  de  la 
maison  Courtois,  il  s'était  présenté  à  celle-ci  comme  fondé 
d'un  pouvoir  général  de  la  maison  veuve  Leroy-Soyez,  sa 
mère. 

Après  sa  faillite,  celle-ci  avait  désavoué  ce  mandat,  et 
Louis  Leroy  lui-même  l'avait  répudié  dans  une  lettre  éga^ 
ment  postérieure  à  la  faillite. 

Le  syndic  de  la  faillite  de  cette  dernière  maison  contesta 
les  créances  sur  lesquelles  s'appuyait  Amblard  fils.  Le  Tri- 
bunal de  commerce  de  Cambrai  a  rendu  le  jugement 
suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que,  par  acte  du  25  novembre  1858,  Cour- 
tois, Amblard  et  fils  ont  fait  assigner  le  syndic  de  la  faillite 
veuve  Leroy-Soyez,  à  l'effet  d'être  admis  au  passif  de  ladite 
faillite  pour  la  somme  de  20,134'  f.  65  c,  plus  les  intérêts 
et  frais ,  montant  de  quatre  lettres  de  change  de  5,000  f. 
chacune,  tirées  de  Masnières  par  Louis  Leroy,  agissant  par 
procuration  de  la  veuve  Leroy-Soyez,  sur  les  sieurs  Scribe- 
I>eroy  et  JuUien  et  C»©,  le  5  janvier  1858 ,  lesdites  lettres 
passées  le  même  jour  à  l'ordre  de  Courtois,  Amblard  et  fils, 
causées  valeur  en  compte ,  sont  revenues  impayées  par  la 
faillite  des  tirés  ; 

»  Considérant  que  Courtois,  Amblard  et  fils,  pour  faire 
valider  cette  signification,  invoquent  soit  l'existence  d'uae 


(59) 
(Garçon  C.  Wacogne.) 

M.  Garçon,  maire  delà  commune  de  Merlincourt,  engagé 
dans  une  instance  contre  M.  Wacogne,  maire  de  la  com- 
mune de  Verton,  a  fait  opposition  à  un  arrêt  de  la  Cour  qui 
l'avait  condamné  par  défaut,  et  au  jour  de  l'audience,  il  a 
fait  signifier  à  Tavoué  de  son  adversaire  une  renonciation  à 
cette  opposition.  Son  désistement  était  conçu  dans  les 
termes  suivants  : 

«  Déclare  se  désister  de  l'appel  interieté,  renoncer  au 
D  bénéfice  de  son  opposition  à  Tarrêt  du  23  novembre  1859, 
»  et  acquiescer  en  tant  que  besoin  au  susdit  jugement , 
»  offrant  de  payer  les  frais  ,  tant  de  première  instance  que 
»  d'appel ,  sous  toutes  réserves  de  fait  et  de  droit,  » 

Le  sieur  Wacogne  a  déclaré  ne  pas  accepter  le  désiste- 
ment fait  avec  réserves.  La  Cour  a  prononcé  comme  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; -r- Attendu  que  le  désistement ,  au  lieu  d'être 
pur  et  simple ,  contient  des  réserves  qui  le  rendent  inac- 
ceptable ; 

Attendu  que  l'opposition  a  été  faite  dans  les  formes  et 
les  délais  de  la  loi  ; 

La  Cour,  sans  s'arrêter  au  désistement ,  déclare ,  en  la 
forme,  Garçon  recevable  en  son  opposition  à  l'arrêt  par  dé- 
faut du  23  novembre  1859,  l'en  déboute  au  fond  par  les 
motifs  déduits  audit  arrêt,  lequel  sortira,  en  conséquence, 
son  entier  effet ,  et  condamne  Garçon  aux  dépens  occa- 
sionnés.  . 

Du  16  janv.  1860.  l^echamb.  Présid.,  M.  de  Moulon  , 
lerprésid.  ;  minist.  publ. ,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.  ; 
avec.  Me  Duhem  ;  avou. ,  Mes  Poncelet ,  Villette  et  Lavoix. 


COMPTE  COURANT.— BANQUIER.— OPÉRATIONS  DEBOURSE. 

—  AGENT  DE  CHANGE. —  EXÉCUTION.  —  REPORTS  À  TERME. 

—  MANDAT.  —  COUVERTURE.  —  ACHAT  DE  VALEURS. 

Le  banquier  qui  s'est  chargé  pour  un  tiers  avec  lequel  il  a 
un  compte  courant,  de  faire,  par  Venlremise  d'agent  de 
change,  à  la  Bourse  deParis,  des  reports  à  terme,  peut,  à 
une  liquidation,  exécuter  5on  client,  en  portant  au  compte 
de  celui-ci  le  prix  d'achat  et  le  prix  de  vente  des  valeurs 
en  report,  sans  plus  reporter,  et  peut  exiger  son  solde, 

...Alors  qm  l'agent  de  change  exécute  le  banquier  hli-même; 


(00) 

»,.Que  le  client  dt  celui-ci  n'a  pa&  renouvelé  le  mandat  de 
reporter,  et  que,  débiteur  aie  compte  courant^  il  n'a  pas 
couvert  le  banquier  de  valeurs  suffisantes  pour  Uacliat 
des  valeurs; 

Ce  rnôme  client  ne  peut  ultérieM,remeni,  dans  ce  cas,  et  alors 
même  que  son  compte  avec  le  banquier  n'a  pas  cessé  de 
cotmr,  réclamer  de  celui-ci  la  vente  de  ses  valeurs  à  un 
marclié  qu'il  détermine.  (4) 


l'i  » 


(i)  Ij^%  reports  à  tema  peuvent,  d'après  nue  jurisprHdeiice  encore  ré- 
cente, être  considérés  comme  licites,  lorsqu'au  Heu  de  cacher  de&opéra^ 
lions  fictives  et  des  jeux  de  bourse,  ils  ont  pour  objet  un  marché  sérieux 
devant  amener  la  délivrance  réelkdes  titres.  —  V.  noifim.  Cass.,  lOjanv. 
1860 ,  aiïairc  dite  des  coulissi^s  C.  ageats  do  cbasge ,  ot  les  Bombreux 
documents  produits  à  cette  occasion.  (Pall.  pér.  1860, 1, 4%) 

Mais  lorsqu'à  révidence  les  reports  à  terme  n*ont  consisté  que  dans  des 
opérations  de  différences,  sans  couvertures  faites,  sans  litres  déposés  ni 
miémc  possédés,  ils  n'ont  aucun  caractère  de  légalité,  et  les  Tribunaux 
placés  devant  ces  sortes  d'opérations,  alors  même  qu'on  les  dit  sérieuses, 
lie  doive»t-ils  pas  se  refuser  à  les  consaorcrt  C'est  ce  <iui  a  été  jugé. — 
y,  Imieas  \ï  janv.  1851,  Jowni.  des Not.  1859,  p.  139. 

«  Attendu,  dit  cet  arrêt,  aue  les  opérations  dont  il  est  question  cons- 
»  lituent  des  infractions  à  aes  lois  d'ordre  public;  ciue, dès-lors,  il  n'est 
»  pas  permis  aux  Tribunaux  de  prononcer  une  conuamnation  pour  des 
>  faits  au  sujet  desquels  il  n'est  accordé  en  justice  aucune  action,  et  qui, 
»  d'ailleurs,  sont  considérées  comme  des  délits  ; 

T>  Attendu  qu'il  importe  peu  que,  dans  l'espèce,  G...  ei  H...  n'élèvent 
»  de  contestation  que  sur  la  manière  d'établir  leur  CQmpte  avec  X,..  ; 
T)  que,  quel  que  soit  le  résultat  de  ce  compte  en  faveur  de  ce  dernier, 
)>  le  Tribunal  ne  pourrait  donner  la  sanction  au  payeraenl  d'un  solde 
D  pour  lequel  la  loi  dénifi  toute  action  en  justice.  i>    ^ 

Quoi  qu'il  eii  soit,  les  Tribunaux*  pour  celte  intervention  d'office,  ont 
nécessairement  une  souveraine  appréciation  des  circonstances. 

Dans  l'espèce  que  nous  rapportons  aujourd'hui,  tout  tendait  sans 
doute  à  démontrer,  malgré  la  direction  donnée  à  la  demande  et  les  dé- 
clarations de  l'appekint,  que  les  opérations  de  report  n'avaient  pas  été 
des  marchés  sérioux.  L'agent  de  cnangc  pointé,  suivant  l'iexpression  du 
parquet  de  la  Bourse,  demande  couverture  iaon  mandant,  qui  lui-même 
dénonce  Vexécution  à  ses  clients.  Il  n'y  a  là  ni  titre  déposé,  ni  garantie 
donnée  à  l'agent  de  change,  dont  la  responsabilité  est  évidemment  en- 
gagée dans  un  jeu  de  différences.  La  Cour  aurait  donc  pu ,  comme  celle 
d'Amiens,  refuser  d'ofllcc  touJc  action  relative  à  ces  jeux  de  bourse. 
]\Iais  il  lui  ^ippartenait  de  juger  de  l'opportunité  des  circonstances. 

En  faisant  abstraction  de  celte  considération  d'ordre  puWic,  en  sup- 
posant même  que  le  défendeur  u]a  demande  en  solde  de  com{)tc  courant 
£îùt  voulu  véritablement  faire  une  opération  sérieuse,  une  gueslion  impor- 
tante et  délicate  restait  toujours  à  décider.  Si  les  titres  avaient  été  achetés 
par  l'agent  de  change,  pour  le  compte  «lu  banquier,  dès  le  mois  de  juillet 
185d,  ces  titres,  en  vertu  des  principes  qui  régissent  le  contrat dççonï^ptc 
courant,  étaient  devenus  .la  propriété  de  l'acheteur.  Dès-lors  pouvaient- 
ils  être  vendus  par  le  banquier,  pour  l'agent  de  change  ou  pour  hii- 
mémc?  —  Décis.  nég.  Mctz,27  jitiH.  1858»  Jurisp.  du  ISot.,  année  1850, 
p.  715,  art.  11,489. 


(61) 

(Carpenlier  C.  Pureur,  Denoyelle  et  C»c.) 

H.  Carpenlier,  propriétaire  àSaint-SauIve,  était  en  compte 
courant  avec  la  banque  Viletlc^  Denoyelle  et  G»^,  devenue, 
parsaite  de  liquidation,  la  maison  Pureur,  Denoyelle  et  C*«, 
de  Valéncierines.  Il  coramissionnait  en  même  iemps  cette 
l)ciir(lûe  pour  l'achat  de  certaines  valeurs  à  la  Boui'se  de 
Paris.  Après  plusieurs  opérations  de  ce  genre,  il  lia  chai^ 
gea  de  lui  faire  des  reports  à  terme  sur  cinquante  actions 
du  Crédit  mobilier  et  sur  3,000  fr.  de  rente  3  p.  o/o.  A 
cliaque  liquidation,  le  report  était  effectué  par  Tintermé*- 
diaire  de  Tarent  de  change  Mahoû,  et  ta  banque  Vilette, 
Denoyelle  et  Ci®  portait  au  compte  courant  deCarpentier  l'a- 
chat et  la  vente  des  valeurs  qui  se  faisaient  siraaltaflémènt 
pour  l'opération  du  report  à  terme^  de  telle  sortie  qu'à  ce 
compte  courant  ressortait  une  différence  eûtre  i'acbat  et  la 
vente,  soit  au  débit,  soit  au  crédit,  suivant  que  l'opération 
avait  clé  heureuse  ou  maliieurcusOi 

Les  choses  s'étaient  passées  ainsi  depuis  le  mois  de  juil- 
let 1854  jusqu'au  mois  de  janvier  1855,  lorsqu'à  la  liquida- 
lion  du  15  courant  pour  les  cinquante  mobiliers  et  à  celle 
de  fin  du  flsio'is  pour  les  3  p.  o/o,  Tag'ent  de  change  Mahou, 
dent  le  carnet  était  chargé  de  ces  sortes  d'ap^érartiîonèj,  fut 
exécuté  par  la  cliambre  syndicale.  Impuissant  à  faire  les 
versements  qui  lui  étaient  prescrits,  il  se  retourna  vers  les 
banquiers  Vilette,  Denoyelle  et  C^^^ses  commettants.  Ceux-ci 
firent  signifier  à  leurs  clients,  assez  nombreux  et  parmi  les- 
quels Côrpentier,  la  soitimation  que  leur  adi'èssait  Mahou 
de  foornrr  les  îofîds  des  valeur^  engagées,  ou  de  les  laisser 
vendre  à  la  Boarse  du  leRdfemain.  La  banque  inscrivît  en- 
suite, aux  comptes  courants  des  divers  intéressés  et  <m 
compte  particulier  de  Carpentier,  le  -prix  de  vente  des*  va- 
leurs àoiélées  pour  le  dernier  report,  plus  ou  moins 
sérieusement,  mit  ainsi  fin  à  ropé'ratiofi  dû  report  à  lerme, 
et  demanda  â  ses  clients  îe  solde  de  leur\îompte  courant. 

La  plupart  de  ceux-ci  invoquèrent  contre  la  banque  l'e'x- 
ception  de  jeu.  Ils  R'avaifent,  ont-ils  dit,  janïâîs  Versé  de 
fonds  à  la  banque,  jtârce  qu'en  effet  ils  n'étaient  pas  ache- 
teure  sérieux.  La  banque,  sous  leur  nom,  «e  faisait  que  dés 
différences  à  la  Bourse. Vilette,  Denoyelle  et  C^^  ne  firent  que 
peii  ou  point  i'objectîons  à  cette  réponse. 

Qdant  à  Carpéirtiér,  il  iië'se  coiisidérâ  pas  comme  touche 
par  Ik  sôttiiiï£ftiof<î,  et  lai^a  toutir  sûH  eoniptè  ^vec  les  ban- 
quiers. Cedx-iai  ilisistèrertt  bientôt  pour  êîiftenir  lè  ^blde  ^e 


(52) 

»  Qu'ainsi  Wayenbuigh,  beau-père  de  la  fémmë  Beroii- 
baii  cottime  second  mari  de  sa  tnérej  n'étant  pas  sotl  pa- 
rent, rtiâis  seulement  son  allie,  il  n'y  a  point  d'aBîiiîlè  ou 
alliance  en  ligne  directe  entre  lui  et  le  prévenu,  hiâri  de  sa 
bèlle-fille; 

î  Que  Deroubaix  ne  pourrait  par  suite,  en  vertu  de  l'art. 
380  C.  pén.,  obtenir  le  bienfait  de  l'impunité  pour  les  abus 
de  confiance  et  de  htaircs-seihgs  dont  il  se  sérail  rendu 
coupable  envers  Wa^f enburgh  ; 

»  ÀltfendUi,  à  la  vérité,  qiite  les  délits  d'abifô  de  coinïîaTîce 
et  de  blancs-seings  présupposent  la  reniise  volontaire  de 
valeurs  et  de  blancs-seiiigs  pour  un  usage  quelconque; 

»  Que  le  fait  générateur  d'une  obligation  contractuello 
est  soumise,  pour  sa  preuve,  aux  règles  des  art.  4341  et 
4347  C.  Nap.; 

»  Mais  otlendu,  à  Tégard  dbs  abus  de  confiance  que  le 
prévenu,  tout  en  niant  sa  culpabilité^  a  rieconnu  dans  soa 
interrtygatôire  dei'ïint  M.  le  juge  d'insti^uclion,  q'u'il  recevait 
tout  et  payait  tout  ;  que  l'on  trouve,  dans  cette  reconnais- 
sance^ tout  au  moins  un  commencement  ée  preuve  par 
écrit  de  la  rcrhifee  volontaire  des  Sommes  el  valeurs  qiiè 
Deroubaix  se  serait  appropri'ées  au  préjudice  de  Wàyen- 
burgh  ; 

s>  Que  le  reftis  de  sigriatifrô  du  prévieiiu,  au  procès- verbal, 
fle  peut  enlever  à  cette  reconnai^ance  la  force  légale  qu'elle 
pcutaVOlir; 

I  Attendu,  à  l'égard  des  «iras  de  blaâcs-seings,  que  Ib 
contexte  embarrassé  et  la>forhiè  étrange  deis  biUët-s  remplis, 
les  40  et  ISjafnvier  1857«,  par  Dei*ouba&  ou  par  «lâ  tiers, 
dont  il  s'esl  apprdpHé  i' écriture^  sur  des  morceaux  de  pa- 
pier qui  à' étaient  évidemment  pas  desiiùés  à  'cêt  emploi, 
rendent  extrêmement  vraisemblable  èa  remise  volontaire 
des  blancs-seings  allégués  par  Wayenbuiigh,  pour  un  tout 
aùù'e  usage  que  celui  ffû'dn  aurait  fait  D^oiSbars; 

»  Que  l'on  y  trouve  donc  bien  le  commencement  de 
prcÀire  par  écrit  doift  parlé  l'art,  4347  G.  Nop.j 

»  Le  TrKyuïial  déchrle  reoévable  l'adièû  du  fÈmis\èr^ 
Jiublio,  ebnh^e  le  préx^enu  OerQnbaiî^  'sttt  téuà  les  cbefs  de 
la  prévention; 


(53) 

»  Dît  qu'il  3era  passé  outre  au  jugement  sur  le  fopd  ; 

»  Frais  de  Tincident  à  la  charge  du  prévenu,  lui  donnant 

acte  de  ce  qu'il  n'a  entendu  accepter  le  débat  que  sur  le§ 

fins  de  non-recevoir,  qu'il  qualifie  de  questions  préjudi- 
cielles. » 

Appel  par  Deroubaix.  Pour  lui,  devant  la  Cour,  on  repro- 
duit, dans  des  conclusions  écrites,  les  objections  faites  à  la 
prpventioa  devant  le  Tribunal  d'Av^snes* 

La  Cour  a  rendu  la  décision  suivante  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Sur  la  première  fin  de  non-recevoir  : 

Atlenduque,  du  moment  où  le  Juge  d'instruction  a  été 
requis  par  le  procureur  impérial  d'informer  sur  uia  lait 
déliclif  quelconque,  il  peut,  sans  o}^ligation  rigoureuse  dje 
communiquer  chaque  fois  au  njinistère  public  et  s?ns  nou- 
veau réquisitoire  de  .celui-ci,  coutinuer  d'informer,  non 
seulement  sur  le  fait  et  lep  circonstances  qui  fonj,  l'objet 
spécial  du  premier  réquisitoire,  mais  ç.ncore  constater  tout 
ce  qui,  dans  le  cours  de  l'information,  est  porté  à  sa  con- 
naissance, surtout  lorsque,  comme  dans  l'espèce,  Ips  faits 
ont  un  mpport  direct  avec  le  fait  principal  qui  a  motivé 
i'inforraaliojn  ; 

S^r  la  deuxième  fin  de  ^on-recevoîr  : 

Attendu  que  l'art,  405  C.  peu,  çi'atleint  pas  seulement 
rescro,querie,  mai^  îiussi  la  tentative  de  çe^délit,  et  qu'en 
distingijaiM'  ain^i  J'esorogueri/Ç  de  k  t^At^tive,  cet  artiple 
n'a  évi4!emmeat  pas  confondu  et  ne  pouy^^it  confondre  le?  . 
caractères  constitutifs  de  l'un  et  de  l'autre,  puisque  l'es- 
croquei^ie  es^  le  délit  consommé,  et  que  h  tentative  n'est 
qu'un  coramencemeût  d'exécution  qui  n'a  été  suspendu  et 
n'a  manqué  son  effet  que  pfir  des  circonstances  indépen- 
dantes de  la  yftlonté  de  son  autour; 

Sur  h  .troisième  fin  de  non-recevoir  : 

Attetd»  ^W  la  reconnaissance  du  14  mars  4857,  4i-gnée 
de  ftiux,  bien  qu'écartée  de  ce  chef  par  l'ordonuanpe  de 
non-lieu  du ,6  septembre  4859  ayant  fprce  de  chose  jugée, 
a  pu  cependant  servir  d'élément  à  rinpulpatiop  de  teftla- 
live  d'escroquerie,  et  pioliver  ainpi  de  ce  chef  le  renvoi  aa 
police  correctionnelle; 


(54) 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

La  Cour  met  Tappellation  au  néant ,  confirme  le  juge- 
ment dont  est  appel,  et  condamne  le  prévenu  aux  frais  de 
rîncident; 

Ordonne  qu'à  l'audience  du ,  il  sera  plaidé  au  fond. 

Du  Slnovemb.  1859.  Chamb.  corr,  Présid.,  M.  Franco- 
ville  ;  rapp.,  M.  Minart,  cons.  ;  minist.  pub.,  M.  Carpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc,  M^s  Talon  et  Pillion(du  barr.  d'Avesnes); 

Il  fut  en  effet  plaidé  au  fond,  et  la  Cour  a  prononcé  un 
deuxième  arrêt  ainsi  conçu  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'il  résulte  de  la  procédure  et 
des  débats  la  preuve  complète ,  qu'à  diverses  reprises 
Wayenburgh  a  confié  des  blancs-seings  à  Deroubaix  ; 
"  Que  les  remises  peuvent  d'autant  moins  être  déniées , 
que,  vers  la  fin  de  4856,  la  femme  du  prévenu  elle-même 
a  détruit,  en  présence  de  témoins,  deux  de  ces  blancs-seings 
en  même  temps  qu'un  troisième  émanant  de  son  oncle  ,  en 
disant:  «Tenez,  voilà  encore  des  blancs-seings  de  mon 
père ,  de  ma  mère ,  de  mon  oncle  de  Dunkerque  ;  qu'est-ce 
qu'il  voulait  encore  faire  de  cela  ?»  ; 

Attendu  que  si  l'on  examine  Tétat  matériel  des  pièces 
incriminées,  leur  forme,  leur  contexte  ,  leur  écriture  irré- 
gulière, l'étrange  division  des  conventions  inscrites  sur 
les  deux  faces  du  papier ,  sous  là  date  du  10  janvier ,  la  si- 
gnature de  Jean  Wayenburgh,  sans  bon  ni  approuvé,  sur  le 
reçu  du  15  janvier,  ôri  ne  peut  les  regarder  comme  des 
titres  sérieux  et  vrais  ; 

Attendu  que  le  compte  qui  se  trouve  sur  une  des  faces 
du  papier  daté  du  10  janv. ,  ainsi  que  l'approbation  et  la 
certification  écrites  au  revers  de  ce  compte ,  le  tout  de  la 
main  de  Deroubaix,  sont  à  la  fois  inconciliables  avec  les 
faits  établis  et  destructifs  des  droits  et  des  intérêts  de 
Wayenburgh  qu'il  s'agissait  de  constater  et  de  garantir  ; 

Qu'en  effet  l'on  ne  comprend  pas  comment,  immédiate- 
ment après  avoir  passé  l'acte  authentique  par  lequel  De- 
roubaix se  reconnaissait  débiteur  de  30,100  f., —  conférait 
hypothèque    pour  la  garantie  du  payement ,  —  stipulait 


(55) 
un  terme  de  trois  ans  pour  se  libérer ,  —  les  parties  au- 
raient le  même  jour,  à  l'instant  même ,  recorwiu  que  les 
trente  mille  ceilt  francs  étaient  éteints  à  concurrence  de 
5/6^,:  et  consigné  un  fait  de  cette  importance  dans  Tespacc 
resserré  d'un  papier  étroit  et  informe  ; 

Qu'en  outre  il' résulte  des  renseignements  fournis  et  des 
dépositions  faites  par  le  juge  de  paix  de  Cassel ,  que  dans, 
la  réunion  qui  eut  lieu  en  sa  présence,  il  fut  positivement 
convenu  que  les  SOJIÔO  f. ,  dus  par  Deroubaix,  feraient 
Tobjet  d'une  obligation  authentique,  resteraient  en  dehors 
du  compte  à-  faire  entre  les  parties  et  que  ce  compte  porte- 
rait d'une  part  hurles  deniers  pupillaires  dus  àDerôubaix  du 
chef  de  sa  femme,  et  d'autre  part  sur  les  valeurs  mobilières 
appartenant  aux  époux  Wayenburgh,  et  que  Deroubaix 
avait  retenues  par  devers  lui  ou  dont  il  avait  fait  emploi  â 
son  profit  personnel ,  «  valeurs  plus  que  suffisantes ,  est-il 
dit ,  pour  couvrir  toutes  ses  prétentions  »  ; 

Alterfdu  que lèsiarliclcsdu  prétendu  compte  inscrits  au 
passif  de  Wayenburgh  sont  tous  méconnus  et  contestés  par 
lui  et  qtie  les  faits,  circonstances  et  présoniptions  de  la 
cause ,  notamment  les  dépositions,  et  renseignements  éma- 
nés du  juge  de  paix ,  ainsi  que  les  pièces  qhi  se  trouvent 
en  la  possession  de  Waycnbiirgh ,  tendent  et  concourent  à 
justifier  ses  dénégations;  . 

Attendu  que  si,  en  plaçant  hypothécairement  sous  son 
nom  et  à  son  profit  personnel,  une  somme  qui  lui  avait  été 
remise  à  titre  de  mandat  et  â  charge  d'en,  faire  un  emploi 
déterminé,  dans  Tintérêt  du  propriétaire ,  beroubaîx  s'est 
rendu  coupable  du  délit  d'abus  de  confiance  ;  ce  délit,  com- 
mis en  1855  ,  était  prescrit  bien  avant  réquisitoire  à  fin 
d'instruction  portant  date  du  7.  mai  dernier  ; 

Attendu  que  si  en  exigeant  par  voie  de  commandenient 
et  en  percevant,  au  mois  de  mars  4859,  deux  années  dès 
intérêts  de  cèttç  somme  alors  échues ,  le  prévenu  a  com- 
mis une  action  déloyale ,  il  faut  néanmoins  reconnaître  que 
ces  fait3  ne  peuvent  constituer  un  nouveau  défit  d'abus  de 
confiance,  les  intérêts  pajr  lui  perçus  ne  lui  ayant  été  reniis 
iaucun  des  titres  spécifiés  en  l'art.  408  C.  Pon.  ni  à 


(46) 
le  leslamenl  olographe  du  26  juin  revivait  dans  sa  force. 
La  Cour  a  confirmé  la  sentence  des  premiers  juges. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  touche  les  reproches  de  sugges- 
tion et  de  capta tion  : 

Attendu  que  s'il  en  est  question  dans  les  numéros  20  et  21 
de  Farliculation,  elle  devrait  être  imputée  à  d'autres  qu'aux 
héritiers  du  sang,  et  qu'elle  aurait  été  vainement  tentée 
dans  un  intérêt  opposé  au  leur  ; 

En  ce  qui  touche  le  reproche  de  violence  : 

Attendu  qu'elle  ne  résulte  pas  des  faits  articulés  ; 

Que  la  prétendue  séquestration  est  démentie  par  la  pré- 
sence d'une  religieuse,  d'un  sieur  Barra,  filleul  de  la  tes- 
tatrice, et  les  visites  du  notaire  Dupire,  administrateur 
nommé  par  justice,  l'entrée,  dans  la  maison,  du  mandataire 
de  Lefebvre,  du  consentement  du  notaire  Dupire  et  de  Le- 
febvre  lui-même  ; 

Qu'au  surplus,  on  ne  concevrait  guère  la  suggestion  et 
la  violence  employées  par  un  ou  deux  héritiers  dans  l'in- 
térêt de  tous  ceux  qui  doivent  être  appelés  à  la  succession, 
lorsqu'ils  auraient  pu  s'en  servir  dans  leur  intérêt  exclusif; 

En  ce  qui  touche  Tinsanité  d'esprit  : 

Attendu  que  si  la  dame  Lefebvre  a  pu,  à  certaine  époque, 
exhéréder  sa  famille  et  investir  un  neveu  de  son  mari  de 
toute  sa  fortune,  provenant  de  son  patrimoine  et  des  éco- 
nomies considérables  que  cette  fortune  a  permis  d'accu- 
muler, elle  a  pu  également,  si  elle  a  persisté  dans  cette 
volonté  tant  que  le  légataire  institué  a  été  près  d'elle,  dans 
les  derniers  jours  de  sa  vie,  revenir  aux  sentiments  de 
famille,  changer  de  volonté  et  vouloir  que  tous  ses  parents 
profitassent  de  sa  fortune,  en  oubliant  les  motifs  de  reproche 
qu'elle  aurait  pu  avoir  contre  certains  d'entre  eux  ; 

Que  rien  dans  l'articulation,  en  la  supposant  justifiée,  ne 
prouve  la  démence,  lors  de  la  confection  du  testament  du 
3  novembre  1858; 

Attendu  que  la  dame  Lefebvre  n'était  pas  dans  un  état 
habituel  de  démence  ;  que  la  preuve  en  résulte  du  testa- 
ment dont  Lefebvre  prétend  s'armer; 


(47) 

Attendu  que  si,  dans  les  n^s  16  et  21,  il  est  dit  que  Fapo- 
plexie  affectait  considérablement  ses  facultés ,  et  que,  de- 
puis le  3  octobre,  elle  n'en  reprit  plus  l'usage,  cette  articu- 
lation manque  de  précision  ; 

Qu'il  faut  dire  en  effet  quels  faits,  quels  actes,  quelles 
paroles  signalent  l'insanité  d'esprit; 
'  Attendu  qu'il  résulte  à  l'évidence  de  l'interrogatoire  de 
la  dame  Lefebvre,  du  27  juillet,  qu'à  cette  époque  elle  jouis- 
sait des  facultés  nécessaires  pour  faire  un  testament  ; 

Attendu  que,  le  24  septembre,  l'appelant  lui  rendait  des 
comptes  et  en  recevait  décharge  ; 

Attendu  qu'il  résulte,  du  testament  authentique,  que  la 
dame  Lefebvre  savait  qu'elle  avait  précédemment  fait  des 
testaments,  et  qu'elle  pousse  la  précaution  jusqu'à  révoquer 
les  écrits  qu'on  aurait  pu  lui  faire  signer; 

Qu'elle  fait  des  dispositions  pieuses  et  en  charge  ses 
héritiers,  en  nommant  l'ecclésiastique  auquel  elle  en  remet 
le  soin; 

Que,  par  lui-même,  le  testament  n'offre  rien  que  de  con- 
forme à  la  raison  ; 

Attendu  que  si  les  craintes  manifestées  suivant  le  n^  27 
de  l'articulation,  par  la  dame  Lefebvre  à  un  témoin  instru- 
mentaire,  peuvent  faire  croire  qu'elle  était  assiégée  de 
terreurs  chimériques  après  avoir  signé  l'acte  du  3  novem- 
bre, elles  ne  justifieraient  pas  que  cette  femme  n'ait  pas 
voulu  alors  révoquer  ses  testaments  antérieurs  ; 

Que  ce  témoignage  isolé,  démenti  du  reste  par  l'attesta- 
tion du  témoin  lui-même,  dans  l'acte  authentique,  que  la 
testatrice  lui  a  paru  saine  d'esprit,  ne  saurait  suffire  pour 
prouver  l'insanité  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

Sans  s'arrêter  à  la  preuve  offerte  comme  irrelevante; 

La  Cour  met  l'appellation  à  néant,  ordonne  que  le  juge- 
ment dont  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  6  ianv.  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minkst. 

Eubl.,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc.  Mes  Théodore  Bac  (du 
arreau  de  Paris),  Duhem  et  Pellieux;  avou. ,  M^s  Legrand, 
Lavoix  et  Estabel. 


(78) 

(Blavoët  C.  rainist.  publ.) 

Le  Tribunal  d'Hazebrouck  a  prononcé  la  condamnation 
suivante  : 

«  Considérant  qu'il  résulte,  d'un  procès-verbal  non  atta- 
qué et  de  l'instruction  orale  : 

»  lo  Que  le  12  novembre  dernier,  vers  onze  heures  du 
soir,  les  préposés  des  douanes  de  la  brigade  d'Herzeelle  ont 
saisi  à  l'importation  la  quantité  de  19  kilogrammes  75  dé- 
cagrammes  de  tabac  haché,  qui  ont  été  abandonnés  par  des 
contrebandiers  fugitifs,  au  nombre  desquels  se  .trouvait 
Blavoët  (dit  Sion)  ; 

»  2o  Que  le  même  jour  et  à  la  même  heure,  àHoutkerke, 
ledit  Blavoët  a  résisté  avec  violence  et  voies  de  fait  envers 
les  préposés  des  douanes  Demeau  et  Beghin,  agissant  pour 
l'exécution  des  lois,  et  ce,  avec  armes  ; 

}>  Considérant  qu'à  l'occasion  du  délit  de  rébellion  envers 
ses  préposés,  l'administration  des  douanes  a  regardé,  dans 
son  intérêt  particulier,  les  faits  commis  par  Blavoët  comme 
une  opposition,  avec  violence,  à  l'exercice  des  fonctions  des 
préposés  saisissants  ; 

»  Qu'elle  a,  à  juste  titre  et  en  sa  qualité  de  partie  civile, 
demandé  contre  Blavoët  une  deuxième  amende  ou  indem- 
nité de  500  fr.; 

»  Vu,  etc.  ; 

7>  Le  Tribunal,  statuant  sur  les  conclusions  de  l'adminis- 
tration des  douanes,  prononce  la:  confiscation  du  tabac  saisi, 
condamne  Charles-Louis-Auguste  Blavoët  (dit  Sion)  par 
corps  à  une  amende  de  500  fr.  du  chef  de  la  contravention, 
et  à  une  autre  amende  de  500  fr.  au  profi.t  de  ladite  admi- 
nistration des  douanes,  à  raison  de  la  rébellion  constituant, 
à  son  égard,  une  opposition  à  l'exercice  des  fonctions  de 
ses  employés,  et  aux  frais  du  procès  ; 

j)  Fixe  à  un  an  la  durée  d6  la  contrainte  par  corps. 

»  Statuant  sur  le  réquisitoire  de  M.  le  procureur  impérial  : 

2>  Condamne  ledit  Blavoët  (dit  Sion)  1^  à  un  mois  d^  pri- 
son pour  le  délit  de  fraude,  et  S^  à  un  an  et  un  jour  pour 
le  délit  de  rébellion.  » 

Sur  appel,  la  Cour  a  réformé,  quant  au  cumul  des 
peines  : 


(59) 
(Garçon  C  Wacogne.) 

M.  Garçon,  maire  delà  commune  de  Merlincourt,  engagé 
dans  une  instance  contre  M.  Wacogne ,  maire  de  la  com- 
nmne  de  Verton,  a  fait  opposition  à  un  arrêt  de  la  Cour  qui 
Favait  condamné  par  défaut,  et  au  jour  de  l'audience,  il  a 
fait  signifier  à  l'avoué  de  son  adversaire  une  renonciation  à 
cette  opposition.  Son  désistement  était  conçu  dans  les 
termes  suivants  : 

«  Déclare  se  désister  de  l'appel  interjeté,  renoncer  au 
»  bénéfice  de  son  opposition  à  l'arrêt  du  23  novembre  1859, 
»  et  acquiescer  en  tant  que  besoin  au  susdit  jugement , 
»  offrant  de  payer  les  frais  ,  tant  de  première  instance  que 
»  d'appel ,  sous  toutes  réserves  de  fait  et  de  droit,  » 

Le  sieur  Wacogne  a  déclaré  ne  pas  accepter  le  désiste- 
ment fait  avec  réserves.  La  Cour  a  prononcé  comme  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; -^Attendu  que  le  désistement ,  au  lieu  d'être 
pur  et  simple,  contient  des  réserves  qui  le  rendent  inac- 
ceptable ; 

Attendu  que  l'opposition  a  été  faite  dans  les  formes  et 
les  délais  de  la  loi  ; 

La  Cour,  sans  s'arrêter  au  désistement,  déclare,  en  la 
forme,  Garçon  recevable  en  son  opposition  à  l'arrêt  par  dé- 
faut du  23  novembre  1859,  l'en  déboute  au  fond  par  les 
motifs  déduits  audit  arrêt,  lequel  sortira,  en  conséquence, 
son  entier  effet ,  et  condamne  Garçon  aux  dépens  occa- 
sionnés.  . 

Du  16  janv.  1860.  l^echamb.  Présid,,  M.  de  Moulon  , 
l^^présid.;  minist.  publ. ,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.  ; 
avoc.  Me  Duhem  ;  avou. ,  Mes  Poncelet ,  Villette  et  La  voix. 


COMPTE  COURANT.— BANQUIER.— OPÉRATIONS  DEBOURSE. 
—  AGENT  DE  CHANGE. —  EXÉCUTION.  —  REPORTS  A  TERME. 
— MANDAT.  — ,  COUVERTURE.  —  ACHAT  DE  VALEURS. 

Le  banquier  qui  s'est  chargé  pour  un  tiers  avec  lequel  il  a 
un  compte  courant,  de  faire,  par  Ventremise  d'agent  de 
change,  à  la  Bourse  de  Paris,  des  reports  k  iermOy  peut,  à 
une  liquidation,  exécuter  5(m  client,  en  portant  au  compte 
de  celui-ci  le  prix  d^aclmt  et  le  prix  de  vente  des  valeurs 
en  report,  sans  plus  reporter,  et  peut  exiger  son  solde. 

...Alors  quê  V  agent  de  change  exécute  le  banquier  lui-même; 


<00) 

».,Que  le  client  de.  celui-ci  n'a  pas  reiianvelé  le  mandai  de 
reporter,  et  que,  débiteur  au  compte  courantj  il  n'a  pas 
cauvert  le  banquier  de  valeurs  suffisantes  pour  V  achat 
des  valeurs; 

Ce  marne  client  ne  peut  ultérieurement,  dans  ce  cas,  et  alors 
même  que  son  compte  avec  le  bamjuier  n'a  pas  cessé  de 
courir,  réclamer  de  cetui-ci  la  vente  de  ses  valeurs  à  un 
marché  qu'il  détermine,  (1) 

(i)  hQs  reports  à  fehna  peuvent,  d'après  imc  jurisprudence  encore  ré- 
cente, être  considérés  comme  licites,  iorsqii*av  heu  dis  cacher  de&  opéra- 
tions fictives  et  des  jeux  de  bourse,  ils  ont  pour  objet  un  marché  sérieux 
devant  amener  la  délivrance  réelkdes  titres, —  V.  nof(tm,  Cass.,  19ianv. 
1860,  alTairc  dite  des  couIissi^sG.  agents  de  cbaBge ,  et  lea  nombreux 
documents  produits  à  cette  occasion.  (QaU.  pér.  J^PQO,  i,à%) 

Mais  lorsqu'à  Tcvidence  les  repçfts  à  tevme  n'ont  consisté  que  dans  des 
opérations  de  différences,  sans  couvertures  faites,  sans  titres  déposes  ni 
iD-cme  possédés,  ils  n'ont  aucun  caractère  de  légalité,  et  les  Tribunaux 
placés  devant  ces  sortes  d'opérations,  alors  mémo  qu'on  les  dit  sérieuses, 
«c  doivcDt-ils  pas  se  refuser  à  les  consacrer*!  C'est  ce  <iui  a  été  juge. — 
y,  Imicûs  14  janv.  1851,  Jouni.  desNot.  18u9,  p.  139. 

«  Attendu,  ait  cet  arrêt,  que  les  opérations  dont  il  est  question  cons- 
»  lituent  des  infractions  à  des  lois  d  ordre  public;  ciue, dès-lors,  il  n'est 
»  pas  permis  aux  Tribunaux  de  prononcer  une  condamnalion  pour  des 
>  faits  au  sujet  desquels  il  n'est  accordé  en  justice  aucune  action,  et  qui, 
»  d'ailleurs,  sont  considérées  comme  des  délits  ; 

»  Allcndu  qu'il  importe  peu  que,  dans  l'espèce,  G...  et  H...  n'élèvent 
»  de  contestation  que  sur  la  manière  d'établir  leur  compte  avec  X...  ; 
T»  que,  quel  que  soit  le  résultat  de  ce  compte  en  faveur  de  ce  dernier, 
:»  le  Tribunal  ne  pourrait  donner  la  sanction  au  payement  d'un  solde 
jf  pour  lequel  la  loi  dénie  toute  action  en  justice.  :»    ^ 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  Tribunaux',  pour  cette  intervention  d'office,  ont 
nécossairement  une  souveraine  appréciation  des  circonstances. 

Dans  l'espèce  que  nous  rapportons  aujourd'hui,  tout  tendait  sans 
doute  à  démontrer,  malgré  la  direction  donnée  à  la  demande  et  les  dé- 
clarations de  Tappekint,  que  les  opérations  de  report  n'avaient  pas  été 
des  nmrchés  sérieux.  L'agent  de  cnange  pointé,  suivant  l'expression  du 
parquet  de  la  Bourse,  demande  couverture  ô  son  mandant,  qui  lui-même 
àéïiOïiceV exécution  à  ses  clients.  Il  n'y  a  là  ni  titre  déposé,  ni  garantie 
donnée  à  l'agent  de  change,  dont  la  responsabilité  est  évidemment  en- 
gagée dans  un  jeu  de  différences.  La  Cour  aurait  donc  pu  ,  comme  celle 


posant  même  que  le  défendeur  à  Ja  demande  en  solde  de  comj)le  courant 
eût  voulu  véritablement  faire  une  opération  sérieuse,  une  question  impor- 
tante et  délicate  restait  toujours  à  décider.  Si  les  titres  avaient  été  aclietés 
par  l'agent  de  change,  pour  le  compte  du  banquier,  dés  le  mois  de  juillet 
1854,  ces  titres,  en  vertu  des  principes  qui  régissept  le  conlrat^lç  çoi|>pte 
jcourant,  étaient  devenus  la  propriété  de  l'acheteur.  Dès-lors  pouvaient- 
ils  être  vendus  par  le  banquier,  pour  l'agent  de  change  ou  pour  lui- 
même?  —  Décis.  nég.  Metz,  27  jmH.  1858.  Jurisp.  du  ISot.,  année  1859, 
p.  715,  art.  H, 489. 


(61) 

(Carpentier  C.  Pareur,  Dènoyelle  et  O^.) 

11.  Carpentier,  propriétaire  àSaint-Saulve,  était  en  compte 
courant  avec  la  banque  Viletlc^  Denoyelie  et  C^^,  devenue, 
par  suite  de  liquidation,  la  maison  Pureur,  Denoyelie  et  C»e, 
de  Valénciennes.  Il  cornmissionnait  en  même  l^emps  celte 
bamjûe  pour  Tachât  de  certaines  valeurs  à  la  Boui'se  de 
Paris.  Après  plusieurs  opérations  de  ce  genre,  il  là  chai^ 
gea  de  lui  faire  des  reports  à  terme  sur  cinquantîî  actions 
(du  Crédit  mobilier  et  sur  3,000  fr.  de  i^ente  3  p.  ^/o.  A 
clîaque  liquidation,  le  repoi't  était  effectué  par  Tintermé'* 
diaire  de  l'agent  de  change  Mahoû,  et  ta  banque  Viletle, 
Denoyelie  et  G»®  portait  au  compte  courant  de  Cari>efîiier  l'a- 
chat et  la  vente  des  valeurs  qui  se  faisaient  simaltanémèùt 
pour  l'opération  du  report  à  termes  de  telle  sortie  qu'à  ce 
compte  courant  ressortait  une  différence  entre  l'achat  et  la 
vente,  soit  au  débit,  soit  au  crédit^  suivant  que  l'opération 
avait  été  heureuse  ou  malheureuse  * 

Les  choses  s'étaient  passées  ainsi  depuis  le  mois  de  juil- 
let 1854;  jusqu'au  mois  de  janvier  1855,  lorsqu'à  la  liquida- 
lion  du  15  courant  pour  les  ciiiquante  mobiliers  et  à  celle 
de  fin  du  mcÀs  pour  les  3  p.  «/o,  l'agent  de  change  Mahou, 
dont  le  carnet  était  chargé  de  ces  sortes  d'opérali«onè>>  fut 
exécuté  par  la  chambre  syndicale.  Impuissant  à  faire  les 
versements  qui  lui  étaîenl  prescrits,  il  se  retourna  vers  les 
banquiers  Vilelte,  Denoyelie  et  C^c^ses  commettants.  Ceux-ci 
firent  signifier  à  leurs  clients,  assez  nombreux  et  parmi  les- 
quels Côrpentier,  la  soin mation  que  leur  adi'èssait  Mahou 
de  fournir  les  îôuds  des  valeuiis  engagées,  ou  de  les  laisser 
vendre  à  la  Boar«e  du  lendemain.  La  banque  inscrivît  en- 
suite, aux  comptes  courants  des  divers  intéressés  eim 
compte  particulier  de  Carpentier,  le^îrix  de  vente  desva- 
ïeuï's  àcnèlées  pour  le  dernier  report,  plus  ou  moins 
sérieusement,  mit  ainsi  fin  à  l'opération  du  report  à  lerme, 
et  demanda  à  ses  clients  le  solde  de  leur  "compte  courant. 

La  plupart  de  ceux-ci  invoquèrent  contt'e  la  banque  ï'e^c- 
cejHion  de  jeu.  Ils  «'aTaifent,  ont-ils  dit,  jamais  Versé  de 
fonds  à  la  banque,  ^rce  qu'en  effet  ils  n'étaient  pas  ache- 
teurs sérieux.  La  banque,  sous  leur  nom,  ne  faisait  que  dés 
différences  à  la  Bovirse.Vilette,  Denoyelie  el  C^^^  ne  firent  que 
peti  Où  pôîlsit  ^'''objections  à  cette  réponse. 

Qdafnl  à  Cai^pèiitier,  iPne'se  considéra  pas  comme  touché 
par  là  sottirtrsftidti,  et  lai^a  <50ufir  sôti  compté  "avec  les  ban- 
quiers. Cetïx-ci  iïisistèrertt  biei^  pbiiv  i[!)1:ttenir  lè  solde  Se 


(82) 

lôire  et  commerciale,  puisqu'elle  associe  le  créancier,  sinon 
aux  perte^,  au  moins  aux  bénéfices  d'une  opération  toute 
industrielle.  Sous  tous  les  rapports  donc,  les  contestations- 
nées  d'opérations  de  cette  nature  appartiennent  à  la  juridic- 
tion commerciale,  et  à  tort  le  Tribunal,  juge  civil,  a  retenu 
la  connaissance  du  litige.  .,      .  ' 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  de  première  instance* 

ARRÊT. 
LA  COUR; — ^Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  met 
l'appellation  au  Ȏajat ,  ordoniie  que  le  jugement  dont  est 
appel  sortira  son  plein  et  entier  effet ,  condamne  les  appe- 
laÊits,  etc. 

Du  31  janvier  4860.  l^c  chamb.  Présid.  ,  M.  de  Moulon , 
l^r  prés.  ;  minist.  publ.^  M.  Morcrette,  avoc.-gén.  ;  con- 
clus, contbrm.  ;  avoc.  ,  M^s  Talon  et  Duhem  ;  avou. ,  M^s 
Debeaumont  et  Estabel. 


BRIS  DE  CLOTURE.  —  soustraction.  —  immunité  pour 

PARENTÉ. 

Limmunité  accordée  par  la  loi  à  ceux  qui  ont  commis  dea 
soustractions  am  préjudice  de  leitrs  parents  ou  alliés,  de 
n'être  soumis  qu'à  des  reparutions  civiles,  ne  peut  s'é- 
tendre au  délit  de  bris  de  clôture,  alors  même  qu'il  se 
rattache  à  un  vol  commis  dans  les  conditions  de  l'art. 
380  C.  pén.  (1). 

(Troqu£nez  C,  minist.  publ.) 
Un  sieur  Troquenez,  qui  avait  commis  un  vol  avec  bris 
de  clôture  chez  son  beau-père,  a  été  condamné,  sur  ce  der- 
nier chef,  par  le  Tribunal  correctionnel  de  Cambrai,  à  un 
mois  d'emprisonnement. 

(1)  Un  pourvoi  en  cassation  avait  été  formé  contre  VMvéi  que  noua 
rapportons,  mais  il  a  été  frappé  de  déchéance  sur  le  motif  que  le  certi- 
ficat d'indigence  du  prévenu,  produit  à  la  Cour  de  cassation,  av.ait  été 
seulement  visé  et  non  approuvé  par  le  préfet,  conformément  à  l'art.  420 
C.  inst.  crim.  (C.  cass.,  chamb.  crim.,  audience  du  leï  mars  1860.)  V. 
Momt.  des  Triburir.  du  2  mars  1860. 

Y.,  pour  la  solution  donnée  paf  la  Cour  de  Douai,  Chauveau  etHélie, 
l.  6,  p.  602;  Rauter,  t.  2,  p.  114. 

Consultez  «epondant  Cass.  26  juill.  1811,  Pal,  édit.  nouv.  à  sa  date; 
Carnot,  t.  6,  p.  258,-»^  7,  et  sur  l'art.  380  C.  pén.  Adde,  Exposé  des 
mjotifs^  du  G.  pén.  —  V.  encore,  pont  les  princi|»es  de  Part.  380,  Cass. 
31  déc.  1837,  J.  Pal.  1838,  1,  131,  et  les  théories  e^^osées  sm  cetto 
matière  par  Chauveau  et  Hélie,  t.  6,  p.  599;  Legraverend,.  t.  2,  p.  119, 
note  8;  Carnot,  Comment.,  t.  2,  n»  221,  note  i. 


(83) 

H  a  appelé  de  ce  jugement.  Devant  la  Cour,  il  réclamait 
Timmunité  accordée  par  Tart.  380  G.  pén.,  par  laquelle  les 
parents  et  alliés,  au  préjudice  desquels  ont  été  commises 
des  soustractions ,  ne  peuvent  donner  lieu  qu'à  des  répa- 
rations civiles. 

Le  ministère  public  appelait  à  minimâ  de  la  condamna- 
tion à  un  mois  d'emprisonnement,  peine  qu'il  ne  trouvait 
pas  en  rapport  avec  les  délits  commis. 

La  Cour  a  rendu  la  décision  dont  la  teneur  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  le  fait  pour  lequel  Troquenez 
a  été  renvoyé  devant  le  Tribunal  de  police  correctionnelle 
de  Cambrai,  constitue  un  bris  de  clôture,  délit  prévu  par 
l'art.  456  C.  pén.; 

Attendu  que  si  ce  fait  se  rattache  à  une  soustraction  qui 
perd  le  caractère  délictif  par  suite  de  l'immunité  écrite  dans 
l'art.  380  du  même  Code,  celte  immunité  doit  être  renfer- 
mée dans  sa  spécialité  exceptionnelle  et  ne  peut  couvrir  le 
bris  de  clôture,  lequel  est  un  délit  distinct,  stU  gêner is,  et 
intéressant  autant  la  sécurité  des  personnes  que  leurs 
intérêts  ; 

Par  ces  motifs,  la  Cour  faisant  droit  sur  les  appels  res- 
pectifs et  du  ministère  public,  et  amendant  le  jugement 
dont  est  appel , 

Déclare  que  Troquenez  s'est  rendu  coupable,  dans  la  nuit 
du  \\  au  12  octobre  4857,  à  Solesmes,  du  délit  de  bris  de 
clôture,  prévu  et  puni  par  l'art.  456  C.  pén.; 

Le  condamne  à  un  mois  d'emprisonnement. 

Du  49  décembre  1859.  Chamb.  corr.  Présid.,  M.  Fran- 
coville;  conseill.  rapp.,  M.  Faucher;  minist.  publ.,  M.  Car- 
penlier. 


lo  BREVET  D'INVENTION.— RÉSULTAT  industriel  nouveau. 

.  — caractères.  —  BREVETABILITÉ. 
2<>G0imiEFAÇON.  —   DISSEMBLANCES    ENTRE     APPAREILS.. — 

ATTEINTE  AU  BREVET, 
3o  CERTIFICATS  d' ADDITION.  —  NULLITÉ. 

1°  G  est  un  résultat  complet  et  nouveau,  portant  avec  lui  tous 
les,  caractères  susceptibles  de  constituer  une  invention  ou 


(U) 

découverte  indiisirielle  noitvelle,  remplissant  toutes  les 
conditions  exigées  par  la  loi,  pour  être  justement  brevetée^ 
que  le  brûlemenï  des  gaz  qui  se  dégagent  et  se  dévelop- 
pent dans  les  opérations  de  vidange  des  matières  fécales 
à  laide  d'un  fourneau  hermétique  ne  recevant  d'air  par 
aucune  ouverture  extérieure,  brûlant  complètement  les^ 
•  dits  gaz,  sans  qu'il  y  ait  dispersion  d'odeur  méphitique 
au  dehors.  (Art.  2  et  30  L.  5  juillet  1844.)  (1). 

2^  La  validité  du  brevet  étant  établie,  la  demande  en  nul- 
lité des  certificats  d'addition  devient  sa7is  objet.  (Art.  30 
de  la  même  loi.) 

3»  Bien  que  le  contrefacteur  ne  fasse  pas  usage  des  moyens 
employés  par  le  breveté  pour  éviter  certains  inconvénients 
(l'explosion  dans  l'espèce)  et  qu'il  reste  ainsi  exposé  à 
certains  accidents,  il  n'en  a  pas  moins  porté  atteinte 
aux  droits  du  breveté  en  s' appropriant,  au  préjudice  de 
celui-ci,  le  moyen  faisant  V objet  principal  du  brevet. 
,(Art.  40  de  la  même  loi.)  (2). 

(Lesage  C.  Bailly.) 

Le  sieur  Lesage-Goctz,  entrepreneur  de  vidanges,  demeu- 
rant à  Mulhouse,  s'est  fait  breveter,  à  la  date  du  11  décem- 
bre 1855,  pour  un  appareil  complet  devant  servir  à  opérer 
la  vidange  des  fosses  d'aisance  d'une  façon  tout  à-fait  ino- 
dore. L'idée  fondamentale  du  brevet  était  la  combustion 
complète  et  sans  déperdition  dans  l'air  atmosphérique  des 
gaz  délétères  quji  se  produisent  pendant  le  travail  à  faire  dans 


permît  d'accepter.  Voici  ce  que  Lesage  a  imaginé. 

Sur  un  tonneau  hermétiquement  fermé,  et  auquel  aboutit 
un  conduit  en  gutta-percha  aussi  parfaitement  fermé,  il 
place  une  sorte  ,de  petite  cheminée  d'appel  aboutissant  à 
un  réchaud  hermétique  d'où  il  ne  s'échappe  que  des  gaz 
brûlés  et  par  suite  sans  odeur. 

Les  matières  sont  prises  dans  la  fosse  par  une  pompe  as- 
pirante et  foulante,  et  amenées  dans  le  tonneau  jusqu'à  ce 
qu'un  flotteur  apparaissant  dans  une  lanterne  hermétique- 
ment fermée,  aussi  sur  le  tonneau,  à  côté  du  réchaud,  in- 

(1)  V.  Douai  28  avril  1858,  Jurisp.  16,  337,  et  la  note  où  sont  résu- 
mées la  jurisprudence  de  la  Cour  et  la  jurisprudence  générale.  Ajoutez 
Douai  17  août  1859,  Jurisp.  17,  390. 

(2)  10  mai  1856.  (Paris.  —  S.  V.  1856,  2, 531  et  la  note.) 


(85) 

dique  que  l'opération  est  finie,  le  tonneau  étant  plein.  Les 
tonneaux  se  succèdent  ainsi  les  uns  aux  autres. 

Toutefoisie réchaud  désinfecteur  ougazivorc  étant  de  cette 
manière  en  contact  direct  avec  les  gaz  qui  s'échappaient  des 
matières  arrivant  dans  le  tonneau,  n'était  pas  sans  danger  : 
la  combustion  pouvait  se  faire  d'une  façon  irrégulîère,  ga- 
gner par  le  bas,  enflammer  les  gaz  du  tonneau  et  amener  une 
explosion.  Lesage  prit  deux  certificats  d'addition  aux  dates 
des  7  mai  1857  et  8  février  1859.  Par  l'un  des  perfection- 
nements, il  rendait  le  gazivore  mobile  et  pouvait  le  placer 
même  sur  un  trottoir,  ce  qui  permettait  non-seulement 
d'éviter  l'explosion,  mais  de  travailler  dans  toutes  sortes  de 
rues,  larges  ou  étroites  ;  par  l'autre,  il  créait,  dans  un  con- 
duit entre  le  tonneau  et  le  gazivore,  un  réservoir  à  eau 
que  les  gaz  devaient  traverser  avant  d'arriver  au  fourneau, 
ce  qui  séparait  ainsi  du  foyer  les  gaz  contenus  dans  le  ton- 
neau à  faire  la  vidange. 

Un  sieur  Bailly,  entrepreneur  de  vidanges  à  Cambrai, 
ayant  entendu  parler  du  système  de  Lesage,  essaya  de  traiter 
avec  lui  pour  avoir  le  droit  de  se  servir  de  son  appa- 
reil à  Cambrai.  Bailly  et  Lesage  ne  s'entendirent  pas,  et 
Lesage  fit  saisir-d écrire,  à  la  date  du  3  février  18o8 ,  un 
appareil  dont  Bailly  se  servait  à  Douai  dans  la  rue  des  Huit- 
Prêtres.  Bien  qu'il  ne  fut  pas  tout-à-fait  pareil  à  celui  décrit 
dans  le  brevet,  plusieurs  ressemblances  néanmoins  frap- 
paient la  vue. 

Lesage  assigna,  devant  le  Tribunal  de  Douai,  Bailly  qui  se 
défendit  en  soutenant  que  rien  de  nouveau  ne  se  rencon- 
trait dans  l'appareil  de  Lesage  ;  que  la  désinfection  par  la 
combustion  des  gaz  était  dans  le  domaine  public  ;  que  tous 
les  organes  de  l'appareil  de  Lesage  étaient  aussi  depuis  long- 
temps dans  le  domaine  public;  que  la  compagnie  Richer, 
de  Paris,  avait  même  dédaigné  depuis  longtemps  le  système 
de  Lesage,  qui  nés' était  fait  breveter  qu'après  cet  abandon. 

Ce  système  réussit,  et  le  Tribunal  de  Douai,  jugeant  cor- 
reciionnellement,  le  24  avril  1858,  déclara  Lesage  non  re- 
cevable,  en  tous  cas  mal  fondé  dans  ses  demandes,  fins  et 
conclusions,  l'en  débouta,  en  le  condamnant  aux  dépens. 

Le  27  avril,  appel  par  Lesage. 

11  fut  soutenu  pour  lui  qu'il  était  désormais  incontestable 
que  l'application  nouvelle  d'un  procédé  connu,  ou  qu'un 
procède  nouveau  d'emploi  d'un  moyen  connu,  suffisait  pour 
constituer  une  iuvcntion  brevetable  ;  que  la  Cour  de  cassa- 


(86) 

iton  avait  été  récemment  plus  loin  encoi^e  en  consacrant 
ce  principe  que ,  bien  que  l'emploi  d'une  matière , 
pour  arriver  à  un  certain  résultat,  soit  tombé  dans  le 
domaine  public ,  les  procédés  nouveaux  d'emploi  de  pette 
matière,  dans  des  conditions  spéciales  et  nouvelles,  pou- 
vaient valablement  faire  l'objet  d'un  brevet  d'invention. 
(L.  du  5  iuill.  4844-,  art.  2  et  30  ;  arrêt  Laming  contre  Ca- 
vaillon,  du  25  nov.  1856  (S.  V.,  1857,  i,  678.)  Qu'au 
surplus  rien  n'empêchait  que  la  Cour  commît  experts 
ayant  à  rechercher  la  nouveauté  du  procédé  Lesage ,  sa 
brevetabilité ,  les  ressemblances  ou  les  différences  de 
l'appareil  breveté  et.de  l'appareil  saisi. 

La  Cour,  avant  faire  droit,  confia  cette  mission  à  M.  Jean- 
Baptiste  Chevalier,  chimiste,  professeur  à  l'école  de  phar- 
macie de  Paris. 

A  l'audience  du  21  décembre  1859,  il  fut  discuté  sur  le 
rapport  de  M.  Chevalier  et  conclu  subsidiairement  à  ce  que 
l'on  entendît  en  personne  l'expert  Chevalier,  et  MM.  Vasse 
et  Evrard,  qui  avaient  vu,  l'un  à  Cambrai,  l'autre  à  Douai, 
fonctionner  les  appareils. 

La  Cour  rendit  un  nouvel  arrêt  d'avant  faire  droit,  et 
ordonna  que  MM.  Jean-Baptiste  Chevalier,  chimiste,  pro- 
fesseur à  l'école  de  pharmacie  de  Paris  ;  Vasse,  professeur 
de  chimie  et  de  physique  au  lycée  impérial  de  Douai  ; 
Cléomède  Evrard,  ingénieur  civil  à  Cambrai,  seraient  en- 
tendus en  personne,  ce  qui  eut  lieu  à  l'audience  du  9  jan- 
vier 1860. 

Enfin  la  Cour,  après  débats  nouveaux,  statua  définitive- 
ment en  ces  termes  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  concerne  la  demande  en  nullité 
de  brevet  opposée  par  Bailly  à  Lesage,  à  titre  d'exception  ; 

Considérant  que  les  recherches  faites  par  l'expert  Che- 
valier, ainsi  que  le  constate  son  rapport,  clos  à  Paris  le  6 
juillet  1859,  ont  établi  que,  depuis  longtemps,  les  moyens 
de  détruire  et  de  brûler  les  gaz  méphitiques  et  délétères , 
qui  se  dégagent  des  matières  fécales  et  qui  se  développent 
surtout  au  moment  où  l'on  opère  la  vidange  de  ces  matières, 
avaient  fait  l'objet  d'études  diverses,  d'expériences  et  d'ap- 


(87) 

plîcations  pratiques,  sans  que  le  problême  ait  été  complète- 
ment résolu  ; 

Qu'en  cet  état  de  choses,  et  à  la  date  du  44  décembre 
4855,  Lesage-Goetz  s'est  régulièrement  pourvu  devant  l'au- 
torité compétente  afin  d'obtenir  un  brevet  d'invention  ayant 
notamment  pour  objet  d'opérer  la  vidange  des  matières 
fécales  d'une  manière  tout-à-fait  inodore,  lequel  brevet  lui 
a  été  délivré  le  6  janvier  4856  ; 

Considérant  qu'il  en  résulte  : 

4o  Des  études  duditexpejft,  consignées  au  rapport  précité,, 
ainsi  que  des  expériences  auxquelles  il  a  soumis  les  appa- 
reils Lesage,  tant  en  4858  qu'en  4859  ; 

2°  Des  observations  contradictoirement  présentées  et  dé- 
battues à  l'audience  du  9  janvier  4860,  tant  par  ledit  expert 
que  par  MM.  Vasse  et  Evrard,  en  exécution  de  l'arrêt  du  24 
décembre  précédent; 

Que  le  fourneau,  qui  fait  l'objet  du  brevet  tel  qu'il  a  été 
présenté  aux  experts,  ne  recevant  d'air  par  aucune  ouver- 
ture extérieure,  brûle  complètement,  et  sans  qu'il  y  ait  dis- 
persion d'odeurs  méphitiques  au  dehors,  les  gaz  qui  se 
développent  dans  l'opération  de  la  vidange,  et  qu'en  raison 
du  résultat  complet  qu'il  produit,  l'appareil  de  Lesage  dif- 
fère essentiellement  de  ceux  qui  avaient  été  antérieurement 
employés  ou  décrits; 

Que  ce  résultat,  tout  à  la  fois  complet  et  nouveau,  porte 
avec  lui  tous  les  caractères  susceptibles  de  constituer  une 
invention  ou  découverte  industrielle  nouvelle  et  remplis- 
sant toutes  les  conditions  exigées  par  la  loi  pour  être  juste- 
ment brevetée  ; 

Considérant  que  la  validité  du  brevet  de  Lesage  étant 
établie,  la  nullité  dont  Bailly  prétend  impugner  les  certifi- 
cats d'addition  doit  nécessairement  disparaître,  cette  nullité 
n'étant  invoquée  t)ar  lui  que  comme  la  conséquence  légale 
de  celle  du  brevet; 

En  ce  qui  concerne  la  poursuite  en  contrefaçon  dirigée 
par  Lesage  contre  Bailly  : 

Considérant  que,  pour  opérer  le  brûlement  des  gaz  qui 


(88) 
se  dégagent  et  se  développent  dans  les  opérations  de  vidange 
des  matières  fécales,  Bailly  fait  usage  d'un  fourneau  hei*- 
métique  fermé,  dans  sa  partie  supérieure ,  par  une  cou- 
verture solidement  fixée  et  surmontée  d'une  cheminée  ; 

Que,  comme  Lesage,  il  détruit  aussi  ces  gaz  en  les  for- 
çant à  passer  au  travers  des  charbons  ardents  concentrés 
dans  un  foyer  fermé  à  l'accès  de  l'air  extérieur; 

Que  s'il  ne  fait  pas  usage  des  moyens  employés  par  le 
breveté  pour  éviter  l'explosion,  et  que  s'il  est  resté  ainsi 
exposé  à  certains  accidents,  il  n'en  a  pas  moins  porté  atteinte 
aux  droits  dudit  breveté  en  s'appropriant,  au  préjudice  de 
celui-ci,  le  moyen  faisant  l'objet  principal  du  brevet; 

Que  vainement,  pour  repousser  la  poursuite  en  contre- 
façon dirigée  contre  lui,  Bailly  prétend  s'être  servi  d'un 
fourneau  précédemment  employé  par  la  Compagnie  Richer, 
à  Paris,  et  même  abandonné  par  elle  ; 

Qu'en  effet,  d'après  les  documents  produits  par  les  par- 
ties, le  premier  fournçau  de  la  Compagnie  Richer,  loin  de 
présenter  aucun  des  avantages  attachés  à  sa  fermeture  her- 
métique, était  au  contraire  d'une  forme  large,  dépourvu  de 
toute  couverture  entièrement  en  contact  avec  l'air  exté- 
rieur, et  présentait  ainsi  un  danger  pern^anent  d'incendie  ; 

Que  le  fourneau  employé  en  dernier  lieu  par  cette  Com- 
pagnie était  percé  d'ouverturess  latérales,  destinées  à  faire 
appel  à  l'air  extérieur  et  à  demander  ainsi  la  destruction 
des  gaz,  tout  à  la  fois  à  l'air  chaud  et  aux  charbons  ai'- 
dents,  avec  tous  les  inconvénients  qui  peuvent  résulter  de 
cette  combinaison  ; 

Que  Bailly  fait  donc  emploi,  non  de  l'un  des  fourneaux 
de  la  compagnie  Richer,  mais  du  fourneau  breveté  de 
Lesage  ; 

Par  ces  motift  : 

La  Cour ,  statuant  tant  sur  les  conclusions  des  parties 
que  sur  celles  du  ministère  public , 

Déclare  Bailly  mal  fondé  en  sa  demande  en  nullité  du 
brevet  et  des  certificats  d'addition  délivrés  à  Lesage  ; 

Déclare  Içdit  Bailly  convaincu  du  délit  de  contrefaçon,  en 


(89) 

raison  de  Talteinte  portée  par  lui  aux  dioils  de  Lesage  par 
remploi  du  fourneau  gazivore  faisant  l'objet  du  brevet  du- 
dit  Lesage  ; 

El  vu  les  art.,  etc.; 

Prononce  la  confiscation  du  fourneau  repris  sous  le  n»  0 
de  la  saisie-description  du  3  février  1858,  ledit  fourneau 
ayant  forme  de  calorifère,  muni  d'une  grille  d'un  décimètre 
de  diamètre  et  surmonté  d'une  cheminée  ; 

Ordonne  que  ce  fourneau  sera  remis  à  Lesage,  proprié- 
taire du  brevet  ; 

Condamne  Bailly,  même  par  corps,  à  payer  audit  Lesage, 
à  litre  de  dommages-intérêts,  la  somme  de  500  fr.,  ainsi 
qu'aux  frais  de  première  instance  et  d'appel  ; 

Fixe  à  un  an  la  durée  de  l'exercice  de  la  contrainte  par 
corps  ; 

Ordonne  qu'un  extrait  du  présent  arrêt ,  contenant  les 
motifs  etle  dispositif  relatifs  à  la  contrefaçon,  sera,  aux  frais 
dudit  Bailly,  affiché  au  nombre  de  cinquante  exemplaires, 
répartis  dans  les  villes  de  Douai,  Cambrai,  Lille,  Paris  et 
Mulhouse  ; 

Dit,  etc. 

Du30  janv.  1860.  Chamb.  corr.  Président,  M.  Franco- 
ville  ;  rapp.,  M.  Minart,  conseill.  ;  avoc.-gén. ,  M.  Carpen^ 
tier,  concl.  conf.  ;  avoc,  M^s  Emile  Flamant  et  Rossignol; 
avou.,  Me  Lavoix. 


ADOPTION.  —  ENFANT  NATUREL  RECONNU. 

L'adoftion  d'un  enfant  naturel  reconnu  est  valable  (1), 


(I)  Cet  arrêt  est  conforme  à  la  jurisprudence  constante  de  la  Cour  de 
Douai  (V.  Not,  Tab.  gén.,yo  Adoption,  n»  1)  qui  déclare  valable  Tadop- 
tion  des  enfants  naturels. 

Le  même  jour,  24  mars  1860,  la  l^e  et  la  2e  chambres  réunies  sous 
Ja  présidence  de  M.  de  Moulon,  premier  président,  ont  confirmé  un 
jugement  du  Tribunal  de  Saint-Pol,  qui  avait  prononcé  l'adoption  d'un 
enfant  naturel  reconnu. 

V.,  sur  la  question,  les  nombreuses  autorités  indiquées  sous  un  arrêt 
du  13  juinl85i.  (.1.  Pal.,  t.  i855,  p.  59.)  La  Cour  de  Paris  n'a  pas  hé- 


(90) 

(Pisson  C.  Salvan.) 

Par  acte  reçu  devant  M.  le  juge  de  paix  du  Quesnoy,  le 
27  mars  1834-,  la  dame  Marie-Rosalie  Lesnes,  veuve  Joly^ 
alors  âgée  de  85  ans,  adopta  sa  fille  naturelle  reconnue,  la 
dame  Anne-Joseph  Lesnes,  veuve  Berlin,  âgée  de  62  ans. 
Cette  adoption,  homologuée  par  jugement  du  Tribunal  civil 
d'Avesnes,  fut  définitivement  prononcée  par  arrêt  de  la  Cour 
royale  de  Douai,  le  9"août  4o39.  A  la  mort  de  l'adoptante, 
le  48  décembre  1840,  la  totalité  de  sa  succession  fut  re- 
cueilUe  par  l'adoptée.  Le  4  juin  484'3,  cette  dernière  mou- 
rut, laissant  un  testament  par  lequel  elle  instituait  lessieur& 
Désiré,  François  et  Hippolyte  Salvan  ses  légataires  univer- 
sels. Ceux-ci  se  mirent  aussitôt  en  possession  de  la  succes- 
sion de  la  testatrice  et  en  jouirent  sans  trouble  jusqu'au 
commencement  de  l'année  4859.  A  cette  époque,  les  sieurs 
Pisson,  héritiers  collatéraux  de  la  mère  naturelle  de  l'adop- 
tée,  réclamèrent  le  quart  des  biens  laissés  en  4840  par  îa 
veuve  Joly.  lis  prétendirent  que  l'adoption  de  la  veuve  Ber- 
tin,  fille  naturelle  de  leur  auteur,  devait  être  annulée,  comme 
contraire  à  la  loi,  aux  idées  morales  et  protectrices  du  légis- 
lateur sur  la  famille,  à  son  système  d'organisation  légale 
sur  la  part  ou  la  réserve  des  enfanls  naturels  reconnus.  Ils 
soutinrent,  en  conséquence,  qu'à  raison  du  vice  de  son 
origine,  la  veuve  Bertm  n'avait  pu  recueillir  plus  des  trois 
quarts  de  l'hérédité,  aux  termes  de  l'art.  757  C.  Nap. 

Un  jugement  du  Tribunal  d'Avesnes,  en  date  du  6  août 
4859,  rejeta  l'action  des  demandeurs  dans  les  termes 
suivants  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  l'adoption  est  une  fiction  de  la  loi  qui 
confère  à  l'adopté  presque  tous  les  avantages  de  la  filiation 
légitime  ;  que  la  loi,  en  mettant  à  cette  faveur  certaines 
conditions  déterminées,  n'en  a  excepté  les  enfants  naturels 
ni  directement  ni  indirectement  ;  que  ce  silence  du  législa- 

site  à  se  ranger  à  l'opinion  de  la  Cour  de  cassation.  Cass.,  i^  avril  1846, 
dans  trois  espèces  :  fre  espèce,  Bazoin  (S.  V.  46, 1,  273,  et  J.  Pal.  46, 
2,  570)  ;  2o  espèce,  Tourret  (S.V.  46,  1,  278  ;  J.  P.  46, 2, 574)  ;  3c  es- 
pèce, Peyrard  (S.  V.  loc.  cit.). 

V.  encore ,  sur  les  autorités  en  doctrine  et  en  jurisprudence ,  Tab. 
ffén.\  Devill.  et  Gilbert,  v>  Adoption,  nos  39  et  suiv.  ;  Pal.  Répert.,eo(/. 
verho,  et  Suppl.  n»*  79  et  80. 


(91) 

leur  est  d'autant  plus  significatif  que  Ton  avait  proposé,  dans 
les  conférences  préalables  à  la  rédaction  du  titre  de  l'adop- 
tion, d'exclure  les  enfants  naturels  du  bienfait  de  la  loi  ; 

>  Attendu  que  l'on  ne  doit  pas  distinguer  où  la  loi  ne 
distingue  point  ; 

:d  Attendu  que  Ton  ne  peut  qu'encourager,  en  règle  géné- 
rale, l'expiation  d'une  faute  et  la  réparation  du  dommage 
qui  en  est  la  conséquence  ; 

3>  Attendu  que  l'adoption  des  enfants  naturels,  au  grand 
profit  de  la  morale  et  de  la  société,  forme  des  liens  de 
famille  entre  personnes  qui  n'étaient  unies  que  par  des 
affections  trop  souvent  fugitives  et  faiblement  conservées 
par  la  loi  ; 

j>  Attendu  que  les  arguments  de  texte,  dans  la  question 
du  procès,  ne  peuvent  balancer  les  arguments  de  haute 
moralité  et  d'intérêt  social,  tous  favorables  à  l'adoption  des 
enfants  naturels,  et  que  l'on  doit  considérer  comme  la  raison 
de  la  loi  et  la  règle  de  la  jurisprudence  ; 

»  Le  Tribunal,  statuant  en  matière  ordinaire  et  en  pre- 
mier ressort,  déclare  les  demandeurs  non  fondés  en  leurs 
conclusions,  les  en  déboute  et  les  condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  les  sieurs  Pisson,  qui  obtiennent  le  bénéfice 
de  l'assistance  judiciaire ,  comme  ils  l'avaient  obtenu  en 
première  instance. 

La  Cour,  conformément  aux  conclusions  de  M.  l'avocat- 
général  Berr,  a  confirmé  la  décision  des  premiers  juges. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 

met  l'appellation  au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet;  condamne,  etc. 

Du  24  mars  1860.  2^  chamb.  civ.  Présid.,  M.  Danel; 
minist.  publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén. ,  concl.  conf.  ;  avec, 
M«s  Lemaire  (Edmond)  et  Pellieux;  avou..  Mes  Vilette  et 
Huret. 


(92) 

^COMMUNE.  —  PLACE  PUBLIQUE.  —  POSSESSION  UTILE.  —  ' 

PRESCRIPTION. 

Un  terrain  affecté  de  tous  temps  à  Vusage  des  Imbitants  et 
qualifié  place  publique,  ne  peut  être  V objet  d'une  posses- 
sion utile  à  prescription.  (L.  du  26  juillet-45  août  1790, 
sect.  Ire^  art.  1er;  25.58  août  1792 ;  10-41  juillet  1793, 
sect.  Ire,  art.  le^  G.  Nap.,  art.  2228  et  2229.)  (1). 

(Duilot-Dcscarpenteries  C.  Evrard-Verdavaine  et  autres.) 

Un  sieur  Duflot-Descarpenteries  a  appréhendé,  en  le  cul- 
tivant en  1856,  dans  la  commune  de  Rosult,  une  par- 
tie de  terrain  d'une  contenance  de  quelques  ares,  qui  parais- 
sait faire  partie  de  la  place  publique  à  laquelle  il  tenait  de 
trois  côtés  en  aboutissant,  par  un  quatrième,  à  un  fossé  de 
dessèchement. 

En  1858,  des  habitants  de  la  commune  ,  agissant  pour 
elle,  ont  introduit  contre  Duflot  une  action  en  revendica- 
tion du  terrain  qu'il  avait  usurpé,  suivant  eux,  sur  le  do- 
maine communal.  Duflot  prétendit  posséder  à  juste  titre,  et 
demanda  à  prouver  :  1»  que  le  terrain  dont  il  s'agissait 
avait  toujours  été  plus  ou  moins  bourbeux  et  marécageux, 
non  cultivable;  2"  que  depuis  un  temps  immémorial,  et 
notamment  depuis  plus  de  trente  ans,  il  en  avait  eu,  par 
ses  auteurs,  la  possession  exclusive,  paisible,  publique  Qt  à 
titre  de  propriétaire^  en  y  exerçant  les  seuls  actes  de  jouis- 
sance dont  il  fût  susceptible ,  c'est-à-dire  en  y  entretenant 
et  cultivant  sans  interruption  des  arbres  plantés  succes- 
sivement par  lui,  puis  abattus  à  leur  maturité  et  remplacés 
aussitôt  par  d'autres. 

On  lui  opposa  la  non  pertinence  de  ces  faits  et  un  plan 
terrier  de  1664,  sur  lequel  figure  îe  terrain  comme  faisant 
partie  de  la  place  publique. 

(1)  V.  Anal.  Douai  9  avril  1837,  Jiirisp.  2,  93  (3®  affaire).  Consult. 
aussi  Douai  17  mai  1852  et  15  juillet  1844,  Jurisp.  10,  256  ;  adde  Douai 
21  dcc.  1831,  S.  V.  32,  2, 198. 

Ces  derniers  arrêts  sont  relatifs  surtout  à  la  prosomplioi  légale  qui 
existe  en  faveur  des  communes,  de  la  proprielc  des  terres  vaines  et 
vagues.  L'arrêt  du  21  décemb.  1831  (Lagonde)  décide  que  l'on  ne  peut 
considérer  comme  telles  que  des  terrains  qui,  avant  le  4  août  1789 , 
avaient  été  plantés  d'arbres  que  faisait  ébrancher  et  abattre  le  posses- 
seur. Les  arrêts  de  1844  et  de  1852  posent  en  principe  que  cette  pré- 
somption ne  peut  être  détruite  que  par  une  possession  équivalente  par 
une  autre  commune.  La  même  présomption  existe-t-cllc  pour  un  ter- 
rain banal?  C'est  ce  que  juge  l'arrêt  du  9  avril  1857  (lùco  rit). 


(93) 

Le  18  novembre  1858,  le  Tribunal  civil  de  Valenciennes 
a  rendu  la  sentence  suivante  : 

JUGEMENT. 

>  Considérant  qu'il  résulte  de  tous  les  documents  du  pro- 
cès, et  notamment  d'un  plan  terrier  de  la  commune  de 

Rosult,  dressé  en  1664?,  produit  par  les  demandeurs,  et 
d'une  valeur  irrécusable  en  la  cause,  que  le  terrain  y  dési- 
gné sous  le  nom  de  place  du  Petit-Rosult ,  est  limité  au 
sud-ouest  par  un  large  fossé  de  dessèchement  qui  le  sépare 
d*avec  les  propriétés  particulières  ; 

i>  Considérant  que  ce  terrain,  affecté  de  tout  temps  à  l'u- 
sage des  habitants,  est  de  la  nature  de  ceux  que  les  lois 
des  26  juillet-15  août  1790,  28  août  1792  et  10  juin  1793 
ont  attribué  aux  communes,  et  qu'il  ne  peut  avoir  d'autFe 
qualification  que  celle  de  place  publique  ; 

»  Considérant  dés-lors  qu'aucune  possession  utile  ne  peut 
être  invoquée  par  le  défendeur  contre  la  commune  de  Ro- 
sult, puisque  cette  possession  n'aurait  jamais  été  exclusive 
et  qu'elle  n'aurait  pas  eu  les  caractères  exigés  par  les  art. 
2228  et  2229  C.  Nap.  pour  pouvoir  prescrire  ; 

j>  Considérant  qu'en  cet  état  des  faits,  il  n'y  a  pas  lieu 
d'admettre  la  preuve ,  subsidiairement  offerte  par  les  de- 
mandeurs ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  dit  que  la  parcelle  de  ter- 
rain en  litige  appartient  à  la  commune  de  Rosult,  et  qu'elle 
fait  partie  intégrante  de  la  place  publique  du  Petit-Rosult; 
rejette  comme  étant  sans  objet  la  preuve  demandée  ; 

•  »  Dit  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'adjuger  de  dommages-intérêts 
à  la  commune;  condamne  le  défendeur  aux  dépens.  ï> 

Appel  par  Duflot.  Devant  la  Cour  il  ajoute  à  ses  conclu- 
sions de  première  instance  de  nouveaux  faits,  pour  démon- 
trer sa  possession.  Ainsi  il  a  toujours  payé  les  contributions 
afférentes  au  terrain  litigieux,  et  le  conseil  municipal,  dans 
maintes  délibérations,  a  reconnu  sa  qualité  de  propriétaire. 
Il  ne  peut,  d'ailleurs,  considérer  le  plan  terrier  de  1664- 
comme  équivalent  à  un  titre.  Si  la  place  du  Petit-Rosult 
figure  sur  ce  plan,  il  n'en  résulte  pas  nécessairement  qu'elle 
soit  la  propriété  de  la  commune.  Une  différence  existe  entre 


(94) 

cette  place  et  celle  du  Grand-RosuU,  dont  la  propriété  est 
indiquée  au  plan  terrier  comme  étant  communale,  tandis 
que  celte  désignation  ne  se  fait  pas  remarquer  pour  la  pre- 
mière. De  plus,  ajoute-t-on,  la  commune  n'a  pas  revendiqué 
ces  terres ,  gui  étaient  vaines  et  vagues ,  dans  le  délai  de 
cinq  ans,  suivant  le  prescrit  de  l'art.  9  de  la  loi  du  28  août 
1792,  et  elle  ne  justifie  pas  d'une  possession  réelle  et  effec- 
tive de  ces  terres  pendant  ce  délai. 

Le  sieur  Legrand,  maire  de  la  commune  de  Rosult,  s'en 
rapportait  à  justice. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  purement  et  simplement. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Donne  acte  à  Legrand  és-qualités  de  la 
déclaration  qu'il  fait  de  s'en  rapporter  à  justice  ; 
Et  adoptant  les  motifs  des  premiers  juges. 
Met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  jugement 
dont  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  31  déc.  1859.  2^  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,M.  Preux,  subst.  proc.-gén.  ;  avoc,  M^s  Legrand  et 
Talon;  avou.,  M^sLavoix,  Dussalian  et  Poncelet. 


lo  DROIT  DE  PASSAGE. — destination  du  père  de  famille .v 
—  partage.  —  interprétation. 

2o  aveu  judiciaire.  —  instances  distinctes.  —  POSSESSOIRE 
ET  PÉTITOIRE.  —  PORTÉE  DE  L'AVEU. 

Bien  qu'un  acte  de  partage  soit  muet  sur  les  conditions 
de  t exercice  d*un  droit  de  passage,  il  doit  être  entendu 
virtuellement  et  nécessairement  que  le  droit  devra  s'exercer 
suivant  Vusage  le  plus  complet  du  bâtiment  oie  conduit  le 
passage,  dans  toutes  les  parties  de  ce  bâtiment  oii  -il  faut 
avoir  accès  (1). 

2o  Ce  n'est  point  un  aveu  judiciaire  que  la  déclaration,  sans 
donné  acte,  consignée  dans  les  motifs  (fune  sentence  ou 
décision  judiciaire  (2) . 

^n        ■!    I  III      ru  -      I -       -"•^      -■--■-  -    --  ,  _ 

(1)  Cette  difficulté  naissait  surtout  dans  la  cause  de  ce  fait  que  l'usage 
pratiauédu  passage  n'avait,  jusqu'au  procès,  été  exercé  qu'à  pied  et  à 
cheval  sans  nécessité  de  voitura^e  pour  l'engrangement.  —^  V.  Demo- 
lombe,  p.  90,  91,  94  du  t.  11  des  Servitudes;  puis  les  n<»  608,  609, 
611  et  612. 

(2)  V.  Marcadésur  l'art.  1356,  no  2;  Cass.  8  août  1808,  indiqué  par 
I  »auteur,  et  rej.  des  3  juin  1829  et 23  fév.  1836.  S.  V.  36.  1.  603,—  Tou- 


(95) 

3^  Un  aveu  ne  saurait  avoir  (Tejfet  au-delà  du  litige  engagé; 
et,  par  suite,  F  aveu  au  possessoire  ne  compromet  en  rien 
au  pétitoire  la  cause  de  celui  qui  le  passe  au  possessoire  (3) . 

(Capon  C.  Couture.) 

ARRÊT. 

Attendu  que  le  litige  soumis  aux  premiers  juges  a  pour 
objet  d'interdire  àCouturale  passage  avec  cheval,  charrette 
et  insti-uments  aratoires  sur  la  pâture  de  Capon,  lorsque 
ce  passage  s'exerce  pour  autre  cause  que  l'exploitation  des 
pâtures  du  2®  lot  du  partage  de  1812; 

Attendu  que  l'interdiction  réclamée  n'a  pas  rapport  à  la 
pièce  u9  607  du  cadastre,  ni  à  la  petite  construction  qui  y 
est  érigée; 

Qu'en  effet  Capon  se  plaint,  dans  son  assignation,  que 
ce  passage  s'exerce  depuis  plusieurs  années  ; 

Qu'il  a  été  l'objet  d'une  citation  et  d'un  jugement  au 
possessoire,  rendu  le  22  mai  1857,  sur  des  faits  du  mois 
d'avril  précédent;  et  que,  de  l'aveu  même  de  l'appelant,  la 
petite  construction  sur  le  n^  607  n'a  été  faite' qu'après 
rexécution  de  la  sentence  arbitrale  du  28  fév.  1857,  qui 
avait  ordonné  la  destruction  de  certaines  bâtisses  sur  le 
terrain  de  culture  ; 

Attendu  que  lorsqu'il  a  été  attribué,  par  le  partage  du  15 
raai  1812,  au  2®  lot  un  bâtiment  à  usage  de  demeure^  com- 
posé de  deux  chambres,  cabinet,  et  d'une  grange  et  d'une 
cave,  on  lui  a  donné  virtuellement  et  nécessairement  le 
droit  de  passer  pour  l'usage  du  bâtiment  tel  qu'il  se  com- 
porte en  toutes  ses  parties  ; 

Qu'il  est  si  peu  entré  dans  la  pensée  des  co-partageants 
que  le  bénéficiaire  du  2^  lot  devait  se  borner  à  la  culture  et 


tefois,  il  convient  de  noter,  dans  la  cause,  que  M.  le  juge  de  paix  avait 
nettement  motivé  sa  sentence  sur  la  déclaration  formelle  de  la  partie. 

(3)  Sur  ce  point  très-délicat,  voyez  :  Voef,  tit.  de  Confess.,  no  1; 
Toul^er,  t.  8,  n»  26  ;  Merlin,  quest.  de  dr.j  v»  Confess.  ;  Duranton,  t.  13, 
no  552;  Zachariae,  t.  5,  p.  596;  Bioche,  v»  Aveiù,  n»  14;  Gontrà  Mar- 
cadé,  iibi  sup,,  n»  1  ;  Cass.  rej.  du  4  août  1840,  S.  V.  40,  1,  903.  Voyez 
aussi  Paris  13juin  1809,  S.  V.  10, 2,  49  ;  C.  rej.  9 janv.  1839,  S.  V.  39, 
1,  22. 


(96) 

à  rengrangemenl  de  1  hect.  65  ares  de  terfe  qui  lui  étaient 
affectés,  qu'on  lui  donna  le  droit  de  bâtir  une  écurie  à  l'ex- 
trémité de  sa  grange ,  sur  une  portion  de  terrain  que  le 
propriétaire  du  l^r  lot  devrait  lui  céder  ; 

Attendu,  du  reste,  que  l'herbe  des  pâtures  étant  destinée 
à  être  consommée  sur  pied  par  le  bétail,  une  grange  n'était 
pas  nécessaire  pour  leur  exploitation  ; 

Attendu  qu'en  vain  on  oppose  à  Couture  la  déclaration 
qu'il  aurait  passée  devant  le  juge  du  possessoire,  qu'il  n'a- 
vait droit  au  passage  qu'avec  cheval,  charrette  et  instru- 
ments aratoires  que  pour  l'exploitation  des  terres  comprises 
dans  son  lot; 

Qu'en  effet  il  n'a  été  ni  demandé  ni  donné  acte  de  cet 
aveu,  qui  ne  se  trouve  que  dans  les  motifs  de  la  sentence  ; 

Qu'au  surplus  Terreur  commise  par  Couture ,  sur  son 
droit  au  possessoire,  ne  pourrait  s*étendre  quant  à  ses  effets 
au-delà  du  litige,  et  ne  lui  ferait  pas  perdre  ses  droits  dans 
une  instance  au  pétitoire  ; 

Attendu  que  Couture  ne  réclame  le  passage  que  pour 
l'usage  des  bâtiments  et  grange  qu'il  possède  en  vertu  du 
partage  de  4812;  qu'il  n^apparaît  pas  qu'il  en  ait  joui  dans 
une  plus  grande  étendue,  et  que  le  jugement  ne  lui  accorde 
rien  au-delà  ; 

Attendu  du  reste  que,  tout  en  maintenant  son  droit  et 
pour  le  cas  où  le  partage  ne  lui  accorderait  pas  le  passage 
pour  accéder  à  ses  bâtiments ,  Couture  se  considérant  en- 
clavé, a  fait  l'offre  d'une  somme  de  100  fr.  à  titre  d'indem^ 
nité,  et  que  cette  offre  n'est  pas  rétractée  ; 

La  Cour  déboule  l'appelant  de  ses  conclusions  principales 
et  subsidiaires,  met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le 
jugement  doiit  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant 
à  l'amende,  elc. 

Du  10 mars  1860. 2®  chamb.  civ.  Présid.,  M.  Danel;  avoc- 
gén.,  M.  Berr  ;  avoc,  M^s Emile  Flamant  et  Legrand;  avou., 
Mes  Legrand  et  Poncelet. 


(97) 

COMPTE.  —  RÉVISION.  —  APPROBATION.  —  REGLEMENT.  — 
CONSIGNATAIRE.  —  VENTE  ET  ACHAT  DE  MARCHANDISES. — 
DUCROIRE.  —  COMMISSIONS.  —  STIPULATIONS  PARTICU- 
LIÈRES. 

Les  comptes  approuvés  et  suivis  de  règlements  entre  parties 
nepeuvent  donner  lieu  à  aucune  révision,  — s'il  n'est  allé- 
gué  aucune  fraude  oudol,  —  alors  même  que  la  convention, 
consentie  librement  et  sans  erreur  qui  puisse  la  vicier, 
sur  laquelle  reposent  les  comptes,  consistent, savoir: pour 
le  consignataire  qui  n'est  ni  aclieteur  des  marchandises, 
ni  simple  intermédiaire,  à  percevoir  une  commission  de 
6  p.  ^/oj  %  compris  le  ducroire,  et  à  désigner  dans  cha- 
que compte  de  vente  un  prix  conventionnel,  en  percevant 
des  différences  entre  ce  prix  et  celui  des  ventes  effectuées; 
et,  pour  le  fabricant,  à  pouvoir  discuter  ce  prix'con- 
ventiomiel,  à  charge  par  le  consignataire  de  swpporter 
un  complément  de  frais  de  fabrication,  et  de  faire  des 
avances  au  fabricant,  (G.  proc,  art.  541.)  (1). 


(1)  Le  contrat  de  commission  donne  lieu  à  une  multitude  de  conven- 
tions qu'il  peut  être  souvent  difflcile  d'apprécier,  parce  qu'elles  naissent 
des  situations  compliquées  de  l'industrie.  C'est  erf  vue  surtout  de  faire 
connaître  l'une  de  ces  complications  que  nouspublionsl'espèce  ci-dessus, 
tes  faits  en  sont  nettement  et  clairement  exposés  dans  l'arrêt;  aussi 
iousa-t-il  paru  inutile  de  le  surcharger  de  détails.  Après  l'appréciation 
d'une  convention,  suivant  le  principe  de  l'art.  1134  C.  Nap.,  la  seule 
question  que  résolve  cet  arrêt  est  une  simple  application  de  l'art.  541 
C.  proc. 

On  sait  que  ce  dernier  article,  relatif  aux  comptes  rendus  en  justice, 
s'étend  aux  comptes  approuvés  et  arrêtés  à  l'amiable  entre  toutes  per- 
sonnes commerçantes  ou  non.  «  Il  n'y  a  lieu  à  révision,  dit  M.  Paillet, 
qu'autant  que  les  erreurs,  omissions  ou  doubles  emplois  stipulés  sont 
matériels  ou  justifiés.  Il  n'y  a  pas  lieu  à  révision  lorsqu'on  remet  en 
question  les  éléments  mêmes  au  compte  arrêté,  ou  lorsque,  se  livrante 
un  examen  nouveau  de  chaque  recette,  de  chaque  dépense,  de  chaque 
article,  on  veut  faire  un  nouveau  compte  sur  d'autres  bases.  » 

Constdt.  cependant,  pour  le  cas  de  perceptions  usuraires  ou  d'exagéra- 
tions de  droits  de  commission:  Colmar  11  mars  1842  (J,  Pal.,  t.  1, 
1843,  p.  8);  Bourges  11  janv.  1851, sous  Cass.  17  décemb.  1851  (J.  Pal.' 
t.  1,  1852,  p.  42);  Rouen  27  mars  1847  (J.  Pal.,  t.  2, 18i8,  p.  55.S).  — 
V.  aussi  Noblet,  nos  160, 175  et  248  ;  Chardon,  Dol  et  fraude,  nos  53  et 
suiv.;  Zacharise,  Dr.  civ.,  t.  2,  §  339,  note  8. 

Adde,  pour  la  jurisp.  de  la  Cour  de  Douai  par  analog.  seulement. 
Douai  lOjuiU.1847  (Jurisp.  5, 352),  et  Cass.  18  mars  1850  (Jurisp. 8, 313). 

TOME  XVIII.  7 


(98) 
(Detrez,  syndic,  DolepouUe  frères  C.  Lenfant  et  0»^.) 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'aux  termes  de  Tart.  1134  C. 
Nap.,  les  conventions  légalement  formées  tiennent  lieu  de 
loi  à  ceux  qui  les  ont  faites,  et  que  le  mode  d'exécution  de 
leurs  slipulaîions  est  le  guide  le  plus  sûr  dans  la  recherche 
et  rinterprétation  de  la  commune  intention  des  parties 
contractantes  ; 

Attendu  que,  pour  apprécier  sainement  le  caractère  des 
relations  qui  ont  existé  entre  les  frères  DelepouUe  et  les 
intimés,  il  importe  de  considérer  que  ceux-ci  n'agissaient 
pas  seulement  comme  simples  commissionnaires,  atec  l'u- 
nique mandat  de  servir  d'intermédiaire  entre  le  vendeur 
de  la  marchandise  et  les  acheteurs,  mais  [qu'en  outre  ils 
participaient  à  la  fabrication  en  faisant  teindre  et  apprêter, 
cl  leurs  frais,  les  damas  écrus  que  les  frères  DelepouUe 
leur  expédiaient  pour  être  livrés  au  commerce;  que,  de 
,plus,  les  intimés  avançaient  des  fonds  à  la  maison  Dele- 
pouUe, sur  la  consignation  de  ses  étoffes;  qu'ainsi  ce  triple 
concours  apporté  par  les  intimés,  dans  le  complément  de 
la  fabrication ,  comme  commissionnaires  et  comme  ban- 
quiers, les  plaçait  dans  une  situation  exceptionnelle  de 
nature  à  justifier  les  avantages  stipulés  en  leur  faveur  par 
la  convention  avec  les  frères  DelepouUe  ; 

Alteïidu  qu'il  résulte  des  documents  de  la  cause  qu'après 
avoir  été,  dans  les  premières  années  de  leurs  rapports  avec 
les  frètes  DelepouUe,  chargés  de  vendre  pour  ceux-ci  les 
damas  sortis  de  leurs  ateliers,  les  intimés  avaient,  plus 
tard,  acheté  ces  tissus  pour  leur  propre  compte,  afin  de  les 
revendre  à  leurs  risques  et  périls;  mais  qu'en  1853,  trou- 
vant ces  produits  défectueux,  ils  annoncèrent  aux  frères 
DelepouUe  qti'Us  n'entendaient  plus  être  acheteurs  des 
damas  ni  servir  d'intermédiaires  pour  leur  débit  dans  les 
conditions  ordinaires  du  contrat  de  commission  ; 

Que,  dans  la  lettre  du  7  août,  ils  formulèrent  îîftè  pro- 
position nouvelle  quant  à  là  fixation  du  prix,  s'engageant 
à  payer  aiix  frères  DelepouUe  celui  qu'Us  coteraient  sur  la 


(99) 

marchandise  par  eux  envoyée,  mais  en  se  réservant  la  faculté 
de  la  vendre  pour  leur  compte  personnel,  soit  au-dessus, 
soit  au  dessous  de  ce  prix;  que,  par  cette  même  lettre, 
s'obligeant  à  supporter,  comme  par  le  passé,  les  frais  de 
teinture,  ils  demandaient  6p.  o/o  de  commission,  y  compris 
k  ducroire;  offrant,  enfin,  de  porter  les  avances  de  fonds 
jusqu'à  concurrence  de  la  moitié  ou  des  trois  quarts  de  la 
valeur  des  marchandises  consignées  ; 

Attendu  que,  par  leur  réponse  du  40  du  même  mois,  les 
frères  Delepoulle  adhérèrent  à  ces  propositions,  mais  que 
la  stipulation  relative  au  mode  de  fixation  du  prix  de  vente 
par  les  expéditeurs  fut  immédiatement  répudiée  d'un  com- 
mun accord  ;  qu'elle  pouvait,^en  effet,  préjudicier  aux  frères 
Delepoulle,  l'indication  d'un  prix  fatal  devant  les  priver  du 
bénéfice  de  la  hausse,  tandis  gu'en  cas  de  baisse,  le  con- 
signataire,  entravé  par  la  limitation  de  prix,  ajournerait  la 
vente  :  résultat  doublement  dommageable  pour  les  fabri- 
cants; 

Attendu  qu'afin  d'obvier  à  ces  inconvénients,  les  parties 
substituèrent  à  cette  marche  une  fixation  de  prix  plus  en 
harmonie  avec  les  fluctuations  inévitables  des  cours  ;  qu'il 
fut  convenu,  sans  déroger  d'ailleurs  à  aucune  des  autres 
stipulations  du  contrat,  que  les  intimés  désigneraient,  dans 
chaque  compte  de  vente,  un  prix  que  les  fabricants  pour- 
raient discuter  sans  que  l'adoption  de  ce  nouveau  mode 
portât,  du  reste,  atteinte  au  droit  que  s'étaient  réservés  les 
consignataires  de  profiter  des  différences  entre  le  prix  con- 
ventionnel à  déterminer  désormais  entre  les  parties  et  ce- 
lui des  ventes  par  eux  effectuées,  conformément  à  l'inten- 
tion manifestée  dans  les  lettres  des  21  juillet  et  7août1853, 
où  ils  déclarèrent  ne  plus  vouloir  intervenir,  ni  comme 
acheteurs,  ni  comme  simples  commissionnaires  ; 

Attendu  que  la  convention  des  7  et  10  août,  ainsi  modi- 
fiée, a  été  pleinement  exécutée  durant  plus  de  quatre 
années  consécutives,  jusqu'à  la  faillite  des  frères  Delepoulle; 
qu'ils  ont  approuvé  et  arrêté,  à  des  intervalles  rapprochés, 
les  comptes  des  intimés,  et  souscrit,  par  suite  de  ces  régie- 


(106) 
mciUs,  (les  obligations  peur  le  montant  des  sommes  dont 
ils  se  trouvaient  reliqualaires  ; 

Que  la  prétention  des  syndics  de  la  faillite,  tendant  à  la 
révision  de  tous  ces  comptes,  est  repoussée  à  la  fois  par 
l'esprit  et  le  texte  de  Fart.  541  G.  proc.  civ.; 

Qu'ils  n'articulent  ni  le  dol  ni  la  fraude  qui  inficieraient 
ces  divers  règlements,  et  que  l'allégation  de  l'erreur  qui 
aurait  vicié  le  consentement  des  frères  DelepouUe  est 
démentie  par  tous  les  éléments  du  procès  ; 

Qu'en  effet,  le  prix  indiqué  par  les  consignataires  n'était 
pas  arbitrairement  imposé  par  eux  aux  expéditeurs  ;  qu'il 
ressort,  des  circonstances  de  la  cause  et  de  la  correspon- 
dance produite,  que  ces  derniers  avaient  à  leur  disposition 
des  moyens  multipliés  de  contrôle  ;  qu'ils  n'ont  pu  ignorer 
et  qu'ils  ont  en  réalité  connu  toutes  les  variations  des 
cours  ;  qu'un  membre  de  leur  famille  avait  à  Paris  de  fré- 
quents pourparlers  avec  les  intimés,  et  pouvait  ainsi  obtenir 
d'eux  des  éclaircissements;  que  leurs  instances  pour  qu'on 
atteignît  les  prix  les  plus  élevés  que  possible,  n'impliquent 
ni  la  négation  ni  la  résolution  du  contrat  qu'invoquent  les 
intimés,  mais  se  concilient  avec  son  exécution  et  témoignent 
seulement  d'une  préoccupation  bien  naturelle  que  parta- 
geaient les  consignataires  ;  que  ceux-ci  ne  se  sont  pas  mon- 
trés si  exclusivement  soucieux  de  leurs  bénéfices  personnels, 
puisqu'à  maintes  reprises  ils  ont  averti  les  frères  DelepouUe 
des  embarras  qui  les  menaçaient,  en  les  engageant  même 
à  cesser  leur  fabrication  ;  que,  loin  d'admettre  sans  examen 
les  comptes  des  intimés,  les  expéditeurs  leur  ont  adressé,  ' 
au  sujet  de  légères  erreurs  qui  s'y  étaient  glicsées,  diverses  ! 
réclamations  assez  minutieuses  attestant  qu'ils  approuvaient  1 
très  sciemment  les  comptes;  qu'à  plus  forte  raison  ils 
n'eussent  pas  manqué  de  protester  contre  l'indication  de 
prix  inacceptables  ;  qu'il  résulte,  de  la  comparaison  avec  le 
chiffre  des  taux  obtenus  antérieurement  au  mode  de  vente 
adopté  en  1853,  que  cette  nouvelle  convention  n'aurait  pas 
été  pécuniairement  moins  favorable  pour  les  frères  Dele- 
pouUe ;  qu'au  surplus  et  dans  le  cas  contraire,  ils  ne  pour- 
raient imputer  qu'à  eux-mêmes  la  conséquence  d'une 


(404) 

adhésion  qu'on  n'établit  pas  avoir  été  surprisé  à  l«ur 
bonne  foi  ;  que,  dans  ces  circonstances,  les  premiers  juges 
ont  avec  raison  décidé  que  les  syndics  étaient  mal  fondés 
à  critiquer  des  actes  librement  consentis  ou  ratifiés  en 
pleine  connaissance  de  cause  ; 

Attendu  que  la  demande  des  appelants,  tendant  à  une  ré- 
duction dans  le  chiffre  de  la  créance,  repose  sur  l'allégation 
d'une  erreur  qui  n'a  été,  aux  débats,  ni  constatée  ni 
reconnue ,  et  à  raison  de  laquelle  il  y  a  lieu  seulement  de 
réserver  aux  parties  tous  leurs  droits  ; 

Attendu  que  les  conclusions  subsidiaires  des  appelants  ne 
sauraient,  quant  à  présent,  donner  lieu  qn'à  des  réserves  ; 
qu^elles  ont  pour  objet  des  règlements  de  comptes  posté- 
rieurs à  la  faillite,  et  à  débattre  entre  les  syndics  et  les 
intimés  ;  que  ces  réclamations  sont  entièrement  distinctes 
de  la  seule  demande  dont  le  Tribunal  ait  eu  à  connaître  ; 

Par  ces  motifs,  la  Cour,  sans  s'arrêter  à  la  demande  de 
sursis,  confirme  le  jugement,  réserve  toutefois  aux  appe- 
lants leurs  droits  touchant  le  redressement  d'une  erreur  de 
calcul  par  eux  signalée  et  dont  la  rectification,  s'il  y  a  lieu 
de  l'effectuer,  entraînerait  uûe  réduction  de  4,224  fr,  sur 
le  chiffre  total  de  la  créance  admise  au  passif  de  la  faillite  ; 

Réserve  également  aux  parties  leurs  droits  respectifs 
quant  aux  règlements  que  pourraient  nécessiter  les  consi- 
gnations et  ventes  de  marchandises,  ou  les  avances  posté- 
rieures au  31  octobre  4857,  jour  du  dernier  arrêté  de 
compte  entre  les  frères  Delepoulle  et  les  intimés; 

Ordonne  la  restitution  de  l'amende  et  condamne  les  appe- 
lants, en  la  qualité  qu'ils  agissent,  aux  dépens  qui  seront 
employés  en  frais  de  faillite. 

Du  27  mars  4860.  4^  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon, 
4er  présid.;  minist.  publ.,  M.  Morcrelte,  4er  avoc.-gén.  ; 
avec.  Mes  Duhem  et  Dutard  (du  barreau  de  Paris)  ;  avou. ,. 
M«s  Debeaumont  et  Huret. 


(102) 


FAILLITE. —  CESSATION  de  payements. — ATERMOIEMENT. 

JUGEMENT  DE  SURSIS.  —  POURSUITES  ANTÉRIEURES.  —  NO- 
TORIÉTÉ. —  DEMANDES  EN  PAYEMENT  NON  JUDICIAIRES.  - — 
PAYEMENTS  SUIVANT  USAGE. 

La  cessation  de  payements,  dans  le  cas  où  les  conditions 
d'un  atermoiement  accordé  au  débiteur  par  le  Tribunal 
de  commerce  n'ontpasété  remplies,  ne  doit  pus  s'entendre 
comme  existant  seulement  dès  le  jour  du  sursis  (1).  Le 
jugement  d'atermoiement  non  réalisé  constate  par  lui- 
même  un  état  antérieur  de  cessation  de  payements.  Par 
suite,  l'ouverture  de  la  faillite  doit  être  fixée  à  l'époque 
des  poursuites  antérieurement  dirigées  contre  le  débiteur. 

Il  ne  peut  être  tenu  compte  des  payements  effectués  par  le 
failli,  grâce  à  l'atermoiement  octroyé. 

Il  y  a  notoriété  de  cessation  de  payements  suffisante  pour 
servir  à  la  fixation  de  l'ouverture  de  la  faillite,  dans  le 
fait  de  demandes  nombreuses  de  payement  vainement 
adressées  au  débiteur  avant  toutes  poursuites  judiciaires, 
en  raison  de  fournitures  de  matières  premières,  comme 
des  produits  agricoles  (betteraves),  qui  d'usage  sont  payées 
par  le  fabricant,  au  moment  de  la  livraison.  (G.  comni., 
art.  437.)  (2). 

(Soyez  et  C^e  C.  Noël-Dieu  et  autres.) 

Dumont  et  C^e,  fabricants  de  sucre  à  Roost-Wareudin, 
se  sont  approvisionnés  de  betteraves,  pour  la  campagne  de 

(1)  Dans  ses  conclusions  conformes  à  l'arrêt  que  nous  rapportons,  M. 
Tavocat-général  Berr  a  rais  en  doute  que  Fart.  1244  puisse  s'appliquer 
aux  matières  commerciales,  de  manière  à  permettre  d'accorder  un  sursis 
de  payement  au  débiteur  poursuivi  par  de  nombreux  créanciers  et  en  état 
de  cessation  de  payements.  Il  a  heureusement  rappelé  à  ce  sujet  l'abo- 
lition des  lettres  de  surséance  et  les  abus  qui  résultaient  autrewis  de  ces 
actes  de  souveraine  autorité.  —  V.,  sur  cette  matière  intéressante  , 
Toullier,  liv.  3,  tit.  3,  sect.  2,  nos  653  et  suiv.  ;  t.  3  de  l'édition  Tar- 
lier,  p.  567  et  suiv.,  où  l'on  trouve  rappelée  en  note  la  disposition  du 
tit.  3  du  liv.  3  du  Cod.  de  com.  belge  sur  les  sursis  rétablis  dans  le 
royaume  des  Pays-Bas,  et  l'opinion  de  M.  Locré  dans  Tune  de  ses  édi- 
tions de  V Esprit  du  C&d.  com.  —  V.  encore  Répert.  Pal.  ,  vo  Paye- 
ment, nos  195  et  suiv.;  idem  au  Suppl.  loco  cit.  Consult.  Douai  13  avril 
18U,  aff.  Grignon  c.  Roseau.  (Sir.  16,  2,  99;  C.  N.  4,  2,  384.)  Indiq. 
à  notre  Tabl.  gén.,  v©  Payement,  no  1. 

(2)V.  sur  les  caractères  de  la  cessation  de  payements  et  sur  l'esprit  de 
la  loi  ea  cette  matière.  Douai  18  iuin  1859  {Jurisp.,  17,  200),* à  la 
note  où  sont  rappelées  les  autorités  de  la  jurisprudence  de  la  Cour.  Adde 
Douai  30  août  1859  (Jurisp.  17,  383.) 


(103) 

1857-1858,  par  des  marchés  passés  avec  im  grand  nombre 
de  cultivateurs  du  pays.  Leurs  achats  étaient,  suivant  Tu- 
sage,  payables  au  moment  de  la  livraison,  c'est-à-dire  au 
mois  de  novembre  1857.  Cependant,  la  campagne  étant 
mauvaise,  les  affaires  d^  la  Société  n'étant  pas  prospères, 
la  plupart  des  payements  furent  ajournés.  Beaucoup  de  cul- 
tivateurs attendirent  patiemment  les  premiers  résultats  de 
la  fabrication ,  mais  bientôt  plusieurs  d'entre  eux  cleraan- 
dèreat  payement.  Dans  les  mois  de  décembre  et  janvier,  les 
réclamations,  quoique  pressantes,  ne  iurcni  qu'officieuses. 
Dès  le  mois  de  février,  Dumontet  C»«  furent  assignés  devant 
le  Tribunal  de  commerce  de  Douai.  Ils  convoquèrent  alors, 
le  24  février,  les  vendeurs  de  betteraves ,  et  leur  deman- 
dèrent une  réduction  sur  le  prix  des  récoltes  qu'ils  avaient 
achetées  et  des  délais  pour  payer.  Quelques-uns  acceptèrent 
les  propositions  d'atermoiement,  mais  la  plupai't  les  refu- 
sèrent. De  nouvelles  assignations  furent  délivrées  à  Dumont 
etC»«,  qui  obtinrent  plusieurs  remises  pour  différents  mo- 
tifs. Enfin ,  poussés  à  bout  et  as&ignés  en  déclaration  de 
fafllite,  ils  se  présentèrent  devant  le  Tribunal ,  et  sur  leur 
déclaration  qu'ils  ne  se  trouvaieat  pas  au-dessous  de  leurs 
affaires,  ils  obtinrent  du  Tribunal  que  deux  experts  seraient 
nommés  pour  lui  rapporter  la  situation  de  la  maison 
Duraontet  C^®.  Sur  le  vu  de  leur  rapport,  le  Tribunal  dé- 
cida, par  jugement  du  29  avril  1858,  et  en  visant  l'art.  4244 
C.  Nap.,  qu'il  était  accordé  délai  à  Dumont  et  C»e,  sous  la 
double  condition  :  l^d'un  payement  immédiat  de  50  p.  ^/^, 
et  2®  du  payement  du  surplus  pour  le  mois  d'août  suivant. 

Sous  la  protection  de  ce  sursis,  Dumont  elC^®,  qui  avaient 
du  reste  déjà  payé  le  plus  de  créanciers  possible,  au  fur  et 
à  mesure  qu'ils  étaient  pressés  par  les  réclamations ,  ac- 
quittèrent une  grande  part  des  50  p.  o/o  immédiats.  Comme 
moyen  de  faire  face  aux  exigences  de  chacun,  ils  avaient 
précédemment,  avee  le  concours  solidaire  d'un  certain 
nombre  de  leurs  actionnaires ,  contracté  un  emprunt  de 
70,000  fr.  ;  de  telle  façon  qu'au  mois  d'août,  avec  cette 
ressource  et  les  produits  de  leur  fabrication ,  leurs  paye- 
ments s'étaient  élevés  à  plus  de  250,000  fr.  Mais,  à  cette 
époque,  ils  ne  purent  satisfaire  à  la  seconde  condition  de 
l'atermoiement  qui  leur  avait  été  accordé.  Au  27  août,  ils 
déposèrent  leur  bilan.  La  faillite  fut  provisoirement  fixée 
à  ce  Jour. 

L'un  des  créanciers,  le  sieur  Noël-Dieu,  assigna  le  syn- 


(164) 

die  de  la  faillite  et  demanda  que  Touverture  de  la  faillite 
fût  reportée  au  27  février  1858.  Le  syndic  s'en  rapporta  à 
justice,  mais  le  Tribunal  ne  reporta  Tépoque  de  cessation  de 
payements  qu'au  29  avril  1858. 

Opposition  de  Soyez  et  C^e,  autres  créanciers,  qui  deman- 
dent contre  Noël-Dieu  que  l'ouverture  de  la  faillite  soit 
maintenue  au  27  août. 

Mise  en  cause  des  créanciers  qui  avaient  été  parties  au 
jugement  de  déclaration  de  faillite. 

Par  sentence  .du  2  février  1859,  le  Tribunal  maintient  la 
cessation  de  payements  au  29  avril  1858,  date  de  son  juge- 
ment de  sursis,  dans  les  termes  suivants  : 

JUGEMENT. 

3)  Considérant  que  la  convocation  des  créanciers,  en  vue 
d'obtenir  d'eux  atermoiement  et  même  remise  d'une  partie 
delà  dette,  révèle  à  la  vérité  des  embarras  financiers  et  une 
situation  critique;  mais  qu'elle  ne  peut  par  elle-même, 
surtout  dans  les  circonstances  de  la  cause ,  suppléer  à  la 
condition  expressément  indiquée  par  la  loi ,  c'est-à-dire  à 
la  cessation  de  payements  ; 

»  Considérant  qu'après  la  tentative  infructueuse  du  24 
février,  la  société  Dumont  et  C^^  a  continué  la  marche  de 
ses  affaires  ; 

»  Qu'un  emprunt  de  70,000  fr.  a  été  contracté;  que  la 
fabrication  s'est  achevée  suivant  l'importance  de  l'usine  ; 
que  la  vente  des  produits  n'a  pas  été  interrompue  ;  qu'à 
partir  de  février  jusqu'à  la  fin  de  juillet,  les  payements  qui 
se  sont  effectués  s'élèvent  à  un  chiffre  de  plus  de  250,000 
francs;  que  ce  chiffre,  au  29  avril,  excédait  155,000  fr.  ; 
qu'à  cette  époque,  sur  une  demande  dirigée  contre  Dumont 
et  Cie,  le  Tribunal,  après  examen  de  la  situation  et  des  res- 
sources de  cette  Société,  dans  l'intérêt  commun  des  parties, 
a,  par  application  de  l'art.  1244C.  Nap:,  accordé  délai  à 
Dumont  et  C»e,  sous  la  double  condition  : 

»  lo  D'un  payement  immédiat  de  50  p.  «/o  ; 

»  2o  Du  payement  du  surplus  pour  le  mois  d'août  suivant; 

ï>  Considérant  que,  dans  l'impuissance  où  ils  se  sont 
trouvés  d'accomplir  vis-à-vis  de  tous  les- créanciers  cette 


(405) 

dernière  condition,  à  Tépoque  fixée,  Dumont  et  G»e  ont, le 
27  août,  déposé  leur  bilan  ; 

»  Que  l'inexécution  de  la  condition  sous  laquelle  le  délai 
leur  a  été  imparti  ne  permet  pas  de  tenir  état  des  paye- 
ments partiels  effectués  à  partir  du  jugement  du  29  avril  ; 
que  la  cessation  des  payements  peut  dès-lors,  et  à  juste 
titre,  être  réputée  remonter  à  cette  époque  et  ne  pourrait 
avec  sûreté  être  reportée  à  une  date  antérieure  ; 

»  Par  ces  motifs ,  le  Tribunal,  jugeant  commercialement, 
fixe  à  la  date  du  29  avril  1858  Tépoque  de  la  cessation  des 
payements  ; 

»  Dépens  comme  frais  de  faillite  ; 

j  Ordonne  l'exécution  provisoire  du  jugement,  même 
avant  l'enregistrement.  » 

Appel  par  Soyez  et  0^®.  Appel  incident  par  Noël-Dieu. 
Les  premiers  demandent  principalement  que  l'époque  de 
la  faillite  soit  fixée  au  29  août,  subsidiairement  au  29  avril. 
Le  second  conclut  principalement  à  ce  qu'elle  soit  reportée 
au  27  février  et  subsidiairement  au  29  avril. 

Le  syndic  de  la  faillite,  et  les  intervenants  Zoude  et  con- 
sorts, s'en  rapportaient  à  justice. 

La  Cour  a  réformé  le  jugement  en  fixant  au  27  février 
l'époque  de  la  cessation  des  payements  et  de  l'ouverture 
de  la  faillite  Dumont  et  C^^. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que,  le  27  février  1858,  Dumont 
et C>e  étaient  touchés  de  deux  assignations,  devant  le  Tri ^ 
bunal  de  commerce  de  Douai,  aux  fins  de  payement  des 
betteraves  qui  leur  avaient  été  livrées  ; 

Qu'une  pareille  assignation  leur  était  délivrée  le  4«r  mars; 

Que,  dans  cet  état  de  choses,  Dumont  et  C>e,  dans  l'im- 
possibilité de  payer  les  cultivateurs  fournissant  des  bette- 
raves, avaient  sollicité  et  obtenu  le  l^r  mars,  de  la  part 
d'un  certain  nombre  d'entre  eux,  une  réduction  sur  le  prix 
de  vente  et  un  atermoiement  pour  le  payement,  mais  que 
cet  arrangement  ne  put  être  mené  à  fin,  en  raison  des 
poursuites  nouvelles  qui  surgirent  ; 

Attendu  que,  le  15  mars,  ils  étaient  assignés  par  vingt 


(106) 

fournisseurs  de  betteraves  en  payement  du  prix,  et  que 
onze  d'entre  eux  demandaient  que  la  faillite  fût  déclarée  ; 

Attendu  que  vingt-cinq  autres  assignations  aux  mêmes 
fins  leur  étaient  données  les  22,  27  et  30  mars,  les  2,  3, 
6,  7,  8,  9, 12, 13, 14,  15, 16  et  17  avril; 

Attendu  que  le  Tribunal  de  commerce  de  Douai,  par  ju- 
gement du  19  avril  1858,  a  cru  pouvoir  accorder  à  Dumont 
etCie,  par  application  deTart.  12440.  Nap.,  un  délai  de  six 
mois  pour  se  libérer  sous  condition  du  payement  immédiat 
de  la  moitié  de  leurs  dettes  ; 

Attendu  que  les  conditions  de  cet  atermoiement  n'ont 
point  été  réalisées  ;  que  de  nouvelles  poursuites  furent 
exercées  et  que  notamment,  le  3  juin,  les  administrateurs  de 
la  Compagnie  de  l'Escarpelle  assignaient  Dumont  et  G>e  au 
payement  de  22,091  f.  25  c.  pour  fournitures  de  charbon  ; 

Que  le  19  juillet,  Descatoire  les  ajournait  aux  fins  de 
payement  de  betteraves  dues  depuis  le  mois  de  novembre 
dernier  et  sur  lesquelles  aucun  payement  à-compte  n'avait 
été  effectué  ; 

Attendu  que,  le  28  juillet,  un  billet  de  200  f.  souscrit  par 
eux  était  protesté  et  qu'ils  étaient  assignés  le  29  aux  fins  de 
paiement  ; 

Que ,  le  9  août ,  deux  nouvelles  assignations  en 
payement  de  betteraves  leur  étaient  délivrées  ;  enfin  qu'un 
second  protêt  avait  lieu  le  21  août  et  était  suivi  d'assigna- 
tion ; 

Attendu  que  Dumont  a  enfin  déposé  son  bilan  le  27  août 
et  qu'un  jugement  fixa  l'ouverture  de  la  faillite  audit  jour  ; 

Attendu  qu'il  est  évident  que  la  cessation  de  payements  est 
bien  antérieure  à  cette  époque  ;  qu'elle  ne  peut  être  fixée 
au  jour  du  jugement  d'atermoiement  qm  constate  au  con- 
traire par  lui-même  l'état  antérieur  de  cessation  de 
payements  ; 

Que  cet  état  existait  dés  ie  27  février ,  date  des  premières 
assignations ,  suivies  de  près  de  cinquante  autres  ; 

Attendu  qu'il  est  encore  manifesté  par  l'atermoiement 


(107) 
sollicité  par  le  débiteur  et  accordé  par  plusieurs  créan- 
ciers, le  ler^mars  ; 

Attendu  que  si  la  fabrique  de  Roost-Warendin  a  conti- 
nué de  fonctionner  et  si  des  payements  ont  été  effectués, 
c'est  grâce  à  Tatermoiement  octroyé  par  le  jugement  du 
Tribunal  de  commerce ,  du  29  avril  ; 

Attendu  que  les  conditions  de  cet  atermoignent  n'ayant 
pas  été  remplies,  il  n'y  a  pas  lieu  d'y  avoir  égard  ; 

Attendu  que  les  administrateurs  de  la  Compagnie  de 
l'Escarpelle  peuvent  d'autant  moins  être  admis  à  soutenir 
qu'il  n'y  a  eu  cessation  de  paiements  que  le  27  août,  jour 
du  dépôt  du  bilan,  qu'eux-mêmes  ont  assigné  en  payement 
de  22,000  f.  dès  le  3  juin  ; 

Attendu  qu'en  raison  du  grand  nombre  de  créanciers , 
cultivateurs  du  pays,  qui,  avant  toute  poursuite  judiciaire, 
réclamaient  vainement  le  payement  de  fournitures  de  bette- 
raves ,  qui  d'usage  se  fait  au  moment  de  la  livraison ,  la 
cessation  de  payements  à  été  notoire  pour  tous  ; 

La  Cour  met  les  jugements  dont  est  appel  au  néant,  dit 
que  l'ouverture  de  la  faillite  de  Dumont  et  Q^,  ex-fabricant 
de  sucre  à  Roost-Warendin,  est  fixée  au  27  février  1858  ; 

Donne  acte  à  Desplanque,  en  sa  qualité  et  Gosselin,  à  Pré- 
vost et  à  Raratte,  de  leur  déclaration  de  s'en  rapporter  à 
justice  ; 

Déboute  Soyez  et  consorts  des  conclusions  principales 
de  leur  appel  ; 

Condamne  Soyez  et  consorts  aux  dépens  de  la  cause 
d'appel  envers  toutes  les  parties  ;  dit  néanmoins  que  les  dé- 
pens de  l'arrêt  seront  pris  et  employés  comme  frais  de  feil- 
lite  ; 

Dit  qu'au  besoin  les  dépens  exposés  par  Noël-Dieu  seront 
employés  en  frais  privilégiés  de  faillite. 

Du  ler  ïïiars  1860.  2e  chamb.  Présid.,  M.  Danel  ;  minist. 
public,  M.  Berr,  avec.  gén.  ;  concl.  eonf.  ;  avoc. ,  Mes  Ta- 
lon, Delebecque,  Legrand,  Flamant,  Merlin;  avou. ,  M^s 
Vilette,  Estabel,  Lavoix,  Dussalian,  Huret  et  Legrajad. 


(108) 
\o  FAUX  EN  MATIÈRE  CI  VILE.  — FAUX  principal.  — faux 

INCIDENT. 

2o  CHOSE  JUGÉE. — TESTAMENT.  — EXÉCUTION.  —  FAUX  PRIN- 
CIPAL ET  FAUX  INCIDENT.  —  ACTION  EN  FAUX  ET  DOL.  — 
RÉSERVES. 

80  TESTAMENT.  —  CLAUSE  PÉNALE.  —  INTERPRÉTATION. 

lo  La  procédure  de  faux,  en  matière  civile,  est  toujours  in-- 
cidente  et  ne  peut  donner  lieu  à  une  action  civile  prin- 
cipale autre  que  la  plainte.  (C.  pr. ,  art.  214;  C.  Nap., 
art.  1319.)  l^e  espèce. 

^  Il  y  a  chose  jugée  vis-à-vis  de  ceux  qui,  ayant  été  par- 
ties dans  une  instance  en  exécution  de  testament,  viennent 
attaquer  ce  même  testament,  soit  par  action  de  faux, 
soit  par  voie  de  faux  incident,  (C.  Nap.,  art.  1351.)  l«*e 
et  2e  espèces. 

La  chose  jugée  existe  encore,  alors  que  de  la  première  de- 
mande ont  été  rejetées  toutes  réserves  d'action  en  dol  et 
fraude  pour  le  mêtne  acte,  {G.  Nap.,  même  art.)  l^e  espèce. 

8®  La  disposition  ou  clause  pénale  par  laquelle  le  testateur 
déclare  que  si  l'un  des  héritiers  vient  à  contredire  ou 
critiquer  sa  volonté,  il  entend  le  priver  d'une  partie  de 
ses  biens,  s'appliqua  au  cas  où*t héritier  attaque  le  testa- 
ment du  chef  de  faux,  (l^e  espèce.) 

Ire  espèce. 
(Godart-Bonnel  C,  Leblanc-Bonnel.) 

Le  sieur  Bonnel-Jacquar,  décédé  à  Arras  en  1856,  a  laissé 
pour  héritières  les  dames  Bonnel-Leblanc  et  Bonnel-Godart, 
ses  deux  filles.  Il  avait,  par  testament  olographe  et  authen- 
tique, réglé  le  partage  de  ses  biens  entre  elles,  et  déclaré 
dans  ces  actes  que  si  «  Tune  de  ses  héritières  venait  à 
»  contredire  ou  critiquer  ses  volontés,  il  entendait  la  priver 
»  de  la  portion  dont  la  loi  lui  laissait  la  libre  disposition, 
T>  pour  cette  portion  accroître  à  son  autre  fille,  lui  en  faî- 
»  sant  au  besoin  don  et  legs  par  préciput  et  hors  part.  » 
Des  legs  particuliers  étaient  faits  à  la  dame  Leblanc  :  des 
difficultés  furent  élevées  à  ce  sujet  par  les  époux  Godart. 
Les  époux  Leblanc  demandèrent  alors  Texécution  des  testa- 
ments devant  les  Tribunaux  d'Arras. 

Les  époux  Godart  font  défaut.  Opposition.  Jugement  qui 
déclare  que  les  testaments  sont  réguliers  et  valides,  et  en 


(109)     . 

ordonne  rexéculion.  Appel  des  deux  jugements  devant  la 
Cour,  et  réserves  faites  dans  les  conclusions  pour  toute  ac- 
tion en  dol  et  fraude  qui  pouvait  être  intentée  vis-à-vis  des 
testaments*  Arrêt  de  la  Cour,  du  21  juin  1858,  qui  con- 
firme les  jugements  et  rejette  toutes  réserves. 

Les  époux  Godart  font  alors  assigner  les  époux  Leblanc- 
Bonnel  pour  voir  déclarer  faux  l'acte  du  7  octobre  1856, 
passé  devant  M^s  Bollet  et  Hovine ,  notaires,  et  qualifié  tes- 
tament. .Ils  prétendent  que  les  déclarations  des  notaires  sur 
la  dictée  du  testateur  sont  fausses  ;  ils-  articulent  des  faits 
tendant  à  prouver  ce  faui.  Le  Tribunal  d'Arras  rend  le  ju- 
gement suivant  :. 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  la  procédure  de  faux  en'matière  civile 
ne  peut  jamais  être  qu'un  incident  et  non  une  action  prin- 
cipale ;  qu'en  effet  les  simples  particuliers  ne  peuvent  avoir 
intérêt  et  qualité  pour  mettre  en  suspicion  la  foi  due  à  un 
acte  régulier  et  en  faire  constater  la  fausseté  qu'autant 
qu'il  leur  est  opposé,  et  par  conséquent  dans  le  cours  d'une 
instance  où  il  est  produit  ; 

»  Que  les  formes  spéciales  de  cette  procédure  et  les  ga- 
ranties que  laloi  exige,  ne  peuvent  nullement  être  suppléées 
par  une  instance  introduite  au  principal  dans  la  forme 
ordinaire  ; 

»  Que  ce  principe,  consacré  par  les  art.  214  et  suiv.  du 
C.  pr.,  trouve  encore  sa  consécration  dans  Fart.  1319  C. 
Nap.,  qui  distingue  la  plainte  en  faux  principal  de  Y  ins- 
cription de  faux  incidemment  ; 

»  Que  dès-lors  l'action  des  époux  Godart  est  doublement 
irrecevable  ; 

7>  Considérant  qu'un  jugement  de  ce  siège,  rendu  le  28 
août  1857,  entre  les  mêmes  parties  et  confirmé  par  la  Cour 
impériale  de  Douai,  le  21  juin  1858,  a  ordonné  Texécution 
du  testament  du  sieur  Bonnel,  aujourd'hui  attaqué  par  les 
époux  Godart,  et  que  l'instance  actuellement  pendante,  de- 
vant le  Tribunal,  n'a  et  ne  peut  avoir  d'autre  objet  que 
d'empêcher  cette  exécution  ;  que  la  différence  des  moyens 
ne  fait  pas  disparaître  l'identité  du  but  ; 

>  Que  s'il  ne  peut  pas  appartenir  au  Tribunal  de  paralyser 


(110) 

les  décisions  souveraines  de  la  Cour,  il  ne  lui  appartient 
pas'  davantage  de  rechercher,  d'une  manière  abstraite,  si 
le  testament  est  ou  n'est  pas  entaché  de  faux  ; 

»  Que  d'un  autre  côté,  les  réserves  faites,  par  les  époux 
Godart,  d'attaquer  le  testament  du  chef  de  dol  et  de  capta- 
tion,  ont  été  rejetées  par  l'arrêt  du  21  juin  1858  ;  qu'il  y  a 
par  conséquent  chose  jugée  encore  sous  ce  rapport  ; 

»  Considérant  que  la  demande  en  nullité  du  testament, 
fondée  sur  la  prétendue  fausseté  de  cet  acte,  introduite  par 
les  époux  Godart,  est  une  contradiction  évidente  à  la  vo- 
lonté exprimée  par  le  testateur,  et,  par  conséquent ,  une 
infraction  à  la  clause  pénale  édictée  dans  le  testament  ;  et 
que  les  demandeurs  ont  encouru  la  peine  attachée  à  cette 
infraction  ; 

»  Le  Tribunal,  statuant  en  premier  ressort,  déclare  non 
recevable  et  nulle  la  demande  des  époux  Godart  ;  dit  qu'ils 
ont  encouru  la  clause  pénale  édictée  par  le  testament  du 
sieur  Bonnel  ;  en  conséquence  dit  qu'ils  seront  privés  de  la 
quotité  disponible,  laquelle  sera  attribuée  aux  défendeurs 
par  préciput  et  hors  part  ; 

»  Renvoie  les  parties  devant  Vassellc,  notaire ,  pour  la 
liquidation,  etc.  » 

Appel  devant  la  Cour,  où,  mettant  d'abord  en  avant  les 
difficultés  élevées  par  les  appelants  sur  les  legs,  et  en  allé- 
guant qu'une  transaction  avait  eu  lieu  sur  ce  point,  on  con- 
testait la  force  de  chose  jugée  à  l'arrêt  du  21  juin  1858 ,  en 
regard  d'une  action  ayant  pour  but  de  faire  invalider  les 
testaments.  On  ajoutait  qu'aux  termes  de  Tart.  3  C.  instr. 
crim..,  toute  partie  peut  choisir  la  voie  qui  lui  convient,  du 
civil  ou  du  criminel,  pour  faire  constater  ses  droits.  Le  dé- 
fendeur ne  saurait  contraindre  le  demandeur  à  suivre  la 
voie  la  plus  rigoureuse.  On  ne  peut  pas  induire  de  l'art. 
214  C.  pr.  que  la  constatation  d'une  pièce  fausse  sera  tou- 
jours jugée  incidemment,  et  l'art.  1319  C.  Nap.,  tout  en 
mentionnant  la  voie  de  la  plainfe  et  celle  du  faux  incident, 
ne  dispose  pas  que  le  demandeur  sera  forcé  de  prendre 
Tune  ou  l'autre  de  ces  voies.  Il  en  est  une  troisième,  l'ac- 
tion civile  pour  préjudice  causé  par  le  faux,  qui  reste  tou- 
jours ouverte ,  d'après  les  règles  du  droit  commun  et  les 
dispositions  particulières  de  l'art.  3  C.  inst.  crim.  —  On 


(111) 

repoussait  encore  la  possibilité  de  faire  application  dans 
l'espèce  de  la  condition  pénale  insérée  au  testament.  Les 
appelants,  disait-on,  n'attaqent  pas  le  règlement  des  dispo- 
sitions testamentaires,  mais  la  force  même  de  Tacte,  c'est- 
à-dire  rinstrument  ou  la  preuve  de  la  volonté  présumée  du 
testateur,  non  sa  volonté  elle-même. 
La  Cour  a  confirmé  le  jugement  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges; 

Sans  qu'il  y  ait  lieu  par  conséquent  à  s'arrêter  à  Toffre 
de  preuves  des  époux  Godart  ; 

Met  l'appellation  au  néant,  confirme  le  jugement,  ordonne 
qu'il  sortira  effet  ; 

Et  condamne  les  appelants,  etc. 

Du  6  mars  1860.  l^e  cbamb.  Présid.,M.  de  Moulon, 
1er  prés.  •  minist.  publ.^  M.  Morcrette^  1er  avoc.-gén.  ; 
avec.  ,  Mes  Emile  Flamant  et  Duhem  ;  avou. ,  Mes  Estabel 
et  Lavoix. 

2®  espèce. 
(Godart-Bonnel  G.  Leblanc-Bonnel  et  Masson.) 

Les  époux  Godart,  qui  figurent  dans  l'espèce  précédente, 
ont  reçu  des  époux  Leblanc  sommation  de  se  trouver  en 
l'étude  d'un  notaire  pour  y  consentir  au  partage  amiable 
des  objets  mobiliers  délaissés  par  Bonnel-Jacquar.  Us  ne  s'y 
sont  pas  trouvés.  Les  époux  Leblanc  ont  alors  fait  somma- 
tion à  l'exécuteur  testamentaire,  le  sieur  Masson,  de  pro- 
céder à  ce  partage  conformément  au  testament.  Refus  de 
celui-ci,  fondé  sur  Tabsenee  des  époux  Godart.  Assigna- 
tion des  époux  Godart  devant  le  Tribunal  civil  d'Arras,  avec 
mise  en  cause  de  Masson.  Défaut  des  époux  Godart.  Juge- 
ment de  défaut  profit  joint.  Opposition  des  époux  Godart. 
Nouveau  défaut.  Jugement  qui  ordonne  qu'il  sera  procédé 
par  le  sieur  Masson  au  partage  des  meubles,  etc. 

Il  est  fait  appel  par  les  époux  Godart,  qui,  en  même 
temps,  s'inscrivent  en  faux  au  greffe  de  la  Cour  contre 
l'acte  du  7  octobre  1856,  se  conformant  aux  règles  de  la 
procédure  sur  le  faux  incident.  Devant  la  Cour  on  soutient, 
comme  dans  la  l^e  espèce,  qu'il  n'y  a  pas  chose  jugée,  et 
que  par  suite  l'inscription  de  faux  doit  être  admise. 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 


(H2) 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  Texécution  du  testament  au- 
thentique du  7  octobre  1856,  aujourd'hui  argué  de  faux 
par  les  appelants,  a  été  ordonnée  par  un  arrêt  rendu  con- 
tradictoircment  entre  eux  et  les  intimés,  le  21  juin  4858; 
que  cet  arrét,confirmatif  des  jugements  des  3  juin  et  28  août 
1857,  a  acquis  l'autorité  delà  chose  jugée;  qu'ainsi  les 
appelants  sont  non  recevables  à  s'inscrire  en  faux  contre 
le  testament  susdaté  ; 

Qu'il  résulte,  au  surplus,  de  tous  les  documents  du  pro- 
cès ,  que,  pour  entraver  l'exécution  des  dispositions  testa- 
mentaires de  leur  père  et  beau-père,  les  époux  Godart  ont 
vainement  allégué  l'existence  d'une  transaction  qu'ils  n'ont 
pu  justifier  ;  que  cette  tentative  a  été,  à  bon  droit,  repous- 
sée, ainsi  que  d'autres  moyens,  par  la  justice;  qu'enfin, 
après  avoir  épuisé  toutes  les  voies  dilatoires,  ils  recourent 
à  une  inscription  de  faux  qu'on  ne  saurait  accueillii;,  dans 
les  circonstances  de  la  cause,  sans  méconnaître  à  la  fois 
l'esprit  et  le  texte  de  l'art.  214  C.  proc.  civ.;'que  l'attaque 
dirigée  contre  ce  testament,  fût-elle  encore  recevable ,  ne 
serait  pas  mieux  fondée  en  réalité,  puisque  tous  les  éléments 
du  procès  concourent  à  établir  que  cet  acte  authentique, 
dont  la  validité  a  été  consacrée  par  les  décisions  susmen- 
tionnées, contient  en  effet  la  fidèle  expression  d'une  volonté 
qui  devait  être  respectée; 

Par  ces  motifs,  donne  acte  à  Masson  de  ce  qu'en  sa  qua- 
lité d'exécuteur  testamentaire ,  il  déclare  s'en  rapporter  à 
justice  ; 

Déclare  les  époux  Godart-Bonnel  non  recevables  dans 
leur  inscription  de  faux,  les  condamne  aux  dépens  de  l'in- 
cident, et  ordonne  aux  parties  de  plaider  au  fond. 

Du  7  mars  1860.  Ire  chamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon,  1er 

Krésid.;  minist.  publ. ,  M.  Morcrette,  l^ravoc-gén.;  avoc, 
[es  Emile  Flamant  et  Duhem;  avou. ,  Mes  Estabel,  Lavoix 
et  Debeaumont. 


(113) 
COMMUNAUTÉ    ENTRE  ÉPOUX.  —  administration.  — 

DISPOSITIONS  GRATUITES  D'EFFETS  MOBILIERS.  —  HÉRITIERS 
DU  MARI.  —  FRAUDE  NON  PRÉSUMÉE. 

Le  mari,  dans  V administration  de  la  communauté,  peut 
disposer  des  effets  mobiliers  qui  la  composent,  à  titre 
gratuit  et  particulier,  au  profit  de  toutes  personnes  ca- 
pables, sans  en  excepter  ses  héritiers  jrrésomptifs  qui  ne 
doivent  dans  ce  cas  aucun  rapport  à  la  communauté, 
pourvu  qu'il  ne  s' m  soit  pas  réservé  l'usufruit,  et  alors 
qiCil  ne  peut  être  présumé  avoir  fait  aucune  fraude 
aux  droits  de  la  femme  ou  à  ses  hérétiers.  (C.  Nap.. 
art,  1422  et  1469.)  (1). 

(Dupire,  veuve  Vasseui*,  C.  héritiers  Vasseur.) 

La  dame  Augustine  Dupire  a  épousé,  en  1835,  un  sieur 
Adrien  Vasseur,  fabricant  d'huile  à  Seclin.  Leur  contnt  de 
mariage  portait  la  coïivention  suivante  : 

« Lors  de  la  dissolution  du  mariage  par  le  décès  de 

»  Tun  des  époux,  s*ii  existe  dés  enfants,  le  survivant  aura, 
»  ainsi  que  le  permettent  les  dispositions  de  Fart.  1525  G. 
î  ciy.,  la  propriété  de  tous  les  biens  meubles  en  général, 
»  et  la  propriété  de  la  moitié  de  ceux  immeubles  de  la 
»  communauté ,  plus  l'usufruit  de  l'autre  moitié  de  ces 
»  mêmes  immeubles,  sans  charge  de  caution,  mais  à  celle 
î  de  payer  et  acquitter  toutes  les  dettes  de  ladite  commu- 
jnauté.  Si,  au  contraire,  il  n'existe  pas  d'enfant  de  ce 
*  mariage,  le  survivant  sera  maître  et  propriétaire  de  tous 
»  les  biens  en  général,  meubles  et  immeubles  de  la  com- 
B  munauté,  sans  cependant  pouvoir  disposer  à  titre  gratuit, 
»  de  telle  manière  que  ce  soit,  au-delà  de  la  moitié,  attendu 
»  que  ce  qui  eh  restera  à  son  décès  devra  être  partagé 
>  par  moitié  entre  ses  héritiers  et  ceux  du  prédécédé.  » 

En  1856,  décès  d'Adrien  Vasseur,  sans  entant.  Sa  veuve, 
lorsque  s'est  liquidée  la  succession  de  son  mari ,  a  élevé 
diverses  prétentions  à  des  récompenses  qui  lui  auraient  été 
dues  par  cette  succession. 

Ainsi,  une  association  agricole  avait  existé  entre  sôh 
mari  et  un  frère  de  celui-ci,  Jean-Baptiste  Vasseur  (lequel 

(1)  La  donation  à  titre  particulier  pourrait  être  attaquée,  si  elle  «vait 
été  faite  avec  l'intention  de  frauder  les  dispositions  prohibitives  de  la 
loi.  Glaadaz,  £ncyc/op.  du  droit,  v®  Communauté,  n»  21. 

V.  d'ailleurs  les  Comment,  de  l'art.  1422  C.  Nàp.,  par  Marcadé,  Ro- 
dlére  et  Pont,  Troplong,  Zachâriae,  etc. 

TOME  XVIII.  8 


(114) 

élail  décédé  en  insliluant  Adrien  Vasseur  son  légataire  uni- 
versel), pendant  laquelle  association,  les  biens  propres^ 
d'Adrien  Vasseur  avaient  été  augmentés,  au  détriment  de 
la  communauté,  d'une  valeur  de  3,500  fr.  —  Une  somme 
de  843  fr.  avait  encore  été  dépensée  par  la  communauté 
pour  Tacquisilion  d'une  partie  de  ferme.  —  Des  impenses 
pour  4,200  fr.ienviron  auraient  été  faites  aux  biens  propres 
du  défunt.  —  Et,  enfin,  la  dame  Vasseur  prétendait  que 
son  mari  ayant  fait  des  donations  à  ses  héritiers,  l'impor- 
tance de  ces  donations  devait  être  rapportée  à  la  commu- 
nauté. —  Elle  arrivait  ainsi  à  réclamer  une  somme  de  46 
à  17,000  fr. 

Instance  devant  le  Tribunal  civil  de  Lille ,  qui  rend  un 
jugement  par  lequel  il  décide  que  les  héritiers  d'Adrien 
Vasseur  doivent,  du  chef  de  son  auteur,  compte  à  la  veuve 
bénéficiaire  de  la  communauté  la  somme  de  3,500  fr.  qui 
a  été  tirée  de  celle-ci  pour  consolider^  sur  la  tête  d'Adrien 
Vasseur,  la  portion  qui  appartenait  à  son  frère  Jean-Bap- 
tiste dans  un  immeuble  commun  ;  qu'au  même  titre ,  ils 
lui  doivent  compte  de  843  fr.  pour  la  part  contributive 
d'Adrien  dans  l'acquisition  de  trois  seizièmes  du  même  im- 
meuble ;  qu'il  sera  tait  compte  de  diverses  plus-values  ; 
que  les  dons  manuels  faits  par  Adrien  Vasseur  à  son  frère 
sont  valables  en  la  forme,  et  qu'au  fond  ils  n'ont  pas  été 
prélevés  sur  la  communauté,  mais  qu'ils  constituent  en 
réalité  une  délibation  de  la  succession  de  Jean-Baptiste 
Vasseur  ;  qu'en  conséquence  aucune  récompense  n'est  due 
de  ce  chef  à  la  conimunauté  ;  que  les  intérêts  des  récom- 
penses qui  seraient  dues  par  la  succession  d'Adrien  Vasseur 
à  la  communauté  sont  une  charge  de  l'usufruit  universel 
constitué  au  profit  de  la  veuve  Vasseur.  Enfin  le  même 
jugement  accorde  à  «elle-ci,  qui  en  avait  réclamé  500,  une 
somme  de  300  fr.  pour  deuil  de  son  mari. 

Appel  par  la  dame  Vasseur  contre  les  héritiers  de  son 
mari.  Dans  son  intérêt  devant  la  Cour,  il  est  soutenu  qu'une 
donation  en  avancement  d'hoirie  faite  par  le  mari  à  ses 
héritiers  présomptifs,  avec  les  deniers  de  la  communauté, 
ne  rentre  pas  dans  les  termes  de  Fart.  1422  C.  Nap.  La 
loi^  dit-on,  qui  a  prohibé  la  donation  par  le  mari  de  biens 
meubles  individuels  de  la  communauté,  si  le  mari  s'en  ré- 
serve l'usufruit,  a  prohibé,  à  plus  forte  raison^  la  donation 
par  laquelle  le  mari  disposerait  à  son  profit,  ou  au  profit 
exclusif  de  la  succession,  des  meubles  de  la  communauté 
dont  il  est  administrateur  dans  l'intérêt  de  sa  femme.  De 


(415) 

pareilles  donations,  ajoute-t-on,  constituent  d'ailleurs  des 
actes  frauduleux  au  préjudice  de  la  femme,  et  dont  celle-ci 
n'a  d'autre  moyen  de  se  garer  que  Faction  en  récompense 
par  elle  exercée  lors  de  la  liquidation  de  la  communauté. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  par  les  motifs  et  le  dis- 
positif suivants  : 

ARRÊT. 

LiCOUR;  Attendu  qu'aux  termes  de  Fart.  1422  C.  Nap., 
le  mari  peut  disposer  des  effets  de  la  communauté  à  titre 
gratuit  et  particulier  au  profit  de  toutes  personnes ,  pourvu 
qu'il  ne  s'en  réserve  pas  l'usufruit  ; 

Attendu  qu'il  résulte,  de  la  généralité  de  ces  expressions 
au  profit  de  toutes  personnes  en  opposition  avec  les  termes 
de  l'art.  225  de  la  coutume  de  Paris  à  personne  capable , 
que  le  législateur  n'a  pas  adopté  les  doctrines  de  Dumoulin 
et  de  Pothier,  qui  rangeaint  les  hoirs  dans  les  incapables, 
et  ne  voulaient  pas  qu'ils  pussent  être  le  terme  de  la  libé- 
ralité de  l'époux  ; 

Attendu  que  le  législateur  a  pris  le  soin  de  déterminer 
les  cas  où  la  donation  faite  à  un  héritier  obligeait  l'époux 
ou  ses  héritiers  à  rapport  à  la  communauté;  que  c'est,  aux 
termes  de  l'art.  1469 ,  lorsqu'il  a  doté  avec  les  effets  de  la 
communauté  un  enfant  d'un  autre  lit ,  ou  lorsqu'il  a  doté 
personnellement  un  enfant  commun  ; 

Attendu  que  le  mari  ne  peut  sans  doute  faire  fraude  aux 
droits  de  la  femme  ou  de  ses  héritiers  ,  mais  que  dans  l'es- 
pèce la  fraude  ne  peut  se  présumer  ; 

Attendu ,  en  effet ,  que  lorsque  les  dons  manuels  ont  eu 
lieu ,  il  était  impossible  de  prévoir  lequel  survivrait  du 
mari  ou  de  la  femme  ; 

Attendu  que  la  libéralité  exercée  par  le  mari  a  eu  une  cause 
fort  légitime;  qu'institué  légataire  universel  de  son  frère 
Jean-Baptiste  Vasseur,  au  détriment  de  sa  sœur  et  de  ses 
neveu  et  nièce ,  il  a  voulu,  par  un  sentiment  d'équité,  leur 
faire  une  part  dans  l'hérédité  ; 

Attendu  que ,  si  postérieurement  il  a  pris  des  quittances 
des  sommes  qu'il  avait  données,  avec  cette  mention  qu'elles 
seraient  considérées  comme  un  avancement  d'hoirie ,  c'est 


(m) 

que  cliacun  .d'eaix^'avait  pas  un«  part  égsie  dans  ses  libé- 
ralités ,  et  qu'il  voulait  rétablir  en^re  eux  coite  égalité 
lorsqu'ils  viendraient  à  sa  succession  ; 

Attendu  qu'Adrien  Vasseur  eût  pu  renoncer  à  la  suc- 
cession de  son  frère  sans  que  sa  femme  pût  s'en  plaindre , 
et  qu'il  a  pu  également  remettre  à  ses  cohéritiers  partie 
de  cette  succession  sans  que  ceux-ci  soient  tenus  de  rappor- 
ter à  ia  comiminaulo  ce  iju'ils  ont  reçus  ; 

Attendu  que.,  loin  de  pouvoir  élever  des  soupçons  de 
flraude  à  ses  droits,  la  veuve  Vasseur  a  conjau  les  disposi- 
tions faites  par  son  mari  et  s'y  est  associée. 

Déboute  la  veuve  Vasseur  de  son  appel,  ordonne  que  le 
jugement  donl  est  appel  sortira  effet. 

Pu  %  mars  \SêO.  2«dhiamb,  Présid. ,  M.  Danel  ;  minist. 
pub.,  M.  Berr,  avoc.-gén,  ;  avo;c.,  M^'Ouhem  et  Dupont; 
avou. ,  Mes  Legrajod  et  Villette. 


lo  PARTAGE  D'ASCENDANT.—  donation.--  rapport  a 

SUCCESSION. —  OBJETS  DÉTOURNÉS. 

2«  SERMENT.  —  LITIS-DÉCISOIRE.  —  FORMULE.  —  OBJET  DU 
LITIGE. 

lo  Lorsqu'à  la  stiite  d'un  ade  de  partage  et  donalion  d' as- 
cendant, les  copartageants  se  déclarent  bien  et  dûment 
partagés,  en  s' interdisant  aucune  réserve  Vun  contre 
l'autre,  il  ne  peut  plm  y  avoir  lieu  à  rapport  par  aucun 
d'eux  à  la  succession  du  donateur,  à  moins  qu'il  ne  soit 
prouvé  que  des  sommes  ou  objets  ofU  été,  antérieuremeni 
au  partage,  employées  au  seiU  profit  de  Vun  des  cmar- 
tageanis  et  à  V  insu  du  donateur,  (G.  Nap. ,  art.  843, 7y5.  ) 

2°  Le  serment  Utis-décisoire  doit  porter  exclusivement  sur  le 
point  en  litige,  et  ne  rien  contenir  dans  sa  formule  qui  y 
soit  étranger.  (  G.  Nap.  ,  art.  1359.  ) 

(  Deret  et  les  époux  Dqpuîch  C.  Deret,  ) 

En  1854-,  une  dame,  veuve  Martin  Deret,  dont  les  affai- 
res étaient  communes  avec  celles  de  ses  enfants ,  Antoine , 
Augustin  et  Amélie  Deret,  femme  Dupnich,  à  Plouvain 
(Pas-de-Calais),  fit  le  partage  de  ses  biens  en  attribuant 
divers  legs  aux  uns  et  aux  autre*. 

Néanmoins,  en  1857,  demande  en  partage  et  liquidation 


(«7) 

(le  h  communaoté  Dei'el ,  et  de  la  succession  de  Martin 
Deret ,  sur  laquelle  demande  il  est  ordonné  de  procéder  de- 
vant notaire.  Difficultés  et  renvoi  devant  le  Triibufial. 

Décès  de  la  dame  Deret.  Demande  en  liquidation  de  sa 
succession.  Requête  au  Président  du  Tribunal  par  Antoine, 
pour  faire  vendre  le  mobilier  délaissé  par  la  dairre  Deret  et 
non  compris  dans  la  donation  de  1854.  Opposition  d'Au- 
gustin qui  prétend  à  la  propriété  de  ce  mobilier. 

Jonction  des  trois  instances.  Il  est  question  de  décider  si 
telle  ou  telle  somme  doit  être!  rà^orlée  à  la  succession  de 
la  dame  Deret. 

Le  Tribunal  d'Arras,  par  son  jugement  du  24-  mars  4  859, 
condamne  Antoine  etAugustin  à  rapporter  diverses  sommes, 
déclare  les  époux  Dupuich  non  recevables  sur  certains  points, 
et  les  admet  à  faire  preuve  par  témoins  et  serment  de  plu- 
sieurs faits  qui  peuvent'  encore  donner  lieu  à  rapport. 

A|5pel=par  les  époux  Dupuich  et  Antoine  Dbret*. 

LaCour  en  admettant,  aveclespremîeFsjuges,  certains  rap- 
ports, a  rejeté  les  preuvesa  faire poun les  autres,  et  n'a  admis 
le  serment  qu'en  le  limitant  strictement  à  Tobjet  du  litige. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  touche  la  demande  â  preuve 
des  faits  articulés  sous  les  n^  1,  2,  3,  4»  et  5  des  conclu- 
sions de  rappeteiit  : 

Attendu  que,  d'après  les  termes  de  l'acte  de  donation  du 
10  août  4854,  les  copartageants  se  trouvent  remplis  de 
leurs  parts  et  droits  dans  là  succession  future  de  leur  mère 
et  dans  la  succession  de  leur»  perte,  quelles  que  soient  les 
sommes  qui  leur'  ^juraieifit  pu  êti*e  remises  antérîdurement 
àiilre  d'avancement  d^hoirie,  à-contpte  ou  tout  autre  titre  ; 

Qu'ils  se  déclarent  bien- et  dûment  partagés,  s*inteTdisant 
aticune  réserve  l'un  contre  l'autre  ; 

Attendu j  dês^lôrs,  que  toute  soittme  ou  valeur  employées 
par  l'un  d'eux,  antérieuremetit-au  partage,  à  son  profit  per- 
sonnel et  exclusif,  si  la' mère  commune  Fy  a  autorisé,  ne 
saurait' donner  lieu  à  un  i^ppcfrt  à  succession  ; 

Attendu  que  rappelant  n'offre  pas  de  prouver  que,  soit 
les  sommes  retirées  à  la- Caisse  d^épargne  de  Cambrai, 
^it  le  résidu  des  somirties  prises  chez  le  notaire  Dàîx>  aient 
élc  employées  par  Antoine  à  son=  profit'  exclusif,  ééPîtisu  et 


(448) 
sans  le  consentement  de  la  mère,  et  auraient  été  détournées 
par  lui  ; 

Attendu,  dés-lors,  que  la  preuve  offerte  n'est  pas  rele- 
vante ; 

En  ce  qui  touche  le  serment  litis-décisoire  : 

Attendu  qu'il  ne  peut  porter  que  sur  le  fait  litigeux,  sans 
qu'il  soit  loisible  à  l'appelant  d'y  mêler  des  faits  étrangers 
au  point  en  question  ; 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  dès-lors  de  retrancher  du  serment 
déféré  ce  qui  a  rapport  aux  4800  f.  de  la  Caisse  d'épargne 
de  Cambrai ,  et  aux  4500  f.; 

En  ce  qui  touche  les  faits  articulés  par  Antoine  à  la 
charge  d'Augustin  : 

Attendu  qu'en  admettant  comme  établi  qu'un  peu  avant 
juillet  4857,  la  veuve  Deret  ait  vendu  pour  3  ou  400  f. 
d'arbres  sur  sa  part  de  marais  ; 

Et  que,  lors  de  son  décès,  45  mars  4858,  Augustin  ait  dé- 
claré qu'elle  n'avait  pas  laissé  d'argent,  il  n'en  résulterait 
pas  qu'Augustin  se  les  fût  appropriés  ; 

Qu'ainsi  la  preuve  est  irrelevante  ; 

En  ce  qui  touche  la  rectification  demandée  : 

Attendu  que  les  réserves  ont  été  faites  non  par  Antoine, 
mais  par  Augustin  ; 

Qu'ainsi  c'était  à  Augustin  qu'il  fallait  en  donner  acte  ; 

La  Cour  donne  acte  aux  époux  Dupuich  de  ce  qu'ils  dé- 
clarent s'en  rapporter  à  justice.  Déboute  l'appelant  de  ses 
conclusions  en  admission  à  preuve.  Emendant,  dit  que  la 
preuve  offerte  par  Antoine ,  en  ce  qui  touche  la  vente  des 
arbres,  est  irrelevante  ;  dit  en  conséquence  qu'il  n'y  sera 
pas  procédé.  Admet  Augustin  à  déférer  le  serment  litis- 
décisoire  k  Antoine  Deret,  dans  ces  termes  :  «  Avez-vous 
payé  à  Jean-Baptiste  Lodieu,  votre  beau-frère,  une  somnie 
de  8,000  f.  en  considération  de  la  dot  immobilière  faite  à 
votre  femme  Céline  Lodieu,  par  le  contrat  de  mariage  du  28 
avril4852?  Ces  8,000  f.  provenaient- ils  de  l'avoir  de  la  veuve 
Deret  et  en  avaient-ils  été  détournés  par  vous  ?  »  ; 

Et,  moyennant  la  prestation  du  serment,  déboute  l'appe- 
lant de  son  appel  de  ce  chef; 


(149) 

El  attendu  que ,  Antoine  î)eret  présent  à  Taudience  et  de 
ce  interpellé,  a  prêté  le  serment  dans  les  ternies  où  il  lui 
èlait  déféré,  la  Cour  lui  donne  acte  du  serment  ; 

Dit  que  les  réserves  actées  au  jugement  sont  faites  non 
pas  par  Antoine,  mais  par  Augustin  Deret  ; 

Orc^onne  que  le  surplus  du  jugement  sortira  etlcl  ; 

Conipense  les  dépens  de  la  cause  d'appel ,  sauf  ceux  des 
époux  Dupuich ,  qui  seront  employés  comme  frais  de  liqui- 

Dit  que  les  frais  de  Tarrêt  seront  aussi  employés  comme 

frais  de  liquidation. 

Du8marsl860.  S^chamb.  Présid. , M. Danel;  min. publ. , 
M.  Berr  ,  avoc.-gén.  ;  avoc. ,  M^s  Talon  et  Flamant  ;  avou. , 
Mes  Debeaumont ,  Estabel  et  Huret, 


HYPOTHÈQUE    COiNVENTIONNELLE.    —    nullité.    — 

LÉGATAIRE  APPARENT. 

Uhypothèque  consentie  par  un  légataire  universel  apparent 
tombe  avec  le  testament  même  qui  servait  de  base  au 
prétendu  droit  de  celui-ci,  alors  (Tailleurs  que  le  bénéfi- 
ciaire de  cette  hypothèque  ne  prouve  pas  une  bonne  foi 
fondée  sur  une  erreur  insurmontable.  (G.  Nap.,  art.  1599 
et  2182  ;C.  proc,  art,  747.)<1). 

(Vanheddeghera  C  Devillers  et  consorts.) 

Après  le  décès,  en  1856,  du  sieur  Jean-Baptiste  Potelle, 
de  Gouzeaucourt,  qui  ne  •laissait  pour  héritiers  que  de 
nombreux  collatéraux,  un  sieur  Carpenlier,  de  la  même 
commune,  a  présenté,  au  président  du  Tribunal  civil  de 
Cambrai,  un  testament  olographe  par  lequel  il  se  prétendait 
légataire  universel  de  Potelle. 

Envoi  en  possession  le  15  novembre  1856. 

Le  15  avril  1857,  emprunt  fait  par  Garpentier,  d'un  sieur 
Vanheddeghem,  d'une  somme  de  1, 500  fr.  avec  hypothèque 
sur  les  immeubles  de  la  succession  Potelle.  Le  14  mai 
suivant,  inscription  prise  en  vertu  de  Tobligation. 

Le 7  décembre  suivant,  demande  en  nullité  du  testament 

(1)  Conf,  G.  cass.  25  janv.  1847  (J.  Pal.  4848,  t.  2.  1348,  p.  701). 

V.  du  reste,  sur  la  validité  des  actes  d'aliénation  faits  par  Théritier 
apparent,  la  jurisprudence  et  la  doctrine  indiquées  Rép.  Pal.,  v»  Péti- 
tion d'hérédité,  no  43  et  suiv.  Adde,  suppl.  eod  loc. 

Consult.  Ami.  Propriétaire  app.  Douai  19  mai  18i9,  Jurisp.  7,  9?.. 


n 


i 


(120) 

par  les  héritiers  collatéraux.  Vérification  d'écritures  ;  rap- 
port d'experts  favorable  à  la  validité  de  l'acte. 

Le  4  juin  1858,  jugement  qui  ordonne  une  enquête  sur 
des  faits  articulés  aux  fins  de  nullité. 

Le  17  novembre,  jugement  qui  annuUe  le  testament. 

Le  12  avril  1859,  arrêt  conflrmatif. 

Il  paraissait,  du  reste,  résulter  des  enquêtes  que  le  pré- 
tendu légataire  n'avait  qu'une  moralité  douteuses ,  et  que 
les  tiers  qui  avaient  contracté  avec  lui,  auraient  pu  facile- 
ment soupçonner  sa  bonne  foi. 

Les  héritiers  collatéraux,  Devillers  et  consorts,  assignent 
alors  Vanheddeghem  en  nullité  d'hypothèque  et  radiation 
d'inscription. 

Carpentier  est  mis  en  cause,  et  fait  défaut. 

Le  Tribunal  de  Cambrai,  à  la  date  du  26  janvier  1860, 
prononce  la  sentence  suivante  : 

JUGEMENT. 

((  Attendu  que  la  vente  de  la  chose  d'autrui  est  nulle  ; 
que,  par  application  de  ce  principe,  l'hypothèque  consentie 
sur  l'in^meuble.  d'autrui  n'est  également  susçeptij)le  de 
produire  aucuHr^flet  ; 

7>.  Attendu  que  si  ces  principes  peuvent  fléchir  devant  la 
bonne  foi  qui  a  présidé  aux  actes  intervenus  entre  les  tiers 
et  l'héritier  apparent,  ce  n'est  que  dains  le  cas  d'une  erreur 
insurmontable  ; 

»  Attendu  que,  dans  l'espèce,  le  testament  fait  en  faveur 
d'un  étranger  à  la  famille  du  testateur,  d'une  moralité  plus 
que  douteuse,  a  fait  bruit  dans  la  localité  ;  qu'il  a  donné 
lieu  à  des  vérifications  d'écritures  amiables  et  des  démarches 
nombreuses  de  la  part  des  héritiers,  pour  rechercher  les 
moyens  de  l'attaquer  ;  qu'en  définitive  il  est  tombé  devant 
les  faits  dont  la  preuve  a  été  administrée; 

»  Attendu  que  le  doute  dont  le  testament  était  entouré  a.  pé- 
nétré jusque  dans  l'acte  même  constitutif  d'hypothèque  dont 
le  bénéfice  est  réclamé ,  puisqu'il  y  est  dit,  nonobstant  le 
ternie  de  remboursement  stipulé,  que  la  créance  devien- 
drait exigible  par  le  seul  fait  d'une  contestation  sur  la  pro- 
pi:îété  du  bien  hypothéqué  ; 

»  Attendu  que,  dans  ces  circonstances  exclusives  d'une 


(421) 

boane  foi  incontestable,  le  principe  conserve  tout  son  em- 
pire ;  que,  par  suite,.  Thypothèque  doit  être  déclarée  nulle  ; 

%  Attendu  que  ^rpentier  fait  itératif  défaut  ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  donne  itératif  défaut  contre 
Caipentier,  annule  l'hypothèque  du  45  avril ,  ordonne  la 
radiation  de  Tinscription  prise  le  44  mai  suivant,  à  quoi 
faire  sera  contraint  M.  le  conservateur  des  hypothèques  de 
Cambrai,  sur  le  vu  du  présent  jugement; 

>  Condamne  le  défendeur  aux  dépens,  etc.  » 

Appel  par  Vanheddeghem.  Pour  lui,  il  est  dit  devant  la 
Cour  que  le  légataire  universel  apparent  devant  être  assi- 
milé à  l'héritier  ou  propriétaire  apparent,  il  suffit  qu'il 
ait  eu  cette  quahté  incontestable  pour  que  le  tiers  ait  pu 
contracter  avec  lui  de  bonne  foi  et  valablement.  Or,  il  ré- 
sulte des  faits  de  la  cause  que  le  testament  n'a  été  attaqué 
par  les  héritiers  collatéraux  que  postérieurement  à  Tobli- 
gation  contractée  et  à  l'inscription  prise.  L'erreur  se  jus- 
tifie donc  pour  l'appelant  ;  il  ne  peut  en  être  victime. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement. 

AftRÊT. 

LA.  COUR;.  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant;  ordonne  que  le  jugement' dont 
est  appel  sortira  effet;  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  27  mars  4860.  4re  chamb.  Prèsid.,M,  deMoulon,4<ir 
présid.  ;  minisl.  publ.,  M.  Morcrette,  4er  avoc.-gén.  ;  avoc, 
Mes  Goquelln  et  Duhem;  avou.,  MesHiiret  et  Bonnaire. 


DEGRÉ  DE  JURIDICTION.  -^  taux  m  la  demande,  — 

DIVISIBILITÉ.  —  COHÉRITIERS.  —  LIQUmATION.    —   INDÉ- 
TERMINATION. 

Le  iawc  d'miei  dem'ande,  dirigée  contre  des  cohéritiers,  se 
divise  entre  eux,  suivant' leurs  droits  successifs,  de  ma- 
nière  que  le  quotient  de  chacun,  et  non  la  somme  demandée 
à  toti^,  règle  le  degré  de  juridiction. 

Ainsi  est,  en  dernier  ressort,  la  demande  de  2,500  fr. 
adressée  à  plmieurs  héritiers,  en  leur  qualité,  alors  que 
h  somme  répétée  de  chacu/n  individuellement  est  infé- 
rieu/re  à  i,500  fr.  (4). 


(1)  Dfîpuis  que  nous  avons  rapporté  Tarrêt  (te  la  Cour  de  Douai,  du 
SjuHlet  1857  (Jurisp.  15,  411,  aff.  Monchain  c.  héritiers  Plancke), 


(122) 

Il  n'imporle  qiie  la  demande  mentionnât  un  recours  éven^ 
iuel  à  une  liquidation,  en  cas  de  contestation  ;  des  con- 
clusions prises  dans  ce  sens  ne  peuvmt  faire  comidérer 
cette  demande  comme  étant  de  nature  indéterminée.  (L. 
H  avril  1838,  art.  l^r;  g.  Nap.,  art.  870,  873  et 
1220.)  (2). 

(Jonas  C.  Hern^quet  et  consorts.) 

Pierre-Martin  Hernequet  a  fait  un  testament  authentique 
par  lequel  il  a  donné  à  Julie  Jonas  ,  sa  femme,  la  pleine 
propriété  des  biens  meubles  et  l'usufruit  des  immeubles 
qu'il  délaisserait  à  son  décès,  qui  a  lieu  en  1850.  Il 
n'est  fait  aucun  inventaire  ni  liquidation,  la  veuve  reste  en 

nous  n'atons  pas  eu  roccasion  de  poser  cette  question  alors  contro- 
versée dans  la  jurisprudence.  On  sait  gu'à  ce  moment  la  Cour  de  cassa- 
tion, par  ses  arrêts  de  rejet  du  10  janvier  1854  (S.  V.,  54,  135),  se 
montrait  encore  opposée  à  la  jurisprudence  de  la  plupart  des  Cours 
d'appel.  Aujourd'hui,  Tétat  des  choses  se  modifie  de  nouveau.  A  la  date 
du  28  mai  1859,  la  Cour  d'Angers  (Dali,  pèriod.  2,  32),  après  renvoi  de 
la  Cour  suprême  qui,  par  un  arrêt  du  10  avril  1358  (Dali.,  p.  58, 1,195), 
avait  cassé  un  arrêt  de  la  Cour  de  Poitiers,  du  11  décemb.  1854,  se 
rangeant  à  cette  opinion  €  qu'un  jugement  qui  statue  sur  une  demande 
»  supérieure  à  1,500  fr.,  formée  collectivement  par  des  cohéritiers  en 
»  vertu  d'un  titre  commun,  est  susceptible  d'appel,  alors  même  que  la 
»  part  de  chacun  des  demandeurs  dans  la  somme  réclamée  serait  infé- 
9  rieure  à  ce  taux.  »  —  Mais  la  Cour  de  cassation,  25  janvier  1860 
»  (Dali.  pér.  60,  1,  76),  a  décidé  que  le  jugement  rendu  sur  une  de- 
mande formée  par  plusieurs  parties,  mais  collectivement  dans  un  seul 
exploit  et  en  vertu  d'un  titre  commwi,  est  en  dernier  ressort,  quel  que 
soit  le  montant  de  cette  demande,  lorsque  la  part  de  chacun  des  deman- 
deurs dans  la  somme  réclamée  est  inférieure  au  taux  de  l'appel,  et  qu'il 
n'existe  entre  eux  aucune  convention  d'indivision  ou  de  communauté. 

Comme  on  le  voit ,  au  premier  aperçu,  la  question  ainsi  posée,  n'a 
presque  rien  de  commun  avec  l'espèce  que  nous  rapportons  aujourd'hui. 
Le  terrain  sur  lequel  celle-ci  est  placée,  c'est  celui  de  rindélennina- 
tion,  bien  plus  que  celui  du  taux  du  litige.  Voy.  la  note  suivante. 

(2)  C'est  d'après  les  conclusions  du  demandeur  prises  à  la  barre  que 
se  reconnaît  la  nature  de  la  demande.  —  V.  sur  ce  point  :  Douai  21  fév. 
1845  (Jurisp.  3,  336);  15mail853(Jurisp.  11,216);  8  fév.  1855(Jurisp. 
13,  172);  25  avril  1855(Jurisp,  13,204, Ircaff.),  et  8  mai  1855  (Jurisp. 
13,210,  Ire  aff.).  Il  suffit,  pour  qu'il  y  ait  appel  rccevable  ,  que  l'an 
conclue  à  la  barre  sur  une  demande  a'objet  indéterminé,  mais  l'indé- 
termination offre  par  elle-même  une  question  d'appréciation  ;  la  juris- 
prudence offre  â  cet  égard  plus  d'exemples  que  de  règles  certaines.  Sur 


questi 

prédation  en  général  du  fond  du  droit,  Voy.  surtout  Douai  29  décemb. 
1845  (Jurisp.  4, 103), 


(123) 

possession  de  tout  l'avoir  de  la  communauté  comme  de 
tous  ses  biens  propres. 

Le  30  mai  1857,  testament  de  la  veuve  Hernequet,  où  il 
est  dit  :  «  Je  donne  et  lègue  à  mon  neveu  Pierre-Hubert 
B  Jonas,  fils  d'Amand,  journalier,  demeurant  à  Escaudain, 

>  tout  le  mobilier  que  je  délaisserai  le  jour  de  mon  décès, 

>  pour,  par  lui,  en  jouir  en  toute  propriété  à  partir  dudit 
>jour.  » 

D'autres  dispositions  sont  faites  au  profit  de  ses  frères, 
neveux  et  nièces,  de  façon  à  partager  ses  biens  en  tiers 
pour  ses  trois  frères  ou  leurs  enfants,  sauf  l'avantage  fait 
à  son  neveu  Amand  et  un  autre  peu  important  au  père  de 
celui-ci.  ^ 

En  décembre  1858,  Pierre-Hubert  Jonas  forme,  contre 
les  cohéritiers  de  sa  tante,  une  demande  qu'il  expose  ainsi  : 
«  Le  mobilier  légué  à  ma  tante  par  son  mari  se  composait 
évidemment  de  1^  la  part  du  mari  dans  le  faible  mobilier 
corporel  qui  existait  en  nature  ;  2°  sa  part  dans  les  sommes 
à  rapporter  à  la  communauté  par  Tun  ou  par  l'autre  des 
époux,  aux  termes  des  art.  1468  et  1469  C.  Nap.  L'autre 
moitié  de  cet  actif  mobilier  appartenait  à  la  femme  de  son 
chef  comme  commune  en  biens.  Or,  la  dame  Hernequet 
-m'a  légué  tout  le  mobilier  qu'elle  délaisserait  au  jour  de 
son  décès  ;  ce  legs  à  titre  universel  comprend,  outre  le  mo- 
bilier corporel,  les  actions  appartenant  à  la  testatrice,  tant 
de  son  chef  que  de  celui  de  la  communauté  mobilière  ayant 
existé  entre  elle  et  son  mari  ;  et  il  n'a  pas  été  procédé  à  la 
liquidation  de  la  communauté  Hernequet-Jonas ,  ni  par 
conséquent  aux  récompenses  dues  à  la  communauté  par 
l'un  ou  par  l'autre  des  époux.  > 

Le  demandeur  ajoute  :  «  Il  n'était  dû  à  cette  commu- 
nauté de  récompense  que  par  le  sieur  Hernequet,  à  raison 
de  constructions  par  lui  érigées  sur  un  immeuble  à  lui 
propre,  et  cette  récompense  peut  être  évaluée  à  la  somme 
de  2,500  fr.  » 

Par  suite,  il  conclut  à  ce  qu'il  plaise  au  Tribunal  : 
«  Condamner  les  défendeurs  à  payer  au  demandeur  ès- 
»  qualité  la  somme  de  2,525  francs,  les  intérêts  judiciaires 
»  et  les  dépens  ; 
»  Préalablement,  en  cas  de  contestation,  renvoyer  devant 

>  notaire  laliquîdatibn  de  la  communauté  Hernequet-Jonas; 
»  dire  que  ce  notaire  pourra ,  par  commune  renommée , 
»  établir  inventaire  etc.  ; 

»  Nommer  experts  pour  procéder  à  l'estimation  de  la  rc- 


(iU) 

•^  compense  due,  et  donner  acte  à  Jonas  de  son  offi-e  de 
»  contribuer  aux  dettes,  etc.  » 

A  ces  conclusions  de  Jouas,  ses  cohéritiers  répondaient 
par  celles-ci  dans  la  forme  :  «  C'est  seulement  par  voie  de 
»  demandé  en  liquidation  que  la  veuve  Hernequet ,  et  par 
»  suite  son  légataire,  auraient  pu  procéder,  et  non  par 
»  voie  de  demande  en  condamnation.  La  demande  n'est 
»  donc  pas  recevable.  »  —  On  disait,  au  fond,  que  s'il  était 
dû  une  indemnité  pour  améliorations  aux  immeubles  du 
mari,  il  était  aussi  dû  des  récompenses  pour  aliénations 
de  propres.  On  s'appuyait  encore ,  pour  repousser  la  de- 
mande, sur  cette  circoastance  que  la  dame  Hernequet  n'a- 
vait fait  dresser  aucun  inventaire  au  décès  de  son  mai^i. 

Le  Tribunal  civil  de  Valfenciennes,  devant  lequel  était 
portée  la  contestation,  rendit  un  jugement  qu'il  peut  être 
utile  de  faire  connaître  en  sonentier  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  qu'il  est  de  règle  générale  aujourd'hui 
que  les  fins  de  non-recevoir,  tirées  de  rirrégularité  des 
actes  de  procédure,  ne  doivent  être  accueillies  par  les  Tri- 
bunaux qu'avec  une  extrême  réserve  ;  quicn:  s'écarlant  de 
cette  règle,  les  magistrats  ne  feraient  qu'entraver  la  marche 
de  lajustice,  et  créer  des  frais  frustratoires  pour  les  parties  ; 

»  Considérant  qu'il  résulte  évidemment  des  motifs  énon- 
cés en  l'assignation  du  8  décembre  1858j  dont  les  défen- 
deurs demandent  la  nullité,  que  l'instance  introduite  par 
Jonas  était  une  véritable  liquidation  de  communauté;  qu'il 
ya.  donc  lieu  de  repousser  l'exception  dont  il  s'agit; 

»  Au  fond  :  —  Considérant  que,, par  son  testament  reçu 
par  Mo  Régnier,  notaire  à  Bouchain,  le  19  octobre  1821 , 
enregistré,  Pierre-Martin  Hernequet  a  légué  à  Julie  Jonas, 
sa  femme,  la  propriété  des  biens  meubles  qu'il  délaisse- 
rait, et  l'usufruit  des  immeubles  en  cas  de  mort  sans 
enfants;  que  ce  legs  a  été  exécuté  dans  toutes  ses  parties  ; 

»  Considérant  qu'au  décès  du  sieur  Hern^uet,  testateur, 
arrivé  en  1850,  la  dame  Hernequet,  sa  veuTe,  est  demeu- 
rée jusqu'à  sa  mort,  survenue  en  1*857,  en  possession 
de  tout  le  mobilier  de  leur  communauté  sans  en  faire 
constater  l'importance  par  un  inventaire,  et  sans  fairB  pro- 


(125) 

céder  à  au€u«e  liquidation  avec  les  héritiers  de  son  mari  ; 

»  Considérant  que  si  le  sieur  llemequet  devait  à  la  com- 
munauté une  indemnité  pour  araélioratiiDns  faites  pendant 
le  mariage  à  un  immeuble  à  lui  propre ,  la  communauté 
lui  devait  d'un  autre  côté  des  récompenses  pour  prix  d'a- 
liénations d'immeubles  également  propres  à  lui ,  Hernequel; 

»  Considérant  que  la  veuve ,  restant  -en  possession  non 
seulement  du  mobilier  de  la  communauté ,  mais  encore  du 
mobilier  propre  à  l'époux  en  ne  faisant  pas  constater  la 
consistance  de  la  communauté  mobilière  et  ne  provoquant 
pas  la  liquidat-ion,  a  reconnu  qu'elle  se  trouvait  plus  que 
couverte  en  sa  qualité  de  commune  de  l'indemnité  qui  pou- 
vait être  duc  par  son  mari  ; 

»  Que  les  pailies,  d'ailleurs,  ayaflt  reconnu  à  l'audience 
qu'il  n'y  availt  entre  elles  d'autre  point  de  diiBculté  que  le 
chiffra  de  2,500  fr.  ;  que  ce  point  écarté,  il  n'y  a  pas  lieu 
d'ordonner  une  liquidation  de  communauté  qui  ne  produi- 
rait que  des  frais  inutiles  ; 

»  Considérant  que  le  demandeur,  qui  représente  la  veuve 
Hernequet  quant  à  ses  droits  mobiliers,  ne  peut  avoir  plus 
de  droits  qu'elle  n'en  aurait  en  elle-même  ; 

j)  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  déclare  le  demandeur  re- 
cevable  en  la  forme,  mal  fondé  en  ses  conclusions,  au  fond 
l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  Jonas.  Devant  la  Cour,  on  lui  oppose  une  fin 
de  non-recevoir  tirée  de  la  divisibilité  du  taux  de  la  de- 
mande formée  contre  vingt-cinq  collatéraux.  Cette  demande, 
dit-on,  n'est  qu'une  instance  en  payement  de  la  somme  de 
2,500fr.  Oi-,  en  vertu  des  art.  870,  873  et  1220  C.  Nap., 
elle  doit  se  diviser  en  autant  de  fractions  qu'il  y  a  d'héri- 
tiers, suivant  les  droits  de  chacun;  et,  dans  l'espèce,  les 
droits  d'aucun  ne  s^ élèvent  à  1,500  fr.  Dès  lors  la  cause 
se  trouve  jugée  en  dernier  ressort.  L'appel  n'est  pas 
r^evable.  Le  principe  sur  lequel  s'appuie  d'ailleurs  la  divi- 
sibilité, et  par  suite  la  non  recevabilité ,  est  désormais  à 
l'abri  de  toute  contestation.  D'abord  incertain  aux  yeux  de 
•la  Cour  de  cassation  qui ,  en  cela ,  résistait  à  la  jurispru- 
dence la  plus  générale  des  Cours  impériales,  et  notamment 
à  la  jurisprudence  particulière  de  la  Cour  de  Douai,  il  vient 
d'être  appliqué  tout  récemment  par  celte  Cour,  qui  a  ainsi 


(126) 

abandonné  Topinion  qu'avaient  consacrés  ses  arrêts  anté- 
rieurs, et  fait  retour^  celles  des  Cours  impériales. 

On  répondait  à  celte  prétention  en  disant  :  Le  principe 
le  plus  général  en  cette  matière,  c'est  que  le  degré  de  juri- 
diction se  règle  sur  le  taux  de  la  demande,  cela  est  incon- 
testable et  incontesté  ;  mais  le  degré  de  juridiction  se  règle 
aussi  sur  la  nature  de  la  demande.  Pour  qu'un  Tribunal 
de  première  instance  puisse  juger  en  dernier  ressort,  il 
faut  !«  que  la  valeur  du  litiee  soit  déterminée,  et  S^  que 
cette  valeur  n'excède  pas  4,500  fr. 

Et  d'abord ,  y  a-t-il  véritablement  lieu  à  la  division  du 
taux  de  la  demande ,  quand ,  vis-à-vis  de  plusieurs  héri- 
tiers, cette  demande  peut  être  ramenée  au-dessous  du  taux 
de  1,500  fr.?  Il  y  a  eu  sur  ce  point,  et  il  y  a  encore  des 
doutes  et  des  controverses  dans  la  jurisprudence  et  la  doc- 
trine. Bien  que  la  Cour  de  cassation  paraisse  en  revenir  à 
l'opinion  des  Cours  impériales  favorable  à  la  division  ,  il 
n'en  est  pas  moins  vrai  que  le  principe  reste  encore  discuté. 
Mais,  dans  l'espèce,  si  la  demande  de  l'appelant  tendait  au 
payement  d'une  somme  de  2,500  fr.  vis-à-vis  d'un  certain 
nombre  d'héritiers,  elle  n'en  poursuivait  pas  moins  une 
liquidation  de  communauté  de  laquelle  elle  dépendait  né- 
cessairement, aussitôt  qu'il  y  avait  contestation  entre  les 
parties.  Une  instance  de  celte  espèce,  comme  celle  qui  peut 
naître  au  cours  d'une  liquidation ,  est  de  sa  nature  indétermi- 
née, puisqu'il  s'agit  entre  toutes  les  parties  de  la  composition 
de  la  masse  à  partager.  L'exploit  et  les  conclusions  de  Pierre- 
Hubert  Jonas,  en  leur  dispositif,  tendaient  à  la  liquidation 
de  la  communauté,  comme  devant  précéder  l'attribution 
de  la  récompense  qui  lui  était  due.  Le  demandeur  a  conclu 
non-seulement  à  cette  attribution,  mais  encore  et  en  même 
temps  qu'au  partage ,  à  l'estimation  de  toutes  les  récom- 
penses qui  seraient  dues  à  la  communauté.  Légataire  à 
titre  universel  de  tout  le  mobilier  de  la  communauté,  il  ne 
faisait  et  ne  pouvait  faire  autre  chose,  tout  en  posant  un 
chiffre  d'estimation,  que  réclamer  cette  universalité,  laquelle 
n'était  et  ne  pouvait  être  déterminée  dans  son  importance 
que  par  les  droits  qu'il  pourrait  revendiquer  au  nom  de  sbn 
auteur  ou  de  la  communauté.  Ces  droits  étant  contestés , 
devaient  être  appréciés  par  le  juge  vis-à-vis  de  tous  les  hé- 
ritiers, non-seulement  dans  leur  chiffre,  mais  dans  leur 
existence  même;  si   ces  droits  pouvaient  être  divisibles 
quant  à  la  valeur  pécuniaire  qu'ils  comportaient,  ils  ne  l'é- 
taient pas  quant  à  leur  légitimité,  aussi  longtemps  qu'il  n'y 


(127) 

aurait  pas  de  liquidation.  Ainsi  Tappel  repose  sur  Tappré- 
dation  générale  des  droits  et  titres  mobiliers  de  la  commu- 
nauté, sur  un  intérêt  indivisible  en  soi  ;  il  a  pour  objet  une 
demande  indéterminée,  il  est  par  suite  recevable. 
La  Cour  a  admis  Texception  de  dernier  ressort  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  que  la  demande  introductive 
d'instance,  non  modifiée  par  les  conclusions  prises  en  der- 
nier lieu,  avait  pour  objet  unique  le  payement  d'une  somme 
de  2,525  fr.  pour  dette  non  solidaire  et  divisible,  par  sa 
nature ,  entre  les  vingt-cinq  défendeurs,  aux  termes  des 
art.  870  et1220C.  Nap.  ; 

Que  le  recours  éventuel  à  une  liquidation,  en  cas  de  con- 
testation, ne  saurait  faire  considérer  comme  indéterminée 
la  demande  où  on  le  mentionnait;  qu'il  n'était  qu'un  élé- 
ment ou  moyen  justificatif  indiqué  à  l'appui  de  l'action 
dont  il  ne  change  pas  le  caractère  ;  qu'aucune  contradiction 
n'a  été  soulevée ,  au  surplus ,  quant  au  chiffre  de  la  de- 
mande, et  qu'enfin  toutes  les  parties  reconnaissent  égale- 
ment que  la  somme  répétée  de  chacun  des  cohéritiers 
individuellement  est  inférieure  à  1,500  fr.  ;  qu'ainsi  le 
jugement  a  été  rendu  en  dernier  ressort  ; 

Par  ces  motifs,  la  Cour  déclare  l'appel  non  recevable,  et 
condamne  l'appelant  à  l'amende  et  aux  dépens. 

Du  26  mars  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  l^r 
présid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.  ;  concl. 
conf.  ;  avoc,  M^s  Delebecque  et  Dupont  ;  avou.,  Mes  Estabel 
et  Lavoix. 


1»  ESCROQUERIE. — manœuvres  frauduleuses.  —  carac- 
tères.—  NOMS  SUPPOSÉS.  —  AVANCES. — LISTES  DE  PAYE. 

2o  BLESSURES   PAR  IMPRUDENCE.  —  conditions.  — 

FAUTE  DU  BLESSÉ. 

1^  JVe  rentre  pas  dans  les  termes  de  Vart,  405  C.  pén.  le 
fait,  par  un  préposé  comptable,  cP avoir  inscrit  sur  une 
liste  de  paye  des  noms  d'ouvriers  supposés,  si  cette  indi- 
cation mensongère  n'a  été  fournie  que  pour  parvenir  au 


(128) 

remboursemefrU  dune  somme  précédemmetit  avancée  par 
le  comptable  de  ses  deniers  (4). 

Il  en  est  ainsi  mém^desinserîimxs,  snr  des  fèuMes  de  quin- 
zaine, de  noms  qui  ne  devaient  pas  s'y  rencontrer,  si 
Von  ne  prouve  pas  contre  le  rédacteur  des  liâtes  le  con- 
cert frauduleux  et  la  remise  d'espèces  (2). 

Le  fait  seul  de  Vinscription  d'un  nom  d'ouvrier  sur  une 
liste  de  paye,  qui  sera  d£ ailleurs  vérifiée,  ne  constitue 
pas  une  manœuvre  frauduleuse  (3). 

2°  Ne  peuvent  être  appliquées  les  dispositions  de  Vart.  320 
C.  pén.  à  V auteur  d'un  accident  en  faveur  duquel  il  est 
démontré  qu'il  a  pris  les  précautions  et  les  soins  possibles 
pour  accomplir  le  fait  cause  de  V accident,  alors  surtout 
qu'il  peut  être  reproché  à  la  victime  d'être  dans  un  lieu 
où  elle  ne  devait  point  se  tromer  (A). 

(Dupas  et  autres  C.  minist.  publ.) 

ARRÊT. 

4 

LA  COUR  ;  —  Eii  ce  qui  touche  les  chefs  d'esci^oquerie 
dé  40  fr.  imputés  à  Dupas  et  DubruUe  : 

Considérant  que  Dtipas  a  toujours  déclaré  n'avoir  porté 
les  noms  des  Legland,  sur  sa  feuille  de  quinzaine,  que 
parce  qu'il  les  avait  trouvés  inscrits  sur  la  feuille  de  semaine 
tenue  par  DubruUe,  du  8  au  45  mars  ; 

Que  ce  dernier  a  reconnu,  dèé  sôii  premier  interroga- 
toire, l'exactitude  de  cette  déclaratioh,  affirmant  qu'il  n'a- 
vait agi  ainsi  qu'afiii  de  parvenir  à  se  faire  rembourser 
d'une  sômttie  de  40  fr.  par  lui  avancée  de  ses  deniers  à 
des  ouvriers  de  Thélus  qu'il  avait  oublié  d'inscrire,  à  une 
époque  antérieure,  siir  ses  feuilles  de  semaine,  èavoir  : 
42  fr.  à  Eugénie  Poteau,  et  28  fr.  à  Chodin  père,  pour 
lui  et  ses  enfants  Elise  et  Benoît ,  ajoutant  que  les  40  fr. 
touchés  par  la  femme  Legland  avaient  été  entièrjeraent  re-* 
mis  par  elle  à  lui  seul,  et  que  de  son  côté  il  n'en  avait  rien 
remis  ni  dû  remettre  à  Dupas  ; 

Qu'Eugénie  Poteau,  appelée  en  témoignage,  a.dédaré, 

(1^2-3)  Rapp.  Ûouai  5jatiV.  1857(jHrîsp.  16,192);  id;  SOjanv.lSS? 
(id.  15,  175);  id.  11  mai  1850  (id.  8.  137). 

V.  aussi  22  mai  1846  (Jurisp.  7,  87),  et  les  autorités  indiquées  (Ju- 
risp.  15,  176,  Lardinc.  Reboux). 

(4)  V.  Déliai  U  déc.  1846  (Jurisp.  5,  96). 


(429) 

tant  dans  ^information  qu'à  l'audience,  qu'elle  avait  travail- 
lé 13 jours  et  demi  dont  le  payement  avait  été  arriéré; 
qu'elle  avait  plusieurs  fois  réclamé  ces  journées  auprès  de 
DubruUe;  qu'enfin  DubruUe  lui  avait  payé  une  somme  de  12 
fr.,  ajoutant  «  qu'elle  avait  ainsi  reçu  trois  sous  de  moins 
que  ce  qui  lui  était  dû  »,  ce  dont  le  calcul  fait  instanta- 
nément a  démontré  l'exactitude,  ainsi  que  le  constate  le 
procès-verbal  d'instruction  ; 

Que  François  Chopin  et  ses  enfants  Elise  et  Benoît ,  ap- 
pelés trois  fois  comme  témoins  dans  le  cours  de  Tinstruc- 
lion ,  ont  constamment  affirmé  qu'une  quinzaine  entière  de 
travail  d'Elise  et  de  Benoît  avait  été  oubliée  ;  qu'il  en  était 
de  même  pour  trois  journées  et  demie  de  Chopin  père  ; 
que  celui-ci  recevait  toujours  le  prix  du  travail  de  toute  sa 
famille  ;  qu'il  avait,  pendant  plusieurs  semaines,  réclamé 
vainement  les  salaires  arriérés,  et  qu'enfin  Dubrulle  lui 
avait  payé  les  28  fr/dus,  tant  à  lui  qu'à  ses  enfants  ; 

Que  de  tout  ce  qui  précède ,  il  résulte  que  le  chef  d'es- 
croquerie de  40  fr.,  imputé  à  Dupas  et  à  Dubrulle,  doit  être 
écarté  ; 

En  ce  qui  concerne  le  chef  d'escroquerie  de  17  fr.  29  c. 
imputé  à  Dupas  et  à  Dubrulle  comme  co-auteurs,  et  à  Cho- 
pin comme  complice  ; 

Considérant  que  rien  n'établit  que  l'insertion  des  noms 
d'Elise  et  de  Benoît  Chopin  sur  les  feuilles  des  deux  quin- 
zaines de  juin,  et  celui  de  Benoît  sur  la  feuille  delà  pre- 
mière quinzaine  d'août,  soit  le  résultat  d'une  fraude  combi- 
née par  Dupas  et  Dubrulle  pour  arriver  à  l'escroquerie  des 
17  fr.  25  c,  formant  le  prix  des  journées  de  travail  ainsi 
inscrites  sous  ces  dates  ; 

Qu'il  est  facile  d'admettre  que  cette  intervention  a  pu  être 
le  résultat  d'une  erreur  ou  d'une  confusion  de  prénoms ,  les 
enfants  de  Chopin  étant  nombreux  et  travaillant  les  uns  et 
les  autres ,  tantôt  à  Thélus ,  tantôt  à  Neuville ,  tantôt  à  Ro- 
cUncourt  ; 

Que,  d'autre  part,  si  ces  noms  se  trouvent  sur  les  feuilles 
de  quinzaine  écrites  par  Dupas,  rien  n'établit  que  les  feuilles 
de  semaine  sur  lesquelles  ces  mentions  ont  été  relevées 

TOME  XVIII.  9 


(130) 
soient  plutôt  celles  de  DubruUe  que   celles  de  Dupas ,  ou 
celles  de  Dupas  que  celles  de  DubruUe  ; 

Considérant  qu'il  résulte  de  la  déposition  du  témoin  Le- 
roux ,  inspecteur  et  payeur  des  fermes  Crespel,  que  c'est 
à  Chopin  père  qu'il  a  payé  les  17  fr.  25  c.  portés  au  nom 
de  ses  emprunts,  Elise  et  Benoît,  du  i^^  au  8  juin,  du  45  au 
30  juin,  et  du  8  au  45  août  ; 

Que  l'affirmation  du  témoin  Leroux ,  circonstanciée  sur- 
tout pour  ce  qui  concerne  le  payement  des  10  fr.  25  c. 
effectué  le  19  juillet  pour  la  deuxième  quinzaine  de  juin, 
ne  peut  laisser  aucun  doute  à  cet  égard  ; 

Qu'à  la  vérité,  François  Chopin,  spécialement  interpellé 
le  16  novembre  1859,  dans  une  confrontation  avec  le  témoin 
Leroux  sur  les  circonstances  du  payement  effectué  le  19 
juillet,  a  positivement  nié  avoir  reçu  à  cette  époque  aucune 
journée  de  travail,  soit  pour  Elise,  soit  pour  Benoît,  et 
qu'il  a  persisté  dans  cette  dénégation ,  dans  l'interrogatoire 
qu'on  lui  a  fait  immédiatement  subir  ; 

Mais  que  cette  dénégation,  produite  à  4  mois  de  date  du 
fait,  ne  peut  suffire  pour  établir  soit  que  les  noms  d'Elise 
et  de  Benoît  auraient  été,  par  suite  d'un  concert  frauduleux 
entre  Dupas  et  DubruUe,  portés  sur  les  feuilles  de  quinzaine, 
dans  un  but  d'escroquerie,  soit  que  Chopin  se  serait  rendu 
sciemment  complice  de  cette  escroquerie  ; 

Que  rien  ne  démontre  d'ailleurs  qu'une  part  quelconque 
des  17  fr.  25  c. ,  perçus  en  trois  mois,  soit  arrivée  aux 
mains  de  Dupas  ou  de  DubruUe,  et  que  dès-lors  n'est  pas 
prouvé  l'intérêt  qu'ils  auraient  eu  à  employer  des  ma- 
nœuvres frauduleuses  pour  faire  sortir  cette  somme  de  la 
caisse  Crespel  ; 

En  ce  qui  concerne  le  fait  de  blessure  par  imprudence 
et  le  fait  d'escroquerie  imputés  à  Dupas  seul  : 

Considérant  qu'il  est  établi  par  la  procédure  et  par  les 
débats  de  l'audience,  qu'avant  de  descendre  dans  la  cave 
'  où  il  avait  vu  entrer  le  chat  qu'U  avait  reçu  l'ordre  de  tuea-, 
et  d'où  il  avait  tiré  le  coup  de  fusil  qui  a  blessé  Hardy, 
Dupas,  accompagné  du  témoin  MiUiot,  s'était  assuré  qu'il  n'y 
avait  personne ,  soit  dans  le  fournil ,  soit  dans  les  environs  ; 


(131) 

Que  le  5  juin  était  un  dimanche,  jour  où  les  ouvriers  ne 
travaillant  pas  dans  la  ferme,  ne  devaient  pas  se  rendre 
dans  le  fournil  qui  ne  leur  est  ouvert  que  pour  y  fumer , 
aux  jours  de  travail; 

Qu'après  que  Dupas  était  descendu  dans  la  cave ,  avant 
que  le  coup  de  fusil  fût  tiré,  Hardy,  n'ayant  aux  pieds  que 
des  chaussons,  était  venu,  sans  bruit,  s'asseoir  sur  une  des 
marches  de  l'escalier  qui  conduit  du  fournil  au  grenier  et 
qui  est  superposé  à  la  descente  de  la  cave ,  au  lieu  de*  se 
placer  sur  un  des  bancs  destinés  aux  ouvriers  ; 

Qu'il  n'a  pas  été  blessé  directement  par  la  charge  du  fusil, 
raais  par  un  éclat  de  bois  qui  s'est  détaché  d'une  des  mar- 
ches de  l'escalier  sur  lesquelles  il  s'était  assis,  et  où  rien 
ne  pouvait  faire  supposer  qu'il  fût  placé  ; 

Qu'il  résulte  de  ces  faits  que  les  peines  édictées  par  l'art. 
320  du  Code  pénal  ne  peuvent  être  appliquées  à  Dupas,  à 
qui  ne  peuvent  être  reprochés  ni  imprudence,  ni  défaut  de 
précaution  ; 

Considérant  que  Dupas,  en  portant  le  nom  de  Hardy  sur 
la  liste  des  ouvriers  qui  avaient  travaillé  pendant  la  première 
quinzaine  de  juin,  et  parmi  ceux  auxquels  cette  quinzaine 
était  entièrement  due,  n'a  commis  aucune  manœuvre  fraudu- 
leuse ; 

Qu'en  effet  la  blessure  de  Hardy,  remontant  au  5  juin,  était 
un  fait  parfaitement  connu  à  Roclincourt  au  moment  où  la 
liste  de  quinzaine  a  été  dressée  par  Dupas  et  par  lui  re- 
mise à  l'inspecteur  ; 

Que  le  contrôle  de  cette  liste  était  d'autant  plus  facile , 
qu'elle  est  restée  plus  de  15  jours  aux  mains  soit  de  l'ins- 
pecteur, soit  des  autres  employés  de  la  maison  Crespel , 
puisque  le  montant  n'en  a  été  remis  que  le  2  juillet  audit 
inspecteur,  dans  les  bureaux  d'Arras,  pour  être  par  lui  ulté- 
rieurement distribué  aux  ouvriers  ; 

Que  Dupas  invoque,  en  outre,  sa  bonne  foi  puisée  d'une 
part  dans  cette  circonstance  qu'il  aurait  blessé  Hardy,  par 
suite  d'un  accident  survenu  en  exécutant  un  ordre  que  l'ins- 
pecteur avait  donné ,  et  d'autre  part  dans  les  usages  de  Ro- 
clincourt et  des  communes  voisines,  usage  qui  consiste  à 


(132) 

indemniser  les  ouvriers  des  fermes  ou  des  usines ,  blessés 
dans  le  cours  de  leur  emploi  ou  de  leurs  travaux  ; 

Que,  par  suite  de  ce  qui  précède,  Tescroquerie imputée 
de  ce  chef  à  Dupas  n'est  aucunement  établie  ; 
Par  ces  motifs  : 

La  Cour  déclare  Dupas  etDubrulle  non  coupables  de  s'être 
fait  remettre  par  des  intermédiaires  :  1°  une  somme  de 
40  fr .  ;  2°  une  somme  de  4  7  fr.  25  c. ,  toutes  deux  appartenant 
à  Crespel,  et  d'avoir  ainsi,  à  l'aide  de  manœuvres  fraudu- 
leuses destinées  à  persuader  l'exislenced'un  fait  imaginaire 
consistant  en  un  prétendu  travail  effectué  par  des  ouvriers 
supposés,  escroqué  partie  de  la  fortune  dudit  Crespel  ; 

Chopin  non  coupable  de  s'être  rendu  complice  par  aide 
et  assistance  de  manœuvres  frauduleuses  ayant  pour  but 
d'escroquer  à  Crespel  ladite  somme  de  17  fr.  25  c.  ; 

Dupas  non  coupable  de  blessure  par  imprudence  sur  la 
personne  de  Hardy,  non  plus  que  d'escroquerie  pour  avoir, 
par  des  manœuvres  semblables  à  celles  ci-dessus  spécifiées 
frauduleusement,  fait  remettre  à  Hardy  une  somme  de  iOfr. 
20  c.; 

En  conséquence,  infirmant  le  jugement  dont  est  appel  , 

Décharge  lesdits  Dupas,  DubruUe  et  Chopin  des  condam- 
nations contre  eux  prononcées,  et  les  renvoie  des  fins  de  la 
plainte  sans  frais. 

Du  12  mars  1860,  Ch.  correct.  Prés.  ,  M.  Cahier,  con- 
seill.  ;  rapp.,  M.  Minart  ;  avoc.-gén.,  M.  Garpentier;  avoc.^ 
Mes  Emile  Flamant  et  Lancien. 


SENTIER  PUBLIC  COMMUNAL.  —  caractère.  —  commit- 

NICATIONSDE  COMMUNE  A  COMMUNE. — USAGE  IMMÉMORIAL. 

Le  sentier  qui,  existant  de  temps  immémorial,  sert  à  relier 
deux  grandes  voies  de  communication^  doit  être  considéré 
comme  ayant  le  caractère  de  sentier  public  communal 
alors  surtout  qu'il  n'est  qu'une  portion  d!un  chemin 
pubUc  considérable  menant  cTune  commune  à  une  autre 
(C.  Nap.,  art.  638  et  650.)  (1). 

^1),  U  Cour  confirme  par  cette  décision  sa  jurisprudence  antérieure. 


(133) 

(Lefebvre  C  la  commune  de  Vendegies.) 

Trois  senliei's  qui  servaient  de  passage  au  public  exis- 
taient sur  une  propriété  appartenant  à  un  sieur  Lefebvre^ 
de  la  commune  de  Vendegies  (arrondissement  d'Avesnes). 
Le  sieur  Lefebvre  en  a  demandé  la  suppression,  sur  le 
motif  qu'ils  n'étaient  que  des  voies  de  tolérance.  La  com- 
mune de  Vendegies  à  soutenu  qu'ils  avaient  le  caractère  de 
passages  publics,  d'utilité  communale. 

Le  Tribunal  d'Avesnes  a  décidé  que  l'un  des  trois  seule- 
ment avait  le  caractère  de  sentier  public  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  le  demandeur  réclame  la  suppression  de 
trois  sentiers  traversant  sa  propriété  ;  que  deux  de  ces  sen- 
tiers aboutissant,  l'un  à  la  rue  Haute,  l'autre  à  la  voie  pu- 
blique, ne  présentent  pas  les  caractères  qui  font  considérer 
ces  sentiers  comme  des  chemins  publics  ;  qu'ils  ne  doivent 
être  réputés  que  comme  le  résultat  de  la  tolérance  qui  ne 
peut  créer  un  droit; 

»  Attendu  que  le  troisième  sentier,  partant  de  la  place 
et  aboutissant  au  Clair-Ménage,  se  présente  tomme  étant 
d'une  utilité  plus  sérieuse  ;  qu'il  réunit  ensemble  plusieurs 
sentiers  de  commune  en  même  temps  qu'il  en  est  la  con- 
tinuation ,  ou  plutôt  qu'il  fait  partie  intermédiaire  d'un 
sentier  qui  part  de  Somraaing  et  va  jusqu'à  Saint-Martin,  en 
traversant  la  commune  de  Vendegies  ;  que  ce  sentier  existe 
depuis  un  temps  immémorial  sans  contestation  sérieuse,  et 
remonte  à  des  époques  où  la  viabilité  furésentait  des  diffi- 
cultés de  communication  entre  les  diverses  localités  ;  qu'il 
réunit  toutes  les  conditions  qui  doivent  faire  considérer  le 
sentier  comme  chemin  public  ; 

)  Attendu  que  le  droit  de  la  commune  existant  depuis 
longues  années,  ne  peut  être  enlevé  à  prétexte  que  les  com- 
munications sont  devenues  plus  faciles  ; 

V.  Douai  13  août  1857  (Juris^.  16,  5),  et  les  notes  qm  accompagnent 
l'arrêt. 

Adûe  Douai  15  décemb.  1818;  17  janvier  1851  ;  11  nov.  4857;  26 
iHial858  (Juri^.  16,  289),  et  25  juin  1858  (Jurisp.  16,  300). 


(134) 
»  Par  ces  motifs  : 
»  Le  Tribunal  dit  que  les  sentiers  conduisant  au  lavoir 
de  la  commune  et  à  la  rue  Haute ,  ne  sont  que  des  voies 
de  tolérance  qui  devront  être  supprimées  ;  que  le  sentier 
conduisant  de  la  place  publique  au  Clair-Ménage  est  un 
chemin  public  qui  doit  être  maintenu;  dit  que  les  dépens 
seront  supportés  par  les  demandeurs.  » 

Appel  par  le  sieur  Lefebvre,  qui  conteste  à  la  voie  con- 
sidérée par  le  Tribunal  comme  sentier  communal  les  carac- 
tères juridiques  de  la  propriété  publique  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  qu'en  1853,  lors  du  projet  de 
licitation  du  domaine  de  l'appelant,  l'existence  du  sentier 
a  été  formellement  avouée,  lorsqu'il  ^  été  stipulé  qu'il 
serait  élargi  comme  chemin  d'exploitation  ; 

Que  l'appelant  l'a  également  reconnu  en  le  reportant  à 
la  limite  de  sa  propriété  ; 

Attendu  que  le  sentier  joint  non-seulement  deux  sec- 
tions de  commune,  mais  sert  encore  à  relier  deux  grandes 
voies  de  communication,  le  chemin  Brunehant  et  la  route 
du  Cateau  à  Valenciennes ;  qu'il  n'est,  du  reste,  qu'une 
portion  d'un  chemin  plus  considérable  menant  de  Sommaing 
à  Saint-Martin  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  : 

Met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  elFet,  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  1er  mars  1860.  2echamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc,  M«8  Talon  etDuhem; 
avou.,  M«8  Lavoix  etPoncelet. 


DENONCIATION  CALOMNIEUSE.   —  partie  civile.    — 

PREUVE. 

La  preuve  de  la  dénonciation  calomnieuse  peut,  par  la 
partie  civile ,  se  faire,  tant  par  les  procès-verhaux  et 
rapports  qu'au  moyen  de  la  preuve  testimoniale. 

Il  n'importe  que  Von  ne  puisse  rapporter  la  dénonciation 
écrite.  (C.pén.,art.  373;  C.  inst.  crim.,  art.  lô^etlSO.) 


(125) 

céder  à  au€U«e  liqiiidalion  avec  les  héritiers  de  son  mari  ; 

»  Consiiààraftt  que  si  le  sieur  llernequet  devait  à  la  com- 
munauté une  indemnité  pour  améliorations  faites  pendan  t 
le  mariage  à  un  immeuble  à  lui  propre ,  la  communauté 
lui  devait  d'un  autre  côté  des  récompenses  pour  prix  d'a- 
liénations d'immeubles  également  propres  à  lui ,  Hernequel; 

»  Considéi'ant  que  la  veuve,  restant  en  possession  non 
seulement  du  mobilier  de  la  communauté,  mais  encore  du 
mobilier  propre  à  l'époux  en  ne  faisant  pas  constater  la 
consistance  de  la  communauté  mobilière  et  ne  provoquant 
pas  la  liquidation,  a  reconnu  qu'elle  se  trouvait  plus  que 
couverte  en  sa  qualité  de  commune  de  l'indemnité  qui  pou- 
vait être  due  par  son  mari  ; 

ï)  Que  les  parties,  d'ailleurs,  ayaût  reconnu  à  l'audiesàce 
qu'il  n'y  avail  entre  elles  d'autre  point  de  difficulté  que  le 
chiffre  de  2,500  fr.  ;  que  ce  point  écarté,  il  n'y  a  pas  lieu 
d'ordonner  une  liquidation  de  communauté  qui  ne  produi- 
rait que  des  frais  inutiles  ; 

»  Considérant  que  le  demandeur,  qui  représente  la  veuve 
Hernequet  quant  à  ses  droits  mobiliers,  ne  peut  avoir  plus 
de  droits  qu'elle  n'en  aurait  en  elle-même  ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  déclare  le  demandeur  re- 
cevâble  en  la  forme,  mal  fondé  en  ses  conclusions,  au  fond 
l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens.  t> 

Appel  par  Jonas.  Devant  la  Cour,  on  lui  oppose  une  fin 
de  non-recevoir  tirée  de  la  divisibilité  du  taux  de  la  de- 
mande formée  contre  vingt-cinq  collatéraux.  Cette  demande, 
dit-on,  n'est  qu'une  instance  en  payement  de  la  somme  de 
2,500fr.  a-,  en  vertu  des  art.  870,  873  et  1220  C.  Nap., 
elle  doit  se  diviser  en  autant  de  fractions  qu'il  y  a  d'héri- 
tiers, suivant  les  droits  de  chacun;  et,  dans  l'espèce,  les 
droits  d'aucun  ne  s^ élèvent  à  1,500  fr.  Dès  lors  la  cause 
se  trouve  jugée  en  dernier  ressort.   L'appel  n'est  pas 


la  Cour  de  cassation  qui ,  en  cela,  résistait  à  la  jurispru- 
dence la  plus  générale  des  Cours  impériales,  et  notamment 
à  la  jurispi-udence  particulière  de  la  Cour  de  Douai,  il  vient 
d'être  appliqué  tout  récemment  par  celte  Cour,  qui  a  ainsi 


(136) 

ment  démontrée  la  nécessité  de  reproduire  textuellement 
tous  les  termes,  sans  exception,  de  la  dénonciation  calom- 
nieuse ;  qu'il  peut  suffire,  au  contraire,  que  les  allégations 
principales,  portant  grief  au  dénoncé,  qui  ont  été  recon- 
nues fausses  et  de  mauvaise  foi^  et  ont  constitué  le  corps 
du  délit,  soient  clairement  établies  avoir  existé  dans  l'écrit 
incriminé  ; 

»  Attendu  qu'avec  le  système  contraire ,  la  personne 
attaquée  dans  son  honneur,  par  une  dénonciation  calom- 
nieuse, pourrait  être  privée  de  tout  moyen  de  réparation, 
puisque  l'officier  de  justice,  détenteur  de  la  dénonciation, 
n'est  pas  obligé  de  la  mettre,  même  momentanément,  à  la 
disposition  de  la  partie  civile  ;  que  des  considérations  de 
diverses  natures  peuvent  déterminer  le  magistrat  à  la 
retirer  ; 

»  Attendu  que  si  l'on  prétendait  que  les  considérations 
ci-dessus  exposées,  quant  à  la  faculté  de  la  preuve  par  les 
voies  ordinaires,  admettent  le  principe  d'une  manière  trop 
absolue,  il  y  aurait  encore  lieu,  dans  l'espèce,  d'en  faire 
l'application  ; 

y>  Qu'en  effet  il  est  établi,  tant  par  les  débats  que  par  les 
conclusions  du  ministère  public,  que  la  dénonciation  a  existé  ; 

»  Qu'on  ne  peut,  quant  à  présent,  la  retrouver  ;  qu'ainsi 
elle  ne  peut  être  ni  officiellement  ni  officieusement  commu- 
niquée; qu'elle  avait  déterminé  M.  le  procureur  impérial 
à  faire  prendre  des  renseignements  par  le  juge  de  paix  du 
canton  de  Quenes  à  l'égard  de  Delattre,  greffier  de  la  mairie 
de  Fiennes,  renseignements  à  la  suite  desquels  le  magistrat 
du  parquet  avait  reconnu  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  prendre 
au  sérieux  cette  dénonciation,  les  faits  allégués  étant  dénués 
de  fondement  ; 

»  Que  Mouret  représente  même  une  copie  qu'il  prétend 
être  conforme  à  l'écrit  incriminé ,  et  qu'à  tort  ou  à  raison 
il  entend  démontrer  que  cette  dénonciation  et  la  demande 
de  renseignements  auxquels  elle  a  donné  lieu  n'étaient,  par 
la  force  des  choses,  pas  moins  dirigées  contre  lui  que  contre 
Delattre  même  ; 

p  Attendu  que  ces  diverses  circonstances,  quel  que  soit 


(125) 

céder  à  au€U«e  liqiiidalion  avec  les  héritiers  de  son  mari  ; 

»  Consid&'aiiîtque  si  le  sieur  lleraequet  devait  à  la  com- 
munaiité  une  indemnité  pour  améliorations  faites  pendant 
le  mariage  à  un  immeuble  à  lui  propre ,  la  communauté 
lui  devait  d'un  autre  côté  des  récompenses  pour  prix  d'a- 
liénations d'immeubles  également  propres  à  lui ,  Hez^nequel; 

»  Considérant  que  la  veuve ,  restant  en  possession  non 
seulement  du  mobilier  de  la  cammunauté ,  mais  encore  du 
mobilier  propre  à  l'époux  en  ne  faisant  pas  constater  la 
consistance  de  la  communauté  mobilière  et  ne  provoquant 
pas  la  liquidation,  a  reconnu  qu'elle  se  trouvait  plus  que 
couveile  en  sa  qualité  de  commune  de  l'indemnité  qui  pou- 
vait être  due  par  son  mari  ; 

î)  Que  les  pailies,  d'ailleurs,  ayant  reconnu  à  l'audieace 
qu'il  n'y  avail  entre  elles  d'autre  point  de  difficulté  que  le 
chiffre  de  2,500  fr.  ;  que  ce  point  écarté,  il  n'y  a  pas  lieu 
d'ordonnor  une  liquidation  de  communauté  qui  ne  produi- 
rait que  des  frais  inutiles  ; 

»  Considérant  que  le  demandeur,  qui  représente  la  veuve 
Hernequet  quant  à  ses  droits  mobiliers,  ne  peut  avoir  plus 
de  droits  qu'elle  n'en  aurait  en  elle-même  ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  déclare  le  demandeur  re- 
cevâble  en  la  forme,  mal  fondé  en  ses  conclusions,  au  fond 
l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  Jonas.  Devant  la  Cour,  on  lui  oppose  une  fin 
de  rion-recevoir  tirée  de  la  divisibilité  du  taux  de  la  de- 
mande formée  contre  vingt-cinq  collatéraux.  Cette  demande, 
dit-on,  n'est  qu'une  instance  en  payement  de  la  somme  de 
2,500fr.  Oi",  en  vertu  des  art.  870,  873  et  1220  C,  Nap., 
elle  doit  se  diviser  en  autant  de  fractions  qu'il  y  a  d'héri- 
tiers, suivant  les  droits  de  chacun;  et,  dans  l'espèce,  les 
droits  d'aucun  ne  s^ élèvent  à  1,500  fr.  Dès  lors  la  cause 
se  trouve  jugée  en  dernier  ressort.  L'appel  n'est  pas 
rjicevable.  Le  principe  sur  lequel  s'appuie  d'ailleurs  la  divi- 
sibilité, et  par  suite  la  non  recevabilité ,  est  désormais  à 
l'abri  de  toute  contestation.  D'abord  incertain  aux  yeux  de 
•la  Cour  de  cassation  qui ,  en  cela ,  résistait  à  la  jurispru- 
dence la  plus  générale  des  Cours  impériales,  et  notamment 
à  la  jurisprudence  particulière  de  la  Cour  de  Douai,  il  vient 
d'être  appliqué  tout  récemment  par  cette  Cour,  qui  a  ainsi 


(438) 
ï>  Le  défendeur    entier  à    preuve    contraire  ,    dépens 
rései*ves.  » 

Appel  par  Gavet. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ; — En  adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 

Attendu  au  surplus  que,  devant  le  Tribunal  et  devant  la 
Cour,  Gavel  se  fondant  sur  la  non  représentotion  de  l'o- 
riginal de  la  dénonciation,  s'est  borné  à  soutenir  inadmis- 
sible la  preuve  par  témoins  de  l'existence  d'une  dénonciation 
par  écrit  ; 

Que  les  premiers  juges  ont  à  bon  droit  repoussé  cette 
prétention  et  admis  la  preuve  des  faits  articulés  par  Mouret; 

Qu'il  n'échet  d'examiner  dès  à  présent  la  question  de 
savoir  si  la  fausseté  des  faits  imputés  à  Mouret  a  été  recon- 
nue par  l'autorité  compétente,  et  si,  en  cas  de  négative, 
un  sursis  doit  être  prononcé  ; 

Que  cette  question  ne  pouri'a  être  discutée  et  résolue 
que  lorsqu'il  aura  été  procédé  à  l'enquête  ordonnée  par  la 
sentence  dont  est  appel,  et  dans  le  cas  oïi  l'existence  d'une 
dénonciation  par  écrit  sera  établie; 

Met  l'appellation  au  néant ,  ordonne  que  le  jugement 
dont  est  appel  sortira  effet  ; 

Condamne  Gavel  aux  frais  de  la  cause  d'appel. 

Du  7  février  4860.  Chamb.  corr.  Présid.,  M.  Dumon; 
avec,  MesMadaré  (du  barreau  de  Boulogne)  et  Talon. 


VOL  PAR  UN  VOITURIER.  —  vol  domestique.  —  chemin 

DE  FER.  —  EMPLOYÉ.  —  GARE. 

La  soustraction  frauduleuse,  dans  une  gare  de  chemin  de 
fer,  par  un  employé  salarié  de  la  Compagnie,  au  préju- 
dice de  cette  Compagnie  ou  d'autres  personnes,  de  choses 
qui  lui  avaient  été  confiées  en  sadite  qualité  d''employé , 
doit  être  qualifiée  vol  commis  par  un  voiturier  et  non  vol 
domestique.  (C.  pén.,  art.  386.) 


(139) 

(Minist.  publ.  C.  Remy.) 

ARRÊT. 

LA  COUR  ; — Attendu  qu'il  résulte  des  pièces  de  la  pro- 
cédure ,  des  indices  suffisants  pour  accuser  ledit  Jean-Bap- 
tiste Rémy  d'avoir,  !<>  le  2  ou  le  3  octobre  1858,  à  So- 
raain,  soustrait  frauduleusement  un  jupon  de  soie  au  pré- 
judice de  la  demoiselle  Tison ,  avec  les  circonstances  que 
Rémy  était  alors  le  préposé  de  la  Compagnie  du  chemin  de 
fer  du  Nord,  à  laquelle  ce  vêtement  avait  été  confié  en  sa 
qualité  de  voiturier  ;  2o  le  16  novemb.  1858,  à  Somain, 
soustrait  frauduleusement  une  montre  et  sa  chaîne  en  argent, 
au  préjudice  de  Louis  Crombez,  avec  les  circonstances  que 
le  vol  aurait  été  commis  :  !<>  la  nuit,    dans  une  maison 
habitée  ;  2^  dans  un  logement  dépendant  de  la  gare  du 
chemin  de  fer,  gare  où  Rémy  travaillait  habituellement  ; 
3o  en  décembre  1858 ,  à  Somain,  soustrait  frauduleusement 
des  foulards  au  préjudice  de  Céhna  Variez ,  avec  la  circons- 
tance que  Rémy  était  alors  le  préposé  de  la  Compagnie  du 
chemin  de  fer  du  Nord,  à  laquelle  ces  foulards  avaient  été 
confiés  en  sa  qualité  de  voiturier  ;  4.o  à  Somain  en  1859 , 
antérieurement  au  20  juin,  soustrait  frauduleusement  du 
numéraire  au  préjudice  de  la  Compagnie  du  chemin  de  fer 
du  Nord ,  avec  la  circonstance  que  ce  vol  aurait  été  com- 
mis dans  la  gare  de  Somain ,  dans  laquelle  Rémy  travail- 
lait habituellement  en  qualité  de  préposé  salarié  de  ladite 
Compagnie  ;  5®  le  21  juin  1859,  à  Somain,  soustrait  frau- 
duleusement un  sac  contenant  une  somme  de  2,655  f.  au 
préjudice  de  la  Compagnie  du  chemin  de  fer  du  Nord,  avec 
la  circonstance  que  le  vol  aurait  été  commis  dans  la  gare 
de  Somain,  dans  laquelle  Rémy  travaillait  habituellement 
en  qualité  de  préposé  de  la  Compagnie  ; 

Crime  prévu  par  Tarticle  386,  §  3  et  §  4  C.  pén.  , 
de  la  compétence  de  la  Cour  d'assises  aux  termes  de  l'art. 
231  C.  inst.  crim.  ; 

Attendu  que  l'ordonnance  du  premier  juge  a  mal  qualifié 
les  faits  repris  sous  les  n^s  2  et  3,  en  les  considérant  comme 
vols  domestiques  prévus  par  le  §  3  de  l'art.  386,  tandis  que 


(140) 

ce  sont  des  vols  commis  par  un  voitmier,  prévus  par  le§ 
4  dudit  article  ; 

Que  la  même  ordonnance  a  confondu  dans  Tarticulation 
du  fait  principal ,  renonciation  de  la  circonstance  que  le 
vol  a  eu  lieu  dans  la  gare  de  Somain ,  élément  de  fait 
qui  rentre  dans  la  définition  de  la  circonstance  légalement 
aggravante  ; 

La  Cour ,  en  infirmant  ladite  ordonnance  et  statuant  à 
nouveau  , 

Dit  qu'il  y  a  lieu  à  accusation  contre  ledit  Jean-Baptiste 
Rémy  des  chefs  sus-énoncés  ; 

Le  renvoie  en  conséquence  devant  la  Cour  d'assises  du 
département  du  Nord ,  etc. 

Du  26  janvier  1860.  Ch.  d'accus.  Présid.  ,  M.  Petit; 
minist.  publ.  ,  M.  Connelly  ,  subst.  proc.-gén. 


ENQUÊTE.  —  TÉMOIN.  —  REPROCHE.  —  INTÉRÊT  DIRECT. 
—  CERTIFICATS.  —  CONSEILLER  MUNICIPAL.  — PAUVRETÉ. 

Uénumération  des  causes  de  reproches  contenue  en  Vart.  283 
C.  proc.  civ.  n'est  pas  limitative  (l);  toutes  les  fois  que 
le  motif  de  reproche  n'est  point  de  ceux  prévus  par  Var- 
ticle  précité,  les  magistrats  ont  un  pouvoir  discrétion- 
naire  pour  l'admettre  ou  le  rejeter,  suivant  les  circons- 
tances (2). 

Ainsi  V intérêt  d'un  témoin  à  V objet  d'un  procès  le  retid  jus- 
tement reprochable  duns  Venquête  y  relative,  mais  il 
faut  que  cet  intérêt  soit  personnel  et  direct,  et  que  le 
témx)in  soit  en  un  mot  appelé  à  témoigner  in  re  suâ  (3). 

Spécialement^  Vhahitant  d'une  commune  peut  être  admis 

/ 

(\)  Sur  ce  point  on  trouvera  de  nombreuses  autorités  en  ce  sens  aux 
coaes  annotés  de  Gilbert,  au  no  2  sur  l'art.  283  C.  proc.  civ.,  et  en  sens 
contr.  au  n»  3  des  mêmes  annotations.  La  Gour  de  Douai  s'est  rangée 
àr  l'opinion  consacrée  par  l'arrêt  que  nous  rapportons.  V.  ses  arrêts  en 
date  du  25  nov.  1829;  10  janv.  1834;  18  déc.  1846  (Jurisp.  5, 102)  ; 
16  déc.  1851  (Jurisp.  10,  167). 

(2)  Cass.  12  déc.  1831  (S.  V.  32, 1,38);  17  juin  1839  (S.  V.  39,1,759). 

(3)  V.  les  arrêts  précités  delà  Cour  de  Douai,  auxquels  on  peut  ajouter 
comme  analog.  :  28 janv.  1853  (Jurisp.  11, 127)  ;  1er  mai  1854  (12, 277); 
3  fév.  1856  (14,  314);  adde  les  autorités  indiquées  a-u  n»  70  des  ob- 
servations du  Code  annot.  de  Gilbert  sur  l'art.  283,  et  comme  se  ratta- 
chant an  même  principe,  les  décisions  repris!»  aux  n®»  10  et  suiv.,  27 
et  suiv.,  53, 54, 55,  56,  57,  65, 66,  77,  78,  87  et  suiv. 


(Ui) 

comme  témoin  dans  une  eyiquête  où  la  commune  est  par-- 
lie,  s'il  s'agit  du  caracth^e  ou  de  la  propriété  d'un  sen-' 
lier,  surtout  s'il  est  reconnu  que  le  sentier  litigieux  ne 
lui  est  point  nécessaire. 

Ou  que,  'poursuivi  en  simple  police,  la  contravention  est 
prescrite.  (640  C.  inst.  crim.) 

Pm  importe  le  rapprochement  de  la  maison  habitée  par  le 
témoin  du  sentier  litigieux. 

Spécialement  encore,  ces  habitants  de  la  commune  fussent- 
ils  inscrits  sur  la  liste  des  pauvres  secourus  par  elle^  la 
pauvreté  n'est  pas  une  cause  de  reproche. 

Un  conseiller  municipal,  cité  comme  témoin  dans  un  pro- 
cès intéressant  la  commune,  ne  peut  être  reproché  par 
cela  qu'il  a  pris  part  à  une  délibération  tendant  à  faire 
autoriser  la  commune  à  plaider;  ce  n'est  pas  là  un  certi- 
ficat donné  sur  les  faits  relatifs  au  procès  (4). 

(4)  Sic  25  juill.  1826,  Cass.  (S.  27,  4,  59);  6  mai  1835,  Limoges  (S.  V. 
35,  2, 487).— Co»/rà  10  janv.  1831,  Bourges  (S.  V.  31,  2,  248);  8  août 
1844,  Gaen  (J.  P.  à  sa  date).— Boncenne,  t.4,  p.  366  et  375;  Ghauveau, 
9, 1101  1er  in  fine. 

(1-4)  Le  Tribunal  d'Avesnes,  à  la  date  du  28  janv.  1860,  a  rendu  dans 
le  même  sens  un  autre  jugement  contre  lequel  il  n'a  pas  été  formé 
d'appel.  Voici  cette  décision  : 

(Gellé  C.  Lerat,  maire  d*Obies.) 

(  Attendu  que  sur  dix  témoins  produits  par  Lerat,  Gellé  en  a  reproché 
neuf  comme  parents  ou  domestiques  d'habitants  de  la  commune  d'Hou- 
dain,  soit  même  comme  habitants,  ou  parents  d'habitants  des  communes 
Toisines  traversées  par  le  sentier  litigieux,  et,  comme  tels,  intéressés, 
suivant  lui,  à  la  contestation  ;  que,  de  plus,  il  a  reproché  l'un  de  ces 
témoins  comme  mendiant;  —  Attendu  qu'aux  termes  de  Tart.  283  C. 
pr.  civ.,  les  reproches  de  parenté  ou  de  domesticité  ne  peuvent  s'appli- 
quer qu'aux  parents  ou  serviteurs  des  parties  litigantes  ;  —  Attendu  que 
les  haoitants  d'une  commune,  ut  singuli,  ne  sont  pas  parties  au  procès 
engagé  snr  un  droit  prétendu  comnriunal,  droit  tout  à  fait  distinct  de 
de  leurs  droits  individuels,  si  quid  universitati  debetur  singulis  non  debe- 
twr;  qu'ainsi  est-il  constant  en  doctrine  et  en  jurisprudence  que,  pour 
rendre  reprochable  l'habitant  même  d'une  commune  dahs  une  enquête 
ordonnée  sur  la  réclamation  d'un  droit  communal,  il  faut  que  son  intérêt 
au  procès  soit  direct  et  personnel  ;  qu'il  s'agisse,  pour  lui,  en  un  mot^ 
de  sa  propre  chose,  rtsm;  —  Attendu  qu'il  n'en  est  pas,  au  reste,  d'un 
droit  communal  de  passage  en  général  comme  d'un  droit  de  paccage  ou 
d'usage,  droit  propre  à  une  commune,  exclusif  au  profit  des  habitants; — 
Que,  dans  la  cause,  l'intérêt  particulier  au  passage  litigieux  s'efface  on 
s'affaiblit  en  s'étendant  à  tout  le  public  étranger  ou  non  au  pays  géné- 
ralement appelé  à  en  jouir,  sans  aucune  acception  de  personne  ;  — 
Attendu  que,  pour  l'admission  de  ces  sortes  de  reproches,  les  Tribunaux 
doivent  y  mettre  d'autant  plus  de  réserve;  que  s'il  en  était  autrement,  Ie& 
communes  se  trouveraient  fort  souvent  dans  l'imptiissancc  de  prouver 
leurs  droits; — Attendu  enfin  que  si  l'on  ne  peut  s'arrêter  au  reproche  ac- 


(142) 

(Erraux  C.  commune  de  Saint-Aubin.) 

Ces  questions  ont  été  résolues  à  propos  d'une  demande 
formée  par  un  sieur  Erraux  contre  la  commune  de  Saint- 
Aubin,  devant  le  Tribunal  civil  d'Avesnes. 

A  la  date  du  26marsl859,  le  Tribunal, avant  faire  droit, 
avait  autorisé  la  commune  à  prouver,  tant  par  titres  que 
par  témoins  : 

Que,  pendant  plus  de  vingt-et-un  ans  avant  le  Code,  les 
habitants  de  la  commune  avaient  toujours  joui  à  titre  de 
propriétaires,  en  toutes  saisons  et  comme  usant  d'un  droit 
d'un  passage  contesté  par  Erraux  ; 

Qu'il  avait  toujours  été  considéré  non  comme  un  passage 
de  tolérance,  mais  comme  une  voie  de  communication  ha- 
bituelle pour  aller  de  la  commune  ou  du  hameau  des 
Bodelets  à  THermilage  et  à  Dampierre  ; 

Que ,  de  plus ,  il  existait  anciennement  sur  ces  sentiers 
des  passages  dits  sautoirs,  qui  depuis  ont  été  remplacés 
par  des  coupés,  en  exécution  de  l'arrêté  municipal  de  1835; 

Que  le  sentier  litigieux  était  connu  sous  le  nom  de 
sentier  de  l'Hermilage,  et  que  depuis  le  Code  comme  avant, 
les  propriétaires  de  la  pâture  dont  s'agit  mettaient  des  dé- 
fenses pour  déterminer  l'espace  qu'ils  entendaient  laisser 
libre  au  public  pour  l'usage  de  la  servitude. 

Partie  adverse  entière  en  preuve  contraire. 

On  procéda  aux  enquêtes  et  contre-enquêtes  ordonnées 
par  le  Tribunal. 

Il  se  produisit  alors  les  questions  de  reproches  que  les 
décisions  rapportées  font  assez  connaître. 

A  la  date  du  1er  juill.  1859,  le  Tribunal  d'Avesnes  sta- 
tua ainsi  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  si  l'intérêt  d'un  témoin  à  l'objet  d'un 

t)rocès  le  rend  justement  reprochable  dans  l'enquête  y  re- 
ative,  il  faut  que  cet  intérêt  soit  personnel  et  direct,  qu'il 
soit  en  un  mot  appelé  à  témoigner  in  re  suâ; 

»  Attendu  que,  pour  sainement  apprécier  l'idonéité  des 
témoins  reprochés  comme  intéressés  dans  une  enquête  sur 
la  réclamation  d'un  droit  élevée  par  une  commune,  il  faut 

cessoire  d'indigence  élevé  contre  un  témoin,  reproche  inadmissible  en 
droit,  et  qui  n'aurait  même  pas  dû  se  produire  en  la  cause;  —  Statuant 
en  matière  ordinaire  et  en  premier  ressort,  déclare  Gellé  non  fondé  dans 
les  reproches  par  lui  formulés,  dit  que  toutes  les  dépositions  des  tém'^' 
de  Tenquéte  seront  lues.  » 


(143) 

distinguer  ceux  dont  Tintérêt  se  confond  avec  Qelui  de  la 
commune,  qui  n'ont  d'autre  titre  au  droit  réclamé  que 
leur  qualité  d'habitants,  de  membres  de  l'association  com- 
munale, et  ceux  qui  prétendraient  avoir  un  droit  personnel 
et  particulier  à  la  chose  litigieuse,  indépendant  du  droit 
de  la  commune,  fondé  sur  une  cause  autre  que  la  simple 
qualité  d'habitant; 

»  Attendu  que  cette  distinction  doit  faire  repousser  les 
reproches  formulés  contre  la  plupart  des  témoins  de  l'en- 
quête, relativement  au  sentier  litigieux  ; 

5  Attendu  que  l'opinion  officiellement  émise  par  un  té- 
moin sur  le  litige  au  sein  du  conseil  municipal  et  en  sa 
qualité  de  conseiller,  ne  peut  être  assimilée  à  un  certificat 
qui  rendrait  son  témoignage  reprochable  ;  ' 

»  Attendu  que  l'on  ne  peut  trouver  dans  la  pauvreté 
seule  des  3^  et  8*^  témoins  une  cause  légitime  ni  même  sé- 
rieuse de  reproche  contre  leur  témoignoge  ; 

»  Attendu  que  les  poursuites  dirigées  contre  les  lOe  et 
i2e  témoins  depuis  la  demande,  ne  peuvent  autoriser  les 
reproches  du  défendeur  à  leur  égard  ; 

»  Mais  attendu  que  le  11^  témoin,  Beuchart,  poursuivi, 
avant  l'introduction  du  procès ,  pour  avoir  passé  sur  le 
sentier  litigieux,  et  ayant  élevé  en  simple  police  l'exception 
préjudicielle,  a  un  intérêt  trop  direct  à  la  contestation  pour 
que  son  témoignage  puisse  être  admis  ; 

»  Attendu  que  le  défendeur,  Erraux,  reconnaît  l'exacti- 
tude des  reproches  formulés  par  le  demandeur  contre  les 
7e,  8e  et  IQe  témoins  de  la  contre-enquête,  et  qu'il  déclare 
renoncer  à  leur  déposition  ; 

»  Le  Tribunal  donne  acte  à  Erraux  de  son  consentement 
à  ce  que  les  7®,  8^  et  10^  dépositions  de  la  contre-enquête 
ne  soient  pas  lues  ;  lui  donne  acte  également  de  sa  renon- 
ciation au  reproche  formulé  contre  le  i^^  témoin  de  l'en- 
quête, et  admettant  seuleinent  le  reproche  dirigé  contre  le 
lie  témoin  de  l'enquête,  le  déclare  non  fondé  dans  tous 
ses  autres  reproches  à  l'égard  des  témoins  de  ladite  en- 
quête; dit  que,  sans  avoir  égard,  leurs  dépositions  seront 
lues;  condamne  Erraux  aux  9/10^8  des  dépens  de  l'inci- 
cident,  1/10©  seulement  restant  à  la  charge  de  Bruyère, 
en  sa  qualité .  » 

Appel  par  Erraux.  —  La  Cour  confirme  la  décision  des 
premiers  juges,  en  y  ajoutant  les  motifs  suivants  : 

ARRÊT. 
LA  COUR  ;  —  Attendu  que  le  témoin  Antoine  Louis  a. 


(iU) 

diaprés  son  contrat  d'acquisition  passé  devant  le  notaire 
Arnoult,  d'Avesnes,  le  17  septembre  1854,  un  passage  pour 
la  culture  de  sa  pièce  de  terre,  et  qu'ainsi  le. sentier  liti- 
tigieux  ne  lui  est  nullement  nécessaire  à  cette  fin  ;  que  le 
sentier  n'est  pas,  du  reste,  un  chemin  d'exploitation; 

Attendu  qu'il  n'est  pas  sous  le  coup  de  poursuites  pour 
avoir  usé  de  passage  par  suite  d'un  procès-verbal  de  garde* 
champêtre  de  Saint-Hilaire,  du  18  avril  1858  >  puisque  ce 
procès-verbal  ne  lui  a  pas  été  dénoncé  ;  qu'aucune  poursuite 
*  n'a  été  dirigée  contre  lui,  et  que  la  contravention ,  si  elle 
existait,  se  trouverait  prescrite  aux  termes  de  l'art.  640 
C.  inst.  crira.  ; 

Attendu  que  ces  dernières  considérations  s*appliquent  au 
IQe  témoin  ; 

Que  le  rapprochement  de  la  maison  habitée  par  le  témoin 
du  sentier  litigieux  ne  prouve  nullement  qu'il  se  rende 
plus  souvent  que  tout  autre  habitant  de  la  commune  au 
hameau  de  l'Hermitage,  et  que  le  sentier  lui  soit  plus  utile 
qu'à  tout  autre  ; 

Attendu  que  le  9®  témoin,  Blanchard,  n'est  pas  voisin 
du  sentier  et  qu'il  n'a  pas  d'intérêt  direct  à  son  maintien  ; 

En  ce  qui  touche  le  6®  témoin,  CauUery  : 

Attendu  qu'on  ne  peut  assimiler  à  la  délivrance  sponta- 
ée,  à  l'une  des  parties,  d'un  certificat  sur  les  faits  du  pro- 


nee. 


ces,  l'acte  du  conseiller  municipal  qui,  remplissant  un 
devoir,  prend  part  à  la  délibération  du  conseil  autorisant 
le  procès  ; 

Attendu  que  cette  délibération,  bien  que  motivée  en  fait, 
est  l'œuvre  de  la  majorité  dans  son  dispositif  comme  dans 
les  raisons  qui  l'appuient  ; 

Que  le  conseil  municipal,  qui  l'a  signée,  reste  le  maître 
de  démentir  les  faits  repris  dans  les  motifs,  Vils  sont  con- 
traires à  ses  appréciations  personnelles  ; 

Qu'ainsi  on  ne  peut  soutenir  que,  pour  avoir  pris  part  à 
la  délibération,  CauUery  n'est  plus  linre  dans  sa  déposition 
comme  témoin  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des^  premiers  juges , 

La  Cour  met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  juge- 
ment dont  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant^  etc. 

Du  16  mars  1860.  2^  chamb.  Présid. ,  M.  Danel;  minist. 
publ.jM.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc. ,  M^s  Duhem  et  Emile 
Flamant  ;  avou. ,  M^s  Huret  et  Lavoix. 


1<3  COMPÉTENCE  CIVILE.  -  saisip-arbèt:  -  tribunaux 

DE  COMMERCE. 

2o  LITISPENDANCE.  —  CAUTIONNEMENT.  —VAXÏDÏTÉ DE  SAISIE- 
ARRÊT.  —  DEMANDE  COMMERCIALE. 

30  APPEL,  -r- MOYEN  NOUVEAU.  —  PRiyiLJlGfi  PRÉEXISTANT. 
—  CAUTIONNEMENT.  --.  DEMANDE  NOUVELLE. 

¥  THEATRE.  —  CAUTIONNJBMENT  DU  DIRECTEUR.  —  CRÉANCE 
PRIVILÉGIÉE.  —  ÉMOiUMENTS  X^ES  ARTISTES.  -^  GÉRANCE 
ET  ADMINISTRATION.  — -  INCESSIBIUTÉ.  -u  NULLITÉ  DE 
CONVENTION. 

\^  Les  Tribunaux  <k  commerce  sont  indompétents  pour 
connaître  de  la  validité  €une  saisie-arrêt.  CC.  nr    art 
667.)  (i>  ^     ^  ''' 

2o  II  y  a  litispendance  alors  qu\une  demande  en  remise  de 
cautionnement  est  formée  devant  m  Tribunal  de  çom^ 
merce,  et  que  la^uestiùn  de  validité  de  saisie  du  même 
cautionnement  a  été  portée  devant  un  Tribunal  civil 

^  (C.  pr.,  art.  471).  (2). 

30  /ï  ne  naît  pas  une  éèmande  notwélle,  radis  un  moyen 
mmeau,  de  ce  qu'en  appel  est  invoqué  un  privilège^ 
alors  qu'en  première  instance  on  n'avait  prétendu  qp^à 
m  droit  général  de  distraction  siir  un  ôaulionnement 
(C.  pr.,art.  464.)  *' 

40  Les  avances  faites  à  un  directeur: de  théâtre  pour  payer 
ses  artistes  sont,  ûux  termes  des  règlements  administra- 
tifs, privilégiés  sur  le  cautionnement, de  ce  directeur. 

En  vertu  des  mêmes  réglemmts,  là  gérance' et  V administra- 
tion des  théâtres  interdites  à  toutes  autres  personnes  qu'aux 
titulaiTeSySOfitincessibles,  elles  actes  résultante  une  cession 
dé  cette  nature  sont  nuls  comme  la  cession  elle-même 
(Ord.  8  déc.  1824,  art.  4.)  (3). 

(DesmpUes  C,  «yndiç,  Léyy  et.içvy.)  . 

Au  10  juin  1859,  la  sieur  tévy  était  direct^r  du  théâtre 
de  Lille.  Par  acte  soua  aeiug-prité,  un  sieur  Desmottés 


-  ■■!    )        p  »   >  ^n 


;  *  '  r       I     ' '    I  '  •       I      -       > I    1 1  1 1. 


(1)  V.pour  h  jurisp.  delà  Cour  de Douaij 48  nov.  1854  (Jurisp,:13 
17)  et  la  note.  Pour  te  jurisp.  gén.  les  décisions  et  autorités- india,  Rév 
Pal.,  y  Saisie-ûrrét,  m  327  et  suiv.  Adde  Suppl,  . 

(2)  Consiiit,  =poiir  la  jurisp.  delà  Cour  de  Douai,  15  ma^s  1858  rJu- 
ri$p.  t6.,i71),  .     : 

(3)  L'art.  4  de  Torflonnanqe  du  8  déc.  1824  est  ainsi  conçii  ; 

<  11  (un  directeur  de  Ihëûtre)  ne  pourra  vendre  ni  céder  spn  brevpt, 
sous  peine  de  destïtntiori.  » 

TOME  XVIII.  10 


(i46) 

s'engage  à  lui  fournir  une  somme  de  16,000  fr.  exclusive- 
ment destinés  aux  avances  à  faire  aux  artistes  et  choristes 
du  théâtre  pendant  la  saison  d'hiver  1859-1860.  Ces 
16,000  fr.  seront  remboursés  à  Desmottes  de  mois  en  mois, 
et  retenus  sur  les  sommes  restituées  par  les  artistes,  après, 
toutefois,  que  les  employés  du  théâtre  auront  été  payés  de 
leurs  appointements.  Pour  plus  de  garantie,  Lévy  a  délégué 
à  Desmottes  l'excédant  des  recettes  sur  les  dépenses  de 
chaque  mois.  Lévy  a  encore  déclaré  céder,  transporter  et 
déléguer  à  Desmottes  acceptant,  toute  Fimportance  du  cau- 
tionnement de  6,000  fr.  déposé  dans  la  caisse  de  la  ville  en 
garantie  de  sa  gestion  comme  directeur  du  théâtre  de  Lille. 
Cette  délégation  était  faite  pour  assurer  à  Desmotles  la 
moitié  brute  du  bénéfice  de  l'exploitation  d'hiverl859-l  860. 
17  juin  1859,  notification  de  la  délégation  au  maire  de 
la  ville. 

Desmottes  a  versé  le  cautionnement. — Il  a  été  remboursé 
de  14,000  fr.;  de  ce  chef  il  ne  lui  est  dû  aue  2,000  fr. 

Desmottes  a  encore  (7  septembre  1 859)  prêté  à  Lévy 
925  fr.,  sous  la  même  garantie. 

Lévy  doit  aussi  à  Desmottes  2,925  fr.  pour  cause  pure- 
ment personnelle,  ou  tout  au  moins  jusqu'à  concurrence 
de  2,000  fr. 

D'autres  conventions  verbales  ont  été  échangées  entre 
eux  le  9  septembre  1859. 

Lévy  s'est  engagé  à  présenter  Desmottes  à  l'autorité  su- 
périeure comme  directeur  du  théâtre  de  Lille  pour  Tannée 
1860-1861. 

Desmottes,  par  dérogation  au  traité  du  10  juin  1859,  a 
autorisé  la  sortie  de  la  caisse  des  fonds  nécessaires  pour 
faire  les  avances  aux  artistes  tombés  ou  qui  tomberaient 
'  pendant  les  débuts.  Lévy  a  abandonné  gratuitement  à  Des- 
mottes son  matériel,  accessoires,  décors  et  costumes  qu'il 
avait  au  théâtre,  et  Desmottes  a  déclaré  abandonner  aussi 
gratuitement  à  Lévy,  qui  en  disposerait  comme  il  le  jugerait 
convenable,  la  baignoire  n^  1  pendant  tout  le  temps  que 
durerait  son  privilège.  Il  s'est  engagé  à  rembourser,  à  sa 
nomination,  à  Lévy,  son  cautionnement  franc  et  quitte. 

20  septembre  1859,  acte  sous  seing-privé  par  lequel 
Lévy  abandonne,  à  partir  de  ce  jour,  la  gérance  etl'entière 
administration  du  théâtre  de  Lille  à  Desmottes,  qui  devra 
gérer  et  administrer  à  ses  risques  et  périls,  et  de  manière 
à  ce  que  Lévy  ne  soit  jamais  ni  recherché  ni  inquiété. 
Il  est  encore  convenu  que,  pendant  l'année  1859-1860, 


(147) 

Lévy  continuera  à  percevoir  mensuellement  une  somme 
de  250  fr.  à  laquelle  il  avait  droit  comme  directeur  gérant; 
que  le  cautionnement  déposé  par  Lévy  à  la  caisse  munici- 

f)ale  y  restera  déposé  jusqu'au  30  avril  1860,  si  Desmottes 
e  désire,  ou  jusqu'à  ce  que  celui-ci  ait  été  nommé  direc- 
teur titulaire  du  théâtre;  qu'à  cette  époque  Lévy  en  fera 
le  retrait  ou  acceptera  le  règlement  que  lui  fera  Desmottes 
en  espèces;  qu'enfin,  pendant  la  direction  de  Desmottes, 
Lévy  aura  droit  d'occuper  gratuitement  la  loge-baignoire 
n®  4,  de  six  places,  pour  en  disposer  comme  bon  lui  sem- 
blera ;  qu'il  aura  en  outre  le  droit  de  disposer,  à  chaque 
représentation  indistinctement,  de  deux  billets  de  deux 
places  de  premières  ou  de  parquet,  etc. 

En  octobre  4859,  Lévy,  devenu  directeur  du  Pré  Cate- 
lan,  près  Lille,  a  été  déclaré  en  état  de  faillite. 

Desmottes  s'est  trouvé  en  déficit  de  4,250  fr.  qu'il  a  dû 
payer. 

Il  a  frappé  d*opposition  le  cautionnement  qu'il  prétend 
devoir  être  distrait  de  la  faillite  Lévy  et  servir  à  l'acquit 
de  ses  créances. 

Demande  en  validité  de  saisie  est  portée  devant  le  Tri- 
bunal civil  de  Lille. 

Le  42  novembre  4859,  le  syndic  de  la  faillite  Lévy  fait 
assigner  Desmottes  devant  le  tribunal  de  commerce  pour 
s'entendre  condamner  :  4^  à  lui  payer  250  fr.  exigibles 
depuis  le  34  octobre ,  suivant  convention  verbale  ;  2°  à 
rendre  disponible  le  cautionnement  versé  par  Lévy  dans 
la  caisse  municipale  de  Lille,  par  la  main-levée  qu'il  don- 
nera des  significations  et  oppositions  qu'il  a  faites  sans 
droit,  ou  à  payer  au  syndic  6,000  fr.  pour  tenir  lieu  du 
cautionnement,  moyennant  quoi  il  en  deviendra  proprié- 
taire; 3o  à  payer  la  somme  de  3,000  fr.,  à  titre  de  dom- 
mages-intérêts, pour  inexécution  par  Desmottes  de  Tenge- 
gement  verbal  qu'il  a  pris  envers  Lévy  de  lui  laisser  le 
droit  de  disposer,  comnae  bon  lui  semblera,  de  la  loge- 
baignoire  no  4  et  de  signer  deux  places  de  premières  ou 
de  parquet,  et  une  autre  somme  de  9,000  fr.  pour  dom- 
mages-intérêts supplémentaires. 

Desmottes  a  prétendu  que ,  sur  la  demande  de  main- 
levée d'opposition,  le  Tribunal  de  commerce  était  incom- 
pétent, pour  cause  de  litispendance.  Il  soutient  de  plus  le 
droit  auquel  il  a  prétendu  d'être  payé  sur  les  valeurs  du  cau- 
tionnement. 


(m) 

Le  Tribunal  de  commerce,  à  la  date  du  28  novembre 
4859,  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 

a  Attendu,  sur  le  décUnatoîre  proposé  par  Desroottes , 
que  la  contestation  dont  le  Tribunal  est  saisi  est  relative  à 
une  entreprise  de  spectacles  publics,  qualifiée  acte  de  coni- 
merce  par  l'art.  632  C.  com.,  et  qu'il  s'agit  d'ailleurs 
d'une  contestation  procédant  de  transactions  entre  com- 
merçants; 

»  Attendu  qu'en  supposant  même  que  cette  contestation 
soit  commune  à  une  autre  déjà  pendante  en  un  autre  Tri- 
bunal, le  renvoi  serait,  aux  termes  de  l'art.  171  C.  proc. 
civ.,  facultatif  et  non  obligatoire  ; 

»  Attendu  au  fond,  sur  la  prétention  de  Desmottes  d'in- 
terdire au  syndic  le  recouvrement  du  cautionnement  fourni 
par  Lévy,  en  sa  qualité  de  directeur  du  théâtre  de  Lille, 
que  le  cautionnement  n'a  été  délégué  à  Desmottes,  par 
l'acte  du  10  juin  1859,  enregistré  à  Lille  le  15  du  même 
mois,  qqe  pour  garantir  audit  Desmottes  sa  part  dans  les 
bénéfices  bruts  résultant  de  l'exploitation  du  théâtre  pen- 
dant l'année  1859-1860; 

»  Attendu  que  Desmottes  reconnaît  lui-même  que,  pen- 
dant la  direction  de  Lévy,  l'exploitation  n'a  donné  aucun 
bénéfice,  puisqu'il  se  prétend  créancier  à&  sommes  qu'il 
aurait  fournies  pour  couvrir  l'excédant  des  dépenses  sur 
les  recettes  ;  qu'il  est  donc  superflu  d'examiner  la  validité 
de  cette  délégation,  puisque  le  cas  pour  lequel  elle  a  été 
donnée  ne  s'est  pas  réalisé  ; 

»  Attendu  qu'il  résulte,  de  ce  qui  précède,  que  Desmottes 
n'a  aucun  droit  de  propriété  à  exercer  sur  le  cautionne- 
ment; 

ï  Attendu  que  les  syndics  sont  chargés  par  la  loi  de 
procéder  au  recouvrement  des  dettes  actives,  et  qu'il  n'ap- 
partient pas  aux  créanciers  individuellement  de  s'opposer 
à  ce  recouvrement,  qui  ne  peut  d'ailleurs  préjudicier  à 
leurs  droits,  puisque  les  droits,  privilégiée  oiji  autres,  peu- 
vent s'exercer  sur  les  sommes  et  valeurs  dépendant  de  l'actif 


(U9) 

d'une  faillite,  aus$i  bien  entre  les  mains  du  syndic  qu'en 
mains  tierces; 

»  Attendu,  sur  les  êhefs  de  la  demande  du  svndic  con- 
cernant  :  4*>  une  somme  de  250  fr.  ;  2o  la  libre  disposition 
d'une  baignoire  et  la  faculté  de  signer  à  chaque  représenta- 
tion deux  billets  de  premières  ou  parquet  ;  3^  des  dom- 
mages-intérêts supplémentaires: 

»  Que  le  syndic  tire  ses  droits  de  conventions  intervenues 
postérieurement  au  40  juin  dernier,  enti^e  Desmotles  et 
Lévy,  pour  l'exploitation  par  Desmottes,  sous  le  nom  de 
Lévy,  du  privilège  de  la  direction  du  théâtre  de  Lille  ou 
pour  la  cession  de  ce  privilège; 

D  Attendu  que  le  privilège  de  Lévy  lui  était  personnel  et 
ince^ible  de  sa  nature  ;  qu'il  n'était  donc  pas  dans  le 
commerce  et  ne  pouvait  être  cédé  ou  vendu,  ni  même  de- 
venir Tobjet  de  convention  (C.  Nap.,  art.  4128  et  4598); 

j>  Attendu  que  les  conventions  intervenues  à  ce  sujet 
ayant  une  cause  illicite,  doivent  être  considérées  comme 
nulles  et  non  avenues,  aussi  bien  pour  les  avantages  qu'elles 
ont  conférés  à  Lévy  que  pour  ceux  qu'elles  ont  pu  attribuer 
à  Desraottes  lui-même; 

»  Attendu,  sur  la  prétention  de  Desmottes  de  faire  former 
une  masse  distincte  du  sieur  Lévy,  en  sa  qualité  de  direc- 
teur du  théâtre,  que  tous  les  biens  du  failli  sont  le  gage 
commun  de  ses  créanciers,  quelle  que  soit  l'origine  de 
leurs  créances,  et  que  la  séparation  des  patrimoines,  qui 
est  de  droit  en  matière  de  société ,  parce  que  la  société 
constitue  un  être  distinct,  ne  peut  s'opérer  en  matière 
purement  individuelle  ; 

»  Le  Tribunal  retient  la  cause,  et  statuant  au  fond^  en 
premier  ressort  sur  tous  les  points  litigieux  : 

j>  Autorise  le  syndic  de  Lévy,  en  sa  qualité,  à  recouvrer, 
nonobstant  l'opposition  de  Desmottes,  le  caulionnement 
fourni  à  l'administration  municipale  de  la  ville  de  Lille 
par  Lévy,  en  sa  qualité  de  directeur  privilégié  du  théâtre 
de  cette  ville,  ou  les  sommes  ou  valeurs  à  provenir  de  ce 
cautionnement  ; 

3  Déclare  le  syndic  non  recevaWe  sur  les  auti'es  chefs  de 


(150) 
la  demande  ;  dit  qu'il  n'y  a  lieu  d'opérer  aucune  division 
dans  Tactif  et  le  passif  de  Lévy  personnellement; 

»  Réserve  à  Desmottes  de  faire  valoir  ses  droits  sur 
l'actif  lors  de  la  vérification  des  créances  ; 

»  Frais  partagés  par  moitié  entre  le  syndic  en  sa  qua- 
lité et  Desmottes.  » 

Appel  par  Desmottes. 

Le  18  janvier  1860,  concordat  par  abandon  d'actif  est 
obtenu  par  Lévy  et  signifié  à  Desmottes. 

Intervention  de  Lévy  dans  l'instance. 

Appel  incident  par  Detrez  pour  toutes  les  demandes 
formées  par  lui  en  1^^  instance. 

Il  est  dit  devant  la  Cour,  pour  Desmottes  : 

En  droit,  les  débats  sur  la  validité  des  saisies-arrêts  sont 
exclusivement  de  la  compétence  des  Tribunaux  civils.  En 
attribuant  au  syndic  de  Lévy  la  libre  disposition  du  cau- 
tionnement saisi-arrêté  par  Desmottes,  le  Tribunal  de  Lille 
a  manifestement  excédé  sa  compétence. 

Au  fond,  et  sur  les  points  qu'il  pouvait  et  devait  juger  : 
Desmottes  est  créancier  de  Lévy  de  :  1°  une  somme  de 
2,925  fr.  spécialement  affectés  par  acte  de  délégation  dû- 
ment signifié,  par  privilège,  sur  le  cautionnement  versé 
par  ce  dernier  à  la  caisse  municipale  de  Lille,  et  d'ailleurs 
privilégiés,  aux  termes  de  l'art.  5  de  l'arrêté  ministériel  (1) 
conférant  la  direction  à  Lévy;  2»  d'un  dixième  de  4,250  fr. 
payés  par  Desmottes  au  caissier  du  théâtre  pour  couvrir 
les  dépenses  du  mois  de  septembre  1859;  cette  dernière 
somme  est  également  privilégiée  sur  le  cautionnement,  aux 
termes  de  l'art.  5  de  l'arrêté  ministériel  précité.  Le  Tribunal 
de  commerce,  saisi  de  la  demande  de  Desmottes,  aurait  donc 
dû  l'accueillir.  Il  doit  en  être  ainsi  à  bien  plus  forte  raison 
devant  la  Cour,  puisque,  par  l'effet  du  concordat  par  aban- 
don concédé  à  Lévy,  il  n'y  aura  plus  lieu  à  vérifications  de 
créances. 

(1)  Cet  article  est  ainsi  conçu  : 

«  Art.  5.  Le  directeur  sera  tenu  de  déposer  un  cautionnement  de 
six  mille  francs ,  conformément  aux  termes  de  son  cahier  des  charges. 

y>  La  présente  autorisation  ne  lui  sera  délivrée  que  lorsqu'il  aura 
justifié  de  ce  versement  auprès  de  M.  le  préfet  du  déparlement. 

»  Cette  somme  sera  affectée  par  privilège  à  la  garantie  : 

»  lo  Du  traitement  des  artistes  et  employés  ; 

»  2»  Du  droit  des  indigents; 

»  3o  Du  droit  des  auteurs. 

3^  Et  ensuite ,  par  concurrence ,  aux  engagements  de  toute  nature 
contractés  par  le  directeur  pour  le  service  de  l'exploitation  théâtrale.  » 


(151)    • 
La  Cour  a  rendu  rarrêt  suivant  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Donne  acte  à  Detrez  de  son  appel  incident  ; 

Donne  acte  à  Lévy  de  son  adhésion  pure  et  simple  aux 
conclusions  de  Detrez  ; 

Et  statuant  sur  les  appels  respectifs  des  parties  ; 

En  ce  qui  touche  la  saisie  : 

Attendu  qu'après  avoir  pratiqué,  le  27  octobre  1859, 
une  saisie-arrêt  entre  les  mains  du  receveur  municipal  sur 
Je  cautionnement  de  Lévy,  Desmottes  avait  assigné  ce  der- 
nier devant  le  Tribunal  civil  de  Lille,  aux  fins  de  validité 
de  la  saisie  ; 

Attendu  que  Detroï,  syndic  de  la  faillite  Lévy,  a  assigné 
à  son  tour  Desmottes  devant  le  Tribunal  de  commerce  de 
Lille,  pour  faire  déclarer  Lévy  créancier  de  diverses  som- 
mes et  faire  ordonner  hi  remise  en  ses  mains  du  caution- 
nement, nonobstant  toutes  oppositions  ; 

Attendu  que  le  Tribunal  civil  de  Lille  étant  déjà  saisi  de 
la  question  de  la  validité  de  la  saisie,  l'exception  de  litfê- 
pendance  proposée  par  Desmottes  eût  dû  être  accueillie 
parle  Tribunal,  aux  termes  de  Tart.  171  C.  proc.  civ.  ; 

Attendu  que  le  Tribunal  de  commerce  était  du  reste  in- 
compétent pour  connaître  de  1»  saîsîe-arrôt ,  procédure 
toute  civile  que  les  Tribunaux  civils  peuvent  seuk  régler  ; 

En  ce  qui  touche  les  prétentions  respectives  de  Desmottes 
et  de  Lévy  : 

Attendu  qu'il  s'agit  d'engagements  de  commerce ,  qu'il 
importe  peu  que  certains  d'entre  eux  aient  motivé  la  sai- 
sie, et  que  le  Tribunal  de  commerce  en  ajustement  retenu 
la  connaissance  ; 

Attendu  que ,  suivant  les  conditions  de  son  privilège, 
Lévy  a  versé  une  somme  de  6,000  fr.  affectée  spécialement 
aux  créanciers  de  son  entreprise  ; 

Attendu  que,  d'après  l'acte  du  10  juin  1859,  Des- 
mottes  devait  verser  dans  l'entreprise ,  pour  avances  aux 
acteurs  et  frais  de  jonction,  une  somme  de  16,000  fr., 
dont  12,000  fr.  devaient  être  payés  directement  par  lui  à 
un  engagement  dramatique  ; 


(152) 

Attendu  qu'il  résulte,  des  côraptes  du  théâtre  de  Lille 
tenus  par  le  contrôleur  nonijfné  par  radminislralion  muni- 
cipale ,  que  2,925  fr.  ont  'été  payés  à  titre  de  frais  de 
jonction; 

Attendu  qu'en  vain  Detrez  soutient,  powien  justifier,  que 
2,000  fr.  restent  bien  dus  parLéyy,  mais  à  titre  personnel; 
que  les  livres  du  contrôle  proteétent  contre  cette  allégation 
et  qu'ils  sont  du  reste  en  conformité  avec  la  lettre  de  la 
penventipn  du  tO  juin  1859  ; 

..  Attendu  que  les  avances  dis  Desnaottes  ayant  trait  à  l'en- 
treprise du  théâtrespnt  privilégiées  sur  le  cautionnement  ; 

^uant  à  la  somme  (Je  4,250  fr.  défiait,  au  80  septenÉibre 
1859,  couvert  par  Desmottes  ; 

Attendu  qu'à  tort  Delréz  soutient  qu'en  Cour  d'appel 
Desmottes  ne  p^ut  prétendre  qu'elle  affecte  le  cautionne- 
ment;        .  .  ,       .  :.     . 

,  Qu'en,  effet  si>  devant  le  premier  juge^  Desmotles  ne  s'est 
pas  prévalu  du  privilège:  qui,  d'après  les  conditions  de  la 
uoipinalion  du  directeur  du- tlkéàlre,  affecté  son  cautionne- 
ment au  profit  Ae^  cpéanpiears  <Ju  théâtre,  il  a  pourtant  sou- 
tçfliiu  que.  ce  cautionnement  devait  être  distrait  de  la  masse 
de  la. faillite,  et  qu'il  avait  droit  d'y  prétendre; 
.;  Attendu:  que  la  qualité  qu'il  prend  en  cause  d'appel  n'est 
.^u' un  nouveau  moyen  invoqué  pour  arriver  au  même. but  ; 

Attendu  que,  par  l'eff(jt  du.  concordat  acco|:'dé  à  Lévy,  il 
n'y  a  plu^  lieu  à<  la  vérification  des  créances,  et  que  desl 
au  juge  saisi  de  la  réclamation  à  statuer  sur,  là  qualité 
de. la  criaan^je;  .      .  ,      .     .  • 

Atten4u  qu'à  ti(r;e4'avances  faites  pour  le  directetar,  elle 
doit  jouir  du  privilège  que  l'arnêté  ministériel  lui  confère; 

Mais  attendu  que  Lévy  a  quitté  de  faiJt  la  direction  le 
20  sçpteiiîl?re  1859,  et  -que,  par  tolérance  et  del'assenti- 
meut  de  Tautorité  municipale.  Desmottes  s'est  substitué  â 
lui,  à  ses  risques  et  périls;  qu'il  faut  donc  arrêter  le 
conipto  de  l'exploitation,  théâtrale  noa  au  30  septembre  1 859, 
mais  au  20  du,  même  mois  ; 

AtteMu  que  Lévy  soutient  que  diverses  dépenses  feites 
^\a^s  ce  mois,  dgiveut  i^e  répartir  sur  toute  Tannée  d'ex- 


(153) 
ploitalion  ;  qu'il  se  pourrait  également  que  certaines  re- 
cettes extraordinaires  dussent  au^i  se  répartir  ; 

En  ce  qui  regarde  les  réclamations  de  Lévy  pour  la  bai- 
guoire  et  les  deux  places  de  premières  promises  par  Des- 
molles :  •        '    ' 

Attendu  que  la  convention  du  9  septembre  n'a  pas  été 
exécutée  et  ne  pouvait  plus  Têtre  par  le  fait  de  la  faillite 
de  Lévy  ; 

Attendu  que  celle  du  20  septembre,  par  laquelle  Lévy 
cédait  immédiatement  à  Desmottes  la  gérance  et  l'entière 
administration,  est  nulle  comme  contraire  au  prescrit  de 
l'art.  2  de  l'arrêté  de  nomination  ; 

Que  dès-lors  les  conventions  accessoires  ne  sont  pas 
d'entretien  ; 

Attendu  que  le  prélèvement  de  250  fr.  par  mois,  en  qua- 
lité de  directeur,  ne  lui  est  dû  que  jusqu'au  20  septembre, 
jour  où  il  a  de  fait  cessé  de  diriger  le  théâtre  ; 

En  ce  qui  touche  le  mobilier  théâtral  cédé  à  Desmotles  : 

Attendu  que  Lévy  en  est  resté  propriétaire  ; 

Que  Desmottes  lui  en  doit  ou  la  valeur  ou  le  loyer  ; 

La  Cour,  émendant  et  faisant  ce  que  le  premier  juge 
aurait  dû  faire, 

Dit  que  le  Tribunal  de  commerce  de  Lille  était  incompé- 
tent pour  connaître  des  suites  de  la  saisie-arrêt  pratiquée 
par  Desmotles  ; 

Déboute  Lévy  de  sa  demande  en  donfïmages-inlérêts 
pour  la  privation  d'une  baignoire  et  de  deux  places  aux 
premières; 

Dît  qu'il  n'a  droit  au  traitement  mensuel  de  250  fr.  que 
jusqu'au  20  septembre  1 859  ; 

Dit  que,  sur  le  cautionnement  de  6,000  fr.  déposé  par 
Lévy,  Desmottes  aura  droit  dé  se  faire  payer  au  rang  de 
son  privilège  :  4®  de  la  somme  de  2,925  fr.,  2^  de  celle 
qui  aura  été  déboursée  par  lui  pour  payer  les  obligations 
contractées  par  Lévy  en  raison  de  la  direction  au  20  sep- 
tembre 4859; 

Dit  que  Lévy  a  droit  à  la  valeur  du  mobilier  théâtral 


(154) 
abandonné  par  lui,  si  mieux  n'aime  Desmottes  le  remetlrc 
en  nature  en  en  payant  le  loyer  ; 

Et  avant  dire  droit  au  fond ,  renvoie  les  parties  devant 
Me  Ernest  Blondeau,  avocat,  arbitre  rapporteur,  que  la 
Cour  nomme  à  cet  effet,  lequel  conciliera  les  parties,  si 
faire  se  peut,  sinon  enverra  son  rapport  au  greffe  de  la 
Cour; 

Dit  que  l'expert  exprimera  son  avis  sur  le  point  de  savoir 
si  certaines  recettes  et  dépenses  doivent  ou  non  êti'e  répar- 
ties sur  toute  l'année  d'exploitation  ; 

Qu'il  déterminera,  en  se  faisant  aider  en  ce  point  par 
gens  compétents,  quelle  est  la  valeur  du  mobilier  théâtral 
délaissé  par  Lcvy,  et  quel  loyer  devrait  être  payé  pour  son 
usage; 

Qu'il  s'expliquera  sur  les  bonifications  sur  remises  du 
gaz  ;  qu'il  fixera  le  chiffre  de  la  dette  ; 

Pour  le  rapport  transmis,  etc.  ; 

Du  29  mars  4860.  2®  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
pubL,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc,  M^s  Dupont  et  Duhem  ; 
avou.,  Mes  Lavoix  et  Dussalian. 


INSTRUCTION  PUBLIQUE.  —  ouverture  d'école  lirre.— 

DÉCLARATION.  —  IN  ACCOMPLISSEMENT  DES  FORMALITÉS. 

La  déclaration  au  maire,  exigée,  par  Vart,  27  de  la  loi  du 
45  mars  i850,  de  tout  instituteur  qui  veut  ouvrir  une 
école  libre,  doit  être,  en  outre,  adressée  par  le  postulant 
au  recteur  de  V académie,  au  procureur  impérial  et  au 
souS'préfet;  il  ne  suffirait  que  trois  déclarations  distinctes 
fussent  adressées  f  l'une  au  maire,  une  autre  au  procu- 
reur impérial,  une  autre  au  sous-préfet. 

En  conséquence,  Vinstituieur  qui  ouvre  une  école  libre  après 
avoir  fait  au  maire,  au  procureur  impérial  et  au>  sous- 
préfet  une  déclaration  distincte,  sans  avoir  adressé  an 
procureur  impérial  et  au  sous-préfet  la  copie  certifiée  de 
la  déclaration  par  lui  faite  au  maire,  se  rend  coupable 
d'ouverture  d'uiie  école  sans  avoir  rempli  les  formalités, 
et  tombe  sou^  Vapplication  des  peines  édictées  par  Vart. 
29  de  la  loi  du  i5  mars  i850. 

Bans  les  arrondissements  où,  depuis  la  loi  du  d4juin  i854, 


f 


(155) 

le  préfet  réunit  les  fonctions  de  recteur  et  de  sous-préfet, 
V instituteur  postulant  doit-il,  à  peine  de  tomber  sous 
P application  de  Fart.  29  de  la  loi  du  i5  unars  1850, 
adresser  au  préfet,  en  sa  double  qualité,  une  double  co- 
pie de  la  déclaration  faite  au  maire?  (Résolu  par  le  Tri- 
bunal seulement.) 

(Dubois  C,  le  procureur-général.) 

Le  sieur  Dubois,  ancien  instituteur  communal  démission- 
naire à  Bucquoy,  résolut,  en  1859,  d'ouvrir  dans  la  même 
commune  une  école  libre.  Il  adressa  en  conséquence,  le  3  oc- 
tobre 1859,  à  M.  le  maire  de  Bucquoy,  une  déclaration 
conçue  dans  les  termes  suivants  : 

«  Conformément  à  Tart.  27  de  la  loi  du  15  mars  1850, 
»  sur  l'instruction  primaire,  le  sieur  Dubois  (Pierre-Fran- 
»  çois),  ci-devant  instituteur  public  à  Bucquoy,  appelé,  par 
»  arrêté  préfectoral  en  date  du  28  septembre  dernier,  à  la 
»  direction  de  l'école  publique  de  Boisleux-St-Marc ,  et,  par 
»  suite,  démissionnaire, al'honneurdevousinformerqu'il est 
^  dans  l'intention  d'ouvrir,  à  l'expiration  du  délai  fixé  par 
»  la  loi,  une  école  libre  dans  la  commune  de  Bucquoy,  et 
»  dans  le  local  où  il  exerçait,  avant  la  construction  de  l'é- 
»  cole  publique  actuelle.  » 

Le  même  jour  il  adressait  deux  déclarations  semblables. 
Tune  à  M.  le  procureur  impérial  du  Tribunal  d'Arras, 
l'autre  à  M.  le  préfet  du  Pas-de-Calais,  remplissant,  aux 
termes  de  l'art.  8  de  la  loi  du  14  juin  1854,  les  fonctions 
de  recteur. 

Récépissés  de  ,  ces  déclarations  lui  furent  délivrés,  le  3 
octobre  par  le  maire,  le  4?  octobre  par  le  procureur  impé- 
rial, et  le  7  octobre  par  le  préfet.  Dés  le  3  octobre,  la  dé- 
claration au  maire  fut  affichée  à  la  porte  de  la  mairie  de 
Bucquoy. 

Le  7  novembre,  aucune  opposition  ne  s'était  produite; 
le  sieur  Dubois,  croyant  avoir  rempli  les  formalités  exigées 
par  la  loi  du  15  mars  1850,  art.  27,  ouvrit  son  école. 

Il  fut  cependant  traduit  devant  le  Tribunal  correctionnel 
d'Arras  pour  avoir  ouvert  une  école  libre  sans  avoir  ac- 
compli les  formalités  réglementaires ,  et  pour  avoir  ainsi 
contrevenu  aux  art.  27,  28,  29  de  la  loi  du  15  mars  1850, 
8  et  9  de  la  loi  du  14  juin  1854,  1,  2  et  3  du  décret  du  7 
octobre  1850. 

Au  soutien  de  la  prévention,  on  disait  :  L'art.  27  de  la 
loi  du  15  mars  1850  exige,  de  l'instituteur  qui  veut  ouvrir 


(156) 

une  école  libre,  une  quadruple  déclaration ,  au  mairej  au 
recteur  de  Tacadémie,  au  procurôur  inipérial  et  au  sous- 
préfet.  Depuis  la  loi  du  44  juiu  i8&4(art.  8),  le  préfet 
exerce  les  attributions  déférées  au  recteur  par  la  loi 
du  15  mars  1850,  en  ce  qui  concerne  l'instruction  pri- 
maire publique  ou  libre  ;  mais,  de  cette  modifieation  il  ne 
résulte  nullepient  que  le  nombre  des  déclarations  exigées 
de  l'instituteur  postulant  soit  réduit  à  trois,  dans  les  arron- 
dissements où  le  préfet  exerce  les  attributions  du  recteur 
et  du  sous-préfet;  dans  ce  cas,  une  double  déclaration  doit 
être  remise  au  préfet,  l'une  destinée  au  préfet-re<^teur, 
l'autre  destinée  au  préfet  représentant  du  pouvoir  poli- 
tique. Dubois  n'a  remis  qu'Une  seule  déclaration  au  préfet 
du  Pas-de-Calais  ;  il  a  ainsi  contrevenu  à  l'art.  27  de  la  loi 
du  15  mars  1850.  — Dans  tous  les  cas,  disait-on,  le  décret 
du  7  octobre  1850,  pour  l'exécution  de  la  loi  du  15  mars 
1850,  prescrit,  dans  ses  articles  1,  2  et  S,  différentes  for- 
malités que  Dubois  n'a  pas  accomplies  ;  à  ce  point  de  vue^ 
il  y  a  eu  également  contravention  de  sa  part. 
Le  Tribunal  d'Arras  rendit  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  en  principe  que  l'art.  27  delà  loi  du  15 
mars  1850  oblige  le  Français  majeur,  qui  veut  ouvrir  une 
école  primaire  libre,  à  déclarer  son  intentigii  au  maire  de 
la  Commune  où  U  veut  s'établir,  et  à  adresser  la  même  dé- 
claration au  recteur  de  l'académie,  au  procureur  impérial 
et  au  sous-préfet  ; 

y>  Qu'aucune  loi /postérieure  n'a  modifié  sait  expressé- 
ment,.soit  implicitement,  ces  prescriptions; 

»  Que  si  là  loi  du  14- juin  1854,  en  restreignant  le 
nombre  des  académies,  çi  délégué  les  attributions  des  rec- 
teurs aux  préfets  des  départements,  cette  disposition  ne 
fait  cesseï'  en  aUcuae  manière  la  nécessité  de  la  quadruple 
déclaration  prescrite  par  la  loi  de  4850; 

»  Que  chacune  des  quatre  déclarations  a  sa  raison  d'être, 
et  doit  appeler  l'attention  de  l'autorité  à  un  point  de  vue 
tout-à-fàit  distinct  ; 

3>  Que  celle  à  faire  au  recteur  a  pour  but  de  mettre  ce 
fonctionnjairç  en  demeure  de  vérifier,  au  point  de  vue  de 
l'enseignement ,  la  nationalité ,  l'âge ,  l'aptitude  légale ,  la 


(157) 

t 

moralité  et  les  auùras  conditions  imposées  par  la  loi  à 
Texercice  de  la  profession  d'instituteur  ; 

»  One  la  déclaration  faite  au  sous-préfet  a  pour  but,  au 
contraire ,  d'appeler  l'attention  de  l'autorité  au  point  de 
vue  exclusivement  politique  et  adraiiaistratif  ; 

»  Que  ces  deux  déclarations  ne  peuvent,  dès^lors,  jamais 
être  confondues  en  une  seule  ; 

»  Qu'il  n*en  saurait  être  autrement  dans  le  cas  où  le 
préfet,  investi  des  fonctions  de  recteur,  exerce  en  m^me 
temps  celles  de  sous-préfet  pour  Tarrondissement  chef- 
lieu,  et  que  la  réunion  de  deux  fonctions  bien  distinctes 
dans  les  mains  du  même  représeritant  de  l'autorité,  rie  dis- 
pense nullement  de  la  déclaration  prescrite  pour  chacune 
d'elles  ; 

Qu'en  effet ,  ainsi  qu'on  Ta  dit  plus  haut ,  les  principes 
posés  par  la  loi  ne  peuvent  pas  être  subordonnés  à  des 
circonstances  fortuites  et  varier  suivant  les  arrondissenients; 
j  Que  les  attributions  des  préfets,  représentants  iîu  pou- 
voir politique  et  administratif,  sont  tellement  distinctes  de 
celles  qu'Ua  exercent  comme  recteurs,  que  la  loi  ne  leur 
délègue  celles-ci  que  sous  l'autorité  du  ministre  de  l'ins- 
trudioa  publique  et  %m  le  rapport  dq  l'inspecteur  ; 

3>  Que  la  subdivision  du  travail  da"ns  les  préfectures,  né- 
cessitée parles  nombreuse^  attributions  des  préfets,  ne  per- 
met pas  la  confusion  des  deux  ordres  de  fonctions,  et,  par 
suite,  celle  des  deux  déclarations  ; 

»  Que  la  déclaration  faite  au  représentant  de  l'autorité 
politique  et  administrative,  qui  ne  doit  donner  lieu  qu'à  ua 
récépissé,  n'est  pas  examinée  par  le  même  mode  et  par  le 
même  fonctionnaire  ou  délégué  que  la  déclaration  faite  au 
préfet-recteur,  puisque  c'est  l'inspecteur  d'académie  que 
la  loi  charge  spécialement  de  l'instruction  des  affaires  con- 
cernant l'enseignement  primaire  ; 

»  Considérant  en  fait  que ,  de  l'iastruction  et  des  débats 
a  l'audience  du  23  décembre  1859,  il  est  résulté  la  preuve 
que  Pierre-François  Dubois  a  ouvert  une  école  à  Buquoy 
dans  le  courant  dé  novembre  dernier,  sans  avoir  fait  au 


(458)       .  ^ 
recteur  la  déclaration  prescrite  par  l'art.  27  de  la  loi  du 
i  5  mars  4  850  ; 

»  Que  la  déclaration  unique  par  lui  faite  au  préfet  et 
dont  il  lui  en  a  été  donné  récépissé ,  n'est  autre  que 
celle  qui  doit  être  faite  au  sous-préfet ,  conformément 
audit  article  ; 

»  Considérant  que ,  dans  le  même  mois  de  novembre , 
il  a  ouvert  un  pensionnat  primaire  sans  avoir  rempli  les 
formalités  légales,  et  qu'il  a  fermé  depuis  lors  ce  pensionnat; 

»  Qu'il  n'a  pas  même  en  sa  faveur  l'excuse  de  la  bonne 
foi,  puisqu'il  a  été  prévenu  à  diverses  reprises,  par  M.  le 
préfet  et  l'inspecteur  de  l'académie,  de  l'insuffisance  de  ses 
déclarations  ; 

Attendu  néanmoins  que  les  circonstances  paraissent  atté- 
nuantes ; 

»  Condamne  Dubois  en  deux  amendes  de  25  fr.  chacune  ; 

7>  Ordonne  que  l'école  ouverte  par  lui  sera  fermée.  » 

Appel  par  Dubois. 

Dans  son  intérêt,  on  combattait  d'abord  le  système  du 
jugement,  en  soutenant  que,  depuis  la  loi  du  14juin  1854, 
la  quadruple  déclaration  exigée  par  Tarticle  27  de  la  loi 
du  15  mars  1850  n'était  plus  nécessaire,  lorsque,  comme 
dans  l'espèce,  les  fonctions  de  recteur  et  de  sous-préfet  se 
réunissaient  dans  la  personne  du  préfet;  qu'en  effet,  bien 
que  le  préfet  représentât,  dans  ce  cas,  deux  pouvoirs  dis- 
tincts, le  but  de  la  loi  était  atteint,  dès  que  le  représentant 
de  ces  deux  pouvoirs  était  averti  de  l'intention  du  postu- 
lant; qu'une  seule  déclaration  au  préfet    suffisait  pour 
amener  ce  résultat.  —  On  soutenait  ensuite  que  si  Dubois 
n'avait  pas  exécuté  les  prescriptions  du  décret  du  7  octobre 
1850,  art.  1,  2  et  3,  aucune  peine  ne  pouvait  lui  être  ap- 
pliquée à  raison  de  cette  infraction;  qu'en  effet  ce  décret 
n'édicte  pas  de  peine  et  ne  pouvait  en  édicter  ;  que ,  par 
conséquent,  Dubois  devait  être  acquitté,  s'il  justifiait  avoir 
rempli  les  formalités  prescrites  par  la  loi  du  15  mars  1850. 
Cette  justification,  disait-on,  était-elle  faite?  Dubois  a  fait 
au  maire  de  Bucquoy  la  déclaration  prescrite  car  l'art.  27 
de  la  loi  ;  cette  déclaration  contient  les  indications  exigées 
par  le  même  article  ;  il  a  adressé  la  même  déclaration  au 
procureur  impérial  et  au  préfet  ;  la  loi  n'exige  rien   de 
plus,  puisqu'il  est  établi  que  la  double  déclaration  au  pré- 


(159) 

fet,  en  sa  qualité  de  recteur,  est  inutile.  En  effet ,  après 
avoir  disposé  (art.  27)  que  «  tout  instituteur  qui  veut  ou- 
j  vrir  une  école  libre,  doit  préalablement  déclarer  son  in- 
î  tenlion  au  maire  de  la  commune  où  il  veut  s'établir»,  la 
loi  ajoute  :  «  Celte  déclaration  doit  être,  en  outre,  adressée 
^  par  le  postulant  au  recteur  de  Tacadémie,  au  procureur 
»  de  la  république  et  au  préfet.  »  —  Est-ce  à  dire  que  la 
formalité  qui  est  imposée  au  postulant,  c'est  d'adresser  au 
procureur  impérial  et  au  préfet  une  copie  de  la  déclaration 
faite  au  maire?  Non;  les  termes  mêmes  de  l'article  se  re- 
fusent à  une  semblable  interprétation.  Si  telle  avait  été  la 
pensée  du  législateur,  il  est  permis  de  croire  qu'il  l'au- 
rait exprimée  et  aurait  dit  :  «  Une  copie  de  la  déclaration 
faite  au  maire,  etc.  î  II  dit,  au  contraire  :  «  Cette  déclara- 
tion »,  c'est-à-dire  la  déclaration  d'ouvrir  une  école.  C'est 
donc  une  déclaration  particulière  qui  doit  être  faite  au 
maire,  au  procureur  impérial  et  au  préfet.  —  L'unique 
but,  d'ailleurs,  que  poursuivait  le  législateur  dans  l'art.  27, 
c'était  l'avertissement  au  maire ,  au  préfet ,  au  procureur 
impérial.  Quelle  différence  y  aurait-il,  à  ce  point  de  vue, 
entre  une  déclaration  particulière  à  chacun  de  ces  fonc- 
tionnaires, et  la  remise  au  préfet  et  au  procureur  impérial 
de  la  copie  de  la  déclaration  au  maire?  —  Il  est  vrai  que, 
dans  le  système  de  la  loi,  ni  le  préfet  ni  le  procureur  im- 
périal n'ont  la  certitude  qu'une  déclaration  semblable  à 
celle  qui  leur  est  remise,  a  été  faite  au  maire  ;  mais  c'est 
précisément  pour  remédier  à  cet  inconvénient,  signalé 
dans  l'instruction  ministérielle  du  31  août  1850,  que  le 
décret  du  7  octobre  1850  a  inventé  1^  système  des  copies 
et  des  récépissés  ;  ce  sont  des  formalités  toutes  nouvelles, 
auxquelles  la  loi  du  15  mars  1850  n'avait  pas  songé,  et 
dont,  par  conséquent,  elle  n'a  pas  puni  l' inaccomplisse- 
ment. 
La  Cour,  en  confirmant,  a  rendu  l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT. 
LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  27  de  la 
loi  du  15  mai's  1850,  tout  instituteur  qui  veut  ouvrir  une 
école  libre ,  doit  préalablement  déclarer  son  intention  au 
maire  de  la  commune  où  il  veut  s'établir ,  lui  désigner 
le  local  et  lui  donner  l'indication  des  lieux  où  il  a  résidé  et 
des  fonctions  qu'il  a  exercées  pendant  les  dix  années  pré- 
cédentes; 


(160)  • 

Que  cette  déclaration  doit  être,  en  outre,  adressée  par 
le  postulant  au  recteur  de  racadémie,  au  procureur  impé- 
rial et  au  sous-préfet  ; 

Qu'elle  demeurera  affichée ,  par  les  soins  du  maire ,  à  la 
porte  de  la  mairie  pendant  un  mois  ; 

Attendu  que  Tart,  8  de  la  loi  du  14  juin  4854  a  investi 
le  préfet  des  attributions  déférées  an  recteur  par  la  loi  du 
15  mars  4850; 

Que  dès  ce  moment  la  déclaratioià ,  qui  précédemment 
devait  être  adressée  au  recteur,  a  dû  être  remise  au  préfet; 

Attendu  que  si  Dubois  a  fait,  le  3  octobre  4859,  au  maire 
de  la  commune  de  Bucquoy  la  déclaration  prescrite  par 
Tart.  27  de  la  loi  du  45  mars  4850,  il  n'a  adressé  cette 
déclaration  iii  au  préfet  ni  au  procureur  impérial  ; 

Que  néanmoins  il  a  ouvert  son  école  le  7  novembre  4859  ; 

Qu'en  ce  faisant,  il  s'est  rendu  coupable  delà  contra- 
vention prévue  et  punie  par  l'art,  29  de  la  loi  du  45:  mars 
4850;     . 

:  Attendu  que  Dubois  prétend  vainement  avoir  réitéré  au 
préfet  et  au  procureur  inapérial  la  déclaration  par  lui  faite 
le  même  jour  au  maire  de  Bucquoy,  et  avoir  ainsi  satisfait 
aux  prescriptions  de  la  loi  ; 

Que.  les  dispositions  de  l'art.  27  de  la  loi  du.  45  mars 
4850  sont  claires  et  précises  ;  qu'elles  veulent  que  la  dé- 
claration à  faire  au  maire  de  la  commune  où  l'insUtuteur 
veut  s'établir  serve  de  base  à  l'information;  que  c'est  cette 
déclaration  qu,i  doit  être  communiquée  par  le  postulant  au 
préfet  et  au  procureur  impérial ,  et  qui  doit  êti^e  affichée 
par  les  soins  du  maire  ; 

Que  des  déclarations  faites  isoléinent  aux  différents  fonc- 
tionnaires indiqués  par  la  loi  et  ne  mentionnant  même  pas 
la  décls^ratiou  faite  aumî^ire,  ne  peuvent  être,  mibàtiluées 
arbitrairement  à  l'information  prescrite  par  la  loi  ;  c^fuWles 
ne  remplissent  pas  le  vçeu  du  législateur  et  ne  jiëuvent 
atteindre  le  but  qu'il  s'est  proposé  ;  ' . 

Qu'en  admettant  hypothétiquemeat  que  lé  texte  dél'art. 
27  précité  soit  ambigu,:  le  doute  est  levé  par  l'art.  2  du 
décret  du  7  octobre  4850  ;  que  cet  article  prescrit  au  maire 


(  w  ) 

de  déliver  gratuitement  àTinstituteur,  en  triple  expédition, 
ojieodpie  légdi^  de. la  déclpratiQH,.  e^t  à, Tinstituteur ^e 
remettre  ces  copii^Sy^x  Jfeueti^^çinaire^  indiqués  par  la  loi  ; 

Que  si  le  décret  du  7  octobre  1850  n'a  pu  ajouter  aux 
prescriptions  d^e  la  loi  du  15  mars  4850,  il  a  pu  fixer  le 
sen^  dq  cette  Ipi,  ca.  régler  rexecution  et.  déterminer  dans 
(juçllei,  fome  sa  déclaration  faite.au  maire  devait  être 
adressée  au  préfet  et  au  procureur  impérial; 

Attendu  que  Dubois  n'allègue  même  pas  avoir  réclamé 
avant  le  7  novembre  4850,  du  maire  de  Bucquoy,  des  co- 
pies de  sa  déclaration  ;  que  c'e53t  seulement  le  26  novembre 
suivant  qu'il  £^  adressé  au  pro€ure.ur-iiApérial  la  çppi^,  cer- 
tifiée de  la  dédaratiott  pm  lui  ftiite  au  maire  de  Bwquoy  ; 

Qu'il  n'a  même  pa&  adressé  semblable  copie  au  préfel; 

Attendu  dès -lors  qu'en  admettan*  eom^me  suffisanl^ 
une  seuie  copie  à  adresser  au  préfet,  réunissstnt  lés  attrî- 
butiops  (Référées  au  recteur  et  au  sous-préfet,  Dubois  n'a 
pas  ren^pli  Qçtte  JfofpjiaUtp  iqupérieusement  exigée  par  la 
loi  pour  légitimer  l'ouverture  d'une  école  libre;  î. 

Attendu  de  plus  qu'il  résulte,'  de  l'instructif  içt  deg  dé- 
bats, que  Dubois,  dans  le  courant  du  inois  de  novembre 
1859,  a  ouvert  à  Bucquoy  un  pensionnat  sans  avoir  rempli 
les  formalités  exigées  par  la  loi  ; 

Attendu  que  c'est  avec  raison  que  les  priémiers  juges  ont 
déclaré  Dubois  coupable  d'une  double  contravention  prévue 
et  punîé  pai*  les'  art,  27,  29,  55,  80  de  lai  loi  du  45  mars 
1850,463  0.  pén. ,  et  qu'ils  ont  reconnu  en  sa  faveur 
l'exiçtence  de  circonstances  atténuantes  4 

Vu  l'art.  494?  G.  înstr.  crim.  ;  ';    ' 

l4 CQijir  iiiet, V:àppellalion  au  néant,  ordonné  que.leju- 
gemeut  dpnt  est  ^^PP^Ï  .sortira  effet  ;    '  •      . 

.  Ûiijftdamne  Dubois  (Pierre-Françdis)  aux  frais  de  là  cause 

Du  6  mars  4860.  Chamb.  correct.  Présid- ,  M.  D\impft; 
rapp. ,  M.  Gabiei/,  cqnseill.  ;  mini^t.  pifbl. ,  M.  Garpentïer, 
avoc-gén.  ;  avec.  M®  Merlin, 

TOME  XVIII,  41 


(462) 

NOTAIRE.  —  COMMISSAIRE-PRISEUR.  —  tENTE   DE  MEUBLES. 

— STIPULATION  DE  TERME. 

Les  commissaires-priseurs  peuvent ,  sans  sortir  de  leurs 
attribuiions  et  sans  empiéter  sur  celles  des  notaires,  pro- 
céder à  la  vente  publique  aux  enchères  d^objets  mobiliers, 
en  insérant  dans  leurs  procès-verbaux  la  stipulation  de 
terme.  (L.  27  pluv.  an  9,  art.  3.)  (1). 

(Chambre  des  notaires  de  l'arrondissement  de  Cambrai 

C.  Rohart.) 

Les  13  et  14  juin  1858,  M©  Rohart,  commissaire-priseur 
à  Cambrai,  procéda,  dans  la  commune  d'Esnes,  requête  de 
MM.  Durieux  et  C^©,  industriels  au  même  lieu,  à  la  vente 
publique  et  à  terme  d'objets  mobiliers.  Ce  fait  ayant  été 
considéré  comme  portant  atteinte  et  préjudice  aux  notaires 
de  l'arrondissement  valablement  représentés  par  la  cham- 
bre, ils  firent  assigner  M^  Rohart  devant  le  Tribunal  civil 
de  Cambrai ,  pour  s'entendre  condamner  à  3,000  fr.  de 
dommages-intérêts. 

Cette  demande  a  été  rejetée,  le  13  avril  1859,  par  le  ju- 
gement dont  voici  la  teneur  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  les  commissaires-priseurs  établis  pour 
Paris  par  la  loi  du  27  vent,  an  9,  et  pour  les  départements 
par  la  loi  de  finances  du  28  avr.  1816 ,  ont  qualifié  pour 
procéder  aux  ventes  mobilières  ;  qu'il  n'est  fait  aucune  dis- 
tinction entre  les  ventes  au  comptant  et  les  ventes  à  terme  ; 

Que  le  doute  n'est  venu  qu'à  raison  de  la  prohibition 
des  anciennes  ordonnances  relativement  à  la  vente  à  terme; 

», Attendu  que,  nonobstant  cette  prohibition,  la  vente  à 
terme  «tait  passée  en  usage  sous  l'empire  des  ordonnances; 
qu'en  ne  faisant  aucune  distinction  entre  les  ventes  au 
comptant  et  les  ventes  à  terme,  la  loi  du  27  vent,  a  voulu 
consacrer  cet  usage  ; 

»  Attendu  que  l'esprit  de  la  loi  de  ventôse  s'est  révélé 


(V.  sur  cette  question  les  consultations  publiées  par  le  Jùumal  de^ 
Notaires  1859,  p.  199,  661  et  suiv.,  avec  les  arrêts  Paris  25  juin  1840 
V.  en  sens  contraire  :  Gaen  24  juin  1847  (S.  V.  49, 2,  583). 


(m) 

dans  les  lois  subséquentes,  dans  celle  de  1841  qui  règle 
les  attributions  des  courtiers  de  eommeirce  et  leur  confère 
le  droit  de  procéder  aux  ventes  à  terme  aussi  bien  qu'aux 
Ventes  au  comptant;  dans  celle  du  15  juin  1851,  qui  con- 
fère aux  coramissaires-priseurs ,  concurremment  avec  les 
notaires,  le  droit  de  procéder  soit  au  comptant,  soit  à  terme> 
aux  ventes  des  fruits  et  récoltes  pendants  par  racines  et 
de  coupes  de  bois  taillis,  dont  l'importance  est  générale- 
ment plus  considérable  que  celle  des  ventes  mobilières 
ordinaires  ; 

>  Attendu  que  la  vente  du  commissaire-priseur  réunit 
toutes  les  conditions  du  contrat  de  vente,  comme  celle  du 
notaire  ;  que  le  terme  pour  payement  ne  modifie  pas  le 
contrat  et  ne  peut  donner  lieu  à  une  distinction  qui  ne 
résulte  pas  de  la  loi  de  ventôse  et  se  trouve  repoussée  par 
les  lois  subséquentes  ; 

>  Attendu  que  si  le  contrat  passé  devant  le  conHnissaire^- 
priseur  n'a  pas  la  forcé  exécutoire  dont  est  revêtu  le  con- 
trat notarié,  ce  n^est  pas  une  raison  pour  en  conclure  que 
le  commissaire-priseur  ne  peut  pas  le  recevoir  ;  qu'il  n'ap- 
partient qu'à  la  partie  de  choisir  entre  le  notaire  et  le 
commissaire-priseur,  comme  d'opter  entre  le  contrat  au- 
thentique et  le  contrat  sous  seing-privé  ; 

»  Attendu  qu'on  île  peut  tirer  argument  des  art.  624  et 
625  C.  pr.  civ.,  qui  ont  rapport  à  des  ventes  faites  dans  des 
conditions  toutes  spéciales,  et  par  un  poursuivant  qui  n'est 
pas  propriétaire  des  objets  vendus  ; 

>  Attendu  qu'il  n'y  a  lieu  à  accorder  des  dommages- 
intérêts  ; 

>  Par  ces  motifs,  le  tribunal  déboute  les  demandeurs 
de  leurs  fins  et  conclusions  ;  dit  qu'il  n'y  a  pas  lieu  à  dom- 
mages-intérêts ;  condamne  les  demandeurs  aux  dépens.  » 

Appel  par  la  chambre  des  notaires.  Pour  eux  il  est  dit 
devant  la  Cour  : 

Les  notaires  sont  institués  par  la  loi  pour  rédiger  les 
contrats,  acter  les  conventions,  leur  donner  force  exécu- 
toire. (L.  25  vent,  an  9,  art.  1«.) 

Nul  ne  peut,  en  l'absence  d'un  texte  formel,  s'immiscer 
dans  ces  attributions.  Vendre  à  terme,  c'est  évidemment 


(iU) 

acter  une  conTention»  pui^ue  la  durée  et  les  conditions  de 
ce  terme  se  trouvent  par  là  réglées  entre  le  vendeur  et 
Tacquéreur  ;  par  suite,  les  commissaires-priseurs,  institjiiés 
uniquement  pour  faire  les  ventes  au  comptant  où  ne  se  ren- 
contre aucune  convention,  ne  peuvent,  en  principe  général, 
stipuler  des  termes  sans  empiéter  sur  le  droit  exclusif  du 
notariat.  En  effet,  ainsi  que  le  reconnaissent  les  premiers 
juges,  la  législation  première,  réglementaire  de  leurs  attri- 
butions, leur  imposait,  sôus  peine  de  responsabilité,  l'o- 
bligation de  faire  les  ventes  au.comptant;  loin  que  Tusage 
ait  dérogé,  un  acte  de  notoriété  du  25  mai  170d  a  rappelé 
cette  obligation,  et  un  arrêt  de  la  Grande  chambre,  du  25 
novembre  4763,  en  a  réprimé  Tin  fraction.  La  loi  du  27  ven- 
tôse an  9,  et  celle  du  28  avril  1816,  n'ont  fait  que  rétablir 
les  commissaires-priseursdans  leurs  anciennes  attributions. 
Il  est  si  vrai  qiie  les  stipulations  d'un  terme  leur  sont  de- 
meurées étrangères,  que  les  art.  624  et  625  C.  proc.  ont, 
par  voie   de  conséquence   et  par  application  du  principe 
général,  rappelé  la  nécessité  de  la  vente  au  comptant  ;  d'ail- 
leurs l'on   comprend  difficilement  comment  les  commis- 
saires-priseurs  pourraient  faire  autre  chose  que  constater 
un  fait  consommé  et  cotnpliet,  la  venté  au  comptant,   et 
insérer  dans  leurs  procès- verbeux  des  conventions  quel- 
-cooques.  Ea  effet  le  notaire,  qui  seul  a  reçu  cette  mission 
de  rédiger  les  convenlionô,  ne  l'accomplit  que  $ous  la  foi 
de  garanties  multiples.  Il  ne  peut  acter  qu'avec  le  concours 
d'ui;i  second  notaire  ou  de  témoins ,  en  recevant  la  signa- 
ture des  parties  ;  aussi  ses  actes  sont-ils  revêtus  de  la  for- 
mule exécutoire.  Au  contraire  ,  le    comniissaire-priseur 
procède  seul,  sans  secoiid,  sans  témoins,  sans  la  signature 
des  parties,  et,  par  suite,  ses  procès- verbaux  n'ont  aucune 
force  ni  vcftu.  Dès-lors,  pour  pouvoir  sortir  de  la  vente  au 
comptant  et  stipuler  un  terme  ou  toute  autre  condition, 
par  dérogation  à  ces  principes  si  formels^  le  commissaire- 
priseur  doit  produire  un  texte  de  loi  clair  et  catégorique. 
Ce  texte  existe ,  51  est  vrai ,  pour  deux  sortes  de  ventes  : 
celles  des  fruits  et  récoltes  pendants  par  racines,  et  des 
iioupes  de  bois  taillis  (L*  du  6  Juin  4854)  ;  et  cell^  d^es mar- 
chandises neuves  (L.  du  17  avril  1812  et  du  26  juin  1841)  ; 
ce  sont  là  dee  exceptions  commandées  <et  justifiées  par  la 
nature  des  choses,  les  ventes  de  récoltes  se  faisant  à  la 
campagne  pour  objets  d'une  certaine  valeur,  et  les  ventes 
^e  infurchapidises  neuves  n'ayant  Heu  que  sur  réflenient 
fi^yiêté  pf^r  le  Tribunal' et  par  i(b4$  de  1,600  fr.  au  moins. 


(165) 

Au  surplus,  lès  exceptions  ne  font  que  confirmer  la  réglé 
générale ,  puisque  •  la  oontrariété  de  celle-ci  commande 
seule  de  les  créer. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  du  Tribunal  de  Cambrai. 

ARRÊT. 
LA  COUR  ;  — Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  met 
l'appellation  au  néant ,  ordonne  que  le  jugement  dont  est 
appel  sortira  son  plein  et  entier  eifet,  condamne  les  appe- 
lants, etc. 

Du  25  avril  1860.  1^  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  1er 
présid.;  minist.  pubL,  M.  Morcrette,  !«*  avoc.-gén.  ;  concl. 
conf.;  avoc,  M^s  Talon  et  Dupont;  avou.,  M«9  Genevoise 
et  Poncelet. 


VENTE  AVEC  RENTE  VIAGÈRE  ET  JOUISSANCE  DE 
L'IMMEUBLE  VENDU.  —  interprétation.  —  carac- 
tères.—  RÉPARATIONS  d'eNTRETIEN. 

» 

Le  veiideur  qui  a  stipulé  pour  prix,  de  son  immeuble  vendu, 
lajouissanceàson  profit  de  cet  immeuble  jusqu'à  son  décès, 
sans  aucune  indemnité  de  loyer,nico7itributionSy  etc^ 
plus  une  rente  viagère  qui  lui  sera  payée  sans  aucune 
espèce  de  retenue  à  quelque  titre  que  ce  soit^  ne  s'est 
point  par4à  même  exonéré  des  obligations  de  l'usufruitier 
ordinaire  (605,  606  C.  Nap.). 

Il  est  tenu  de  toutes  les  charges  de  V&ntretieti. 

Le  nu-propriétaire  peut  le  contraindre^  pendant  la  durée 
de  l'usufruit,  à  faire  les  réparations  nécessaires  à  V  en- 
tretien de  la  chose  (1). 

(Dubois  C.  Pottiez.) 

L'abbé  Dubois  était  propriétaire  à  Saint-Omer  d'une 
maison  avec  jardin^  sise  rue  des  Tanneurs.  II  la  vendit , 
le  4  mars  1855,  aux  époux  Pottiez.  Le  prix  de  la  vente  fut 
500  fr.  de  rente  viagère,  et  la  jouissance  de  la  propriété 
jusqu'au  décès  de  Dubois.  Le  eonti^at  se  taisait  sur  les  répa- 

raticms  d'entretien.  Il  y  était  dit,  toutefois,  que  la  rente 

■  »  1 1 1  I  I  1 1 1  i     'I     ■  iiiii     I  I    I  I* iiiiÉi    « 

(i)  Y.  Cass.  27  juin  1825  (S.  Y.  Coll.  nouv.  à  ^a  date). 
Contra,  Amiens  i^t  juin  1822  (loc,  cit.);  Montpellier  7 juin  1831  (S.  V. 
3^,  2,  10);  Perrière,  Cont.  de  Paris,  art.  262;  Bourjon,  Repart.,  p.  7, 
31  et  suiv.  ;  Proiidltôn,  ïio872  ;  Hennequin,  p.  434. 


(166) 

viagère  serait  payée  sans  aucune  espèce  de  retenue  ;  que 
la  jouissance  serait  sans  aucune  indemnité  de  loyer,  et  que 
Dubois  ne  payerait  aucune  imposition  ou  contribution. 

Au  mois  de  juillet  dernier,  Pottiez  fît  nommer  en  référé 
trois  experts  qui  constatèrent  que  des  réparations  étaient 
à  faire  à  l'immeuble  :  les  unes  par  suite  de  vétusté ,  d'au- 
tres par  suite  de  négligence  ou  de  défaut  d'entretien.  Il 
assigna  Dubois,  et  sur  cette  demande  intervint  le  jugenaent 
suivant  ; 

JUGEMENT. 

«Considérant  que  le  contrat  précité  porte  vente  à  Pottiez 
d'un  jardin  avec  maison  sous  réserve  au  profit  du  vendeur 
de  l'usufruit  de  l'immeuble,  et  payement  en  sus  d'une  rente 
viagère  de  500  fr.  ; 

»  Qu'en  droit  l'usufruitier  est  tenu  de  toutes  les  charges 
d'entretien  (art,  605  et  606  du  Gode  Nap.  )  ; 

»  Que  le  contrat,  en  dégrevant  l'usufruitier  de  la  charge 
des  impôts,  a,  par  cette  restriction,  confirmé,  et  d'autant 
plus  relativement  à  l'entretien,  l'application  desdits  articles  ; 

>  Qu'il  est  de  jurisprudence  incontestée  que  le  nu-pro- 
priétaire peut  contraindre  l'usufruitier,  pendant  la  durée  de 
l'usufruit,  à  faire  les  réparations  nécessaires  à  la  conserva- 
tion de  la  chose  ; 

i>  Considérant  qu'il  a  été  constaté,  tant  par  l'expertise 
que  par  l'examen  des  lieux  et  les  documents  du  procès  y 
que  les  murs  d'enceinte  de  la  partie  supérieure  du 
fonds ,  ont  été  dégradés  par  défaut  d'entretien  ; 

»  Condamne  Dubois  à  effectuer  les  réparations ,  etc.  > 

Appel  par  Dubois. 

Au  soutien  de  l'appel  on  disait  :  Le  contrat  notarié  du 
4  mars  1855,  par  lequel  le  sieur  Dubois  a  vendu  à  l'intimé 
sa  maison  et  son  jardin  de  la  rue  des  Tanneurs,  moyennant 
une  rente  viagère  et  annuelle  de  500  fr. ,  ne  pouvait  avoir 
qu'un  but  :  c'était  d'assurer,  par  cette  rente  intégralement 
payée  et  régulièrement  servie,  l'avenir  du  vendeur.  Celui-ci 
n'a  nulle  autre  ressource.  Comme  le  vendeur  gardaitla  jouis- 
sance de  la  maison,  ila  bien  fallu  que  le  mot  usufruitse  trouvât 
dans  l'acte  ;  mais  est-ce  un  usufruit  ordinaire  ou  une  jouis- 
sance de  nature  spéciale ,  c'est-à-dire  sans  charges  d'entre- 
tien, à  la  condition  seulement  de  jouir  en  bon  père  de  fa^ 


(167) 

fflille?  Cela  parait  être  là  vérité,  et  ne  faut-il  pas,  dans  les 
conventions,  rechercher  quelle  a.  été  la  commune  inten- 
tion des  parties  contractantes ,  plutôt  cuie  s'arrêter  au  sens 
littéral  des  termes  ?  N'a-t-on  pas  dû  calculer  le  coût  de  Fen- 
tretien  locatif  y  dans*  ce  qufon  a  appelé  indemnité  de  loyers. 

On  discutait  ensuite  le  caractère  de  certaines  réparations, 
et  on  demandait  subsidiairement  à  prouver  que  Pottiez 
avait  fait  les  réparations  de  1855  à  4858.. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  — Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  sans 
qu'il  y  ait  lieu,'par  conséquent,  de  s'arrêter  aux  conclusions 
subsidiaires  de  l'appelant ,  non  plus  qu^à  Fôfifre  de  preuve 
de  faits  déjà  contredits  par  les  documents  de  la  Cour  ; 

Met TappellaticH  au  néant;  déboute  Dubois  de  ses  con- 
clusions, tant  subsidiaires  que  principales  ; 

Confirme  le  jugement ,  ordonne  qu'il  sortira  son  entier 
effet ,  et  condamne  rappelant,  etc. 

Du  23  avril  1860.  l^e  chamb.  Présid.  M.  de  Moulon, 
1"  présid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  l^^  avoc.-génér.  ; 
avec. ,  M«8  Emile  Flamant  et  Coquelin  ;  avou. ,  M«s  Debeau- 

mont  et  Lavoix. 


FRANÇAIS.  — RÉUNION  et  séparation  de  territoires.  — 

DÉCLARATIONS  LÉGALES.  —  FAIT  DE  LA  NAISSANCE.  —  RE- 
CRUTEMENT DE  l'armée. 

Est  étranger  t(mt  individu  né  en  France  dun  père  qui,  né 
lui-même  en  France,  est  fils  d'étranger  devenu  Français 
par  habitation  du  sol  ou  par  réunion  de  territoire,  et 
ensuite  redevenu  étranger,  en  1814,  par  séparation  de 
territoirey  alors  que  ni  Vun  ni  Vautre  n'ont  fait,  dans  les 
délais  légaux  de  la  loi  de  i8i4  et  du  Cod.  ïfap. ,  la  dé-- 
claration  de  vouloir  se  fixer  en  France  ou  de  devenir 
Français,  (C.  Nap.,  art.  9,  L.  14  oct.  1814,  art.  1.)  (1). 

(i-2)  Cette  décision  est  contraire  à  quatre  arrêts  rendus  dans  les 
mêmes  circonstances  par  la  Cour,  les  1er  et2  juin  1855  (Jurisp.  13. 218). 
A  roccasion  de  ces  arrêts  et  d'un  autre  qui  les  avait  précédés,  18  déc. 
1854  (Jurisp.  13,  70),  nous  avons  résumé  Tétat  de  la  jurisprudence  de 
la  Cour  de  Douai  et  fait  ressortir  quelles  modifications  la  loi  du  7  février 
1851  avait  pu  apporter  aux  lois  antérieures  sur  la  nationalité,  en  ce  qui 


.  (168) 

Ainsi  le  pefHt-^is  dé  UélrangîBr,  devenu- FranQai^  et  redevenu 
ensuite  étranger,  a  pil,  quoique^  fié  en  Ff^nce,  farwtie 
déda/ration  faite  dans  Vannée  qui  a  suivi  sa  mccj&rité , 
réclmner  utilement  laqmMté  d'étranger  pour  n^étr^  pas 
soumis,  en  France,  à  la  loi  du  recrnêement  de  tafmée. 
(L.  7  fév.  1854,  art.  1.)  (2). 

(Préfet  du  Nord  C.  Lebeau.  ) 

Un  sieur  Nicolas  Lebeau  est  né  en  1769,  dans  la  partie 
autrichienne  de  la  commune  de  Gognies-Chaussée,  de  père 
et  mère  autrichiens.  Il  vint,  en  1793,  habiter  la  partie 
française  de  la  même  commune ,  alors  d'ailleurs  que  le 
décret  du  25  mars  de  la  même  année  avait  rendu  français 
le  lieu  ou  il  était  né.  Il  eut  pour  fils  Louis-Joseph  Lebeau, 
né  en  France,  En  1814-,  la  partie  autrefois  autrichienne  où 
était  né  Nicolas  Lebeau  étant  réunie  au  royautne  des  Pays- 
Bas,  lui  et  son  fils  mineur,  Louis-Josefh  Lebeau,  quoi- 
qu'ils continuent  de  résiéer  en  France ,  cessent  d'être 
Français^  par  le  iflotif  que  le  prenaier  n'a  pas  rempii  les 
formalités  prescrites  par  la  loi  du  14  octOOTe  1814,  pour 
conserver  la  qualité  de  Français.  D'un  autre  côté,  le  second 
n'a  pas  usé  dubéhëfice  de  i'art.  9  C.  Nâp.  pour  réclamer 
tîette  qualité . 

Dé  Louis-Joseph  Lebeau,  continuant  de  résider  en  France, 
est  né,  en  France,  Léopold  Lebeau.  Celui-ci,  le  14  jnin 
1859,  déclare,  à  la  mairie  de  Gognies-Chaussée,  qu'il  veut 
profiter  de  la  faculté  à  lui  laissée  par  la  loi  du  7  février 
1851  'de  rester  étrnug^.  H  n'en  ^t  pas  moins  compris  dans 
le  contingent  de  l'armée  ;  mais  il  assigne  le  /préfet  du  Nord 
devant  le  Tribunal  civil  d'Avesnes  pour  voir  déclarer  qu'il 

est  étranger. 

-  '  •-  '         •      -,     •  • 

toucliait  le  pecratemsiit  de  l'armée.  V.  les  notes  frtiMiées  au  bas  de  ces 
arrêts  (loc.  cit.) 

La  décision  d'amoiird'hai  rejette  le  principe  si  absolument  admis  par 
celles  des  1er  et  2  juin  1855 :  que  la'  règle  du  droit  ancien,  pos''e  par 
Pottier,  Traite  des  personnes  (lit.  ^^scci.  i) ,  qui  déroge  au  principe 
que  le  fils  mineur  suit  la  condition  de  son  père,  était  re&tèe  en  vigueur 
jusqu'à  la  promulgation  du  Gode  Napoléon  ;  qae  te^naftt  tout  du  fait  de 
sa  naissance,  Tenfant  né  sur  notre  sol  n'avait  pas  été  dépouillé  d'un  droit 
personnel  par  le  cliangement  de  nationalité  de  son  père,  parce  que 
celte  nationalité  n'avait  aucune  influence  sur  sa  qualité. 

Le  juçement  du  Tribunal  d'Avesnes  pose  au  contraire  en  principe  que 
le  fils  mineur  a  suivi  la  condition  de  son  père,  alors  que  celui-ci  est  re- 
devenu étranger  par  la  séparation  des  téfiritoires,  et  la  Cour  s'est  Tangée 
à  cet  ans,  malgré  l'opinion  soutenue  par  le  ministère  public.  EFle  revient 
ainsi  ù  la  jurisprudence  déjà  consacrée  par  ses  arrêts  de  IS^S,  1849, 
4'^50  et  1854. 


(469) 

Le  Tribunal,  accueillant  ^ette  demande,  a  rendu  la  sen- 
tence ilont  la  teneur  suit  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  tous  les  habitants  de&  paysrénnis  à  la 
France  depuis  1 791 ,  n*ont  pu  conserver  la  nationalité  fran- 
çaise, e'n  vertu  de  la  loi  du  14  octobre  1814,  qu*à  la  con- 
dition de  faire  la  déclaration  prescrite  par  cette  loi  dans  le 
délai  de  trois  mois  ;  . 

»  Attendu  que  la  privation  de  ta  qualité  de  Français,  con- 
séquence nécessaire  du  démembrement  du  territoire,  a 
frappé  tout  à  la  fois  le  père  et  ses  enfants  mineurs  ;  que 
l'état  du  père  du  réclamant  s'est  donc  trouvé  fixé  comme 
celui  de  son  aïeul ,  par  cela  seul  que  Tun  n'a  pas  usé  du 
bénéfice  de  la  loi  de  1814,  et  l'autre  de  l'art.  9  G.  Nag.  ; 
que  le  réclamant*  est  donc  foTidé  à  se  prévaloir  de  l'art,  l^r 
de  la  loi  du  7  février  1851 ,  pour  se  faire  reconnaître  étranger; 

»  Le  Tribunal  dit  que  LéopoM  Lebeau  est  étranger  ; 
dépens  à  sa  charge.  » 

Appel  par  le  préfet.  Pour  soutenir  que  Lebeau  (Léopold) 
est  Français,  l'organe  du  ministère  public,  portant  la  parole 
au  nom  du  préfet  du  Nord ,  s'appuie  sur  îe  principe  aue 
sous  le  droit  ancien  et  en  vertu  des  constitutions  de  1791, 
1793  et  1795,  tout  individu  né  en  France  était  Français. 
Suivant  M.  l'avocat-général ,  Louis-Joseph  Lebeau,  né  en 
France  sous  le  régime  de  ce  droit,  au  moment  où  son  père 
était  lui-même  Français, a  conservé  cette  qualité,  malgré 
toute  séparation  dé  territoire  survenue  en  1814.  Si  la  loi  du 
14  octobre  a  soumis  à  certaines  formalités  l'individu  étran- 
ger qui,  devenu  Français  en  vertu  de  la  réunion  des  terri- 
toires, veut  conserver  cette  qualité,  même  après  leur  sépa- 
ration, cette  disposition  n'est  applrcable  qu'à  ceux-là  seuls 
qui  ne  détenaient  leur  qualité  que  du  fait  de  l'annexion , 
et  qui  pouvaient  la  perdre  par  un  fait  contraire,  et  non  à 
ceux  qtii  avaient  obtenu  cette  qualité  à  tout  autre  titre.  Or, 
Louîs-loséph  Lebeau^  péré  du  réclamant,  était  Français  par 
le  seul  fait  de  sa  naissance;  son  fils  est,  par  suite,  resté  îui- 
rnêrae  Français.  Il  n'y  a  donc,  dans  les  circonstances  de 
cette  cause,  à  s'occuper  ni  du  fait  de  la  séparation  des  terri- 
toires en  1814,  ni  de  la  loi  du  14  octobre  de  cette  même 
année,  ni  même  de  la  loi  du  7  février  1851  .La  qualïtc  de 


(170) 

Français  s'est  attachée  à  Louis  Lebeau  par  sa  naissance  ; 
son  fils,  en  suivant  sa  condition,  n'a  pu  aevenir  étranger. 

On  répondait  au  ministère  public  que  si  Louis-Joseph 
Lebeau,  père  du  réclamant,  était  né  en  France  d'un  père 
qui  alors  était  devenu  Français,  il  n'en  était  pas  moins  mineur 
en  1814,  c'est-à-dire  à  l'époque  où  son  pèr©  était  redevenu 
étranger  par  la  séparation  des  territoires,  et  que,  mineur, 
il  avait  nécessairement  suivi  la  condition  de  son  père;  que 
iils  d'étranger  né  en  France,  il  n'avait,  pour  reconquérir  la 
qualité  «de  Français ,  rien  fait  de  ce  que  commandaient  m 
m  constitution  de  Tan  8,  ni  la  loi  du  14  octobre  1814,  ni 
l'article  9  du  G.  Nap.  ;  qu'il  était  donc  étranger  et  non 
Français. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  du  Tribunal  civil 
d'Avesnes* 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  — Adoptant  les  motifs  des  .premiers  juges  ,. 
met  l'appellation  au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet  ;  condamne 
l'appelant,  etc.  Les  dépens  à  la  charge  de  l'intimé  (1). 

Du  25  avril  1860.  l''^  chamb.  civ.  Présid.,  M,  de  Moulon, 
lor  prés.  ;  minist.  publ. ,  M.  Morcrelte ,  l^r  avoc.-génér.  ; 
avoc,  Me  Pillion  (du  barreau  d'Avesnes) ;  avou* ,  M®  Huret. 

Le  même  jour,  arrêt  identique.  (Le  préfet  du  Nord 
C.  Hénaut.  ) 

lo  TRANSCRIPTION.  —  quittances  de  loyers  non  échus. 

—  FAILLITE.   —   BAILLEUR  ET  LOCATAIRE.  —  SYNDICS.   

TIERS     OU   AYANTS  CAUSE.  —    INSCRIPTION    HYPOTHÉCAIRE 
CONSERVATOIRE. 
2o  FAILLITE.  —  PAYEMENT  DE   LOYERS   NON  ÉCHUS.  —  VALI- 
DITÉ. —  ABSENCE  DE  FRAUDE  ET  CONNIVENCE. 

i^  Ne  sont  pas  assujetties  à  la  transcription,  pour  pouvoir 
être  opposées  aux  syndics  d'une  faillite,  les  quittances  de 
loyers  non  échus,  délivrées  par  le  bailleur ^  avant  sa  fail- 
lite, en  compensation  de  sommes  dont  il  était  débiteur 
envers  son  locataire.  (L.  23  mai  1855,  art.  2  et  3.)  (2). 

(1)  Y.,  sur  la  condamnation  aux  dépens,  les  arrêts  du  2  juin  1855. 
(Jurisp.  loc.  cit.) 

(2)  L'art.  3  de  la  ici  du  %3  mai  1855  dit  que  les  actes  et  jugements 


(171) 

Dans  ce  cas,  les  syndics  d'une  faillite  potirraienl-ils  être 
considérés,  en  droit,  comme  des  tiers,  dans  le  sens  de 
l'art.  S  de  la  loi  du  22  mai  i855f  Ne  sont-ils  pas  plutôt 
les  ayants-cause  du  failli?  (Non  résolu.) 

Les  syndics,  en  opérant  l'inscription  de  Vart.  490  C.  corn. y 
ne  font  qu'un  acte  conservatoire  dans  V intérêt  de  la  masse 
créancière ,  lequel  ne  suffirait  pas  pour  décliner,  vis-à- 
vis  de  la  faillite,  la  validité  des  quittances  de  loyers  non 
échus,  qui  n' auraient  pas  été  transcrites. 

2*^  Le  locataire,  en  avançant  à  son  bailleur,  sur  les  loyers  à 
échoir,  des  fonds  qui  ont  aidé  celui-ci  à  remplir  ses  obli- 
gations, dans  U7i  temps  plus  ou  moim  rapproché  de  sa 
faillite,  ne  fait  pas  un  payement  qui  puisse  être  annulé. 
—  //  n'en  peut  être  de  ce  payement  comme  de  celui  qui 
serait  fait  par  le  débiteur  à  l'un  de  ses  créanciers  au 
pryudice  des  autres;  alors  d'ailleurs  que  la  connivence 
et  la  fraude  n'ont  pas  été  démontrées  avoir  préjudicié  à 
la  masse.  (C.  cora.,  art.  447.) 

(Syndics  de  la  faillite  B.  CarlieretA.Legay  C.  Duprez.) 

Les  syndics  de  la  faillite  B.  Cartier  et  A.  Legay,  de  Ba- 
paume  ,  ont  réclamé  d'un  sieur  Duprez  le  payement  de 
deux  termes  de  loyer  d'une  brasserie  appartenant  à  la 
faillite,  et  échus  depuis  la  déclaration.  Cette  déclaration 
avait  eu  lieu  le  2avfill858,  et  la  iaillite  avait  été  repor- 
tée au  15  janvier  1858, 

L'ouverture  de  la  faillite  personnelle  du  gérant,  B.  Car- 
lier,  avait  été  fixée  au  27  octobre  1857. 

A  la  demande  des  syndics,  Duprez  a  répondu  qu'il  avait 
payé  à  B.  Carlier  une  somme  de  16,500  fr.  imputables  par 
anticipation  sur  les  loyers  qu'on  lui  demandait.  Il  a  pré- 
senté deux  quittances  sous  seing-privé. 

énumérés  en  Fart.  2 ,  par  conséquent  les  quittances  de  loyers  non 
échus,  ne  pourront  être  opposés  aux  tiers  qui  ont  des  droits  sur  l'im- 
meuble.  Le  commissaire  du -gouvernement,  lors  de  la  discussion  de  cet 
article  au  Corps  législatif,  en  a  rappelé  le  principe  déjà  posé  dans  la 
législation  antérieure  au  Gode  NapQléon.  c  il  résulte  des  termes  de  cet 
»  article,  a-t-il  dit,  que  jusqu'à  la  transcription ,  les  droits  résultant 
)  d'actes  ou  de  jugements  ne  pourront  être  opposés  aux  tiers  qui  ont 
»  des  droits  sur  l'immeuble,  et  qui  les  ont  conservés  en  se  conformant 
»  aux  lois,  ce  qui  exclut  les  créanciers  chirographaires,  puisqu'ils  n'ont 
>  pas  de  droit  sur  Timmeuble.  »  Les  syndics  peuvent  agir  au  nom  de 
la  masse  ou  au  nom  du  failli  ;  ils  ne  le  peuvent  pas  au  nom  d'un  créan- 
cier hypothécaire.  —  Ils  ne  pouvaient  donc  opposer  ici  la  non  trans- 
cription des  quittances. 


(in) 

La  première,  en  date  du  2  septembre  1857,  enregistrée 
à  Arras  le  29  janvier  1859,  était  ainsi  conçue  : 

«  Je  soussigné  reconnais  que  M.  Eugène  Duprez,  mori 
»  successeur,  m'a  payé,  pour  prix  du  droit  de  bail  que  j'ai 
»  aliéné  en  sa  faveur,  une  somme  de  dix  raille  francs  en 
»  valeurs,  et  moyennant  laquelle  somme  j'ai  reconnu  et 
»  reconnais  avoir  renoncé  à  tous  loyers  de  la  brasserie  qu'il 
»  occupe,  pendant  trois  années,  c'est-à-dire  jusqu'au  i^^ 
»  octobre  18G0. 

))  Bapaume,  2  sept.  1857.  Signé  B.  Carubr.  » 

La  deuxième,  en  date  du  13  janvier  1858,  enregistrée 
à  Arras  le  même  jour  que  la  précédente,  était  aussi  sous 
seing-privé  dans  les  termes  suivants  : 

«  Je  soussigné  reconnais  avoir  reçu  et  remis  à  M,  Jules 
»  Carlier  des  valeurs  créées  par  la  société  B.  Cartier  et 
j>  A.  Legay,  et  acceptées  par  M.  Mâchez  de  Garvin,  sous 
»  la  responsabilité  de  M.  Duprez,  brasseur,  mou  succes- 
»  seur  ;  ces  valeurs  comportant  une  somme  de  6,500  fr. 
»  Je  viens  autoriser  M.  Duprez,  au  cas  où  il  serait  obligé 
»  d'effectuer  le  payement  de  cette  somme,  d'en  faire  l'ap- 
»  plication  sur  le  prix  des  années  de  location  de  ma  bras- 
»  série  à  échoir  en  1861  et  1862. 

»  Bapaume,  13  janvier  1858.        Signé  B.  Carlier.  » 

Poyr  contester  la  validité  de  ces  actes,  les  syndics  s'ap- 
puyaient principalement  sur  des  circonstances  de  fait.  Sui- 
vant eux  : 

Les  valeurs  énoncées  dans  la  quittance  du  13  janvier 
1858  n'existaient  pas  à  cette  époque  ;  elles  n'ont  été  créées 
que  le  30  janvier  suivant,  pour  faire  fraude  aux  créanciers. 

Les  quittances  étaient  écrites  sur  un  papier  timbré  dont 
le  millésime  au  filigrane  démontrait  l'antidate. 

Elles  n'avaient  pas  de  date  certaine  avant  la  déclaration 
de  faillite  ;  elles  ne  pouvaient  donc  être  opposées  aux  tiers, 
et  les  syndics  étaient  des  tiers. 

Elles  étaient  frauduleuses  :  elles  avaient  été  faites  pour 
la  cause. 

Différents  faits  de  fraude  étaient  encore  articulés. 

Duprez  les  a  déniés  etademandéà  prouver  les  payements 
qu'il  avait  réellemeût  effectués. 

Les  syndics  ont  persisté  dans  leurs  fins  en  payement  de 
1,875  fr.  pour  deux  termes  échus  de  loyer  de  la  brasserie 
Carlier. 

Le  1er  mars  1860,  le  Tribunal  civil  d' Arras,  saisi  de  la 
contestation,  prononce  un  jugement  par  lequel  il  déclare 


que  les  pay<înîents  aRégtiés  par  Dupréz  ne  sonf  pas  dés  ce 
moment  justifiéfe,  mais  par  lequel  il  l'admet  à  prouver  par 
témoins  le^  fajl$î4:.qii'il;ïarticule,  et  tendant  à  démontrer 
qu'il  a  fait  à  B.  Qarlier  des  avances  telles  qu'elleB  compor- 
tent 16,500  fr.  devant  être  compensés  par  anticipation  sur 
les  loyers  de  la  brasserie. 

Il  le  déclare  non  recevabîe  sur  d'autres  chefs. 

Appel  de  ce  jugement  est  porté  devant  la  Cour  par  les 
spdics.  Pour  eux  il  est  dit  :  C'est  à  tort  que  les  premiers 
juges  ont  admis  la  preuve  testimoniale  dans  la  cause  ;  la 
créance  invoquée  par  Duprez  n'est  aucunement  commer- 
ciale, et  les  quittances  de  Carlier  ne  peuvent  fonder  un 
commencement  de  preuve  par  écrit.  Il  est  aussi  maintenu 
que  ces  quittances  sont  frauduleuses  et  par  suite  annu- 
lables. Pour  Duprez,  au  contraire,  on  offre  toujours  la 
preuve  de  &és  payements.  On  soutient  qu'avant  tneme  cette 
preuve,  il  doit  être  considéré  comme  libéré  en  vertu  des 
quittances  qu'il  produit,  lesquelles  ne  sont  que  le  résultat 
d'opérations  licites^  bien  loin  d'être  entachées  d'aucune 
fraude.  Enfin,  les  syndics  opposent  à  l'intimé  un  moyen 
tiré  de  la  loi  du  ^3  mars  1855.  Suivant  eux,  les  quittances, 
si  elles  pouvaient  être  opposées  aux  syndics,  devraient  être 
transcrites. 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Statuant  sur  les  appels  respectifs  des 
parties  : 

Attendu  qu'il  est  dès  à  présent  établi  par  les  documents 
du  procès  que  Duprez,  locataire  par  bail  authentique  de  la 
brasserie  de  Benjamin  Gariier,  a  en  effet  acquitté ,  de  ses 
propres  deniers,  au  profit  de  celuinci,  à  valoir  sur  le  mon- 
tant des  loyers  à  échoir,  une  somme  de  16,500  fr.,  savoir  : 
10,000 fr.  endeuxmandats  de  5,000  fr.  chacun,  et  6,500  fr. 
pour  des  traites  qu'il  a  éû  solder,  comme  caution,  en  vertu 
de  l'engagement  qu'il  avait  pris  ; 

Attendu  quô  les  justifiieations  produites  à  cet  égard,  en 
ne  bissant  aucun  doute  sur  la  réalité  de  ces  versements, 
dispensent  de  recourir  à  l'étiquete  ordonnée  par  les  pre- 
Hiiers  juges  et  qui  serait  désormais  frustratoire  ; 

Attendu  que  les  syndics  de  la  faillite  Carlier   ne  sau~ 


(iU) 

raient,  poiir  repousser  cette  imputation ,  se  prévaloir  du 
défaut  de  transcription  des  quittances  de  loyer  données  à 
Duprez  par  Carlier,  envers  lequel  il  s'était  libéré  par  antî* 
cipation  jusqu'à  concurrence  de  la  somme  ci-dessus  meïi-* 
tionnée  ; 

Attendu  que  la  loi  du  23  mars  1855  est  inapplicable  ici  ; 
que,  sans  rechercher  si  les  syndics,  en  réclamant  des  loyers 
à  Duprez,  du  chef  du  failli,  n'agissaient  pas  uniquement 
comme  ayants-cause  de  ce  dernier,  et  s'ils  peuvent  être 
considérés  comme  des  tiers,  dans  le  sens  de  cette  loi ,  il 
est  évident  qu'elle  a  pour  objet  de  sauvegarder  l'intérêt  de 
ceux  qui  ont  acquis  un  droit  réel  sur  l'immeuble ,  et  de 
prévenir  des  surprises  nuisibles  aux  acquéreurs  ou  aux 
préteurs;  que  l'inscription  même  qu'auraient  prise  les 
syndics,  en  vertu  de  l'art.  490  G.  comm.,  ne  serait  qu'une 
mesure  puremeut  conservatoire  en  faveur  de  tous  les  in- 
téressés, et  dont  on  ne  saurait  s'armer  contre  aucun  d'eux  ; 
que  si,  pour  empêcher  des  collusions,  et  à  cause  de  la  sus- 
picion attachée  aux  cessions  et  aux  payements  anticipés  de 
loyers,  les  actes  qui  les  constatent  ont  aussi  été  assujettis  à 
la  transcription  pour  être  opposables  aux  tiers,  on  ne  ren- 
contre ici  aucune  présomption  de  cette  nature,  et  qu'au 
contraire  les  payements  effectués  par  Duprez  ne  pouvaient 
préjudicier  à  personne  ; 

Attendu  que  cette  dernière  considération  suffirait  pour 
écai'ter  l'application  des  art.  1167 G.  Nap.  et  Ml  G.  comm., 
invoqués  par  les  syndics  ; 

Qu'en  effet,  loin  qu'il  y  ait  ici  le  moindre  indice  sérieux 
de  dol  ou  de  fraude,  ou  d'une  manœuvre  clandestine ,  les 
conditions  dans  lesquelles  les  traites  ont  été  payées  excluent 
jusqu'au  soupçon  d'une  connivence  intéressée;  qu'on  ne 
prouve  point  que  Duprez  ait  eu  alors  connaissance  de  la 
véritable  situation  de  Benjamin  Garlier,  et  qu'il  importe 
peu,  d'ailleurs,  que  ce  dernier  ait  profité  de  ces  sommes 
à  une  époque  plus  ou  moins  rapprochée  de  la  cessation  de 
ses  payements,  puisque  le  locataire,  en  avançant  à  son  bail- 
leur, sur  des  loyers  à  échoir,  des  fonds  qui  l'aident  à 
remplir  ses  obligations,  ne  peut  évidemment  être  assimilé 


(175) 
au  débiteur  qui ,  lorsque  sa  faillite  est  imminente ,  rem* 
Bourse  un  de  ses  créanciers  au  préjudice  des  autres  ; 

Qu'une  saine  appréciation  des  faits  conduit  donc  à  re- 
pousser comme  inadmissible,  en  droit  et  en  équité,  la  pré- 
tention des  syndics; 

Par  ces  motifs  et  sans  qu'il  y  ait  lieu,  par  conséquent,  de 
statuer  sur  les  conclusions  subsidiaires  de  Duprez  : 

La  Cour,  émendant,  infirme  aux  deux  chefs  par  lesquels 
le  Tribunal  déboute  Duprez  de  ses  conclusions  principales, 
et  ordonne  une  enquête  ;  le  surplus  du  jugement  sertis- 
sant effet  ; 

Déclarent  les  syndics,  en  cette  qualité ,  mal  fondés  dans 
leur  demande ,  fins  et  conclusions  ;  les  en  déboute  et  les 
condamne  aux  dépens  des  deux  instances,  etc. 

Du  25  avril  1860.  l^e  chamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon, 
l«rprésid.;  minist.  publ. ,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén., 
concl.  conf.  ;  ayoc,  M«s  Talon  et  Pellieux;  avou.,  M«sDe- 
beaumont  etHuret. 


TESTAMENT.  —  interprétation.  —  contrat  de  mariage. 

—  donation   aux  époux.     —    COMMUNAUTÉ    LÉGALE.    — 
AVANTAGES. 

Si  des  époux,  s^  étant  mariés  sotis  le  régime  de  la  commu- 
nauté telle  qu'elle  est  régie  par  le  Code  Napoléon,  avec 
donation  au  profit  du  mari  de  la  moitié  en  v^tfruit  des 
immeubles  que  la  femme  délaissera  à  son  décès,  la  femme 
donne  ensuite  à  son  mari,  par  testament,  une  rente  via- 
gère, différentes  sommes  et  divers  objets  mobiliers  de  la 
communauté,  en  disant  que  «  ces  legs  seront  confondus 
avec  les  donations  qu'elle  a  faites,  à  quelque  titre  que 
ce  soit,  par  son  contrat  de  mariage,  ^  les  avantages  faits 
au  mari  doivent  être  limités  aux  legs  résultant  du  tes- 
tament. 

Le  mari  ne  peut  les  cumuler  avec  la  moitié  des  objets  de 
la  communauté. 

Encore  moins  peut-il  prétendre  à  cette  moitié  sans  charge 
de  dettes. 

R  en  est  ainsi,  alors  surtout  que  le  mobilier  de  la  commu- 
nauté a  été  apporté  en  entier  par  la  femme,  et  que  le 
passif  de  cette  communauté  est  supérieur  à  V  apport  de 
la  fenême.  (G.  Nap.,  art.  1156  et  1474.) 


(176) 

(Detrez  C.  Leffrand.) 

Les.  répoux  jpelrez  s^  sqn.t  marines  après,  ayau^  rédigé  Içurs 
convenlioas  matrimoniales  comme  il  suit  :  4°  ils  adoptent 
le  régime  de  la  communauté  légale,  tel  qu'il  est  rédigé  par 
le  Code  civil  ;  2^  les  biens  du  futur  époux  consistent  dans 
ses  meubles pei*sôniïels,  qui  sont  exclus  de- la  communauté; 
3»  les  biens  de  Ift  future  épouse  comprennent'  ses  meubles 
corporels,  son  argenterie,  ses  Jbijoux,  se&  meubles  de  mai- 
son et  son  mobilier  d'exploitation  :  le  tout  évalué  30,000 
fr.  environ;  A^  une  fçrmeen  bçnétat  et  21  hectares  66  ares 
de  manoir  et  terres  labourables,  situés  à  Diéval;  5^  dona- 
tion au  mari  de  la  moitié  en  usufruit  des  immeubles  que 
la  future  épouse  délaisserait  à  son  décès  sans  charge  de 
donner  caution',  mais  avec  état  des  lieux,  lequel  usufruit 
cesserait  d'avoir  effet,  en  cas  de  secondes  noees. 

Partest^mnçnt.du  4  avriH857)  la  dame  DelrQ?  a  insti- 
tué .pour  sa  légataire  universelle  .la  dame  Legr^i3,d,  sa 
nièce,  à  qui, elle  a  doçné  et  légué. la  toute  propriété  dès 
biens  meubles  et  immeubles  qu'elle  délaisserait  au  jour  de 
son  décès,  sous  réserve  de  legs  particuliers  et  de  charges 
diverses.  Elle  a  donné  à  Detrez,  son  mari  :  1^  la  toute  pro- 
priété de  divers  objets  mobiliers  détaillés  en  un  inventaire 
et  d'une  impoï-tance  de  4,473  fr. ;  3o  d'autrèfi  objets  en 
usufruit  seulement  et  évalués  192  fr.  ;  3»  les  labours  et  se- 
mences sur  3  hectares  36  ares  de  terre  à  son  choix,  d'une 
valeur  de  489  fr.  ;  4«  l'usufruit  de  certaips  objets  dont  la 
la  nue^propriélé.aété  léguée  à  la  dame  Decroix,  épouse 
de  François  Carlier^  eçtimé,65&fr,  ;  et  5«  une  somme  de 
1,500  fr.  payables,  600  fr>  ^près  squ  décès,  et  1,000  fr. 
en  deux  autres  payement?  :  au  total  4,202  fr,       .  . . 

Par  le  même  testament ,  la  i^m^  Detrez  a  fait  divers 
Içgs  à  la  dame  Decroix  et  douîié  encore  h  5on  mari  une 
reçte  annuelle  et  viagère  de  1 ,200  fr.  paphl^  par  semes- 
tre, avec  faculté  pour  lui  de  h  feire  élever  è.  1,5Q0  fr., 
s'il  abandonnait  l'usufruit  des  terres  et  pâtures.. 

Ei;ifm,  par  un  C()ditile  daté  du.  14  avril  1857>  la. dame 
Detrez  complète  les  legs  qu'elle  a  faitsik.son.ipaariet'à  la 
dame  vCariier,  de  façon  que  eelie-cî  ei^tlôgfttaire.;  .49  de 
divers  objets  mobiliers  d'une  valeur  de  722  fr*  ;  2^^  <îe  di- 
vers objets  do»t  l'usufruit  est\  à  Detrez,  et  qui  soirt  é-y^lttés 
655  fr..;  S»  d'une  3QmmQ  de  2,000  fr,  payable»  par  quart 
d'anaée  eu  année.  La  testatrice  charge  en  outrera  léga- 
taire universelle  de .  payer  toutes  les  dettes  de  la  commu- 


(177) 

sauté  extstaQt  entre  elle  et  son  mari,  ainsi  que  les  frais  de 
dépôt  de  son  te^atmant,  droits  de  oiutation,  etc.,  et  elle 
ajoute  :  n  Je  yeux  q^ue  ces  legs  se  confondent  avec  la  do- 
»  nation  que  j'ai  faite  à  mon  mari  par  notre  contrat  dp 
»  mariage.  » 

Au  décès  de  sa  f^rame,  Detrez  a  prétendu  avoir  droit 
noa-seulement  à  la  délivrance  des  legs  qu'elle  lui  avait 
faits  par  testament,  mais  encore  à  la  moitié  de  la  commu- 
nauté, sans  càarge  de  dettes,  en  vertu  de  son  conimt  de 
msffiage.  La  dam$  Legrand,  légataire  universelle,  a  soutenu 
au  contraire  que  la  confusion  devait  s*o^;)érer  entre  les  legs 
faits  au  mari  par  le  testament  et  le  codicille  et  les  avantages 
qu'il  pouvait  retirer  de  son  contrat  de  mariage,  et  que  ces 
avantages  ne  consistaient  pas  seulement  dans  l'usufruit  de 
la  moitié  des  immeubles  de  sa  femme,  mais  aussi  dans  la 
mise  (Hi  comirtunauté  par  celle-ci  d'une  somme  de  80,000 
fr.,  alors  que  le  mari  n'y  avait  rien  apponfcé;  Là  légataire 
ufli^rselle  pr^étendait  ainsi  que  la  volonté  de  la  dame  De^ 
Irez  avait  .éié  çje  réduire  les  avantages  coaférés  à  son  mari 
à  l'ioiportance  des  legs  qu'elle  lui  faisait,  en  le  çrivant  de 
tous  droits  dans  la  communauté.  Detrez  répondait. que  l'a- 
doption du  régime  de  la  communauté  légale  ne  pouvait  être 
considérée  comme  uûe  donation  ni  un  avantage,  alors  sur- 
tout que  la  dame  Detrez  apportait,  dans  cette  communauté, 
des  dettes  supérieures  à  son  actif  mobilier.  Ge  dernier  fait 
était  contesté  f)ar  la  dame  Legrand ,  demanderesse  au  pro- 
cès. Le   mobilier  de  la  communauté  s'élevait  d'ailleurs  â 
33,690  fr.  Detrez  devait-il  toucher  laipoitié  decette  somme 
en  la  cumulant  avec  les  legs  à  lui  faits  par  sa  femme  ?  Le 
Tribunal  de  Saint-Pol  a  rendu,  le  6  septembre  1859,  la 
sentence  suivante  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  la  prétention  de  li)uis-JosepIî  Detrez 
tendrait  à  cumuler  les  avantages  contenus  dans  son  contrat 
de  mapiage  avec  ceux  plus  considérables  résultant  pour  lui 
du  te&^an^ent  et  du  codidllè  faits  en  sa  £a^ieur  par  Sophie- 
AngustiHB'^Joseph  Soyez,  sa  femme,  lesdits  testament  et 
codicîUe,  endateà  JDiéval,  le  premier  du  4  afvrill857^  le 
^aeooaid  du  li5  Cévriet  1859,  et  déposés  tous  deux,  en  vertu 
de  Fc^tlonnanoe  de  M.  le  président  du  Tribunal  de  céan^, 
endâtédu>9  dactit  .iriois.demsa*^,  en  l'étude  de  Me  Detape, 

TOME  XV III.  12 


(178) 

notaire  à  la  résidence  de  Saint- Pol^  aux  termes  d'un 
acte  dressé  par  ce  notaire  le  14  dudit  mois  de  mars; 
»  Que  celte  prétention  est  évidemment  contraire  aux 
dispositions  dudit  testament,  où  la  testatrice  dit  en  termes 
formels  :  c  Je  veux  que  toutes  les  donations  faites  à  mon 
mari  se  confondent  avec  celles  que  je  lui  ai  faites,  à  quel- 
que titre  que  ce  soit,  par  notre  contrat  de  mariage  »  ;  que 
cette  clause,  d'après  ses  termes  seuls,  indique  assez  que  la 
dame  Detrez-Soyez  a  voulu  que  son  mari  eût  à  opter  entre 
les  droits  que  lui  confèrent  son  contrat  de  mariage  et  ceux 
qui  résulteraient  pour  lui  du  testament  ;  que  si  ces  termes 
n'étaient  pas  suffisamment  explicites,  l'intention  de  la  tes- 
tatrice ressortirait  clairement  de  la  saine  interprétation  de 
l'ensemble  des  divers  actes  ci- dessus  mentionnés;  qu'en 
effet,  Louis  Detrez  prétend  à  la  moitié  du  mobilier  de  la 
communauté  qui  a  été  apporté  en  totalité  par  la  testatrice, 

lors  de  son  contrat  de  mariage  ;  c'est  donc  un  avantage 
qu'il  veut  retirer  de  ce  contrat.  Si  la  testatrice  avait  voulu 
qu'il  en  fût  ainsi ,  aurait-elle  commencé  par  lui  léguer  des 
objets  mobiliers  dépendant  de  cette  communauté  et  s' éle- 
vant à  une  valeur  de  4',202  fr.  50  c. ,  pour  ne  laisser  à  la 
légataire  universelle,  chargée  d'acquitter  toutes  les  dettes, 
-que  la  moitié  de  ce  mobilier  ainsi  réduit ,  surtout  lorsque 
le  mobilier  pris  dans  son  entier  est  encore  beaucoup  insuf- 
fisant pour  payer  les  dettes? 

Considérant  que  la  prétention  de  Louis-Joseph  Detrez  a 
pour  but  non-seulement  de  cumuler  ces  avantages  tes- 
tamentaires avec  ceux  que  lui  donnaient  les  conventions 
matrimoniales  ,  mais  encore  d'augmenter  ces  derniers , 
puisqu'il  réclame  d'abord  la  part  du  mobilier  légué ,  plus 
la  moitié  du  reste,  sans  charge  de  dettes,  tandis  que,  d'a- 
près le  contrat  de  mariage,  il  n'aurait  eu  droit  qu'à  la 
moitié  de  cette  communauté,  déduction  faite  du  passif  qui, 
dans  l'espèce,  excède  l'actif;  que  si  Sophie-Augustine-Jo- 
seph  Soyez  a  voulu  qu'après  sa  mort,  son  mari  eût  une 
vieillesse  heureuse  et  tranquille',  en  lui  assurant  le  mobi- 
lier et  une  pension  yiagére,  nécessaires  à  ses  besoins,  sans 
avoir  à  entrer  dans  des  détails  d'affaires  et  d'administra* 


-  (179)        , 

lion,  on  ne  peut  supposer  qu'elle  ait  voulu  faire  à  sa  nièce 
un  legs  universel  dérisoire,  puisqu'il  se  réduirait  à  rien,  et 
enrichir  ensuite  la  famille  de  son  mari  aux  dépens  de  la 
sienne  ;  que  ces  dispositions  n'ont  rien  d'illégal  ;  que  rien 
ne  s'opposait  en  effet  à  ce  que  la  dame  Soyez  mît,  aux  libé- 
ralités faites  à  son  mari,  les  conditions  rationnelles  qui  se 
trouvent  dans  son  testament  ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  jugeant  en  matière  ordinaire 
et  en  premier  ressort,  dit  et  ordonne  que  le  testament  dé 
Sophie- Augustine-Joseph  Soyez,  en  date  du  4  avril  4857, 
et  son  codicille  en  date  du  15  février  4859,  sus-rappelé,  re- 
cevront leur  entière  exécution,  en  ce  sens  que  tous  les 
droits  de  Louis-Joseph  Detrez ,  tant  dans  la  communauté 
qui  a  existé  entre  lui  et  ladite  feue  Sophie-Augustine-Jo- 
seph  Soyez  que  dans  la  succession  de  la  testatrice,  seront 
limités  aux  legs  particuliers  qu'ils  contiennent  en  sa  faveur  ; 
à  plus  prétendre ,  le  déclare  mal  fondé  ;  donne  acte  au 
demandeur  ès-noms  et  qualités  qu'il  agit,  de  ce  qu'il  con- 
sent la  délivrance  desdits  legs,  et  Texécution  dans  tout  leur 
contenu  desdits  testament  et  codicille  ; 

»  Condamne  Louis-Joseph  Detrez  en  tous  les  frais  et 
dépens  de  l'instance.  3> 

Appel  par  Detrez.  Pour  lui ,  il  est  dit  devant  la  Cour  : 
Il  résulte,  des  termes  du  testament  de  la  dame  Detrez , 
que  la  seule  confusion  que  la  testatrice  voulût  opérer,  c'é- 
tait celle  des  legs  en  usufruit  avec  la  donation  en  usufruit 
déjà  faite  au  contrat  de  mariage.  Or,  il  n'y  a  dans  le  con- 
trat qu'une  donation ,  celle  de  la  moitié  en  usufruit  des 
imnaeubles  que  délaissera  la  femme.  L'adoption  du  régime 
en  communauté  n'y  est  pas  qualifiée  donation,  et  jamais 
en  effet  ce  régime ,  même  avec  apports  inégaux,  n'a  cons- 
titué une  donation.  Par  son  testament,  la  dame  Detrez  n'a 
donc  pas  voulu  priver  son  mari  de  la  moitié  de  l'actif  de 
la  communauté.  Elle  ne  le  pouvait  d'ailleurs,  puisque  la 
loi  lui  défendait  de  modifier  les  dispositions  de  son  contrat 
de  mariage.  Elle  pouvait  sans  doute  laisser  à  son  mari 
l'option  entre  la  stipulation  de  son  contrat  de  mariage  et 
les  legs  de  son  testament;  mais  cette  pensée  de  le  soumet- 
tre à  cette  option  ne  se  trouve  exprimée  ni  dans  le  testa- 
ment, ni  dans  le  codicille.  Ces  trois  actes  doivent  simulta- 


(180) 

nément  avoir  leur  eCet ,  ce  qui  comporte  seulement  la 
confusion  de  certaines  donations  spéciales,  c'est-à-dtre  la 
confusion  de  la  donation  de  la  naoitié  des  immeubles  avec 
les  legs  en  usufruit.  Aller  plus  loin,  c'est  méconnaîtra  Tin- 
tention  de.  la  testatrice. 
La  Cour  a  confirmé  le  jugement  du  Tribunal  de  Saint-Pol. 

ARRÊT. 
LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant;  ordonne  que  le  jugement  sor- 
tira son  plein  et  entier  effet  ;  condamne,  etc. 

Du  25avriH860.  i^^  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon, 
4erprésid.;  minisl.  publ.,  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.  ; 
avoc,  M«»  Duhem  et  Coquelin  ;  avou.,  M®»  Huret  et  Gene- 
voise^ 

40  HYPOTHÈQUE  LÉGALE.  —  communauté.  —  faillite. 

—  CRÉANCE.  —  DATB  CERTAINE. 
2o  FAILLITE*  —  INSCRIPTION  HYPOTHÉCAIRE, 

4°  L'hypothèque  légale  de  la  femme  mariée,  en  cas  de  fail- 
lite de  son  mari,  peut,  pour  les  obligations  conéretctées 
avec  lui  et  résultant  d'actes  sous  seing-privé  sans  date 
certaine,  s* exercer  vis-à-vis  des  créanciers  de  cette  faillite, 
du  jour  même  des  obligations.  (C.  Nap.  2435,4328.)  (1). 

En  cas  d'admission  des  créances  de  la  femme  au  passif  de 
la  faillite,  les  créanciers  chirographaires  ou  les  sytndics, 
ayants  cause  du  faiUi ,  sont ,  dans  to'us  les  cas ,  srnis 
droits  pour  refuser  feicercice  de  l'hypothèque  légaUe  (2). 

2»  L'inscription  hypothécaire  prise  par  le  syndic  d'une 
faillite  dans  l'intérêt  de  la  masse  sur  les  immeubles  du 
failli,  conformément  à  Vart.  490  C.  comm.,  n'a  pas  pour 
effet  de  conférer  aux  créanciers  un  droit  hypothécaire 
qui  puisse  modifier  la  position  de  cJiacun  d'tux  au  mx>- 
ment  de  l'ouverture  de  la  faillite  (3). 

(Boileux,  femme  Arnouts,  C.  syndics  Arnouts.) 

Par  un  arrêt  du  29  janvier  4857,  la  Cour  de  Douai  (Ju- 

risp.  45,  99)  a  jugé  que  Thypothéque  légale  de  la  femme 

"  ■  ■  '  ■      -• — - — ■ —  - 

(1-2)  V.  sur  ces  questions  les  arrêts  indiqués  plus  haut  (Jurisp.  15, 
97,  et  Jurisp.  17, 105). 

(3)  Un  arrêt  de  la  Cour  de  Cassation,  29  décemb.  i%5S  (S.  V.  1859, 
t.  209),  est  contraire  à  cette  doctrine.  (Vide  conf,  suprà,  p.  170,  iffaire 
Duprez  c.  syndic  Carlier.) 


(181) 

raaiiée  peut  â*exercér  pour  les  dettes  qu'elle  a  contractées 
avec  son  mari,  bien  que  les  actes  constatant  ses  obligations 
n'aient  acquis  date  certaine  que  dans  les  dix  jours  qui  ont 
précédé  Tepoqùe  à  laquelle  a  été  fixée  l'ouverture  de  la 
faillite.  —  Mais  elle  a  jugé  en  même  temps  (même  arrêt, 
Im.  cit.)  que  cette  hypothèque  ne  peut  s'exercer  que  si  les 
actes  constatant  les  obligations  ont  acquis  date  certaine 
avant  le  jugement  déclaratif  de  la  faillite  ;  que,  dans  ce  cas, 
les  créanciers  sont  des  tiers  vis-à-vis  d'elle  et  non  des 
ayants  cause. 

La  Cour  suprême  a  prononcé  la  cassation  de  l'arrêt  (C. 
Nap.  45  mars  4850,  Jurisp.  17,  105)  en  jugeant,  au  con- 
traire: que,  lorsqu'il  s'agit  de  l'admission  de  la  créance 
hypothécaire  de  la  femme  à  la  faillite,  il  suffit,  à  l'égard  de 
la  masse  chirographaire ,  que  l'obligation  d'où  naît  cette 
créance  ait  une  existence  certaine  à  une  date  antérieure  à 
la  faillite  ;  qu'en  conséquence  la  femme  peut  exercer  son 
hypothèque  légale  à  l'égard  des  créanciers  chirographaires 
du  mari  déclaré  en  faillite ,  lorsqu'il  est  reconnu  'par  les 
syndics  que  l'obligation  par  elle  contractée  envers  un  créan- 
cier de  son  mari  et  d'où  naît  sa  créance ,  est  antérieure  à 
h  faillite^  même  sans  date  certaine. 

La  Cour  d'Anaiens,  devant  laquelle  le  renvoi  a  eu  lieu 
après  cassati(Mi,  vient  de  juger  aussi,  et  d'une  manière  plus 
générale,  que  la  femme  a  l'hypothèque  légale  pour  l^s  obli- 
gations ccmtractées  solidairement  avec  sou  mari  avant  la 
faillite  de  celui-ci.  : 

Nous  croyons  devoir  reproduire  cette  décision  à  raison 
de  son  importance,  relative  surtout  à  l'arrêt  de  Douai  du" 
^  janvî^4857.  L'arrêt  d'Amiens  décide  d- ailleurs  j  dans^ 
ses  termes,  que  les  syndics  ne  sont  pas  des  tiers  vis-à-vî» 
du  failli 9  niais,  bien  ses  ayants  cause;  que  l'inseriplion 
prise  au  nom  de  la  masse  j  en  vertu  de  l'art.  490  C.  eomm.^ 
n'a  pour  objet  que  la  conservation  du  gage  commun,  et  ne 
confère  à  aucun  des  créanciers  chirographaires  un  droit 
particulier  qui  puisse  modifier  les  positions  respectives  de 
chacun  ée  ces  créanciers  au  moment  de  l'ouverture  de  la 

faillite. 

ARRÊT; 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que ,  par  suite  de  la  faillite  du 
sieur  Ar»oiJts,  déclarée  le  5  août  4854,  sa  f^mme  a  ob- 
ieau  sa  sépaflratbn  de  biens  et  a  fait  procédei-  à  la  liquida- 
t'\m  de  ses  droils  devant  M^  Vasï^eîte,  notaire  à  ce  commis; 


(18â) 
que  là,  en  présence  des  syndics  de  la  faillite  de  son  mari, 
elle  a  demandé  à  faire  figurer,  dans  le  montant  de  ses  re- 
prises matrimoniales,  en  exécution  de  l'art.  1431  C.  Nap., 
trois  créances  résultant  pour  elle  d'obligations  qu'elle  au- 
rait contractées  avec  son  mari,  savoir  :  4°  50,000  fr.,  mon- 
tant de  trois  billets  souscrits  par  les  époux  Arnouts  au  pro 
fit  des  Urselines  d'Arras,  billets  portant  la  date  du  i^r  avril 
1851 ,  sans  date  certaine  avant  la  faillite;  2»  24,000  fr., 
montant  d'une  reconnaissance  souscrite  par  les  mêmes  au 
profit  d'un  sieur  Legillon,  reconnaissance  portant  la  date 
du  23  février  1854,  sans  date  certaine  avant  la  faillite  ;  3« 
et  177,073  fr.  restant  dus  sur  une  créance  plus  forte  d'un 
sieur  de  Baillencourt,  de  Tournai ,  contre  Arnouts  et  cau- 
tionné par  la  dame  Arnouts ,  suivant  acte  sous  seing-privé 
en  date  du  28  mars  1850,  sans  date  certaine  avant  la 
faillite  ; 

Attendu  que  les  syndics  de  la  faillite  Arnouts  déclarè- 
rent, lors  du  procès-verbal  de  liquidation,  qu'ils  n'admet- 
taient la  créance  de  la  dame  Arnouts  qu'éventuellement  et 
à  conditioii  qu'elle  justifierait  du  payement  d'obligations 
verbales  par  elle  souscrites  avec  son  mari,  et  que,  de  plus, 
ils  se  réservaient  d'établir  qu'elle  n'avait  pas  d'hypothèque 
légale,  parce  que  les  obligations  n'avaient  pas  de  date  cer- 
taine avant  la  faillite  ; 

Attendu  que,  dans  cet  état  de  la  contestation ,  il  y  a  lieu 
d'examiner  si  les  syndics  sont  bien  fondés  à  repousser  la 
demande  de  la  dame  Arnouts  ; 

Attendu  que  Pexistence  et  le  contexte  des  ad;es  sous  seing- 
privé  dont  cette  dame  se  prévaut  ne  sont  pas  méconnus  ; 
qu'ils  ont  été  exhibés  aux  syndics,  qui  ont  admis  au  passif 
de  la  faillite  les  créanciers  qui  en  sont  porteurs;  qu'en 
principe  général,  ces  titres  qui  font  foi  contre  le  sieur  Ar- 
nouts, ont  la  même  valeur  contre  ses  simples  créanciers , 
qui  ne  sont  que  ses  ayants  cause  ;  que ,  sans  doute ,  les 
créanciers  pourraient  attaquer  ces  actes  comme  simulés  et 
ayant  été  faits  par  des  débiteurs  en  fraude  de  leurs  droits , 
mais  que,  dans  l'espèce,  ils  se  bornent  à  insinuer  la  possi- 
bilité de  la  fraude ,  sans  demander  à  en  faire  la  preuve  ; 


(183) 

que,  dèS'lorSy  les  actes  par  lesquels  le  sieur  Arnouts  s'est 
engagé  leur  sont  également  opposables  ; 

Attendu  que  les  syndics,  comme  représentant  la  masse 
des  créanciers  chirographaires,  ne  pourraient  invoquer  l'art. 
1328  G.  Nap.  pour  exciper  du  défaut  de  date  certaine  sur 
les  billets  qu'on  leur  oppose  qu'autant  qu'ils  seraient  des 
tiers,  c'est-à-dire  que,  comme  créanciers  hypothécaires 
ou  à  tout  autre  titre,  ils  auraient  acquis,  avant  la  faillite 
du  sieur  Arnouts,  un  droit  spécial  sur  les  immeubles  ;  que 
telle  n'est  pas  leur  situation,  puisque,  simples  créanciers, 
ils  ne  peuvent  avoir,  hors  le  cas  de  fraude,  plus  de  droits 
que  le  failli  lui-même  ;  que  vainement  ils  veulent  se  pré- 
valoir de  l'inscription  générale  prise  sur  les  biens  du  sieur 
Arnouts  au  nom  de  la  masse,  en  vertu  de  l'art.  490  G. 
comm.  ;  que  cette  inscription ,  prise  après  la  faillite ,  n'a 
pour  objet  que  la  conservation  de  leur  gage  commun,  et 
ne  confère  à  aucun  d'eux  un  droit  particulier  qui  puisse 
modifier  les  positions  respectives  de  chaque  créancier  au 
moment  de  l'ouverture  de  la  faillite  ; 

Attendu  que,  dans  ces  circonstances,  la  dame  Arnouts 
ayant  contracté  valablement  des  obligations  avec  son  mark 

dans  l'intérêt  de  la  communauté,  a  droit  à  une  indemnité,. 

et  que  poi:^r  cette  indemnité  l'art.  2135  G.  Nap.  lui  accorde 

sans  inscription  le  bénéfice  de  l'hypothèque  légale  sur  les 

biens  de  son  mari,  à  compter  du  jour  des  obligations  par 

elle  contractées  ; 

Attendu  que  si ,.  en  cette  matière,  la  fraude  peut  être 
trop  aisément  pratiquée,  il  serait  inique  toutefois  d'enlever 
à  la  femme  les  garanties  que  la  loi  lui  assure  en  la  plaçant 
hors  du  droit  commun  ; 

Attendu,  au  surplus  et  en  fait,  qu'il  résulte  des  conclu- 
sions prises  par  les  syndics  devant  tous  les  degrés  de  juri- 
diction ,  qu'ils  n'ont  jamais  contesté  les  créances  dont  il 
s'agit  comme  ayant  en  elles-mêmes  une  existence  certaine 
avant  l'ouverture  de  la  faillite ,  et  que  dès-lors  elles  sont 
nécessairement  garanties  par  l'hypothèque  légale  accordée 
à  la  femme  ; 

Par  ces  motifs,  met  l'appellation  et  ce  dont  est  appel  ait 


(184) 
néant,  en  ce  que  le  T^^ibunal  d'Arras  a  déclai'é  que  la  dame 
Arnouts  n'a  pas  d'hypothèque  légale  relativement  aux  dettes 
non  constatées  par  actes  ayant  date  certaiûe  ;  —  dit  que  la 
dame  Arnouts  a  hypothèque  légale  pour  sûreté  dé  la  créance 
de  reprises  résultant  des  indemnités  à  elle  dues  à  raison 
des  trois  dettes  dont  s'agit ,  contractées  soUdairemetit  avec 
sonmariy  qui  ne  sont  pas  constatées  par  actes  ayant  date 
certaine  en  la  forme  indiquée  par  l'art.  1828  C.  Nap.^  etc. 

Du  26  mars  4860.  C.  d'Atnîens.  —  Charrib.  têuii.  — 
Présid.,  M.  Poirel,  1er  présid.;  rainist.  puH. ,  M.  Becot, 
avoc.-gén.,  concl.  conf.  ;  avoc,  M«*  Daussy  et  Hébert  (du 
barreau  de  Paris).  • 

BREVET  D'INVENTION.  ---  ëêritIer  ou  AYAr^T-cAtSE.  — 

BREVET  ÉTRANGÈtl. 

Eêt  valable  le  brevet  pris  en  France  par  Vhéritter  ou  ayardr 
cause  du  breveté  à  V étranger  pour  la  mente  invention, 
(L.  5  juillet  1844,  art.  29.)  (1). 

(Brunfaut  frères  et  C^e  C.  la  Société  des  hauts  fourneaux 

de  Denain  et  d'Anzin.  ) 

Nous  avons  rapporté  (Jûrisp.  17,  282)  un  arrêt  qui>  ju- 
geant cette  question,  a  été  l'objet  d'un  pourvoi  en  cassa- 
tion. On  se  fondait,  pour  attaquer  l'arrêt  4^  la  Cour  de 
Douai  :  1»  sur  ce  que  le  brevet  était  nul  comme  pris  en 
France  pour  une  invention  déjà  brevetée  eti  pays  étt-ânger, 
et  cependant  délivré  en  France  au  nom  d'un  autre  feWVèté; 
2®  sur  ce  qtie  M.  Haut  n'avait  pas,  dans  sa  VlBmandë^  rap- 
pelé le  brevet  pris  en  Belgique  par  Brunfatit ,  ni  éxmimé 
qu'il  agissait  comme  ayant-bause  de  son  beau-^re  ;  o^  sur 
ce  que  la  Cour  de  Douai  avait  admis,  sur  de  simples  pré- 
somptions, que  Hant  avait  agi  au  nom  de  Brunfaut  et  non 
pour  son  propre  compte.  On  opposait  enfin  uii  dernier 
moyen,  tiré  de  ce  que  l'arrêt  attaqué,  après  avoir  décidé 

■    I  I  1,11  I  ,  ,    •         r  I n   i-nii,' 

(1)  La  Cour  de  Douai  (V.  son  arrêt  loc.  et/.),  en  Adoptant  )es  metifs 
du  jugement  du  Tribunal  de  Valeneiennes,  avait  été  plus  loin  :  elle 
avait  admis  que  le  brevet  étranger,  pris  en  France  par  nri  mandataire, 
était  valable  et  profitait  an  mandant.  La  Cour  de  cassation  ne  parais- 
sant pas  aussi  favorable  à  cette  doctrine,  constate  gue  Hant,  qui  a  pris 
le  brevet  en  France ,  était  non  le  mandataire,  mais  Y  ayant-cause  de 
Bfûnfàut.  La  Cour  de  Douai  avaiti  dit  :  fnandataire  et  a^ant-^amè. 


(185) 

que  le  brevet  belge  et  le  brevet  français  s'applicjaalent  au 
même  inventeur ^  auraient  néanmoins ,   contrairement  à 
Tari.  29  de  la  loi  de  1844,  fait  survivre  le  brevet  français 
au  brevet  belge. 
La  Com'  a  rejeté  le  pourvoi  par  un  arrêt  ainsi  conçu  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;-^  Sur  les  premier  et  deuxième  moyens  réunis 
tirés  de  la  violaftion  des  art.  6  et  i9  de  la  loi  du  5  juilliît 
1844;  4985,  1342,  4355, 1821  du  Code  Napoléon,  en  ce 
que  Farrêt  attaqué  a  décidé  que  l'auteur  d'ime  découverte 
brevetée  à  l'étrangcar  pouvait  se  faire  délivrer  en  France  un 
brevet  pour  la  même  découverte  sous  mn  autre  nom  que 
le  sien  et  saAS  rappeler  le  brevet  étranger,  et  en  ce  qu'il 
fait  résulter  de  simples  présomptions  la  preuve  que  le  titu<^ 
laire  du  brevet  n'était  que  le  mandataire  d'un  inventeur 
déjà  breveté  à  l'étranger  ; 

Attendu  que  l'art.  29  de  ladite  loi  du  5  juillet  1-844  ac- 
corde à  celui  qui  s'est  fait  breveter  à  l'étranger  la  facîulté 
d'obtenir  en  France  un  brevet  d'invention  d'une  durée 
qui  ne  peut  exjjéder  celle  du  brevet  étranger; 

Que  ce  droit  n'est  pas  tellement  personnel  au  breveté 
qu'il  ne  puisse  être  exercé  par  ceux  qui  sont  devenus  pro- 
priétaires de  la  déo^ttterte  comme  héritiers  où  ayants 
eanse;  « 

Et  attendu  qti^ il  ï'ésdte  suffisamment,  des  énondattons 
de  ran*êt  attaqué  et  des  faite  quMl  emprunte  àUX  àîCies  au- 
thentiques passas  entre  Haut  et  Brunfaut  postérieu- 
rement à  la  prise  des  brevels ,  et  qui  ont  été  en- 
registrés au  secrétariat  de  la  préfecture,  le  30  octobre  1845, 
que  Hant,  gendre  de  Brunfaut,  quand  il  a  pris  un  brevet 
d'inv^tion  le  12  féviier  1845,  ea  France,  pour  la  décou- 
verte déjà  brevetée  en  Belgique  au  profit  éete  demiet^,  le 
98  août  1S44,  était  non  le  mandatâir^^  mais  un  a;fant-eause 
deBrunfeul; 

Que  le  brevet  ainsi  délivré  û^était  donc  pas  par  tîèi'a  seul 
entaché  de  nullité,  et  que  Tarrêt  attaqué  en  le  déclarant 
valable,  16*  %aM  atit  feits  partîculîerfe  de  la  rnse,  n'a 
violé  aucun  des  articles  précités  ; 


(186) 

Sur  le  troisième  moyen,  résultant  de  la  violation  de  Tar- 
ticle29  de  la  loi  du  5  juillet  1844,  en  ce  que  l'arrêt  atta- 
qué ,  après  avoir  décidé  que  le  brevet  à  l'étranger  et  le 
brevet  français  s'appliqueraient  au  même  inventeur,  a  fait 
néanmoins  survivre  la  durée  du  brevet  français  à  la  dé- 
chéance du  brevet  encourue  à  l'étranger; 

Attendu  que  ce  moyen  manque  en  fait,  et  qu'il  est  établi 
par  la  représentation  d'un  arrêt  rendu ,  le  31  décembre 
1857,  par  la  Cour  d'appel  de  Bruxelles,  que  le  brevet  belge 
n'a  point  été  frappé  de  déchéance  en  Belgique,  ainsi  qu'il 
a  été  allégué,  d'où  il  suit  que  la  réciprocité  stipulée  par 
l'art.  29  de  ladite  loi  en  faveur  du  breveté  français  pendant 
la  durée  du  brevet  belge  a  pu  librement  s'exercer,  et  que 
l'arrêt  attaqué  n'a  point  par  conséquent  contrevenu  à  la 
disposition  dudit  article;  —  Rejette,  etc. 

Du  24  mars  1860.  C.  cass.,  ch.  crim.  Présid.,  M.  Rivel; 
rapp.,  M.  Zangiacomi  ;  avoc.-gén.,  M.  Guyho;  avou.,  U^ 
Marnier  et  Delaborde, 


I  ]" 


COMPÉTENCE  COMMERCIALE,  —  commerçant.  —  bail  de 

MATÉRIEL  d'usine. 

Le  bail  fait  par  un  commerçant  à  un  commerçant  (T objets 
mobiliers  formant  un  matériel  industriel  destiné  à  l'ex- 
ploitation d'une  usine,  est  un  acte  commercial.  Les  con- 
testations relative  à  cet  acte  sont  de  h  compétence  des 
Tribunaux  de  commerce.  (C.  comm.,  art.  o31,  632  et 
633.)  (1). 

(Lahousse  C.  Windsor.) 

Lahousse,  créancier  de  J.  Windsor,  avait  acheté  de 
Windsor  frères,  constructeurs  mécaniciens  à  Lille,  des  mé- 
tiers que  ceux-ci  avaient  vendus  d'abord  à  J.  Windsor.  Le 
prix  avait  été  réglé  partie  au  comptant,  partie  par  passation 
d'écritures  de  commerce,  partie  à  terme.  Il  avait  été  stipulé 
faculté  de  rachat  pendant  trois  ans  au  profit  de  J.  Windsor. 
Quelque  temps  après  cette  location,  les  affaires  de  J.  Wind- 
sor diminuèrent  notablement.  Il  négligea  de  faire  fonc- 
tionner les  métiers;  puis  il  tomba  en  faillite.  Lahousse  fit 

(1)  ConsulL  sur  cette  question  Pal,  i{e]9erl.,\o  Compétence  commer- 
ciale, n<M  9  et  suiv.,  et  Suppl.  \. principal.  Colmar  28  nov.  1849,  t.  1, 
1851 ,  p.  212. 


(i87y 

assigner  alors  J.  Windsor  et  Windsor  frères  devant  le  Tri- 
bunal de  commerce  de  Lille,  pour  entendre  dire  que,  par 
suite  d'inexécution  des  conditions  du  bail,  cet  acte  setait 
résolu,  avec  dommages-intérêts  à  fixer. 

Exception  d'incompétence  par  Windsor  frères,  qui  sou- 
tiennent que  le  bail  est  un  contrat  essentiellement  de  droit 
civil,  et  que  la  convention  dont  il  est  question  est  moins  un 
bail  qu'un  contrat  pignoratif. 

Le  Tribunal  admet  l'exception  par  le  motif  que  le  bail 
est  un  contrat  exclusivement  de  droit  civil. 

Appel  par  Lahousse.  Devant  la  Cour,  il  est  dit  dans  son 
intérêt  : 

Pour  déterminer  la  compétence  dans  la  cause,  il  convient 
de  rechercher  les  caractères  de  Tacte  du  5  août  4  858  ;  il 
est  fait  entre  commerçants  à  propos  d'objets  mobiliers  de 
leur  industrie  et  de  leur  commerce.  A  supposer  que  la  qua- 
lité des  personnes  n'imprimât  pas  suffisamment  à  cet  acte 
le  caractère  commercial,  ce  caractère  résulterait  à  suffisance 
du  but  que  se  proposaient  les  parties. 

Il  n'a  jamais  été  contesté  que  l'acte  de  commerce  se  re- 
connaissait à  ce  signe  caractéristique  qu'il  était  fait  par  les 
parties  avec  l'intention  d'en  retirer  un  bénéfice  et  par 
motif  de  spéculation.  Ces  deux  conditions  se  rencontrent 
dans  la  cause  aussi  bien  vis-à-vis  du  preneur  que  vis-à-vis 
du  bailleur  ;   et,  fallût-il  recourir  à  une  distinction  qui  a 
quelquefois  été  faite ,  la  commercialité  de  l'acte  est  mani- 
feste du  côté  du  preneur,  défendeur  en  l'instance  engagée. 
Vainement  les  premiers  juges  se  sont  déterminés  par 
cette   considération  que  le  bail  est  un  contrat  civil  ;  il 
faut ,  au  contraire ,  déterminer  le  caractère  du  bail  par 
ridée  qui  y  prédomine,  l'objet  qui  en  fait  la  chose  princi- 
pale et  les  stipulations  qui  le  caractérisent. 
Le  Tribunal  de  Lille  était  donc  compétemment  saisi. 
La  Cour  a  réformé  le  jugement. 

ARRÊT. 

LA  GOtJR  ;  —  Attendu  que  le  contrat  de  bail  n'est  i>as 
toujours  et  exclusivement  une  convention  du  droit  civil  ; 
qu'il  peut  emprunter  un  autre  caractère^  selon  l'objet  au- 
quel il  s'applique  ou  la  qualité  des  contractants; 

Qu*il  s'agit,  dans  l'acte  du  5  août  4858,  d'une  location 
faite  par  un  commerçant  à  un  commerçant ,  d'objets  mo- 
biliers formant  un  matériel  industriel,  destiné  à  Texploita- 
tion  d'une  usine  ; 


XI 88) 

Qu'ainsi,  sous  tous  ks  rapports,  la  juridiction  commer- 
ciale est  ici  compétente  ; 

Par  ces  motifs  et  en  donnant  acte  à  John  Windsor  de  sa 
déclaration  de  s'en  rapporter  à  justice,  infiitne  le  jugement; 
dit  que  le  Tribunal  de  commerce  est  compétent  ;  renvoie 
les  parties  devant  le  Tribunal  de  commerce  de  Lille,  com- 
posé d'autres  juges  ;  condamne ,  etc. 

Du  30  avril  1860.  l^e  charab.  Présid.,  M.  de  Moulon,  !« 

Ïrésid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  i^^  avoc.-gén.  ;  avoc, 
[es  Em.  Flamant  et  Dupont;  avou.,  M^s  Lavoix  et  Villelle. 


DÉBIT  DE  BOISSONS.  —  quverturb.  —  autorisation 

PRÉALABLE.  —  MARCHAND  DE  POMMES  DE  TERRE  FRITES. 

Pour  ifùe  le.  délit  d'ouverture  illégale  de  débit  de  boissons 
puisse  exister,  il  fàuJt  que  le  débit  oijwèrt  sans  permis- 
sion de  Vautoriié  soit  l'objet  principal  de  f industrie 
exercée.-^ Ainsi  le  marchand  de  pommes  de  terre  frites, 
qui  vend  pour  emporter  ou  consommer  sur  place ,  n'a 
pas  besoin  de  permission  préalable  de  V autorité  pour 
débiter  des  boissor^  à  ceux  qui  consomment  sa  mur- 
thxmdisé  dans  une  mèce  à  ce  destinée  et  dépèndûnt  de  son 
établissement.  (L.  lO  janv.  1852,  art.  4«'.) 

(Minist.  publ.  C  Bahr.) 

Sur  appel  du  ministère  public  d'un  jiigement  du  Tribu- 
nal correctiottûeî  de  Boulogne-sur-Mer,  du  10  fév.  4860, 
ainsi  conçu  : 

JUGEMENT. 

«Endroit:  Attendu  que  le  décret  du  29  décembre-!  0 
janvier  1852  a  eu  pour  butj  comme  l'indique  son  consi- 
dérant, de  protéger  les  mx3eur$  publiques  et  la  sûreté  gé- 
nérale^; guil  constitue  une  loi  pénale  et  conséquemment 
ne  saurait  être  étendu  au-delà  des  cas  formellement  prévus; 

»  Que  l'art.  1er  d^dit  décret  n^impose  l'obligation  delà 
permission  préalable  qu'à  tout  café,  cabaret  ou  autre  débit 
««  boissons  à  consommer  sur  place,  et  gue,  d*après  la  ju- 
Tî^pudence  de  la  Cour  de  cassation^  il  faut,  pour  que  le 
ilélit  existe»  qoe  le  débit  de  boissons  soit  l'objet  prmcipal 
de  l'industrie,  tandis  que  s'il  n'était  vendu  à  boire  qu'ac- 
Mssoiremèttt  à  une  «utre  industrie,  là  permission  ne  serait 
pasttéceèsaïre; 

n  -Qn'nînsi,  par  exemple ,  il  â  été  jngg ,  par  ari-êt  du  12 
février  1857,  que  le  décret  en  question  ne  s'appUqtie  pas 


(489) 

aux  logeurs  tenant  pension  et  aux  restaurateurs^  lorsqu'ils 
ne  joignent  pas  à  leur  profession  principale  le  fait  de  débi- 
ter des  boissons  à  consommer  sur  place,  en  dehors  des  re- 
pas qu'ils  peuv^  servir,  et  qu'un  autre  arrêt  de  la  même 
Cour,  du  19  mai  1854,  contient  semblable  décision  à  l'é- 
gard d'un  hôtel  tenu  pour  loger  et  nourrir  les  voyageurs 
qui  s'y  présentent,  à  moins  qu'il  ne  soit  constaté  en  fait 
qu'il  y  ait  été  débité  des  boissons  à  des  buveurs  qui  ne  s'y 
présentaient  ni  pour  y  loger,  ni  pour  s'y  nourrir  ; 

ï  Que  la  logique  et  la  raison  veulent  qu'on  applique  ces 
décisions  aux  industries  analogues  dans  lesquelles,  en  ven- 
dant pour  emporter  ou  consommer  sur  place  certaines  es- 
pèces d^aliments ,  on  ne  donne  à  boire  qu'accessoirement 
à  ceux  qui  les  consomment  sur  place  ; 

»  Qu'on  peut  ranger  dans  cette  catégorie  les  pâtissiers, 
et  qu'en  eflBt,  à  Boulogne ,  les  pâtissiers  vendent  à  boire  à 
ceux  qui  mangent  des  pâtisseries  chez  eux,  $ans  avoir  jamais 
été  l'objet  d'aucune  poursuite  ; 

]»  Ën&it  :  Attendu  que  Bahr  exerce  sérieusement  l'indus- 
trie de  marchand  de  pommes  de  terre  frites,  et  que  cette 
industrie  ne  lui  sert  pas  à  déguiser  un  débit  ^  boissons  ; 

»  Qu'il  vend  des  pommes  de  terre  frites  pour  emporter 
ou  pour  consommer  sur  place,  et  qu'il  dépend  de  son  éta- 
blissement une  place  destinée  aux  consommations  ; 

Qu'il  résulte,  de  l'instruction  et  des  débats,  que  les  trois 
mârii^  auxqu^s  il  a  vendu  à  hoire  à  GonaQmm6r  sun  place, 
avaient  acheté  des  pommas  de  tcire  frites  qu'ils  ^jmmt 
mangées  dans  son  éâibltâsement; 

»  Qu'il  n'est  pas  prouvé  qu'il  ait  donné  à  boine;  à  dcjs  per^ 
sonnes  n'ayant  pas  mangé  chez  lui  ; 

>  Que  le  fait  constaté  à  sa  cbîirge  ne  peut  donc,  soit  d'a- 
près l'esprit,  soit  d'après  le  teinte  du  décret  pr^ksilé,  consti- 
tuer le  délit  de,  tdébit  de  boissons  qu'il  a  voulu  .rékprimer  ; 

j  Qu'en  décidant  le  contraire,  on  ajouterait  à  la  loi  et  l'on 
porterait  atteinte  à  une  industrie  qui,  mérite  d'être  pro- 
tégée; ^ 

»  Le  Tribunal  renvoie  Bahr  des  poursuites  sans  dépens.  » 

La  Cour  a  conflrmfé. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —Adoptant  les  motifs  des  premiers  JHgèg,  met 
l'app^àfion  au  îaéant,  ordonne  que  le  jugement  dont  est 
af)pel  sortira  e^  sans  frais. 

Du  5  mars  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dmnon; 


(490) 

râpp.,  M.  Minart,  conseill.  ;  minist.  publ. ,  M.  Carpenlier, 
avoc.-gén.  ;  avoc,  M©  Maduré  (du  barreau  de  Boulogne). 

PEINE.  —  AGGRAVATION.  —  FONCTIONNAIRES  ET  OFFICIERS 
PUBLICS.  —  AGENTS  DES  DOUANES.  —  SURVEILLANCE  DE 
NAVIRE  ÉPAVE.  —  VOL. 

Les  agents  de  V administration  des  douanes,  encore  bien 
qu'ils  eussent  été  chargés  de  la  surveillance  d'un  navire 
épave,  par  suite  d'échouement,  ne  peuvent  encourir  une 
aggravation  de  peine,  pour  le  vqI  qu'ils  commettent  sur 
ce  navire,  alors  que  la  vente  en  avait  été  faite  et  que  leur 
surveillance  avait  dû  cesser,  (C.  pén.,  art.  198;  G.  inst. 
crim.,  art.  9.) 

Minist.  publ.  C.  Pocholle  et  Gafier. 

Deux  préposés  des  douanes ,  Pocholle  et  Gafier,  ont  été 
condamnés  par  le  Tribunal  correctionnel  de  Dunkerque  à 
quatre  mois  d'emprisonnement,  pour  soustraction  fraudu- 
leuse de  feuilles  de  cuivre  provenant  du  navire  le  Vauban, 
vendu  comme  épave  après  échouement.  L'épave  avait  été 
confiée  à  leur  surveillance,  mais  cette  surveillance  avait 
cessé  par  suite  de  la  vente  du  navire,  lorsque  le  vol  avait 
été  commis. 

Le  ministère  public  avait  prétendu  qu'il  y  avait  lieu, 
dans  ce  cas,  à  l'application  de  l'art.  498  G.  pen.,  qui  pro- 
nonce l'aggravation  de  la  peine  contre  les  fonctionnaires  et 
officiers  publics  qui  ont  participé  à  des  crimes  ou  délits 
qu'ils  avaient  été  chargés  de  surveiller  ou  réprimer.  Les 
premiers  juges  n'avaient  pas  fait  cette  application. 

Appel  devant  la  Gour. 

ARRÊT. 

LA  GOUR  ;  —  Gonsidérant  qu'il  résulte,  de  l'instruction 
et  des  débats,  que  les  8  et  9  janvier  1860,  les  deux  préve- 
nus ont,  ensemble  et  de  concert^  soustrait  frauduleusement, 
à  Dunkerque,  des  feuilles  de  cuivre  provenant  du  navire 
échoué  dit  le  Vauban; 

Que  néanmoins  la  circonstance  aggravante  relevée  dans 
l'ordonnancée  de  mise  en  prévention  ne  peut  être  admise 
dans  l'espèce; 

Qu'en  effet  le  navire  le  Vat^fcan  avait,  à  l'époque  susdite, 
cessé  d'être  à  l'état  d'épave  et. avait  été  vendu  à  Ogez,  son 
constructeur  ; 


(194) 

Que  dès-lors  aucune  surveillance  spéciale  n'était,  à  l'é- 
gard de  ce  bâtiment,  imposée  aux  agents  de  la  douane,  ce 
qui  est  prouvé  par  ce  fait  que ,  dès  le  22  décembre ,  avait 
été  levée  la  consigne  donnée  aux  préposés  à  l'effet  de  sur- 
veiller le  navire  échoué  ; 

Que  les  préposés  des  douanes  ne  sont ,  par  aucune  dis- 
position des  lois  organiques  de  cette  administration ,  assi- 
milés aux  fonctionnaires  dont  l'incrimination  est  consignée 
dans  l'art.  9  C.  inst.  crira.  ;  que,  par  conséqent,  les  pré- 
venus n'étaient  pas  investis  légalement  de  la  mission  de 
surveiller  et  réprimer  les  soustractions  dont  le  Yauban 
pouvait  être  l'objet  ; 

D'où  il  suit  que  les  deux  prévenus  ne  peuvent  être  pas- 
sibles de  l'aggravation  de  peine  édictée  par  l'art.  498 
C.  pén.  ; 

Par  ces  motifs  : 

Déclare  les  prévenus  coupables  d'avoir,  les  8  et  9  jan- 
vier 4860,  ensemble  et  de  concert,  soustrait  frauduleuse- 
ment, à  Dunkerque ,  des  feuilles  de  cuivre  provenant  du 
navire  fe  Vauban  ; 

Et  vu  l'art.  55  C.  pén.,  confirme  le  jugement  dont  est 
appel  sans  frais. 

Du  20  mars  4560.  Chamb.  corr.  Présid. ,  M.  Cahier  ; 
cons.  rapp.,  M.  Faucher,  cons.  ;  minist.  publ.,  M.  Carpen- 
tier,  avoc*-gén.  ;  avoc,  Mes  Coquelin  et  Fliniaux. 


CHASSE.  —  CLÔTURE.  —  fossés.' 

On  ne  petU  réputer  clos^  dans  le  sens  de  la  loi  sur  la  chasse, 
un  terrain  entouré  de  fossés  qui  sont  à  sec  et  que  Von 
peut  franchir  facilement  au  moment  où  le  fait  de  chasse 
s'accomplit,  (l.  3  mai  4844,  art.  2.)  (4). 


(1)  Bien  qu*en  principe  la  question  de  savoir  ce  qu'il  faut  entendre 
par  clôture  continue  soit  laissée  à  l'entière  appréciation  des  Tribunaux 
Vf.  Discuss.  de  la  loi  à  la  Chambre  des  pairs.  Daver^er,  Coll.  t.  44,  p. 
104.  Cit.  Réoert.  Pal.  verbo  Chasse,  no  68  ;  —  et  Limoges  5  fév.  ISiS 
(Pal.  t.  1,  1848,  p.  382),  il  importe  cependant  d'annoter  les  décisions 
d'espèces  rendues  en  cette  matière.  Y.  Répert.  Pal,  verbo  eit.yjx»  69 
et  suiv.  —  Pour  la  jurisprudence  de  la  Cour  de  Bouai,  V.  ^8  nov.  1842 
(Jurisp.  1,  47);  24  nov.  1843(Jurisp.  1,  239);  9  nov.  1847  (Jurisp.5, 
431). 


(492) 
(Min.  publ.  C.  Ditte.) 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  qu'il  résulte,  d'un  procès-verbal 
régulier  et  de  rînstructîon  à  l'audience,  que  le  ISnovemb. 
1859,  Ditte,  porteur  d'un  fusil ,  a  été  vu  chassant  sur  le 
territoire  de  Remy  ; 

Que  Ditte  n'est  point  muni  d'un  permis  de  chasse  ; 

Que,  par  suite,  il  s'est  rendu  coupable  des  délits  prévus 
et  punis  par  l'art.  11  de  la  loi  du  3  mai  4844  ; 

Que  les  dispositions  de  Tart.  2  de  pette  toi  ne  peuvent 
être  invoquées  utilement  pour  Ditte  ; 

Que  cet  article  ne  permet  au  propriétaire  de  chasser  ou 
de  faire  chasser  en  tout  temps  et  sans  permis  de  chasse, 
que  dans  ses  possessions  attenant  à  une  habitation  et  en- 
tourées d'une  clôture  faisant  obstacle  à  toute  communica- 
tion avec  les  héritages  "voisins  ; 

Que  si  les  fossés  peuvent  constituer  une  clôture,  il  faut 
que  ces  fbssés  aient  une  largeur  et  une  profondeur  telles 
qu'ils  fassent  obstacle  à  toute  communicatioji  avec  les  héri- 
tages voisins  ; 

Qu'il  résulte,  des  dépositions  des  témoins  entendus ,  que 
le  fossé  qui  longe  le  bois  de  la  dame  Daùchez ,  du  côté  de 
\^  ien  Artois,  et  notamment  le  fossé  qui  longe  oe  bois  du 
côté  du  chemin  d'Htiueourt,  étaient  à  secau  moment  où  le 
délit  a  étécomnïis  et  qtfil&peuvent  être  facilemient  franchis  ; 

Que  ces  fossés  ne  peuvent  donc  constituer  la  clôture 
voiûue  par  l'art.  2  précité,  pour  permeWire  Ja-phasse  en  tous 
temps  et  sans  permis  de  chasse  ; 

Vu^fes  art.  14, 16  de  la  loi  du  3  mars  1844,  et  104  G. 
ïnst.  crim.; 

Met  le  jugement  ^witt^t  ^j>|)el  au  néant;  déclara  Ditte 
<50upfiWe  d'avoir  chassé  sans  permis  de  ebasse,  et  pwr  ré- 
,paratîpin  le  çqpâ^xam  h  l'ame^ide  de  16  fr.;  prononce  la 
confiscation  du  fusU  dont  Ditte  était  porteur;  eon^ 
darane^  etc. 

Du28fév.  1860.  Chamb;  correct.  Présitf.,  W;  Dumon; 
rapp.,  M.  FjrancoViîlfe^  conseill.  ;  minist  pubL,  M.€arpen- 
tier,  avoc.-gén.  ;  avoc,  Me  Merlin. 


(493) 

GAINS  DÉ  SURVIE.  —  coutume  de  saint-amand. 

Les  avantages  matrimoniaux  ou  gains  de  survie  résultant 
des  coulumes  locales  ^  ont  été  abolis  par  la  loi  du  il  nivôse 
an  2,  quant  aux  époux  mariés  depuis  cette  loi.  (Lois  des 
17  nivôse  an  2,  art.  43,  44>  64  ;  22  ventôse  an  2,  art, 
49;  9  fructidor  an  2,  art.  9  et  24.)  (4). 

En  conséquence  est  sans  application,  "aux  époux  mariés  en 
Fan  8,  l'article  i  du  chapitre  24  de  la  coutume  de  Saint- 
Amand,  qui  constitue  le  survivant  sans  enfant  héritier 
des  biens  meubles  et  des  acquêts  faiis  pendant  le  ma- 
riage (2). 

(Deltorabe  et  consorts  C  Demousselle  et  consorts.) 

Le  30  thermidor  an  8 ,  François  Broutin  épousa ,  sans 
contrat  de  mariage,  la  demoiselle  Adèle  Decoorrière,  do- 
miciliée comme  lui  à  Saint- Amand.  Dix  mois  plus  tard,  le 
28  prairial  an  9,  les  époux  se  présentent  devant  le  notaire 
Naveteur,  de  Saint- Amand,  en  déclarant  n'avoir  rien  réglé 
relativement  à  leurs  droits  présents  et  futurs  par  contrat 
anlénuptial,  et  vouloir,  par  un  contrat  post-nuptial,  arrê- 
ter les  stipulations  suivantes  :  4»  les  père  et  mère  de  Fran- 
çois Broutin  lui  donnent  300  fr.  à  titre  de  port  de  mariage  ; 
2»  Agnès  Decourrière  déclare  mettre  en  communauté  une 
petite  maison  rue  de  Valenciennes,  à  Saint-Amand,  esti- 
mée  fr.  700 

Plus,  une  petite  maison  composée  d'une  seule 
plaee,  sise  au  Moulin  des  Loups,  à  Saint-Amand, 
estimée. .       .     »  200 

Plus,  une  pièce  de  terre  au  même  lieu,  estimée.     >  300 

Enfin  quarante  verges  de  mauvaise  terre,  situées 
au  même  lieu,  au  Moulin  des  Loups,  valant.       .     >  445 

Aux  termes  de  cet  acte,  les  époux  sont  convenus  que  le 
survivant  sera  héritier  du  mobilier,  et  viager  des  immeu- 
bles venus,  échus  ou  à  échoir  durant  leur  communauté ,  à 
la  charge  de  payer  les  dettes  de  la  maison  mortuaire. 

Le  5  novembre  4840,  Agnès  Decourrière  décède  sans 

(4-2)  V.  dans  ce  sens  rej.  eh.  civ.,  20  oct.  1807;  Cass.  26'  mai 
1812;  Cass.  chamb.  réun.  8  janv.  48U;  Sirey,  Coll.  nouv.  à  leurs 
dates;  Rej.  req.  47  juin  1834  (Sirey  1^34.,  1,  481);  Douai  22  août 
1846  (Jurisp.  t.i,  p.  385  ;  16  mars  1849,  t.  7,  p.  182)  ;  Chabot,  quest.  de 
droit,  TTo  Douaire,  p.  318.  — V.  toutefois  Merlin  Répert.,vo  Gains  nup- 
tiaux et  de  survie,  §  4  ;  et  Questions ,  v»  Gains  nuptiaux,  §  5.  —  V. 
Douai  16  juin  1855  (Jurisp.  1. 13,  p.  246-253). 

TOME  XVIII.  13 


laisser  d'enfant.  Vers  la  même  époque,  François  Broutin 
paya  les  droits  de  mutation  en  se  déclarant  propriétaire  du 
mobilier  et  de  la  moitié  des  immeubles  acquêts  de  com- 
munauté, et  usufruitier  de  l'autre  moitié  des  biens  propres 
de  la  défunte.  Aucune  liquidation  ne  fut  faite ,  et  le  mari 
continua  à  jouir  de  tout  l'avoir  commun  jusqu'à  son  décès, 
c'est-à-dire  jusqu'au  29  octobre  1857.  Ses  héritiers  colla- 
téraux, les  sieurs  Deltombe,  se  mirent  alors  en  possession 
de  toute  la  fortune  mobilière  et  immobilière  dont  jouissait 
François  Broutin,  en  invoquant  les  dispositions  du  cbap.  24 
des  Coutumes  de  St-Araand,  qui,  selon  eux,  devaient  exclu- 
sivement régir  l'association  conjugale  de  leur  auteur.  L'art. 
1er  de  ce  cbap.  24  est  ainsi  conçu  :  «  Quand  Vun  des  detix 
conjoints  pur  mariage  termine  par  mort  sajis  cojistant 
icduy  avoir  eu  ravestissement  de  sang  (sans  enfant),  le  der- 
nier vivant  est  setdement  viager  des  biens  patrimoniaux  du 
premier  terminé;  mais  quant  aux  biens  meubles  et  acquêts 
faits  constant  iceluy  mariage,  le  dernier  vivanJt  en  est  héri- 
tier sans  que  les  hoirs  du  premier  terminé  y  puissent  avoir 
aucun  droit  de  succession  en  payant  les  dettes.  >  Les  béri- 
tiers  d'Agnès  Decourrière  contestèrent  ces  prétentions  et 
soutinrent  que  l'art.  61  de  la  loi  du  17:  nivôse  an  2  avait 
aboli  tous  les  avantages  matrimoniaux  ou  gains  de  survie 
purement  statutaires  ou  non  conventionnels.  En  consé- 
quence ils  assignèrent,  le  15  novembre  1858,  les  sieurs 
Deltombe,  devant  le   Tribunal  civil  de.  Valenciennes ,  en 
compte,  partage  et  liquidation  de  la  communauté  des  époux 
Broutin  et  de  la  succession  de    la  dame  Broulin.  Dans 
leur  exploit,  ils  réclamaient  la  moitié  des  biens  meubles 
dépendant  de  la  communauté,  ef  la  moitié  des  biens  im- 
meubles acquis  pendant  le  mariage.  j 

Le  6  avril  1859,  la  demande  des  héritiers  Decourrière 
fut  accueillie  par  lejugementdont  suit  la  teneur  : 

JUGEMENT. 

c  Considérant  que  les  époux  Broutin  se  sont  mariés  à 
Saint-Amand  sans  contrat  de  mariage ,  le  30  thermidor 
an- 8  ;  que  cette  union  s'est  trouvée  régie  par  les  anciennes 
coutumes,  modifiées  toutefois  par  la  loi  du  17  nivôse  an  2; 

»  Considérant  que  l'art,  i^,  cbap.  24  de  la  Coutume  de 
Saint-Amand,  attribuait  à  l'époux  survivant,  alors  qu'il  n'é- 
tait pas  né  d'enfant  du  mariage,  l'usufruit  des  biens  propres 


1 


(195) 

l'époux  prémourânt  et  la  propriêlé  des  meubles  et  des 
acquêts; 

ï  Considérant  que  la  seule  question  du  procès  est  de 
savoir  si  cette  disposition  de  la  Coutume  n*a  pas  été  abro- 
gée par  la  loi  du  17  nivôse  an  2,  pour  les  mariages  con- 
tractés depuis  la  pi^omulgatîon  de  cette  loi  ; 

»  Gotifeidérant  que  st  l'on  cherche  en  l'espèce  quelle  a 
été  la  pensée  commune  des  parties,  on  la  trouve  claire- 
ment manifestée  dans  l'acte  de  don  mutuel  reçu  par  M®  Na- 
veteur,  notaire  à  Saint-Amand,  le  28  prairial  an  9,  acte 
dont  les  termes  prouvent  que  les  époux  Broutin  n'avaient 
pas  cru  que  le  survivant  d'eux  pût  profiter  des  dispositions 
de  l'article  de  la  Coutume  précitée  ; 

n  Considérant  qu'il  ressort  à  l'évidence,  de  la  combinai- 
son des  art.  43, 14,  61  de  la  loi  du  17  nivôse  an  2,  que 
tous  les'gains  de  survie  résultant  entre  époux  des  disposi- 
tions des  Coutumes  ou  statuts  locaux,  ont  été  déclarés  abo- 
lis pour  l'avenir  ;  que  telle  est  l'interprétation  donnée  à  cette 
loi  par  l'arrêt  rendu  par  la  Cour  de  cassation ,  sections 
réunies,  le  8  janvier  1814,  au  sujet  de  la  Coutume  de 
Luxembourg,  tit.  &,  art.  8,  dont  le  texte  présente  une  ana- 
logie parfaite  avec  celui  de  la  commune  de  Saint-Amand  ; 

>  Considérant  que  cet  arrêt  a  fixé  définitivement  sur  ce 
point  important  la  jurisprudence  dont  la  Cour  impériale  de 
Douai  ne  s'est  jamais  écartée  ; 

»  Considérant  que  c^lte  abolition  a  nécessairement  atteint 
les  dispositions  de  la  Coutume  de  Saint-Amand  sus-énoncée, 
qui  constituait  un  véritable  gain  de  survie  ; 

>  Considérant  que  vainement  on  objecte  que  cette  dis- 
position de  la  Coutume  portait  spécialement,  dans  Tune 
de  ses  parties^  sur  les  biens  de  la  communauté,  et  qu'elle 
aurscîi  été  maintenue  dans  cette  partie  comme  convention 
de  mariage  étrangère  à  tout  esprit  de  libéralité  ;  qu'il  est 
remarquable,  âû  contraire,  que  l'art.  1er  du  chap.  24  de  la 
Coutume  ne  forme  qu'une  seule  et  même  disposition  déri- 
vant d*une  même  pensée,  et  comprenant  dans  son  ensemble 
tous  les  biens  propres  et  de  communauté  ; 

>  Considérant  que  si  les  avantages  résultant  de  cette 


(196) 
disposition  ne  peuvent  être  rangés  (ainsi  que  le  porte  Tar- 
rêt  de  la  Cour  de  cassation  du  8  janvier  1814)  dans  la  classe 
des  donations  et  successions  proprement  dites,  ils  partici- 
pent néanmoins  de  ces  deux  espèces  de  transmission,  et 
que,  par  conséquent,  ils  tombent  d'une  manière  générale 
et  absolue  sous  l'application  de  la  loi  du  17  nivôse  an  2, 
sans  exception  en  &veur  de  ces  avantages  qui  n'auraient 
pour  objet  que  des  biens  de  communauté  ; 

»  Considérant  qu'il  résulte  de  ce  qui  précède  que  les  hé- 
ritiers de  François  Broutin  réclament  à  tort  le  bénéfice  de 
la  disposition  de  la  Coutume  de  Saint-Âmand  sus-énoncée; 

T>  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  adjuge  aux  demandeurs  les 
conclusions  par  eux  prises  ;  dit  qu'il  sera  procédé  par-devant 
M^  Herbert,  notaire  à  Saint-Âmand,  aux  compte,  partage  et 
liquidation  tant  de  la  communauté  ayant  existé  entre  les 
époux  Broulin-Decourrière,  que  de  la  succession  de  la 
dame  Broutin; 

»  Donne  acte,  aux  défendeurs  héritiers  de  Broutin ,  de 
leurs  réserves  au  sujet  de  l'acte  de  don  mutuel  du  28  prai- 
rial an  9,  etc.  > 

Appel  des  sieurs  Deltombe.  —  La  Cour  confiitne  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant,  confirme  le  jugement,  ordonne 
qu'il  sortira  effet,  et  condamne  les  appelants,  etc. 

Du  5  mai  1860.  2«  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minisl. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.,  concl.  conf.  ;  avoc,  M®»  Talon 
et  Dupont;  avou.,  M^»  Lavoix  et  Genevoise. 


VENTE.  —  DÉLFVRANCE.  —  CONTENANCE  APPROXIMATIVE.— 
EXCÉDANT.  —  SUPPLÉMENT  BE  PRIX.  —  RESTITUTION  EK 
NATURE. 

La  vente  qui  se  fait  d'un  immeuble  (Tune  contenance  ap- 
proximative  et  à  prendre  par  quotité  dans  une  totalité 
également  approximative,  de  telle  sorte  que  cette  totalité 
doive  être  mesurée  pour  la  fixation  de  la  quotité  vendue, 
se  trouve  comprise  dans  les  cas  pour  lesquels  Fespression 
de  la  mesure  ne  donne  lieu  à  aucun  supplément  de  prix, 


(197) 

m  faveur  du  vendeur,  si  r excédant  de  mesure  ne  dépasse 
pas  un  vingtième.  (C.  Nap.,  art.  1619.)  (1). 
U excédant  de  moins  d^un  vingtième  de  la  contenance  por- 
tée au  contrat  de  vente,  ne  donne  pas  lieu  non  plus,  dans 
ce  cas,  à  la  restitution  de  V excédant  en  nature.  (G.  Nap., 
même  article.)  (2). 

(Lescieux,  veuve  Banquart,  C.  Francomme.) 

Un  sieur  Francomme  a  successivement  vendu,  en  1825, 
1835  et  184fl,  à  un  sieur  Lescieux,  une  mesure  de  terre 
environ,  et  à  prendre  dans  une  autre  mesure  environ  (22 
ares  environ  ou  une  demi-mesure,  et  16  ares  15  centiares 
environ),  sans  charge  de  mesurage,  quand  même  le  plus 
ou  moins  de  contenance  excéderait  un  vingtième,  la  tota- 
lité étant  d'ailleurs  à  borner  par  une  haie  séparative  des 
héritages  du  vendeur  et  de  l'acheteur.  La  haie  fut  en  effet 
plantée,  et  les  choses  restaient  en  l'état  depuis  1841,  lors- 
que le  fils  du  vendeur,  le  sieur  Francomme,  prélendit  qu'à 
son  préjudice  la  veuve  Banquart,  qui  avait  succédé  à  Les- 
cieux son  père,  avait  usurpé  4  ares  60  centiares  de  terrain.  - 

A  cette  demande  portée  devant  le  Tribunal  de  Saint- 
Oraer,  la  veuve  Banquart  répondit  que ,  pour  la  vente  de 
1825,  il  y  avait  prescription  ;  que,  pour  les  deux  autres, 
Francomme  avait  vendu  si^s  garantie  de  contenance,  et  que 
d'ailleurs  la  délimitation  des  propriétés  avait  été  faite,  entre 
Francomme  père  et  Lescieux,  par  la  plantation  d'une  baie. 

Un  jugement  du  Tribunal  de  Saint-Omer,  du  3  mars  1859, 
déclara  la  vente  de  1825  inattaquable,  et  disposa  que 
celles  de  1835  et  1841  ayant  été  faites  â  la  contenance,  et 
Francomme  ayant  droit  pour  son  héritage,  par  son  titre,  à 
une  contenance  de  38  ares  15  centiares,  cette  contenance 
serait  vérifiée  par  expert. 

Il  résulta  de  l'expertise  un  excédant,  pour  la  veuve  Ban- 
quart, de  1  are  29  centiares  et  56  centiares  de  fossés.  Fran- 
comme réclama  cet  excédant  (1  are  83  centiaies)  en  nature, 
ou  200  fr.  de  dommages-intérêts  ou  augmentation  de  prix. 

La  restitution  fut  ordonnée  pour  1  are  27  centiares. 

Appel  devant  la  Cour,  qui  a  réformé  la  sentence  des 
premiers  juges. 

ARRET. 

LA  COUR  ;  —Attendu  qu'il  n'est  pas  justifié  que  la  veuve 

Baoquart  possède  {«i-delà  de  ce  que  lui  donnent  ses  titres  ; 

m  I  *  ■■  i      ■■    I        I  ■   I  ,  ,    ,  ■ 

(1-2)  Consult.  Besançon,  14;  mars  1811,  Pal.  à  sa  date;  Troplon^. 
De  la  Vente,  n»  340;  Duranton,  no220;  Duvergier,  t.  l,n<^  299. 


(198) 

Qu'en  effet,  d'après  la  grosse  produite  de,  l'acte  du  10 
mars  1835,  il  lui  est  vendu  22  ares  environ  (une  demi- 
inesure)  ; 

Qae  la  partie  vendue  doit  être  prise  dans  une  pièce  de 
terre  occupée  par  le  vendeur,  d'une  contenance  de  44  ares 
(une  mesure)  environ  ; 

Que  les  parties  n'étaient  pas  fixées  sur  la  véritable  conte- 
nance de  la  pièce  entière  dont  moitié  était  vendue;  qu'il 
était  dans  leur  intention  que  la  pièce  fût  mesurée ,  puis- 
qu'il est  conditionné  que  la  portion  vendue  est  à  prendre 
au  bord  du  fossé  réparant  ladite  portion  avec  le  sieur  Bru- 
nebois,  et  que  la  portion  non  vendue  s'étendra  à  14  cen- 
tiares 47  centièmes  (une  verge)  sur  le  revers  de  ia  digue 
au  midi; 

Qu'il  fallait  donc  mesurer  la  pièce  entière  et  en  attri- 
buer la  moitié  ou  22  ares  environ  à  l'acquéreur  de  1835  ; 

Attendu  que  cette  opération  n'a  point  été  effectuée  par 
Texpert,  et  que  si  elle  eût  eu  lieu,  plus  de  22  ares  eussent 
été  attribués  à  la  veuve  Banquart,  la  partie  «ifttièrç  conter 
nant  plus  de  44  ares  ; 

Attendu  que  si,  en  présence  #ane  réelOTi^lion  de  4  ares 
50  centiares,  le  Tribunal,  par  son  jugement  interlocutoire 
du  3  mars  1859,  a  ordonné  un  mesurage  de  deux  pièces  de 
terre  objets  des  ventes  de  1835  et  de  1841,  e,t  n'^  attribué 
k  la  veuve  Banquart  qu'une  contenance  de  38  areç  15  cen- 
tiares, il  n'a  pas  préjugé  l'exception  tirée  de  l'art.  161:9 
G.  Nap.,  pour  le  cas  où  le  mesurage  ne  constateiait  qu'un 
excédant  inférieur  au  vingtième  ; 

Attendu  que  l'excédant  constaté  n'est  que  de  1  are  27 
centiares  inférieur  au  20®  de  la  contenance  totale  ; . 

Attendu  que,  d'après  l'art,  1619  précité,  il  ne  pouvais  y 
avoir. lieu  à  une  demande  en  augmentation  de  prix^  et 
qu'une  pareille  demande,  si  elle  eût  pu  être  formée,  eût 
dû  être  intentée  dans  l'année  ,  aux  termes  de  l'art.  1622 
même  Code; 

Attendu  qu'on  ne  peut  soutenir  qu«  lorsque  toute  f  écla- 
i»ation  quant  au  prix  est  interdite,  elle  peut  néanmoins 
être  formée  pour  la  restitution  en  nature  ; 


(199) 

Attendu  d'ailleurs  que  la  veuve  Banquart  peut  se  préva- 
loir de  la  prescription  qui  peut  être  proposée  en  tout  état 
(le  cause,  aux  termes  de  Tart.  2224  C.  Nap.  ; 

Qu'en  effet,  d'après  Tacte  de  vente  du  9  novembre  4  841, 
il  devait,  pour  la  séparation  du  terrain  vendu,  être  planté 
une  haie  entre  le  vendeur  et  l'acquéreur  à  frais  communs, 
laquelle  haie  serait  mitoyenne  entre  eux; 

Attendu  que  la  haie  a  été  effectivement  plantée  en  con* 
formilé  des  conditions  de  la  vente,  et  qu'elle  subsiste  en- 
core aujourd'hui  comme  mitoyenne  ; 

Attendu  dès-lors  que  la  veuve  Banquart  possède  en  con- 
formité de  son  titre  et  dans  des  limites  certaines,  telles  que 
la  convention  les  a  constituées  ; 

Attendu  que  là  bonne  foi  se  présume  toujours  et  qu'elle 
ne  saurait  être  suspecte  lorsqu'il  s'agit  d'une  si  légère  dif- 
férence de  mesure  ;  que  les  faits  se  sont  passés  entre  pro- 
ches voisins,  et  que  le  vendeur  a  gardé  le  silence  pendant 
dix-sept  ans  ; 

La  Cour  met  le  jugement  dont  est  appel  au  n^ant,  dé- 
clare Fjrancomme  mal  fondé  en  sa  demande  fins  et  conte- 
nances, l'en  déboulç,  le  condamne,  etc. 

Du,30  mars  1860.  2^  chamb.  Présid.,  M.  Danel  ;  minist. 

Subi.,  M.  Berr;  avoc,  M®»  Duhem  et  Coquelin;  avou., 
es  Dussalian  et  Huret. 


FAILLITE. CRÉANCIER.  —  CAUTION.  —  FEMME  DU  FAILLI. 

-—  DROÏT  AUX  REPRISES.  —  PREUVE. 

Le  créancier  a  une  faillite,  admis  au  passif  pour  sa  créance 
cautionnée  par  la  femme  du  failli,  ne  p&tiH,  du  chef  de 
celle-ci,  participer  à  la  distribution  de  Vactif,  pour  la 
même  créance. 

Le  droit  aux  reprises  de  la  femme  du  failli  doit  être  justi- 
fié et  établi,  pour  permettre  à  son  créancier  de  U exercer 
vis'àfvis  de  la  fciillite. 

Ce  créanciiçr  n^  saurait  être  adfnis  pour  telle  justification  à 
prouver,  devant  lajf^fçidicUon  commerciale ,  qm  le  failli 
a  touché  ladqt  dem  femme.  (CNap,.,  ^rt.  1^06  et  1446.) 


(200) 

(Fiévet-Hernian   C.  syndic  HerbaUx   et  David,  veuve 

Herbaux.  ) 

Deux  obligations  d'une  importance  de  5,000  fr.  ont  été 
souscrites  au  profit  de  Fiévet-Herman,  par  un  sieur  Her- 
baux, commerçant,  et  cautionnées  par  la  dame  David, 
femme  Herbaux. 

Herbaux  est  déclaré  en  f;iillîle. 

Fiévetesl  admis  au  passif  pour  sa  créance  de  5,000  fr.,  et 
demande  à  être  également  admis  du  chef  de  la  dame  Da- 
vid, sa  débitrice,  dont  il  prétend  exercer  les  droits  de  cçiu- 
tion  du  mari, 

11  ajoute  que,  d'ailleurs,  la  dame  Herbaux  possède  vis- 
à-vis  de  son  mari  des  droits  de  reprises  pour  une  dot  de 
6,000  fr.,  et  demande  à  être  admis  à  la  preuve  du  verse- 
ment de  cette  somme. 

Le  Tribunal  «de  commerce  de  Lille  déclare  FiéVet  non 
recevable. 

Appel  devant  la  Cour,  qui  confiriBe. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  En  ce  qui  touche  le  premier  chef  des 
conclusions  de  l'appelant  :  • 

Attendu  que,  par  son  admission  au  passif  de  la  faillite, 
il  reçoit  le  dividende  afferant  à  sa  créance  ;  que  son  droit 
ne  saurait  s'étendre  au-delà  ;  qu'en  vain  il  se  prévaut  de 
celui  qu'aurait  sa  caution ,  pour  participer  aussi ,  du  chef 
de  celle-ci,  à  la  distribution  de  l'actif ,  en  sorte  que  dans 
chaque  répartition  s^iceessive  entre  les  intéressés  de  la 
même  masse  chirographaire ,  il  s'attribuerait  simultané- 
ment, pour  la  même  créance,,  un  premier  dividende  comme 
créancier  direct ,  puis  un  second  comme  représentant  sa 
caution;  qu'une  prétention  aussi  exorbitante  est  absolu- 
ment inadmissible;  qu'elle  aurait  pour  conséquence.,  si 
elle  pouvait  être  accueillie,  de  créer  au  profit  d'un  créan- 
cier, au  préjudice  de  la  masse,  une  situation  exception- 
nelle que  repoussent  les  principes  en  matière  de  faillite 
et  cetlç  condition  fondamentale  d'égalité  entre  les  créan- 
ciers non  privilégiés  dans  la  répartition  de  Tactif  j 

Sur  le  second  chef  de  la  demande  : 

Attendu  que  si,  par  suite  de  l'engagement  personnel  de 


(201) 

la  femme  du  failli  envers  l'appelant,  celui-ci  peut,  usant 
du  bénéfice  des  art.  4166  et  4446  C.  Nap. ,  exercer  les 
droits  de  sa  débitrice,  cette  faculté  est  essentiellement  su- 
bordonnée ici  à  la  justification  préalable  de  Texistence  même 
des  reprises  de  la  femme  ;  qu'aucun  document  de  nature 
à  établir  ce  fait  n'a  été  produit  jusqu'à  ce  jour;  que  la 
preuve  subsidiairement  offerte  par  l'appelant,  touchant  la 
numération  d'une  dot  de  6,000  fr.  entre  les  mains  du  mari, 
n'est  point  concluante,  puisque  ce  payement ,  fût-il  cons- 
tant, il  ne  s'ensuivrait  pas  que  la  femme  est  demeurée 
créancière  de  son  mari,  dont  elle  pourrait,  au  contraire,  se 
trouver  débitrice  par  l'effet  de  répétitions  qu'il  aurait  exer- 
cées ;  que  le  résultat  d'une  liquidation  doit  seul  résoudre, 
parles  voies  civiles,  la  question  préjudicielle  soulevée  par 
la  prétention  de  l'appelant,  le  droit  qu'il  invoque  pour  agir 
au  nom  de  la  femme  du  failli  devant  exister  ou  s'évanouir, 
selon  qu'elle  serait  ou  non  reconnue  créancière  de  son  mari  ; 

Par  ces  motifs,  donne  acte  à  la  dame  veuve  Herbaux  de 
ce  qu'elle  déclare  s'en  rapporter  à  justice; 

Confirme  le  jugement,  et,  sans  s'arrêter  aux  conclusions 
subsidiaires  de  l'appelant,  le  déclare  quant  à  présent  non 
recevable  dans  sa  demande,  et  le  condamne  à  l'amende  et 
aux  dépens  de  la  cause  d'appel  envers  toutes  les  parties. 

Du 46  mai  4860.  4^  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  i^ 
présid.;  rainist.publ.,  M.  Morcrelte,  4er  avoc.-gén.  ;  avoc, 
Mes  Dupont  et  Talon  ;  avou.,  M^»  Huret  et  Ville tte. 


SUCCESSION.  —  DÉSHÉRENCE.  —  SUCCESSION  VACANTE.  -^ 
ENVOI  EN  POSSESSION.  —  CURATEUR.  —  GESTION  DES 
filENS. 

Lorsque  l'Etat  réclame  une  su^ession  à  titre  de  successeur 
irrégulier,  cette  succession  n'est  plus  réputée  vacante,  et 
si  un  curateur  a  été  nommé,  celui-ci  ne  peut  conserver 
la  gestion  de  l'hérédité  jusqu'à  ce  que  le  domaine  ait  été 
envoyé  en  possession.  (G.  Nap.,  art.  768,  769,  770,  814, 
842.)  (4). 

(1)  Couf.  Paris  26  mars  1835  (S.  V.  36, 282),  et  G.  Cass.  17  août  1840 
(S.  V.  40. 1,  759);  Rennes  7  juill.  1851  (Pal.  t.  1,  1852,  p.  235).  V. 
aussi Touilier,  édit.  Tarlier,  t.  2,  p.  342,  no 294.  —La  requête  deTad- 


(Administration  des  domaines.) 

Par  jugement  du  24  mars  1860,  le  Tribunal  civil  de 
Lille  a  déclaré  vî^çante  la  succession  d'un  sieur  Henri 
Mullier,  enfant  naturel,  décédé  à  Toufïlers  le  43  mai  1859; 
il  a  nommé  un  curateur  à  cette  succession.  La  décision 
avait  été  rendue  sur  la  requête  d'un  sieur  Defrenne,  créan- 
cier hypothécaire  de  la  succession. 

Dès  lé  49  du  même  mois,  l'administration  des  domaines 
avait  demandé  par  requête  a  être  autorisée  à  faire  les  pu- 
blications préalables  à  son  envoi  en  possession  de  cette 
succession  qui  était  en  déshérence,  et  a  l'administrer  pro- 
visoirement pendant  l'accomplissement  de  ces  fprmalités. 

Le  Tribunal  autorise  les  publications,  mais  il  décide  qu'il 
n'y  a  pas  lieu  de  pourvoir  à  Tadminislration  demandée,  at- 
tendu qu'un  curateur  a  été  nommé  à  la  succession  vacante 
dudit  Henri  Mullier. 

L'administration  des  domaines,  requête  de  son  direc- 
teur, en  présence  et  à  l'intervention  du  procureur-général, 
a  formé  appel,  La  Cour  a  réformé  le  jugemqnt. 

ARRÊT. 

LA. COUR;  — Attendu  que  l'administration  des  domaines 
appréhendant,  à  titré  de  déshéience,  la  succession  de  Henri 
Mullier,  cette  succession  ne  pouvait  plus  être  réputée  va- 
cante;* qu'ainsi  le  mandat  de  curateur,  nommé  sur  la  pré- 
somption àe  la  vacance,  cessait  virtuellement  iavec  ia  cause 
qui  le  lui  avait  fait  conférer;  qu'il  était  dès-lors  cîonforme 
à  l'intérêt  de  tous  les  ayants  droit  que  le  Tribunal,  en  or- 
donnant les  publications  préalables  à  l'envoi  en  possession 
de  r£(^,  autorisât,  ea  mêm^e  t^j^p^^  le  domaipeà  admi- 
nistrer désormais  cette  succession,  et  à  pourvoir  provisoi- 
rement à  toutes  les  mesures  conservatoires,  ainsi  qu'il  le 
demandait  par  sa  requête  ; 

Par  ces  motifs,  statuant  sur  l'appel  de  radministralion 
des  domaines,  et  émendant  le  jugement,  infirme  quant  à 
la  disposition  par  laquelle  la  gestion  des  biens  de  la  suc- 

ministration  des  domaines  indiquait  encore,  comme  aitioi^ités ,  Chabot 
et  Duranton  (Comment,  des  art.  773  çjt  811  C.  Nap.);  Âgen,  Moaipcl- 
lier,  Ck)ln[iar  et  Taris  :  19  iuiU.  1835, 8  mai  im\  18  kiîn  ISSO,  6  mai 
i^é,  et  6  juill  4850.  • 


(203) 

cession  MuUier  a  été  refusée  à  radministralion  appelante  ; 

Dit,  au  contraire,  qu'elle  est  investie  de  tous  les  pou- 
voirs nécessaires  à  cet  égard  ;  Tautorige ,  en  conséquence, 
sur  la  signification  du  présent  arrêt  au  sieur  Leclercq- 
Grandel,  curateur  nommé  par  le  jugement  du  24-  mars 
dernier,  à  réclamer  de  lui  la  reddition  de  son  compte,  la 
remise  des  valeurs  ou  titres  concernant  la  gestion  dont  il 
est  saisi,  et  dans  laquelle  il  n'aura  plup  à  s'immiscer  ; 

Ordonne  que  le  jugement  sortira  au  surplus  effet,  les 
frais  de  l'appel  demeurant  ainsi  à  la  charge  de  la  suc- 
cession. 

Du  16  mai  1860.  l^e  çbamb.  Pré^d. ,  M.  de  Moulon, 
l^^  présid. ,   rapp.  ;   minist.   publ.,   M.  Morcr^te ,    1^ 

avoc.-gén. 


^■M« 


ASSURANCE  MARITIME.— EMPRUNT  a  la  grosse.  —  rè- 
glement d'avaries.  —  PAYEMENT.  —  AVANCES. 

En  cas  de  sinistre  d'un  navire,  lorsque  le  capitaine  a  sous- 
crit une  lettre  de  grosse  pour  payer  ses  dépenses  et  a 
dorme  son  oliargement  en  garantie,  l'assureur,  à  Varri^ 
vée  du  nature ,  doit  payer  le  r^tement  d' maries  après 
justifications  suffisantes^  mm  que  le  consignatair^  ni  le 
destiuaioLtr^  assuré  ne  soient  obUgM.  P^  /aire  tes  Ai^nce^ 
de  ce  payement.  (G.  com.,  art,  350.)  .î 

(Asîsora»ce  maritime  G.  Delrue  et  Cuvelîer.) 

Apres  avaries  faîtes  sur  les  côtes  de  la  Manche  par  son 
navire  la  Bonne-Mère,  le  capitaine  Haîgand  a  contracté,  à 
Boulogne-sw-Mer,  un  emprunt  â  la  grosse  ayant  pour  ga- 
rafllde  sa  «argaisen.  Une  partie  "âès  marchandises  ont  été 
envoyées  à  Dunkerque  par  le  Persévérant, 

Le  porteur  de  la  lettre  de  ^ros$^,  après  en  avoir  donné 
avis  aux  assurances  l'Union  et  la  Sauvegarde,  s'est  adressé 
pour  le  payement  au  sieur  Plaideau ,  con&i^natàire ,  qui 
lui-même  a  appelé  en  garantie  le  destinataire  assuré,  le 
sieur  Cuvelîer,  négociant  à  Hanbourdin.  Celui-ci  a  refusé 
payement,  et  s'est  adressé  a;ux  compagnies  d'assurances, 
en  soutenant  qu^il  n'était  oMigié  à  faire  aucune  avance  au 
porteur,  lét  que  l'dfisiwancfî  jdevak  iinraédiateraent  le 
couvrir. 


(204) 

La  répartilion  des  avances  avait  été  d'ailleurs  faite  par 
expertise,  et  ne  soulevait  pas  de  contestation. 

Les  Compagnies  prétendirent  que,  ne  devant  tenir  compte 
à  Guvelier  du  montant  du  sinistre  par  lui  éprouvé  qu'après 
règlement  d'avaries  et  communication  des  pièces  qui  1  éta- 
blissent, elles  ne  pouvaient  être  tenues  de  dispenser  Guve- 
lier du  payement  des  dépenses  faites  pour  la  conservation 
des  objets  assurés,  et  que  ce  n'était  que  lorsqu'il  aurait 
lui-même  payé  qu'il  pourrait  s'adreseer  à  elles;  que  le  dé- 
cider autrement,  ce  serait  admettre  que  l'assuré  a  le  droit 
de  former  contre  les  assureurs  autant  de  demandes  qu'il 
y  aurait  de  sommes  pouvant  entrer  dans  un  règlement 
d'avaries. 

Le  Tribunal  de  commerce  de  Dunkerque  en  a  décidé 
autrement  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  le  navire  la  Bonne-Mère ,  capitaine  Hal- 
gand  ,  qui  aurait  pris  à  Liboume  des  marchandises  pour 
Dunkerque,  a,  par  suite  d'un  abordage,  été  forcé  d'inter- 
rompre son  voyage  à  Boulogne  ;  qu'une  partie  du  charge- 
ment est  airivèe  à  Dunkerque  par  le  navire  le  Persévérant, 
grevée  d'un  emprunt  à  la  grosse,  contracté  à  Boulogne  par 
le  capitaine  Halgand,  pour  se  procurer  les  fonds  nécessaires 
pour  payer  les  frais  faits  audit  lieu  ; 

»  Attendu  qu'à  l'arrivée  des  marchandises  à  Dunkerque, 
A.  Delrue,  consignataire  du  navire,  paya  la  lettre  de  gi'osse 
et  délivra  les  marchandises  aux  divers  intéressés ,  qui  s'o- 
bligèrent à  lui  rembourser  ladite  lettre  de  grosse ,  à  sa 
première  réquisition,  suivant  règlement  à  intervenir; 

»  Attendu  que  Plaideau  ne  prit  cet  engagement  qu'a- 
près en  avoir  obtenu  l'autorisation  des  assureurs  des  mar- 
chandises qu'il  réclamait; 

»  Attendu  que,  d'après  un  calcul  de  répartition  qui  n'est 
contesté  par  aucune  des  parties  en  cause,  les  marchandises 
réclamées  par  Plaideau  doivent  une  contribution  de  5,004  fr. 
52  c.  ;  que  Delrue  ayant  réclamé  celte  somme  audit  Plai- 
deau, celui-ci  a  appelé  en  garantie  Guvelier)  destinataiix) 
desdites  marchandises,  qui,  à  son  tour,  a  appelé  ses  assu- 
reurs en  contre-garantie  ;  que  Plaideau  et  Guvelier  ont 
conclu,  Plaideau  à  ce  que  Guvelier  fût  tenu  de  le  garantir 


(205) 

et  indemniser  des  condamnations  qui  pourraient  être  pro- 
noncées contre  lui,  et  Cuvelier  a  pris  les  mêmes  conclu- 
sions à  regard  de  ses  assureurs  ;  que  ces  derniers  recon- 
naissent bien  qu'ils  doivent  tenir  compte  à  Cuvelier  des 
avaries  éprouvées,  mais  seulement  après  règlement  et 
communication  de  pièces;  que  Cuvelier  doit  d'abord  payer; 
que  ce  n'est  qu'après  avoir  satisfait  à  la  demande  du  por- 
teur de  la  lettre  de  grosse  qu'il  sera  en  droit  de  les  ac- 
tionner, et  que,  jusqu'à  présent,  il  n'est  inteiTenu ,  entre 
lui  et  ses  assureurs,  aucun  règlement  ; 

if  Attendu  que  les  assureurs  se  sont  obligés  à  payer  les 
pertes  et  avaries  à  leur  charge,  comptant  et  sans  escompte, 
quinze  jours  après  la  remise  des  pièces  justificatives  ; 

j>  Attendu  que  la  demande  de  Delrue  à  la  charge  de 
Plaideau,  et  celle  en  garantie  de  Plaideau  contre  Cuvelier, 
ne  sont  pas  contestées  et  qu'elles  sont  d'ailleurs  parfaite- 
ment justifiées  ;  qu'il  y  a  donc  seulement  à  examiner  les 
motifs  des  assureurs  polir  repousser  la  demande  en  garan- 
tie dirigée  contre  eux  ; 

»  Attendu  que,  par  le  contrat  d'assurance,  l'assuré  met 
à  la  charge  des  assureurs  qui  y  consentent,  moyennant  le 
payement  de  la  prime,  toutes  les  pertes  et  dommages  qui 
arrivent  aux  objets  assurés  par  fortune  de  mer,  et  qu'aux 
termes  de  la  loi,  il  est  seulement  obligé  à  faire  travailler, 
en  temps  et  lieu,  au  recouvrement  des  effets  naufragés,  et 
d'informer  les  assureurs  des  événements  qui  les  intéres- 
sent ;  que,  du  moment  où  les  assureurs  sont  avertis  d'un 
sinistre,  ils  doivent  exécuter  de  bonne  foi  le  contrat  inter- 
venu, et  faire  en  sorte  que  l'assuré  qui  a  voulu  se  garantir 
des  accidents  de  mer,  ou,  comme  l'enseignent  les  auteurs 
et  la  jurisprudence ,  séparer  complètement  sa  fortune  de 
terre  de  sa  fortune  de  mer,  que  l'assuré  profite  des  avan- 
tages de  sa  prévoyance  et  reçoive  les  objets  assurés  ou 
leur  valeur  dans  les  termes  de  son  contrat  ; 

>  Attendu,  en  fait ,  que  les  assureurs  ont  été  informés 
qu'il  avait  été  contracté  un  emprunt  à  la  grosse  ;  qu'ils  ont 
eu  connaissance  du  travail  de  répartition  dès  le  10  sep- 
tembre dernier  et  de  la  demande  formée  contre  l'assuré, 


(206) 

et  ce,  dans  les  termes  et  délais  fixés  par  eux-mêmes,  et 
qu'ils  n'ont  élevé  aucune  contestation  sur  ce  qui  a  été  fait  ; 
qu'aucune  disposition  dé  la  loi  ou  du  contrat  n'astreignent 
l'assuré  à  faire  les  avances  nécessaires  pour  obtenir  se& 
marchandises  quittes  et  libres;  que  c'est  aux  assureurs  à 
se  substituer  à  l'assuré  et  à  payer  les  sommes  que  ce  der- 
nieit  aurait  dû  payer,  s'il  n'avait  voulu  s'en  affranchir*  par 
l'assurance  ; 

'  >  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  statuant  en  premier  res- 
sort, condamne  Plaîdeau  à  payer  à  Delrue,  avec  les  inté- 
rêts judiciaires  et  les  dépens,  la  somme  de  5,004»  fr.  52  c. 
qu'il  lui  doit  pour  sa  quote-part  dans  l'emprunt  à  la  grosse, 
et  faisant  droit  aux  demandes  en  garantie,  condamne  Cuve- 
velier  à  garantir  et  indemniser  Plaideau  des  condamnations 
prononcées  contre  lui,  intérêts  et  frais,  et  les  Compagnies 
d'assurances  à  garantir  et  indemniser,  chacune  dans  la 
proportion  de  leurs  engagements ,  Guvelier,  des  sommes 
qu'il  devra  payer  par  suite  des  condamnations  qui  précè- 
dent ;  condamne  lesdites  Compagnies  en  tous  les  dé- 
pens,  etc.  » 

Appel  pr  les  Compagnies  d'assurances.  Devant  la  Cour, 
il  est  toujours  soutenu  par  elles  qu'elles  ne  peuvent  être 
obligées  au  payement  que  si  le  montant  des  avances  est 
devenu  liquide  par  un  règlement  arrêté  et  après  toute  com- 
njunication  de  pièces,  non  auparavaftt;  que  si  la  lettre  de 
grosse  est  payable  immédiatement,  elle  ne  peut  être  payée 
que  par  les  assurés,  dans  l'intérêt  de  la  conservation  de 
leurs  marchandises,  sauf  à  eux  à  se  faire  rembourser  par 
les  Compagnies,  lorsque  leur  créance  sera  liquide. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  du  Tribunal  de  com- 
merce de  Dunkfinque. 

ARRÊT. 

LA  CGUft;— Attendu  que  c'est  de  l'aveu  et  avec  l'ac- 
quiescement formel  de  l'agent  de  la  Compagnie ,  que  le 
destinataire  s'est  obligé  pei^onnellement  à  rembourser  au 
porteur  de  la  grosse,  après  répartition  par  l'expert  com- 
mis, sa  part  dans  l'emprunt; 

Attendu  que  cette  répartition  opérée,  l'emprunteur,  as- 
signé en  payement,  a  appelé  en  cause  la  Compagnie  d'as- 


(207) 

surances  pour  le  couvrir,  ou,  en  tous  cas,  pour  payer  Tim- 
portance  de  la  réclamation  ; 

Attendu  qu'en  tête  de  l'assignatian  le  prêteur,  qui  pré- 
tend ,  du  reste ,  avoir  communique  antérieurement  toutes 
les  pièces  à  la  Compagnie,  lui  a  notifié  le  résumé  du  tra- 
vail de  répartition  de  l'expert  ; 

Que  les  pièces  ont  été  produites  in  extenso  devant  le 
premier  juge; 

Que  la  Compagnie  pouvait  demander  des  justifications 
plus  étendues  au  besoin,  et  obtenir  les  remises  nécessaires; 

Qu'aucune  justification  ultérieure  n'a  été  réclamée  ; 

Attendu  qu'il  ne  s'agit  pas  d'avances  à  faire  par  suite  de 
l'assurance,  mais  d'un  règlement  qui  intéressait  la  Compa- 
gnie comme  l'assuré  ; 

Qu'il  n'est  pas  indispensable  que  le  remboursement  soit 
effectué,  pour  que  l'assureur  puisse  être  appelé  en  garantie 
ou  en  payement;  qu'il  suffit  que  le  règlement  des  .avaries 
ait  été  fait  ; 

Attendu  enfin  que  nulle  critique  au  fond  n*a  été  et  n'est 
soulevée,  met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  ju- 
gement sortira  effet,  condamne  l'appelant  à  l'amende  et 
aux  dépens. 

Du  26 mai. 1860.  2«.diamb.  Présid.,  M.  Danel;  minîst. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-géiî.  ;  avoc,  M«»  Ed,  Lemaire  et  Ta- 
lon; avou.^  Mps  Legrand  et  Ville tte. 

AVARIE.  —  ABORDAGE.  —  RÉCLAMATION  DU  CAPITAINE.  — 
FIN  DE  NON-RECEVOIR. —  DÉLAI.  — Ï'AUTE.  —  cm^ONS- 
TANCES  DÉTERMINANTES. 

Le  délai  de  vingt-quatre  heures  imparti  au  capitaine  de 
navire  pour  faire  sa  réclamation  en  indemnité  pour  domr 
mage  causé  par  V abordage ,  ne  court  que  du  moment  où 
le  capitaine  est  complètement  affranchi  des  soins  que 
peut  exiger  son  navire.  (C.  com.;  art.  435  et  436.)  (1). 

U abordage  survenu,  par  suite  de  non  surveillance,  sur  Vun 
des  deux  navires  abordés,  doit  êtr^  imputé  à  faute  au 
capitaine  de  ce  navire.  (C.  com.,  art.  4f07.)  (2). 

(1)  V.  Dèlviûcourt,  t.  2,  p.  274  ;  Boulaj-Paly,  t.  4,  p.  608.  V.  aussi 
Répert,  Pal.,  vis  Assurance  maritime,  n»  1175  et  suiv.,  et  Capitaine  de 
navire,  ip  569  et  suiv.  Consull.  Donai  21  janv^  1852  {Jurisp.  10,  189).. 

(2)  L'appréciation  des  causes  de  l'abordage  est  livrée  aux  Tribunaux. 


(508) 
(Huret  C.  Halgand.) 

Parti  de  Bordeaux  et  de  Libourne  avec  un  chargement 
de  brai,  devins  et  d'eau-de-vie  pour  le  port  de  Dunkerque, 
le  navire  la  Bonne-Mère,  capitaine  Halgand,  faisait  route 
vers  sa  destination,  lorsque,  se  trouvant  à  6  milles  (10  mai, 
8  heures  du  matin)  dans  Touest  sud-ouest  du  cap  Griz- 
Vez,  il  fut  abordé  par  le  bateau  de  pêche  le  Saint-Jean- 
Baptiste,  ayant  pour  patron  Pierre- Guillaume  Huret,  Le 
choc  eut  lieu  à  l'avant,  et  fut  si  violent  que  plusieurs  voies 
d'eau  se  déclarèrent  aussitôt,  et  qu'en  moins  de  vingt  mi- 
nutes, le  bâtiment  s'inclina  sur  le  côté  et  se  tint  entre  deux 
eaux,  sans  pouvoir  se  relever  et  prêt  à  sombrer  à  chaque 
instant.  L'équipage ,  avec  le  capitaine,  passa  sur  le  canot 
du  bateau  aboraeur,  et,  àTaidedelapatache  des  douanes  qui 
se  trouvait  dans  ces  parages ,  on  entreprit  de  remorquer  la 
JBonne-JIfère  jusqu'au  port  de  Boulogne.  La  faiblesse  de  la 
brise,  et  l'action  violente  des  courants,  empêchèrent  cette 
manœuvre,  et  le  bâtiment  fut  laissé  en  dérive  par  le  travers 
du  cap  d'Âlpreck.  Le  capitaine  Halgand  s'embarqua  dans 
le  canot  de  la  patache  pour  venir  en  toute  hâte  à  Boulogne 
affréter  un  navire  à  vapeur.  Le  paquebot  V Albion  entreprit 
le  sauvetage  moyennant  AO  liv.  sterling,  sortit  du  port  le 
raêmejour  à  trois  heures  après-midi,  alla,  sous  la  direc- 
tion et  avec  l'aide  du  capitaine,  prendre  le  navire  à  la  re- 
morque et  l'amena  à  une  encablure  de  la  jetée  de  l'ouest, 
où  il  échoua  à  six  heures  et  demie  du  soir.  Le  lendemain 
H ,  le  navire  échoué  put  être  halé  dans  l'intérieur  du  port, 
le  long  de  l'estacade  de  l'ouest ,  où  il  fut  amarré ,  puis 
relevé. 

Le  40,  à  son  retour  au  port  avec  Halgand,  le  patron 
Huret  avait  fait  une  protestation  contre  l'abordage  dont  il 
imputait  la  faute  à  la  Bonne-Mère.  Le  H  seulement,  à  cinq 
heures  du  soir,  Halgand  faisait  réclamation  en  indemnité. 
Son  action  fut  portée  devant  le  Tribunal  de  commerce  de 
Boulogne,  par  exploit  du  21  mai.  Pour  la  justifier  et  établir 
que  la  faute  de  l'abordage  était  due  au  bateau  le  Saint- 
Jean-Bapliste,  il  demanda  à  faire  vérifier  par  experts  et  à 
établir  que  le  bateau  avait  manqué  de  surveillance,  et  qu'a- 

Pour  les  guider,  cependant,  Tusage  et  l'ancienne  jurisprudence  ont  éta- 
bli certaines  règles  qui  neuvent  servir  à  décider,  dans  le  doute,  si  l'a- 
bordage peut  être  consiaéré  comme  fortuit,  ou  peut  être  imputé  à  Tun 
des  capitaines.  V.  l'indication  de  ces  régies  au  Répert.  Pal.,  yo  Ava- 
ries ,  no  150.  La  Cour  décide  ici  que  le  défaut  de  surveillance  sur  un 
navire  constitue  la  faute  du  capitaine. 


(209) 

vei'li  de  laisser  arriver,  il  ne  tint  aucun  compte  de  cet 
ordre  et  se  maintint  droit  dans  sa  route,  violant  ainsi  tous 
les  usages  de  la  mer. 

Le  défendeur  opposa  au  capitaine  Halgand  une  fin  de 
non-recevoir  tirée  ae  Tart.  436  C.  com.,  et  sur  le  motif 
que  sa  déclaration  n'avait  pas  été  faite  dans  les  vingt-quatre 
heujres  de  l'abordage.  Il  repoussa  au  fond  l'imputation  de 
faute  alléguée. 

Le  Tribunal  de  commerce  prononça  la  sentence  dont  la 
teneur  suit  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  le  40  mai  dernier  Halgand,  capitaine  de 
la  Bon7ie-Mère,  s'est  abordé  avec  le  bateau  de  pêche,  pa- 
tron Huret,  et,  par  suite  de  cette  collision,  a  souffert  cer- 
taines avaries  dont  il  demande  la  réparation  à  Huret,  à 
qui  il  attribue  la  faute  de  l'abordage  ; 

»  Attendu  que  Huret,  de  son  côté,  repousse  toute  res- 
ponsabilité, prétendant  que,  dans  la  position  où  se  trou- 
vait la  Bonne-Mère,  par  rapport  au  Saint- Jean- Baptiste, 
le  navire  n'a  pas  manœuvré  comme  le  prescrivent  les  usages 
maritimes  en  pareille  circonstance  ;  que,  dès-lors,  la  faute 
doit  être  attribuée  au  capitaine  Halgand  ;  que,  de  plus,  sa 
protestation  a  été  tardive  et  n'a  pu  lui  ouvrir  aucun  droit  à 
réclamer  ; 

»  Attendu  qu'en  disposant  que  la  protestation  ou  la  ré- 
clamation serait  nulle,  si  elle  n'avait  pas  lieu  dans  les  vingt- 
quatre  heures,  la  loi  a  voulu  que  le  délai  ne  courût  que 
du  moment  où  le  capitaine,  protestant  ou  réclamant,  était 
complètement  affranchi  de  tous  les  soins  que  pouvait  exiger 
son  navire ,  par  suite  du  dommage  souffert ,  à  ce  point 
qu'aucun  autre  dommage  ne  pût  être  appréhendé  ; 

^  Que,  dans  l'espèce,  il  est  constant  que  la  Bowie-Mère, 
bien  qu'ayant  abordé  au  port  de  Boulogne  dans  la  journée 
du  10  mai,  n'a  pu  être  amarrée  au  quai  que  le  11  au  matin; 
»  Qu'entre  le  moment  du  halage  du  heu  où  elle  avait 
Bchoué  contre  les  jetées  du  port  et  celui  de  son  amarrage 
mx  quais,  certains  dommages  pouvaient  survenir  qui  eus- 
sent donné  lieu  à  réclamation  ;  que  c'est  donc  à  bon  droit 

TOME  XVIII.  ii 


(340) 
que  la^  p»çot6Stalion;  î\  é\é  laile,  \ei\  mai,  à  cinq  heures  d« 
pelevée; 

»  Attendu  que  des  enquête,  contre-enquête,  documents 
et  débats,  il  résulte  que  les  deux  navirçs  se  trouvant  en 
mer,  dans  les  parages  du  cap  GrLz-Vez,  se  soijit  abordés, 
le  10  mai,  en  plein  Jour,  par  un  temps  presq.ue  calm,e,  et 
alors  que  le  Samt-Jean-Baptiste  ne  filait  qu'un  nœud  à 
l'heure,  aiOfisi  qu'il  a  été  déclaré  au  rapport  dte  mer; 

»  Qu'avant  de  rechercher  si  les  deux  navires,  antôrieu- 
ment  à  leur  rencontre,  et  ^fu^  df  qviter  l'abordage,  ont  navi- 
gué et  manœuvré  suivant  les  usages  prescrits  païf  la  science 
maritime,  il  importe  de  savoir  si  l'un  et  l'aulrç  s'aperce- 
vaient réciproquement,  dans  le  cours  de  leur  navigation, 
de  leurs  manœuvres  et  pouvaient  se  conformera  ces  usagés, 
de  constater  si  la  surveillance  prescrite  par  lesdîts  usages 
s'exerçait  sur  l'un  et  l'autre  navire  suffisamment  pour 
éviter  Tabordage  ; 

»  Attendu  qu'il  est  établi  qu'une  surveillance  existait  sur 
la  Bonne-Mère  ;  que  les  hommes  de  l'équipage  se  trou- 
vaient sur  le  pont,  que  là  spontanéité  de  leurs  déclara- 
tions ne  laisse  aucun  doute  à  cet  égard; 

»  Qu'ail  n'Bst  pas  moins  certain  q^u'ils  ont  dû  avoir  con- 
naissance dli  Saint' Jean-Baptiste  avant  l'abordage ,  les.  re- 
gards de  l'homme  en  mer,  quand  un  travail  ne  l'occupe 
pas,  étant  instinctivement  portés  au  large  ; 

»  Que  si  l'on  repi:ochait  à  Hatgand  de  ne  s'être  pas  alors 
plus  éloïgné  du  bateau  en  vue,  les  circonstances  de  temps 
et'  de  vent  le  justifient  et  pouvaient  lui  permettre  d'appro- 
cher ou  de  se  laisser  approcher  sanè  avoir  à  appréhender 
une  collision ,  pourvu  que  le  bateau  rencontré  eût  veillé 
comme  lui  ; 

Attendu  q^ie  dû  ïappart  de  Bruchet,  représentant  fituret, 
empêché  par  maladie,  il  résulte  que  les  deux  hommes  de 
qttai*t ,  suï*  le  pont  du  Saint-Jean-Baptisîe ,  aperçiirent 
tout  à  coup  un.  navire  venant  à  eux  et  déjà  trop  près  pour 
éviter  Pabordage  ; 

»  Que  cette  découverte  instantanée^  alors  que  la  !brise 
étail*  faible  et  que  le  Snint^Jea^^J^tiste  ne^^filaît  ^^^on 


t  :  '  /  •/ 


(211) 

nœud  et  demi,  ainsi  que  le  déclare  Bruchet,  a  tout  le  ca- 
ractère d'une  surprise  et  permet  de  supposer  que  ces  deux 
hommes  ne  veillaient  pas  ; 

i>  Qu'en  effet  il  est  déclaré  par  l'un  d'eux,  au  même 
rapport,  qu'il  était  occupé  à  travailler; 

j>  Que  travailler  n'est  pas  veiller  ; 

T>  Que  la  faute  commise  est  d'autant  plus  grave  que, 
placé  à  l'avant  du  bateau  dans  un  but  exclusif  de  surveil- 
lance, rien  ne  devait  le  détourner  de  son  devoir; 

»  Que  Ton  ne  peut  admettre  que  si  les  douze  autres 
hommes  faisant  le  complément  de  l'équipage,  se  fussent, 
comme  ceux  de  la  Bonne-Mère,  trouvés  sur  le  pont,  l'un 
d'eux  îi'eùt  aperçu  ce  navire  d'un  tonnage  double  de  celui 
du  Saint'Jemi'Baptistey  longtemps  avant  la  collision,  le 
temps  étant  clair  et  la  brise  modérée  ; 

>  Attendu  que  les  experts  appelés  pour  constater  les  ava- 
ries de  la  Bonm-Mère,  ont  reconnu  qu'elles  s'élevaient,  à 
un  chiffre  excédant  la  valeur  dudit  navire,  avant  l'abor" 
dage  ; 

>  Que  le  fait  de  la  collision  ne  siauicait  avoir  pour  consé- 
quence de  replacer  te  navire  abordé  dans  un  état  meilleur 
que  celui  dans  lequel  il  se  trouvait  avant  l'événement  ; 

»  Que  cet  état  lui  donnait  une  valeur  de  3,500  fr.  qui, 
après  la  collision,  se  réduisait  à  celle  de  1 ,400  fr.,  diffé- 
rence en  moins  2,100  fr.  ; 

»  Attendu  que  le  remorquage,  le  halage  dans  le  port, 
le  placement  du  navire  sur  le  gril,  pour  parve^iir  à  la  cons- 
tatation du  dommage  souffert,  les  avaries  survenues  dans 
le  chargement,  les  frais  faits  pour  les  constater,  sont  le 
résultat  de  l'abordage  ; 

>  Attendu  que  la  Bonne-Mère  était  dans  des  conditians 
normales  de  navigabilité  ; 

»  Que  le  certificat  d'expertise  produit  le  constat^  sufJSlr 
samment;  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  s'arrêter  dès-lors  aux 
conclusious  subsidiaires  ; 

»  Attendu  que  l'absence  de  surveillance  sur  le  bateau  le 
Saint-Jean-Baptisiè  a  causé  le  dommage  dont  Halgand 
demande  la  réparation  ; 


(212) 

»  Le  Tribunal  condamue  Iluret  à  payer  à  Halgand  la 
la  somme  de  1,100  fr.,  montant  du  dommage  souffert  par 
la  Bonne-Mère  dans  sa  coque,  les  agrès,  apparaux  et  tous 
objets  ou  ustensiles  de  bord  ; 

»  A  rembourser  les  frais  de  remorquage  par  V Albion^  de 
halage  et  de  mise  sur  cale ,  ensemble  tous  ceux  faits  pour 
parvenir  à  l'expertise  ;  à  payer  toutes  avaries  oa  pertes 
éprouvées  par  le  chargement,  le  tout  suivant  état,  etc.  » 

Appel  par  Iluret.  Devant  la  Cour,  il  est  soutenu  pour  lui 
que  le  délai  de  vingt-quatre  heures,  imparti  par  la  loi  pour 
faire  la  réclamation  en  indemnité,  doit  courir  à  partir  de 
rheure  même  de  l'abordage,  si  le  capitaine  se  trouve  dans 
un  lieu  où  il  peut  agir  ;  que  le  capitaine  Halgand  se  trou- 
vait à  Boulogne  dans  la  possibilité  d'agir  le  10  mai  à  une 
heure  après-midi  ;  qu'il  y  resta  jusqu'à  trois  heures  sans 
faire  de  réclamation,  tandis  que  le  patron  Huret  en  fit  une 
à  ce  moment  ;  que  d'ailleurs,  le  même  capitaine  Halgand 
revint  à  Boulogne  le  même  jour,  10  mai,  à  cinq  heures  du 
soir,  sans  plus  en  sortir  ;  que  sa  réclamation  ne  fut  faite 
que  le  lendemain  11,  à  cinq  heures  du  soir,  c'est-à-dire 
bien  plus  de  vingt-qnatre  heures  après  le  moment  de  l'a- 
bordage ;  qu'il  est  donc  non  recevable  dans  sa  demande. 
Quant  au  fond,  il  est  dit  que  la  faute  imputée  au  capitaine 
Huret  n'est  pas  établie. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Sur  la  fin  de  non  recevoir  : 

Attendu  que  le  capitaine  se  doit  d'abord  et  tout  entier 
à  la  conservation  de  son  navire  ; 

Que  l'on  ne  peut  dire  qu'il  ait  pu  faire  de  protestation 
pour  cause  d'abordage  Jorsque ,  le  10  mai  1859,  vers  une 
heure^  il  s'est  fait  jeter  en  canot  au  port  de  Boulogne,  afin 
d'aller  y  chercher  du  secours  pour  son  navire  naufragé,  et 
qu'il  en  est  sorti  trois  heures  après,  aussi  tôt  que  le  secours 
a  pu  lui  être  fourni  ; 

Qu'on  ne  peut  considérer  le  capitaine  comme  ayant  pu 
agir  à  Boulogne  que  lorsqu'il  est  rentré  après  six  heures 
du  soir,  et  après  que  son  navire  a  été  remorqué  près  de 
l'estacade  ; 


(213) 

Oue  dès-lors  la  protestation  faite  l^e  H,  à  cinq  haures 
du  soir,  a  été  faite  en  temps  utile  ; 

Au  fond  :  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 

Met  Tappellalion  au  néant,  ordonne  que  le  jugement  dont 

est  appel  sortira  effet ,  condamne  l'appelant  à  l'amende  et 

aux  dépens  de  la  cause  d'appel. 

Du  20  avril  1860.  2^  chamb.  civ.  Présid.,  M.  Danel; 
minisl.  publ.,M.  Berr,  avoc. -gén.;  avoc,  Mes  Duhem  et 
Talon;  avou.,  M^s  Iluret  et  Villette. 


MARIAGE.  —  DOMICILE  conjugal.  —  habitation  de  la 

FEMME.  — DROIT  DE  CONTRAINTE  DU  MARI. — CONDITIONS. 

La  femme  ne  peut  être  contrainte  d'habiter  avec  son  mari 
qu'atUant  que  celui-ci  justifie  qu'il  peut  la  recevoir  sui- 
vant son  état.  (G.  Nap.,  art.  214.)  (1). 

(Lambert  C  Charlemaîgne.) 

Le  sieur  Lambert ,  ouvrier,  demeurant  à  Bergues ,  a 
épousé  une  veuve  Garton,  née  Charlemaigne.  Depuis  quel- 
que temps  déjà,  ils  ont  cessé  de  vivre  dans  la  même  habi- 
tation. La  dame  Lambert  a  fixé  sa  résidence  à  Dunkerque, 
tandis  que  son  mari  continue  de  demeurer  à  Bergues.  Une 
séparation  de  biens  est  intervenue  entre  eux,  et  Lambert 
a  obtenu  des  Tribunaux  que  sa  femme  lui  fournit  une  pen- 
sion alimentaire  qu'il  a.  même  fait  augmenter  par  une 
deuxième  demande. 

Dans  cette  situation  des  choses,  Lambert  a  demandé  à 
sa  femme  la  réintégration  du  domicile  conjugal.  La  dame 
Lambert  s'y  est  refusée,  en  s'appuyant  sur  la  triple  cir- 
constance de  la  séparation  de  biens ,  de  ki  pension  déjà 
fournie  à  son  mari,  et  de  l'état  de  pénurie  où  il  se  trou- 
vait. 

Le  Tribunal  de  Dunkerque  a  accueilli  cette  défense  et 
prononcé  comme  il  suit  : 

(1)  V.  dans  ce  sens  Merlin,  Répert.,  yoMari;  Chardon,  Puissance 
maritale,  t.  1 ,  n»  24;  Duranton,  t.  2,  n»  437;  Vazeille,  Traité  du  M<^ 
rtage,  t.  2,  p.  25.  —  Bruxelles  11  nov.  1807,  S.  V.  Coll.  nouv.  à  sa 
date;  Paris  30  oct.  1810,  id.;  Nancy  14  avril  1811,  Journ.  Pal.  à  sa 
date  ;  Colmar  14  ianv.  1812,  id.  ;  Rouen  21  nov.  1812,  S.  V.  Coll.  nouv. 
à  sa  date  ;  Paris  19  avril  1817,  id.  ;  Cass.  rej.  9  janv.  1826,  id. 


(214)  -      . 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  la  dame  Lambert  opposeàla  demande 
de  son  mari,  tendante  à  la  réintégration  du  domicile  con- 
jugal, une  fin  de  non-reoevoir  tondée  sur  ce  que,  depuis 
plusieurs  années,  il  a  volontairement  vécu  séparé  de  fait 
d'avec  elle,  et  qu'il  a  en  quelque  sorte  fait  sanctionner  en 
justice  cet  état  de  choses,  en  demandant  deux  fois  devant 
les  Tribunaux  une  pension  alimentaire  ; 

3)  Considérant  que  séparé^  quant  aux  biens  seulement, 
le  sieur  Lambert  pouvait  en  effet  exiger,  dès  le  principe, 
le  séjour  de  sa  femme  dans  le  domicile  conjugal;  qu'il  s'est 
abstenu  de  le  réclamer  ou  ne  l'a  fait,  comme  dans  l'ins- 
tance actuelle,  que  pour  le  besoin  de  sa  demande  en  aug- 
mentation de  pension  alimentaire  dont  le  chiifre  actuel 
doit  être  considéré  comme  suffisant;  qu'en  agissant  ainsi, 
il  a  accepté  cette  situation  qui)  sans  être  absolum^it  régu- 
lière ,  doit  cependant  déterminer  le  Tribunal  à  repousser 
son  action  qui  ne  parait  point  inspirée  par  le  sentiment  de 
respect  dû  à  la  foi  jurée  entre  époux,  mais  par  un  motif  de 
spéculation  ; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  déclare  Lambert  non  rece- 
vable  ni  fondé  en  sa  demande,  fins  et  conclusions,  et  au 
besoin  l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  Lambert.  Pour  luij  il  est  dit  devant  la  Couripie 
la  cohabitation  des  époux  constitue  essentiellement  l'étal 
de  mariage,  base  de  la  famille.  Les  dispositions  si  formelles 
de  l'art.  2l4G.  Nap.,  quant  à  la  femme,  ne  peuvent  res- 
ter sans  sanction.  11  est  eh  effet  de  jurisprudence  incontes- 
table aujourd'hui  que  la  femme  qui  se  refuse  de  réintégrer 
le  domicile  conjugal,  peut  y  être  forcée  par  la  contrainte 
personnelle,  manu  militari,  par  la  saisie  de  ses  revenus 
personnels  ou  par  une  condamnation  à  des  dommages-in- 
térêts, moyens  dont  l'application  est  laissée  à  l'appréciation 
des  juges. 

Aux  termes  de  l'art.  1448,  la  femme  qui  a  obtenu  la 
séparation  de  biens  doit  contribuer,  dans  la  proportion  de 
ses  facultés  et  de  celles  de  son  mari,  aux  frais  du  ménage 
commun  ;  elle  doit  même  supporter  ces  frais  intégralement, 
s'il  ne  reste  rien  au  mari.  Le  mari  étant  chef  du  ménage, 


(215) 

c'est  à  lui  que  la  part  contributive  de  la  ferame  doit  être 
versée,  et  c'est  lui  qui  doit  seul  en  avoir  la  disposition. 

Dans  Tespèce ,  le  mari  n'a  aucune  ressource  ;  il  est  âgé 
de  soixante  ans  et  se  trouve  dans  le  cas  de  la  disposition  de 
Tart.  1448*  Par  suite,  la  femme  dfâWa  verser  en  sefs  mains 
lès  Sommes  nééessaircs  pout  isubvenir  aux  dépenses  du 
ménage  Coïftmun. 

La  Cour  a  confirmé  le  j  ugettiènt. 

ARRÊT. 

LAOOUR';  —  AtteMu  que  si,  aax  termes  de  l'art.  214 
C.  Nâp.,  la  femme  est  témite  d'habiter  aveu  son  mari, 
celui-ci  doit  la  recevoir  seloii  son  élat,^ 

Que  l'appelant  ne  jljsirfie.  point  qu'îï  soit  aujourd'hui,  à 
cet  égard,  dans  les  conditions  voulues  par  la  loi  ; 
Par  ces  motifs  : 

Confirme  le  jugement,  déclare  l'appelant  (Juânt  â  présent 
non  recevable  dans  sa  demande,  etle<condaïnne  à  l'amende 
et  aux  dépens  de  la  cause  d'appel. 

Du  9mai  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  l«r 
présid.;  minist.  pubL,  M.  Morcretle,  l^r  avoc.-gén.  ;  avoc, 
Mes  Ed.  Lemaire  et  Coquelin  ;  avou.,  fes  Lavoix  et  Estabel. 


BREVET  D'INVENTION.  —  défaut  de  nouveauté.  —  pro- 
cédé «ÉLEVÉ  d'anciens  BREVETS.  —  iPOUÙES  A  ESTROPPES 
EXTÉRIEURES  ET  INTÉRIEURES.  —  VARIÉTÉS.  —  NON  CON- 
TREFAÇON. 

Ne  peut  être  i^onsidéré  comme  une  invention  le  fait  d'avoir 
signalé  comme  étant  préférable  à  un  autre,  dans  telle  hypo- 
thèse donnée.,  V emploi  d'un  procédé  tombé  dans  le  do- 
maine public. 

Ainsi,  que  des  brevets  qui  71' existent  plus  aient  été  pris,  par 
Vun  pbur  des  poulies  à  estropp^s  continues  et  extérieu- 
res, par  l'autre  pom  despmlies  où  Vestivppe  est  ptacée  à 
VirUériem  de  la  caisse,  et  qu'un  inventmr  se  fasse  bre- 
veter pour  une  poulie  à  estroppe  extérieure;  qu'ensuite, 
par  voie  de  certificat  d'addition,  il  adopte  définitivement 
t estroppe  à  V intérieur,  en  déclarant  ce  second  mode  su- 
périeûr  au  premier,  il  ne  peut  y  avoir  invention. 

Il  n'importa  d'ailleurs  qu'une  variation  existe  entre  les  es- 
trôppès;  les  pûûUeè  mnsi  tombées  dans  le  domaine  public 


(216) 

7è6  peuvent  donner  lieu  à  la  contrefaçon.  (L.  5  juillet 
1844,  art.  30.) 

(Woussen  C.  Malo.) 

M.  Woussen,  constructeur  de  navires  à  Dunkerque ,  qui 
avait  pris  un  brevet  pour  un  système  de  poulies  qu'il  em- 
ployait, l'avait  fait  suivre,  en  1856  et  1857,  de  certificats 
d'addition.  Ce  système,  après  avoir  consisté  à  placer  Tes- 
troppe  à  l'extérieur,  avait  été  par  lui  ramené  aune  estroppe 
intérieure  qu'il  déclarait  préférable  à  l'autre,  et  d'ailleurs 
conforme  aux  principes  de  son  brevet  En  1859,  il  fit  saisir 
chez  M.  Malo  des  poulies  de  cette  dernière  espèce,  et  pré- 
tendit qu'elles  étaient  contrefaites  sur  les  modèles  décrits 
dans  ses  brevets.  M.  Malo  soutint  que  ces  sortes  de  pou- 
lies, autrefois  brevetées,  il  est  vrai,  étaient  désormais  tom- 
bées dans  le  domaine  public. 

Le  Tribunal  de  Dunkerque  accueillit  la  défense,  et  ren- 
voya Malo  de  la  plainte  en  contrefaçon. 

Appel  devant  la  Cour,  qui  a  rendu  l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT. 

XA  COUR  ;  —  Donne  acte  à  Malo  de  son  appel  incident, 
et  statuant  sur  les  appels  respectifs  des  parties  : 

Attendu  qu'antérieurement  au  brevet  de  Woussen,  le 
baron  Séguier,  en  1847,  s'était  fait  breveter  pour  une  pou- 
lie à  estroppe  continue  et  extérieure ,  en  fer,  qui  permettait 
d'établir  en  métal  l'essieu  qui  reposait  sur  les  côtés  de  l'es- 
troppe  en  traversant  les  joues  de  la  poulie; 
.  Attendu  qu'en  1848,  Barbe  et  Morisse  ont  pris  un  bre- 
vet pour  une  poulie  où  l'estroppe  en  fer  était  placée  à  l'in- 
térieur de  la  poulie ,  ce  qui  permettait,  par  le  rapproche- 
ment des  points  d'appui  de  l'essieu,  d'en  diminuer  le 
diamètre,  et  par  suite  les  frottements  du  réat; 

Attendu  que  les  inventeurs  font  remarquer  qu'iL  sera 
inutile  de  prolonger  l'estroppe  jusqu'au  bas  de  la  poulie, 
et  qu'on  poun*a  ainsi  économiser  de  la  matière  et  gagner 
de  la  légèreté  pour  Tengin  ;  mais  qu'ils  n'en  sont  pas  moins 
brevetés  pour  le  placement  de  l'estroppe  à  l'intérieur  de  la 
caisse  de  la  poulie,  qu'elle  soit  prolongée  jusqu'au  bas  ou 
qu'on  préfère  la  raccourcir  pour  les  motifs  qu'ils  donnent  ; 

Attendu  que  le  3  novembre  1855,  Woussen  a  pris  un 


(217) 

brevet  pour  une  poulie  à  estroppe  exlcrieure  en  fer,  et 
qu'il  fixe  ou  soude,  au  point  de  passage  de  Tessieu  dans 
Testroppe,  des  talons  métalliques  formant  coussinets,  en- 
taillés dans  le  bois  ; 

L'inconvénient  auquel  il  veut  remédier,  c'est  que,  dans 
la  poulie  en  usage,  Taxe,  sur  une  partie  de  la  longueur^ 
se  trouve  libre  ou  repose  sur  du  bois  qui  s'use  facilement, 
tandis  que,  dans  sa  poulie,  l'essieu  portant  sur  des  coussi- 
nets en  fer,  on  peut  en  diminuer  beaucoup  le  diamètre,  au 
profit  de  la  solidité  du  réat  et  de  son  facile  mouvement; 
Attendu  que,  par  un  brevet  d'addition  pris  dans  l'année, 
le  29  octobre  4856,  Woussen  adopte  le  système  Barbe- 
Morisse,  tombé  dans  le  domaine  public;  qu'il  place  son 
estroppe  à  l'intérieur  de  la  caisse  et  qu'il  déclare  que  ce 
mode,  supérieur  au  premier,  procède  du  même  principe 
que  le  brevet  principal  ; 

Attendu  que  si  celte  dernière  disposition,  appai^tenant  à 
tous,  n'était  pas  susceptible  d'être  brevetée,  il  en  est  de 
même  de  la  première,  qui  consiste  dans  le  rapprochement 
à  la  sortie  du  réat  des  supports  en  métal  de  l'essieu,  afin  de 
lui  donner  plus  de  solidité  et  de  permettre  de  diminuer 
son  diamètre  ; 

Que  ridée  première ,  le  résultat,  le  but  et  les  moyens, 
sauf  une  variation,  sont  les  mêmes  que  pour  le  brevet 
Barbe-Morisse  ; 

Attendu  qu'il  s'agit,  au  surplus,  uniquement  d'une  con- 
trefaçon au  deuxième  procédé  indiqué  dans  le  breyet  d'ad- 
dition ; 

Attendu  qu'en  vain  Woussen  prétend  que  son  système 
diffère  du  système  Barbe-Morisse ,  en  ce  que  son  estroppe 
est  continue,  et  qu'il  pare  ainsi  au  danger  que  peut  ame- 
ner la  rupture  de  l'essieu ,  le  fardeau  étant,  en  ce  cas , 
maintenu  par  l'estroppe  ; 

Attendu  que  la  continuité  de  l'estroppe  n'est  pas  chose 
nouvelle  ; 

Attendu  que  Barbe  et  Morisse  ne  l'excluent  pas  lorsqu'ils 
placent  leur  estroppe  à  l'intérieur  de  la  poulie  ;  qu'ils  font 
seulement  remarquer  qu'il  y  aura  économie  à  raccourcir 


(218) 
Teslroppe,   qu* on  y  gagnera   en    métal  et  en  légèreté; 

Attendu  que,  pendant  l'existence  du  brô^et  Barbè-Mo- 
risse,  il  y  eût  eu  évidemment  contrefaçon  à  ihlrôduire 
dans  l'intérieur  de  la  caisse  Testroppe  soît  prolongée,  soit 
ïticcourcie  ; 

'  Attendu  que  ni  dans  son  brevet  d'invention,  ni  date  son 
premier  brevet  d'addition ,  Wbusseh  ne  signale  l'avantage 
de  l'estroppe  continue,  pour  le  cas  dé  rupttii'e  de  Tessieu, 
composé  d'une  matière  plus  résistante  que  le  reste  de  l'ap- 
pareil et  surtout  que  la  corde  enroulée  au  réal  ; 

Que,  loin  de  là,  il  dit,  dans  son  premier  brevet,  ique 
dans  aucun  cas  l'axe  ne  peut  tomber,  et  qu'il  mâiritieal 
parfaitement  Fécartement  des  joues  et  de  l'armure; 

Qu'on  ne  peut  considérer  comme  une  invention  le  fait 
d'avoir  signalé  comme  préférable)  dans  une  hypothèse 
donnée,  l'emploi  d'un  procédé  appartenant  à  tous; 

Attendu  que,  d^iaprès  ces  motifs,  le  brevet  Woussen  est 
nul  pour  défaut  dé  nouveauté,  et  qu'il  tombe  avec  les  ad- 
ditions qui  s'y  rattachent; 

Sans  avoir  besoin  de  statuer  sur  l'exceptioin  personnelle 
qu'aurait  à  faire  valoir  Malo 'pour  l'emploi  qu'il  aurait  fait 
antérieurement  au  brevet  d'addition  de  Woussen,  du  15 
juin  1847,  d'estroppe  prolongée,  traversée  à  son  ex tréttiilé 
par  une  cheville  de  fer  destinée  à  sotitenir  lé  ringot  dans 
les  poulies  à  conjugaisons  ; 

Met  te  jugetnent  dont  est  appel  au  néantj  dit  nuls  pour 
défaut  de  nouveauté  les  brevets  d'inven^tion  et  d'addition 
de  Woussen  ; 

Donne  main-levée  de  la  saisie  pratiquée  par  lui,  le  con- 
damne en  300  fr.  de  dommages-intérêts  envers  Malo  ; 

Le  condamne  à  l'amende  et  aux  dêpêôs,  etc; 

Du  16  févrîerl860.  2®  chamb.  Présid.,M.DaneI  ;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc. ,  M*»»  Duhem  et  Édm. 
Lemaire;  avou.,  M©»  Lavoix  et  Yittette. 

APPEL  CORRECTIONNEL.  —  jugement  ï>ar   défaut.  — 

.      OPPOSITION.  -^   TARDIVETÉ. 

fs/C  délai  d! appel ,    en  malière  correclioimdle ,  court  dés 
avant  Vexpiration  du  délai  d'opposition. 


(219.) 

Ainsi  se  trouve  tardif,  et  par  suite  frappé  de  déchéance, 
F  appel  d'un  jugement  correctionnel,  lorsqu' interjeté  après 
ks  dix  jours  de  la  signification,  il  Va  été  cependant  dam 
les  dix  jours  qui  ont  suivi  V  expiralion  du  délai  légal  de 
ï  opposition,  alors  même  qxjceV  opposition  avait  été  formée, 
d'ailleurs  tardivement.  (G,  inst.  crim. ,  art.  187  et 
203.)  (1). 

(Leroy  C.  minist.  publ.) 

Le  31  janvier  1860  a  été  rendu,  par  le  Tribunal  correc- 
tionnel d'Avesnes,  un  jugement  qui  a  condamné  par  défaut 
un  sieur  Leroy,  maître  d'hôtel  à  Maubeuge,  pour  délit  de 
diffamation. 

Le  jugement  est  signifié  le  27  février  suivant.  Le  23 , 
Leroy  y  forme  une  opposition  tardive.  Le  28,  il  interjette 
appel;  on  lui  oppose  nouvelle  tardiveté. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Vu  l'art.  203  G.  inst.  crim.  ; 

Attendu  que  cet  article  prononce  la  déchéance  de  l'ap- 
pel, si  la  déclaration  d'appeler  n'a  pas  été  faite  au  grelTc 
du  Tribunal  qui  a  rendu  le  jugement,  et  si  cette  décision 
est  rendue  par  défaut,  dix  jours  au  plus  tard  après  celui 
de  la  signification  qui  en  aura  été  faite  à  la  partie  con- 
damnée ; 

Que  le  jugement  par  défaut  attaqué  a  été  prononcé  le 
31  janvier  1860,  et  a  été  signifié  à  Leroy,  parlant  à  sa  per- 
sonne, le  17  février  suivant  ; 

Que  Leroy  n'a  interjeté  appel  de  ce  jugement  que  le  28 
février  1860,  après  les  dix  jours  qui  ont  suivi  la  significa- 
tion de  cette  sentence; 

Que  cet  appel  est  tardif;  que  l'opposition  formée  le  23 
février  1860,  au  jugement  par  défaut  rendu  le  31  janvier 

(1)  C.  cass.  22  jânv.  1825,  S.  V.  25,  i,  318;  Paris  27  mai  1829, 
I.  P.  à  sa  date.  — Consult.  aussi  :  Cass.  19  avril  1833,  DaL  Pér.  33, 1, 
>71  ;  Cass.  20  août  1841,  J.  Pal.,  t.  1,  4845,  p.  593;  Metz  20  août 
1821,  Bourges  25  juill.,  J.  Pal.  à  leur  date. 

Contra.  Cass.  belge  17  mars  1836;  Bruxelles  29  mai  1834;  Colmar 
Î4  oct.  4843  (î.  Pal.  à  leur  date)  ;  Besançon  26  noT.  4843  (J.  Pal.,  1. 1, 
844,  p.  640). 

V.  encore  r  Legraverend,  chap.  3,  sect.  5,  t.  2,  p.  354  ;  Bourguignon, 
ur  Tart.  150,  t.  1,  p.  353;  Berriat-St-Prix,  no  1078. 


(220) 

précédent,  n'a  pu  ni  proroger  ni  suspendre  le  délai  d'ap- 
pel au  profit  de  Leroy  ; 

Qu'en  effet  les  art.' 387  et  203  C.  inst.  crim.,  qui  ont 
accordé  à  la  partie  condamnée  le  droit  de  former  opposi- 
tion au  jugement  par  défaut  ou  d'en  interjeter  appel,  ont 
pris,  pour  point  de  départ  du  délai  d'opposition  et  d'hap- 
pé!, la  signification  de  ce  jugement,  et  ont  fait  courir  si- 
multanément ces  délais  ; 

Que  c'est  à  la  partie  condamnée  à  opter  entre  l'un  des 
deux  modes  de  recours  consacrés  par  le  législateur  ; 

Que  si  la  partie  a  recours  à  l'opposition,  et  si  cette  oppo- 
sition est  régulière  et  formée  en  temps  utile,  le  juge  devra 
connaître  à  nouveau  de  la  cause,  et  la  sentence  qui  inter- 
viendra sera  susceptible  d'appel  ; 

Que  si  l'opposition  est  irrégulière  ou  tardive,  la  partie 
ne  peut  invoquer  l'irrégularité  ou  la  tardiveté  de  son  op- 
position pour  être  relevée  de  la  déchéance  prononcée  par 
l'art.  203  C.  inst.  crim.; 

Qu'en  fait  Leroy  a  formé  opposition  au  jugement  par 
défaut  <lu  31  janvier  1860,  signifié  le  17  février  suivant, 
mais  que  cette  opposition,  notifiée  le  23  février,  a  été  dé- 
clarée tardive  et  inopérante  par  jugement  du  28  février 
1860,  passé  en  force  de  chose  jugée; 

Que  par  suite  Leroy  ne  peut,  ni  en  droit  ni  en  fart,  in- 
voquer l'opposition  par  lui  formée  pour  valider  et  rendre 
recevable  Tappel  par  lui  interjeté  après  les  dix  jours  qui 
ont  suivi  la  signification  du  jugement  attaqué  ; 

La  Cour  déclare  non  recevable  l'appel  interjeté  par  Le- 
roy le  28  février  1860,  et  vu  l'art.  194?  C.  inst.  crim.; 

Condamne  Leroy ,  Jean-Joseph ,  aux  frais  de  la  cause 
d'appel. 

Du  "25  avril  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Durnon; 
minist.  publ.,  M.  Carpentier;  rapp.,  M.  Minart,  conseill.; 
avoc,  Me  Em.  Flamant. 

GARDE-CHAMPÊTRE.  —  agent  cÉPOsiTAmE  de  la  force 

PUBLIQUE,  OU  OFFICIER  DE  POLICE  JUDICIAIRE.  —  OUTRAGE. 
—  LOI  APPLICABLE. 

Lorsqu'un  garde-champêtre  agit  pour  Vexéouimi,  soit  du 


(221) 

jugement,  soit  des  lois  et  règlements  de  police,  dont  la 
surveillance  lui  est  confiée  par  V autorité  municipale,  il 
doit  être  considéré  comme  un  agent  dépositaire  de  la 
force  publique,  et  les  outrages  publics  qui  lui  sont  adres- 
sés dans  r exercice  de  ces  actes ,  doivent  être  punis  sui- 
vant les  dispositions  de  fart.  224  C.  pén,,  non  d'après 
celles  de  Vart.  6  de  la  loi  du  25  mars  i822. 

Il  y  a  lieu  d'appliquer  cette  dernière  loi,  alor^  seulement 
que  les  outrages  publics  par  paroles  sont  adressés  au 
garde-champêtre  agissant  comme  officier  de  police  judi- 
ciaire, en  exécution  des  art,  9  et  16  C,  inst.  crim.  Il  est 
ici  fonctionnaire  public. 

Ainsi  les  outrages  adressés  au  garde-champêtre,  agissant 
pour  l'exécution  d'un  arrêté  municipal  réglant  Vheure 
de  la  fermeture  des  cabarets,  sont  punis  par  Vart,  224 
C.  pén.,  et  non  autrement  (i). 

(Empis,) 

Un  sieur  Empis,  de  la  commune  de  Saintes ,  a  été  con- 
damné, par  le  Tribunal  correctionnel  de  Lille,  à  la  peine 
d'un  mois  d'emprisonnement  pour  outrages  publids  par 
paroles  envers  le  sieur  Descamps,  garde-champêtre,  qui,  à 
rheure  de  la  rétraite,  faisait  fermer  les  cabarets  de  cette 
commune,  en  conformité  d'un  arrêté  municipal. 

On  a  fait  au  prévenu  application  de  l'art,  b  de  la  loi  du 
25  mars  4822. 

Appel  par  Empis.  Devant  la  Cour,  il  est  soutenu  par  la 
défense  que  le  garde-champêtre  ne  pouvait  être  considéré 
comme  fonctionnaire  public,  alors  qu'il  n'agissait  que 
pour  l'exécution  d'un  arrêté  du  maire  ;  qu'il  avait  seule- 
ment, dans  ce  cas,  le  caractère  d'agent  de  la  force  publique. 

La  Cour  a  réformé  le  jugement. 

ARRÊT. 
LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'il  résulte ,  de  l'instruction  et 

(1)  Cet  arrêt  est  confcnrme  à  la  jurisprudence  de  la  Cour  de  cassation 
(V.  Cass.  20  oct.  1847,  Pal.  t.  2, 1848,  p.  92)  et  aux  précédents  même 
de  la  Cour  de  Douai  (V.  Douai  20  déc.  1838,  Man.  3,  204,  et  i3  mars 
1856,  Jurisp.  14,  232)  ;  mais  Farrét  que  nous  rapportons  précise  plus 
nettement  que  tout  autre  les  distinctions  qu'il  faut  admettre,  et  dans  le 
caractère  oes  fonctions  du  garde-champétre,  et  dans  Vapplication  des 
lois  sur  le  délit  d'outrage  par  paroles,  gestes  ou  menaces.  Nous  croyons 
d'autant  plus  utile  de  le  publier  qu'il  a  été  suivi  de  deux  autres  réfor- 
mant des  jugements  des  Tribunaux  du  ressort,  ce  qui  indique  que  ceux- 
ci  n'ont  pas  encore  adopté  les  mêmes  principes. 


(222) 

des  débals,  que  les  26  el  27  décembre  1859,  Empis,  dans 
son  cabaret,  dans  celui  de  Boutry  à  Saintes,  et  dans  le  pré- 
toire du  juge  de  paix  à  Haubourdin,  a  dit  à  plusieurs  re- 
prises, au  garde-cbampêtre  Descamps,  qu'il  Femm , 

que  Descamps  était  un  po/icAmeWe,  que  s'il  était  civil  comme 
lui,  il  ne  pèserait  pas  vingt  livres  dans  ses  maiiis; 

Qu.^  ces  propos  constituent  dies  outrages  publics  par  pa- 
roles adressés  à  un  garde-chârapêlre  ; 

Que,  dans  le  cas  où  un  garde-champêtre  agit  comme 
officier  de  police  judiciaire,  en  exécution  des  art.  9  et  16 
C.  inst.  crim,  ou  d^lois  spéciales  qui  hjii  ont  attribué  cette 
qualité,  il  doit  être  considéré  comme  un  fonctionnaire  pu- 
blic, et  les  outrages  publics  par  paroles  qui  lui  sout  adres- 
sés, à  raison  de  ces  fonctions  ou  de  cette  qualité,  doivent 
être  réprimés  par  Tart.  6  de  la  loi  du  25  mars  1822  ; 

Qu'il  ne  saurait  en  être  de  même  loijsque  le  garde- 
champêtre  agit  pour  Texécution  soit  des  jugements,  soit 
des  lois  et  réglem.ents  de  police  dont  la  surveillance  lui  est 
conjQée  par  Tau^torité.  municipal^  ; 

Que,  dans  ce  cas,  il  doit  être  considéré  comme  un  agent 
dépositaire  delà  force  publique,  et  que  l'art  227  C.  pén. 
punit  Feutrage  qui  lui  est  fait  par  paroles  dans  Fexercice 
ou  à  Foccasion  de  ses  fonctions  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  par  Finstruction  qu'au  moment 
où  Déscamps  a  été  outragé  par  le  prévenu^,,  le  garde-chaih- 
pêtre  agissait  pour  Fexécution  d'un  arrêté  municipal'  pris 
par  le  maire  de  Saintes  dans,  le  cercle  de  ses  attributions, 
et  réglant  Fheure  de  la  fermeture  des  cabarets  de  celte 
commune  ; 

Que^  par  suite,  le  garde-çhampêtre  n'agissait  pas  comme 
officier  de  police  judiciaire ,  qu'U  était  alôr a  agent  déposi- 
taire de  la  force  publique^  et  que  le?  outrages  à  lui  faits 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions  doivent  être  puftis  par 
l'art.  224  C.  pén,; 

Vu  ledit  article,  ensemble  l'art.  194 C.  inst.  crim.; 

Ëmendant  la  sentence  doutent  appel  el  statuant  par  juge- 
ment nouveau,  déclare  Empis  coupable  d'outrages  faite  par 
paroles  à  un  agent  dépositaire  de  la  force  publique  dans 


(223) 

Texerciçe  de  ses  fondions,  cl  pour  réparation  le  condamne 
à  16  fr.  d'amende; 
Le  condamne  aux  frais  de  première  instancç  et  d'appel. 

Du  28  fév.  1860.  Cbartib.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
minist.  publ.,  M.  Garpenlier;  avoc,  M^  Armand  Flamen. 


Deux  arrêts  (affaires  Masure  et  Douchement,  21  et  30  mai 
1860)  ont  été  readuspar  1^  même  Chambre,  et  ont  repro- 
duit les.  mêmes  principes. 


DÉLIT.  —  AMNISTIE.  —  APPLICATION.  —  DÉLITS  NON  JUGÉS. 
-    — POURSUITB.I5ION.  ENCORE  INTRODUITE. 

L'amnistie  du  i6  aofU  i859  s'applique  aux  délits  dont  les 
poursuites  sont  engagées  ou  à  introduire,  comme  à  ceux 
qui  ont  été  jugés,  pourvu  qu'ils  soient  antérieurs  au 
décret  {i). 

(Pêche.) 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  qu'aux  termes  du  décret  dn  16 
août  1859,  amnistie  pleine  et  entière  a  été  accordée  à  tous 
les  îndividuâ  qui  oxd  été  condamnés  pour  crimes  et  délits 
politiques; 

Que  le  décret  s'applique  aux  délits  politique^'  dont  les 
poursuites  sont  engagées  ou  à  introduire  comme  à  ceux 
qui  ont  été  juçés,  pourvu  qu'ils  soient  antérieurs  à  Tam- 
nistie  ;  ' 

Attendu,  que  le  fait  reproché  à  Pêche  aurait  été  commis 
le  15.  août  1859i>  et  qu'il  consisterait  en  offenses  vers  l'Em- 
pereur, délit  prévu  et  puni  par  l'art.  86  C.  pén.,  miodifié 
par  "la  loi  du  10  jiiin  1.853; 

Qu^  ce  délit  serait  politique  et  antérieur  au  décret  du  16 
août  1859;  q^e,.  par  suite,  il  est  éteint  par  l'amnistie; 

Qu'à  tort  les  premiers  juges,  ont  examiné  et  jugé  laquesr 
lion  de  savoirsi  le  prévenu  était  ou  n'était  pas  coupable  du 
délit  qui  lui  était  imputé  ; 

(1>  Instruct.  mmisi,  coût  V.  eji  mat.  forçsi.,  Circ4|l.  Direct,  géiji^  des 
forêts,  20  juin  1837. 


(224) 

Qu'ils  auraient  dû  se  borner  à  déclarer  le  délit  éteint  par 
le  décret  d'amnistie; 

Qu'il  y  a  lieu  de  réformer  la  sentence  ; 

Met  le  jugement  dont  est  appel  au  néant  ;  dit  que  le  fait 
reproché  à  Pêche  a  été  amnistié  par  le  décret  du  16  août 
1859,  et  qu'en  conséquence  il  n'y  a  pas  lieu  à  statuer;  — 
Sans  frais. 

Du  1er  mai  1860.  Chamb.  corr.  Présid.,  M.  Dumon; 
rapp.,  M.  de  Guerne,  cons.  ;  rainist.  publ.,  M.  Carpentier, 
avoc-gén.  ;  avoc,  M©  Delebecque. 


DÉBIT  DE  BOISSONS.  —  ouverture.  —  débit  ancien.  — 

CESSIONNÀIRE. 

Un  débitant  dont  le  cabaret  était  ouvert  antéi^ieurement  au 
décret  du  29  décembre  i85i ,  ne  commet  pas  de  délit, 
si,  ayant  cédé  depuis  i85i  sa  maison  et  ses  ustensiles 
de  cabaret  à  un  tiers,  il  continua  de  débiter  (quoiqu'au 
nom  et  pour  le  compte  de  son  cessionnaire)  dans  le  même 
local. 

(Mopty  C.  minist.  publ.) 

Le  sieur  Mopty  tenait  sous  son  nom,  antérieurement  à 
1851,  un  cabaret  à  Gouy  sous  Bellonne.  A  la  date  du  30 
août  1859,  il  vendit  sa  maison  et  les  ustensiles  de  $on  débit 
JL  M,  J.-B.  Lespagnol,  marchand  iirasseurà  Flines.  Ce  der- 
nier demanda  et  obtint  l'autorisation  pour  le  cabaret  qu'il 
venait  d'acquérir  ;  mais  comme  il  ne  pouvait  l'exploiter  par 
lui-même,  il  prit  le  sieur  Mopty  pour  préposé ,  et  le  char- 
gea de  gérer  en  son  lieu  et  place.  Le  lO  janvier  1860,  la 
gendarmerie  s'élant  fait  représenter  l'autorisation  et  ayant 
vu  qu'elle  était  au  nom  de  Lespagnol,  dressa  procès-verbal 
contre  Mopty  comme  débitant  sans  autorisation,  et,  le  20 
janvier,  le  tribunal  d'Arras  le  condamnait  à  six  jours  de 
prison  et  25  fr.  d'amende,  pour  violation  du  décret  du  29 
décembre  1851.  Le  lendemain  de  celte  condamnation,  M. 
le  préfet  du  Pas-de-Calais  envoyait  à  Mopty  une  autorisa- 
tion pour  pouvoir  gérer  en  son  nom  le  '  cabaret  de  M. 
Lespagnol. 

C'est  dans  ces  circonstances  que  la  Cour,  saisie  de  l'appel 
de  Mopty,  à  réformé  la  décision  des  premiers  juges  en 
statuant  en  ces  termes  : 


(225) 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  ^—Attendu  que,  de  Tinstruction  et  (tes  débats, 
résulte  la  preuve  que  le  débit  de  boissons  établi  â  Gouy 
sous  Ballonne,  par  Louis-Joseph  Mopty,  n'a  pas  été  ouvert 
postérieurement  au  décret  du  39  décembre  1851 ,  mais 
qu'au  contraire  cet  établissement,  fondé  dès  1846,  a  sans 
interruption,  depuis  cette  époque,  été  tenu  dans  le  même 
local  par  ledit  Mopty  ; 

Ooe  par  conséquent  celui-ci,  autorisé  de  plein  droit  aux 
termes  du  décret  précité,  n'avait  aucune  permission  à  de- 
mander à  Tautorité  administrative  et  se  trouvait  seulement 
exposé  aux  mesures  de  police  qui  auraient  pu  faire  ordon- 
ner la  fermeture  de  son  cabaret  ; 

Que  la  prévention  n'allègue  pas  qu'un  arrêté  de  ce  genre 
ait  été  pris  par  le  préfet  du  Pas-de-Calais,  et  qu'ainsi  au- 
cune prévention  ne  saurait  être  imputée  à  Mopty  ; 

Par  ces  motifs: — Faisant  droit  sur  l'appel  du  prévenu, 
infirme  le  jugement  du  Tribunal  d'Arras  du  20  janvier 
1860,  et  renvoie  Mopty  des  poursuites  sans  frais. 

Du  28  fév.  1860.  Chamb.  correct.  Présîd.,  M.  Dumon  ; 
rapp.,  M.  Cahier,  conseill.  ;  minist.  pubL,  M.  Carpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc.,  M®  d'Esdaibes. 


ASSURANCES  TERRESTRES.  —  ESTiMàTiONs  de  la  police. 

— ►  JUSTIFICATION  DES  PERTES. 

Les  estimations  des  objets  assurés ,  faites  dans  la  police 
d'assurances,  ne  lient  pas  l'assureur,  quoiqu'elles  aient 
été  acceptées  par  lui,  et  qu'elles  aient  servi  de  base  à  la 
détermination  de  la  prime  (1). 

En  conséquence,  l'assureur  peut,  lors  du  sinistre^  critique^' 
ces  estimations,  et  les  Tribunaux  doivent,  pour  détermi- 
ner V étendue  du  préjudice  souffert  par  l'assuré,  prendre 
en  considération  toutes  les  circonstances  de  nature  à  Vé- 
tablir  (2), 

(1-2)  V.  dans  ce  sens:  Pardessus,  n»  595,  2o;  Persil,  n»  40;  Grûji 
ît  Joliat.  no  252  ;  Alauzet,  n»  468  ;  Boudousquié,  n»  %2. — Rapprochez  : 
Douai  13  noT.  1845  (Jiirisp.  4,  76). 

TOME  XVIII.  15 


(226) 

(La  O^  l'Union  C.  Loîsel.) 

Lors  de  la  construction  du  chemin  de  fer  de  Somain  à 
Busigny,  un  sieur  Loisel,  entrepreneur  de  travaux  à  Fon- 
taine-au-Pire,  fit  construire,  sur  un  terrain  dépendant  du 
chemin  de  fer,  une  baraque  en  bois  destinée  à  servir  d'au- 
berge et  de  cantine  pour  les  ouvriers  terrassiers.  Le  25juil- 
let4856,  il  fit  assurer  cette  baraque  â  la  Compagnie  ITUnion 
pour  une  somme  de  8,500  fr.  répartie  comme  suit  :  3,000 
fr.  sur  la  construction ,  500  fr.  sur  le  mobilier.  Par  une 
seconde  police  en  llate  du  41  août  1857,  il  augmenta  le 
chiffre  de  son  assurance,  et  porta  à  5,000  fr.  la  valeur  de 
la  conslruction,  à  2,200  fr.  celle  du  mobilier. 

Le  7  août  4858,  un  incendie  détruisit  la  baraque  et  tous 
les  meubles  qu'elle  contenait. 

Après  avoir  fait,  devant  le  juge  de  paix  du  canton,  la 
déclaration  prescrite  par  la  police,  déclaration  dans  laquelle 
il  évaluait  le  dommage  par  lui  souffert  à  9,200  fr.  approxi- 
mativement, Loisel  assi^a  la  Compagnie  de  TUnion,  devant 
le  Tribunal  de  commerce  de  Cambrai^,  en  payement  de 
7,200  fr.,  somme  pour  laquelle  la  Compagnie  l'avait  as- 
suré. La  Compagnie  ayant  prétendu  que  le  dommage 
éprouvé  par  Loisel  ne  s'élevait  pas  à  cette  somme,  le  Tri- 
bunal nomma  des  experts.  Sur  les  trois  experts,  deux  es- 
timèrent à  800  fr.  la  valeur  de  la  construction  détruite  ; 
quant  au  mobilier,  ils  déclarèrent  ne  pouvoir  accepter  l'é- 
valuation donnée  par  l'assuré,  et  se  trouver  dans  l'impossi- 
bilité, faute  d'éléments  suffisants,  de  se  prononcer  sur  ce 
I)oint.  Le  troisième  expert  estima  à  4 ,600  fr.  la  valeur  de 
a  baraque,  et  déclara,  d'après  ses  renseignements  person- 
nels, que  la  valeur  du  mobilier  détruit  était  d'au  moins 
2,200  fr.,  somme  pour  laquelle  il  avait  été  assuré. 

On  revint  devant  le  Tribunal,  qui  rendit  le  jugement 
suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  Loisel  se  fit  assurer  en  4857,  par  la 
Compagnie  l'Union,  pour  une  somme  de  5,000  fr.  sur  une 
construction  à  usage  de  cantine,  située  à  Cattenières,  pour 
loger  et  héberger  les  ouvriers  du  chemin  de  fer  alors  en 
construction,  et,  en  outre,  pour  une  autre  somme  de 
2,200  fr.  sur  le  mobilier  contenu  dans  ladite  construction; 

»  Considérant  que  la  Compagnie  l'Union  a  accepté  ces 


(227) 

estimations  et  qu'elle  en  a  perçu  les  primes  jusqu'au  mo- 
ment de  l'incendie  ; 

»  Qu'elle  est  mal  fondée  aùjourd*buià  contestet^  la  Valeur 
assurée;  que  c'était  à  l'époque  du  contrat  qu'elle  aurait  dû 
faire  procéder  à  une  expertise  contradictoire,  ce  que,  eii 
principe,  toutes  les  compagnies  d'assurances  devraient 
pratiquer  comme  mesure  d'ordre  public  ; 

»  Considérant  que  la  Compagnie  l'Union  s'est  bornée  à 
alléguer  sur  beaucoup  de  points  sans  rien  prouver; 

ï  Considérant  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  s'arrêter  au  rapport 
des  experts  qui,  faute  d'éléments  suffisants,  n'ont  pu  éta- 
blir leiir  opinion  que  par  analogie  et  par  induction,  ce  qui 
n'est  pas  concluant  ; 

»  Considérant  que  Loisel  n'avait  aucun  intérêt  à  porter 
la  valeur  de  son  mobilier,  après  l'incendie,  à  6,452  francs 
85  c.  ;  qu'en  effet  son  mobilier  n'ayant  été  assuré  que  pour 
2,200  fr.,  il  ne  pouvait  pas  plus  prétendre,  en  vertu  de 
l'art.  19  de  la  police  ; 

>  Considérant  qu'il  résulte,  des  documents  produits  par 
Loisel,  qu'il  a  dépensé  plus  de  3,500  fr.  pour  sa  construc- 
tion, mais  qu'il  convient  d'admettre  une  dépréciation,  tant 
sur  la  construction  que  sur  le  mobilier;  que  le  Tribunal 
possède  des  éléments  suffisants  d'appréciation;  en  consé- 
quence, il  fixe  le  dommage  à  3,000  fr.  sur  la  construction, 
et  à  1,800  fr.  sur  le  mobilier; 

Le  Tribunal,  faisant  droit,  condamne  la  Compagnie  d'as- 
surances contre  l'incendie  TOnion  à  payer  à  Joseph  Loisel 
la  somme  4',800  fr.  pour  les  causes  avant  dites,  etc.  » 

Appel  par  la  Compagnie  l'Union. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  l'assurance  ne  doit  pas  être 
une  cause  de  bénéfice  pour  l'assuré,  et  que  l'indemnité  ne 
ioit jamais  dépasser  le  sinistre; 

Attendu  que  les  estimations  faites  dans  la  police  ne 
)rouvent  pas  qu'au  moment  de  l'incendie  les  objets  assurés 
existassent  en  nature  et  avaient  véritablement  encore  la 
aleur  qu'on  leur  a  assignée  ; 


^338) 

Attendu  que  si,  en  thèse  générale,  les  déclarations  de  la 
police  acceptées  par  la  Compagnie  peuvent  suffire  pour  dé- 
terminer l'étendue  du  sinistre,  cependant  le  juge  doit  pren- 
dre en  considération  toutes  les  circonstances  qui  peuvent 
rétablir  ; 

Attendu,  en  ce  qui  touche  le  bâtiment,  qu'il  était  enlié- 
remenl  construit  en  bois,  qu'il  devait  être  enlevé  dans  un 
avenir  rapproché,  les  travaux  du  chemin  de  fer  touchant  à 
leur  terme,  et  qu'ainsi  il  n'avait  guère  d'autre  valeur  que 
Qelle  des  matériaux  ; 

Attendu  qu'on  ne  peut  s'arrêter,  pour  estimer  le  bâti- 
ment, ni  aux  frais  de  la  main-d'œuvre ,  ni  au  prix  primitit 
des  achats  des  matériaux  qui  ont  nécessairement  subi,  par 
l'usage,  une  forte  dépréciation; 

Attendu  que  l'un  des  experts,  le  plus  favorable  à  l'in- 
timé, a  évalué  le  bâtiment  à  1,600  fr.,  moitié  de  la  valeur 
primitive  qu'il  donne  à  Tédifice  ;  qu'il  y  a  lieu  de  s'arrêter 
à  l'aveu  le  plus  favorable  aux  prétentions  de  l'intimé  ; 
En  ce  qui  touche  le  mobilier  : 

Attendu  que,  contrairement  aux  allégations  des  agents 
de  la  Compagnie  de  l'assurance ,  un  des  experts  affirme 
avoir  reconnu ,  sur  le  lieu  de  Tincendie,  les  vestiges  du 
mobilier  qu'il  constate  aussi  avoir  vu  peu  de  temps  avant 
l'incendie  ; 

Attendu  que  rappelant  ne  justifie  pas  et  ne  demande 
même  pas  à  établir  qu'avant  l'incendie  une  portion  du  mo- 
bilier aurait  été  transférée  dans  d'autres  lieux  ; 

Que  l'offre  de  prouver  que  jamais  la  maison  incendiée 
n'a  pu  contenir  plus  de  1 ,000  fr.  de  mobilier,  est  repoussée 
par  des  faits  déjà  constants; 

Sans  s'arrêter  à  la  preuve  offerte  comme  irrelevante,  met 
l'appellation  au  néant,  réduit  néanmoins  à  1,600  fr.  Tin- 
demnité  pour  le  bâtiment ,  ordonne  que  le  surplus  du  ju- 
gement sortira  effet. 

Du  10  mai  1860.  Sechamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avec,  M««  M^lin  et  Talon; 
avou..  Mes  Lavoix  et  Debeaumont. 


(229) 

lo  COPROPRIÉTÉ.  — HÉRITAGES  CONTIGUS.  — FONDS  AUÉilÉ. 

—  SERVITUDE.  » 

2»  SERVITUDE.  —  TOUR  D'ÉCHELLE.  —   EGOUT  DES  TOITS.  — 

MDR  MITOYEN. 

1»  VarL  694  C  Nap,  s'applique  excliisivement  à  Vexis- 

knce  de  servitudes  en  faveur  dHun  fonds  aliéné.  Il  ne 

peUtHre  invoqué  pour  établir  la  copropriété. 
Il  ne  concerne  pas  d* ailleurs  les  servitudes  non  apparentes, 

œmme  la  servitude  du  tour  d'échelle. 
2°  Les  conditions  de  la  servitude  d'égout  des  toits  peuvent 

aussi  bien  s^  exécuter  au  moyen  d'un  récipient  que  par  la 

chute  des  eaus  sur  le  si^L 
La  mitoyenneté  d'un  mur  est  suffisamm^erU  démontrée  pat^ 

l'existence  d^arcs-boutants  et  de  boëtes  du  côté  de  celui 

qui  {invoque. 

(Veuve  DelcoUrt  C  Glorieux.) 

En  1818  et  1820,  un  sieur  Bourla  avait  successivement 
acquis  la  propriété  de  deux  héritages  contîgus,  mais  sé- 
parés par  une  ruelle  conduisant  à  un  cours  d^eau.  En  1836, 
Bourla  avait  de  nouveau  séparé  les  de^ix  propriétés  en  les 
vendant  Tune  à  la  veuve  Delcourt,  l'autre  à  un  sieur  Glo- 
rieux. Dans  les  ventes,  il  n'avait  été  rien  stipulé  quant  à  la 
ruelle;  mais  sur  l!une  des  propriétés  à  usage  de  brasserie, 
une  porte  donnant  sur  la  ruelle  avait  été  suppriniée,  et 
sur  Fautre,  à  usage  de  saline,  l'accès  à  la  rivière  avait  été 
conservé.  Le  sieur  Glorieux  possédait  cette  saline:  Il  voulut 
élever  des  constructions  sur  le  mur  de  la  ruelle  du  côté 
de  la  brasserie.  La  veuve  Delcourt  s'y  opposa  et  prétendit 
que,  vu  le  silence  du  contrat  sur  la  propriété  particulière 
de  la  ruelle,  cette  ruelle   était  restée  commune  aux  deux 
héritages,  comme  elle  Tétait  avant  l'aliénation  ;  elle  disait 
que  tout  au  moins  il  était  resté,  en  faveur  de  sa  propriété, 
des  servitudes  de  tour  d'échelle  et  d'égout  des  toits.  Elle 
ajoutait  qu'en  fait  rien  ne  démontrait  d'ailleurs  la  mi- 
toyenneté du  mur  de  séparation. 

Le  Tribunal  n'accueillit  pas  ces  prétentions,  et  dit  que 
la  veure  Delcourt  ne  pouvait  s'opposer  aux  constructions. 
-—  AppeL 

ARRÊT, 

LA  COUR î  —  Attendu  que  le  domaine,  vendu  en  deux 
portions  en  1836,  avait  primitivement  formé  deui  pro- 


(280) 

priétés  distinctes  :  Tune,  la  brasserie  renseignée  dans  le 
contrai  de  vente  à  Bourla  du  21  décembre  1818,  comme 
tenant  d'un  côté  aux  héritiers  de  Maxirain  Dumoulin,  d*un 
autre  côté  aux  héritiers  de  Théophile  Jôssaud,  et  par  der- 
rière à  la  rivière  delà  Haynette  ;  l'autre,  acquise  par  Bourla 
le  2  septembre  1820,  dite,  dans  le  contrat,  se  composer 
d'une  grande  maison  tenant  au  sieur  Bourla,  au  sieur  Glo- 
rieux, et  par  derrière  à  la  Haynette,  derrière  laquelle  se 
trouve  un  jardin  ; 

Qu'il  est  à  remarquer  que,  ni  dans  l'un  ni  l'autre  de  ces 
contrats,  il  n'est  question  de  la  ruelle  conduisant  à  la  ri- 
vière qui  aurait  été,  suivant  l'appelante,  propriété  indivise, 
annexe  aux  deux  maisons; 

Attendu  que  l'adjudication  du  4  juillet  1836  est  égale- 
ment muette  quant  à  la  ruelle,  mais  que  voulant  partager 
le  jardin  situé  derrière  la  Haynette,  entre  les  deux  maisons, 
il  est  conditionné  que  la  séparation  se  fera  par  une  ligne 
tirée  à  plomb  de  l'angle  droit  du  pignon  de  la  brasserie, 
et'que  le*mur  de  séparation  sera  construit  à  frais  communs 
entre  les  adjudicataires  des  deux  propriétés  contiguës; 

Attexidu'que  si  la  ruelle  eût  été  une  propriété  indivise, 
la  ligne  de  séparation  du  jardin,  au  lieu  de  continuer  en 
ligne  droite,  le  pignon  de  la  brasserie  eût  été  placé  vis-à- 
vis  le  milieu  de  cette  ruelle  ; 

Attendu  que,  d'après  la  disposition  des  lieux,  l'allée  don- 
nant accès  à  la  Haynette  par  une  de  ses  extrémités,  et  se 
terminant  à  Tautre  bout  par  une  porte  de  la  maison  à  usage 
de  saline,  est  une  dépendance  de  cette  maison  qui  avait 
sur  cette  ruelle  de  nombreuses  portes  et  fenêtres ,  tandis 
qu'elle  était  inutile  k  h  brasserie  tenant  par  le  fond  à  la 
Haynette  ; 

Attendu  que  si  la  porte  ouverte  pendant  Toccupation 
simultanée  des  deux  maisons,  par  le  même  propriétaire 
qui  exploitait  à  la  fois  et  la  brasserie  et  la  saline,  avait  sa 
raison  d'existence,  elle  devait  disparaître  après  la  séparation 
des  deux  parties  du  domaine  ; 

Attendu  qu'elle  a  été  effectivement  bouchée  en  maçon- 
nerie ;  qu'ainsi  les  parties  ont  interprété  par  le  fait  l'acte 


(231) 
de  vente,  et  attribué  à  la  maison  à  usage  de  saline  la  pro- 
priété et  la  possession  exclusive  de  ia  ruelle  ; 

Attendu  que,  pour  revendiquer  la  co-propriété,  l'appe- 
lante invoque  en  vain  Tart.  694  G.  Nap.,  cet  article  n'étant 
relatif  qu'à  la  conservation  des  servitudes  ; 

Attendu  que  cet  article  ne  peut  être  appliqué  avec  plus 
de  succès  pour  réclamer  une  prétendue  servitude  du  tour 
de  l'échelle,  cette  servitude  ne  se  manifestant  point  par 
des  signes  apparents  ; 

Attendu,  quant  à  la  servitude  d'égout  des  toits,  qu'il 
n'est  pas  interdit  au  propriétaire  du  fonds  assujetti  à  rece-; 
voir  les  eaux  dans  un  récipent,  au  lieu  de  les  laisser  tomber 
sur  le  sol,  dès  que  les  eaux  du  fonds  dominant  trouvent  un 
écoulement  aussi  facile  ; 

En  ce  qui  louche  la  mitoyenneté  : 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  653  G.  Map.,  tout  mur 
de  séparation  entre  héritages  est  présumé  mitoyen,  s'il  n'y 
a  titre  ou  marque  du  contrai^re  ; 

Attendu  que,  de  chaque  côté,  les  bâtiments  des  parties 
se  sont  appuyés  sur  le  mur  litigieux,  puisque  les  experts 
constatent,  du  côté  de  l'intimé,  des  traces  d'arcs-boutants 
en  maçonnerie  qui  reposaient  sur  le  mur; 

Qu'ils  constatent  également  l'existence  de  son  côté  d'une 
boéte,  signe  ordinaire  de  mitoyenneté  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges , 

La  Gour  met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  juge- 
ment dont  est  appel  sortira  effet,  condamne  l'appelant,  etc. 

Du  12  mai  1860.  2e  chamb.  Présid.,  M.  Danel  ;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc,  Mes  Talon  et  Dupont; 
avou.,  Me«  Lavoix  et  Debeaumont. 


lo  FALSIFIGATION  DE  DEiNRÉES.  —  mixtion  de  parties 

INERTES  ET    IMPROPRES    A    l' ALIMENTATION.  —  CAFÉS    DE 
MAUVAISE  NATURE. 
2^  DÉLIT,  —  QUALIFICATION.  —  ORDONNANCE  DE  RENVOI. — 
CITATION.  —  APPRÉCIATION  DU  JUGE  CORRECTIONNEL. 

i^  Il  y  a  falsification  d'une  denrée^  non-seulement  lors- 
qu'elle est   méla^tgée  d*unc  substance  étrangère ,  mais 


encore  quand  il  s'y  trowe  la  mixtion  d'une  denrée  de 
pareille  nature  qm  a  perdu  $e$  qualités  essentielles. 

Ainsi,  des  cafés  vendus  avec  un  mélange  de  40  ou  20, p.  ^/o 
de  grains  inertes  et  impropres  à  V alimentation,  doivent 
être  considérés  comme  cafés  falsifiés.  (L.  27  mars  1851, 
art. '1er,  §2.)  (1). 

i^  Il  appartient  aux  juges  correctiormels  saisis  pœr  le  juge 
d'instruction  de  la  connaissance  des  délits ,  d'en  faire 
V appréciation  légale  et  d'en  préciser  la  quali/iccUion^ 

Ainsi,  lorsque  le  prévenu  a  été  renvoyé  par  Fordonnanôe 
du  juge  d'instruction,  et  cité  par  le  procureur  impérial 
devant  le  Tribunal  correctionnel,  pour  vente  de  denrées 
corrompues,  le  Tribunal  peut  le  déclarer  coupable  du  dé- 
lit de  vente  de  denrées  falsifiées. 

Il  le  peut  surtout  s'il  y  a  lieu,  pour  V une  et  Vautre  quaUfi' 
cations,  d' appliquer  la  même  peine,  et  si,  dans  ce  cas,  k 
prévenu  a  eu  connaissance  entière  des  faits  relevés  à  sa 
charge.  (G.  inst.  crim.,  art.  130, 134  et  182.)  (2)- 

■  >  I    H  I  «  I  ■  ■  Il  II  ■       I        I   ■  I  I  ■  ■         ■  ■  I         ■       I 

1 

(1)  M.  Riche,  dans  son  rapport  à  l'Assemblée  nationale  législative, 
dans  sa  séance  du  25  février  1851,  exposait  comme  il  suit  l'esprit  du 
projet  de  loi  : 

<t Il  y  a  falsification,  non-seulement  dans  f  introduction  d'une 

denrée  d'une  autre  nature,  mais  dans  la  mixtion  d'une  denrée  d'une  na- 
ture identique  et  de  qualité  notablement  inférieure,  de  manière  que  le 
résultat  de  l'amalgame  soit  très- sensiblement  moins  propre  à  l'usage 
auquel  la  chose  est  destinée,  ou  d'une  valeur  considérablement  moindre 
que  la  valeur  promise  nar  la  dénominaiion  ou  par  le  prix  de  la  mar- 
chandise. —  La  loi  ne  doit  pas  donner  ces  définitions.  En  présence  de 
la  nouvelle  législation,  comme  en  exécution  de  l'ancienne,  le  ju^e  cor- 
rectionnel doit  apprécier  les  intentions,  la  bonne  foi,  les  excuse»,  frap- 
per la  fraude  et  rien  que  la  fraude.  11  ne  punira  ni  les  méJanges  non 
pernicieux  révélés  par  le  nom  de  la  marchandise  ou  par  Te  vendeur,  ni 
les  mélanges  ou  coupages  non  avoués  que  peuvent  réclamer  ou  légiti- 
mer la  conservation  de  la  chose,  les  lois  de  la  fabrication ,  les  besoins 
de  la  consommation  ou  du  commerce,  les  habitudes  locales  pu  les  ca- 
prices du  goût,  pourvu  que  l'on  n'ait  pas  oublié  frauduleusement  les 
proportions  qui  doivent  être  observées  dans  ces  mélaÉges,  ni  l'imita- 
tion déclarée  de  produits  étrangers.  Il  appréciera  comme  aujourd'hui 
le  degré  de  responsabilité  qui  doit  appartenir  aux  divers  açenls  ou  auxi- 
liaires d'un  fait  délictueux  ;  les  cas  où  cette  responsabilité  devra  re- 
monter du  vendeur  au  fabricant,  du  détaillant  au  marchand  qui  lui  a 
fourni  ;  les  circoiistances  d'ignorance  probable,  surtout  a»  mtheo  d'un 
commerce  très-actif;  les  présomptions  de  connaissances  et  d'attention 
nécessaires  que  toute  profession  suppose  chez  celui  qui  l'exerce.  Ceux 
qui  voudraient  imposer  à  la  loi  le  précieux  labeur  d'entrer  dans  ces  dé- 
tails, méconnaîtraient  les  limites  et  lestyfô  deft  prescriptions  légisIatiTes, 
et  1«  rôle  nécessaire  qui  a  toujours  été  confié  aux  juges  des-  cas  de 
fraude.  » 

(2)  V.  sur  ce  point  :  Cass.  16  août  1832  (j.  Pat. ,  2^  édit.  à  sa  date). 


(233) 

(  Desfreilnes  ei  Sénélar  C.  minisl.  publ.) 

Les  visites  du  jury  médical  chez  les  sieurs  Desfreiine»^ 
épicier  à  Mou  veaux,  et  Sénélar,  négociast  à  Lille,  ont  fait 
saisir  chez  eux  des  cafés  de  mauvaise  oualité.  Le  juge 
d'instruction  près  le  Tribonal  correetioimei  de  Lille  les  a 
renvoyés  devant  ce  Tribunal^  en  quali&ant  la  prévention  de 
délit  de  vente  de  denrées  qu'ils  savaient  être  corrompues. 
Le  pi*ocureur  iinnérial  a  rédigé  la  citation  dans  le  même 
sens.  Devant  le  Tribunal,  les  prévenus  ont  soutenu  que  les 
cafés  n*étaient  pas  corrompus  et  n'avaient  pas  été  falsifiés 
dans  le  sens  âe  la  loi  ;  Sénélar,  qui  les  avait  vendus  à  Des- 
fresnes  et  qui  en  conservait  de  sembkbles  en  magasin,  pré^ 
tendit  qne  ces  cafés  étaient  maorcbands,  et  lui  venaienl  teb 
du  marché  de  Marseille,  comme  cafés  de  Rio,  Le  Tribunal 
de  Lille  a  rendu  le  jugemient  suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que^  le  4  5  septembre  1859,  le  jury  médical  a 
fait  saisir  chez  L.pesfrennes,  épicier  à Mouveaux,9S  kîlqg. 
de  café  exposé  en  vente  et  paraissant  falsifié,  par  le  mé- 
lange de  grains  avariés;  que  Desfrennes  a  justifié  avoir 
acheté  ce  café  à  Sénélar-Libert ,  majxhand  d'épicerîe  â 
Lille,  suivant  facture  du  ;! 7  août  1 859  ;  que  Sénélar-Libert 
n'a  pas  voulu  reconnaître  ce  café  comme  venant  dé  chei 
lui,  mais  convient  en  avoir  vendu  d'analogue  à  Desfrennés; 
que,  de  plus,,  on  a  saisi  chez  ledit  Sénélar,  le  31  janvier 
1860,  du  café  paraissant  falsifié  par  ua  mélange  semblable; 
que  Tanalyse  chimique  a  constaté  40  p.  ^/o  de  grains  aVâ^ 
ries  dans  le  café  saisi  chez  Desfrennés,  et  20  p.  <>/9  dans 
celui  saisi  chez  Sénélar;  que  l'expert  a  déclaré  lesdits  grains 
impropres  à  l'alimentation,  leurs  principes  sapides  et  àli- 
biles  étant  complètement  détruits;' 

»  Attendu  qu'en  admettant,  conformément  a(u .  dire  de 
Sénélar,.  que  ces  cafés  lui  sont  arrivés  ainsi  mélangés  de 
Marseille,  et  sous  la  dénomînçttion  de  cafés  de  Rio,  il  nfen 
est  pas  moins  à  examiner  s'il  a  pu  sans  fraude  les  mettre 
en  vente  dans  cet  état;  qu'en  effet  il  est  inculpé,  lïon  pas 

Consult.  TËxposé  des  motifs  de  la  lot  dn  i7|mHiet  t856,  sur  la  suppres- 
sion de  la  Chmâire  dm  Conseil  (lÊomt.  25  jiiin<^3'JQillei  1866). 


(234) 

de  les  ayoif  falsifiés,  mais  de  les  avoir  vendus,  sachant 
qu'ils  l'étaient; 

»  Attendu  qu'une  denrée  est  falsifiée  non-seulement  lors- 
qu'elle est  mélangée  d'une  substance  étrangère,  mais  en- 
core quand  il  s'y  trouve  mixtion  d'une  denrée  de  pareille 
nature  qui  a  perdu  ses  qualités  essentielles;  que  si,  à  un 
produit  sain  et  nutritif,  se  trouve  mêlé  un  produit  iden- 
tique, mais  avorté  et  inerte,  il  y  a  dans  un  tel  mélange  une 
falsification  réelle,  car  au  lieu  delà  quantité  qui  est  censée 
livrée  au  consommateur  d'une  bonne  marchandise,  celui-ci 
ne  reçoit  en  réalité  qu'une  qualité  beaucoup  moindre  et 
dimiimée  de  toute  la  portion  du  mélangé  défectueux  ; 

>  Attendu  que  les  cafés  vendus  par  Sénélar  et  par  Des- 
frennes  au  public  étaient  mêlés  de  quarante  ou  ving  par- 
ties sur  cent  de  grains  devenus  inertes  et  impropres  à  l'ali- 
mentation ;  que  ce  mélange  doit  les  faire  considérer  comme 
étant  falsifiés  ;  que  lesdits  Sénélar  et  Desfrennes  ont  connu 
cet  état  de  falsification  ;  qu'en  effet,  il  était  apparent  et  ma- 
nifeste par  le  seul  aspect  des  grains',  dont  les  uns  sont 
d'u^é  couleur  et  d'une  forme  normales,  et  dont  les  autres 
sont. noirâtres  et  mal  conformés;  que  le  jury  médical  en  a 
été  frappé  du  premier  abord,  et  à  plus  forte  raison  des 
marchands  ont-ils  dû  s'en  apercevoir,  s'y  connaissant  par 
leur  profession  ;  que  Desfrennes  a  d'ailleurs  avoué  avoir 
fait  à  Sénélar  quelques  observations  â  ce  sujet,  et  que  ce- 
lui-ci, après  la  saisie,  lui  a  reproché  d'avoir  laissé  vérifier 
son  café  par  le  j  ury  ; 

u  Attendu  qu'il  y  a  lieu  d'admettre  des  circonstances 
atténuantes,; 

'  •»  Vu  Içs  art.  1,  6  et  7  de  la  loi  du  29  mars  1851,  423  et 
et  463  G.  pén.,  et  194  G.  inst.  crim.  ; 

»  Le  Tribunal  déclare  Célestin-François- Joseph  Sénélar, 
et  Louis-Joseph  Desfrennes,  coupables  d'avoir,  en  1859  et 
1860,  à  Lille  et  à  Mouveaux,  mis  en  vente  et  vendu  du 
café  qu'ils  savaient  falsifié  par  le  mélange  d'une  notable 
proportion  de  grains  inertes  et  impropres  à  l'alimentation, 
le  tout  avec  circonstances  atténuantes  ; 

>  En  conséquence,  condamne  Sénélar  à  une  amende  de 


(235) 

50  fr.,  De&Tiennesà  une  amende  de  â5  fr.,  et  tous  deux 
aux  frais  du  procès,  le  tout  solidairement  et  par  corps; 

»  Dit  que  le  précédent  jugement  sera  affiché  par  extrait, 
mais  avec  le.  texte  exposant  les  faits,  les  motifs  et  le  dispo- 
sitif, au  nombre  de  25  exemplaires  à  Lille  et  à  Mouveaux, 
notamment  à  la  porte  de  Thabitatioa  des  condamnés  ;  qu'il 
sera  inséré  de  même  dans  les  trois  journaux  qui  se  publient 
à  Lille,  le  tout  aux  frais  desdits  condamnés.  > 

Appel  par  Desfrennes  et  Sénélar.  Devant  la  Cour,  il  est 
élevé  pour  eux  une  fin  de  non-recevoir.  Il  est  dit  en  effet 
que,  saisi  par  l'ordonnance  du  juge  d'instruction  et  par  la 
citation  du  procureur  impérial,  qui  ne  portent  que  sur  le 
délit  de  vente  de  denrées  corrompues  /  le  Tribunal  n'a  pu 
valablement  les  déclarer  coupables  de  vente  de  denrées 
qu'ils  savaient  falsifiées.  On  ajoute  que  les  cafés  saisis  n'é- 
taient pas  corrompus,  et  que  d'ailleurs  il  n'est  pas  établi 
qu'ils  eussent  connaissance  de  la  corruption.  On  demande 
par  suite  à  prouver  :  1®  que  les  cafés  connus  dans  le  com- 
merce sous  le  nom  de  cafés  de  Rio,  sont  d'ordinaire  mêlés 
dans  une  proportion  plus  ou  moins  forte  de  cafés  grains 
noirs  ;  2o  que  le  grain  noir  provient  ou  de  ce  gue  la  matu- 
rité n'a  pas  été  complète,  ou  de  ce  que  le  grain  est  tombé 
sur  la  terre  et  a  été  ramassé  par  le  producteur  ;  3°  que  ce 
grain  noir,  quand  il  ^st  trié,  ne  donne  qu'une  liqueur  pri- 
vée des  qualités  caféines  non  sapide  ni  alibile,  et  ceta  à 
son  état  naturel,  sans  altération  m  corruption;.  4^  que  ce 
grain  noir,  quand  il  n'est  pas  trié,  ne  fait  que  diminuer 
les  qualités  de  l'ensemble  du  café  dans  lequel  il  se  trouve 
mêlé  ;  5°  que  le  café  saisi,  soit  chez  Desfrennes,  soit  chez 
Sénélar,  est  du  jafé  de  Rio  acheté  et  vendu  comme  tel  au 
prix  normal  du  commerce  ;  6®  que  ce  café,  mêlé  de  grains 
noirs,  n'était  ni  altéré  ni  corrompu,  mais  seulement  en  l'é;- 
tat  habituel  du  café  de  Rio;  7^  gue  rien,  dans  tous  les  cas, 
n'annonçait  aux  acheteurs  qu'il  y  eût  altération  ou  oor- 
ruption. 

Le  ministère  public  déclare  former  appel  à  minimal 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; —  Vidant  son  délibéré,  donne  acte  au  mi- 
nistère public  de  âa  déclaration  d*interjeter  appel  hminimâ 
du  jugement  du  Tribunal  correctionnel  de  Lille>  ett:  ce 


(236) 
qu'il  omet  de  proQoncôr  la  coafiscâtioa  d^  marchandises 


saisies  y 


Statuant  sur  cet  appel  et  sur  celui  interjeté  par  les  prévenus; 

En  ce  qui  touche  la  fin  de  non-recevoir  : 

Attendu  que  les  premiers  juges  avaient  été  saisis,  par 

l'ordonnance  de  renvoi  en  police  correctionnelle,  des  faits 

résultant  de  rînstruction  qui  avait  précédé  cette  ordonnance; 

.  Que  ces  faits  avaient  en  eux-mêmes  un  caractère  délictif; 

Qu'aux  juges  saisis  de  la  connaissance  des  délits  constatés 

par  l'instruction,  appartenait  le  droit  et  incombait  le  devoir 

de  rechercher  les  éléments  de  ces  délits ,  et  par  suite  de 

10S  apprécier  au  point  de  vue  légal  qui  devait  leur  paraître 

le  plus  exact; 

Attendu  que  l'appréciation  légale  à  laquelle  se  sont  ar- 
rêtés les  premiers  juges  les  a  conduits  à  faire  précisément 
l'application  du  même  article  de  loi  que  celui  auquel  se  ré- 
férait Tordonnance  de  mise  en  prévention»  et  qu'ils  ont 
d'ailleurs  statué  stir  les  mêmes  infractions,  sans  faire  autre 
chose  que  de  les  qualifier  différemment; 

Attendu  que  les  prévenus  avaient  eu  ^  dans  l'instruction 
préalable,  la  connaissance  entière  des  griefs  relevés  â  leur 
charge,  et  étaient  par  conséquent  à  même  de  préparer  à 
Tâvance  et  de  présenter  à  l'audience  tous  les  moyens  qui 
pouvaient  être  de  nature  à  contribuer  à  leur  défense  ; 
Au  fond  :  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 
Attendu  que  la  Cour  poésède  tous  les  documents  néces- 
Siaîres  pour  pouvoir  rendre  une  décision  définitive ,  sans 
qu'il  soit  utile  de  recourir  à  de  nouvelles  voies  d'instruction; 
One  d'ailleurs  les  faits  articulés  dans  les  conclusions 
stibsîdïaîres,  ou  manquent  de  pertinence,  ou  sont  démentis 
par  les  faits  du  procès  ; 

Attendu  néanmoins  qu'eu  égard  aux  ciÂonslances  de  la 
danse,  U  n'ya  pas  lieu  d'ordonner  l'affiché  et  la  publication  de 
là  partie  du  jugement  qui  concerne  le  prévenu  Desfrennes; 
Attendu  qu'aux  termes  de  Tari.  5  de  la  loi  du  27  mars 
iSSl,  les  ODJets  dont  la  vente,  l'usage  ou  la  possession 
constitue  le  délit,  doivent  être  confisqués  ; 

Oue  s'ils  sont  propres  â  un  usage  alimentaire,  les  juges 
peuvent  les  mettre  à  la  disposition  de  l'administration  pour 
être  attribués  aux  établissements  de  bienfaisance  ; 

Que  les  premiers  juges  ont  omis  de  prononcer  cette 
confiscation,  et  qu'il  y  a  lieu  de  réparer  cette  omission  ; 

Vu  Fart.  5  de  la  loi  du  27  mars  1S51  et  Tart.  194  C. 
insl.  criim.  ; 


(237) 

Ënce  i^ui  toucha  le  prévenu  Sénélar,  met  l'appellation 
au  néant,  ordonne  aue  le  jugement  dont  est  appel  sortira  effet; 

Condamne  Sénélar  aux  frais  de  la  cause  a  appel. 

En  ce  qui  touche  le  prévenu  Desfrennes,  émendantla 
sentence  aont  est  appel  et  statuant  par  jugement  nouveau; 

Déclare  Louis-Joseph  Desfrennes  coupable  d'avoir,  en 
1859  et  en  4860,  à  Mouveaux,  mis  en  vente  et  vendu  du 
café  qu'il  savait  fal^é  par  le  mélange  d'une  notable  pro* 
portion  de  grains  inertes  et  impropres  à  l'alimentation  ; 

Dit  qu'il  y  a  des  circonstances  atténuante»  en  faveur  du 
prévenu  ; 

En  conséquence,  condamne  Desfrennes  k  une  amende 
de  25  francs  ; 

Prononce  la  confiscation  des  marchandises  saisies  au 
domicile  de  ce  prévenu,  met  les  marchandises  i  la  disposi- 
tion de  l'administration,  pour  être  attribuées  aux  établis- 
sements de  bienfaisance; 

Condamne  Desfrennes  aux  frais  de  première  instance  et 
d'appel,  etc. 

Du  30  mai  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
rapp.,  M.  Cahier,  conseiH.  ;  minîst.  publ.,  M.  Garpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc.,  V^  Talon  et  Honoré  (Alfred). 


"^— ^p"'^-^ 


lo  enquête.  ~  séparation  de  €0rps.  —  résidence  a 

l'Étranger.  —  assignation.  —  délai  des  distances. 
2«  demande  nouvelle.  —  conclusions  apin  de  nouvelle 

ENQUÊTE. 

1^  Uordonnanee  du  président  du  Tribunal,  qui  autorise  Ut 
femme  demanderesse  en  séparation  de  corps  à  se  retirer 
dans  une  maison  autre  que  celle  de  son  mari,  a  pour 
effet  (Tattribuer  à  la  femme,  vis-à-vis  ce  dernier,  et  re^ 
lativemerU  à  la  procédure  en  séparation,  un  domicile 
propre  (1). 

Si  c'est  hors  de  la  France  que  la  femm^  a  été  autorisée  à 
résider,  les  assignations  à  lui  délivrées,  notamment  celle 
dont  il  est  parlé  en  Vart.  261  C.  proc.  civ,  en  matière 
£  enquête,  doivent  Vêtre  avec  observation  des  délais  spé- 
ciaux prescrits  par  Vart.  73  C.  proc.  ;  l'inobservation  de 
ces  délais  entraîne  la  nullité  de  V enquête  (2). 

2^  Doit  être  considérée  comme  nouvelle,  et  comme  telle  non 
recevable  en  Cour  d^ appel,  la  demande  ^fin  SHre  aiUo-- 

(1-2)  V.  dans  ce  sens  :  Douai  22  dée.  1853  (Jurisp.  t.  12,  26,  et  le 
autorités  citées  à  la  note). 


(288) 

nsé  à  recommencer  une  enquête  dont  on  réclame  la  nul- 
litéy  si  cette  demande  n'a  pas  été  produite  devant  les 
premiers  juges. 

(Bois  C.  Bois.) 

La  dame  Bois,  habitant  avec  son  mari  à  Hautmont,  arron- 
dissement d'Avesnes,  a  formé  contre  le  sîeur  Bois  une  de- 
mande en  séparation  de  corps.  Par  ordonnance  du  président 
du  Tribunal  d'Avesnes ,  en  date  du  12  septembre  1857, 
elle  a  été  autorisée  à  résider  pendant,  l'instance  à  Merbes- 
Sainte-Marie  (Belgiaue). 

Un  jugement  du  29  novembre  4857  admit  la  dame  Bois 
à  faire  la  preuve  des  faits  allégués  par  elle  à  l'appui  de  sa 
demande.  L'enquête  fut  fixée  au  21  avril,  et  la, contre- 
enquête  au  12  mai  1858. 

Le  4  mai  seulement,  le  sieur  Bois  fit  assigner  la  dame 
Bois,  conformément  à  l'art.  261  C.  pén.,  au  domicile  de 
son  avoué,  pour  être  présente  à  la  contre-enguêie.  Ni  la 
dame  Bois,  ni  son  avoué  ne  se  présentèrent  ;  il  fut  procédé 
à  la  contre-enquête.  —  La  dame  Bois  en  demanda  la  nul- 
lité, fondée  sur  ce  que  l'assignation  à  partie^  délivrée  en 
vertu  de  l'art,  261  C.  proc,  l'avait  été  sans  observation  du 
délai  des  distances.  Depuis  l'ordonnance  du  12  sept.  1857, 
disait-on  pour  elle,  Merbes-Ste-Marie  est  devenu,  pour  la 
demanderesse,  son  véritable  don?icile  pendant  l'instance  en 
séparation  de  corps.  Aux  termes  de  l'art.  261  C.  proc,  la 
partie  doit  être  assignée  pour  être  présente  à  l'enquête, 
au  domicile  de  son  avoué,  trois  jours  au  moins  avant  l'au- 
dition des  témoins.  Celte  disposition  :  trois  jours  au  moins, 
démontre  à  l'évidence  que  le  législateur  a  voulu  respecter 
les  délais  de  dislance  (art.  73  et  1033  C.  proc);  la  juris- 
prudence, d'ailleurs,  est  unanime  pour  admettre  les  délais 
de  distance  en  matière  d'enquête.  Dans  l'espèce,  l'asisigna- 
tion  à  partie  a  été  délivrée  le  4  mai  pour  le  12  du  même 
mois  ;  dès-lors,  le  délai  prescrit  par  l'art.  73  n'ayant  pas 
été  observé,  il  y  a  lieu  de  prononcer  la  nullité  delà  contre- 
enquête.  —  Conformément  à  celte  prétention,  le  Tribunal 
d'Avesnes  prononça  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 
3)  Considérant  que,  pendant  l'instance  en  séparation  de 
corps,  c'est  au  domicile  de  la  femme  que  doivent  se  don- 
ner les  assignations  nécessaires  pour  la  régularité  de  la 
Ïrocédure  ;  que  ce  domicile  est  celui  que  le  président  du 
ribunal  lui  a  désigné,  soit  sur  sa  demande,  soit  d'office,  et 
non  la  rtiaison  conjugale  ;  —  Que  l'on  conçoit  facilement. 


(â39) 

en  eifet)  les  inconvénients  qui  pourraient  résulter*  de  la  re- 
mise des  assignations  entre  les  mains  du  mari  ; 

»  Considérant  qu'aux  termes  de  Tart.  261C.  proc,  la 
partie  doit  être  assignée  aux  fins  d'assister  à  l'enquête  au 
domicile  de  son  avoué,  sinon  à  son  domicile,  le  tout  trois 
jours  au  moins  avant  l'audition  des  témoins  ;  qu'en  fait, 
dans  l'espèce,  la  dame  Bois  a  été  assignée  le  4  mai  pour  le 
12  du  même  mois,  mais  que  ce  délai  était  insuffisant^  eu 
égard  aux  circonstances  ;  qu'en  efifet,  cette  dame  a  été,  sur 
sa  demande,  autovisée,  par  ordonnance  du  président  du 
Tribunal  d'Avesnes,  à  retourner  et  à  résider,  durant  l'ins- 
tance en  séparation,  dans  sa  famille,  à  Merbes-Ste-Marie 
(Belgique)  ;  qu'aux  termes  de  l'art.  73  C.  proc,  si  celui  qui 
est  assigné  demeure  hors  de  la  France  continentale,  le  dé- 
lai sera,  pour  ceux  habitant  les  Etats  limitrophes  de  .la 
France,  de  deux  mois;  que  c'est  donc  ce  délai  qui  devait 
être  observé  ;  qu'en  effet,  la  loi  ne  distingue  pas  entre  l'as- 
signation aux  fins  d'assister  à  une  enquête,  et  celle  qu^  est 
donnée  en  toute  autre  circonstance  ;  que  la  doctrine  et  la 
jurisprudence  sont  d'accord  pour  décider  que  les  assigna- 
tions à  l'effet  d'assister  à  une  enquête  sont  soumises  aux 
mêmes  formalités  que  les  ajournements  ou  exploits  intrq- 
ductifs  d'instance  ;  d'où  la  conséquence  que  les  délais  pres- 
crits par  l'art.  73  doivent  être  observés,  l'étranger,  au  cas 
contraire,  ne  pouvant  être  utilement  touché  de  l'assignation; 

»  Que  l'art.  261  édicté  la  peine  de  nullité  pour  Tinob- 
servatipn  des  délais  qu'il  prescrit,  et  que  la  nullité  de  l'as- 
signation entraîne  celle  de  l'enquête  ; 

»  Le  Tribunal  dit  nulle  et  sans  aucun  effet  la  contre-»en- 
quêle  du  2  mai  1858  ;  condamne  Bois  aux  dépéris  de  ladite 
contre-enquête  et  à  ceux  de  l'incident.  » 

Appel  par  le  sieur  Bois.  —  Dans  son  intérêt,  on  disait  : 
Les  délais  légaux  prescrits  par  la  loi,  pour  la  sommation  de 
comparaître  à  l'enquête  et  pour  la  notification  des  noms  dés 
témoins,  ont  été  observés  dans  la  cause.  En  effet,  la  loi 
(art.  261  G.  proc),  porte  que  la  partie  sera  assignée  au 
aomicile  de  son  avoué  pour  être  présente  â  l'enquête,  trois 
jours  au  moins  avant  l'audition  ;  or,  l'assignation  à  compa- 
raître à  l'enquête  du  12  mai  1858  a  été  délivrée  à  la  date 
du  4  mai  1858,  huit  jours  avant  l'audition  des  témoins^  et 
la  loi  ne  prescrit,  en  cette  matière,  aucune  augmentation 
de  délai  à  raison  des  distances.  Alors  même  que  l'art.  1033 
C.  proc.  devrait  être  appliqué  dans  l'espèce,  l'assignation 
resterait  régulière  ;  en  effet,  soit  qu'on  considère  le  domi- 


cile  conjugal  comme  restant  celui  de  la  femme  demande- 
resse en  séparation  de  corps,  soit  qu'on  prenne  pour  domi- 
cile de  la  femme  le  lieu  où  elle  a  fixé  sa  résidence  pendant 
l'instance,  situé  à  39  kilomètres  environ  d'Avesnes,  le  délai 
est  sufiisant;  car  les  prescriptions  de  Tart.  73  C.  proc.  ne 
s'appliquent  qu'aux  demandes  introduclives  d'instance,  et 
non  aux  actes  signifiés  au  cours  .d*une  procédure  contra- 
dictoire.— Subsidiairément,  on  disait: Aux  termes  de  l'art. 
256  C^  proc,  la  preuve  contraire  est  de  droit.  L'art.  993, 
il  est  vrai,  dispose  que  l'enquête  nnlle  ne  sera  pas  recom- 
mencée ;  mais  cette  disposition  cesse  d'être  applicable  dans 
les.  matières  qui,  cpmrae  les  instances  en  séparation  de 
corps,  intéressent  l'ordre  public.  (V,  Dijon  29  mai  1845, 
S.  V.  46,1, 173;Thomine-Desmazures,Chauveauet  Carré, 
g.  1186  bis.)  La  contre-enquête,  dans  l'espèce,  peut  donc 
être  recommencée.  On  concluait,  en  conséquence,  à  ce  que 
le  sieur  Bois  fût  admis  à  recommencer  sa  icontre-enquête. 

Pour  l'intimé,  on  reproduisait  le  système  du  jugement. 
Aux.  conclusions  subsidiaires  de  l'appelant,  on  opposait  que 
la  demande  afin  d'être  autorisé  à  recommencer  la  contre- 
enquête  n'ayant  pas  été  produite  devant  les  premiers  juges, 
constituait  une  demande  nouvelle,  non  recevable  çn  appel, 
aux  termes  de  Tart..  464  C.  proc. 

La  Cour  a  statué  en  ces  termes  : 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  — Sur  les  conclusions  principales  de  l'appelant, 

Adoptant  les  motifs  des  prenàiers  juges  ; 

En  ce  qui  touche  les  conclusions  subsidiaires  : 

Attendu  que,  loin  de  présenter  le  caractère  d'une  défense 
à  l'action  principale  dont  le  Tribunal  de  i^^  instance  était 
saisi  et  qui  avait  exclusivement  pour  obj^t  la  nullité  de  la 
èontre-enquéte,  ces  conclusions  constituent  une  prétention 
distincte,  subordonnée  à  cette  annulation  même,  et  par 
coniiéquent  une  demande  nouvelle,  irrecevable  en  cause 
d'appel,  aux  termes  de  l'art.  464  C.  proc.  civ  ; 

Par  ces  motifs,  la  Cour,  sans  s'arrêter  aux  conclusions 
subsidiaires  de  l'appelant ,  met  l'appellation  au  néant  ;  or- 
donne qu'il  sortira  effet,  et  condamne  l'appelant  à  l'amende 
et  aux  dépens. 

Du  7  nov.  18S9.  Ire  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  1«r 
présid.;  minist.publ.,  M.  Morcrette,  1«'avoc.-gén.;  avoc, 
M«»  Merlin  et  Bunem  ;  avou.,  U^  Lavoix  et  Huret. 


(241) 
SOCIÉTÉ  COMMERCIALE.  —  durée,  —décès  d'associé. 

—  HÉRITIERS  MINEURS.  —  RETRAITE  d' ASSOCIÉ.  —  PUBLI- 
CITÉ. —  RENONCIATION.  —  PREUVE. 

» 

La  Société  commerciale  qui  est  stipulée,  au  cas  décès  de 

Vun  des  sociétaires  en  nom ,   devoir  continuer  avec  ses 

héritiers,  peut  être  considérée  comme  existant  vis-à-vis 

de  ceux-ci,  pendant  leur  minorité.  (G.  Nap.,  art.  487, 

.  1868;  G.  com.,ârt.  2.)(1). 

La  publicité  exigée  pour  la  retraite  d'un  associé  ne  Vest  que 
vis-à-vis  des  tiers,  non  à  V égard  des  associés  entre  eux, 
(G.  cora.,  art.  442  ei446.)  (2). 

Le  fait  de  cette  retraite  pev^t  résulter^  contre  V associé,  de 
sa  renonciation  manifestée  par  des  actes  d'une  volonté 
non  équivoque. 

(Cailleret  C  Boutry  et  consorts.) 

Suivant  contrat  passé  devant  M®  Duhayon ,  notaire  à 
Ronchin,  le  16  septembre  1833,  une  Société  de  commerce 
s'est  formée  entre  une  dame  veuve  Cailleret  et  un  sieur 
Boutry,  sous  la  raison  sociale  veuve  Cailleret  et  Boutry, 
Son  objet  était  l'exploitation  d'une  maison  de  commerce 
de  toiles  et  sarraux,  appartenant  à  W^^  Gailleret  et  ses  en- 
fants. La  durée  en  était  fixée  à  douze  années,  à  partir  du 
17  septembre  1833.  Il  avait  été  stipulé  que  les  bénéfices 
seraient  partagés  par  moitié  entre  les  associés;  que  les 
sommes  versées  par  les  associés  au  delà  de  leurs  mises 

f porteraient  intérêt  à  5  p.  ^/opar  an,  sans  retenue,  et  que 
es  associés  auraient  la  liberté  de  les  reprendre  quand  bon 
leur  semblerait ,  sans  toutefois  gêner  la  Société  ;  enfin 
que  ,  dans  le  cas  où  W^^  Gailleret  seulement  viendrait  à 
décéder,  pendant  le  cours  des  douze  années  fixées  poiir  la 
durée  de  la  Société ,  cette  Société  continuerait  d'exister 
avec  ses  héritiers  ;  que  M.  Boutry  en  serait  seul  gérant, 
mais  qu'il  devrait,  dans  ce  dernier  cas,  rendre  compte  de 
sa  gestion  au  tuteur  des  enfants  mineurs ,  lequel  aurait 
même  le  droit  d'assister  à  l'inventaire,  s*il  lé  jugeait  à 
propos. 

Lé  20  octobre  1833,  décès  de  la  dame  Cailleret,  qui  laisse 
pour  héritiers  sept  enfants  mineurs,  en  instituant  un  sieur 

(1-2)  Consult.  Pardessus,  nos  61  et  1071  ;  Duranton,  t.  17,  n»  473; 
Massé,  t.  3,  n®  129  ;  Duvergier,  ti»  441  ;  Goujet  et  Merger,  t»  Société, 
no  323  et  suiv.  Idem  G.  oass.  10  nov.  1847  (S.  V.  1,  5). 

TOME  XVIÎI.  16 


(242) 

Ledieu  leur  tuteur,  et  le  sieur  Boutry,  son  frère,  leur  su- 
brogé-tuteur. 

La  Société  continue  ses  opérations  comme  par  le  passé, 
sous  l'administration  de  Boutry  seul.  Mais,  au  fur  et  à  me- 
sure que  chacun  des  enfants  Cailleret  atteint  sa  majorité, 
il  lui  tient  compte  d'un  quatorzième  des  bénéfices,  et  leur 
déclare  qu'ils  ne  font  plus  partie  de  la  Société. 

C'est  ainsi  qu'à  la  date  du  15  septembre  4840,  trois  mois 
après  la  majorité  d'Antoine  Cailleret,  il  lui  remet  un  compte 
de  bénéfices  et  lui  verse  une  somme  de  34,186  fr.  93  c. 
qui  représentent  à  la  fois  sa  part  de  bénéfice  social,  la  por- 
tion lui  revenant  dans  le  mobilier  dépendant  de  la  succes- 
sion de  sa  mère,  et  une  part  de  succession  de  son  oncle. 
Antoine  Cailleret  délivre  la  quittance  suivante  :  «  Je  recon- 
»  nais  avoir  reçu  de  MM.  veuve  Cailleret  et  Boutry  la  somme 
3)  de  34,187  fr.  93  c.  pour  mon  1^^  dans  la  mise  de  ma  mère, 
»  mon  quatorzième  dans  les  bénéfices  de  la  maison  depuis 
»  le  jour  de  sa  création  jusqu'au  jour  de  ma  majorité, 
»  époque  où  j'ai  cessé  d'être  intéressé  ;  pour  mon  septième 
»  du  montant  du  mobilier  laissé  par  ma  mère ,  et  mon 
»  quatre-vingt-onzième  dans  les  successions  de  M«^«  Wan- 
»  tiez-Boutry  et  M.  François  Boutry,  décédé  curé  â  Ascq. 

»  15  septembre  1840.  » 

Nonobstant  cette  quittance  qui  ne  faisait  mention  d'au- 
cune liquidation  de  société,  Antoine  Cailleret,  la  dame 
Desreumaux,  les  époux  Cailleret-Dubois,  Cailleret-Crassier, 
Dewulf  et  la  demoiselle  Cailleret,  frères  et  sœurs,  préten- 
dant profiter  des  opérations  de  la  Société  qui  s'était  conti- 
nuée, suivant  eux,  en  vertu  de  l'acte  qui  Tavait  constituée, 
en  ont  demandé  la  liquidation  contre  Boutry.  Le  Tribunal 
de  commerce  de  Lille,  à  la  date  du  7  juin  1859,  a  rendu 
le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  la  Société  contractée  entre  Henri  Boutry 
et  la  veuve  Cailleret-Boutry,  sa  sœur,  a  été  dissoute  par  le 
décès  de  cette  dame,  survenu  le  20  octobre  1833,  et  ce 
nonobstant  la  stipulation  contenue  dans  le  contrat  social 
reçu  par  le  notaire  Duhayon,  de  Ronchin,  le  16  septembre 
1833,  portant  que  la  Société  serait  continuée,  en  cas  de 
décès  de  cette  dame,  à  l'égard  de  ses  enfants  ; 

3>  Qu'en  effet,  cette  stipulation  étant  contraire  aux  près- 


(US) 

criptions  du  Gode  de  commerce,  art.  %  a  dû  être  considé- 
rée comme  non  avenue  ; 

»  Attendu  qu'à  la  vérité  Henri  Boulry,  dans  un  sentiment 
d'affection  pour  les  enfants  de  sa  sœur,  les  a  fait  participer 
jusqu^à  leur  majorité  aux  chances  heureuses  de  son  com- 
merce, mais  que  cette  circonstance,  toute  de  bienveillance, 
ne  peut  avoir  pour  conséquence  d'attribuer  aux  enfants  mi- 
neurs la  qualité  d'associés  pouvant  en  exercer  les  droits  et 
devant  en  subir  les  obligations  ; 

y>  Attendu  d'ailleurs  qu'en  fût-il  ainsi,  Antoine  Cailleret 
et  la  dame  Desreumaux,  qui  s'est  jointe  à  lui,  ont,  à  leur 
majorité,  reçu  leur  part  dans  la  Société  et  s'en  sont  volon- 
tairement retirés,  acceptant,  soit  par  suite  d'une  liquidation 
faite  à  leur  apaisement,  soit  à  titre  de  forfait,  la  somme 
représentant  leur  intérêt  dans  la  Société  ; 

»  Attendu  que  Cailleret-Dubois  n'a  pas  comparu  ;  que 
Cailleret-Craïisier,  les  époux  Dewulf  et  la  demoiselle  Cail- 
leret ont  déclaré  s'en  rapporter  à  justice,  le  Tribunal  donne 
défaut  contre  Cailleret-Dubois,  déboute  Antoine  Cailleret 
et  la  dame  Desreumaux  de  leurs  conclusions,  déclare  le 
présent  jugement  commun  avec  Cailleret-Crassier ,  les 
époux  Dewulf,  Cailleret-Dubois  et  la  demoiselle  Cailleret  ; 
condame  Antoine  Cailleret  et  la  dame  Desreumaux  soli- 
dairement aux  frais,  etc.  » 

Appel  par  Antoine  Cailleret.  Il  est  dit  dans  son  intérêt 
devant  la  Cour  :  La  Société  contractée  le  16  septembre  1833 
n'a  pas  été  dissoute  par  la  mort  delà  dame  veuve  Cailleret, 
en  vue  de  laquelle  elle  avait  été  uniquement  stipulée.  En 
effet,  aux  termes  de  l'art.  1868  C.  Nap.,  les  associés  peu- 
vent stipuler  qu'en  cas  de  décès  de  l'un  d'eux,  la  Société 
continuera  avec  leurs  héritiers  ;  il  doit  surtout  en  être  ainsi 
lorsque  l'associé  survivant  reste  chargé  seul  de  la  gérance 
et  de  l'administration  de  la  Société.  Rien,  dans  le  Code  de 
commerce,  ne  s'oppose  à  ce  qu'il  en  soit  ainsi  ;  le  législa- 
teur a  même  manifesté  une  intention  contraire,  puisqu'il 
a,  dans  l'art.  18  C.  cora.,  soumis  les  Sociétés  commerciales 
aux  régies  posées  dans  le  Code  civil.  Au  surplus,  l'intimé 
lui-même  a  reconnu  qu'il  en  devait  être  ainsi,  puisqu'il  a 
laissé  subsister  la  Société  sans  aucune  modification,  et  a 
même,  pendant  tout  le  temps  stipulé  pour  sa  durée,  conti- 


(244) 

nué  les  affaires  sous  la  raison  sociale  :  Veuve  Gailleret  et 
Boutry.  En  admettant  que  la  minorité  d'un  associé  pût  vi- 
cier le  contrat  de  société,  il  ne  saurait  appartenir  à  l'asso- 
cié majeur  d'attaquer  pour  ce  motif  le  contrat  de  société. 
(G.  Nap.,  art.  1125.)  Il  est  constant,  d'ailleurs,  qu'il  n'a 

Î)as  été  procédé  à  la  liquidation  de  la  Société,  soit  qu'on 
a  suppose  dissoute  par  le  décès  de  la  veuve  Gailleret,  soit 
qu'on  la  suppose  avoir  duré  jusqu'au  17  septembre  1845, 
époque  fixée  par  le  contrat  nour  son  expiration.  D'un  aulre 
côté,  si  l'on  admet  que  la  Société  a  continué  avec  les  en- 
fants Gailleret,  on  ne  peut  pas  admettre  en  même  temps 
qu'elle  ait  cessé  à  l'égard  d  Antoine  Gailleret  à  la  date  du 
10  juin  1840,  jour  de  sa  majorité.  Il  est  en  effet  de  prin- 
cipe que,  pour  que  la  cessation  d'une  Société  ou  la  retraite 
de  l'un  des  associés  soit  valable^  il  faut  que  cette  cessation 
ou  cette  retraite  ait  été  accompagnée  de  Vaccomplissemenl 
des  formalités  prescrites  par  l'art.  42  et  suiv.  G.  com.  Cet 
accomplissement  étant  une  mesure  d'ordre  public,  l'omis- 
sion qui  en  est  faite  constitue  une  nullité  de  la  même  na- 
ture qui  peut,  pai'  suite,  être  invoquée  aussi  bien  par  les 
associés  que  par  les  tiers.  Au  surplus,  ajoutait-on,  aucune 
convention  de  retraite  de  la  Société  n'est  intervenue  entre 
Antoine  Gailleret  et  ses  associés.  Pour  qu'une  convention 
de  cette  nature  fût  valable ,  il  n'aurait  pas  suffi  qu'elle  in- 
tervînt entre  Antoine  Gailleret  et  Boutry,  il  eût  fallu  qu'elle 
fût  commune  à  tous  les  associés.  Antome  Gailleret  a  donc 
continué  de  faire  partie  de  la  Société  veuve  Gailleret  et 
Boutry.  Et  quand  le  contraire  serait  vrai,  pourrait-on  en- 
core repousser  sa  demande  en  liquidation?  On  cherche  à 
démontrer  ici  qu'en  fait  il  n'a  été  opéré  aucune  liquidation 
sociale  vis-à-vis  d'Antoine  Gailleret;  que  la  quittance  par 
lui  délivrée  ne  mentionne  rien  qui  puisse  avoir  cette 
valeur. 

Pour  l'intimé  Boutry ,  on  répond  :  La  Société  stipulée 
par  l'acte  du  16  septembre  1833  a  été  dissoute  de  plein 
droit  par  le  décès  de  la  veuve  Gailleret,  en  vertu  des  dis- 
positions de  l'art.  1868  G.  Nap.  Vainement  on  invoquerait 
une  convention  contraire  ;  car  les  enfants  de  la  dame  Gail- 
leret, à  son  décès,  étaient  tous  mineurs,  et,  aux  termes 
des  art.  487  G.  Nap.  et  2  G.  com.,  le  mineur  non  émancipé 
ne  peut  faire  le  commerce.  Il  est  tenu  sans  doute  comme 
héritier  des  obligations  de  son  auteur  ;  mais  celui-ci  n'a 
pu,  par  un  pacte  quelconque,  l'habiliter  à  êtr^  commer- 
çant pendant  sa  mmorité.  D'ailleurs,  les  formalités  de  l'art. 


(245) 

2  C.  com.  n^ayantpas  été  remplies,  la  Société  eût  été 
nulle.  Ce  qui  a  existé,  après  le  décès  de  la  dame  Cailleret, 
c'est  une  Société  de  fait  qui  n'a  duré  qu'autant  que  l'ont 
voulu  les  parties,  et  pour  laquelle  celles-ci  ne  sont  enga- 
gées qu'autant  que  leur  volonté  s'est  manifestée  par  des 
actes  d'exécution.  Si  par  dévoûment  l'intimé,  malgré  la  dis- 
solution et  même  la  nullité  de  la  Société ,  a  bien  voulu 
travailler  pour  l'appelant  et  ses  frères  et  sœurs,  les  favo- 
riser des  bénéfices  de  son  commerce,  cet  état  de  choses  a 
nécessairement  cessé  du  moment  où,  par  des  actes  person- 
nels et  volontaires,  cbacun  a  prouvé  son  intention  d'y  re- 
noncer. Or,  cette  intention  réciproque  ressort  de  toutes 
les  circonstances  de  la  cause,  et,  par  exemple,  en  repre- 
nant de  l'intimé  le  capital  même  de  la  mise,  en  le  libérant 
de  tous  les  bénéfices  jusqu'au  Jour  où  il  avait  cessé  d'être 
intéressé,  l'appelant  a  suffisamment  dissous,  quant  à  lui,  la 
Société  de  fait  maintenue  par  l'intimé.  Il  n'importe  que  sa 
retraite  n'ait  été  ni  publiée  ni  affichée.  Les  tiers  pourraient 
peut-être  s'en  prévaloir,  mais  l'appelant  est  certainement 
inhabile  à  méconnaître  les  actes  et  conventions  qu'il  a  libre- 
ment consentis  et  exécutés.  D^ailleurs  sa  retraite  a  été  plu- 
tôt une  cession  de  droits  qu'une  simple  renonciation,  etc. 

La  Cour  a  prononcé  comme  il  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  que  Cailleret-Dubois  fait  défaut, 
quoique  dûment  réassîgné ,  donne  itératif  défaut  contre 
lui,  et  statuant  entre  toutes  les  parties  par  un  seul  et 
même  arrêt; 

Attendu  que,  par  acte  du  16  septembre  1833,  devant 
Duhayon,  notaire,:  une  Société  a  été  formée  entre  Rosalie 
Boutry,  veuve  Cailleret,  et  Henri  Boutry,  son  frère,  pour 
Je  commerce  de  sarraux,  sous  la  raison  veuve  Cailleret  et 
Boutry  ; 

Que  cette  Société  devait  durer  douze  années ,  et  qu'il 
était  stipulé  que,  dans  le  cas  où  la  dame  Cailleret  viendrait 
à  décéder  pendant  le  cours  des  douze  années,  la  Société 
continuerait  d'exister  ;  que  Henri  Boutry  en  serait  seul 
gérant,  mais  quMl  devrait,  dans  ce  dernier  cas,  rendre 
compte  chaque  année  de  sa  gestion  au  tuteur  des  enfants 
mineurs,  qui  aurait  même  le  droit  d'assister  à  l'inventaire, 
s'il  le  jugeait  convenable  ; 


Allendu  que  le  15  septembre  1840,  Antoine  Caillerel, 
majeur,  a  reconnu  avoir  reçu  de  la  veuve  Caillerel  et  Bou- 
try  la  somme  de  34, 427  fr.  96  c.  pour  son  septième  dans 
la  mise  de  sa  mère,  son  quatorzième  dans  les  bénéfices  da 
la  maison  depuis  le  jour  de  sa  création  jusqu'au  jour  de  sa 
majorité,  époque  où  il  a  cessé  d'être  intéressé  ; 

Attendu  qu'il  résulte  à  l'évidence,  des  termes  de  celte 
quittance,  qu'Antoine  Cailleret  s'est  retiré  de  la  Société  à 
partir  de  sa  majorité  ; 

Qu'en  effet,  à  cette  époque,  il  déclare  avoir  cessé  d'y 
être  intéressé  ; 

Qu'il  n'a  plus  eu  de  capitaux  dans  cette  Société  à  laquelle 
il  n'avait  pas  apporté  son  industrie  ; 

Attendu  que  si,  à  l'égard  des  tiers,  des  conditions  de 
publicité  sont  exigées  à  peine  de  nullité  pour  signaler  la 
retraite  d'un  associé,  il  n'en  est  pas  ainsi  lorsqu'il  s'agit 
de  régler  entre  eux  la  position  respective  des  associés; 

Attendu,  du  reste,  qu'Antoine  Cailleret  ne  saurait,  alors 
que  le  temps  fixé  pour  la  durée  de  la  Société  est  depuis 
longtemps  écoulé,  se  prévaloir  de  l'absence  de  publications 
pour  la  reconstituer  à  son  profit  singulier,  fictivement  et 
et  d'une  façon  rétrospective  ; 

Attendu  que  la  retraite  d'Antoine  Cailleret  de  la  Société 
avait  été  précédée  par  celle  de  trois  de  ses  frères  et  sœur, 
majeurs  et  mineur  émancipé,  qui  l'avaient  quittée  en  1837, 
en  recevant  aussi  le  septième  de  la  mise  de  leur  mère  et 
le  quatorzième  des  bénéfices  ; 

Attendu  que  Henri  Boutry,  qui  avait  dû  pourvoir  de  ses 
deniers  à  ces  divers  remboursements  et  reconstituer  le 
fonds  social,  s'est  alors  substitué  aux  membres  sortants 
pour  l'attribution  ultérieure  de  leur  part  dans  les  bénéfices; 

Attendu  que  les  inventaires  de  fin  d'année  ont  été  éta- 
blis sur  ces  bases  ; 

Que  ces  inventaires  ont  été  dressés  contradîctoirement 
avec  Ledieu  ,  tuteur  des. mineurs  Cailleret,  et  approuvés 
par  lui  ; 

Attendu  qu'Antoine  Cailleret  a  eu  parfaite  connaissance 
de  ces  faits  avant  le  15  septembre  1840,  ainsi  que  cela 


(247) 

résulte  des  documents  que  lui-même  a  produits,  notamment 
de  la  lettre  à  lui  adressée  par  Ledieu  le  5  août  1840  ; 

Qu'il  a  su  également  que,  pour  ses  frères  comme  pour 
lui,  il  n'était  pas  tenu  compte  du  fonds  de  commerce  res- 
tant aux  mains  de  la  Société  ; 

Que  si,  dans  la  pensée  d'empêcher  Henri  Boutry  de  pro- 
voquer une  dissolution  de  la  Société,  et  de  laisser  profiter 
ses  frères  et  sœurs  mineurs  des  avantages  que  la  Société 
devait  leur  procurer,  il  a  consenti  à  accepter  les  conditions 
qui  lui  étaient  faites,  son  acceptation  donnée  en  parfaite 
connaissance  de  cause  ne  le  lie  pas  moins  ; 

Qu'il  ne  peut  même  alléguer  une  violence  morale  qu'il 
eût  subie^  puisque  Henri  Boutry  consentait  à  le  garder 
comme  associé,  s'il  voulait  venir  prendre  part  aux  travaux 
de  la  maison  de  commerce  ; 

Attendu  qu'Antoine  Cailleret  ne  peut  demander  rien  au- 
delà  de  ce  qu'il  a  stipulé  comme  condition  de  sa  retraite 
de  la  Société  ; 

Qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'ordonner  une  liquidation  de  la  So- 
ciété, lorsque  sa  situation  était  fixée  chaque  année  par 
des  inventaires  arrêtés  contradictoirement  avec  le  tuteur  ; 

Que  ces  inventaires  ont  été  mis  à  la  disposition  d'Antoine 
Cailleret  ;  qu'il  les  a  acceptés  en  donnant  décharge  à  Le- 
dieu de  son  compte  de  tutelle  ; 

Que,  quant  à  la  part  de  bénéfices  gagnés  dans  Tannée 
de  sa  retraite,  il  a  reçu  le  prorata  qui  lui  revenait  par  le 
crédit  qui  lui  en  a  été  donné  dans  le  compte-courant  qui 
lui  avait  été  ouvert  chez  son  oncle  ; 

Attendu  que  s'il  prétend  à  des  erreurs  commises  dans  les 
inventaires,  il  peut  les  faire  redresser  par  action  princi- 
pale, s'il  s'y  croit  recevable  et  fondé  ; 

Par  ces  motifs,  déboute  Antoine  Cailleret  de  ses  conclu- 
sions principales  et  incidentes;  ordonne  que  le  jugement 
dont  est  appel  sortira  effet  ;  donne  acte  à  Nicolas  Cailleret- 
Crassier  et  à  Catherine  Cailleret  de  ce  qu'ils  entendent 
rester  étrangers  aux  débats  ; 

Donne  acte  aux  époux  Dewiilf  de  leur  déclaration  de  s'en 
rapporter  à  justice;  condamne  Antoine  Cailleret  à  l'amende 


(248> 

cl  aux    dépens  de  la  cause   d'appel    eavers  laites   les 
parties. 

Du  7  juin  1860.  2^  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  mînist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-ffén.;  avoc,  Me»  Fauveïle  (du  bar- 
reau de  Paris)  et  Talon;  avou.,  Mes  Lavoix,  Dussalian 
et  Huret. 


VENTE  DE  MARCHANDISES,  —  livraison.  —  accepta- 
tion. —  RECONNAISSANCE.  —  QUALITÉS  ESSENTIELLES.  — 
QUALITÉS  PARTICULIÈRES.  —  VICES  CACHÉS.  —  EXPERTISE. 

La  marchandise  vendue  et  préseiUée  à  la  livraison  peut 
n'être  pas  considérée  comme  définitivement  acceptée  par 
V acheteur,  alors  que,  restée  en  la  possession  du  vendeur, 
elle  n'a  pas  été  reconnue  par  celui-là  posséder  ^es  qua- 
lités substantielles,  quoiqu'elle  fût  cependant  supérieure, 
à  certain  égard,  à  la  qualité  promise  (i).  —  U  y  (^  H^ii 
d'ailleurs  à  faire  exp&tiser  la  marchandise  dans  le  cas 
où  U acheteur  se  plaint  des  vices  cachés  qu'eUe  coniietU. 
(C.  Nap.,  art,  1136, 1603, 1625  et  1641.)  (2). 

( Desespringalle  Ç.  Trislara  et  Crujeot.) 

En  novembre  1859 ,  vente  par  Tristam  et  Crujeot,  de 
Dunkerque,  à  Desespringalle,  de  Lille,  de  5,000  kilog.  de 
best  rectified  naphta,  incolore  et  ne  se  coloraptpas,  à  127 
fr.  les  100  kilog.,  livrables  en  bateau  ou  en  gare  à  Dun- 
kerque. A  l'arrivée  de  la  .marchandise,  l'acheteur  en  re- 
connut le  degré,  ainsi  que  la  nuance,  en  prit  échantillon, 
l'emporta  et  en  demanda  un  deuxième  qui  lui  fui  transmis 
à  Lille.  Il  fit  savoir  ensuite  aux  vendeurs  que  n'ayant  pas 
reconnu  à  la  naphte  ses  éléments  constitutifs,  il  refusait 
d'en  prendre  livraison.  Tristam  et  Crujeot  prétendirent  au 
contraire  que  Desespringalle  avait  reconnu  et  agréé  la 
marchandise  par  l'examen  qu'il  en  avait  fait  à  Dunkerque; 
ils  l'assignèrent  en  payement  du  prix  devant  le  Tribune  de 
Dunkerque,  où  il  demanda  expertise.  Le  Tribunal  déclara 
que  les  dix  fûts  de  naphte  étaient  la  propriété  de  Tache- 
teur  ;  qu'ils  avaient  été  séquestrés  à  ses  risq^ues  et  périls , 

(1-2)  V.  sur  Tacceptation  définitive  qui  est  à  distinguer  de  la  récep- 
tion de  la  marchandise,  sous  Tarrélhde  la  Cour  de  Douai  du  ler  juin  1859 
(Jurisp.  ^7,  198),  la  note  dans  laquelle  se  trouve  rappelée  la  jurispru- 
dence de  cette  Cour,  en  même  temps  que  la  jurispnidencegénénile. 


(249) 

et  le  condamna  à  payer  7,324  fr*  pour  prix  de  celte  mar- 
chandise. 

Sur  appel  inlerjelé  par  Desespringalle,  la  Cour  a  rendu 
l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  que  le  marché  porte  sur  dix  pipes, 
5,000  kilog.  environ  de  best  rectified  naphtay  échantillon 
pris  comme  type  de  degré  et  nuance  ne  se  colorant  pas  ; 

Attendu  que  Desespringalle  allègue  que  la  marchandise 
contient  dix  à  douze  pour  cent  de  corps  étrangers  au 
naphta,  et  qu'elle  colore  Tacide  sulfurique  quand  on  la 
mêle  et  Fagite  avec  cet  acide;  qu'en  un  mot  elle  n'a  pas 
les  caractères  du  best  rectified  naphta; 

Attendu  que  les  fûts  litigieux  ne  sont  pas  entrés  dans  les 
magasins  de  l'acheteur  ;  qu'ils  sont,  depuis  leur  arrivée  en 
France ,  restés  en  la  possession  du  vendeur  ou  sous  sé- 
questre ;  qu'ainsi  U  ne  peut  y  avoir  de  débat  sur  l'identité 
de  la  marchandise  ; 

Attendu  que  si,  à  l'arrivée  à  Dunkerque,  Desespringalle 
a  vu  la  marchandise  et  l'a  reconnue  être  supérieure  au 
degré  promis  ;  que  s'il  a  débattu  une  réfaction  de  prix  â 
roccasion  de  la  coloration  de  la  matière,  â  l'égard  de  la- 
quelle un  échantillon  avait  été  pris,  il  ne  s^ensuit  pas  qu'il 
ait  accepté  la  marchandise  sous  le  rapport  de  ses  qualités 
substantielles ,  qu'une  opération  chimique  peut  seule 
révéler  ; 

Attendu  que  si  l'acceptation  eût  été  complète  à  Dunker- 
que, même  son»  ee  rapport,  on  ne  concevrait  pas  que  Deses- 
pringalle eût  emporté  un  échantillon  de  la  marchandise 
pour  le  soumettre  immédiatement  à  Lille  à  l'analyse  chi- 
mique, ni  qu'il  eût,  en,  présence  du  nouveau  résultat  qu'il 
signalait  à  ses  vendeurs,  demandé  l'envoi  d'une  quantité 
plus  considérable  pour  contrôler  sa  première  opération; 

Attçpidu  qu'on  ne  peut  considérer  comme  une  accepta- 
tion de  la  marchandise  le  fait  que  Desespringalle  n'aurait 
pas  répondu  péremptoiremenl  par  un  refus  aux  premières 
lettres  (îe  Tristam  et  Crujeot,  annonçant  que  les  naphta 


(250) 

étaient  à  sa  dispositian,  et  sollicitant  des  ordres  d'envoi  ; 
qu'en  effet,  éprouvant  encore  des  doutes  sur  le  résultat  de 
sa  première  analyse,  il  démande  l'envoi  d'un  titre  au  moins 
pour  la  recommencer  ;  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  pour  lui  de 
refuser  alors  une  marchandise  sur  la  nature  de  laquelle  il 
n'était  pas  complètement  fixé  ; 

Attendu  que  la  prise  de  l'échantillon  n'est  d'aucune  con- 
sidération, puisque  cet  échantillon  n'était  pris  que  pour 
type  du  degré  et  de  la  nuance,  et  que  ces  deux  points  ont 
été  réglés  ; 

Attendu  que  n'ayant  pas  accepté  définitivement  la  mar- 
chandise et  se  plaignant  d'ailleurs  d'un  vice  caché  que  des 
opérations  de  laboratoire  peuvent  seuls  manifester,  Deses- 
pringalle  est  recevable  à  provoquer  une  expertise  judi- 
ciaire ; 

Par  ces  motifs,  met  le  jugement  dont  est  appel  au  néant; 
émendant  et  faisant  ce  que  le  premier  juge  aurait  dû  faire, 
dit  que  par  Vasse,  Woussen  et  Girardin,  la  marchandise 
séquestrée  sera  vérifiée,  etc.  ;  qu'ils  diront  si  elle  est  ou 
non  le  best  rectified  naphta,  si  elle  en  a  les  bases  essen- 
et  les  qualités  fondamentales,  etc. 

Du  14  juin  1860.  S^chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 

Eubl.,  M.  Berr,  avoc.-gén,;  avoc. ,  M^s  Duhem  et  Edm. 
emaire;  ayou.,  M^sLegrand  et  Lavoix. 


LEGS.  —  MOBILIER.  —  INTERPRÉTATION. 

Le  legs  de  tout  le  mobiUer  qu'on  délaissera  au  jour  de  son 

décès,  ne  comprend  pas  nécessairement  V argent  comp- 
tant ni  les  créances. 
Une  signification  plm  restreinte  doit  être  domiée  à  ces  ex- 
pressions, si  des  faits  et  circonstances  apparaît  que  telle 
a  été  V intention  du  testateur,  (G.  Nap.,  art.  895,  967, 
535.)  (1). 

(Oyez,  femme  Ponthieux,  C.  héritiers  Franque.) 

Le  9  juin  1859  est  décédé  à  Ardres  (Pas-de-Calais) ,  un 

(1)  La  Cour  de  Douai,  dans  son  arrêt  du  10  mars  1852  (Juris.  iO, 
120),  avait  déjà  décidé  que  c'est  dans  la  volonté  de  Thomme  et  dans 
la  combinaison  des  diverses  clauses  du  testament,  que  doit  être  recher- 


(251) 

sieur  Laurent-Céleslin  Franque,  propriétaire,  qui  ne  lais- 
sait aucun  héritier  réservataire.  On  a  recueilli  de  lui  et  dé- 
posé chez  le  notaire  Delannoy,  à  Guines,  un  testament  olo- 
graphe dont  voici  le  texte,  avec  son  orthographe  : 

«  Je  donne  et  lègue  en  toute  propriété  a  Menanie  Oyez, 
»  ma  domestique  restant  chez  moi,  présentement  tous  le 
ï  mobiliers  que  je  délaisserai  aujour  de  mon  décès  excepté 
»  les  harde  et  linge  servant  a  mon  corps.  2^  Je  donne 
»  également  a  Ménani  ma  légataire  dis  mesures  de  terres 
»  et  la  maison  sur  laquelle  est  située  dont  je  demeure  pré- 
>  sentement  pour  en  jouir  sa  vie  durant.  3»  En  outre  je  lui 
»  fait  dont  de  deux  cent  francs  de  rentes  par  chaque  année 
»  dont  mais  héritiers  seront  tenu  d'acquiter  pour  moitié 
»  de  sis  mois  en  sis  mois  a  commencere  du  jour  de  mon 
j  décès  jusqu'au  jour  du  décè  de  la  ditte  légataire 
i  et  don  elle  pourra  prende  hypothèque  pour  sûreté  de  sa 
j  rente  sur  tous  mais  biens  que  je  delessere  et  le  toutes  a 
i>  la  charge  de  mes  heritie  le  présent  lègue  et  fait  aux  con- 
î  ditions  suivante  que  j'impose  a  ma  légataire  de  me  faire 
i>  dire  une  demi  annuelles  et  de  me  faire  recommandère 
»  toutes  les  ans  sa  vie  durant  et  elle  ne  sera  tenue  de  ne 
»  paiyer  auqune  dette  s'il  en  exite  tation  quels  sera  fait  aus 
»  tribunal  pour  les  exécution  du  présent  testament  soi  a  la 
3>  charge  de  mes  héritiers.  —  Tel  est  mon  testament  qui 
j>  sera  et  est  écrit  en  entier  date  et  signé  de  ma  propre 
»  main  dans  ma  maison  ou  je  demeure  a  Ardres  aujour- 
»  dhuit  le  deux  février  mil  huit  cent  cinquante  trois. 

»  Signé  Franque.  » 

La  dame  Mélanie  Oyez,  femme  Ponthieux,  légataire,  d'a- 
près ce  testament,  du  mobilier  de  Franaue ,  a  demandé  la 
délivrance  de  ce  qui,  aujour  du  décès  du  testateur,  et  aux 
termes  de  l'art.  535  G.  Nap.,  pouvait  être  compris  dans 
l'expression  de  mobilier,  c'est-à-dire  tout  ce  qui  est  censé 
meuble,  par  nature  ou  par  détermination  de  la  loi ,  par 

ché  le  sens  du  terme  mobilier,  employé  par  le  testateur  dans  ses  dispo- 
sitions, nonobstant  la  signification  que  lui  attache,  pour  les  cas  ordi- 
naires, Tart.  535  C.  Nap.  En  adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
la  Cour  admet  ici  que  rintention  du  testateur  peut  être  rechercnée 
même  dans  les  faits  extérieurs  aux  dispositions  testamentaires,  comme 
dans  rétat  de  fortune,  l'éducation  et  les  intentions  présumables  du  tes- 
tateur. La  jurisprudence  consacre  d'ailleurs  ce  principe  que^  dans  ce 
cas,  l'appréciation  du  juge  est  souveraine  et  échappe  même  à  la  cen- 
sure de  la  Cour  de  cassation. 

V.  Gilbert  sous  l'art.  535.  Aiout.  Répert.  Pal.,  vo  Biens,  no  294  et 
suiv.;  id.  suppl.  Rappr.  Douai  ïermai  1851  (Jurisp.  9,  279). 


(252) 

suite  Targent  comptant,  obligations,  créances ,  etc.  Les  hé- 
ritiers naturels  de  Franque  se  sont  refusés  de  donner  cette 
extension  aux  termes  du  testament  olographe  du  2  février  ; 
ils  se  sont  appuyés,  pour  repousser  la  demande,  sur  les 
circonstances  de  la  cause ,  l'ignorance  de  la  loi  par  le  tes- 
tateur, son  état  de  fortune  au  moment  où  il  testait,  enfin 
sur  ses  intentions  sainement  interprétées. 

Le  Tribunal  civil  de  Boulogne  a  accueilli  cette  défense 
par  la  sentence  dont  la  teneur  suit  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  si  l'art.  535  G.  Nap.  détermine  l'étendue 
légale  du  mot  mobilier,  employé  dans  les  dernières  dispo- 
sitions de  l'homme,  cette  détermination  ne  doit  pas  être 
admise  d'une  manière  tellement  absolue  qu'elle  ait  à  pré- 
valoir même  contre  l'évidence  de  fait^  démontrant  que  la 
personne  qui  a  fait  usage  de  l'expression  a  entendu  lui  at- 
tribuer une  signification  plus  restreinte  ; 

5>  Attendu,  dans  l'espèce ,  qu'il  paraît  démontré  que  le 
testateur  n'a  pas  connu  la  portée  légale  du  mot  mobilier, 
et  qu'il  a  écrit  ce  mot  avec .  l'intention  de  ne  l'appliquer 
qu'aux  m^eubles  meublants  et  objets  mobiliers  divers,  autres 
que  les  créances  et  argent  comptant  pouvant  se  trouver 
dans  son  avoir  au  moment  de  l'ouverture  de  la  succession  ; 
y>  Qu'en  effet,  dans  le  langage  usuel  des  campagnes  et 
même  de  la  grande  majorité  des  habitants  des  villes,  jamais 
le  mot  mobilier  n'est  employé  pour  désigner  autre  chose 
que  des  meubles  meublants  et  autres  objets  mobiliers  s'ap- 
pliquani  à  divers  usages  tout^à-fait  en  dehors  de  l'argent 
et  des  créances  ; 

»  Que,  de  la  teneur  même  de  ses  dispositions,  il  appert 
que  Louis  Franque  était  illettré  ;  qu'il  a  dû  employer  l'ex- 
pression dans  ses  conditions  les  plus  communes  et  les  plus 
usuelles,  et  que  celui  dont  il  tenait  le  modèle  de  ces  dispo- 
sitions testamentaires  ne  lui  a  pas  prêté  d'autres  inten- 
tions ; 

»  ÂtloQidu  que  l'état  de  fortune  du  testateur  en  4853  vient 
confirmer  cette  opinion  ;  quà  cette  époqua  Franque,  loin  de 
posséder  de  l'argent  comptant  et  des  créances  actives , 


(253) 

avait  déjà  quelques  dettes,  dettes  qui  ont  continué  de  s'ac*- 
croître  jusqu'au  moment  où  il  a  vendu  une  partie  de  ses 
immeubles  ;  qu'il  louait  ses  propriétés  à  de  très-longs  ter* 
mes,  ce  qui  ne  laissait  pas  supposer  l'intention  de  les  ven- 
dre, et  que  si  ultérieurement  il  a  changé  d'avis  à  cet  égard, 
pour  une  notable  portion,  il  ne  semble  l'avoir  fait  que  pou' 
liquider  son  arriéré  et  augmenter  ses  sources  de  revenu  f 

»  Attendu  d'ailleurs  que  les  autres  legs  feits  par  Fran- 
que,  en  faveur  de  la  demanderesse,  étaient  de  nature  à 
rétribuer  convenablement  les  services  de  cette  dernière  , 
comparativement  à  l'état  de  fortune  du  disposant  ;  que 
cette  circonstance  doit  être  prise  en  considération,  lors- 
qu'il s'agit  d'expression  de  volonté  susceptible  d'interpréta*» 
tion,  et  que  l'on  ne  saurait  admettre  que  Franque  ait 
entendu  faire  profiter  la  légataire  d'un  état  de  chose  alors 
aussi  imprévu  que  celui  qui  existe  aujourd'hui,  et  en  outre 
aussi  important  relativement  à  l'ensemble  des  autres  dis- 
positions faites  en  sa  faveur  ; 

»  Attendu  d'ailleurs  que  l'on  objecterait  en  vain  que, 
depuis  1853,  l'aversion  de  Franque  pour  ses  héritiei's  na- 
turels et  sa  reconnaissance  des  bons  soins  de  sa  domestique 
allaient  croissant;  que  si  ces  sentiments  étaient  réels  et 
devaient  influer  sur  les  résolutions  à  prendre  à  l'égard  de 
sa  fortune,  rien  ne  s'opposait  à  ce  qu'il  modifiât  ce  qu*îl 
avait  fait  ;  que,  dès-lors,  on  ne  saurait  en  tirer  argument 
pour  expliquer  la  nature  de  ses  intentions  en  \  853  ;  qu'il 
ne  serait  pas  plus  pertinent  d'établir  que,  pendant  sa  der- 
nière maladie ,  Franque  aurait  remis  les  clefs  de  ses  ar- 
moires à  la  demanderesse ,  en  lui  recommandant  de  les 
garder  comme  chose  importante  pour  elle  ;  qu'elle  avait 
aussi  un  autre  intérêt,  celui  de  conserver  toutes  choses 
intactes,  de  façon  à  n'être  ultérieurement  l'objet  d'aucun 
reproche  ni  soupçon  de  la  part  des  héritiers  ; 

Attendu  enfin  qu'il  n'y  a  point  à  se  préoccuper  du  prin- 
cipe admis  que  les  dispositions  testamentaires  viennent 
frapper  la  fortune  du  testateur  au  moment  même  de  son 
décès,  quelques  modifications  qu'ait  subi  antérieurement 
cette  fortune  et  quelle  que  soit  la  date  des  legs  ;  que  cette 


(254) 

considération  ne  change  rien  à  Télat  de  la  question,  puis- 
qu'il s'agit  toujours  d'apprécier  la  véritable  intention  de 
celui  qui  a  disposé,  et  que  sa  fortune,  au  moment  du  dé- 
cès, ne  se  trouve  atteinte  que  conformément  à  l'intention 
appréciée  et  reconnue  du  disposant,  au  moment  même  où 
»1  a  édicté  ses  dispositions. 

/  Par  ces  motifs,  le  Tribunal,  sans  s'arrêter  aux  conclu- 
ssions subsidiaires  de  la  demanderesse,  la  déclare  mal  fon- 
dée en  ses  conclusions  principales  à  l'égard  de  l'argent 
comptant  et  des  créances  ;  donne  acte  aux  défendeurs  de 
ce  que,  sous  cette  restriction,  ils  consentent  la  délivrance 
du  legs  au  profit  de  la  dame  Ponthieux  ;  prononce  cette 
délivrance  ;  condamne  la  demanderesse  aux  dépens.  » 

Sur  appel,  la  Cour  a  confirmé. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant;  ordonne  que  le  jugement  sor- 
tira son  plein  et  entier  effet;  condamne  les  appelants,  etc. 

Du  H  juin  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  l^^" 
présid.;  minist.publ.,  M.  Morcrette,  l^ravoc-gén.;  avec, 
Mes  Duhem  et  Coquelin  ;  avou..  Mes  Huret  et  Lavoix 


FRAIS  ET  DÉPENS.  —  droits  d'enregistrement.  —  actes 

PRODUITS  AU  COURS  d'uNE  INSTANCE. 

Lc5  droiU  d'enregistrement,  dus  au  domaine  pour  les  actes 
produits  au  cours  d'une  instance  judiciaire  et  non 
soumis  de  leur  nature  à  V  enregistrement  dans  les  trois 
mois  de  leur  date,  lesqu£ls  droits  doivent  être  compris 
dans  les  dépens,  ne  peuvent  être  supportés  par  la  partie 
non  condamnée  qui  s'est  appuyée  sur  ces  actes,  par  suite 
de  la  nécessité  de  sa  défense,  surtout  alors  qu'ils  n'ont 
pas  été  invoqués  pour  établir  la  propriété,  —  Ils  doi- 
vent restera  la  charge  de  la  partie  qui  succombe,  (C.Nap., 
art.  4593.  L.  22  frim.  an  7,  art.  22,  23;  28  avril  1816, 
art.  57.)  (1). 

^V.  Conf.  Amiens  18  août  1838  (S.  V.  38,  2.  507)  ;  Grenoble  30 
1838,  J.  Pal.  t.  1,  1839,  p.  413;  Cass.  rej.  6  a?rill840  (S.  V.40, 
1,  294)  ;  Cass.  9  fév.  1832,  J.  Pal.  3^  édit.  à  sa  date  ;  Caen  6janv.  1841 
(S.  V.  41,  2,  269);  Bordeaux  3  fév.  1846,  J.  Pal.  t.  i,  1846, 672;  Cass. 


(255) 

jIgs 
(Boitelle  et  consorts  C.  Topino  et  consorts.)       *^. 

Par  un  arrêt  du  4  août  1859  (Jurisp.  17,  211),  Te 
et  consorts  ont  été  condamnés  aux  frais  de  premier*  p^jjj. 
lance  et  d'appel  envers  toutes  les  parties  délendere&j^^j 
principal  ou  en  garantie.  L'arrêt  s'est  appuyé,  pot 
pousser  la  prétention  du  demandeur,  sur  certaines  co 
lions  intervenues  entre  les  défendeurs  principaux  ?'  ^^^^ 
défendeurs  en  garantie,  et  sur  certaines  délibérations  étions 
Compagnie  de  Bruay  et  de  la  Compagnie  de  Béthunôspour 
lamment  sur  une  convention  du  27  mars  1853,  etsurqu^^ 
délibérations  reprises  en  l'arrêt.  (Vid.  loc.  cit.)  ^^ 

Sur  le  vu  de  la  décision  de  la  Cour,  l'administration  de  ^ 
Fenregistrement  avait  d'abord  perçu  sur  la  convention , 
dontl  original  n'existait  plus,  un  droitde  marché  de  2  p.  «/o,        ''^^ 
soit  4?8,800  fr.,  un  double  droit,  un  dixième  et  un  double 
dixième,  et  pour  les  quatre  délibérations,  un  droit  et  un  \ 

double  droit  de  8  fr.,  et  deux  dixièmes  en  sus  :  en  totalité  \ 

107,377  fr.  60  c.  Elle  était  revenue  ensuite  sur  cette  per- 
ception et  l'avait  réduite  pour  la  convention  à  50  centimes, 
sans  double  droit  ni  double  dixième  ;  elle  avait  par  suite 
restitué  une  somme  de  93,940  fr.  :  de  sorte  qu'il  restait 
perçu  sur  la  convention  un  droit  d'enregistrement  de 
d3,437  fr.  60  c. 

Celte  somme  devait-elle  entrer  dans  les  dépens  auxquels 
Topino  et  consorts  avaient  été  condamnés? 

Boitelle  et  consorts,  défendeurs,  l'ont  prétendu  ainsi.  La 
Cour,  appelée  après  débats  en  chambre  du  Conseil  à  se  pro- 
noncer sur  cette  question,  a  rendu  la  décision  dont  la 
teneur  suit  : 

28  janv.  1855,  J.  Pal.  56,  p.  91.  —  Consult.  dans  le  même  sens  Chau- 

veau,  Tarif,  t.  1,  p.  76;  Rolland  de  Villargues,  Dictiortn.,  v©  Dépens, 

n*  8. 

Contra  19  déc.  1811,  cité  sous  Amiens  18  août  1838.  loc.  cit,  Consult. 

encore  Bioche,  vo  Dépens,  no  10,  et  Boucher  d'Argis,  indiq.  au  Rép.  du 

Pa! .,  70  Frais  et  Dépens,  n»  400. 

Pour  la  jurisprudence  de  la  Cour  de  Douai,  V.  Conf.  à  l'arrêt  de  ce 
jour  :  2  décemn.  1852,  2o  chamh.,  afif.  Mazy  c.  Morel-Cornet  (Jurisp. 

il,  111).  Dans  l'espèce  de  cet  arrêt,  Tacte  awjet  au  droit  avait  été  pro- 
duit par  l'intimé,  dans  son  intérêt.  Ses  prétentions  avaient  été  rejetées 
avec  condamnation  aux  dépens.  Les  frais  d'enregistrement  ont  été  mis 
à  sa  charge.  Mais  Y.  Douai  23  août  1851,  chamh.  réun.,  Delalaissec. 
héritiers  de  Roseville  (Jurisp.  10,  54),  où  la  Cour  laisse  les  droits  à  la 
charge  du  plaideur  qui  i^e  succomhe  pas,  mais  oui  était  tenu  de  faire 
enregistrer  un  acte.  V.  encore  Douai  29  nov.  1851,  Delair  c.  Delair 
(Jurisp.  10,  63). 


s. 


I  • 


/ 


J' 


(256) 

con'  ARRÊT. 

qu'i^, 

celui  ry  ce  qui  concerne  l'opposition  d'Alexis  Boitelle  : 
ces,  n^entiQ  q^e  l'administration  de  l'enregistrement  a  ré- 
appréq  13,427  fr.  le  droit  perçu  à  l'occasion  de  la  conven- 

•If* 

»i  a  efr(ju  27  mars  1853,  comme  cession  d'actions,  sans  exiger 
•  Parouble  droit; 

sions  vjtendu  qu'une  condamnation  aux  dépens  comprend 
^^^.iFseulement  le  remboursement  du  coût  des  actes  de  la 
^^rocédure  tel  qu'il  est  établi  par  le  tarif,  mais  encore  les 
frais  d'enregistrement  des  actes  non  judiciaires,  tels  que 
lettres  et  conventions,  dont  la  production  a  été  nécessitée 
par  les  besoins  de  la  défense,  et  sur  lesquels  le  juge  a  fait 
reposer  sa  sentence  ; 

Attendu  que  la  convention  du  27  mars  1853  n'était  pas 
de  sa  nature  soumise  à  la  formalité  de  renregislremenl 
dans  les  trois  mois  de  sa  date  ; 

Que,  dans  l'intention  des  parties  contractantes,  elle  ne 
devait  pas  y  être  soumise  ;  que  la  cession  des  actions  con- 
sommée, l'acte  qui  en  réglait  les  conditions  a  même  élé 
anéanti  et  n'a  pu  dès-lors  être  représenté  ; 

Qu'aussi  l'administration  n'a  perçu  que  le  droit  simple 
sur  la  convention,  sans  exiger  le  double  droit  ; 

Attendu  que  les  dispositions  de  l'art.  1593  C.  Nap.,  et  de 
l'art.  31  dé  la  loi  du  22  frimaire  an  7,  qui  font  supporter 
les  droits  d'enregistrement  aux  nouveaux  possesseurs  ou  à 
ceux  qui  profitent  des  actes,  sont  sans  application  lorsque 
la  production  des  actes  est  nécessitée  par  le  besoin  de  la 
défense ,  surtout  lorsque  ces  actes  ne  sont  pas  invoqués 
pour  établir  la  propriété  ; 

Attendu  qu'en  vain  de  Gargan  et  consorts  allèguent  que 
Lecomte  devant  justifier  de  son  apport  dans  la  société,  doit 
supporter  les  frais  d'enregistrement  de  la  convention  qui 
lui  a  conféré  les  actions  ; 

Qu'en  effet  cet  apport  a  été  effectué  et  que  iiul  ne  le 
conteste  ; 

Attendu  qu'en  vaîn  encore  ils  soutiennent  que  la  con- 
vention n'a  été  produite  que  pour  soutenir  la  demande  en 


(257) 
garantie,  et  qu'ils  ne  peuvent  être  déclarés  responsables 
des  suites  d'une'  demande  en^  garantie  cfu'ils  ne  pouvaient 
prévoir  ; 

Attendu  que  celui  qui  succombe  dans  son  actioïi  prin- 
cipale, répond  de  toutes  les  conséquences  de  sa  ftiauvaise 
contestation  prévue  ou  non  prévue  ; 

Att^endu  qu'il  suffit  de  lire  les  motifs  de  Fârrêt  du  4  août 
pour  s'assurer  que  la  coilventîon,  comme  les  délibérations 
des  l«r  décembre  et  25  novembre,  ont  été  invoquées  pour 
établir  le  fait  de  la  réduction  du  capital  social  avant  toute 
émission  d'actions; 

Quant  à  l'enregistrement  des  quatre  délibérations  : 

Attendu  que  leur  production  a  été  amenée  par  les  né- 
cessités de  la  défense,  et  que  le  coût  .de  l'enregistrement 
doit  êlte  supporté  Comme  conséquence  de  leur  mauvaise 
contestation  par  ceux  qui  ont  succombé  ; 

Dit  et  ordonne  qu'il  sera  retranché  de  la  taxe  la  somme 
de  546  fr.  93  c.  pour  frais  faits  contre  les  intervenants; 
qu'il  y  sera  ajouté  la  somme  de  ISj^S?  fr.  60  c.  pour  droits 
perçus  par  Tenregistrement  à  l'occasion  de  la  convention 
du  27  mars  1853  et  des  quatre  délibérations  reprises  en 
Tan'ét  du  4  août  1859,  avec  intérêts  têlsique  de  droit  ; 

Compense  les  dépens  ;  dit  que  les  fraîà  d'arrêt  seront 
supportés  par  moitié,  sauf  les  droits  d'enregistrement  qui 
seront  perçus  sur  la  somme  de  13,437  fr.  00  c,  lesquels 
seraient  à  la  charge  de  Gargail  et  consorts. 

Du  7  juin  1860.  2c  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  mînist. 
publ.,  Ml  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc,  M^s  Duhem  et  Talon; 
avou.,  Sf'^s  tavoix  et  Èstabel. 


lo  ÉTRANGER-.  —  arrestation  PROvisomE.  —  ordon- 
nance DtJ  PRÉSmENT.  —  COMMISSION  d'uUISSIER. 

2o  CONTRAINTE  PAR  CORPS.  —  ARRESTATION  A  DOMICILE.  — 
DÉLÉGATION  DE  COMMISSAIRES  DE  POLICE. 

t<*  V Ordonnance  du  président,  rendue  en  vertu  de  T art.  "15 
•"  de  ta  loi  du  fl  avril  i839,  à  V effet  d'autoriser  l'arresta- 
tion provisoire  d'un  étranger,  ne  doit  pas  commettre 

TOMEXVIÏI.  17 


(258) 

d'huissier  pour  y  procéder;  celte  arrestation  peut  être 
opérée  par  F  huissier  choisi  par  le  créancier,  (L.  47  avril 

4832,  art.  32.)  (1). 
2®  Lorsque ,  pour  procéder  à  Varrestation  d'un  débiteur 
dans  son  domicile ,  le  juge  de  paix ,  conformément  à 
Vart.  78i,  ^5  C.  proc,  modifié  par  la  loi  du  26  mars 
1855,  commet  lé  commissaire  central  de  police,  et,  à  son 
défaut,  deux  autres  commissaires  de  police,  V arrestation 
peut  valablement  être  faite  avec  V assistance  de  l'un  de  ces 
deux  derniers  magistrats,  sans  que  V huissier  soit  tenu  de 
mentionner,  dans  son  procès-verbal  d'arrestation,  V em- 
pêchement du  commissaire  central,  premier  délégué  (2). 

(Davies  C.  Adam.) 

M.  Adam,  banquier  à  Boulogne,  était  créancier  d'une 
somme  de  23,000  fr.  environ,  à  lui  due  par  un  sieur  Da- 
vies, Anglais  de  nation,  non  domicilié  en  France.  Le  27 
juillet  4859,  ayant  appris  que  son  débiteur  se  trouvait  à 
Boulogne,  M.  Adam,  en  vertu  de  l'art.  45  de  la  loi  du  47 
avril  4832,  présente  requête  au  président  du  Tribunal  civil, 
à  l'effet  d'obtenir  l'autorisation  de  faire  arrêter  provisoire- 
ment M.  Davies. 

Par  son  ordonnance  du  même  jour,  le  président  autorise 
l'arrestation  provisoire,  sans  toutefois  commettre  d'huis- 
sier pour  la  mettre  à  exécution. 

L'huissier  choisi  par  M.  Adam  se  présenta  chez  M.  Da- 
vies, qui  se  tint  enfermé  dans  son  appartement.  Conformé- 
ipent  aux  prescriptions  de  l'art.  784,  §  5  C.  proc,  modifié 

{mrlaloidu  26  mars  4855,  l'huissier  se  transporta  alors  chez 
e  juge  de  paix,  et  le  requit  de  l'accompagner  chez  le  sieur 
Davies.  Ce  magistrat  rendit  l'ordonnance  suivante  : 

<r  Attendu  l'impossibilité  de  nous  transporter  avec  Thuis- 
»  sier,  commettons,  pour  nous  représenter,  M.  Moyat,  com- 
})  missaire  central  de  police,  et,  à  son  défaut,  MM.  Cantinet 
»  Estienne,  aussi  commissaires  de  police.  » 

L'arrestation  fut  opérée  avec  l'assistance  de  M.  Estienne, 
sans  que  rien,  dans  le  procès-verbal  de  l'huissier,  n'indiquât 

(4)  V.  en  sens  contraire  :  Troplong,  Gontr.  par  corps,  n»  515  ;  Dallez, 
Rép.,  2e  édit.,  v©  Contrainte  par  corps,  n»  596. 

(2)  Rapprochez,  comme  analog.,  en  sens  contraire  :  Douai  27  juill. 
1825  (Jurisp.  15,  275);  Cass.  26  nov.  1849  (J.  Pal.,  t.  1,1850, 
p.  417);  Cass.  26  mai  1851  (J.  du  Pal.,  t.  2,  1851,  p.  161);  Cass.  27 
déc.  1853  (J.  Pal.,  t.  2, 1855,  p.  261).  —  Rappr.  aussi  :  Dalloz,  Rép. , 
2«  édit.,  voExploiljno  311. 


(259) 

si  M.  Moyat,  délégué  en  premier  lieu  par  le  juge  de  paix, 
avait  été  requis,  ou  si,  ayant  été  requis,  il  était  empêché. 

Sur  la  demande  en  condamnation  qui  lui  fut  intentée 
par  Adam,  Davies  opposa  de  deux  chefs  la  nullité  de  l'em- 
prisonnement. Il  soutenait ,  en  premier  lieu,  que  l'ordon- 
nance du  président  aurait  dû  commettre  un  huissier  chargé 
de  procéder  à  l'arrestation.  En  second  lieu,  il  prétendait 
que  l'arrestation  n'avait  pas  été  opérée  avec  l'assistance  du 
commissaire  de  police  délégué  par  le  juge  de  paix  ;  qu'en 
effet,  M.  Estienne  n'avait  de  mandat  qu'à  défaut  de  M.  Moyat, 
et  que  rien  ne  constatait  que  ce  dernier  fût  empêché. 

Le  Tribunal,  par  son  jugement  du  13  janvier  1860^  re- 
poussa les  deux  moyens  de  nullité  : 

JUGEMENT. 

«  En  ce  qui  touche  la  validité  de  l'arrestation  : 

»  Attendu,  en  premier  lieu,  qu'aux  termes  de  l'art.  780 
C.  proc,  la  commission  d'huissier  a  pour  but  la  signifi- 
cation préalable,  avec  commandement,  du  jugement  qui 
prononce  la  contrainte  par  corps  ; 

3>  Que  l'art.  32  de  la  loi  du  17  avril  1832  dispensant, 
pour  le  cas  d'arrestation  provisoire  de  l'étranger,  de  cette 
signification  et  de  ce  commandement  préalable,  il  en  ré- 
sulte que  la  commission  d'huissier  cesse  d'être  obligatoire  ; 

»  Qu'aucune  raison  plausible  ne  conduirait  d'ailleurs  à 
supposer  que  le  législateur  l'a  entendu  autrement;  qu'en 
effet  si,  dans  les  cas  ordinaires,  on  comprend  la  conve- 
nance d'assurer  autant  que  possible  au  débiteur  la  con- 
naissance préalable  du  titre  qui  doit  entraîner  son  arresta- 
tion ,  cette  considération  disparaît  lors  de  l'arrestation 
provisoire,  à  l'égard  de  laquelle  la  promptitude  d'exécu- 
cution  et,  autant  que  possible,  le  secret  des  intentions  du 
créancier,  jusqu'au  moment  de  cette  exécution ,  consti- 
tuent des  conditions  essentielles; 

»  Qu'il  est  facile  de  comprendre  à  quelles  lenteurs  pour- 
rait donner  lieu,  dans  la  pratique,  la  désignation  spéciale 
d'un  huissier  pour  l'arrestation  provisoire;  que,  d'autre 
part,  tout  individu  arrêté  par  suite  d'une  mesure  de  ce 
genre  pouvant  immédiatement  demander  d'être  conduit  en 
référé,  toute  garantie  lui  est  accordée  sur  le  mode  d'exé- 


(260)    ^ 

culion  confié  par  le  créancier  au  premier  huissier  venu  ; 

»  Attendu,  en  second  lieu,  que  le  jnge  de  paix  du  canton 

de  Boulogne  avait  délégué  pour  assister  à  l'arrestation  le  sieur 

Moyat,comaiissaire  central  de  police,età  son  défaut  les  S»*sCan- 

tin  etEstienne,  commissaires  de  police;  qu'ainsi  tous  trois  te- 

naientunmandatdirectâujugedepaix;que,  derassistance  du 

sieur  Etienne,  on  doit  inférer  naturellement  que  l'absence 
ou  un  autre  service  ont  empêché  les  deux  autres  fonctionnaires 

dénommés  avant  lui  de  prêter  leur  ministère;  que,  bien  qu'il 
eût  été  préférable  de  voir  l'huissier  l'énoncer  dans  son  procès- 
verbal,  on  ne  saurait  trouver  dans  cette  émission  une  cause 
de  nullité,  lorsqu'en  réahté  il  ne  s'agit  que  d'une  question 
d'ordre  et  de  régularité  de  service  entre  les  divers  agents 
délégués,  et  que  le  concours  de  l'un  offrait  à  Davies  les 
mêmes  conditions  de  sécurité  et  d'égards  que  le  concours 
de  l'autre  ; 

»  Attendu  dès-lors  qu'on  ne  saurait  admettre  la  nullité 
proposée  par  Davies  de  son  arrestation  ; 

»  Le  Tribunal  déclare  Davies  mal  fondé  en  sa  demande  en 
nullité  d'arrestation  ;  dit  que  cette  arrestation  est  bonne  et 
valable^  etc.  » 

Appel  par  Davies.  Dans  son  , intérêt,  il  est  dit  devant  la 
Cour  : 

En  matière  de  contrainte  par  corps,  tout  est  de  rigueur, 
et  toutes  les  formalités  prescrites  par  la  loi  doivent  être  ob- 
servées à  peine  de  nullité.  (C.  proc,  art.  794.) 

Aux  termes  de  l'art.  32  de  la  loi  du  17  avril  4832,  les 
dispositions  du  Codé  de  procédure  sont  applicables  à  l'exer- 
cice de  la  contrainte  par  corps  contre  les  étrangers.  Si  ce 
même  article  dispense  le  créancier  de  la  signification  et 
du  commandement  préalable  pour  les  cas  d'arrestation 
provisoire,  il  ne  dispense  pas  de  faire  commettre  un  huis- 
sier pour  procéder  à  l'arrestation. 

En  fait,  l'ordonnance  rendue  le  27  juillet  1859  par  M.  le 
président  du  Tribunal  civil  de  Boulogne,  à  l'effet  d'autori- 
ser l'arrestation  provisoire  de  l'appelant,  n'a  pas  commis 
d'huissier  pour  procéder  à  cette  arrestation  ;  cette  forma- 
lité, comme  toutes  celles  édictées  en  matière  d'emprison- 
nement ,  est  prescrite  à  peine  de  nu^Uifé  ;  par  coUîSéquent, 
l'arrestation  est  nulle  de  ce  chef. 


(261) 

D^un  autre  côté,  Tarrestation  de  rappelant  ayant  eu  Ijea 
dans  son  domicile,  il  ne  pouvait  y  être  valablement  pro- 
cédé; en  exécution  de  Tart.  I^r  de  la  loi  du  26  mars  1855, 
aux  termes  duquel  le  débiteur  ne  peut  être  arrêté  dans  une 
maison  quelconque ,  même  dans  son  domicile,  à  moins 
qu'il  n'ait  été  ordonné  ainsi  par  le  juge  de  paix  du  lieu, 
lequel  devra,  dans  ce  cas,  se  transporter  dans  la  maison 
avec  r  officier  ministériel  ou  déléguer  un  commissaire  de 
police. 

Le  commissaire  de  police  n'ayant  pouvoir  qu'en  vertu 
de  la  délégation  du  juge  de  paix ,  l'arrestation  est  nulle 
aux  termes  de  l'art^  794  C.  proc,  si  l'officier  ministériel 
s'est  fait  assister  par  un  autre  que  le  commissaire  délégué. 

L'ordonnance  de  M.  le  juge  de  paix  ayant  commis  pour 
le  représenter  M.  Moyat,  commissaire  central  de  police,  et 
à  son  défaut  seulement  MM.  Cantin  et Estienne,  aussi  com- 
missaires de  policé,  la  délégation  de  ces  derniers  était 
subordonnée  à  l'absence  ou  à  l'empêchement  de  M.  Moyat. 
Or,  rien  dans  le  procès-verbal  ne  constatant  ni  l'absence 
ni  l'empêchement  de  ce  dernier,  ni  m^me  aucune  démarche 
pour  le  requérir,  c'est  cependant  par  M.  Estienne  que  l'huis- 
sier Leroy  a  été  assisté  dans  l'arrestation  de  l'appelant.  A  ce 
second  point  de  vue,  il  y  a  lieu  également  de  prononcer  la 
nullité  de  l'arrestation. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; — ^Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  met 
l'appellation  au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont  est 
appel  sortira  son  plein  et  entier  effet;  condamne  l'appe- 
lant, etc. 

Du  22  mai  1860.  l^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon, 
4^  présid.;  minist.  publ.,  M.  Morcretle ,  l^r  avoc.-gén.; 
avec.  M®*  Merlin  et  Duhem  ;  avou.,  M^^  Huret  et  Dussalian. 


APPEL.  —  ACTE  d'appel.  '—  ÉTRANGER.   —  SIGNIFICATION 
AU  PARQUET.  —  POMICILE.  —  CHANGEMENT. 

L'acte  d'appel  vis-à-vis  d'une  personne  domiciliée  à  Vé- 
tranger  et  n'oAjant  pas  de  résidence  connue  en  France, 
doit  être  signifié,  à  peine  de  nullité,  au  parquet  dupro- 
cureur-gàiéral  près  la  Cour  devant  laquelle  f  appel  est 


(202) 

porté,  et  non  au  parquet  du  Tribunal  qui  a  rendu  le 
jugement  attaqué.  (G.  proc,  art.  69,  9»,  70  et  4-50.)  (1). 

(1)  La  jurisprudence  est  constante  sur  ce  point.  V.  Trêves  30jan?. 
1813  (S.  V.  11,  2,  398);  idem  12  mars  1813  (S.  V.  C.  n.  -4,  2,  275); 
Colmar  25  nov.  1815  (S.  V.  16, 2, 126)  ;  Cass.  rej.  U juin  1830  (S.  V.  30, 
1,  224)  ;  Nancy  26  mai  1834  (S.  V.  35, 2,  107)  ;  Cass.  rej.  12  avril  1843 
(S.  V.  43,  1,  601).  —  V.  aussi  Bioche  et  Goujet,  Dict.  de  proc,  v»  Ap- 
pel, no  183,  2e  édit.;  Coin  de  Lisle  sur  les  art.  U  et  15,  n»  30;  Cliau- 
veau  sur  Carré,  Lois  de  la  proc.  civ.,  quest.  371,  not.  1.  — Ajout.  Rép. 
Pal,  vo  Etrangers,  n®  502. 

Notre  recueil  contient  déjà  un  arrêt  de  la  Cour  de  Douai  conforme 
à  celui  que  nous  rapportons  aujourd'hui,  et  notre  table  générale ,  v» 
Etranger,  no»  35  et  36,  en  indique  plusieurs  autres  que  nous  allons 
rapporter  : 

Le  premier,  en  date  du  31  août  1819,  a  été  recueilli  par  les  Annales, 
t.  2,  p.  165. 

(Dubois  C.  Bonnet.) 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  la  signification  de  l'appel  n'a  pas  été  faite 
au  procureuivgénéral  près  la  Cour  où  l'appel  est  porté,  déclare  l'acte 
d'appel  dont  s'agit  nul  à  l'égard  de  Henri  Bonnet,  domicilié  en  Russie  ; 
condamne  Matbieu  Dubois  à  l'amende  et  aux  dépens. 

Du  31  août  1819.  1^  chamb.  civ.  Présid.,  M.  de  Forest  de  Quart- 
deviUe  ;  avoc.  Mes  Delaflotte  et  Martin. 

Le  second  est  du  31  décembre  1819  et  par  erreur  indiqué  à  notre  table 
comme  étant  du  31  octobre.  Il  est  d'ailleurs  rapporté  dans  les  Annales, 
t.  3,  p.  59,  et  dans  la  Collection  nouvelle  de  Sirey,  à  sa  date.  Il  est 
ainsi  conçu  : 

(Lambert  C.  Coppens.)  ^  _ 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  436  C.  proc,  l'acte 
d'appel  doit  contenir  assignation  ;  que,  par  suite,  il  est  soumis  à  toutes 
les  formalités  exigées  pour  les  ajournements; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  69,  §  9  du  même  code,  ceux  qui  sont 
établis  chez  l'étranger  doivent  être  assignés  au  domicile  du  procureur 
du  Roi  prés  le  Tribunal  où  sera  portée  la  demande;  que,  par  suite, 
tout  appel  porté  devant  la  Cour  royale  doit  être  signiûée  au  domicile 
du  procureur-général  près  la  Cour  ; 

Attendu,  dans  l'espèce,  que  l'appel  qui  a  été  signifié  au  sieur  Baron 
Coppens,  demeurant  à  Wauldrez,  royaume  des  Pays-Bas,  a  été  signifié, 
non  au  domicile  de  M.  le  procureur-général,  mais  bien  à  celui  de  M.  le 
procureur  du  Roi  près  le  Tribunal  d  Avesnes  ;  que,  par  suite,  U  est  nul 
aujf:  termes  de  l'art.  70  du  même  code,  qui  déclare  que  ce  qui  est  pres- 
crit par  l'art.  69  doit  être  observé  à  peine  de  nullité  ; 

Déclare  l'appel  du  sieur  Lambert  nul  et  de  nul  effet,  etc. 

Du  31  déc.  1819.  2®  chamb.  Présid.,  M.  Dubois,  conseill.;  avec. 
Mes  Deprés  et  Leroy  de  Falvy. 

Un  troisième  arrêt,  entièrement  inédit,  est  ainsi  conçu  : 

(Frénor  C.  Orcnse  et  C«e.) 

ARRÊT. 
LA  COUR;  —  Attendu  que,  de  la  combinaison  des  art.  69,  §9,  et 456 


(263) 

Lorsque,  dans  le  cours  de  la  procédure,  le  domicile  de  l'une 
des  parties  a  été  indiqué  dans  la  signification  d'un  juge- 
ment dont  est  appel,  c'est  à  ce  domicile  et  non  ailleurs 
que  doit  être  faite,  à  peine  de  nullité,  la  signification  de 
l'appel,  si  elle  ne  l'est  pas  à  personne. 

C.  proc.  civ.,  il  résulte  que  Tacte  d'appel,  quand  il  doit  être  signifié  à 
un  étranger,  doit  être  remis  non  au  procureur  du  Roi  prés  le  Tribunal 
qui  a  rendu  le  jugement  attaqué,  mais  au  procureur-général  près  la 
la  Cour  à  laquelle  la  cause  doit  être  soumise  ; 

Que  cette  formalité,  prescHte  à  peine  de  nullité  par  Fart.  70  G.  proc, 
n'a  pas  été  remplie  dans  la  cause  ; 

Déclare  Tappel  signifié  à  la  requête  de  Frénor,  le  16  février  der- 
nier, nul,  etc. 

Du  6  juillet  1832.  2®  chamb.  Présid.,  M.  Delaetre;  avoc,  M»  Bru- 
neau  et  Martin;  avou.,  M«s  Pla  et  Guilmot. 

Un  quatrième,  également  inédit,  décide  la  question  de  la  même  manière 
et  ajoute  que  le  moyen  de  nullité  peut  être  invoqué  par  Télranger,  encore 
bien  qu'il  n'ait  pas,  devant  les  premiers  juges,  excipéde  ce  que  l'ajour- 
nement primitif,  au  lieu  d'être  signifié  au  parquet  du  procureur  du  roi, 
l'avait  été  à  la  dernière  résidence  du  défendeur. 

(Devineux ,  veuve  Messéant ,  C.  les  époux  Penton  et  Gordier  de  La 

Houssaye.) 

ARRÊT. 

LÀ  GOUR;  —  Attendu  que  les  intimés  du  nom  Penton  sont  étrangers 
et  n'ont  pas  de  domicile  en  France  ;  que  dès-lors  l'acte  d'appel  aurait 
dû  leur  être  notifié  au  (parquet  du  procureur-général  ; 

Que  s'ils  ont  consenti  à  ne  pas  opposer  en  première  instance  la  nul- 
lité de  l'assignation  qui  leur  avait  été  donnée  à  Marck,  on  ne  peut  en 
inférer  qu'ils  aient  malicieusement  dissimulé  leur  véritable  domicile 
dans  le  but  d'induire  leurs  adversaires  en  erreur,  puisqu'ils  s'étaient 
empressés  de  le  leur  faire  connaître  lors  de  leur  comparution  au  bu- 
reau de  conciliation  ; 

Qu'en  n'opposant  cette  nullité  devant  les  premiers  juges,  ils  n'ont  pas 
renoncé  au  droit  de  s'en  prévaloir,  si  elle  se  reproduisait  dans  l'acte 
d'appel  ; 

Attendu  qu'à  défaut  d'appel  valable  vis-à-vis  des  époux  Penton,  le 
jugement  est  passé  en  force  de  chose  jugée  à  leur  égard,  et  çue  par 
suite  la  demande  introductive  d'instance  est  sans  objet,  même  vis-à-vis 
du  sieur  Gordier  de  La  Houssaye  ; 

Par  ces  motifs,  déclare  nul  l'acte  d'appel  interjeté  vis-à-vis  des  époux 
Penton;  déclare  les  appelants  sans  intérêt  dans  leurs  conclusions  au  fond 
contre  Gordier  de  La  Houssaye,  et  non  recevables  dans  leurs  conclu- 
sions tendantes  à  ce  qu'il  soit  fait  défense  aux  intimés ,  à  peine  de 
dommages-intérêts,  de  porterie  nom  de  Gordier  de  La  Houssaye; 

Condamne  les  appelants,  etc. 

Du  6  juillet  1836. 1^  chamb.  civ.  Présid.,  M.  Farez;  minist.  publ., 
M.  Preux,  ayoc.-gén.;  avoc,  M<»  Roty  etHuré;  avou.,  M«s  Duchochois 
et  Brachelet. 

Enfin  un  cinquième  arrêt  de  la  même  Gour,  également  conforme,  du 
13  janvier  1845,  est  rapporté  Jurisp.  3,  49. 


Pqiit  être  auiorUé  à  /aw  cetiB  significalion  eu  tout  autre 
lieu,  V appelant  doit  fair0  la  preuv^e  du  changement  de 
domicile  de  Vintirm.  {G.  proc,  art.  450.) 

{Bondu  C.  Hénin.) 

Dans  une  instance  pendante  entre  les  sieurs  Charles  et 
Louis  Bondu,  d'upe  part,  et  les  héritiers  Hénin,  d'autre 
part,  le  Tribunal  civil  de  Saint-Orne;'  rendit,  à  la  datje  df; 
40  février  1859,  un  jugement  qui  admettait  quelques-unes 
.de3  prétentions  .des  sieurs  Bondu,  et  renvoyait  à  compter 
pour  le  suiT)lus. 

Charles  Éondu  était  domicilié  à  Ypres  (Belgique)  ;  Louis 
Pondu  se  disait,  (Jap.s  tous  les  actes  de  ta  procédure,  de- 
meurant à  Lille  ;  c'est  sous  cette  qualification  notamment 
qu'il  avait  fait  signifier  aux  héritiers  Hénin  le  jugement  du 
40  février  4859. 

Les  héritiers  Hénin  interjetèrent  appel  de  ce  jugeiiaeQt  > 
l'appel  fut  signifié  à  Charles  Bondu,  au  parquet  du  procu- 
reur impérial  pfès  le  Tribunal  de  Smnt-ômei';  il  fut  signi- 
fié à  Louis  Bondu,  à  Nantes,  à  l'hôtel  des  Voyageurs,  par- 
lant au  maître  de  l'hôtel. 

Devjant  la  Cour,  les  sieurs  Bondu  opposèrent  chacun  la 
nuUité  d^  l'acte  d'appel  qui  le  concernait  :  Charles  Bondu, 
parce  que  Tappel,  au  lieu  de  lui  être  signifié  au  dpn^icile 
du  procureur  impériol  près  le  Tribunal  où  la  demande  était 
portée  (art.  69,  §  9  G.  proc),  c'est-à-dire  au  parquet  du 
procureur  général  près  la  Cour  de  Douai,  avajt  été  signifié 
au  parquet  du  procureur  impérial  près  le  Tribunal  âe  St- 
Omer;  Louis  Bondu,  parce  que  l'appel  ne  lui  avait  été 
signifie  ni  à  personne,  ni  à  domicile,  son  domicile  n'ayant 
jamais  été  à  Nantes. 

Par  l'arrêt  suivant,  la  Cour  ^  annulé  les  deux  actes 
d'appel, 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que,  dans  tous  les  actes  de  la  pro- 
cédure qui  a  abouti  au  jugement  du  Tribunal  de  St-Oraer 
du40février4859,notamment  dans  l'assignation  du  48  avril 
4857,  comme  dans  les  significations  du  j jugement  à  parties, 
Charles  Bondu  s'est  dit  demeurant  à  Ypres  (Belgique);^  et 
Lpijis  Bondu,  demeurant  à  Lille; 

Attendu  que  les  appelants  ont  compris  cette  désignation 
comme  indiquant  le  domicile  des  frères  Bondu,  puisqu'ils 


,(265) 
fl'oflt  pas  critiqué  l'assigBation  qui,  aux  terrues  de  l'art.  61 
du  Code  de  procédure,  doit,  à  pleine  de  nullité,  contenir 
la  flcienlion  du  domicile  du  demmdeurî 

Attendu  que  c'est  par  §uite  de  cette  indication  qu'ils  ont 
signifié  leur  acte  d'appej  du  jugement  du  40  fiéviier  4859, 
dirigée  contre  Charles  Boja^u  au  parqaet  ;du  pr-ocwreur  im- 
périal^ en  cjouforraité  des  preseriptipns  du  n9  ^  de  l'art  69 
C.  proc.  civ.  ; 

Mais  ^jiteudu  que  pour  ^'insteUCô  d'appçl  portée  devait  ia 
Courj  c'était  au  parquet  du  procureur  général,  non  au 
parquet  de  l'un  de  ses  substituts  du  ressort,  que  l'açlte  d'ap- 
pel eût  dû  être  signifié  ; 
En  ce  qui  touche  la  signiftcation  d'appel  ^  liom^  Boudu  : 
Atien4u  (j[ue  n'ayant  p^s  été  jajte  à  personne,  elle  devait 
être  faite  à  domicile  ; 

Attendu  qu'elle  a  eu  lieu  h  Nantes,  parlant  à  la  maî- 
tresse de  l'hôtel  où  loge  habituellement  Louis  Bondu  ; 

A).tendu  que,  pour  s'écarter  ainsi  de  h  désignatîan  de 
domicile  pvi^  par  Louis  Bondu  dans  toute  la  procédure, 
nataj^ru^nt  dan.s  la  signification  du  jugement  attaqué,  les 
^ppelailt$  doivaol  établir  que  Louis  Bondu  n'a  Jamais  été 
domicilié  à  Lille,  ou  qu'il  a  changé  de  domicile  pour  pren- 
dre celui  de  Pfanles; 

Attendu  qu'ib  n'essaient  pas  de  ju^tiéerque  Louis  Bondu 
n'ait  jamais  été  domicilié  à  Lille  ; 

Qu'il  paraîtrait  étrange  que  sans  paotif  plausible  il  eût, 
d^ustoutle  cours  de  la  procédure,  indiqué  un  domicile  autre 
que  son  domicile  véritable,  et  que  p'ill'eût  fait  dans  son  PBsî- 
l^atiou,  pu  lui  eût  opposé  à  boa  droit  unmoy4gnde  nullité  ; 

Attendu  qu'il  résulte  au  contraire,  d'une  signification  de 
jugement  du  33  juin  4834  et  par  Drion,  auteur  des  appe- 
lants, à  Reine  Bondu,  comme  tutrice  légale  de  Cb^?les  et 
Louis  Bondu,  ses  enfants  miueur^,  qu'exile  éfait  49Ripjhée 
à  Lille  f 

Que  dés-lors  le  domicile  dçges leuf^ntp  était  à  Lijle; 

Qu'il  n'apparaît  pas  qu'elle  ait  transféré  ailleurs  son  do- 
micile pendant  la  minorité  de  ceux-ci  ; 


(266) 

Attendu  que  Louis  Bondu  n'a  fait  aucune  déclaration  de 
changement  de  domicile; 

Que  le  fait  qu'il  n'aurait  pas  conservé  de  résidence  à  Lille 
n'est  d'aucune  valeur,  puisque  sa  profession  de  commis- 
voyageur  au  service  d'une  maison  de  commerce  de  Lille 
l'oblige  à  un  éloignement  presque  continuel  ; 

Attendu  qu'on  ne  saurait  argumenter  avec  plus  d'avan- 
tage de  la  circonstance  que,  chargé  d'explorer  les  départe- 
ments de  l'Ouest,  c'est  à  Nantes  et  dans  le  même  hôtel  qu'il 
réside  le  plus  habituellement; 

Qu'il  y  a  loin  de  ces  faits  qu'expliquent  les  nécessités  de 
la  profession  de  Louis  Bondu  à  l'abandon  de  son  domicile 
d'origine  et  à  l'adoption  d'un  nouveau  domicile  à  Nantes, 
où  le  retient  le  mandat  de  sa  maison  tant  qu'il  lui  sera 
continué  ; 

Attendu  qu'en  vain  encore  on  voudrait  se  prévaloir  des 
termes  d'une  procuration  qu'il  a  passée  devant  un  notaire 
de  Nantes  le  23  juillet  1858,  et  où  il  se  dit  commis-voya- 
geur, demeurant  à  Nantes,  hôtel  des  Voyageurs;  qu'en 
effet  il  désigne  un  fait  vrai  en  lui-même>,  mais  qui  n'em- 
porte pas  le  sens  forcé  d'une  déclaration  de  domicile  à 
Nantes  ; 

Attendu  que  les  appelants  n'établissent  en  aucune  façon 
que  ce  soit,  à  Nantes,  que  Louis  Bondu  paye  la  contribu- 
tion personnelle  ou  exerce  ses  droits  de  citoyen  ; 

Attendu  dès-lors  que  les  appelants  ne  justifient  pas  du 
changement  de  domicile  de  Louis  Bondu,  leur  signification 
d'appel  est  nulle  en  ce  qui  touche  Louis,  comme  en  ce  qui 
touche  Charles  Bondu,  aux  termes  des  art.  68,  69, 159, 
70  et  456  C.  proc.  civ.  ; 

La  Cour  déclare  nuls  lesdits  actes  d'appel;  condamne 
les  appelants,  etc. 

Du  15  juin  1860.  2©  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.';  avoc,  M^s  Merlin  et  Duheni; 
avou.,  Mes  Huret  et  Lavoix. 


(267) 

HUISSIER.  —  ASSOCIÉ  COMMANDITAIRE.  —  EXPLOIT.  —  NUL- 
LITÉ. —  ACTE  d'appel. 

Un  huissier  associé  commanditaire  ne  peut  instrumenter 
pour  la  Société  dans  laquelle  il  est  intéressé.  Les  exploits 
qu'il  délivre  et  signifie  dans  ce  cas  sont  viciés  de 
nullité,  (G.  proc,  art.  66.)  (4). 

(Debéve  et  0^  C.  DubruUe-Chevalier.) 

L'huissier  G ,  propriétaire  de  plusieurs  actions  dans 

la  Société  en  commandite  Debéve  et  G^®,  a  toujours  instru- 
menté pour  cette  Société.  Dans  un  appel  formé  par  elle 
contre  DubruUe-Ghevalier,  il  a  signifié  à  celui-ci  l'acte  d'ap- 
pel. La  cause  ayant  été  appelée  à  l'audience  de  la  Gour,  au 
moment  où  les  âélais  d'appel  étaient  d'ailleurs  expirés,  l'in- 
timé a  élevé  une  exception  de  nullité  fondée  sur  le  motif 
(jue  si  l'huissier,  en  vertu  de  l'art.  66  G.  proc,  ne  pouvait 
instrumenter  pour  ses  parents  et  alliés,  à  plus  forte  raison 
ne  le  pouvait-il  pour  une  Société  dans  laquelle  il  possédait 
un  intérêt  direct.  Propriétaire  en  nom  d'actions  de  la  com- 
mandite, cet  intérêt  existait  pour  lui,  à  propos  de  toute 
contestation  qui  pourrait  affecter  plus  ou  moii^  sa  part  de 
dividendes. 

La  Gour  a  prononcé  dans  les  termes  suivants  la  nullité 
demandée  : 

ARRÊT. 

LA  GOUR  ;  —  Attendu  que  l'exploit  d'appel  du  24  octo- 
bre 4859,  requête  du  sieur  Auguste  Debéve,  en  sa  qualité 
de  gérant  de  la  caisse  commerciale  et  industrielle  de  Douai, 
sous  la  raison  sociale  A,  Debéve  et  G^®,  a  été  notifié  par 
l'huissier  G ; 

Attendu  que  le  jugement  dont  est  appel  porte  sur  diffé- 
rentes sommes  réclamées  par  la  Société  en  commandite 
dont  Debéve  est  le  gérant  ; 

Attendu  que  l'huissier  G est  associé  commanditaire, 

propriétaire  d'un  certain  nombre  d'actions  nominatives 
dans  cette  Société; 

(1)  V.  dans  ce  sens  :  Encyclop,  des  Huissiers,  par  MM.  Adrien  Harel 
et  Marc  Deffaux,  vo  Huissier,  n©  305  et  306,  et  Thomine,  Proc.  civ,^ 
t.  1  no  91. 

CÔnf.  Pau  7  juillet  1813,  J.  Pal.  à  sa  date;  Poitiers 26 nov.  1822,  id. 
—  V.  aussi  Merlin,  Répert.,  v©  Huissier,  n«  15. 


(268) 

Attendu  que  si  l'intérêt  d'affection  suffit,  aux  termes  de 
l'art.  66  G.  proc,  pour  frapper  de  discrédit  et  annuler  les 
significations  faites  par  un  huissier  dans  l'intérêt  de  ses  pa- 
rents et  alliés  jusqu'au  d^gré  de  cousin  issu  de  germain,  à 
plus  forte  raison  l'huissier  n^e  peut  donner  le  sceau  de  l'au- 
thenticité à  des  actes  qui  l^  touchent  dir^tem^nt  et  indi- 
viduellemQut  ; 

Attendu  en  effet  que  nul  n'est  témoin  idoine  dans  sa 
propre  cause; 

Attendu  qu'il  est  évident  que  C-i-f,  l'^socié  commaiidi- 
tairp  de  la  Société  Debève  ,  est  directeraent  intéressé  au 
procès  pendant  entre  la  Société  et  DubruUe-Ghevalier  ; 

Que  sa  part  proportionnelle  dans  les  bénéfices  ou  les 
pertes  de  la  Société  sera  affectée  par  l'événement  du 
procès ; 

Attendu  que  si  on  a  validé  l'exploit  signifié  par  Thuissier 
pour  3a  communauté,  c'est  qu'il  est  absolument  indispen- 
mbl^  qu'il  en  soit  ainsi,  puisque  les  huissiers  de  l'arrondis- 
sement faisant  to^s  partie  de  la  commiinauté,  peuvent 
seuls  instrumenter  dans  sa  circonscription  ;  que,  du  reste, 
îl  faut  distinguer  entre  l'intérêt  direct  et  personnel,  et  l'in- 
térêt de  communauté  ; 

Attendu  qu'on  ne  peut  davantage  se  prévaloir  de  ce  qu'on 
n*a  pa«  prono|ij3é  dans  le  cour$  du  procès  sur  le  moyen  de 
hullîJé;  qu'en  effat,  c'est  à  la  partie  intéressée  à  s'en  pré- 
valoir, non  au  juf  e,  qui  ne  peut  le  connaître,  par  une  sorte 
d0  divination,  à  le  suppléer; 

La  Cour  déclare  nul  l'acte  d'appel  du  24  octobre  4859; 

Condamne  la  Société  Debève  et  C*®  à  l'amende  et  aux 
dépens. 

Du  28  juin  1860.  2^  chamb.  Présîd.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gé».,  concl.contr.  ;  avoc.,M^Dnhem 
et  Rossignol  ;  avou.,  M^  livoii:  fet  GennevQJSQ, 


-•»> 


SOaETÉ  OOMMANDITAIilE,  ^  oéftANT,  —  révocation.- 

ASSEMBLÉE  «ÉNÊRAL^.  ^'^  MOTIFS. 

IjU  rçvûmtion  if  m  gérant  nom^^^  p<^  tGUl4  i(^  dur^  £uu 
Société  m  comrmndiU  ne  peut  être  prononcée  po^r  l'ct^- 


(269) 

semblée  générale  des  actionnaires;  elle  doit  Vêtre  fwr  fe 
Tribunal  de  commerce,  à  V  arbitrage  duquel  sont  laissés 
les  motifs  de  cette  rév(fcation. 
Doit  être  considéré  comme  un  motif  suffisant  de  révocation 
le  fait  par  le  gérant  d'aggraver  sciemment  une  cause  de 
raine  pour  la  Société.  (C.  Nap.,  art.  1856,  1871.)  (1). 

(  Dehée-Lefebvre  C.  DuUorier  et  consorts*) 

Debée-Lefebvre,  d'abord  gérant  à  temps  de  la  Société  du 
gaz  de  Wâzemroes-lez-LiUe,  a  été,  en  1856,  continué  dans 
les  mêmes  fonctions  pour  toute  la  durée  de  cette  même 
Société.  Cependant  l'assemblée  générale  des  actionnaires, 
sur  des  plaintes  du  conseil  de  surveillance,  a  prononcé  sa 
révocation.  Dehée-Lefebvre  et  un  actionnaire,  le  sieur  Le- 
chevalier,  ont  résisté  à  l'exécution  de  cette  ralesure,  et  ïe 
président  et  les  membres  du  conseil  de  surveillance  ont 
porté  fa  question  devant  le  tribunal  de  commerce  de  UUe, 
qui  a  rendu  le  jugement  suivaiil  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  rassemblée  générale  des  actionnaires  du 
gaz  de  Wazemmes,  dans  sa  délibération  du  23  décembre 
dernier,  a  prononcé  à  Puiianimité,  pour  des  motifs  énon- 
cés en  cette  délibération ,  la  révocation  de  Dehée-Lefebvfe 
de  ses  fonctions  de  directeur-gérant  de  cette"  Société  ; 

j>  Attendu  que  cette  résolution  li'â  été  prise  qu'après  que 
Dehée-Lefebvre  a  été  entendu  dains  ses  observations  écrites 
sur  les  différents  griefs  qui  lui  étaient  reprochée,  et  pas 
une  seule  voix  ne  s'est  élevée  en  sa  faveur; 

J  Attendu  que  Dehée-Lefebvre  a  cherché,  il  est  vrai,  à 
atténuer  la  portée  de  cette  délibération^  en  signalant  des 
manœuvres  à  l'aide  desquelles  on  serait  parvenu  â  fausser 
ladite  délibération  dans  un  intérêt  qui  lui  est  hostile  ; 

»  Attendu  que  ces  manœuvres ,  en  supposant  qu'elles 

aient  existé,  ce  qui  est  contesté,  pouvaient  bien  dans  une 

"-        -     "  -        •       j'"''     ' ■    -.--. 

(1)  Le  jugement  dont  les  motifs  sont  rci  adoptés  par  la  Cour,  dispose 
en  effet  que  l'assemblée  générale  des  actionnaires  avait  excédé  ses  pou- 
voirs^ en  révoquant  le  gérant.  C'est  la  doctrine  de  St.  Trôplong  :  Des 
Sociétés,  t.  1,  Bo  433,  peoi  conforme  à  uaarrôtde  la  Go«r  de  Paris,  18 
février  1850,  J.  Pal.,  t.  1,  1850,  p.  364.  —  V.  sur  cette  matière  les 
Traités  ûesSociétés,  par  MM.  Delangle,  Ûuvergier,  Malpeyre  et  Jourdain, 
ConsuH.  encore  Cass.  12  jativ.  1852  (J.  Pa*.-,  t.  %  1«^  p,  23^; 


(270) 

certaine  mesure  modifier  la  majorité ,  mais  non  produire 
l'unanimité,  alors  que  le  but  de  la  réunion  étant  suffisam- 
ment connu  de  tous  les  actionnaires,  ceux  qui  auraient  pu 
être  favorables  à  la  continuation  des  fonctions  du  gérant, 
se  trouvaient  mis  en  demeure  de  manifester  leurs  senti- 
ments, soit  spontanément,  soit  à  la  sollicitation  de  Dehée- 
Lefebvre  lui-même  ; 

»  Attendu  que  si  l'assemblée  générale  des  actionnaires 
a  excédé  ses  pouvoirs  en  prononçant  elle-même  la  révoca- 
tion de  Dehée-Lefebvre,  la  résolution  unanimement  prise 
d'obtenir  cette  révocation  n'en  est  pas  moins  une  circons- 
tance très-grave  qui  démontre  que  Dehée-Lefebvre  a  com- 
plètement perdu  la  confiance  de  la  Société  et  dont,  par  ce 
motif,  le  Tribunal  doit  tenir  compte  comme  constituant 
l'un  des  cas  dont  la  légitimité  est  laissée  à  l'arbitrage  des 
juges  par  l'art.  1871  G.  Nap.  ; 

»  Attendu  néanmoins  que  cette  considération  ne  dispense 
pas  le  Tribunal  d'examiner  les  griefs  qui  ont  inspiré  la  ré- 
solution de  l'assemblée  générale  ; 

»  Attendu  que,  parmi  ces  griefs,  il  convient  de  s'arrêter 
aux  deux  principaux,  à  savoir  les  pertes  considérables  de 
gaz  que  la  Société  a  subies,  et  la  position  faite  à  cette  Société 
par  l'attitude  de  l'autorité  administrative,  les  autres  faits 
n'ayant  pas  été  établis  ou  n'ayant  pas  le  caractère  que  les 
demandeurs  leur  attribuent  ; 

»  Attendu,  sur  la  déperdition  du  gaz,  qu'il  ne  paraît  pas 
possible  que  la  Société  puisse  prospérer  en  perdant,  sans 
utilisation  aucune,  une  quantité  de  ses  produits  aussi  con- 
sidérable que  celle  qui  est  accusée,  même  en  admettant 
que  les  relevés  qui  ont  été  faits  puissent  être  empreints  de 
quelque  exagération; 

»  Attendu  que  Dehée-Lefebvre  a  bien  moins  cherché  à 
atténuer  les  déperditions  qu'à  les  expliquer  par  les  défec- 
tuosités de  la  canalisation  ; 

»  Attendu  que  si  la  canalisation  a  été  établie  d'après  un 
mode  vicieux,  Dehée-Lefebvre,  au  lieu  d'exagérer  les  dé- 
fectuosités de  ce  mode,  comme  il  l'a  fait  en  développant  la 
canalisation  qu'il  reconnaît  avoir  portée  de  14,000  mètres  à 


J 


(271) 

,000,  devait,  au  contraire,  réclamer  les  moyens  d'y  subs- 
tituer l'un  des  modes  établis*  dans  les  établissements  de  ce 
genre,  ou  tout  au  moins  appeler  très-sérieusementrattention 
de  la  Société  sur  sa  position  ; 

)  Attendu  qu'en  aggravant  sciemment  une  cause  de  ruine, 
il  a  manqué  vis-à-vis  de  la  Société  à  l'un  de  ses  devoirs 
les  plus  rigoureux  ; 

Attendu,  sur  la  position  de  la  Société  vis-à-vis  de  l'au- 
torité administrative,  que  le  privilège  concédé  à  la  Compa- 
gnie du  gaz  de  Wazemmes,  pour  l'établissement  de  sa  ca- 
nalisation sous  les  voies  publiques ,  comporte ,  pour  la 
Compagnie ,  l'obligation  d'assurer  le  service  de  l'éclairage 
à  des  conditions  déterminées  ; 

»  Qu'ainsi ,  il  n'importe  peu  que  l'éclairage  public  soit 
moins  profitable  que  l'éclairage  privé,  puisque  le  premier 
est  Tune  des  conditions  essentielles  de  l'existence  de  la 
Société  ; 

»  Attendu  que  les  communications  faites  à  la  Société  par 
l'autorité  administrative  établissent  que  les  conditions  du 
cahier  des  charges  sont  très-mal  observées  dans  les  com- 
munes suburbaines,  et  que,  depuis  leur  annexion  à  la  ville 
de  Lille,  l'administration  est  assaillie  de  plaintes  fondées, 
surtout  pour  le  quartier  des  Moulins  lez-Lille,  et  les  fau- 
bourgs de  Fives  et  Saint-Maurice  ; 

ï  Qu'indépendamment  des  avertissements  et  injonctions 
données  verbalement,  douze  ou  quinze  réclamations  écrites 
ont  eu  lieu  dans  l'espace  de  moins  d'une  année,  à  l'occasion 
de  l'imperfection  de  l'éclairage  public  et  particulier  des 
travaux  de  matériel,  de  l'insuffisance  de  la  canalisation,  et 
que  les  réclamations  n'ont  rencontré  que  négligence  et 
résistance  d'inertie  ; 

»  Que  des  contraventions  de  toute  nature  sont  journel- 
lement relevées  et  donnent  lieu  à  des  retenues  relative- 
ment importantes;  qu'enfin  l'administration  en  est  arri- 
vée au  point  de  se  préoccuper  des  moyens  d'obtenir 
judiciairement  la  résiliation  des  traités,  désespérant  d'at- 
teindre^ par  voie  de  remontrance  ou  d'injonction,  les  amé- 
liorations qu'exige  impérieusement  le  service  ; 


(272) 

»  AUendtt  que  eétte  situaiion^  qui  menace  là'  Société 
dans  soft  existence,  pféoecupe  à  bon  droit  kdite  Société, 
dans  un  moment  surtout  où  l'extension  considérable  que 
va  prendre  la  consommation  de  ses  produits  dans  Féténdue 
de  sa  concession,  doit  la  porter  à  se  concilier  les  sympa- 
ti)ie&de  l'adoïiinifitratioii  ; 

»  Attendu  que ,  même  en  tenant  compte  des  embarras 
que  le  développement  du  service  a  pu  occasionner  à  là  gé- 
rance, il  n'eBt  pas  possible  d'admettre  que  Dehée-Lefebvre 
n'ait  pas  à  s'imputer  personnellement  une  très-graTide  par- 
ti»e  des  faits  relevés  à  sa  chaiPge  par  l'autorité  municipale  ; 

»  Attendu  que  la>  satisfaction  qu'atirai€^  d'après  Dehée- 
Lefebvre,  éprouvé  la  clientèle  privée,  ne  peut  même  être 
considérée  comme  abâolue,  puisque  l'autorité  signale  Fim- 
perfeclion  de  F  éclairage  public  et  privé,  et  que  notamment 
la  clientèle  très-importan«e  du  chemin  de  fer  du  Nord  est 
sinon  perdue,  tout  au  moins  très-compromise  par  suite  de 
faits  analogues  à  ceux  dont  se  plaint  l'administration  com- 
munale ; 

.  >  Atte!ndu  que  de  Ces  diveï'ses  considérations  résulte, 
pour  le  Tribunal,  la  conviction  qjate  la  direction  de  Dehée- 
Lefebvre  (piî,  déjày  a  él^é  pour  beaucoup  dans  Finsuccès  de 
la  Société  duga^  de  Wa25emrties,.  conduirait  fatalement  cette 
Société  à  sa  ruine,  si  elle  se  prolongeait  ; 

»  Attendu,  quant  à  la  comparution  personnelle  des  mem- 
bres du  coïiseil  de  surveillance  qiui  est  demandée  par  Le- 
eheyalier  et  q^ui  a  pour  but  d'établir  que  les  actions  de'  la 
Société  ont  dépassé  le  cours  de  200  fr.,  et  qu'ils  en  ofit 
acheté  su<îcessivement  pour  lesrôpartir  entre  leui^s  amis; 

»  Qu'on  n'aperçoit  pas  Finfluence  qiie  des  faits  de' cette 
nature  peuvent  avoir  sur  le  débat,  puisque;  d'une* port-,  le 
cours  de  20O  fr.  pour  des  aétions  de  500  fr.,  dst  loito  de 
déEftoatrer  une  situafioô  prospère,  et?  que,  d'autre  part,  la 
réuiiioi^des  actions  dîaiis  des  mains  amies  est  précisément 
l'un  d«es  moj'ens  de  eoBJurer  la  ruine  doiit  la  Société  est 
meôacée; 

»  Le  Tribunal  dit  qu'il  a'y  a  lieu  d'ordonner  la  compa- 
rution personnelle  des  demandeurs  ;  prononce  la  révocation 


(273) 

de  Dehée-Lefebyre  de  ses  fonctions  de  gérant  de  la  Société 
du  gaz  de  Wazemmes  ;  nomme ,  pour  administrer  provi- 
soirement ladite  Société,  le  sieur  E.  Bertrand,  comptable 
à  Lille  ; 

»  Condamne  Debée-Lefebvre  aux  frais  exposés  par  les 
demandeurs  ;  déclare  le  présent  jugement  commun  avec 
Lechevalier  ;  condamne  ledit  Lechevalier  aux  frais  qui  sont 
résultés  de  son  intervention. 

Sur  appel,  la  Cour  a  confirmé  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  les  causes  inscrites  sous  les 
nos  284  et  287  sont  connexes,  et  qu'il  y  a  lieu  d'en  ordon- 
ner la  jonction  ; 

El  statuant  entre  toutes  les  parties  par  un  seul  et  môme 
aiTêt,  sans  s'aj^'éter  aux  conclusions  subsidiaires  des  ap- 
pelants ; 

Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  met  les  appella- 
tions au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont  est  appel 
sortira  son  plein  et  entier  effet;  condamne  les  appelants 
à  Tamende  et  aux  dépens,  etc. 

Du  5  juin  1860. 1^®  chamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon,  l^r 
présid.;  minisl.publ.,  M.  Morcrette,  l^ravoc-gén.  ;  avoc, 
MesDuhemetDuponl;avou.,Me8Legrand,VilletteetDussalian. 


ACTE  DE  .L'ÉTAT-CIVIL.  —  rectification.  —  nom.  — 

POSSESSION  ANCIENNE. 

Une  demande  en  rectification  d'actes  de  Vélat-^civil  est  rece- 
vable  dans  les  cas  mêmes  où  elle  ri  a  diantre  but  que  de 
faire  restituer  à  un  nom  de  famille  son  véritable  contexte, 
et  de  faire  décider  qp^e^la  particule  qui  précède  ce  nom 
et  quia  été  écrite  comme  formant  avec'y  nom  un  mot 
unique,  doiteti  être  séparée  et  former  deux  mots  (I). 

Quç^nd  un  Tribunal  a  dû  viser  qu'en  fait  un  nom  patrony- 
mique s' est  toujours  composé  de  deux  parties,  ce  Tribu- 
nal  ne  peut  à  aucun  titre,  sans  se  contredire  lui-même, 
excéder  ses  pouvoirs  et  léser  la  partie  intéressée,  décider 

(1)  En  ce  sens:  Douai  40  août  1852  (Jurisp.  10,  399  et  la  note). 
TOME  XVIU.  18 


(274) 

que  le  droit  de  cette  dernière  et  de  sa  famille  s'est  borné 
et  se  bornera  «  à  laisser  un  intervalle  entre  la  syllabe 
initiale  et  le  reste  du  mot.  »  (1). 

(Le  Gentil.)      ' 

M.  Constant  Le  Gentil,  juge  au  Tribunal  civil  d'Arras, 
est  né  en  cette  ville  le  18  juillet  1819. 

Il  a  épousé  également  à  Arras^  le  l^r  septembre  1847,  la 
demoiselle  Julia  Grespel. 

De  ce  mariage  est  née,  au  château  Saint-Michel,  com- 
mune de  Saint-Laurent-Blangy,  la  demoiselle  Alice,  le  i8 
juin  1848. 

Les  actes  de  l'état-civil  constatant  ces  naissances  et  ma- 
riage portent  en  un  seul  contexte  Le  Gentil,  qui  y  est  écrit 
Legentil. 

En  exécution  de  la  loi  du  28  mai  1858  et  de  la  circu- 
laire ministérielle  du  22  novembre  1859,  relative  aux  ma- 
gistrats ,  M.  Constant  Le  Gentil  se  pourvut  devant  le 
Tribunal  d'Arras  pour  obtenir  la  rectification  des  trois 
actes  de  l'état-civil  précités. 

La  requête  présentée  le  2  décembre  1859  exposait  en 
ses  motifs  «  que  le  nom  patronymique  du  requérant  avait 
ïi  toujours  été  écrit  en  deux  mots,  composés  de  l'article 
»  particulaire  le  et  du  nom  Gentil,  »  et  concluait  en  son 
dispositif  à  ce  qu'il  fût  ordonné  que  les  actes  de  l'état-civil 
sus- énoncés,  où  par  erreur  le  nom  figurait  en  un  seul  con- 
texte, fussent  rectifiés  en  ce  sens  «  que  le  nom  Le  Gentil 
»  y  serait  rétabli  en  deux  mots.  » 

A  l'appui  de  cette  rejjuêle  étaient  produits  : 

lo  Les  extraits  réguliers  de  vingt-cinq  actes  de  l'état- 
civil  s'écheldnnant  du  21  juin  1685  au  3  mai  1847,  et 
s'appliquant ,  indépendamment  de  la  ligne  collatérale,  à 
cinq  générations  successives  en  ligne  directe  des  auteurs 
du  requérant,  y  compris  son  père,  M.  Fleury  Le  Gentil. 

2®  Dix-neuf  titres  publics  ou  authentiques,  portant  actes 
d'anciennes  juridictions  locales ,  collations  de  grades  ec- 
clésiastiques ou  militaires,  quittances  de  droits  de  francs 
fiefs,  lettres  de  licence  en  Sorbonne  ou  en  droit,  etc.,  etc., 

s'échelonnant  encore  du  15  mars  1627  au  2  prairial  an  6. 

/ . — 

(1)  Il  est  incontestable  qu'uniquement  appelés  à  constater  an  point  de 
fait  par  la  comparaison  des  actes,  les  Tribunaux  ne  peuvent,  sous  pré- 
texte de  rectification,  se  livrer  à  aucune  révision  et  encore  moins  à  aa- 
cune altération.  — V.  sur  ce  point,  évident  par  lui-même,  les  instruc- 
tions très-explicites  de  M.  le  garde-des-sceaux,  en  date  du  ^  oct.  1859. 


11^  r: 


(275). 

â»  Différente  ouvrages  juridiques >  historiques,  stalistU 
ques,  imprimés  anlérieuremenl  à  1 789. 

Pièces  établissant  péremptoirement  que,  iusqu*à  l'époque 
révolutionnaire  surtout,  le  nom  de  la  famille  Le  Gentil  n'a- 
vait jamais  figuré  qu'en  deux  mots  dalis  les  actes,  titres  et 
documents  qui  la  concernaient. 

Le  25  février  1860,  au  rapport  de  M.  le  président  et 
sar  les  conclusions  de  M.  le  procureur  impérial  déclarant 
c  ne  pas  empêcher,  »  intervint  un  jugement  ainsi  conçu  : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  qu'il  résulte  de  nombreux  documents  pro- 
duits par  le  requérant,  et  spécialement  de  vingt-cinq  actes 
de  Tétat-civil  relatifs  tant  à  ses  ascendants  qu'à  d'autres 
membres  de  sa  famille,  que  le  nom  de  cette  famille  a  tou- 
jours été  orthographié  en  laissant  un  intervalle  entre  la 
syllabe  initiale  Le  et  le  reste  du  nom  ; 

»  Que  cette  orthographe  se  trouve  notamment  repro* 
produite  dans  les  actes  de  naissance  et  de  décès  du  père 
du  requérant,  dans  ceux  de  naissance  et  de  décès  de  son 
bisaïeul,  et  enfin  dans  l'acte  de  décès  de  l'un  de  ses  aïeux 
mort  en  1685; 

>  Qu'elle  est  reproduite  encore  dans  plusieurs  autres  actes 
de  naissance  et  de  décès  de  frères  et  sœurs  de  ses  ascendants  ; 

>  Que  le  nom  ainsi  orthographié  est  dès-lors  le  véritable 
nom  du  requérant,  et  que  c'est  par  erreur  qu'il  a  été  écrit 
Legentil  en  un  seul  contexte  et  sans  séparation  :  1»  dans 
l'acte  de  naissance  du  requérant,  reçu  par  l'officier  del'é- 
tat-civil  d'Arras,  le  20  juillet  4819  ;  2^  dans  son  acte  de  ma- 
riage, reçu  par  le  même  officier  de  l'éUit-civil  le  1er  sep- 
tembre 184?7;  et  3»  dans  l'acte  de  naissance  d' Alice- Julia- 
Constance-Marie  Le  Gentil ,  sa  fille,  reçu  par  l'officier  de 
l'état-civil  de  Saint-Laurent-Blangy,  le  19  juin  1848; 

»  Que  le  requérant  demandant  la  rectification  de  cette 
erreur,  il  y  a  Ueu  de  l'ordonner  ; 

»  Attendu  que  ladite  requête  est  régulière  en  la  forme 
et  juste  au  fond  ; 

»  Le  Tribunal  ordonne  que  lesdits  actes  de  naissance  et 
de  mariage  des  20  juillet  1819,  1er  septembre  1847  et  19 


(276) 

juin  1848  seront  rectifiés,  et  quête  nom  Legenlily  sera 
écrit  Le  Gentil,  en  laissant  un  intervalle  entre  la  syllabe 
Le  et  le  reste  du  niot  ; 

»  Ordonne  que  le  présent  jugement  sera  transcrit  sur 
les  registres  de  Tétat-civildeE  communes  d'Arras  etdeSaint- 
Laurent-Blangy,  fconformémeat  à  la  loi  ; 

i>  Fait  défense  à  tous  dépositaires  de  délivrer  aucun  ex- 
trait ou  expédition  desdits  actes  sans  transcription  littérale 
des  rectifications,  à  peine  de  tous  dommages  et  intérêts.  > 

Le  28  mars  1860,  appel  fut  interjeté  de  ce  jugement. 

Aux  griefs  relevés  en  Vacte  d'appel,  on  exposait  notam- 
ment que  force  était  de  se  retirer  fjardevant  la  Cour  : 

a  En  ce  que  le  Tribunal  avait  rejeté  les  conclusions  au 
fond,  tendant  à  ce  que  le  nom  patronymique  du  requérant 
fût  rétabli  en  deux  mots  ; 

»  En  ce  qu'au  lieu  de  se  borner  à  constater  un  fait  et  à 
ordonner  la  rectification  d'une  erreur  signalée,  le  Tribunal 
avait  statué  sur  une  question  qui  ne  lui  était  pas  soumise 
et  à  propos  de  laquelle  il  se  trouvait  essentiellement  incom- 
pétent en  procédant  à  une  révision,  à  un  amoindrissement, 
à  une  altération  du  nom  de  l'appelant.  » 

Le  20  juin  1860,  au  rapport  de  M.  le  premier  président 
et  sur  les  conclusions  de  M.  le  premier  avocat-général  ten- 
dant «  à  ce  qu'il  fût  fait  droit  aux  conclusions  de  la  re- 
quête, »  fut  rendu  l'arrêt  infirmatif  suivant  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'il  résulte  des  nombreux  docu- 
ments authentiques  produits  par  l'appelant,  et  spécialement 
des  actes  d'état-civil  qui,  remontant  à  plus  d'un  siècle  et 
£tdemi,  se  succèdent  jusqu'au  décès  de  son  père,  que  le 
nom  patronymique  de  sa  famille  se  compose  des  deux  mots 
distincts  et  séparés  Le  Gentil; 

Qu'ainsi,  c'est  évidemment  par  erreur  que  ce  nom  a  été 
écrit  en  un  seul  mot  :  !<>  dans  l'acte  de  naissance  de  l'ap- 
pelant, reçu  par  l'officier  de  Tétat-civil  d'Arrias  le  20  juillet 
1819;  2°  dans  son  acte  de  mariage,  reçu  par  l'officier  de 
l'état-civil  de  la  même  commune  le  l<^r  septembre  1847; 
3o  dans  l'acte  de  naissance  de  sa  fille  Alice^Julia-ConsIâBce- 
Marie,  reçu  par  l'officier  de  l'état-eîvil  de  la  commune  de 
Saint-Laurent*Blangy,  le  19- juin  1848; 


(277) 

Attendu  que  les  premiers  juges,  tout  en  reconnaissant 
que  la  requête  était  pleinement  justifiée,  ont  pourtant,  par 
un  dispositif  qui  ne  concorde  point  avec  les  motifs  de  leur 
sentence ,  ordonné  la  rectification  en  des  termes  impli- 
quant que  le  nom  de  l'appelant  se  réduisait  à  un  seul  mot; 

Par  ces  motifs,  la  Cour  infirme  le  jugement; 

Ordonne  que  les  trois  actes  ci-dessus  énoncés  et  datés, 
seront  rectifiés  en  ce  sens  que  le  nom  Le  Gentil  y  sera 
rétabli  en  deux  mots  ; 

Ordonne  la  transcription  du  présent  arrêt  sur  les  regis- 
tres de  Fétat-civil  des  communes  d'Arras  et  de  Saint-Lau- 
rent-Blangy;  dît  que  mention  en  sera  faite  en  marge  des 
actes  réformés,  et  qu'il  n'en  sera  plus  délivré  expédition  ou 
extrait  qu'avec  lesdites  rectifications,  à  peine  de  tous  dom- 
mages-intérêts, le  tout  conformément  aux  art.  101  C.  Nap. 
et  857  C.  proc.  ; 

Ordonne  la  restitution  de  Famende  consignée. 

Du  20  juin  1860.  l^e  chamb,  Présid.,  M.  de  Moulon,  1er 
présid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  l®^avoc.-gén.;  concl. 
conf,;  avoc,  M^  Duhem;  avou..  M®  Lavoix. 


SAISIE  IMMOBILIÈRE.  —  demande   en  conversion.  — 

REFUS.  —  APPEL. 

La  deniande  en  conversion  dune  vente  ^immeubles  sur 
saisie  immobilière,  en  vertu  des  dispositions  de  Part.  74S: 
C.  proc,,  peut  être  portée  en  appel,  alors  que  la  conver- 
sion a  été  refusée  par  le  Tribunal.  (C.  proc.,  art.  743  et 
746.)  (^<^  et  2e  espèces.)  (1). 

li*e  espèce. 

(Capet,  veuve  Martin.) 

10  septembre  1859,  jugement  du  Tribunal  civil  d'An^as, 
qui  refuse  la  conversion  demandée  par  la  dame  Capet , 
vouve  Martin, 

Appel  devant  la  Cour,  par  voie  de  requête. 

(1)  (Jaw^rà  Cacn  22  sept,  4849.  Bioohe,  Joum.proc,^  n*  4547,  elSup- 
plésn.  àtt  Diet.,  y^.^mste  immobilière,  no 794. 

L'arrêt  que  nous  recueillons  (2©  espèce)  vient  d^étre  rapporté  dans  le 
Journal  de  M.  Bioche  (7e  cahier  1860,  art.  7245).  L'opinion  de  ce  juris- 
consulte est  que  le  jugement  n'était  pus  susceptible  n'tippeL 


(278) 

ARRÊT. 

LA  COURj  — Attendu  que  l'appelante  ne  justifie  par 
aucune  raison  fondée  sa  demande  tendant  à  faire  substituer 
le  mode  de  vente  proposé  par  elle  à  celui  que  les  premiers 
juges  ont  adopté  et  qui  doit  être  maintenu,  d'après  les 
circonstances  de  la  cause  ; 

Par  ces  motifs,  la  Cour  met  l'appellation  au  néant  ;  con- 
firme le  jugement,  ordonne  qu'il  sortira  effet,  et  condamne 
l'appelant  aux  dépens. 

Du  9  janvier  1860,  lreeh,Prés.,  M.  deMoulon,  l«r  prés.  ; 
rainist.  pubL,  M.  Morcrette,  l®f  avoc.-gén.;avoc.,  Me  Du- 
hem  ;  avou.,  M^  Debeaumont. 

2e  espèce. 
(De  Gantés  C.  Queval.) 

Le  20  avril  1860,  saisie  immobilière,  suivie  de  dénoncia- 
tion et  de  transcription  ;  requête  à  fin  de  conversion.  4  mai 
4860,  jugement  du  Tribunal  de  Saint-Om«r  qui  ordonne 
la  continuation  des  poursuites  par  ces  motifs  qu'au  Tribu- 
nal appartient,  ainsi  que  le  reconnaît  implicitement  le  §  2 
de  l'art.  746,  la  faculté  d'admettre  ou  de  rejeter  une  de- 
mande en  conversion  ;  qu'à  part  le  bénéfice  que  peut  offrir 
aux  créanciers ,  relativement  aux  frais  de  purge,  d'après 
l'art.  717  de  la  loi  du  21  mai  1858,  le  rejet  de  la  conver- 
sion demandée,  il  est  d'autres  raisons  pour  retenir  à  la 
barre  la  vente  dont  il  s'agit^ 

Le  saisissant  et  le  saisi  ont  interjeté  appel  par  une  re-» 
quête  collective,  La  Gour  a  infirmé  le  jugemei^t, 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  toutes  les  parties  sont  ma- 
jeures, que  les  saisissants  et  les  tiers  saisis  concluent  à  la 
conversion  de  la  saisie  en  vente  volontaire  devant  notaire; 

Attendu  qu'il  paraît  plus  conforme  aux  divers  intérêts 
engagés,  d'une  part  que  la  vente  ait  lieu  avec  les  formalités 
propres  à  une  vente  volontaire;  d'autre  part,  qu'elle  ail 
lieu,  soit  à  raison  de  la  nature  des  biens,  soit  à  raison  du 
peu  de  valeur  de  certains  d'entre  eux,  dans  les  mairies  des 
communes  de  leur  situation  ; 

Infirme  en  ce  point  la  décision  rendue  par  le  Tribunal 


(279) 

de  première  instance  de  Saint-Omer,  le  4  mai    4860  ; 

Dit  qu'il  sera  procédé  à  cette  vente  sur  les  lieux  aux 
mairies  d'Ardres  et  de  Bonningues-les-Ardres,  par  le  mi- 
nistère de  Me  Trousel,  notaire  à  Saint-Omer,  sur  la  mise  à 
prix  fixée  au  jugement  ;  fixe  jour,  etc.  ; 

Dit  que  les  frais  seront  employés  comme  frais  de  pour- 
suite, etc. 

Du  29  mai  4860.  4^6  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon,  4©^ 

Êrésid.;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,4eravoc.-gén.  ;  avoc, 
[e  Coquelin  ;  avou..  Me  Lavoix. 


ADULTÈRE.  —  pouRSurrE  en  séparation   de  corps.  — 

COMPLICE.  —  POURSUITE  CORRECTIONNELLE.  —   SURSIS. 

Lorsqu'un  mari  a  poursuivi  devant  la  juridiction  civile 
contre  sa  femme  la  séparation  de  corps  pour  cause  d'a- 
dultère, et  devant  la  juridiction  correctionnelle  contre  le 
complice,  la  réparation  du  préjudice  causé  par  Vadul- 
tère,  il  y  a  lieu,  de  surseoir  à  celte  dernière  action,  jus- 
qu'à ce  qu'il  ait  été  prononcé  définUivement  sttr  la  pre- 
mière. (C,  Nap.,  art.  308.) 

(Laude  et  Warnet.) 

25  avril  4860,  jugement  du  Tribunal  civil  de  Cambrai, 
qui  prononce  la  séparation  de  corps  des  époux  Laude  pour 
cause  d'adultère,  et  condamne  la  femme  Laude  à  la  peine 
d'un  an  d'emprisonnement. 

5  mai  4860,  jugement  par  défaut  du  Tribunal  correc- 
tionnel qui  condamne  Warnet ,  comme  coupable  d'adul- 
tère, à  aeux  années  d'emprisonnement  et  à  40,000  fr.  de 
dommages-intérêts. 

34  mai  4860,  appel  par  la  femme  Laude  du  jugement  de 
séparation.  De  son  côté,  Warnet  a  appelé  devant  la  juridic- 
tion correctionnelle  du  jugement  qui  l'a  condamné. 

Devant  la  Cour,  il  demande  sursis  jusqu'à  définitif  juge- 
ment sur  la  séparation. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que,  sur  la  demande  en  séparation  de 
corps  formée  par  Laude  contre  sa  femme,  et  fondée  sur  l'adul- 
tère commis  par  cette  dernière,  le  Tribunal  civil  de  Cam- 
brai, par  jugement  du  25  avril  4860,  a  prononcé  lasépa- 


(280) 

ration  de  corps,  et  pair  application  de  Tari.  308  C.  Nap., 
a  condamné  là  fenitne  Laude  à"  la  peine  d'un  an  d^empri- 
sonnénieilt  ; 

Que,  par  exploit  du  31  mai  i8C0,  la  femme  Laude  a  in- 
terjeté appel  du  jugement; 

Attendu  que,  sur  la  dénonciation  de  Laude  qui  s'est 
porté  partie  civile,  Warnet  a  été  poursuivi  devant  le  Tribu- 
nal correctionnel  de  Cambrai  comme  complice  de  la 
femme  adultère  ; 

Que,  condamné  par  un  jugement  par  défaut,  Warnet  a 
appelé  de  cette  décision  ;  qtf  à  Taudience  Warnet  conclut 
à  ce  qu'il  soit  sursis  à  statuer  sur  cet  appel  jusqii'â  ce  qtfîl 
ail  été  prononcé  définitivement  sur  l'action  iiilentée  par 
Laude  contre  sa  fenlme  ; 

Que  ces  conclusions  doivent  être  accueillies  ; 

Qu'en  effet ,  en  matière  de  délit  d'adultère,  la  poursuite 
contre  le  complice  doit  suivre  le  sort  de  Taction  principale 
et  en  est  indivisible  ; 

Qu'ainsi  le  complice  peut,  tant  que  durel'instatice  contre 
l'auteur  du  délit,  invoquer  Texceplion  qui  résulterait  de  la 
réconciliation  du  mari  avec  sa  femme,  ou  de  désistement 
de  sa  plainte  ;  qu'il  profite  également  de  la  décision  qui, 
au  regard  de  la  femme,  reconnaîtrait  qu'il  n'y  a  pals  eu 
adultère  ; 

Que  ces  considérations  démontrent  que,  lorsque  le  mari 
usant  dé  son  droit,  a  poursuivi  devant  la  juridiction  civile 
contre  sa  femme  la  séparation  de  corps  pour  cause  d'adul- 
tère, et  devant  la  juridiction  correctionnelle  contre  le  com- 
plice la  réparation  du  préjudice  causé  par  l'adultère,  il  ne 
peut  être  statué  sur  l'action  intentée  pour  complicité  d'a- 
dultère, jusqu'à  ce  qu'il  ait  été  pronon<îé  défmitivetûent 
par  le  juge  saisi  des  poursuites  contre  l'autetir  dû  délit; . 

Donne  acte  à  Laude  de  ce  que,  sur  le  sursis  demandé,  il 
déclare  s'en  rapporter  à  justice  ; 

Surseoît  à  statuer  sûr  Tappel  interjeté  plar  Warnet  jiisqu'à 
ce  qu'il  ait  été  prononcé  par  la  Coûr  îtnpériaile  de  Douai 
sur  l'appel  du  jugement  du  Tribunal  de  Cambrai  dii  25 


(281) 

avril  1860,  notifié  par  la  femme  Latide  le  31  mai  suivant; 

frais*  réservés. 

Du  11  juin  1860.  Chamb.  côrr.  Présid.,  M,  Dumon  ; 
rapp.,  M.  de  Gwerne,  cons.  ;  minist.  publ.,  M.  Carpentier, 
avoc-gén.  ;  avoc,  M^  Emile  Flamant  et  Merlin;  avou., 
Me  Huret. 


JUGE  D'INSTRUCTION.  —  liberté  provisoire  sous  cau- 
tion. —  LEVÉE  FACULTATlVïr  DES  MANDATS  DE  DÉPÔT.  — 
LOI  DU  4  AVRIL  1855. 

Les  dispositions  de  la  loi  dû  4  avril  i855,  sur  la  faculté 
donnée  av^  juges  dHnstruclion  d'accorder  la  màin-levée 
dès  mandats  de  dépôt,  sont  tout'à-fait  indépendantes  des 
dispositions  des  art.  H3  et  H4  €.  in)st.  criin.  sur  la 
liberté  provisoire  sou^  caution.  Par  suite,  il  reste  toujours 
interdit  aux  juges  d'instruction  d'accorder  à  V inculpé  la 
miÈe  en  liberté  sous  caution,  lorsque  le  titre  de  l'accu- 
sation emporte  une  peine  affliclive  ou  infamante  (1). 

(1)  La  confasîon  peut  d'autant  moins  se  faire  entre  la  liberté  provi- 
soire sous  caution  et  la  levée  facultative  des  mandats  de  dépôt  que  ceUe- 
ci  a  été  l'objet  d'explications  données  par  le  rapporteur  de  la  commis- 
sion du  corps  législatif,  qui  a  introduit  dans  la  loi  du  i  avril  1855  ces 
termes  qu'on  y  trouve  :  quelle  guc  soit  la  nature  de  l'inculpation. 

Le  rapporteur, M.  Nogenl  Saint-Laurénè ,  s'exprimait  ainsi: 

«  L'art.  113  du  Code  d'instruction  criminelle  ne  permet  la  liberté 
sous  caution  que  dans  le  cas  de  délit,  jamais  dans  le  cas  de  crime. 

>  En  sera-t-il  de  même  pour  le  mandat  de  dépôt,  et  ne  pou^ra-t-ii 
être  levé  que  lorsque  la  poursuite  est  correctionnelle  î 

i>  Ce  n'est  ni  l'esprit  ni  le  texte  du  projet  de  loi  qui  dit  :  tout  mandat 
de  dépôt...., 

»  En  principe,  et  lorscjù'îl  y  a  raàhàat  de  dépôt,  Ï6  fait  n'est  pas  en- 
core qualifié,  ou  du  moins  il  n'a  pas  besoin  de  Fétre.  Dans  la  pratiqué, 
la  qualifiùatioTi  peut  exister  sur  un  mandai  de  dépôt,  mais  elle  n'est  pas 
Jiécessaire  comme  dans  le  mandat  d'arrêt,  qui  ne  peut  être  décerné  que 
sur  les  réquisitions  du  ftiitiistcre  public,  et  qui  doit  contenir  èxpressé- 
mctrt  la  qualiûcation  du  fait  poursuivi. 

» L'art.  113  reste  en  tlgueùr  danstidtre  Code  d'instruction  xri- 

rainelle,  avec  la  distinction  QÙ  il  a  consacrée. 

x>  Mais  pour  le  mandat  de  dépôt,  en  dehors  dé  là  qùàlîficà'lioh  précisé, 
le  projfet  de  loi  n'a  pas  renoiTtelé  cette  distinclidn,     ,  .. 

»  Siïr  ce  point  capital,  il  a  semble  à  votre  coiîiroîsaîOB  ,qùe  là  rédac- 
tion priinitive  du ,  projet  pouvait  laisser  subsister  quelque  douté  ;  que 
les  juges  ji'instructi on,,  placés  sdus  là  distinction  de  Tart.,  llSj  pour- 
raient supposer  que  cet  article  doit  réagir  sur  l'art.  94,  et  qu^  par  ces 
expressions  :  tout  Mandat  de  dépôt,  il  ne  faudrait  entendre  que  la  géné- 
ralité des  mandats  de  dépôt  relatifs  à  des  poursuites  correclionheiles. 


(282) 

(De  Roux  de  Lusson.) 

Un  sieur  Doms  de  Roux  (de  Lusson),  ex-banquier  àVa- 
lençay,  est  inculpé  avec  d'autres  de  banqueroute  fraudu- 
leuse, de  faux  en  écriture  de  commerce,  d'usage  de  ces 
faux,  d'abus  de  confiance  et  d'escroquerie.  Il  a  demandé  et 
le  juge  d'instruction  lui  a  accordé  sa  mise  en  liberté  sous 
caution,  par  ordonnance  du  28  mars  1860. 

Opposition  du  procureur  général. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'il  résulte  des  pièces  ^  et  notam- 
ment de  l'ordonnance  rendue  le  28  mars  1860,  par  le  juge 
d'instruction,  et  des  réquisitious  qui  l'ont  précédée,  que 
de  Roux  est  inculpé  de  banqueroute  frauduleuse  et  de  faux; 

Attendu  que  les  art.  113  et  114C.inst.  crim.  interdisent 
la  mise  en  liberté  provisoire  sous  caution,  quand  le  titre 
de  la  prévention  emporte  une  peine  afBictive  et  infamante; 

Que  la  recevabilité  d'une  requête  tendant  à  cette  fin,  pré- 
sentée pendant  le  cours  d'une  procédure,  dépend  de  la  na- 
ture de  l'action  intentée  par  le  ministère  public  et  non  des 
charges  fournies  par  l'instruction  ; 

Que  les  principes  posés  par  lesdits  articles  ne  sont  pas 
modifiés  par  la  loi  du  4  avril  1855; 

Qu'on  ne  saurait  en  effet  confondre  la  main-levée  du 
mandat  de  dépôt,  mesure  subordonnée  à  la  nature  du  man- 
dat antérieurement  décerné  et  à  la  condition  de  conclusions 

»  En  conséquence,  elle  a  proposé  d'ajouter  ces  mots  :  quelle  que  soit 
la  nature  de  rtnculpaUon, 

»  Cette  rédaction  a  été  adoptée  par  le  Conseil  d'Etat,  et  il  ne  peut 
plus  exister  de  doute  sur  la  portée  delà  loi.  Le  juge  sera  le  maître  de 
lever  son  mandat  de  dépôt,  quelle  que  soit  la  nature  du  fait  poursuivi.  » 

L'arrêt  de  la  chambre  d'accusation  que  nous  recueillons  aujourd'hui 
établit  aussi  très-clairement  la  différence  qui  existe  entre  la  main-levée 
du  mandat  de  dépôt  et  la  liberté  provisoire  sous  caution. 

La  main -levée  du  mandat  de  dépôt  est  une  mesure  subordonnée  à  la 
nature  du  mandat  antérieurement  décerné. 

Elle  est  prise  à  la  condition  de  conclusions  conformes  du  procureur 
impérial  ;  elle  est  indépendante  du  titre  criminel  ou  correctionnel  de  la 
prévention  ;  elle  procure  une  mise  en  liberté  pure  et  simple. 

La  liberté  provisoire  sous  caution  peut  intervenir  malgré  l'opposition 
du  ministère  public  ;  —  en  tout  état  de  cause  ;  —  elle  implique  l'exis- 
tence d'une  caution  solvable  ;  —  elle  est  réservée  aux  préventions  correc- 
tionnelles. 


(283) 
conrormcs  du  procureur  impérial,  mais  indépendantes  du 
litre  criminel  ou  correctionnel  de  la  prévention  et  procu- 
rant une  mise  en  liberté  pure  et  simple,  avec  la  liberté 
provisoire  sous  caution,  pouvait  intervenir  malgré  l'oppo- 
sition du  ministère  public,  et  en  tout  état  de  cause,  mais 
impliquant  l'existence  d'une  caution  solvable  et  réservée 
aux  préventions  correctionnelles  ; 

Que  le  juge  d'instruction  d'Arras  a  donc  indûment  ac- 
cordé la  mise  en  liberté  provisoire  sous  caution  ; 

Déclare  bonne  et  valable  l'opposition  du  procureur 
général,  et  faisant  ce  que  le  premier  juge  aurait  dû  faire, 
déclare  non  recevable  la  demande  de  mise  en  liberté  pro- 
visoire de  de  Roux  de  Lusson,  etc. 

Du  41  juin  1860.  Chamb.  d'accus.  Présid.,  M.  Petit; 
minist.  publ.,  M.  Connelly,  subst.  du  proc.  gén.;  concl. 
conf. 


APPAREILS  A  VAPEUR.  —  fabricant.  —  contraven- 
tion. —  HOMICIDE  PAR  IMPRUDENCE.  —  BLESSURES.  — 
RESPONSABILITÉ. 

Bien  que  Vart.  W  de  la  loi  du  25  juillet  1856  ne  s'apptt- 
que  pas  aux  contraventions  relatives  à  la  vente  des 
appareils  à  vapeur,  tout  fabricant  qui  a  livré  une  pièce 
quelconque  destinée  à  contenir  de  la  vapeur,  sans  que 
cette  pièce  ait  été  soumise  aux  épreuves  prescrites  par  les 
règlements  d'administration  publique,  rC encourt  pas 
moins  la  responsabilité  prévue  par  les  art.  3i9  et  320 
C.  pén.,  si  la  confection  et  les  défectuosités  de  F  appareil, 
non  conformes  aux  prescriptions  des  mêmes  règlements, 
le  constituent  en  faute  (1). 

(i)  L'art.  2  de  la  loi  du  25  juillet  1856  est  ainsi  conçu  : 

ff  Art.  2.  Est  puni  d'une  amende  de  25  à  200  f.  tout  fabricant  qui  a  Hyré  un 
cylindre,  une  enveloppe  de  cylindre  ou  une  pièce  quelconque,  destinés 
à  contenir  de  la  vapeur,  sans  que  cette  pièce  ait  été  soumise  aux  épreuves 
prescrites  par  les  règlements.  » 

Cet  article  fait  partie  du  titre  1er  de  la  loL 

L'art.  20  s'exprime  ainsi  : 

€  Art.  20.  Si  les  contraventions  prévues  dans  les  titres  2  et  3  de  la 
présente  loi  ont  occasionné  des  blessures,  la  peine  sera  de  huit  jours  à 
six  mois  d'emprisonnement,  et  l'amende  de  50  à  1 ,000  fr.  Si  elles  ont 
occasionné  la  mort  d'une  ou  plusieurs  personnes,  l'emprisonnement  sera 
de  six  mois  à  cinq  ans,  et  l'amende  de  300  à  3,000  fr.  j» 


(284) 

(Jesuprety  Delaltre  et  Biachet.) 
JUGEMENT. 

«  Aliendu  que  HeHri-Josepb  Ddattre,  filateur  de  lin  à 
Liîle  ,  voulant  se  procurer  un  appareil  pour  chauffer  sa 
earderie,  se  rendit  à  cet  effet  chez  son  febricanl  d'appa- 
reils à  vapeur,  Louis  Jesuprét,  qui  lui  livra,  le  H  décem- 
bre 1850,  une  bâche  destinée  à  le  chaïuffer  ;  que  la  bâche 
fut  préparée  dans  les  ateliers  de  Jesupret  et  établie  par 
ses  ouvriers  dans  la  earderie  dé  Delattre  ;  que  la  vapeur  y 
était  conduite  par  trn  tuyau  fixé  au  générateur  et  s'en  échap- 
pant pal*  un  autre  tuyau  sortant  de  la  earderie  à  Fair  exté- 
rieur ;  que  chacun  des  tuyaux  était  àiuni,  à  sa  jonction  avec 
la  bâche,  d'un  robinet  ouvrant  et  fermant  à  l'aide  d'une 
clef  mobile;  que  la  clef  reétait  constamment  sur  les  robi- 
nets à  la  portée  du  premier  venu  qui  voulait  les  manœu- 
vrer ;  que  la  tension  de  la  vapeur  dans  la  bâche  pouvait 
s'élever  jusqu'à  quatre  atmosphères;  que  cependant  celte 
bâche,  épaisse  de  trots  millimétrés  à  trois  et  demi  au  plus, 
ne  pouvait  supporter  avec  sécurité  qu'une  teasdoja  d'un  at- 
moi^hére  et  quart  au  maximum;  que  le  28  janvier  4860, 
deux  ouvrières  de  la  earderie  s' étant  approchées  de  la  bâ- 
che, celle-d  éctetâ  tout-à-coup  ;  que  l'explosion  tua  à  Fins- 
taàt  l'une  deé  ouvrières,  bleâsa  grièvement  l'anlfe  qui 
moùrtit  six  jo'ûjte  après  ;  puis  atteignit  de  blessures  graves 
une  troisième  obvrîére  dont  le  métier  touchait  â  la  bâche; 
que^  parmi  les  débris,  le  robinet  d'échappement  de  la  va- 
peur a  été  trouvé  fermé,  ce  qui  explique  l'accident  ; 

]>  Attendu  que  Jesupret,  sachant  que  k  bâche  par  lui 

livrée  contiendrait  de  te  vapeur,  devait,  d'après  la  loi,  la 

soumettre  aux  épreuves  prescrites  par  les  règlements  d'ad- 

niitîistrâtion  publique,  ce  qu'il  n'a  pas  fiait  ;  qu'il  a  donc 

commis  la  cohlraventîôii  prévue  paf  l'art.  2  de  la  loi  du 

25  juillet  1856; 
»  Attendu  que  si  cette  infraction  à  la  polit)©  des  appa- 

Ces  dispositions  ne  pouvant  i>''ïi^pTfî^ttër  à  Tért.  2,  le  Gode  pénal  p<m- 
i^ail  seul  fcfùitiiîf  la  pénalité  en  ce  qiiî  imibliail  l%omiciée  par  iropni- 
doncc,  alors  que  cétjle  imprtittencc  «ait  jugée  exister  de  U  part  4iu  fa- 
bricant de  rapparcil. 


(285) 

reils  à  vapeur  n'est  pas  de  celles  que  Tart.  20  atteint,  pour 
avoir  occasionné  la  mortH)u  les  blessures  d'autrui,  les  au- 
tres faits  d'imprudence  reprochables  en  la  matière  n'en 
restent  pas  moins  sous  le  coup  des  art.  3i9  et 320  C.  pén., 
et  qu'à  cet  égard  Jesupret  fi' est  mis  gravement. en  faute; 
qu'en  effet  il  a  employé,  pour  récipient  à  vapeur,  une  bâcbe 
évidemment  trop  faible  pour  la  contenir,  puisqu'elle  pou- 
vait à  peine  supporter  une  tension  d'un  atmosphère  et 
quart,  tandis  que  cette  tension  devait  ordinairement  s'éle- 
ver jusqu'à  quatre  atmosphères  ;  qu'au  Ueu  d'amoindrir  le 
danger  en  laissant  la  vapeur  s'échapper  librement  ,par  un 
tuyau  large  de  six  à  huit  oenUmètres  et  ss^ns  robinet, , con- 
formément aux  règlements,  il  l'a  encore  aggravé  en  ne 
laissant  à  la  décharge  qu'un  tuyau  étroit  de  lO.millinjètres, 
et  en  y  plaçant  un  robinet  dont  la  fermeture  partielle  le 
rétrécissait  davantage,  dont  la  fermeture  complète  faisait 
éclater  l'appareil  ;  qu'ainsi  Jesupret ,  par  les  vices  de  sa 
bâche,  a  causé  pour  une  notable  parties  morts  et  blessures 
sus-mentionnées; 

»  Attendu  que  Delattre  a  &it  usage  de  ladite  bâche  sans 
être  muni  de  l'autorisation  exigée,  contravention  punie  par 
l'art.  A  de  la  loi  précitée;  que  de  plus  il  a  eii  l'impru- 
dence : 

io  De  mettre  en  communication  la  vapeur  ^  son  géné- 
rateur avec  un  récipient  insuffisant  à,  en  supporter  \a^  pres- 
sion ;  2°  d'y  placer  un  robinet  qui  pouv^^t  en  empêcher  la 
sortie  et  qui  l'a  effectiyeipent  ejupêchée  ;  3<>.de  tolérer  la 
demeure  pçrn^anente  sur  le  robinet  d'une  clef  ,fnobHe 
qui: en  mettaîit  larf^rmature  à  la  disposition  de  chacun;  que 
ces  contraventiqnset  imprudjçnçes  ont  étéeause  des  sus- 
dites morts  et  blessures; 

>  Attendu  qu'Auguste  Brachet,  chargé  de  conduire  la 
bâche  et  de  surveiller  les  ouvriers:  de  la  car4erie,  a  négligé 
^o  d'ôter  la  clef  servant  à  manœuvrer  les  robinets  ;  29  d'em- 
pêcher les  ouvriers  d'y  toucher  et  de  les  fermçr;  3°  de 
prendre  .garde  à  une  fuite.de  vapeur  signalée  peu  avant 
l'explosion  par  Florine  Delefosse  ;  que  ces  négligences  ont 
été  aussi  la.  eause  desdltes  morts  et  blessures; 


(286) 

%  Altencîu  qu'en  cas  de  conviction  de  plusieurs  délits,  k 
t)eine  la  plus  forte  doit  seule  être  prononcée  ; 

»  Vu  les  art.  2,  4,  20  et  23  de  la  loi  du  25  juillet  1856, 
319,  320,  463  C.  pén.,  365  et  194  G.  inst.  crim.  ; 

i>  Le  Tribunal  déclare  Louis-Modeste  Jesupret  coupable 
1o  d'avoir,  étaiit  fabricant  d'appareils  à  vapeur,  livi-é  le  11 
décembre  1859,  à  Lille,  une  bâche  destinée  à  contenir  delà 
vapeur,  sans  qu'elle  eût  été  solitniseau^  épreuves  prescrites 
par  les  règlements  d'administration  publique  ;  2»  d'avoir 
involontairement,  mais  par  imprudence  et  inobservation 
des  règlements,  causé,  le  28  janvier  1860,  à  Lille,  la  mort 
de  Rosalie  Vanhaesbrouck  et  de  Marie  Vanwynmersch,  et 
les  blessures  de  Florîne  Delefosse  ; 
»  Le  tout  avec  circonstances  atténuantes  ; 
>  En  conséquence,  le  condamne  à  l'emprisonnemenlpen- 
dant  quinze  jours  et  par  corps,  et  à  l'amende  de  100  fr.; 

»  Déclare  Henri-J.-B.  Delattre  coupable  1^  d'avoir,  en 
décembre  1859  et  janvier  1860,  à  Lille,  fait  usage  d'une 
bâche  à  vapeur  sans  être  muni  de  l'autorisation  exigée  par 
les  règlements  d^administratiori  publique  ;  2»  d'avoir  vo- 
lontairement,  par  négligence  et  inobservation  des  règle- 
ments aussi,  le  28  janvier  1860,  à  Lille,  causé  la  mort  de 
Rosalie  Vanhaesbrouck  et  de  Marie  Vanwynmersch,  et  les 
blessures  de  Florine  Delefosse  ; 

»  Le  tout  avec  circonstances  atténuantes  ; 
j&  En  conséquence  )  le  condamne  à  l'emprisonnement 
pendant  vîngtjoursetpar  corps,  et  aune  amende  de300fr.; 
j>  Déclare  Auguste  Brachet  coupable  d'avoir  involontaire- 
ment, mais  par  imprudence,  négligence  et  inobservation, 
causé,  le  28  janvier  1860,  à  Lille,  la  mort  de  Rosalie  Van- 
haesbrouck et  de  Marie  Vanwynmersch  ,  et  les  blessures 
de  Florine  Delefosse  ; 

>  Le  tout  avec  circonstances  atténuantes  ; 

3>  En  conséquence ,  le  condamne   à  l'emprisonnement 
pendant  dix  jours  ; 

>  Condamne  Jesupret,  Delattre  et  Brâchet  aux  frais  du 
procès.  » 

Appel  devant  la  Cour.  Pour  Jesupret,  on  disait  que  sans 


(287) 

doute  il  était  passible  d'amende  pour  contravention  à  la  lot 
du  25  juillet  1856,  mais  que  l'art.  20  de  cette  loi  ne  le 
rendait  pas  responsable  d'un  accident  survenu  un  mois 
après  la  livraison  de  son  appareil  et  sans  sa  participation 
aucune* 
La  Cour  a  confirmé  le  jugement. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Condamne,  etc. 

Du  23  mai  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Durtion; 
minist.  publ.,  M.  Carpentier;  avoc,  M«8  Emile  Flamant  et 
Dupont. 

DÉNONCIATION  CALOMNIEUSE.  —  partie  civile.  — 

PREUVE. 

La  preuve  de  la  dénonciation  calomnieuse  peut ,  par  la 
partie  civile  comme  par  le  ministère  public,  se  faire  tant 
par  les  procès-verbaux  et  rapports,  qu'au  moyen  de  la 
preuve  testimoniale.  Il  n'importe  que  Von  ne  puisse  rap- 
porter la  dénonciation  écrite.  (C.  pén.^  art.  273;  C.  inst. 
crim.,  art.  354  et  189.) 

(Gavel  C.  Mouret.) 

Nous  avons  rapporté  plus  haut  {vid,  suprày  p.  134)  un 
arrêt  de  la  Cour  de  Douai  qui  le  jugeait  ainsi.  Sur  pourvoi 
de  la  partie  condamnée,  la  Cour  de  cassation  s'est  pronon- 
cée sur  cette  question  par  l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Sur  le  premier  moyen  tiré  de  la  violation 
de  l'art.  373  C.  pén.  ; 

Attendu  que ,  sur  l'exception  proposée  par  le  prévenu 
(demandeur  en  cassation)  et  tirée  de  ce  que  Mouret,  partie 
civile  poursuivante ,  ne  rapportait  pas  l'acte  de  dénoncia- 
tion écrite,  imputé  à  délit  audit  prévenu,  l'arrêt  attaqué  a 
admis  Mouret  à  prouver,  tant  par  titres  que  par  témoins, 
notamment  qu'en  1858,  Gavel  l'avait  spontanément  dénoncé 
par  écrit  au  procureur   impérial  de  Boulogne-sur-Mer , 

Attendu  1  «>  qu'aucune  loi  ne  subordonne  la  poursuite  du 
délit  de  dénonciation  calomnieuse  à  la  représentation  de 


Tacte  a  Taide  duquel  il  a  été  commis;  qu'à  cet  égard, 
cpn^roe  par  tous  les  autres  éléments  de  criminalilé  et  de 
culpabilité,  ^^Qtion  soit  du  ministère  public,  soit  delà 
partie  civile,  n'est  soumise  qu'aux  règles  du  droit  commun 
relatives  à  l'instruction  et  à  la  preuve  en  matière  de  délits; 

D'où  il  suit  qu'en  réglant  l'exception  proposée  et  en  or- 
donnant la  preuve  offerte,  l'arrêt  attaqué  n'a  fait  qu'une 
juste  application  des  art.  154,  489  G.  inst.  çrim.  ; 

Attendu  2o  que  la  preuve  ordonnée  rentre  dans  les  termes 
de  l'art.  373  G.  pén.,  et  qu'elle  s'applique  même  expres- 
ment  à  une  dénonciation  qui  aurait  été  faite  par  écrit; 

Qu'auo^ne  contestotion  n'avait  ^i^  éleyée  par  le  deman- 
deur sur  la  forme  de  la  dénonciation  qui  lui  était  imputée, 
et  que,  dès-lors,  la  Gour  impériale  n'a  pas  eu  à  spécifier 
préalablement  les  conditions  auxquelles  pourraient  être 
reconnus  les  caractères  de  la  dénonciation  par  écrit; 

D'où  il  suit  que  l'arrêt  attaqué  s'est  conformé  à  l'art.  373 
C.  pén.,  et  n'a  causé  aucun  grief  au  demandeur. 

Sur  le  2^«  moyen  tii:é  de  la  fausse  application  du  même 
art.  373  :Ç.  pén,  : 

Attendu  que  le  demandeur  ayant  ^conclu,  par  forme  de 
fin  de  non-recevoir,  contre  l'açtipu  de.la  partie  civile.  Far- 
rêtattaqué,  en  y  statuant  incidemment,  n'a  rien  préjugé 
.curies  moyens. du Ipnd,  et-amêpie  ,expves§émept réservé 
.Içs  moyens  relatifs  à  }a  preuve  des  faits  prétendument  dé- 
noncés et  au  service  qu'il  pourrait  y  avoir  lieu  d'ordonner, 
le  cas  échéant; 

iD'pù.il  suit  que  l'arrêt  attçiqué,  en  ne  statuant. pas  quant 
à  présent  sur  les  questions  de  preuve  et  .de  sursis,  .s'est 
.conformé  aux  .règles  de  procédure  et  n'a  méconnu  .ni  les 
règles  de  la  compétence,  ni  faussement  appliqué  l'art.  373 
G.  pén. ; 

Attendu  d'ailleurs  que  l'arrêt  attaqué  est  régulier  en  la 
^orme,  rejette,  etc. 

Pu4  mai  1860,  G.  cass.,  chamb.  crim.  Présîd. ,  M.  Vaïsse ; 
conseill.;  rapp.,  M.  Serieca;  miriîst.  pùbl.,  M.  Martinet, 
avoc.-gén.;  avoc,  M^  Labordère. 


(289) 
lANCE  MUTUELLE.  —  association  de  bateliers.  — 

ICTÈRE.  —  SOCIÉTÉ  CIVILE.  —  SOCIÉTÉ  COMMERCIALE. 
ÉTÉ  ANONYME.  —  PLAIDER  PAR  PROCUREUR. 

mcialion  entre  batèlkrs  ayant  pour  but  Fassurance 
telle  contre  les  risques  de  la  navigation  swr  Us 
Tes  et  ca^iaux,  n'a  le  earacière  d'une  Sodélé  ni  civile 

mmerciale  (;\) . 

ite,  elle  m  peut  être  une  Société  anonyme  soumise 
utorisation  préalable  du  Gouvernement.  (C.  ôom. , 

37.)  (2). 

L.es  Sociétés  d'assurances  mutuelles,  quelque  ferme  qu'elles 
,  ont-elles  le  caractère  d'une  Société  civile  ou  commerciale  ?  . 
it-elles  être  assimilées  à  des  Sociétés  anonymes  ? 
miére  de  ces  deux  questions,  soulevée,  en  1850,  en  vue  des 
d'assurances  mutuelles  de  navires,  a  été  résolue  négativement 
>ur  de  Douai  dans  les  motifs  d'un  arrêt  du  29  juillet  1850. 
1,328.) 

du,  dit  cet  arrêt,  que  le  caractère  des  contrats  dépend  de  là 
s  choses  et  de  la  loi.  non  des  formes  que  leur  impriment  et  de 
;ation  oue  leur  attribuent  les  parties  ; 
'art.  1832  C.  çiv.,  applicable  aux  Sociétés  de  toute  espèce, 
le  :  la  Société  est  un  contrat  par  lequel  plusieuts  personnes 
\t  dé  mettre  en  commun  quelque  chose  dans  la  vue  de  partager 
qui  pourra  en  résulter  ;  que  cette  dernière  condition  est  es- 
3t  que,  s^ns  une  réunion  d'Intérêts  formés  daiis  un  but  de  spé- 
1  ne  saurait  exister  de  véritable  Société  -,  que  les  Compagnies 
es  mutuelles  sont  étrangères  à  toute  idée  dé  lucre  ;  qu'au*- 
ualité  de  bénélices  ne  leur  est  ouverte  ;  qu'elles  n'ont  pour  but 
lir  une  communauté  de  i:isques  entre  des  individus  qui  sont 
aent  assureurs  et  assurés,  et  d'alléger,  daiis  la  proportion 
statuts,  la  gravité  des  pertes  accidentelles  que  chacun  d'eux 
ver  dans  les  objets  assurés  ;  qu'elles  ne  sont  donc  pas  y  à 

t  parler,  des  Sociétés » 

!  principe  a  été  posé  et  les  mêmes  déductions  juridiques  ont 
;   pour  les  assurances  mutuelles  contre  les  ravages  de  ta 
mment  dans  un  arrêt  de  la  même  Cour  du  15  novemb.  1851 
5).  —  V.  d'ailleurs  un    autre   arrêt  du  4  dçcemh..  1820 
)i).  On  lit  dans  la  décision  du  15  nov.  1851  \ 
nature  même,  la  convention  d'assurance  mutuelle  contre  le^ 
la  grêle  est  exclusive  de  toute  idée  de  spéculation  et   de 
manque,  par  conséquent,  du  caractère  le    plus  essentiel 
s  soit  commerciales,  soit  même  civiles.  % 
3   question  s'est  encore  présentée  devant  la  même  Cour  à 
assurances  mutuelles  contre  les  faillites  (aff.  Pasturin,  29 
Jurisp.  13,  145). 

car,  cette  fois,  envisageant  exclusivement  les  choses  à  leur 
final,  qui  consistait  ft  savoir  si  la  Société  en  question  avait 
imise  à  l'autorisation  préalable  dti  6puvernement ,  comme 
re  les  lontines,  en  vertu  de  l'avis  du  Conseil  d'Etat  du  i^ 

:  viii .  \  9 


(290) 

Vue  telle  associationy  d'ailleurs  licite  et  régie  par  le  prin- 
cipe du  droit  commun,  peut  être  représentée  eu  justice 

avril  1809  et  du  décret  du  18  novembre  ISIO,  et  st  elle  n-était  pas  nulle 
en  ce  regard,  décida  que  les  tontines  et  établissements  de  même  na- 
ture avant  pour  base  les  chances  aléatoires  de  la  vie  humaine,  et  ayant 
pour  j&ut  de  faire  profiter  les  survivants,  soit  en  totalité,  soit  jusqu'à 
certaine  concurrence,  ce  caractère  manquait  à  rétablissement  dit  : 
Compagnie  générale  d'assurances  mutuelles  et  à  primes  fixes  contre  les 
faillites;  que,  par  suite,  elle  ne  pouvait  être  assujettie  a  rautorisalion 
préalable.  Elle  jugea  d'ailleurs  que  les  avis  du  Conseil  d'Ëtat  (même 
celui  du  15  août  1809)  et  le  décret  précités  n'avaient  pas  force  de  loi, 
parce  qu'Us  n'avaient  pas  été  publiés  au  Bulletin  des  Lois  pendant  la 
durée  de  l'Empire. 

La  Cour  de  cassation,  à  laquelle  fut  soumise  ce  même  arrêt,  se  plaça 
sur  un  autre  terrain,  sur  celui  de  l'art.  37  C.  com.,  en  vertu  duquel  tonte 
Société  anonyme  doit  être  autorisée;  la  Cour  suprême  a  considéré  que 
la  Société  d'assurauçes  contre  les  faillites  présentait  les  caractères  de  la 
Société  anonyme,  sans  qu'il  fallût  faire  aucune  distinction  ni  entre  les 
Sociétés  commerciales  et  civiles,  ni  entre  les  Sociétés  anonymes  y  oui  ont 
pour  objet  la  poursuite  d'un  lucre  ou  le  partage  de  bénéfices,  et  celtes  qui, 
comme  les  assurances  mutuelles,  n'ont  pour  ofyet  que  la  répartition  des 
pertes  ou  leur  atténuation,  puisque,  a-t-elle  ajoute,  dans  un  cas  comme 
dans  Vautre,  et  avec  non  moins  d'utilité,  l'autorisation  préalable^  tend  à 
prévenir  le  public  contre  les  combinaisons  imprévoyantes  et  artificieuses 
de  statuts  non  approuvés,  et  elle  a  prononcé  la  cassation  de  l'arrêt  de 
Douai.  —  V.  Cass.  13  mai  1857,  Jurisp.  15,  424;  id.  S,  V.,  avec  aut. 
indiq.  1858,  1,  129. 

La  Cour  de  Paris,  devant  laquelle  fut  ordonné  le  renvoi,  se  rangea  au 
raêmç  dvis.  Paris  1er  fév.  1858  (S.  V.  1858,  2,  i29,  où  l'on  trouve  à 
consulter  utilement  le  réquisitoire  de  M.  Tavocat-général  Moreau).  — 
V.  encore  Metz  10  août  1858  (J.  Pal.  1858,  p.  1079) et  Càss.rej.  Onov. 
1858  (S.  V.59, 1,  ISetnol.) 

Ces  deux  questions  se  rencontrent  de  nouveau  dans  l'aftaire  que  nous 
rapportons  aujourd'hui.  La  Cour  de  Douai  juge  d'abord  que  les  associa- 
tions de  bateliers  n'ont,  à  aucun  .titre,  le  caractère  d'une  Société  soit 
civiIe,'SOÎt  commierciale;  que  ces  mêmes  associations  sont  exclusives 
de  toute  préoccupation  de  lucre  ou  de  spéculation,  qu'elles  n'ont  point 
le  caractère  commercial,  —  ce  qui  importé  peu  à  la  jurisprudence  de 
la  Cour  de  cassation  (13  mai  1857, /oc.  cit.), 

"Ellé'i'oge  aussi  qu'on  ne  peut  les  çonfondre.avec  les  Sociétés  anony- 
mes, parce  qu'elles  n'ont  ni  capital  social,  ni  actions  trahsmissibles 
(C.  com.,  art.  34),  parce  que.  les  associés  sont  responsajbles  person- 
nellement. . 

Elle  ajoute  qu'il  n'existe,  à  l'égard  de  ces  associations  d'une  hature 
snéciàlé,  auctm  des  motifs  dlntérêt  général  qui,  pour  sauvegarder  les 
droits  des  tiers  et  le  crédit  public ,  ont  fait  soumettris  au  contrôle  du 
Gouvfirnemiînt  la  constitution  des  Sociétés  anonymes, 
*  Cette  dernière  raison  de  décider  diffère  de  celle  de  la  Cour  de  cassa- 
tion, qui  s'appuye  sur  la  possibilité  de  combinaisons  imprévoyantes  et 
artificieuses  ae  statuts  non  approuvés,  pour  ramener  les  associations  de 
diverses  natures  à  l'application,  par  elle  jugée  légale,  des  avis  du  Con- 
seil d'Etat  de  1809  et.du  .décret  de  1810.  (V.  si^r  ce  point  k  réquisi- 
lôirt  dé  M.  l'avoc.-gén.  Mureau,  arrêt  de  Paris  du  ler  fév.  1838,  toc. 


(291) 

r  des  mandataires^,  malgré  la  maxime  :  Nul  en  France 
plaide  par  procureur  (i).  •   <  / 

(Gilliot  C.  Cauvain  et  autres.) 

puis  un  temps  immémorial,  les  bateliers  oaviguantiSur 
ut  et  autres  rivières  et  caniaux  du  Nordy  oat  foraié 
eux  des  associations  mutuelles  contre  les  risques  de 
igation.  Les  statuts  de  ces  Sociétés,  particulièrement 
les  Sociétés  (ïOstrevent  et  de  Saint-Julleny  établies  à 
ain  et  à  Condé,  sont  rédigés  devant  notaires  et  con- 
nt,  comme  celle  de   SainhJulien^  les  clauses  sui- 

sociation  est  formée  pour  un  temps  indéterminé;  — 
rend  responsable  et  garante  des  pertes  et  dommages 
corps  des  bateaux  peut  éprouver  dans  certains  cas 
,  pendant  le  cours  de  leurs  voyages  et  pendaiit  le 
de  huit  jours  qui  suivent  le  moment  de  leur  arrivée 
3UX  de  destination.  —  Cette  resrponsabilitè  et  celte 
e  s'étendent  aux  avaries  et  à  la  perte  des  marchas- 
Dnt  sont  chargés  les  bateaux  des  associés,  en  cas  de 
je,  jusqu'à  la  valeur  de  3,500  fr.  seulement.  — ^  La 
e  mutuelle  n'a  lieu  que  pour  les  matières  brutes  et 
3rte  pesanteur,  suivant  certaines  conditions  de  char- 
.  —  Les  fondateurs^  au  nombre  de  quatre,  se  sont 
de  pourvoir,  par  règlement  particulier,  auxidiverses 
ions  d'administration  et  cl  e  police.  ><— Les  primes 
mce  sont  fixes,  mais  peuvent  être  augmentées  ou 
îes  en  tout  temps  par  les  quatre  fondateurs,  suivatnt 
ins  de  la  Société,  -r*  Toute  c^élibération  à  cette  fin 
î  par  deux  fondateurs  au  moips,.  parmi  lesquels  le 

aussi  le  jugement  du  Tribunalde  Lille,  dans.  Taffaire  Pasturin 
)  mai.ï855,làc.  çtf.),  Cvixè  différence  est  capitale  et  peut  faire 
{ue  4a  Cour  de  cassation  pourrait  '  bien  considérer  les  assu- 
tuelles  entre  batelieraf  comme  sujettes  à  Tautorisation  préa- 

Société  commerciale  plaide  par  son  ^^.rant,  une  Société  anp- 
SCS  administrateurs ,  une  Société  civile  par  chacun  dé  s^s 
idividu«lle3iient  et  non  par  mandataire.  (T:  6iibert;!C.  proc, 
1,  no  59- r-f  CoBSuIt,  Jwwp.  16^.325  à  la-  ^6te.);Une.assp- 
ticulière,  cobime  cçlle  des  assurances  mutuelles  de  bateliers, 
laider  par.  un  procurateur?  Si  cette  association  est  régie  par 
38' du  ivcfit  commun,  il  paraît  difficile  de  la  soustraire  à  ran- 
ime dà  droit  :  Nul  enl  France  ne  plaide  par  procurewr,  par 
i  dération  qne  les  bateliers  sont  habituellement  éloignés  de 
lie.  —  Rapprochez  cependant  de  cette  décision  celle  de  la 
unes.  à6niaii849'(Jouni.  Palv.'t.  î,  1859,  p.  239). 


(292) 

iNWîeyeur.  -^  Une  asserablée  générale  a  lieu  chaque  année 
au  40  août;  on  y  vote  la  prime  annuelle.  —  Chaque  asso- 
cié peut  se  retirer  de  la  Société  quand  il  le  veut,  au  moyen 
d'une  renonciation  authentique;  en  se  retirant,  il  doit  la 
contribution  aux  dettes^  sans  pouvoir  rien  réclamer  dans 
l'actif  d.e  la  Société.  —  Il  encourt  la  déchéance  dans  des  cas 
.fléterminé&.  • — Il  o'-est  d'ailleurs-admis  que  du  consente- 
ment du  receveur.  —  Le  receveur  a  tous  pouvoirs  néces- 
saires 4  pour  régir,  gérer  et  administrer  la  Société  en  nom 
»  collectif,  loucher,  recevoir  et  payer  toutes  sommes, 
»  en  donner  ou  retirer  toutes  quixtances,  emprunter  au  nom 

>  de  la  Société  toutes  et  quantes  fois  les  besoins  l'exigeront 

>  et  en  due  concurrence,  s'obliger  au  remboursement  et 
1  au  payement  des  intérêts,  poursuivre  par  toutes  les  voies 
»  de  droit  des  sociétaires  bu  de  tous  autres  débiteurs  de  la 
Société  (art.  29).  » 

Le  contrat  dé  Société  est  publié  et  affiché  au  Tribunal  de 
commerce.  —  Par  des  articles  additionnels  résultant  de 
diverses  délibérations,  des  dispositions  diverses  ont  encore 
été  prises  sur  la  marche  des  bateaux,  le  payement  des 
primes  et  l'étendue  de  la  garantie.  On  y  lit  aussi  que  ï  tout 
»  sociétaire  qui,  soit  pdr  l'âgQ,  soit  par  son  inconduite,  soit 
»  ienfin  par  son  incapacité,  sera  jugé  ne  pas  pouvoir  con- 

>  duire  son  bateau,  pourra  être  exdu  de  la  Société  par 
»  une  délibération  prise pardeuxdesfondateursseulement.j 
—  Un  tableau  nominatif  des  sociétaires  est  publié  à  la 
suite  des  statuts  avec  l'indication  du  bateau  qu'ils  con- 
duisent. 

Le  i^  décembre  4859,  le  bateau  la  Grâce-de-Dieu,  pa- 
tron Louis  Cauvàin,  associé  de  la  nouvelle  Société  dé  Saint- 
Julien,  descendait  l'Escaut  à  la  hauteur  de  Denain  avec  un 
chargement  de  paille  à  destination  dfi  Yalencïeflnes.  Passant 
^tre  une  barque  dite  ponton  et  le  bateau  l'/natfemùi,  pa- 
tron Dufresnes,  membre  de  la  Société  (ï  Ostrevmi,  il  heurta 
ce  bateau  de  manière  &  lui  causer  des  avaries  considéra- 
bles, même  à  le  couler  bas. 

Dufresnes  fit  d'abord  sommation  à  Cauvaîn  de  réparer  le 

{préjudice  qti'il  avait  causé,  et  comme  il  ne  s'exécutait  pas, 
es  sieurs  Laval,  Coiplet  etCarlier,  le  premier  comme  syn- 
dic, le;  second  comme  associé  et  le  troisième  comme  rece- 
veur, tous  trois  représentant  la  Société  d'Ostrevent  et  agis- 
jsant  pour  Cjiuyain,  demandèrent  par  voie  de  requête^  au 
président  4U:Trîbynal  de  commerce  de  Valenciennes,  et 


(293) 

obtinrent  rautorisatioiî  de  saisir  œnservatQii'enjent  le  ba- 

ieaula6râce'd&-Dteu.         »     - 
Ils  dssi§faèrent  ensnite  Oauvaéneila  Société  deSaint-Ju^ 

lien  en  payement  du  préjudice  causé. 
De  lear  côtéj  ceux-ci  j^ppelèrent  en  garantie  un  sieur 

Gilliot,  propriétaire  du .  pontan,  prés  êuquel  Ib  Gréee-de^ 
Dieu  avait  dû  passer  en  même  temps  que  près  de  rinat- 
tendu,  surkmdtîf  que. dés  mouvements  di^  ponton  avaient 
poussé /a  firacft-de-2Wew$uri'Jna/(e7wîtfci  etavaieni  été  ainsi 
cause  de  llavaria  faite  au  bateauid^  Dufresnes. 

Devant  le  Tribunal  civit  de  Yal^nciennes,  où  la.cavse  fut 
)ortée,  Gilliot  éleva  ujae  fin  de  non-re^^evoir  ^n- refusant, 
lux  Sodélés  de  SaiûÉrJiçUQn  et  d'Ostrev!ea.t,  qualité  pom^ 
gir,  ildifiaiit  :  ,  ;  , 

«  Nul  en  Fraaoe  ne  plaide  fiav  procwmVi  ^aiuf  le  corps 
jcial,  le  souverain  ou  les  eorps^  moraux  légalement  cons- 
tués.  Dés-loi'S,:poiiir  agit  en  justice  comme  syndic,  repré- 
ntant  ou  receveur  d'une  Société  et  à  cB;  titre^j  il  faut  éta^ 
ir  rexisteuce  légale  de  cette  Société  prétendue  et .  son 
oit  à  se  faire  représenter  comme  entité  juridiq^e^  de- 
inderesseou  défenderesse,  sans  faire  intervenir  la  perr 
inalifcé  d«  ses  membres.  Or,  soit  qu'on  regarde  les  asso- 
tions  mutuelles  d'assurances  bat^ières  de  la  na^ture  des 
étendues  Sociétés  d'Osirevent  et  de  Saint-Julien  comm^ 
nt  un  caractère  coitMixerçial,  qu'on  les  considère  comme 
ni  un  caractère  civile  il  faut  également  décider  qu'elles 
leuvent  exister  juridiquement  et.  partant  ester  en  jus- 
,  faute  d'autorisation  du  Gouvernement.  Eu  effet,  consi- 
îes  au  pqint  de  vue  commercial  que  semble  devoirfaire 
lominer  la  qualité  de  leurs. membres  tous  commerçants 
ui  seraient  liés,  soit  pour  se  couvrir  entre  eux,  soit 
'  couvrir  des  tiers  de  risques  coipmercîaux ,  ces  Soeié- 
le  sont  point  des  Sociétés  en  nom  collectif,  puisque 
mode  d'organisation  exclut  et  la  solidarité  active,  et 
lidarité  p^sive,  annoncées  au  public  gar  la  raison 
le  ;  elles  ne  sont  pas  davantage  des  Sociétés  en  com- 
'jte,  puisque  leur  mod,e  de  constitution  exclut  la  gê- 

d'une  ou  de  plusieurs  personnes,  tenues  indéfiniment 
^ttes  sociales  et  la  fixation*  d'un  capital  annoncé  au 
î  comoie  ayant  été  fait  par  les  autres  cointéressés,  et 
jîe  composée,  pour  désigner  la  Société  aux  tiers,  du 
les  raerqbres  collectifs  et  de  la  formule  abstraite  :  et 
xgrnie,  couvrant  les  simples  intéressés  pécuniaires. 
le  peuvent  être  davantage  regardées  comme  des  par- 


(294) 

licipations;  loin  d'avoir  pour  objet  un  compte  occulle,  exis- 
tant à  propos  d'une  ou  plusieurs  opérations  entre  com- 
raerçants  intéressés,  à  Tinsu  du  public  à  un  agissement  os- 
tensiblement opéré  par  un  seulj  elles  se  présentent,  à  lous 
comme  constituant  des  étres^juridiques  abstraits,  ayant 
une  vie  propre  et  des  intérêts  collectifs  distincts  de  ceux 
de  leurs  différents  membres. 

>  D*àjî^rès'  cette  organisation  caractéristique^  ces  deux 
sociétés  rentrent  dans  la  catégorie  des  Sociétés  anonymes 
ayant  pour  désignation,  non  point  des  noms  individuels 
d'intéressés  ou  une  raison  sociale,  mais  un^  appellation 
purement  abstraite  et  ayant  pour  administrateurs  non  des 
gérants  personnellement  et  mdéfiniment  tenus  des  dettes 
sociales,  mais  des  préposés  uniquement  tenus  de  rendre 
compte  dé  leur  mandat  ,et  non  engagés  par  suite  des  obli- 
gations sociales.  Maiè,  dans  quelqu' esprit  qu'elles  fussent 
{)assées,  religieux  ou  politique,  civil  ou  commercial,  toutes 
es  conventions  ayant  pour  but  de  créer  des  corps  ray^ti- 
tiques,  indépendants  de  la  personne  de  leurs  membres, 
subsistant  sans  raison  sociale  et  gouvernés  par  des  fonc- 
tionnaires sans  responsabilité  personnelle,  ont  été,  depuis 
4789,  considérés  comme  incompatibles  avec  l'ordre  public, 
si  elles  n'avaient  obtenu  la  consécration  du  pouvoir  souve- 
rain, qui  a  été  de  nouveau,  pour  les  Sociétés  anonymes, 
expressément  exigée  par  Fart.  37  G;  corn. 

»  On  essayerait  en  vain,  pour  soutenir  Texistence  légale 
des  deux  Sociétés  et  la  possibilité  pour  leurs  préposés  de 
les  réprésenter  en  justice,  de  les  considérer  comme  n'ayant 
point  pour  objet  une  spéculation,  mais  une  simple  réparti- 
tion de  risques,  et  partant  comme  ayant  un  caractère  civil 
qui,  d'une  part,  les  soustrairait  aux  principes  d'ordre  pu- 
blic, et,  d'autre  part,  leur  permettrait  d'agir  par  syndics, 
indépendamment  de  chacun  et  de  tous  les  membres  de 
l'association.  Outre  là  qualité  de  commerçant  des  raenabres 
dé  la  Société  et  la  nature  dés  risques  couverts,  mêine  au 
profit  des  tiers,  dans  un  but  évidemment  commercial,  qui 
donne  à  cette  association  un  caractère  de  commercialité 
indiscutable,  il  est  certain,  et,  d'une  part,  que  lés  Sociétés 
civiles  ne  peuvent  non  plus  que  d'autres,  sans  rautorisation 
du  Gouvernement,  exister  sous  la  forme  anonyme. 

»  En  effet,  les  motifs  d'ordre  public  sont  les  mêmes; 
l'art.  37  G.  com.  n'a  été  que  déclaratif  des  principes  de 
droit  public  qui  sont  sortis  de  la  révolution  de  4789;  il  est 


($95) 

général  dans  sa  formule  et  »6  distingue  eotire  aucune  6s* 
péce  d'association.  C'est  ainsi  qu'il  a  tqm'ours  été  entendu» 
sous  et  par  tous  les  pouvoirs  qui  se  sont  succédé,  niêrae 
les  plus  rétrogrades  ;  à  plus  forte  raison  il  doit  Têtre  sous 
une  Constitution  qui  s'est  pfecée  sous  l'invocation  des  prin- 
cipes de  1789;  dès-lors  les  deux  Sociétés  prétendues  et 
Jeui^  représentants  ne  peuvent  être  admis  à  ester  en  îus- 
lice,  et  il  y:a  lieu  de  dédarér  dés  à  présent  non  recevanles 
eurs  prétendus  mandalaires  et  de  les  :  condamner  person^ 
lelleraenlaux  dépens,  w        .     ■ 

Gilliot  concluait  au  fond  et  prétendait  que  la  barque  dit 
3  ponton,  qui  se  trouvait,  le  jour  de  l'abordage,  amarrée 
l'aide  d'une  chaîne  iSxée  à  un  pieu,  comme  elle  l'est  dé- 
nis longtemps,  en  face  de  ïa  demeure  de  Gilliot,  n'entra- 
lil  en  aucune  façon  la  navigaition,  et  qu'elle  laissait  à  des 
teliers^  ainsi  que  le  démontre  la  largeur  du  canal,  un 
oace  qui  permettait  de  faire  toutes  les  manœuvres  pos* 
des;  que,  partant,  le  choc  ne  pouvait  avoir  été  occasionné 
e  par  Tincurie  et  la  négligeace,  soit  de  l'un  des  ;  bâte- 
rs,  soit  de  tous  deux. 

Le  tribunal  rendit  le  jugement  suivant,  à  la  date  du 
janvier  4860  : 

JUGEMENT. 

Considérant  que  le  l^r  décembre  1859^  un  choc  a  eu 

sur  l'Escaut,  entre  le  bateau  l'Inattendu,  dirigé  par 
andre  Dufresnes,  et  le  bateau  la  Grâce-de-Dieu,  oon- 
par  Louis  Cauvain  ; 

Considérant  que  le  batelier  Dufresnes  étant  membre 
1  Société  d'assurances  contre  les  risques  de  la  navîga- 
dite  Société  d'Ostrevent,  les  sieurs  J.*B,  Laval,  Aga- 
non  Masy^  tous  deux  syndics,  et  Jules  Carlier,  receveur 
jite  Société,  $e  joignent  à  Dufresnes,  pour  demander 
is  Cauvain,  membre  de  la  Société  ayant  pour  titi*e  : 
^Jle  Société  de  Saint' Julien,  et  au  sieur  Joseph  Charles, 

qualité  de  receveur  à,e  ladite  Société,  la  réparation 
m  m  âge  éprouvé  par  le  bateau  V Inattendu  qniy  peu 
mis    après  avoir  élé  heurté,  coida  à  fond  avec  son 
'.ment  de  charbon;. 
»nsldérant  que  le3  sieurs  Gauvin  et  Charles,  défen- 

ont  appelé  en  cause  le  sieur  Gilliot,  constructeur  de 


(296) 
bateaax,  demeuraiil  à  L^ùrch@s>  comme  étant  en  partie  la 
cause  du  siïïistrè,  objet  (Ju  procès,  poui-  avoir  laissé  sta- 
tionner, à  Tendçoît  de  la  rencontre  des  deux  bateaux,  une 
barque  ditepontpn  qui,  par  uxie  fausse  manœuvre,  serait 
vçnue  frapper  le  bateau  la  Grâce^de^Bieu,  et  l'aurait  ren^ 
Yoyé  contre  rinaltendu; 

»  Goosidérant  que  le  sieur  Gilliot,  appelé  en  caui^,  op- 
pose at|x  demandeurs  principaux  Laval,  Masy  et  Carlier,  et 
à  Charles,  défendeur  (par  lequel  il  a  été  assigné),  une  ex- 
ception tirée  de  Ist  quàjité  qu'ils  ont  prise  sans  droit  selon 
lui  de  syndics,  receveurs  et  représentants  des  Sociétés 
d'Ostrevent  et  âe  Saînt-Juliça  ;  qu'il  conteste  l'existence 
légale  desdites  prétendues  Sociétés,  ^t  partant  le  droit, 
soit  pour  ces  associations  elles-mêmes  d'ester  en  juslice> 
soit  pour  leurs  mandataires  d'y  ester  de  leur  chef  ; 

»  Considérant  que  bien  que  Gilliot  n'ait  aùçuii  intérêt 
dans  la  fin  de  non-recevoîr  qu'il  propose,  toutes  les  parties 
et  lui-même  ayant  conclu  au  fond,  la  question  soulevée 
n'en  doit  pas  moins  être  examinée  et  décidée  par  le  Tribu- 
nal auquel  elle  est  soumise  ; 

»  Considérant  que,  pour  apprécier  la  nature  des  asso- 
ciations dont  oii  discute  l'existence  légale,  il  suffit  de  .lire 
les  statuts  qui  les  régièsent  ;  qu'il  résulte  à  l'évidence,  des 
termes  de  ces  statuts^  que  la  convention  d'assm  anoe  contre 
les  risques  de  la  navigation  est  exclusive  de  toute  idée  de 
spéculation  et  de.lucre,  et  que  toute  so»  efficacité  se  con- 
centre dans  la  réparation  d'un  dommage  d'après  lamaxîme: 
A$secUratus  non  quœrit  lucrumy  sed  agit  ne  in  damno  sit; 

»  Que  les  associations  dont  il  s'agit  ne  doivent  pas  être 
ôonsidérées  comme  des  Sociétés  anonymes,  qui  ne  peuvent 
exister  qu'avec  rautorisation  du  Gouvernement  ; 

»  Qu'en  effet,  dans  l'espèce,  les  sociétaires  sont  connus, 
qu'ils  offrent  toutes  les  garanties  désirables  de  moralité  et 
de  solvabilité,  et  îqu'on  lit  dans  le  §  9  des  articles  addition- 
nels des  statuts  de  la  Société  de  Saint- Julien  que  «  tout  so- 
ciétaire qui,  soit  par  l'âge,  soit  par  éoii  incoiiduite,  soit  en- 
fin par  incapacité,  sera  jugé  ne  pas  pouvoir  conduire  son 
bateau,  pourra  être  ei^cl»  de  ces  Sociétés,  par  une  déli- 


(2^7) 

tération   prise    par    deux    des    fondateurs  seulement  ; 

»  Considérant  que  ce  qui  écarte  dans  la  cause  tout  ca- 
ractère anonyme,  c'est  que,  d'après  les  statuts  des  Sociétés 
d'Ostrevent  et  de  Saint-Julien,  les  sociétaires  sont  indéfi- 
niment et  personneliement  responsables  des  pertes  ;  que 
tous  les  contrats  ont  été  publiés  au  grefiFè  du  Tribunal  de 
commerce  et  dans  les  journaux  de  Valenciennes  ; 

»  Considérant  qu'il  reste  dès-lors  une,  association  sut 
gmeris  très-licite,  très-légale^  qui  n'est  assujettie  à  aucune 
forme  ou  condition  particulière,  une  association  ayant  une 
personnalité  morale,  pouvant  ester  â  ce  titfô  en  justice  et 
y  être  représentée  par  son  gérant  ; 

»  Considérant  que  la  maxime  :  Nul  ne  plaide  par  pro- 
cureur, invoquée  par  Gilliol,  est  inapplicable  en  l'espèce, 
puisque  c'est  la  personne  morale  (et  non  les  membres  qui 
la  composent)  qui  seule  plaide  par  le  sieur  Charles,  son 
gérant,  à  qui  l'art.  29  des  statuts  précités  confère  tous  pou- 
voirs nécessaires; 

»  Considérant,  en  ce  qui  touche  le  fond,  qu*au  milieu 
des  dires  contradictoires  des  parties,  le  moyen  le  plus  cer- 
tain de  connaître  la  véritable  cause  du  sinistre,  ,Qbjet  du 
procès,  est  une  expertise  qui  sera  confiée  à  des  hommes 
spéciaux  qui  s'entoureront  de  tous  renseignements  utiles  et 
à  qui  le  Tribunal  donnera  tous  pouvoirs  pour  déterminer 
la  valeur  et  en  constater  les  causes  ; 

9  Considérant  que  la  jurisprudence,  fixée  par  un  dernier 
arrêt  de  la  Cour  de  cassation  du  17  novembre  4858  (S.  V., 
1859, 1,  727),  reconnaît  aux  Tribunaux  le  droit  d'étendre 
ninsi  la  mission  qu'ils  donnent  aux  experts. 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal,  sans  s'arrêter  à  la  fin  de 
non-recevoir  proposée  parle  sieur  Gilliot dont  il  le  déboute, 
DUS  droits  et  moyens  des  parties  réseiwés,  dit  qu'il  sera 
)rocédê  à  une  expertise,  etc.  » 

Appel  par  Gilliot  contre  Cai^vin,  et  de  Cauvin  contre  Du- 
resnes  et  Gilliot. 

Devant  la  Cour,  pour  Gilliot  on  reproduisait  la  fin  de  non- 
ecevair  présentée  devant  les  premiers  juges  : 

En  droit,  disait-on,  nul   ne  plaide  par  procureur;  les 


(298) 

Sociélés  batelières  qualifiées  Sociétés,, de  SakU-Jidim  ç^i 
de  rO^^r^vmi,' qu'on  les  considère  comme  civiles  ou  com- 
merciales, ne  peuvent  ester  en  justice  qu'à  la  condition 
que  l'action  soit  intentée  au  nom  de  tous  ceux  qui  en  font 

Eàrtie  ;  mais  il  n'est  pas  possible  d'admettre  que  les  sieurs 
aval,  Masy  et  Charles,  se  disant  syndics  et  receveur  de  ces 
Sociétés,  aient  qualité  pour  les  représenter  en  justice.  D'ail- 
leurs ces  sociétés,  par  leur  nature  et  leur  constitution,  sont 
de  véritables  sociétés  anonymes;  elles  ne  sont  pas  autori- 
sées. Dès-lors  elles  sont  nulles,  aux  termes  de  l'avis  du 
Conseil  d'Etat  dn  i^  avril  1809  et  du  décret  du  18  novem- 
bre 1810.  Par  une  conséquence  ultérieure,  elles  ne  peu- 
vent ester  en  justice  dans  un  intérêt  collectif,  constitué  eu 
violation  manifeste  de  la  loi. 

La  Cour  a  confirmé  la  sentence  des  premiers  juges  par 
les  motifs  qu'on  va  lire  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  la  connexité  des  causes  inscrites 
sous  lés  nos  222  et  269  du  rôle  général,  en  ordonne  la 
jonction,  et  statuant  à  l'égard  de  toutes  les  parties  : 

Attendu  que  les  associations  de  bateliers,  dites  d'Ostre- 
vent  et  de  Saint-Julien,  ne  présentent,  à  aucun  titre,  le  ca- 
ractère d'une  Société  soit  civile,  soil  commerciale; 

Qu'en  effet  on  ne  rencontre  point,  dans  leurs  conventions, 
rélcment  constitutif  du  contrat  de  Société,  que  le  législa- 
teur a  pris  soin  de  définir  par  l'art.  1832  C.  Nap.  ; 

Que  ces  bateliers,  par  des  stipulations  exclusives  de  toute 
préoccupation  de  lucre  ou  de  spéculation,  n'ont  eu  d'autre 
but  que  de  se  garantir  réciproquement  contre  les  risques  de 
lanavigation,aumoyend'unecolisationformantunlonds  com- 
mun destiné  à  la  réparation  du  dommage,  en  cas  d'accident; 

Qu'en  vain  on  prétendrait  qu'à  raison  de  la  qualité  des 
contractants,  cette  convention  revêt  un  caractère  commer- 
cial, en  ce  qu'elle  peut  favoriser  indirectement  leur  indus- 
trie ;  qu'on  ne  saurait,  sous  ce  spécieux  prétexte,  dénaturer 
l'esprit  et  le  texte  des  actes,  ni  s'écarter,  par  une  extension 
arbitraire,  des  conditions  essentielles  déterminées  par  la 
loi  en  matière  de  Société; 

Que  vainement  encore,  et  pour  assujettir  lesassociationsdc 

bateliers  à  Tautorisation  préalable  du  Gouvernement,  on 


(299-) 

essaie  de!  lôSi  confondre  avec  les  Sociétés  anonymes,  en  se 
prévalant  de  certainscaractèresqui  leur  seraient  communs, 
notamment  de  Fabsenç/e; d'une  raison  sociale; 

Attendu  que  des  différences  radicales  repoussent  une 
telle  assimilation;  qu'il  n'y  a  eu  ici  ni  capital  social,  niaçtions 
transmissibles  ;  qu'une  simple  contribution,  dont  le  chiffre 
est  réglé  selon  l'exigence  de?  cas»  est  imposée,  d'un  com- 
raan  accord,  aux  associés  qui  sont  d'ailleurs  personnelle- 
ment responsables  ;  . 

Qu'il  n'existe  évidemment,  à  l'égard  de  ces  associations 
d'une  nature  toute  spéciale,  aucun  des  motifs  d'intéiêt  gé- 
néral qui,  pour  sauvegarder  les  droits  des  tiers  et  le.  cré- 
dit public,  ont  fait  soumettre  au  contrôle  du  Gouvernement 
la  constitution  des  Sociétés  anonymes^; 

Attendu  que  la  garantie  mutuelle  conclue  par  un  nombre 
plus  ou  moins  limité  de  bateliers,  non  pour  se  ménager  un 
bénéfice  quelconque,  mais  uniquement. afin  4'être  indem- 
nisés des  pertes  au  avaries,  à  r.aideîd'unei  coti^tipn  airétée 
entre  eux,  demeure  donc  régie  .par  les  principes  du  droit 
commun  et  par  les  distpositioï^3:des  art.  6  et  1134  C.  Nap., 
en  vertu  desquels  les  conventions  qui  ne  dérogent  en  rien 
à  Tordre  public  et  aux  bonnes  mœurs  tiennent  lieu  de  loi 
àceux  qui  les  ont  faites,,  et  doivent  être  sanctionnées  par  la 
justice;:  .    - 

Attendu  que  ces  traités^  passés  en  forme  authentique,  et 
qui,  par' leur  objet,  conserveijt  un  caractère  purement 
privé,  ne  renferment  d'ailleurs  que  les  clauses  les  pluf5 
licites  •  qu'on  y  prescrit  notamment  toutes  les  mesures  pro- 
pres à  assurer  une  direction  prudente  des  bateaux  ;  que 
tlans  ce  but  et  par  une  prévoyance  aussi  morale  qu'intelli- 
gente, on  exclut  de  la  communauté  ceux  dont  l'inconduite 
DU  l'inhabileté  entraînerait  des  conséquences  préjudi- 
ciables ;  ' 

Attendu  que  de  telles  spéculations,  obligatoires  pour  les 
contractants  qu'elles  prémunissent  contre  des  éventualités 
lommageables,  ne  peuvent,  en  même  temps,  que  profiter 
i  l'intérêt  public;  qu'aussi  des  associations  semblables  se 
;ont  succédé  depuis  plus  d*un  siècle  jusqu'à  ce  jour, 
lans  cette  contrée,  sous  les  yeux  de  l'administration,  sans 


(300) 
qu*elle  ait  jamais  manifesté  la  pensée  de  subordonner  i  son 
approbation  la  légalité  éè  lenr  existence  ; 

Attendu  que  ces  batelief s ,  habituellement  éloignés  de 
leur  domicile,  plus  ou  moins  longtemps,  par  les  exigences 
mêmes  de  leur  profession,  ont  pu  constituer  des  manda- 
taires àTeffel  d'exerceir  en  leur  nom  leurs  droits  et  ac- 
tions ;  que,  dans  ces  conditions,  les  associés  ne  plaident 
point  par  procureur;  qu'ils  agissent  eux-mêmes  et  directe- 
tement  par  Torgane  des  représentants  de  leur  choix,  qui 
les  personnifient  et  les  engagent  par  leurs  actes  et  leurs 
cofldusions  en  justice; 

Attendu  que  Gilliot  n'est  donc  pas  plus  fondé  à  eçitîquer 
ici  la  régularité  de  la  procêdtire  que  la  légalité  des  Sociétés 
batelières  intimées  au  procès,  et  qtfen  le  décidant  ainsi, 
les  premiers  juges  ont  sainement  apprécié  les  faits  de  la 
cause  ;  .   '    • 

Attendu  que  Tappel  de  Gillîot  a  entraîné  celui  de  Charles 
et  celui  de  Gauvain,  et  retardé  la  solution  du  procès  au 
fond,  en  suspendant  1-exédution  d'ûtie  mesure  préparatoire 
wdonnée  par  lé  Tribunal;  qti'en  cotfôéquwice,  Giîliot  doit 
supporter  tous  les  frais  occasionnés  par  une  mauvaise  con- 
testation qu'il  n'avait  même  pas  intérêt  à  soulever,  puis- 
qu'il est,  en  outre,  appelé  en  garantie  fiit  Gauvain  ; 

Par  ces  motifs,  met  les  appellations  au  néant;  confirme 
le  jugement,  ordonne  qu'il  sortira  son  entier  effet;  or- 
donne lai  restitution  dés  amendes  consignées  sur  les  appels 
de  Charles  et  de  Càuvam  ;  condamne  GHHot  à  l'amende  el 
aux  dépens  de  la  cause  d'appel  env^s  toutes  les  parties. 

Du  18  juillet  1860.  1^  chamb.  Présid.,  M.  de  Mbulon, 
!«>•  présid.;  minist.  pubL,  M.  Morcrette,  i^  avoc.-gén.  ; 
avec,  M^Dupont,  Duhemet  Talon;  avou.,  M<»Lavoix, Dus- 
salian  et  Debeaumont. 


SOCIÉTÉ.  —  STATUT  SOCIAL.  —  MOMFÏCAHONSw  —  CARAC- 
TÈRE. —  ASSEMBLÉE  GÉNÉRALE.  —  SOUSCRIPTIOÇi  D'AC- 
TIONS. 

l/ne  Société  y  à  la  formation  de  laquelle  a  concouru  une 
autre  Société  pour  y  apporte»^  le  principe  (Tune  assurance 
contre  les  pertes,  moyennant  une  allocation  proportion' 


(301) 

uelle  el  la  réserve  d'un  droit  de  contrôle,  p^utse  séparer 
d^  la  iSociété  assurante  et  se  rendre  complètement  indé- 
penduniè,  sans  pour  cela  modifier  les  bases  essentielles  de 
son  eâûisience;  si  d'ailleurs  eUe  avait  une  existence  pro- 
pre, un, ica^tal  di$UpQf  de  celui  delà  Société  assurante, 
et  la  propf;iélé  exclusive  de  ses  bénéfices  (1). 

Il  en  est  surtout  ainsi  lorsque  Vacte  de  Société  domieà  l'as- 
semblée  géi^4rale  le  droit  de^  faire  uux  statuts  tom  les 
cliangements  dont  V expérience  ferait  reconnaître  t(i  né- 
cessité, et  qw  la  disparition  de  V assurance  n'a  été  ame- 
née que  par  un  é^émm^nt  de  force  majeure,  ta  que  la 
déconfUure  de  la  Société  assurante,  {^). 

En  conséqumoe,  celui  qui  a  souscrit  ^  des  actions  a  celte  So- 
ciété, 9îfi  pmt  s^  refuser  à  ^n  effectuer  le  payement  sous 
le  prétexte  que,,  par  suite  (JLela  disparition  de  l'assu- 
rance^ la  Société  qui  lui  réclame  le  montant  de  sa  sous- 
cription n'est  plus  celle  dans  laquelle  il  avait  consenti  à 
engager  $es  capitaux  (3); 

.(petU^Solignac  C,  Pérot  et  G^.) 

Un  sieoT  Pérot  fonda,  ea  1852,  sous  le  nom  de  Com- 
pagnie générale  des  Cm^esd'eéfcompfe^  une  institution 
ayan*  poi^  but  d'appliquer  le  principe  de  l'aôsurance  aux 
opéraiipns:de  banque.  Son  plaa  consistait  à  instituer  sue- 
cessivemeiy;,  dans  toutes  leâ  Villes  dont  l'importance  le 
comportait,  et  sur  une  base  uniforme,  des  caisses  spéciales 
d'escompte;  à  assurefr  contre  tt)utes  les  éventualités  de  perte 
non-seoleoient  les  capitaux  engagés^  dans  lesdites  caisses, 
mais  encorele  service  de  rîotérêt  à  Ap-,  «/a  dés  capitaux  ; 
à  établir  un  système  d'organisation  et  de  contrôle  commun 
à  toutes  les  caisses,  et  qui,  sans  gêner  en  rien  leur  liberté 
d'action  particulière,  les  associait  aux  intérêts  généraux  de 
rinstitûtion,  et  les  maintenait  toujours  danslçs  limites  des 
statuts  constitutifs. 

Aux  termes  des  statuts  de  la  Conjpagnie  générale,  chaque 
caisse  spéciale  avait  son  capital  propre,  complètement  dis- 
tinct de  celui  des  autres  caisses  et  de  celui  de  la  Compa- 
gnie générale;  ses  bénéfices  étaient  également  sa  propriété 
exclusive. 

En  1856,  la  Compagnie  générale  des  caisses  d'escompte 


(302) 

fonda,  à  Lille,  une  caisse  spéciale  d'escompte  sous  là  raison 
sociale:  Paviot,  Ph.  Vrau  efC*®.  Cet  établissement, comme 
tous  ceux  du  même  genre,  était  constitué  sous  la  forme 
d'une  Société  en  commandite  par  actions.  L'acte  social, 
quiportait  les  dates  des  5  et  40  juin  1856,  intervenait  entre 
le  sieur  Pérot,  d'une  part ,  directeur-général  de  la  Com- 
pagnie générale  des  caisses  d'esconipte,  les  sieurs  Paviot 
étPh.  Vraii,  gérants  de  la  caisse  d'escompte  de  Lille,  et 
les  persohnes  qui  adhéreraient  aux  statuts  par  la  prise 
d'actions,  d'autre  part.  La  Gompa^ie  générale  des  caisses 
d'escompte,  représentée  par  le  sieur  Pérot,  son  gérant,  s'y 
obligeait  (art.  l^ry  à  assurer  la.Sôcîiété  créée  contre  les 
chances  de  pertes,  dàris  les  limites  et  conditions  stipulées 
dans  ses  statuts.  L'art.  27  disposait  que  les  déficits  résul- 
tant des  opérations  faites  conformément  aux  statuts,  se- 
raient supportés  par  la  Compagnie  générale  des  caisses  d'es- 
compte dans  les  proportions  et  dans  les  conditions  de  son 
assurance;  que  néanmoins  la  Compagnie  générale  oe  pour- 
rait jamais  être  obligée  à  rembourser,  une  somme  plus 
forte  que  le  capital  de  la  Société,  réalisé  au  jour  de  Fin- 
dentaire.  —  Aux  termes  de  l'art.  S7,  dans  le  cas  dû  la  So- 
ciété serait  dissoute  par  suite  de  pertes,  celles-ci  seraient 
réparées  par  la  Compagnie  générale ,  dans  les  propcMrtions 
déterminées  ;  à  1* expiration  naturelle  de  la  Société,  etaprés 
le  remboursement  intégral  de  toutes  les  actions  émises,  ce 
qui  resterait  en  actif  de  liquidation  serait'  réparti  entre  les 
actionnaires  et  les  gérants;  en  cas  d'insuffisance  de  l'actif 
à  rembourser  les  valeurs  nominales  des  actions,  le  surplus 
serait  parfait  par  le  fonds  de  répartition  de  la  Compagnie 
générale. 

Il  était  stipulé  fart:  1er)  q^e  la  Société  de  Lille  n'existait 
qu'en  raison  de  1  intervention  de  la  Compa^gnie  gëiiérale 
des  caisses  d'escompte,  et'  que  lès  statuts  à' en  pouvaient 
être  modifiés  qu'avec  le  concours  et  l'assentiment  de  MM. 
A.  Prostet  C»®.  Aussi  Tart.  38  disposait-il  qu'aucune  ifaodifi- 
cation  ne  pouvait  êlï^e  faîte  aux  élaluts  saiisle  consente- 
ment de  la  Compagnie  générale.  ~T- L'art.  35  cependant 
donnait  à  l'assemblée  générale  le  droit  de  faire  aux  statuts 
tous  les  changements  dont  l'expérience  aurait  faiït  recon- 
ilaître  la  nécessité. 

En  1857,  la  gérance,  telle  qu'elle  avait  été  constituée 
par  les  statuts ,  fut  révoquée  :  MM.  Pérot  et  JDestombes 
furent  nommés  gérants  à  la  place  de  ÏMM.  Paviot  etPh. 


(303) 

*  Vraa;  là  raison  sociale  fat  alors  :  Pérot,  Destombes  et  C»<^; 
aucune  autre  modification  ne  fut  apportée  aux  statuts. 

En  1858,  la  Compagnie  générale  des  caisses  d'escompté 
tomba  en  dèconfitùrç.  La  caisse  d'escompte  de  Lille  réunit 
alors  ses  actionnaires,  et,  par  délibération  en  date  du.  18 
mars  18&8,  l'assemblée  générale  donna  au  conseil  de  sur- 
veillance pouvoii*  de  réviser  les  statuts,  et  de  les  approprier 
à  la  nouvelle  situation. 

Le  conseil  de  surveillance  commença  par  poursuivre  en 
justice  la  résiliation  ^es  engagements  qui  liaient  la  caisse 
d'escompte  de  Lille  'divers  la  Compagnie  générale  des 
caisses  d'escompte  ;  œCie  résiliation  fut  prononcée  par  le 
Tribunal  de. commerce  de  la  Seine,  le  2  juillet  1858.; 

De  nouveaux  statuts  furent  ensuite  rédigés. 

Aux  termes  de  ces  statuts,  là  Société  en  commandite, 
constituée  primitivement  sous  la  raison  Paviot,  Ph.  Vrau 
et  C^®,  et  depuis  sous  celle  de  Pérot,  Destombes  et  C>«,  con- 
tinuait entre  M.  Pérot,  gérant-directeur,  d'une  part,  et  tous 
les  actioAnaireB  de  la  Caisse  d'eBcompte  de  l'arrondisse- 
ment de  Lille.  Seulement  l'assurance,  qui  faisait  l'une  des 
conditions  de  la  précédente  Société,  iJisparaissait  ;  la  nou- 
velle Société  était  coitiplétement  indépendante,  et  suppor- 
tait elle-même  ses  pertes  en  totalité. 

Ces  statuts  furent  approuvés,  le  18  mars  1858,  par  l'as- 
semblée générale. 

Le  25  juin  1856,  un  sieur  Petit -Splignac  avait  souscrit 
vingt  actions  à  la  caisse  d'escpmpte  de  Lille,  Paviot,  Ph. 
Vrau  et  C*^.  Le  montant  die  sa  soqscrîption  ne  lui  fut  ré- 
clamé qu'en  1859  par  M.  Pérot,  gérant  de  la  nouvelle  So- 
ciété organisée  par  les  statuts  du  18  mars  1858.  Jusque  là 
Petit-Solignac  n'avait  assisté  à  aucune  :délibérati.on  des 
actionnaires,  et  n'avait  pris  part  à  aucune  répartition  de 
dividendes.  Sur  son  refus  de  payer,  il  fut  assigné,  à  la  re- 
quête) de  Pérot^  gérant  de  la  Caisse  d'escompte  de  Lille,  en 
payement  de  la  somme  de  10,000  fr.^  importance  des  vingt 
actions  par  lui  souscrites.  ;.  . 

A  çettq  demande,  il  opposait  qu'il  n'avait  pas  souscrit 
d'actions' à  la  Société  Pérot  et  C^S  quç  s'il  avait  souscrit, 
en  4856,  vingt  actions  delà  caisse  dont  Paviot  et  Ph.  Vrau 
étaient  les  gérants,  cç  fait  ne  formait  aucun  lien  de  droit 
entre  lui  et  Pérot;  qu'en  effet,  la  Société  Paviot^  Ph,  Vrau 
et  C»e  étai^  une  dé^pendance  de  la  Compagnie  générale  des 
caisses  d'escompte^  qui  les  garantissait  contre  toutes  pertes; 


(304) 

qu'à  cette  eatr^prise  on  avait  substitué  une.  maison  .  de  - 
banque  qui  ne  présentait  aucun  rapport,  avec  Tancienne 
Société  ;  qu'en  l'absence  de  tout  concours  de  sa  part  aux 
délibérations  qui  avaient  modifié  la  première  Société,  Pé- 
rot  et  Ci®  étaient  non  recevables  dans  leur  demande. 

A  la  date  du  25  octobre  1859,  le  Tribunal  de  Lille  re- 
poussa en  ces  termes  les  prétentiops  de  Petit-Solignac  : 

JUGEMENT.. 

(Attendu  que  Petit-Solignac  ne  méconnaît  pas  d'avoir 
souscrit,  dans  la  Société  de  la  caisse  d'eâcompte  de  Lille, 
fondée  en  i856,  vingt  actions  de  500  fr.  chacune  ; 
^    >  Attendu  que,  par  le  fait  dé  cette  souscription,  Petit- 
Solignac  est  devenu  membre  de  la  Société  ; 

»  Attendu  qu'il  ne  produit  aucun  titre  ayant  opéré  dis- 
SfOlution  de  ladite  Société  ; 

>  Attendu  que  le  Tribunal  n'a  pas  été  mis  à  même  d'ap-* 
précier  ^i  les  mûdificatkms  ont  changé  ressènce  de  la 
Société; 

»  Le  Tribunal  condamné  Petit-Solignaô  par  Corps  à  payer 
à  Pérot  et  C^e  la  somme  de  10,000  fr.  représentant  sa  mise 
sociale  dans  la  Société; 

>  Condamne  Petit-Solignac  aux  intérêts  judiiçiaires,  eljc.> 

Appel  par  Petit-Solignac.  .  j. 

Dans  son  intérêt,  on  disait  :  L'engagertient  invoqué  con- 
tre Petit-Solignac  par  Pérot  et  C^<î  s'applique  à  une  Société 
toute  différente  de  celle  dont  le  sieur  Pérot  est  aujourd'hui 
le  gérant.  La  Caisse  d'escompte,  en  effet,  établie  à  Lille  en 
1856,  sous  la  raison  Paviol,  Pb;  Vrauet  C>«,  n'était  qu'une 
dépendance  et  une  émanation  dé  la  CompAgnie  générale 
des  caisses  d'escompte,  créée  par  Prost,  doiM;  le  but  était 
d'appliquer  le  principe  de  l'assurance  au^  opérations  de 
banque,  et  de  garantir  contre  toutes  les  éventualités  de 
pertes  non  seulement  les  capitaux  engagés  dans  les  caisses 
d'escompte  formées  sous  ses  auspices,  mais  encore  le  ser- 
vice de  l'intérêt  à  4  p.  «/o  desdils  capitaux.  Lès  statuts  des 
5  et  10  juin  1856t;ontiennent,  en  conséqence,  l'obligation, 
de  là  part  des  «ieurs  Prost  et  C»®,  d'assurer  la  Société  con- 
tre les  chances  de  pertes  (art.  l«r,  27  et  37).  -—C'est  dans 
cette  Société  ainsi  organisée,  et  en  vue  des  avantitges  et  des 
garanties  qu'elle  promettait ,  que  le  sienr  Petit-Solignac 


(305) 

8*est  éttgafg^,  le  25  juin  1856^  à  prendre  vingt  acliona  de 
500  fr.  chacune.  —  La  Société  Pérot  et  G»^,  qui  réclame 
aujout*d'hui  l'exéculion  de  cet  engagement,  est  constituée 
sui'  des  bases  toutes  différentes  ;  au  lieu  de  se  rattacher  a 
une  sorte  de  fédéiralion  d'entreprises  semblables,  elle  est 
compléteraent  isolée.;  le  principe  de  l'assurance,  base  eé- 
sentielle  de  l^  premièï^e  Société,  disparaît  de  la  seconde; 
celte  Sôtiiété  est  livrée  à  ses  proprèis  ressotirceè,  sans  offrir 
à  ses  actionnaires  une  garantie  quelecfnq^je,  ni  pour  leurs 
capitaux,  ni  pour  l'intérêt  de  ces  capitaux.  11  n'existe,  dès- 
lors,  aucuniien  cfe  droit  entre  PelitrSoUgpj^c  et  la  Société 
Pérot  et  G*®;  cette  dernière  n'a  pas  qiwlité  pour  réclamer 
de  rappelant  le  payement  des  actions  par  lui  souscrites  à  la 
Société  Paviot,  Ph.  Vi'aù  et  G'^.  —  En  vain  l'oû  se  pré- 
vaudrait, Vis-à-vîè  Pefît-SpligAàc,  deâ  délibérations  dfel*ais- 
seittlrtéé  g^AéM'ô  des  âtctioïiïiaîres  de  la  premfièr^  Soelété^ 
en  dat€f  des  48  mar«  et  5  octobre  4858  ;  en  effet,  il  est  de 
prkicipN^  qu'un  ooniitot  d^  Société  ne  )pmi  être  modifié  dans 
ses  éléments  «$sentiels<que.dd  consentement  de  tous  ceux 
qui  l'ont  formée  Or,  Petit-Solignac  n'a  pas  concouru  aux 
délibérations  .sus-raentionnèes  ;  par  conséquent,  et  quelles 
que  soient  à  ce  sujet  les  stipulations  de  l'acte  de  Société,  il 
n'est  pas  lié  par  la  d'écisionde  rassemblée  générale  qui  a 
approuvé  les  statuts  nouveaux,  modifiant  les  bases  essen- 
tiellé^s  éeÈ  anciens*  »— -  Ces*  donc  à  tort  que  tes  premiers 
jug^  ont  condumné  l'appelant  à  payer  à  Pérot  et  G^^  le 
montant  des  actions  par  lui  souscrites  à  la  Société  Paviot, 
Ph,  VrauetÇ^ 
La  CÎoury  en  confirmant,  a  rendu  l'ai^êt  suivant  : 

ARRÊT. 

tA  iaCflJR'j  —  Attenào  qu'en  1856^  il  s'est  fondé  à  Lille 
une  Sétiété 'a^à4!il  ' p0nr  obj^t  les  opérations  de  banque. et 
d'éë^tMHnplie^  isôU^  le  ncftn  de:  Gai»ge d' escompte  de  Lille; que 
Cette  ôaisèe  fc'ÊtpparteittilA  elte-mêftw,  avait  son  existence 
propre,  son  capital  dtéliict  -du  capital  de  toute  autre  caisse, 
sa  géèiaÈée  *péciôle,  la  propriété  exclusive  de  ses  béné- 
fice^ >    ".'•'•' 

Attendu  qu'à  la  Gompagnie  générale  des  ejaissës  dfeg- 
compte,  Prost  ne  concourait  à  la  iorinatiion  de  la  Société 
t[U^  ffoùi"  ftppoviér  le  principe  d'une  assurance  déterminée 
et  tîîWôiiichritë  *iiisc^ônaineélimîleâ,sôU!^laoondition  d'une 

TOME  XVITl.  ^0 


(806) 

allocation  proporlionnelle  el  en  se  réservant  un  droit  de 
contrôle; 

Attendu  qu'en  raison  de  Télat  de  déconfiture  de  la  So- 
ciété générale  Prosl,  qui  les  exposait  au  payement  de  pri- 
mes pour  une  assurance  devenue  complètement  illusoire, 
les  gérants  de  la  Caisse  d'escompte  de  Lille  ont  dû  deman- 
der et  ont  obtenu  du  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine, 
le  Si  juillet  1858,  la  résiliation  des  engagements  qui  les 
liaient  envers  la  Société  générale  ; 

Attendu  qu'en  cet  état  de  choses  il  y  avait  nécessité 
d'apporter  des  modifications  au  statut  gocîal  ; 

Qu'aux  termes  de  l'art.SSde  l'acte  de  Société,  l'assemblée 
générale  avait  le  droit  de  faire  aux  statuts  tous  les  change- 
ments dont  l'expérience  aurait  fait  connaître  la  nécessité  ; 

Attendu  que  ces  changements  oiHété  opérés,  que  nulle 
modification  essentielle  n'a  été  ap^rtée  aux  conditions  de 
la  Société,  et  que  la  disparition  de  l'asàurance,  amenée  par 
un  événement  de  force  majeure,  le  fait  de  la  déconfiture 
de  Prost,  n'était  pas  de  nature  à  y  mettre  fin; 

Attendu  que,  le  20  juin  1856,  Petit-Solîgnaç  a  souscrit 
vingt  actions  de  500  fr.  à  la  Caisse  d'escompte  de  Lille, 
payables  le:  i^^  décembre  suivant;  que  cet  engagemenl 
ferme  et  à  jour  n'a  point  été  modifié  ;  que  les  ménage- 
ments apportés  au  recouvrement  du  prix  par  les  gérants 
d'une  Société  ne  peuvent  être  invoqués  comme  la  recon- 
naissance d'un  droit  prétendu  de  s'acquitter  à  volonté  du 
prix  d'actions  faisant  partie  du  capital  social  ; 

Attendu,  au  sui^plus ,  que  le3  aUégatious  de  Petit-Soli- 
gnac  sont  démenties  par  ses  engagements  formels;  que 
c'est  envers  la  Caisse  d'escompte,  nctn  envers  les  gérants 
qui  ont  pu  changer,  que  Petit-Sôlignac  a  contracté,  et  qu'il 
doit  à  la  Société  le  prix  de  ses  actions  ;  . 

Là  Cour  met  l'appellation  au  néant  ;  déboute  Petit-Soli- 
gnac  de  ses  fins  et  conclusions  ;  ordonne  que  le  jugement 
dont  est  appel  sortira  effet  ;  . 

Condamne  l'appelant,  etc. 

Du  5  mai  1860.  2^  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minis- 
publ.,  M»  Berr,  avoc.-gén.  ;  avoc,  M«  Merlin  et  Dupont; 
avou.,  M«s  Legrand  et  Villette. 


(307) 
SOCIÉTÉ  EN  COMMANDITE.  —  immixtion.  —  statuts.  — 

GESTION  LIMITÉE.  —  DROITS  DU  COMMANDITAIRE.  —  SUR- 
VEILLANCE. —  DÉLIBÉRATIONS.  '■—  ATANTAGE  SOCIAL  PAR- 
TICULIER. —  EMPRUNTS.  — PREUVE  INADMISSIBLE. 

0)1  peut,  par  Vacte  constitutif  (Tune  Société  en  comman- 
dite, déterminer  et  limiter  le  rnandat  du  gérant^  pourvu 
que,  dans  les  limites  fixées,  celui-ci  soit  libre  de  gérer  et 
administrer  la  Société  saus  entrave,  ^ous  sa  responsa- 
bilité. 
Ainsi,  Fùcte  de  Société  en  commandite  peut  limiter  a  une 
^mme  fixe  la  dépense  qu'il  pourra  faire  pour  l-acquisi^ 
tian  d'instruments  ou  de  machines,  sans  V assentiment  des 
commanditaires,  el  en  lui  interdisant,  sans  cet  assenti-^ 
menly.d'empmntery  d'acquérir  ées  immeubles,  d'hypo* 
théquer,  de  vendre  partie  dés^  meubles  et  immeubles  de 
V actif Mcial,  produits  exceptés. 

Les  associés  commanditaires  peuvent  être  hvoestis  par  Vûcie 
de  Société  du  droitde. swveillei^  les  opérations  delà  gé- 
rance, de  prendre  communication  de  la  comptabilité,  de 
la  correspondance,  des  comptes  ouverts  chez  les  banquiers 
et  de  toutes  les  pièces  comptables,  dHnspecter  l'usine  et 
les  établissements  qui  en  dépendent,  sans  engager  leur 
responsabilité. 

Ils  peuvent  assister  aux  délibérations  de' la  Société,  y  con- 
courir avec  voix  dMibéirative,  lérs  même  que  ces  délibé- 
rations ont  pour  objet  de  conférer  au  gérant  une  capacité 
qu'il  ne  peut  puiser  dans  Vacte  de  Société^  et  d! apporter 
diverses  modifications  aux  statuts  primitif^-. 

Il  n'iniporte  que  le  gérant  n'assiste  aux  délibérations  qu'a- 
vec voix  consultative. 

Les  statuts  qui  autorisent  ces  sortes  de  délibérations  restent 
dans  les  conditions  légales  de  la  commandite,  alors  qu'elles 
ne  mettent  pas  les  commanditaires  en  rapport  avec  les 
tiers.  >  . 

La  convenïion  faite  dans  les  statuts  d'assurer  un  avantage 
particulier,  mais  soumis  aux  chances  de  durée  de  la  So- 
ciété, n'est  pas  iricompatible  avec  la  commandite  et  ne 
peut  imprimer  à  la  Société  le  caractère  d'une  Société  en 
nom  collectif . 

Les  autorisations  données  au  gérant  par  les  associés  com  • 
nianàitaires  decontràctet  des  emprunts,  alors  que  les  sta- 
tuts ne  l'y  autorisent  pas,:  ne  constituent  pas  l'immix^ 
tion  de  ces  associés  dans  la  gestion  de  la  Société. 


(S08) 

Uassocic  commandUaire  peut,  sans  engager  saresponsaH- 
lité,  prêter  .persomietletnent  à  la  Société  les  foiuJU  qu'il 
a  pu  empi^nter.  lui-même  d'un  banquier. 

Pour  être  admis  à  prouver  qu'un  associé  commanditaire 
s'est  immiscé  dans  la  gestion  sociétaire,  Une  suffit  pas 
d'alléguer  qu'ail  s'est  mis  en  rapport  avec  dés  tiers  pour 
la  vente  des  produits  sociaux,  il  faut  encore  énoncer  le 
temps,  le  lieu  et  les  diverses  circonstances  qui  ont  accom- 
pagné son  immixtion.  (G.  com.,  art.  27  et  28.)  (1). 

(Chainponnois  et  autres  C.  de  BocqaigQy^t  autres*) 

En  4857,  Delbets^,  de  Rocquigny^  Dulerlre,  DekmûUe 
et  Leborgne ,  formèrent  une  Société  '  en  nom  collectif  à 
l'égard  de  Delbetz^  et  en  commandité  à  l'égard  des  quatre 
autres,  sous  le  nom  de  Théodore  Delbetz  et  C»«,  en  vue  de 
Tieixploitation  d'une  distillerie  à  Ëtaples. 

Le  gérant  n'avait  apporté  que  son  industrie  dans  la  So- 
ciété>  et  les  statuts  de  la  commandite  mettaient  à  ses  pou- 
voirs des  limites  suffisamment  expliquées  au  jugement  que 
nous  rapportons  plus  bas. 

La  Société  ne  dura  que  deux  années  ;  le  gênant  Delbelz 
fut  mis  en  faillite  au  mots  de  mars  4859. 

Des  fournisseurs  d'appareils,  Champonnois  et  autres, 
prétendirent  que  la  Société,  par  les  stipulation^  de  ses  sta- 
tuts et  l'immixtion  des  commanditaires  dans  les  actes  de 
la  gestion  sociale^  avait  le  caractère  de  la  Société  en  nom 
collectif,  et  que  les  quatre  sociétaires  administrateurs,  bien 
plus  que  le  gérant,  étalent  indéfiniment  responsables  de 
tous  les  engagements  pris  au  nom  de  la  Société* 

Les  syndics  de  la  faillite  se  joignirent  même  ûu\  deman* 
deurs  pour  les  appuyer  dans  leur  demande.  Le  Tribunal 
de  Montreùil-sur-Mer,  saisi  de  la  contestation,  a  prolioncé 
la  sentence  suivante  :  . 

iUGBMENT. 

»  Attendu  que  l'art.  2  de  l'acte  du  46  mai   4857  porte 

(1)  Nous  avon»  fait  remarqoer,  soiis  l'arrêt  d^  la  Gp«r  de  Donai  du 
19  mars  1859  (Jurisp.  17,  66  à  la  note),  que  la  détermination  précise  des 
actes  d'immittion  dans  la  gestion  commanditaire  est  plutôt  tfhé  ques- 
tion de  fait  que  de  droit,  mais  que  les  arrêts  d'espèces  n'en  ont  pas 
moins,  en  cette  matière,  une  grande  importance.  Noii|»coAtiiiU(»sdonc 
de  publier  les  solutions  données  par  la  ju^sprudenee  de  lé  Gour^ 

Aux  autorités  indiquées  îoc.cit,^  ajout.  Rôpert.  Pal.  Suppl.,  v»  So- 
ciété, nos  1072, 1074  bis,  et  Cass.  29  Juin  1858,J.  Pal.  1859;  p.  1203. 
et  i^erti  U  mai  1850, 1.  Pal.  18e(»,  pt  109. 

Voy.  encore  Trih.  de  Domi^  infrà,  décision  suiTante. 


•  (809) 

que  Ifi  Sociélé  formée  par  de  RocquigBv,  Dulerlre,  La- 
motte,  liebqrgne  et  Delbetz,  est  uae  Société  en  nom  col- 
lectif à  l'égard  de  Dèlbetz  seul  indéfiniment  responsable,  et 
en  commandite  à  l'égard  des  quatre  autres  contractants, 
qui  ne  seront  passibles  que  des  pertes  et  dettes  que  jusqu'à 
concurrence  de  leur  mise  ;  qu'à  la  vérité  la  qualification 
devinée  à  un  acte  n'en  détermine  pas  la  nature  ;  qu'il  fout 
donc  examiner  les  stipulations  que  l'acte  précité  renferme, 
et  re^eechev  si  qudques^unes  d'ellea  ne  sont  point  in- 
compatibles avec  4es  princàpes  des  Sociétés  en  comman»- 
dite  ; 

9  Attendu  qiiedesart.l?,  19  et  20dudita<^6principalement 
incriminés^  contiennent,  le  premier,  défense  au  gérant  d'em^- 
prunter,  hypothéquer,  donner  en  gage ,  aequérir  des  im*- 
meuMes,  acheter  , des  instruments  o^u  machinés  dont  le 
prix  ex<ïéderait  3,000  fr,,  aliéner  aucune  partie  des  meu- 
bles et  immeubles  de'l'actifèodal,  produits  exceptés»  que 
de  rassentîmeut  écritde^r commanditaires;  le  deuxième,  un 
droit  de  con^trqle,  au  profit  des  commanditaires,  des:  actes 
de  la  gérance  ;  le  troisième,  le  mode  d'exercice  de  ce 
droit  ;  —  qufon  critique  principalement  ce  dernier  article, 
en  ce^  qu'il  stipule  qu'indépendamment  des  réunions  exr 
cpptionneiUes  qui  pourraient  être  provoquées  pour  causes 
graves»  il  y  aura  nm  réufmn  obligatoire  des  commandir 
taires  au  siège  social,  le  premier  lundi  de  chaque  mois  ; 
que  le  gérauat  ne  ppurra  s'écarter  des  résolutions  arrêtées 
dai^$  ces  réunions,  dans  lesquelles  il  n'aura  que  voix  con- 
sultative, que  sous  sa  responsabilité  personnelle  ; 

^  Attendu  qu'il  est  de  principe  que  l'on  peut,  par  l'acte 
constitutif  d'une  Société  en  commandite,  déterminer  et  li- 
miter te  mandat  du  gérant,  pourvu  que,  dans  les  limites 
fixées,  ce  dernier  soit  libre  de  gérer  et  administrer  la  So- 
ciété sans  entraves  aous  sa  responsabihté  ; 

»  Attendu  quç  Part.  17  ne  fait  rien  autre  chose  que  de 
détepmideir  d'une  manière  précise  le  mandat  donné  au  gé- 
rant Delbetz,  en  limitant  à  3,000  fr.  la  dépense  qu'il  pourra 
faire  jpôur  racquisitiop  d'instrumeifts  ou  de'  machines, 
sans  Vassenitîmeiit  des  commanditaires  et  en  lui  interdi- 


(310) 
sâQt,  sans  cet  assentiment,  d'emprunter,  d'acquérir  des 
immeubles,  d'hypothéquer,  de  Teindre  partie  des  meubles 
et  immeubles  de  Tàctif  social,  produits  exceptés  ;  -^  que 
cette  limite  imposée  au  gérant  avait  principalement  pour 
objet  d'empêcher  ce  dernier  de  faire,  en  instruments  et 
machines,  des  dépenses  qui  excéderaient  les  besoins  de  la 
Société  et  compromettraient  son  avenir;  —  que  cette  sti- 
pulation était  pleine  de  sagesse  et  de  prudence;  qu'elle 
était  introduite  dans  le  pacte  social,  tant  danîs  l'intérêt  des 
commanditaires  que  dans  celui  des  tiers,  qui  n'ont  évidem- 
ment pas  à  s'en  plaindre  ;  —  qu'il  est  admis  en  jurispru- 
dence et  en  doctrine  que  les  aissociés  commanditaires  peu- 
vent être  investis,  par  l'acte  de  Société,  dû  droit  de  sur- 
veiller les  opérations  de  la  gérance,  de  prendre  communi- 
cation de  la  comptabilité,  de  la  correspondance^  des  comptes 
ouverts  chez  les  banquiers  et  de  toutes  les  pièces  compta- 
bles, d'inspecter  l'usine  et  les  établissements  en  dépen- 
dant, ^ans  engager  leur  responsabilité ,  pourvu  qu'ils  ne 
s'immiscent  pas  dans  les  actes  que  le  gérant  a  seul  le  droit 
de  faire  ;  qu'ils  peuvent  assister  aux  délibérations  de  la  So- 
ciété, y  concourir  avec  voix  déllbérative,  lors  même  que 
ces  délibérations  ont  pour  objet  de  conférer  au  gérant  une 
capacité  qu'il  ne  peut  puiser  dans  l'acte  de  Société,  etd'ap- 
porter  diverses  modifications  aux  statuts  primitifs.  Or,  l'art. 
20  de  l'acte  de  Société  Delbetz  et  C»^  ne  prescrit  rien  de 
plus,  il  a  même  soin  d'énoncer  que  le  gérant  ne  pourra 
s'écarter  des  délibérations  qui  seraient  prises  que  sous  sa 
responsabilité  personnelle,  c'est-à-dire  qu'à  l'égard  des 
tiers  il  pourra,  à  ses  risques  et  périls,  se  mettre  eà  con- 
tradiction avec  ces  délibérations  ;  —  que  les  engagements 
qu'il  prendra  avec  eux,  au  mépris  de  ces  délibérations,  en- 
gageront la  Société  qu'il  représente  au  dehors  ;  qu'il  ne  sera 
responsable  que  vis-^à-vis  les  commanditaires  dans  la  me- 
sure de  la  valeur  des  actes  eux-mêmes  qu'il  aura  accom- 
plis contrairement  aux  délibérations  prises  par  la  So- 
ciété ; 

»  Attendu  que  la  présence  du  gérant  aux  délibérations 
de  la  Société  avec  voix  consultative  seulement  prouve  que 


(311) 

Ton  a  voulu  respecter  son  indépendance,  le  laisser  libre' 
d'agir  envers  les  tiers,  dans  tons  les  actes  de  son  adminis- 
tration, sans  tenir  compte  des  délifoérations  qiii  auraient  pu 
apporter  quelque  gêne  dans  sa  gestion,  sauf  sa  responsa- 
bilité envers  les  commanditaires,  responsabilité  qui  évi- 
demment ne  pourrait  peser  sur  lui  que  s'il  s'était  écarté 
dans  sa  gestion  des  droits  qu'il  tenait  de  k  loi  et  du  pacte 
social  ;  —  que  telle  était  évidemment,  lors  de  la  rédaction 
de  l'acte  de  Société,  la  pensée  des  a^ociés  commanditaires, 
car  on  voit  à  chaque  instant  cette  pensée  se  faire  jour  dans 
ledit  acte,  tantôt  en  réservant  surabondamment  au  gérant 
la  gestion  d'administration  de  la  Société  dans  toute  la  plé- 
nitude des  pouvoirs  attribués  par  la  loi  et  l'usage  aux  gé- 
rants des  Sociétés  commerciales  en  commandite,  tantôt  en 
stipulant  que  Delbetz  administrera  seul^  à  titre  de  gérant 
sousle  contrôle  légaldescommanditaires,  et  en  rappelant  que 
toute  immixtion  dans  la  gestion  de  la  Société  est  interdite 
par  la  loi  à  ces  derniers,  tantôt  et  lorsqu'il  est  question  de 
l'exercice  du  droit  de  contrôle  accordé  aux  commandi- 
taires, en  réservant  les  droits  des  tiers,:  étrangers  aux  rap- 
ports entre  le  gérant  et  les  commanditaires; 

»  Attendu,  au  surplus,  que  les  délibérations  que  l'acte 
de  société  autorise  les  associés  commanditaires  de  prendre, 
soit  pour  donner  au  gérant  les  conseils  que  leur  prudence  et 
leur  expérience  pourraient  leur  suggérer,  soit  pour  obliger  le 
gérant  à  se  renfermer  dans  les  limites  du  pacte  social,  soit 
même  dans  des  cas  tout  exceptionnels  pour  donner  au  gé- 
rant la  capacité  de  faire  certains  actes  qu'il  ne  peut  faire 
sans  leur  assentiment,  se  renferment  dans  l'intérieur  de 
la  Société,  se  passent  exclusivement  entre  le  gérant  et  les 
associés  commanditaires,  ne  mettent  pas  ceux-ci  en  rap- 
port direct  avec  les  tiers;  que  le  gérant  n'en  reste  pas 
moins  le  seul  représentant  légal  de  la  Société  au  dehors, 
que  seul  il  traite  des  affaires  de  la  Société  avec  les  tiers, 
qui  légalement  ne  connaissent  que  lui  ;  —  quq ,  dès-lors, 
la  clause  qui  autorise  ces  délibérations  n'est  pasincompa- 
lible  avec  les  principes  de  la  commandite  ; 

»  Attendu  en  fait  que  les  délibérations  prises  parles  as- 


sociés  coiBn)aiidil«ufe&^  ea  eîée*iiîo«  de  l'acte.  4o.  Société 
sus-éDoneé,  ne  so»i  <}p'au  pombrQ  d^  ciaq  i  q^^  d^Dp  la 
premiéi'e^  la  Société  dèeMie,  sur  le  rapport  du  gérwt>  q^'QP 
se.  servira  »  ca^nrae  raoteur,  d'^n  joaanége  mû  par  des 
bcBofs^  et  exaisine  quelques  giiu^tions  sans  inoportaqçe; 
-î-r  qui?  la  deuxième,  en  date  du  43  Août  1858ji  décide,  gijr 
le  rapport  du  gérant  etr  cQnfortnéïneiit  aux::  co»cluftipB8  de 
c^  rapport,  Tachât  d^un  appareil  GbampQnaois,  et  coûwe 
moteur  une  loeomobile  à  vapeur  et  tm  **ejotificaleur  d'oc- 
casion, et  demande  m  gérant,  quireftàeomfpt^  d'un  voyage 
à  SaintrPol^  un  étM  des  dépendes  prqbftbles  peur  1^8  5  -- 
<jue  la  troisième,  eu  date  du.  8  tmi  :1?85^,  s'Qç^upe  de 
l'examen  du  résumé  du  grandîtivrei  des  ef>mpte&  de  la  dis- 
tillerie, depuis  le  4&  n^rs  1857  juequ'av  9  mai  4858,  et 
du  budget  de^  dépenses!  prpbahles  jusqu'il  la  mise  en.  m- 

yre  des  appareils  disliHatqires  ;  —  que  la  qualrièipei  en 
date  du  20  décembre  1858,  décide  qu'au  mois  de. janvier 
Ton  se  réunira  pour  examiner  le  bilan  que  le  gérant  pré- 
sentera de  la  situation  de  la  Société  ;-f-  quç^la  cinquième 
s'occupe  du  compte  définitif  de  reinpjoi  de  la,  réçoltçde 
4857,  constate  que  les  versements  sociaux  ont  été  effec- 
tués par  chacun  de^  sociétaires ,  ajourne  la  question  de 
radmission  d'un  npuvel  associé,  invite  le  gérant  à  étudier 
d'une  maniée  toute  particulière  la  question  ^e  la  distil- 
lerie des  mélasses  et  des  betteraves,  et  entend  les  rensei- 
gnemenls  qu'il  donne  sur  le  rendement  des  diversciç  pièces 
de  terre  §n  topinambours  ; 

>  J^ttendu  que  les  délibérations,  qui  toutes,  oiàt  été  prises 
5ur  le  rapport  et  conformément  aux  conclusions 4u:  rapport 
du  gérant,  n'ont  en  rien  gêné  son  admini&ti'ation  ;  q^u'après 
ces  délibérations,  le  gérant  restait  oOmmeauparavat^t  libre 
de  n'y  donner  aucu^ie  suite ,  s'il  :4?royait  que  les  re$fto»^^s 
de  la  Société  étalent  insuffisantes  pour  faire  Cs^ce^^w. dé- 
penses que  leur  mise  à  exécutioift:  exigerait.»  ou  s?il  çonç^r- 
vait  quelque  crainte  sur  l'efficacité  de  la  mesure  autarfeée; 
qu'à  la  date  du  43  avril  4858,  jour  où  Tofta  défûdé  Vadw^t 
d'un  appareil  champonnois,d'une  locomobile  à  vapeui?etd*un 
rectificateur  d'pcQasioft^  lesassociéi?  cqmi*an4ita W^  îgno- 


813) 
raient  la  position  de  la  société-»  puisqu'ils  demandaient  alors 
au  gçrawl  un  état  des  dépïcnses  probables  pour  1858^  et  que 
ce  n'est  que  Iprs  de  la  réunion  du  20  diécembre  1858  qu'on 
décide  qu'on  se  réunira  au  inois  de  janvier  1859,  pour 
examiner  le  bilan  de  la  situation  de  la  Société  ;  qu'ainsi 
tombent  toutes  les  critique^  dont  ces  délibérations  opt  été 
l'objet  j 

*  En  ce  qui  concerne  les  avantages  stipulés  par  l'art.  32 
dQ  l'acte  de  Société  au  profit  dp  de  Roçquigny  et  çju*on  a 
qualifiés  ayantages  léonins. 

»  Attendu  que  l'firticle  précité  attribua  à  (Je  Ro(jqi|ignj[ 
la  propriété  dei^  çpnstructiou^  qui  serait  étabUçp  çw  de^ 
terraifls  dwtU  oopiçerve  Ja  propriété,  §W)^  indefnnUé^lore 
de  la  dissolution  de  la  société  arrivée  par  quelque  qiuçe 
que  qe  soitj  qu'il  est  convenu  néaniuoips  quq  cette  ejause 
ne  s'applique  pas  aux  chaudières  et  autres  fiçcessoir^s  de- 
venus iowaeublea  par  destination  j.  q^e>  ces.  avani^es  lui 
sont  accordés  par  163  coa^i|QçJé8  i  titr$  dQ' coropeus^tion 
de  l'abaadpn  qu'il  a  bien  voulu  fwe  dQ  sa  pari,  de  béné- 
fices sur  la  mgitié  de  sa  miae^,  qui  n'a,  droit  qu'aube 
intérêts; 

»  Attendu  qu'auoune  dÂspoaHion  dQ  IqI  n'i^n^erdit  au^cas- 
soci^  cQmîuauditair^s  d'fissur^r  uu  avantage!  ^Vwd'eui^ 
pour  quelque  motif  que  ce  ^ojll  ;  que,  dan^  l'espèce,  l^s 
avantagea  accordés  à. .  d^  Rocquigny  §e  justifient  par  sa  po- 
sition partioulière  dm^  la  Société;  qu'en  effe(.les  cons- 
tructions nécessaires  à  l'établi^^ment  devant  êtrq  élevées 
sur  des  tenrain^  qu41  louait  à  la  Société»  on  oopiprend  qu'à 
raison  de  c^tte  circonstance  on  ait  ptipulé  que  les  cf^m- 
tructions  lui  resteraient  à  la  dissolution  de  lu  Société  çaus 
indemnité  ;  qu'à  la  date  de  l'acte  social,  on  ue  pouvait  pas 
)révoir  quei  la  Société,  qui  devait  avoir  une  durée  de  vingt 
ms,  serait  dissoute  après  àm%  aps  d'eiistence»  et  qu6  les 
:onstraetiona  qu'on  abandonnerait  ain$i  auraient  auc;ore 
me  assez  grande  valeur,  lorsqu'elles  deviendr^i^t  1^  pro- 
priété de  de  Rocquigny  ;  t..  que  d'^iUew^  il  oSVait ,  en 
ompens^tion,  l'abandon  de  sa  part  d^  bénéfices  sur  la 
loitié  de  sa  mise  ;  que  cet  abandon  était  sérieu)ç  et  pQU- 


(314) 

vail,  si  l'espoir  que  les  associés  avaient  conçu  s'était  réa- 
lisé, c'est-à-dire  si  la  Société  avait  prospéré,  procurer  à  la 
Société  un  avantage  en  rapport  avec  l'abandon  qu'elle  fai- 
sait à  de  Rocquigny  des  constructions  dont  s'agît  ;  qu'on 
ne  peut  donc,  dans  ces  circonstances,  imputer  à  ce  der- 
nier de  s'être  fait  assurer  des  avantages  exagérés  ; 

»  Attendu  que  si,  en  raison  du  peu  de  durée  de  la  So- 
ciété, Ton  pouvait  jusqu'à  un  certain  point  concevoir  que 
les  créanciers  élevassent  la  prétention  de  faire  annuler  les 
avantages  constitués  au  profit  de  de  Rocquigny,  il  est  im- 
possible d'admettre  que  ces  avantages  constituent  une  sti- 
pulation incompatible  avec  la  commandite,  de  nature  à 
donner  à  la  Société  Delbetz  et  (?*  le  caractère  d'une  Société 
en  nom  collectif; 

»  En  ce  qui  touche  les  faits  d'immixtion  imputés  à  la  plu- 
part des  associés  commanditaires  : 

»  Attendu  que  s'il  est  constant  que  de  Rocquigny,  La- 
môtïe  ètDutertrè  ont  autorisé  Délbetz,  le  10  décembre  1858, 
à  emprunter  de  Lebeau  et  C*eune  somme  dé  6,500  fr.  pour 
payer  une  traité  de  semblable  somme,  tirée  par  Charopon- 
nois,  à  recouvrer  sur  les  premiers  fonds  à  provenir  de  la 
distillerie;  que  s'il  eàt  également  établi  que  le  SI  décem- 
bre 1858,  les  mêmes  associés  commanditaires  ont  autorisé 
Delbetz  à  empriinter  de  la  maison  Lebeau  une  somme  de 
9,275  fr.  pour  les  besoins  de  la  Société,  à  la  condition  de 
recevoir  cette  somme  sur  les  produits  de  la  distillerie ,  ces 
autorisations  n'ont  été  données  au  gérant  qu'en  exécution 
d'une  stipulation  de  l'acte  de  Société  et  pour  donner  au  gé- 
rant la  capacité  de  faire  ces  emprunts,  que  ledit  acte  lui 
interdisait  de  faire  seul  sans  l'assentiment  des  commandi- 
taires ;  que  ces  autorisations,  données  en  de  pareilles  cir- 
constances et  dans  ces  termes,  n'impliquent  en  aucune  ma- 
nière immixtion  dans  la  gestion  de  la  Société,  et  ne  sau- 
raient avoir  pour  effet  d'engager  la  responsabilité  des 
commanditaires. 
»  En  ce  qui  touche  Leborgne  > 

»  Attendu  qu'aucun  acte  d'immixtion  personnel  ne  lu» 
est  imputé; 


(315) 
»  Attendu  que  les  syndics  de  la  faillite  Delbétz  el  C** 

offrent  de  prouver  par  témoins  :  1«>  que  Lamotte  père  s'est 
mis  en  rapport  avec  des  tiers  pour  la  vente  des  alfcools 
provenant  de  la  distillation  de  la  fabrique  de  la  récolte  de 
1858  ;  2»  que  de  Rocquigny,  Duterire  et  Lamotte  se  sont 
mis  en  rapport  avec  des  tiers  pour  la  négociation  de  prêts 
faits  à  la  Société  ;  3^  que  Dutértre  a  accompagné  Delbetz 
dans  plusieurs  ventes  mobilières  à  la  fin  de  Tannée  der- 
nière;—que  c'était  lui  qui  portait  les  enchères,  et  qu'aus- 
sitôt après  l'adjudication,  îï  déclarait  cominand  au  profit 
de  Delbetï  qui  se  trouvait  à  ses  côtés  ; 

»  Attendu,  en  ce  qui  concerne  le  premier  fait,  que  ce 
fait  est  trop  vague  pour  que  la  preuve  en  puisse  être  auto- 
risée; qu'il  ne  suffit  pas^  eii  effet,  d'drticuler  vaguement 
que  Lamotte  s'est  mis  en  rafiport  avec  dès  tiers  pour  la 
vente  des  alcools  de  la  fabrique  de  4858;  qu'il  faut  encore 
énoncer  le  temps,  le  lieu  et  les  diverses  circonstahces  qui 
ont  accompagne  soii  intervention;  car  s'il  en  était  kutre- 
ment,  on  mettrait  Lamotte  dans  l'impossibilité  dé  Mte  la 
la  preuve  contraire  ;  que  le  fait  tel  qu'il  est  énoncé  n^est 
donc  point  pertinent  ; 

>  Sur  le  second  fait  : 

»  Attendu  que  ce  fait  est  évidemment  relatif  aux  prêts 
autorisés  avec  la  maison  Lebeau  ; 

i>  Attendu  qu'il  résulte  des  éléments  de  la  cause  que  la 
maison  Lebeau  a  refusé  de  contracter  avec  la  Compagnie 
Delbetz  ;  que  les  emprunts  réalisés  par  Delbetz  ont  été  con- 
tractés personnellement  par  Lamotte  père,  qui  lui-même  a 
emprunté  de  la  maison  Lebeau  pareille  somme  ;  qu'un  as- 
socié commanditaire  a  incontestablement  le  droit,  sans 
engager  sa  responsabilité,  de  prêter  à  la  Société  dont  il 
!ait  partie  ;  qu'il  est  donc  dès  â  présent  constant  que  de 
îocquîgriy,  Dutértre  et  Lamotte  ne  se  sont  pas  mis  en 
apport  avec  la  maison  Lebeau  pour  contracter  ces  erii- 
)runts  ;  qu'il  n'y  a  donc  pas  lieu  d'autoriser  ce  fait  démenti 
»ar  les  éléments  de  la  cause  ; 

»  Attendu  que  le  3®  fait  est  trop  invraisemblable  pour  que 
a  preuve  en  puisse  être  autoriséei;  qu'on  ne  comprendrait  pas 


(316) 

en  effet  que  Dutertre  ait,  enchéri  pour  le  compte  de  Del- 
Jbetz  qui  se  trouvait  à  ses  côtés  ;  que  si  Delbetz;  n'avait  pas 
les  oonuaissançes  nécessaires  pour  faire  les  acquisitions 
qu'il  projetait,  il  pouvait  réclamer  les  conseils  de  Duterlre, 
sans  avoir  besoin  de  réclamer  son  intervention  pour 
enchérir  :  .  , 
I  attendu  d'ailleurs  que  ce  fait  est  trop  injsignîfiant  pour 

3 n'en  le  supposant  prouvé,  il  puisse  constituer  un  lait 
'irninixtion  dans  la  gérance  et  entraîner  contre  son  au- 
teur Une  re^ppnsî^biliié  indéfinie;  qu'en  ftËfeit  les  tiers,  en 
voyant  Dutertre  surenchérir  pour  le  cpnipte  de  Delheta  qui 
était  présent,  n'çint  pu  oroire  qu'il  stipulait  ^au  nom  de  la 
Çppietéf  çomime. associé  solidaire,  ^t  compter, sur  sa  solva- 
hilUéper^onnelle;^  que,  sous  ce  doublée  rapport;  le  fejt  ar- 
ticulé.n'^^^. pas  pertinent,  et  l^=pre(vi,Ye  n'en  pei,it  dèsrlors 

»  En  (je  qui  cqncernQ.la  demande  de  Delbetz  tendant  à 
pbtqnir  q\i^  rimpprta^ce  dçs  emprunt^  contractés  chez  Le- 
bea^  i^t  G^e^  Q\  (jes  instiîivnents  ?iGhçtés  en  vertu  d'unman- 
iàat  qui  lui  9  4té  donné  par  les  commanditaires,  soit  dis- 
traite du  passif  de  la  faillite  : 

»  Attendu  que  de  ce  qui  précède  il  ré^i^lte  :  1^  que  Tacle 

de  Society,  niei  oontiejç^t  aucune  ciaus^e^  incompatible  avec 

les  Sociétés  en  commandite  ;  qv^'en  çQnséque^oe^  la  Société 
Delbetz  et  0^®  est  bien  une  Société  en  qoinnîandîte  admi- 
nistrée par  nn  gérant  seul  indéfiniment  responsable  ;  2° 
que  l'es  autorisations  qui  ont  été  données  au  gérant  par  Jçs 
commanditaires,  en  vertu  dqs  clauses  des  statuts  delà  So- 
ciété, A  Teffet  dé  contracter  les  eniprunts  et  d'acheter  les 
instruments  4bnt  s'agit,  ne  constituent  pas  de  leur  part  des 
faits  d'îmmîjtîbn  dans  la  gérance  ;  que  ces  autorisations 
ne  robligeçiîent  pas  à  en  fe ire  usage  ;  qu'il  était  aoinpléte- 
ment  libre  d'agir  suivant  sa  propre  impulsion  et  de  daa- 
ber  â  ces  autorisations  la  suite  qu'il  jugeajt  utile  au^  iû* 
térêts  d§  la  Société  qu'il  administrait,  ;  qu'il  pst  donc  mal 
ITondé  en  sa  demande  ; 

»  Qu'eijs,upp,sattt  ^^ême;.g^lî  Ja  Société  n^ç:  cçoptituai, 
en  raison   des  slipulalions>  ftuç  l>çte  dc^  ^Qçjétp  nç  ren- 


(317) 

ferrtie^ïu'une?  Société  en  ïiom  colleeiif,  cette  transfontlàtioft 
de  la  Société  rendrait  bien  tous  les  associés  responsables, 
mais  ne  le  déchargerait  pas,  lui  Delbetz,  de  tout  ou  partie 
de  cette  responsabilité  pour  la  faire  exclusivement  support 
ter  par  ses  coassociés; 

Par  ces  motifs,  le  Tribunal  déclare  les  syndics  de  la  fail^ 
lile  Delbetz  non  rec0yables  à  faire  la  preuve  qu'ils  ont  of- 
ferte, et  statuant  entre  toutes  les  parties  en  éause,  déclare 
les  demandeurs  mal  fondés  en  leur  demande,  les  en  dé- 
boule «t  les  condamne  chacun  à  un  quart  des  dépens  ; 

»  jûécl^'e  Delbefô  non  recevabte  et  mal  fondé  en  s@d 
prétentions  ; 

»  Dit  que  la  partie  des  dépens  afférente  aisx  syndics  eera 
employée  en  frais  de  syndicat.  » 

Appd  par  Ghampbnn'Àis  et  àntl'eë.  Ilr^si^v  dlsait-^on 

four  eux  devant  la  Omir^  de  T^cte  d^  S^û^eiiété  àni^  mat 
857  et  dé  Fexécntion  (|a'il  a  n^jf  qde  les  |[»réteiidus<MOïn^ 
manditaires  étaient  en  réalité  des  associés  en  nonl  ikAX^t- 
tif,  ayant  géré  et  administré  dans  leur  intérêt  et  passibles, 
tant  en  droit  qu'en  fait,  des  conséquences @oit  delà  n^iture 
mêrtîè  de  la  Société,  soit  de  rimmixlfon  forcée  qu'^entraî- 
nail  ôette  Société.  Ëh  effet,  les  commânditmres  ayant  seuls 
apporté  tous  les  fonds  (le  sieur  Delbetz,  désigné  comme  gé- 
raïtt,  n'apportait  que  soh  iùYÎiistf iô)  ,  se  sont  altrfbtiè  îâ 
partie  importante  de  radmlnistràliôii  ;  ils  se  sont  réservé 
le  di\)ilile  recôtinàîlre  le  besoin  des  appels  de  fôttdè.  Celui 
d'augmenter  lé  bôpitâl  social  V  Mstf  ont  ki^%i  au  gêi^tttque 
la  dîsï«)nibiWté'déS^,«OOïi*;^,  ils6M^^^^^  àbsotbépôur 
eux  h  «ottplélô  direct Jdfl'  diB  Y^mife  cm^flii  6tit  défeiidtt  au 
gérant  nôn-^sêfelettiènt  a^émjfA^ufitè^,  d*hypbthéqttôi^,  â''âîîé- 
ner  les  immeuhlts,  mais  qUô^tlréant  une  oislîBerie  considé- 
rable^ ilslui  ont. ^ême  défendu  de  faire  aahat  d'instruments 
ou  machines  d'une  yatçur  de  3,ÔÔ0  fr<,  et^'aUénerauçim 
meuble  de  Tactil  social,  jp^roduits-  exceptés^  sans  l  autorisa- 
tion écrite  des  commanditaires.  .  . ,   .  ^  ^ 

Les  commai]iditaires  géraient  et  idcçiii^istraîent  telleinent 
par  eux-mêmes,  qu'ans  avaient  tous  les  mois  une  réunion 
obligatoire  en  dehors  des  réiuniop  ejxçeptionneUes  qui  ppu- 
vaieii£  encore  avoir  lieu  ;  mi%  unpç^ai^t  au  géranksous 
sa  responsabilité  personnelle,  de  ne  pas  s'écarter  de  ces 
délibérations  «luxqueib^  le  gérants  ne  pouvait  d'ailleurs 


\ 


(348) 

prendre  part  avec  voix^  délibérative  ;  qu'Us  vont  méime  jus- 
qu'à se  réserver  le  droit  de  donner  la  liquidation  de  la  So- 
ciété, en  cas  de  dissolution,  aux  commanditaires. 

D'ailleurs  les  Çommatidltàîres,  qui  avaient  fait  connaître 
aux  tiers  la  position  qu'ils  faisaient  à  leur  gérant,  ont  en 
fait  géré  et  administré  comme  ils  s'en  étaient  réservé  le 
droit.  i   -  ■•'  ' 

Et  l'on  citait  les  faits  4nuraérés  au  jugement. 

La  Cour  a  confirmé.» . . 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
en  donnant  acte  à  Delbetz  de  ce  qu'il  déclare  s'en-  rappor- 
ter à  justice,  met  l'appellation  au  néant,  confirme  le  juge- 
ment^ ordonne  qu'il  sortira  effet;  condamne  les  appe- 
lants, etc. 

Du  20  ju^.  1860.  i^  ebamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon, 
1er  prési<l.;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,  A^  avoc.*gén.  ; 
avoc;.,  Mes  Dubem,  Gpquelin  etiTalon;  avou.,  M©»  I^voix 
et  Huret. 


■•i«»»i"WW» 


SOCIÉTÉ  EN  COMMANDITE.  —  immixtion.  —  conseil  de 

■  SURVEILLANCE ,  —  DÉLIBÉRATIONS    INTÉRIEURES.  —  RELA- 
TIONS AVEC  LÉS  TIERS. 

Le  conseil  de  surveillance  constitué  par  les  statuts  d'une 
.  Société  en  comm(fiidite  p^ut,  sans  faire  encourir  à  ses 

^ernbres,  vis-à-vù  des  Mers,  \  la  responsabilité  de  Vim- 
,  mùi^on ,  approuver  ou  autoriser  des  actes  de  la  gestion 

sociale. ,  \comme  cendre  toute .  <$pèce  de  délibératim, 
.pourvu  qu\il  n'y  a^t  auçu^  relation  directe  ou  indir^e 
:  de  ce  çons^^l,  avecîes  tier^,.(Ç,:(^qxn*9^vi.  37  et28.).(l). 

i  i  (Soyez  et  C»*  C.  Bataille  et  autres .  ) 

*  La  Société  F.  Dumoht  etC^e^  fabricants  dé  sucre  à  Roost- 
Wàrendin,  déclarée  en  faillite,  avait  été  constituée  en  com- 
mandite, avec  un  conseil  de  surveillance  qui  avait,  dans 
maintes  délibérations,  prescrit  où  autorisé  des  mesurés  à 

1)rendre,  des  achats  ou  des  ventes  à  faire  par  le  gérant  de 
a  Société.       ' 

La  Compagnie  de'PEscàrpelle,  Soyez  el!  C»®,  actionna  les 
membres  de  ce  conseil  en  responsanilité  pqur  imrnîttion 

(1).  Voy.  raffàire  précédente  et  la  note  qpii  Taècompagne. 


(319) 

dans  la  gestion^  responsabilité  prévue  et  définie  par  les  art. 
27et28G.com. 

Le  Tribunal  de  Douai,  par  un  jugement  dont  il  n'a  pas 
été  fait  appel  et  aujourd'hui  passé  en  force  de  chose  jugée, 
a  prononcé  comme  il  soit  sur  les  prétentions  de  la  Com- 
pagnie : 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  les  actes  interdits  par  la  loi  au  com- 
manditaire ne  sont  pas  ceux  par  lesquels  celui-ci  prêterait 
au  gérant  dans  l'intérêt  commun,  le  concours  de  son  expé- 
rience et  de  ses  lumières  par  une  coopération  purement 
intérieure  et  en  dehors  de  toutes  relations  avec  les  tiers  ; 

»  Qu'il  ne  peut  être  interdit,  nota,mment  au  conseil  de 
surveillance,  de  couvrir,  vis-à-vis  de  la  Société,  soit  de  son 
approbation,  soit  de  son  autorisation^  les  actes  consommés 
par  le  gérant  où  ceux  qu'il  s'agirait  de  résoudre; 
»  Que  d'ailleurs  délibérer  n'est  pas  agir  ; 
»  Que  tes  conseils,  autoWsàtions  ou  décisions  dont  s'agit, 
quels  que  soient  les  termes  par  lesquels  ils  soiit  exprimés 
dans  les  procès-verbaux  de  délibérations,  n'étaient  nulle- 
ment destinés  à  être  portés  à  la  connaissance  des  tiers  ni  à 
influer  sur  leurs  dispositions  vis-àTvis  de  la  Société;     ^ 

»  Qu'ils  ne  pouvaient  davsntage  annuler  ni  restreindre 
la  liberté  d'action  qui  appartenait  au  gérant,  lequel,  seul, 
traitait  avec  les  tiers  comme  unique  représentant  de  ladite 
Société  ;  qu'aucune  relation  directe  ou  indirecte  du  conseil 
de  surveillance  avec  les  tiers  ne  parait  pas  avoir  eu  poior 
eflet  de  déplacer  les  pouvoirs  et  la  responsabilité  attachés 
aux  foactions  du  gérant,  ni  de  faire  assumer  aux  membres 
dudit  conseil  uÉ&solidarité  que  ne  comportiut  pas  la  nature 
de  leurs  fonctions  ; 

»  Que  les  demandeurs  n'ont  pu  avoir  juste  sujet  de 
compter  sur  la  responsabilité  ou  la  solidarité  dés  défen- 
deurs, puisque  rien  n'établit  que  ceux-ci,  soit  en  leur  nom, 
soit  en  vertu  de  procurations,  se  soient  jamais  mis,  par 
aucun  acte  extérieur,  en  contact  avec  les  tiers  pour  les  af- 
faires sociales  ; 

>  Qu'il  n^existe  donc  dans  la  cause  ni  contrat  ni  qùasi- 
contrat  par  l'effet  duquel  se  serait  formé,  entre  les  as&ignés 


(320) 

et  les  demandeurs,  lejien  de  droit  SW  lequel  se  foûde  les 
dispositions  des  art.  27  et  28  C.  com«  ; 

9  Considérant^  en  résumé  ,  ^u'il  n'apparaît  pa6  en  la 
t^use  que  les  assises  aient  fait  aucun  acte  de  gestion  ni 
qu'ils  aient  été  employés,  même  en  vertu  de  procuration, 
pour  les  affaires  de  la  Sôôiélé  ; 

Par  côs  motifs,  le,  Tribunal  jugeant  commercialeinent, 
déclara  les  deimandew  mal  fondés  en  leurs  fins,  et  conclu- 
àions,  les  en  déboute  et  les  condamné  aux  dépens,  j» 

Du^î  mars  1860. Trîb.  deDodai.  iPréiid.,  M.  Rossignol; 
avocJ,  M«8  Tàlott,  Ed.  Letti&irè ,  Delebecque ,  d'Esdeibes, 
fiupoiil,  Eni.  "Flattiàttt,  Legt^fld^  Mertin  et  Em.  Lewaîre. 


SOCIÉTÉ.    ^  1^FA0T  I>E  PUBLICATION .  —  mJltlTÉ.  — ^  ACTE 

MODIFXÇATIF,  *—  VALIDATION. 

LupubUikiiiùnéeVaçle  modificaiif  d'une  Société  dont  Uade 
constitutif  n\a  fiomt  été  publié f  ^t  régulier  et  suf^ant 
pour  éviter  ta  nullité  de  tart.  4$  C.  com,,  si  d^aitleurs 
etle  a  eiè  faite  en  contenant  îoulés  tés  énonciàtiôns  pireS' 
crites  par  Vàft.  43  C,  ôorti.y  (t  si  cette  publitâPiùn  a  m 

•  lieu  ûVdHt  toute  demandé  en  nùltiié  mur  défaut  dé  pu- 
bUtatim.  {G.  tHM.,  art.  4®  el  48.)  (1). 

(Lètîennè  Ù.  fiaîsîelt^.) 

Le  7  octd)ra  1 854,  Gb.  J^rosper  Létienne ,  propriétaire  à 
bouaij,  louait  pour  neuf  années  corisècùtivès  au  éîeulr  Charles 
fioiiay.  màrcbàiid  tâplsèiet,  demeurant  à  Vaiétttfenties,  utte 

mki^êti  tthportattte  dé  èômmewe  teise  à'  Dduat ,  tuè  du 
€Iiâf]fip^FIè^y,  ï^  4.  Le  bail  déSifidmt  de  mm^imieT  ou 
ûë  ëë(lèf  ^»  *âfï»t&  «Q  présent  teit,i  stos  le.  (tonseiHeitiefit 
exprés  et  par  écrit  du  bailleur.  Il  était  de;  plus  expressé- 
.fnent  eonvenu  queM*  Do^ay  aurait  le  droit,  pendant  cinq 
attttées  consécutives,  à  ^arlir  du  jour  du  contrat,  de  devenir 

\i)t,  1*ari^  ^j«Ufe<i847»  ^i  rféèWè  q«e  là  nttlKléd'iilioSwiélé 
mmraèroiakrv  poir  défaut  de  publka^^o^v  ne  saurait  4ire  couTerteà 
i  égaré  des  tiers  intéressés,  ni  par  rexistcncc  nx)toire  de  la  Société,  ni 
hr  sa  dû'réë  de"  ftU  (8.  Y.  tà,  %  SB).  Màî^  ^<i^l  tinhiftft.  Gà*J;Tfef.r) 
juin  1831,  sur  Dojiai  mmot)  (S.  V.  31,  1, 316);  id.  AiaÉQ  juillet  m 


(32i) 

acquéreur  de  rirameublc  présentement  loué,  moyennant  le 
prix  de  28,000  fr.,  moins  le  prix  de  la  machine  à  vapeur 
et  ses  accessoires,  qui  viendrait  en  déduction  sur  les  28 
mille  francs,  payables  comptant,  M.  Létienne  s'obli^eant  et 
obligeant  ses  héritiers,  en  cas  de  décès,  à  consentir  cette 
vente  par  acte  devant  M^  Moreau,  notaire  soussigné  au  bail 
ou  successeur,  au  profit  de  M.  Douay,  à  la  première  de-^ 
mande  de  celui-ci. 

Douay  crut  pouvoir  céder  ces  droits  et  en  fit  son  rapport 
dans  une  Société  en  commandite  Gorroenne,  Douay  et  G^®, 
fondée  à  Valenciennes  le  42  juillet  1856. 

L'acte^sous  seing-privé  ibndant  la  Société  ne  fut  pas 
publié. 

Plus  tard  Gorroenne,  Douay,  Glaisse,  gérants  de  la  So- 
ciété, fiirent  remerciés  de  leurs  soins  ou  révoqués. 

Et  un  acte  modificatif  de  septembre  1859  établit  Baisier, 
Etienne,  gérant.  La  Société  eut  pour  raison  sociale  :  E.Bai- 
sier  et  G^^.  Get  acte  fut  publié  suivant  le  prescrit  des  art. 
42  et  suiv.  G.  com. 

Le  26  septembre  4859,  Baisier,  ès-qualité,  fit  somma- 
tion à  Létienne  de  réaliser  sa  promesse  de  vente  du  7  oc- 
tobre 4854. 

Létienne  répondit  :  Je  ne  connais  et  ne  veux  connaître 
que  Douay. 

Le  Tribunal  de  Douai  accueillit  la  prétention  de  Baisier 
par  le  jugement  suivant,  en  date  du  40  février  4859  : 

JUGEMENT. 

«  Gonsidérant  que  la  publication  de  Facte  modificatif  de 
la  Société  dont  s'agit  contient  toutes  les  énonciations  pres- 
crites par  l'art.  43  G.  com.  ; 

»  Qu'ainsi,  à  partir  de  cette  publication,  le  public  a  été 
légalement  informé  de  l'existence  et  des  conditions  éven- 
tuelles de  la  Société  ; 

»  Que  ladite  publication,  bien  que  faîte  tardivement  et 
après  la  quinzaine  de  la  date  de  l'acte  par  lequel  la  Société 
s'était  originairement  constituée,  n'en  est  pas  moins  valable, 
alors  qu'elle  a  eu  lieu  avant  toute  demande  en  nullité  pour 
défaut  de  publication  ; 

»  Gonsidérant  que  le  gérant  représente  la  Société,  en 
exerce  tous  les  droits  et  actions,  et  que  le  droit  d'achat  qui 

TOME  xviii.  24 


(322) 

appartiendrait  à  la  Société  peut,  en  conséquence,  être 
exercé  en  son  nom  par  le  gérant,  sauf  les  restrictions  et 
conditions  qui  résulteraient  de  la  convention  sociale  ; 

>  Considérant  qu'à  la  suite  de  la  convention  de  bail,  en 
forme -authentique,  à  la  date  du  7  octobre  1854,  il  a  été 
expressément  convenu  que  Douay  aurait  le  droit,  pendant 
cinq  années  consécutives,  de  devenir  acquéreur  de  Tira- 
raeuble  loué,  moyennant  28,000  fr.  ; 

»  Que  ce  droit  acquis  dès  ce  moment  par  Douay  était  ces- 
sible et  aliénable  par  celui-ci  au  même  titre  que  les  autres 
droits  et  actions  qu'il  possédait  in  bonis,  et  qu'il  n'était  pas 
exclusivement  attaché  à  sa  personne  ; 

»  Considérant  que  Douay  a  apporté  à  la  Société  les  droits 
au  bail  et  à  l'achat  éventuel  de  l'immeuble  dont  s'agit  ; 

»  Que  par  exploit  en  date,  à  Douai,  du  26  septembre 
4859,  le  gérant  de  la  Société  a  notifié  à  Létienne  qu'il 
avait  litres,  pouvoir  et  qualité  pour  procéder  à  la  réalisa- 
tion de  la  promesse  de  vente  sus-rappelée,  qu'il  entendait 
acheter  l'immeuble  et  fait  offre  à  deniers  découverts  du 
prix  convenu,  avec  sommation  de  passer  contrat  ; 

»  Considérant  que  les  conventions  légalement  formées 
tiennent  lieu  de  loi  entre  les  parties  ; 

Par  ces  motifs,  le  Tribunal  dit  Baisier  ès-qualités  recc- 
ble  et  fondé  en  son  action  ; 

»  Condamne  le  défendeur  à  réaliser,  dans  les  trois  jours 
de  la  signification  du  présent  jugement,  la  promesse  de 
vente  dont  s'agit  par  contrat,  soit  devant  M^  Moreau,  no- 
taire à  Douai,  soit  devant  tel  autre  notaire  à  son  choix, 
transférer  au  demandeur  ès-qualité  l'immeuble  quitte  et 
libre  d'hypothèques,  moyennant  le  prix  de  28,000  fr.,  et 
sous  les  autres  conditions  convenues  ;  faute  de  quoi  le  pré- 
sent jugement  en  tiendra  lieu  ; 

j  Condamne  le  défendeur  aux  dépens.  i> 

Appel  par  Létienne. 

Au  soutien  de  l'appel  on  disait  :  Il  importe  d'abord  de 
bien  caractériser  l'acte  du  7  octobre  4854,  de  bien  fixer 
l'intention  des  parties.  Le  sens  des  termes  n'est  point  équi- 
voque. Il  ne  s'agit  pas  de  savoir  si  une  promesse  de  vente 
peut  en  principe  être  aliénable  et  cessible  :  cela  ne  saurait 


(323) 

être  utilement  contesté  ;  mais  de  savoir  si,  au  cas  particu- 
lier, la  stipulation  n'était  pas  particulièrement  réservée  à 
Douay,  cl  si  tout  autre  n'était  pas  repoussé  par  M.  Létienne 
dans  Tespritde  la  convention  (art.  4156,  4158,  1162  G. 
Nap.).  L'on  discutait  alors  les  divers  articles  du  bail  et  le 
règlement  fait  au  cas  de  décès  pour  l'exécution  de  la  pro- 
messe de  vente. 

Puis  sub^idiairement,  à  supposer,  disait-on,  que  la  pro- 
messe de  vente  cessible  d'une  façon  générale  ne  fût  pas 
ici  uniqemenl  personnelle  à  Douay, ,  comment  Douay  l'a-t-il 
cédée  ?  A-t-il  fait  un  acte  obligatoire  pour  Létienne?  ou 
bien  la  cession  est-elle  nulle?  et  dès-lors  est-il  iiTece- 
vable? 

Douay  a  cédé  ses  droits  à  une  Société  en  commandite 
des  logements  du  Nord  de  la  France ,  par  acte  sous  seing- 
privé  non  enregistré,  en  juillet  1 856,  et  la  Société  s'est  cons- 
tituée à  la  date  du  12  juillet  1856,  sous  la  raison  sociale  : 
Corroenne,  Douay  et  Ù^.  Cet  acte  de  société  n'a  point  été 
publié.  Dans  son  rapport  social,  Douay  comprend  en  cet 
acte  ses  droits  à  l'achat  pour  28,000  fr.  d'une  maison  sise 
à  Douai,  rue  duChamp-Fleury,  n®  4,  ancienne  filature.  Plus 
tard,  le  18  septembre  1859,  Baisier  prend  la  place  de  Douai 
et  Corroenne  est  renvoyé  delà  Société. 

La  raison  sociale  devient  :  E.  Baisier  et  C»e.  Cet  acte  mo- 
dificatif  de  la  Société  fut,  comme  de  droit,  publié  par  ex- 
trait, et  Baisier  fit  sommation  de  réaliser  la  promesse  du  26 
septembre  4859.  Que  nous  importe  Baisier,  disait-on  pour 
l'appelant  ;  nous  ne  pouvons  le  connaître.  L'art.  42  G. 
Com.  est  formel.  Il  s'agit  de  la  Société  formée  le  42  juillet 
4856,  dont  Baisier  n'est  que  le  continuateur.  Or,  cette  So- 
ciété est  nulle,  nulle  de  toute  nullité  ;  aucun  acte  n'a  pu 
la  faire  revivre.  La  publication  de  l'acte  modificatif  Baisier 
et  C»e  ne  saurait  donner  la  vie  à  l'acte  Corroenne,  Douay  et 
C»e.  La  nullité  est  donc  acquise.  Et  on  le  juge  non  pas  seu- 
lement entre  les  contractants  les  uns  contre  les  autres, 
mais  aussi  au  profit  des  créanciers  personnels  de  l'un  des 
associés.  Enfin,  une  jurisprudence  imposante  a  consacré  la 
vérité  que  cette  nulhté  ne  saurait  être  couverte,  même  par 
l'exécution. 

Or,  le  Tribunal  juge  que  Ja  publication  de  l'acte  modi- 
ficatif de  la  Société  ,  contenant  toutes  les  énumérations 
prescrites  par  l'art.  43  C.  com.,  cette  publication,  bien 
que  tardivement  faite,  rend  la  vie  à  l'acte  par  leguel  la  So- 
ciété s'était  originairement  constituée.  Ces  principes  ne 


(324) 

peuvent  être  consacrés  par  arrêt  :  ils  sont  contraires  au 
droit. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
met  rappelïation  au  néant,  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Condamne  l'appelant,  etc. 

Du  25  juillet  1860.  l^e  chamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon, 
ler  présid.  ;  minist.  publ.,  M.  Morcrette  ,  1er  avoc.-gén.  ; 
avoc.,  M«»  Em.  Flamant  et  Legrand;  avou.,  U^  Dussalian 
et  Debeaumont. 


LIVRES  DE  COMMERCE.  —  communication  et  repré- 
sentation. —  FAILLITE.  —  DOCUMENTS.  —  SYNDIC.  — 
CRÉANCIER. 

Le  créancier  d'um  faillite  ne  peut,  en  s' opposant  à  Vad- 
mimon  d'un  autre  créancier  au  passif,  demander  la 
communication  (1)  de  tous  les  livres  et  registres  de  ce 
dernier,  dans  le  but  de  vérifier  la  créance  qu'il  conteste; 
il  doit  indiquer  les  documents  dont  il  entend  particuliè- 
remefiit  se  prévaloir  à  V appui  de  ses  prétentions. 

Les  syndics  d'une  faillite  doivent,  en  appel,  communication 
aux  créanciers  qui  auraient  négligé  de  la  demander  plus 
tôty  de  tous  les  documents  qui  concernent  la  faillite  et 
dont  ils  sont  dépositaires.  (C.  com.,  art.  14  et  15.) 

(Bocquet  frères  C.  Denfertet  syndic Dewaleyne  frères.) 

Dans  une  faillite  Dewaleyne  frères,  les  sieurs  Denfert 
frères  ont  demandé  d'être  admis  au  passif  de  la  faillite 
pour  une  somme  de  plus  de  100  mille  francs.  Bocquet 
frères,  créanciers  déjà:  admis,  ont  élevé  dès  contestations. 

(1)  On  sait  que  la  communication  diffère  de  la  représentation  en  ce 

3ue,  par  la  première,  le  commerçant  se  dessaisit  de  ses  livres  en  faveur 
es  parties  intéressées,  pour  être  examinés  en  entier,  et  que,  par  la  se- 
conoe,  il  ne  se  dessaisit  pas,  il  les  représente  seulement,  pour  qu'on 
puisse  en  extraire  ce  qui  concerne  le  diftérend. 

Les  Tribunaux  ont,  du  reste,  un  pouvoir  discrétionnaire  pour  admet- 
tre ou  refuser  la  représentation  des  livres.  —  Jurisp.  c&nstanie,  —  La 
communication,  au  contraire,  ne  peut  être  ordonnée  que  dans  les  cas 
prévus  par  l'art.  14  C.  com.  (Cass.  25  janv.  1843,  Pal.  Journ.  1843, 
t,  1er  n.  513.  ^ — V.  au  surplus  sur  cette  jurisprud.  :  Tab.  gén.  Gilbert 
et  Devul.y  v»  Livres  de  commerce,  n»  19  et  suiv.  — V.  encore  Bioche, 
vo  Exception,  no  148. 
Consult.  Douai  â5  juin  1851  (Jurisp.  9,  312). 


(325) 

Le  Tribunal  de  commerce  de  Lille,  sur  production  de  bor- 
dereaux par  Denfert  et  après  la  vérification  du  syndic,  a 
prononce  l'admission  de  la  créance. 

Appel  par  Denfert  frères.  Dans  le  cours  de  la  procédure, 
ils  ont  demandé  par  voie  de  sommation  à  avoué,  au  syndic 
Fiévet-Dubrulle,  communication  des  documents  provenant 
de  la  faillite  et  laissés  en  ses  mains.  Ils  ont  encore  demandé 
par  la  même  voie  à  Denfert  frère&  de  leur  communiquer 
»  leurs  livres  de  commerce,  journal,  grand  livre,  livre  de 
»  caisse,  registre  de  copies  de  lettres  et  les  correspondances 
»  de  Dewaleyne  frères ,  les  comptes  de  ventes,  livres  de 
»  factures^  les  reçus  relatifs  aux  envois  de  fonds,  les  accu- 
»  ses  de  réception,  ainsi  que  tous  les  titres,  pièces,  docu- 
»  ments  et  justifications  à  Fappui  de  leur  demande  d'ad- 
»  mission  à  la  faillite  Dewaleyne,  et  notamment ,  disaient- 
»  ils  ,  un  prétendu  transport  Débay ,  un  jugement  de 
»  condamnation  par  eux  obtenu  contre  Dewaleyne  ,  et 
>  Tarrêté  de  compte  qui  en  faisait  Tobjet.  » 

Ni  le  syndic,  ni  Denfert  frères,  n'ont  répondu  aux  som- 
malions.  La  Cour  a  décidé. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  — •       .       .       .       . 

En  ce  qui  touche  le  syndic  : 

Attendu  que  si  les  appelants  ont  négligé  d'abord  de 
prendre  connaissance  des  pièces  mises  à  leur  disposition 
par  le  syndic,  ce  retard  ne  saurait  les  priver  du  droit  de 
réclamer  aujourd'hui  une  communication  qu'ils  croient 
utile  pour  soutenir  leur  appel;  que  le  syndic,  dépositaire 
dans  l'intérêt  de  tous  les  créanciers,  des  documents  relatifs 
à  la  faillite,  ne  pouvait  donc  refuser  de  déférer  à  la  som- 
mation à  lui  faite  par  les  appelants  le  ^0  mars  diernier  ; 

Sur  leurs  conclusions  tendant  à  ce  que  leslivreset  regis- 
tres de  la  maison  Denfert  leur  soient  aussL  communiqués  : 

Attendu  que  cette  demande  n'est  pas  motivée;  qu'ils 
n'indiquent  point  en  effet  les  documents  dont  ils  entendent 
particulièrement  se  prévaloir  à  l'appui  de  lem's  préten- 
tions ;  que  la  généralité  des  termes  de  leurs  conclusions  sur 
ce  chef  les  rend,  quant  à  présent,  irrecevables,  sauf  à 
eux  à  spécifier  ultérieurement  leurs  griefs,  ou  à  la  jus- 
tice à  oï'donner  telle  production  ou  teL  apport  de  pièces 


(326) 

qu'elle  jugera  utiles  à  la    manifestation  de    la  vérité; 

Par  ces  motifs,  la  Cour ; 

Dit  que  Fiévet-DubruUe  est  tenu  de  communiquer  aux 
appelants  les  livres  et  correspondances  des  faillis  avec  les 
frères  Denfert,  les  registres  de  consignation  et  autres  piè- 
ces de  comptabilité,  qui  lui  ont  été  remises  en  sa  qualité 
de  syndic  ; 

Donne  acte  aux  intimés  de  ce  qu'ils  tiennent  à  la  dispo- 
sition des  appelants  les  deux  bordereaux  par  eux  remis  au 
syndic,  ainsi  que  les  pièces  et  comptes  y  annexés  ; 

Déboute  les  appelants  du  surplus  de  leurs  conclusions,  et 
les  condamne  à  la  moitié  des  dépens  de  l'incident,  l'autre 
moitié  restant  à  la  charge  du  syndic. 

Du  42  juin  4860.  i^e  chamb.  Présid.,  M.  de  Moulon;  !« 

Srésid.;  minist.  publ.,  M.  Morcrette,4«'avoc.-gén.;  avoc, 
[e  Merlin  et  Duliem  ;  avou.,   Mes    Lavoix ,    Dussalian  et 
Villette. 


4o  FAILLITE.  —  cessation  de  payement.  —  juridiction 

CORRECTIONNELLE.    —   JURIDICTION    COMMERCIALE,  —  DÉ- 
TOURNEMENT d'effets  DE  LA  FAILLITE. 
2o  ARMES  PROHIBÉES.  —  PISTOLET    DE  POCHE.   —  COUTEAU- 
POIGNARD. 

i^  La  juridiction  correctionnelle  n'est  pas  liée  par  le  juge- 
ment du  Tribunal  de  commerce  qui  a  fixé  la  date  de  la 
cessation  de  payements  d'un  commerçant  failli;  il  lui 
appartient  d'en  apprécier  et  d'en  déterminer  Vé- 
poque  (i). 

Ainsiy  le  jils  d'un  failli  peut  être  puni  de  la  peine  de  vol, 
pour  avoir  détourné  des  effets  appartenant  à  la  faillite, 
sans  avoir  agi  de  complicité  avec  le  failli,  encore  bien 
que  la  déclaration  de  faillite  et  la  fixation  qui  en  a  été 
faite  soient  postérieures  à  ces  détournements,  s'il  est  re- 
connu que  la  cessation  de  payements,  établie  par  la  fuite 
du  failli,  est  antérieure  à  ces  détournements.  (C.  inst. 
crira.,  art.  3;  C.  com.,  art.  437,  594.)  (2). 

(1-2)  V.  sur  ceUe  question  :  Cass.  23  nov.  1827  (J.  Pal.  à  sa  date, 
3«  édit.);  Aix9  août  1837  (J.  Pal.  1837,1.2,  p.  531);  Metz  U mai  1833 
(J.  Pal.  à  sa  date)  ;  Bordeaux  U  janvier  1848  (J.  Pal.  1848,  t.  2,  p.  15), 
et  Cass.  9  août  1851  (J.  Pal.,  t.  2,  1853,  p.  132). 

Consiilt  Delamarre  etLcpoitevin  (Traité  des  Contr.  de  Commis.,  t.  5 , 


(327) 

2o  Les  pistolets  de  poche  et  les  couteaux  en  forme  de  poi- 
gnard sont  des  armes  prohibées ,  (Déclar.  23  mars  1728; 
L.  24  mai  1834;  ord.  23  fév.  1837.)  (1). 

(Marchand.) 

Narcisse-Edouard  Marchand  a  été  poursuivi,  devant  le 
Tribunal  correctionnel  de  Lille,  comme  prévenu  d'avoir  à 
La  Bassée,  en  septembre  1859,  étant  fils  de  Nicolas  Mar- 
chand, failli,  détourné,  diverti  ou  recelé  des  effets  mobi- 
liers appartenant  à  la  faillite ,  sans  avoir  agi  de  complicité 
avec  le  failli,  et  d'avoir,  à  Béthune,  le  25  septembre  1859, 
été  trouvé  porteur  d'armes  prohibées  par  la  loi  ou  par  des 
règlements  d'administration  publique,  —  un  pistolet  de 
poche  et  un  couteau  en  forme  de  poignard. 

Un  jugementdu  2  mai  1860  l'a  condamné  à  un  an  d'em- 
prisonnement, à  La  confiscation  des  armes  prohibées  et 
aux  frais. 

Sur  appel  devant  la  Cqur,  ce  jugement  a  été  en  partie 
réformé  par  l'arrêt  dont  la  teneur  suit  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Donne  acte  au  ministère  public  de  ce  qu'il 
déclare  appeler  à  minimâ  du  jugement  attaqué; 

Statuant  sur  cet  appel  et  sur  celui  interjeté  par  le 
prévenu  ; 

En  ce  qui  touche  le  premier  chef  de  prévention  : 

n«  68  et  suiv.);  Mangin,  t.  1,  p.  362,  n»  169;  Boulay-Paly  (Faill.  et 
Banquer.,  t.  2,  ii*»  481)»  et  Renouard,  t.  2,  p.  450. 

(1)  Aucun  doute  ne  s'élève  plus  dans  la  jurisprudence  sur  la  force  ré- 
glementaire de  la  déclaration  du  23  mars  1728.  Les  pistolets  de  poche, 
pour  lesquels  la  Goar  de  cassation  avait  décidé,  en  présence  du  décret 
du  14  décembre  1810,  qu'il  était  dérogé  à  cette  ordonnance,  Cass.  7 
cet.  et  3nov.  1836  (J.  Pal.  à  leur  date),  sont  définitivement  classés  dans 
les  armes  prohibées  par  Tord,  du  23  fév.  1837,  rendue  dans  la  forme  des 
règlements  d'administration  publique.  —  V.  sur  ce  point  MM.  Chau- 
veau  et  Hélie  (Ti^cor.  C.pén.,  t.  5,  p.  463). 

Sur  les  éléments  caractéristiques  de  cette  arme,  V.  ces  mêmes  au- 
teurs (loc.  cit.)  et  un  arrêt  de  la  Cour  de  Douai,  10  mars  1857  (Jurisp. 
5,  233). 

La  déclaration  de  1728  mentionnait  expressément  les  poipards  et 
les  couteaux  en  forme  de  poignard.  La  jurisprudence  est  d  ailleurs  tixée 
sur  ce  point  que  les  prohibitions  de  la  foi  du  24  mai  1834  et  de  la  dé- 
claration de  1728,  sont  applicables  aux  couteaux-poignards.  V.  Cass. 
15  oct.  1841  (J.  Pal.  1841,  t.  2.  p.  640). 

Sur  la  forme  de  ces  couteaux,  V.  un  arrêt  de  la  Cour  de  Douai  2  oct. 
1852  (Jurisp.  11,  43).  Consult.  aussi  Cass.  5  juillet  1851  (J.  Pal.,  t.  2, 
1851,  p.  151). 


(928) 

Attendu  que  les  juges  de  répression  ont  le  droit  et 
le  devoir  d'apprécier  et  de  déterminer  l'époque  de  la  ces- 
sation des  payements  d'un  négociant  failli  ; 

Que  la  juridiction  correctionnelle  n'est  point  liée  par  le 
jugement  du  Tribunal  de  commerce,  déclaratif  de  la  fail- 
lite j  que  cette  décision  a  été  rendue  dans  un  ordre  d'idées 
et  d'intérêts  différents  ; 

Que  d'ailleurs  le  jugement  déclaratif  de  la  faillite  de  Mar- 
chand père  n'est  pas  représenté  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  l'instruction  et  des  débats  que, 
le  24  septembre  1859,  Marchand  père,  commerçant,  a  pris 
la  fuite  et  a  cessé  ses  payements  ; 

Que  les  détournements  effectués  par  le  prévenu  d'objets 
appartenant  à  la  faillite  ont  eu  lieu  après  la  fuite  de  Mar- 
chand père  et  à  une  époque  où  le  prévenu  connaissait  l'état 
de  faillite  de  son  père; 

Que,  par  suite,  Marchand  fîls  s'est  rendu  coupable  du 
délit  prévu  par  l'art.  594  C.  com.; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

En  ce  qui  touche  le  deuxième  chef  de  prévention  : 

Attendu  qu'il  est  établi,  par  l'instruction  et  par  les  dé- 
bats, que  le  prévenu,  au  moment  de  son  arrestation,  était 
porteur  d'un  pistolet  de  poche  et  d'un  couteau  en  forme 
de  poignard  qui  ont  été  saisis  ; 

Qu'aux  termes  de  la  déclaration  du  23  mars  1728  et  de 
l'ordonnance  du  23  février  1837,  les  pistolets  de  poche  et 
les  couteaux  en  forme  de  poignard  sont  des  armes  pro- 
hibées ; 

Que  le  port  de  ces  armes  constitue  le  délit  prévu  par 
l'art.  1er  de  la  loi  du  24  mai  1834; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges; 

Attendu  qu'il  existe  des  circonstances  atténuantes  en 
faveur  du  prévenu  ; 

Attendu  que>  suivant  l'art.  595  C.  com.,  les  juges  doi- 
vent ordonner  la  réintégration  à  la  masse  des  créanciers 
de  tous  biens,  droits  ou  actions  frauduleusement  sous- 
traits ; 

Que,  de  plus,  les  premiers  juges  ont  omis  d'ordonner 


(329) 

l'affiche  et  la  publication  du  jugemenl  de  condamnation  ; 

Emendant  la  sentence  dont  est  appel  et  statuant  par 
jugement  nouveau  ; 

Déclare  Marchand  fils  coupable  1»  d'avoir,  à  La  Bassée, 
en  septembre  1859,  étant  fils  de  Nicolas-Joseph  Marchand, 
failli,  détourné,  diverti  ou  recelé  des  effets  mobiliers  ap- 
partenant à  la  faillite,  sans  avoir  agi  de  complicité  avec  le 
failli  ; 

2o  D'avoir  à  Bélhune,  le  25  septembre  4859,  été  trouvé 
porteur  d'armes  prohibées  par  la  loi  ou  par  des  règlements 
d'administration  publique  (un  pistolet  de  poche  et  un  cou- 
teau en  forme  de  poignard)  ; 

Pour  réparation,  vu  les  articles  énoncés  dans  le  juge- 
ment dont  est  appel,  et  de  plus  les  art.  463  G.  pén.,  595, 
600C.  com.,  194  G.  inst.  crim.  ; 

Condamne  Marchand  fils  à  la  peine  de  six  mois  d'em- 
prisonnement, prononce  la  confiscation  des  armes  saisies, 
ordonne  la  réintégration  à  la  masse  des  créanciers  deç  biens 
et  droits  frauduleusement  soustraits  ; 

Ordonne  que  le  présent  arrêt  sera  affiché  et  publié  sui- 
vant les  formes  établies  par  l'art.  42  G.  com.,  aux  frais  du 
condamné;  condamne  le  provenu  aux  frais,  etc. 

Du  30  mai  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
minist.  publ.,  M.  Carpenlier,  avoc.-gén.;  avec,  M^  Enï, 
Flamant. 


MINEUR  DE  MOINS  DE  16  ANS.  —  délit.  —  discerne- 
ment.— FRAIS  DE  PROCÉDURE.  —  CONTRAINTE  PAR  CORPS. 

Les  prévenus  de  crimes  ou  délits,  mineurs  de  moins  de  i6 
ans,  ayant  agi  sans  discernement,  doivent  être  condam- 
nés aux  frais  de  la  procédure  (1  ) . 

Mais  ces  frais  ayant  le  caractère  de  réparations  puretnent 
civiles  envers  le  trésor,  la  contrainte  par  corps  ne  peut, 
dans  ce  cas,  être  prononcée  contre  les  mineurs.  (G.  pén.. 


(330) 
art.  52,  66;  C.  Nap.,  art.   2059  et  suiv.,  2064.)  (1). 

(Cousin  et  autres.) 

CiOusin,  Desbuissons,  Marchand  et  Olivier,  tous  quatre 
mineurs  de  moins  de  16  ans,  ont  été  traduits  devant  le 
Tribunal  correctionnel  de  Lille,  comme  prévenus  d'outrages 
publics  et  d'attentats  à  la  pudeur.  Trois  d'entre  eux  ont  été 
condamnés  à  dos  peines  de  correction  pour  avoir  agi  avec 
discernement,  le  quatrième  a  été  acquitté  comme  ayant  agi 
sans  discernement. 

Le  Tribunal  les  a  en  même  temps  condamnés  tous  qua- 
tre par  corps  et  solidairement  aux  frais. 

Sur  appel,  la  Cour  décide  que  tous  quatre  ont  agi  sans 
discernement,  et  réforme  le  jugement  en  ce  qui  touche  la 
contrainte  par  corps. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  — Enadoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 

Attendu  néanmoins  que,  d'après  les  circonstances  de  la 

cause,  il  y  a  lieu  de  décider  que  Marchand,  Desbuissons  et 
Cousin  ont  agi  sans  discernement  ; 

Que  les  quatre  prévenus  doivent  être  condamnés  soli- 
dairement aux  frais  ; 

Mais  attendu  qu'à  tort  les  premiers  juges  ont  ordonné 
l'exécution  par  corps  de  cette  condamnation  contre  Olivier 
et  qu'il  n'échet  pas  de  prononcer  la  contrainte  par  corps 
contre  les  trois  autres  prévenus,  qui  sont  déclarés,  par  la 
Cour  avoir  agi  sans  discernement; 

Qu'en  effet,  si  les  mineurs  âgés  de  moins  de  16  ans, 
ayant  agi  sans  discernement,  sont  condamnés  aux  frais, 
c'est  parce  que^  dans  ce  cas,  les  frais  ont  un  caractère  de 
réparation  purement  civile  envers  le  trésor; 

Que,  par  suite,  les  modes  d'exécution  dictés  par  la  loi 
pour  le  recouvrement  des  condamnations  en  matière  civile 
doivent  seuls  être  appliqués; 

(1)  Doctrine  conf.  Chauveau  et  lïélic.  — Conirà.  Cass.  27  juin  1835, 
cilé  au  Rcpcrt.  Pal.,  v»  Discernement,  n©  53. 

V.,  en  matière  de  contributions  indirectes  (colportage  de  tabacs), 
rarrêt(Dehorgne) Douai  16  décemb.  1842(Jusï).  1 ,  235),  ou  sont  indiques 
deux  autres  arrêts  qui  prononcent  la  contrainte  par  corps.  Mais  com- 
parez Tarrét  (Corrion)  12  janv.  1843  (Jurisp.  1,  232),  conforme  à  l'ar- 
rêt d'aujourd'hui. 


Que  les  art.  2059  et  suiv.  G.  Nap.  ont  déterminé  les  cas 
dans  lesquels  la  contrainte  par  corps  peut  être  prononcée 
en  matière  civile  ; 

Que  l'art.  2064  du  même  Code  dispose  que,  dmis  les 
cas  mêmes  ci-dessus  énoncés,  la  contrainte  par  corps  ne 
peut  être  prononcée  contre  les  mineurs  ; 

Que  Tart.  52  C.  pén.  est  sans  application;  que  cet  ar- 
ticle, placé  au  titre  des  peines  et  des  autres  condamna- 
tions prononcées  pour  crimes  ou  délits,  ne  concerne  que  les 
frais  qui  sont  Taccessoire  et  la  conséquence  de  la  condam- 
nation pénale  et  qui  participent  de  la  nature  de  cette  con- 
damnation ; 

Vu  les  art.  60  C.  pén.  et  194  C.  inst.  crim.  ; 

Emendant  la  sentence  dont  est  appel  et  statuant  par  ju- 
gement nouveau; 

Déclare  Louis-Florent  Olivier  et  Jean-Raptiste  Marchand 
convaincus  d'avoir  commis  des  outrages  publics  à  la  pu- 
deur pour  avoir,  à  Loos,  en  février  4860,  notamment  le 
21  de  ce  mois,  en  présence  de  plusieurs  personnes  etc. 
(Suivent  les  faits.)  ; 

Déclare  Jean-Baptiste  Marchand,  Achille -Gustave  Des- 
buissons et  Louis-Joseph  Cousin,  convaincus  d'attentats  à 
la  pudeur,  tentés  et  consommés  avec  violences  sur  la  per- 
sonne de  Latrinilé^  pour  avoir,  etc.  (suivent  les  fai(s),  avec 
la  circonstance  que  ledit  Lalrinité  était  alors  âgé  de  moins 
de  15  ans; 

Dit  que  les  quatre  prévenus  ont  agi  sans  discernement, 
les  acquitte;  néanmoins  ordonne  que  les  quatre  prévenus 
seront  conduits  dans  une  maison  de  correction  pour  y  être 
élevés  et  détenus,  Olivier  pendant  un  an.  Marchand  pen- 
dant trois  ans.  Desbuissons  pendant  deux  ans,  Cousin  pen- 
dant deux  ans; 

Condamne  les  quatre  prévenus  solidairement  aux  frais 
de  première  instance  et  d'appel  ; 

Dit  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'ordonner  l'exécution  par  corps 
de  cette  condamnation. 

Du  24 avril  1860.  Charab.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 


(332) 

minist,  pjibl.,  M.  Garpcntier,  avoc.-gén.;  avoc,  M^sPel- 
lieux  cl  Emile  Flamant. 


JUGE  D'IlNSTRUGTION.  —  ordonnance  de  renvoi.  —  op- 
position DU  PROCUREUR-GÉNÉRAL.  —  DÉLAI.  —  LOI  DU 
17  JUILLET  1856. 

Le  droit  (Topposition  accordé  au  procureur-général,  par  la 
loi  du  il  juillet  4856,  contre  les  ordonnances  m  juge 
d'instructionj  dans  le  cas  de  renvoi  devant  la  police  cor- 
rectionnelle, ne  peut  s'exercer  postérietiremetit  au  juge- 
ment  du  Tribunal  qui  s* est  déclaré  incompétent,  encore 
bien  que  le  délai  de  dix  jours  depuis  V ordonnance  ne  soii 
pas  encore  écoulé,  —  //  n'y  a,  dans  ce  cas,  d'autre  re- 
cours contre  le  jugement  que  la  voie  de  V appel.  (G.  inst. 
crim.,  art.  135.)  (1). 

-  -  -    --  -  —   -  1 1 -     ■         I     "■   -  -     -        Il  -     —  — ■ 

(1)  Avant  la  loi  du  17  juillet  1856,  qui  a  supprimé  la  chambre  du  con- 
seilct  défini  les  nouvelles  attributions  dujuçe  d'instruction,  lorsqu'un 


■quatre  heures.  Ce  délai  a  été  doublé  par  la 
du  17  juillet  1856,  et  il  a  été  ajouté  à  Fancien  article  la  disposition 
suivante  : 

«  Dans  le  cas  de  renvoi  à  la  police  correctionnelle,  il  (le  procureur 
»  impérial)  est  tenu,  danslcméme  délai  (quarante-huit  heures)  défaire 
»  donner  assignation  au  prévenu  pour  l'une  des  plus  prochaines  audieti- 
»  ces,  en  observant  les  délais  prescrits  par  Part.  184.  > 

Le  projet  du  Gouvernement  portait  :  pour  la  plu^  prochaine  audience. 
Cette  disposition  ayant  paru  inconciliable  avec  Tart.  135  du  méme()i'o- 
jet  qui  accordait  dix  jours  au  procureur-général  pour  former  opposition, 
dans  tous  les  cas,  aux  ordonnances  des  juges  d'instruction,  la  rédaction 
nouvelle  :  l'une  des  plus  prochaines  audiences,  a  été  adoptée  par  le  Con- 
seil d'Etat  et  par  le  Corps  législatif,  sur  la  proposition  de  M.  Aywé  el 
de  la  commission.  «  [1  peut  arriver,  disait-on  a  cette  occasion,  que  /" 
»  vlus  prochaine  audience,  après  Tordonnance  de  renvoi,  arrive  avant 
»  respiration  du  délai  de  dix  jours  accordé  au  procureur-général.» 

Ce  délai  de  dix  jours  a  donc  été  maintenu  au  nouvel  art.  135,  §§8  el 
t)  ainsi  conçus  : 

«  Dans  tous  les  cas,  le  droit  d'opposition  appartiendra  au  procureur- 
»  général  prés  la  Cour  impériale. 

j>  II  devra  notifier  son  opposition  dans  les  dix  jours  qui  suivront  l'or- 
»  donnaucedu  juge  d'instruction.  » 

Quoique  cela  pût  avoir  quelquefois  des  inconvénients,  comme  celui 
de  prolonger  la  Jurée  de  la  détention  préventive,  il  paraît  bien  évident 
que,  dansFinlenlion  du  législateur,  le  procureur  impérial,  tout  en  assi- 
gnant le  prévenu  à  Tune   des  prochaines  audiences,  devait  laisser  au 


(333) 

(GliiskuM.) 

Le  49  juin  4860,  le  procureur  impérial  de  I^ille  requiert 
le  renvoi,  devant  le  Tribunal  de  police  correctionnelle,  de 
la  nommée  Ghislain,  domestique,  prévenue  du  délit  de  vol 
chez  ses  maîtres. 

Le  20  juin,  le  juge  d'instruction  prononce  ce  renvoi,  et 
le  24  le  procureur  impérial  fait  donner  assignation  à  sa 
requête. 

Le  25,  le  Tribunal  prononce  en  la  cause  et  se  déclare 
incompétent. 

Postérieurement  à  ce  jugement,  le  procureur-général 
près  la  Cour  impériale,  s'appuyant  sur  les  dispositions  de 
l'art.  435  C.  inst.  crim.,  modiiié  par  la  loi  du  47  juillet 
1856,  forme  opposition  à  Tordonnance  du  juge  d'instruc- 
tion et  défère  la  cause  à  la  chambre  d'accusation. 

La  Gourjuge  qu'il  ne  pouvait  plus  user  de  son  droit. 

ARRÊT. 

LA  COUR; —  Attendu  que  le  procureur  impérial  au 
siège  de  Lille,  a,  par  acte  du  19  juin  4860,  requis  le  ren- 
voi, au  Tribunal  de  police  correctionnelle  de  Lille,  de 
la  nommée  Ghislain,  Sophic-Silvie ,  comme  suffisam- 
ment prévenue  du  délit  de  vol  prévu  et  puni  par  Fart.  404 
C.  pén. ; 

Attendu  que  ce  renvoi  a  été  prononcé  par  le  juge  d'ins- 
truction, par  ordonnance  du  20  juin  1860  ; 

Attendu  que,  procédant  en  exécution  de  Fart.  432  C. 
inst.  crim,  modifié  par  la  loi  du  19  juillet  1856,  le  procu- 
reur impérial  a  fait  donner,  à  sa  requête,  le  21  juin  1860, 
assignation  à  la  prévenue  de  comparaître  en  personne 
pardevant  MM.  les  président  et  juges  composant  le  Tribu- 

piration  du  délai  de  dix  jours,  le  procureur-générat  peul-il  encore  user 
de  son  droit  ? —  Non,  dit  la  chambre  d'accusation,  par  le  motif  que  le 
procureur-général  ne  peut  ainsi  mettre  à  néant  une  décision  judiciaire  ! 

Mais,  suivant  le  Tribunal,  les  faits  de  l'inculpation  sur  lesquels  il  s'est 
déclaré  incompétent  revenaient  à  la  juridiction  de  la  Cour  d'assises.  Le 
procureur-général,  par  son  opposition,  livrait  l'appréciation  de  ces  faits 
a  la  chamore  d'accusation  ;  ne  peut-on  dire,  à  ce  point  de  vue,  que 
son  opposition  ne  faisait  qu'exécuter  le  jugement  même? 

II  y  a  là  une  question  délicate  qui,  pensons-nous,  sera  procbaine- 
mcnt  résolue  par  la  Cour  de  cassation,  pourvoi  ayant  été  formé  contre 
Tarrét  que  nous  rapportons. 


(334) 

nal  de  Lille,  jugeant  correctionnellement ,  pour  se  voir 
condamner  aux  peines  portées  par  l'art.  401  C.  pén.  ; 

Attendu  que,  par  jugement  du  25  juin  1860,  le  Tribu- 
nal correctionnel  de  Lille  s'est  déclaré  incompétent  ; 

Attendu  que  ce  jugement  ne  pouvant  être  attaqué  que 
par  la  voie  d'appel,  ne  saurait  être  rais  à  néant  par  voie 
de  conséquence ,  par  suite  de  l'exercice  du  droit  d'opposi- 
tion réserve  au  procureur- général  contre  les  ordonnances 
du  juge  d'instruction  par  Tari.  135  C.  inst.  crim.,  modifié 
par  la  loi  du  17  juillet  1856  ; 

Que  si  telle  devait  être  la  portée  du  9^  §  dudit  art.  135, 
le  législateur  aurait  ainsi  rendu  illusoires  les  garanties  et  les 
précautions  que,  dans  sa  sagesse,  il  avait  pris  soin  d'assu- 
rer dans  les  paragraphes  précédents  ; 

Que  l'autorité  et  le  respect  qui  sont  dus  à  un  jugement 
d'un  Tribunal  correctionnel  s'opposent  à  ce  que  l'exercice 
d'un  droit  préexistant,  non  exercé,  puisse  venir  ainsi  faire 
tomber,  par  voie  de  conséquence,  une  décision  judiciaire; 

Qu'une  telle  application  du  droit  d'opposition  à  l'ordon- 
nance du  juge  d'instruction  aurait  pour  effet  de  créer  une 
voie  nouvelle  de  se  pourvoir  contre  les  jugements,  qui  n'est 
ni  reconnue  ni  indiquée  par  l'ensemble  de  notre  législation 
pénale  ; 

Par  ces  motifs,  déclare  régulière  en  la  forme  l'opposi- 
tion formée  par  exploit  du  27  juin  1860,  et  statuant  sur 
ladite  opposition,  la  déclare  non  recevable,  et  dit  qu'en 
l'état  des  faits  il  n'est  pas  possible  d'ouvrir  une  infor- 
mation afin  de  déterminer  la  compétence,  alors  qu'il  y  a 
déjà  été  statué  par  un  jugement  non  attaqué. 

Du  26  juillet  1860.  Chamb.  d'accus.  Présid.,  M.  Petit; 
minist.  publ.>  M.  Preux,  subst.  du  proc.  gén.. 


TENTATIVE  D'ESCROQUERIE.  ^-  caractères.  —  empr^t 

d'argent.  —  BILLETS  SOUSCRITS.  —  MANŒUVRES. 

Le  fait  par  un  individu  de  demander  à  un  autre,  après  se 
Vétre  rendu  favorable  par  certaines  manoeuvres,  de  lui 
prêter  une  somme  d'argent,  en  promettant  de  rendre  le 
double  de  cette  somme  et  de  payer  un  double  intérêt,  et, 


(335) 

pour  obtenir  celte  somme,  de  faire  signer  au  préteur  un 
bon  de  certaine  somme,  défaire  remplir  le  billet  par  un 
tiers  et  de  le  présenter  à  V escompte,  sans  cependant  en  re- 
cevoir le  montant,  constitue  non  le  délit  d'escroquerie, 
mais  celai  de  tentative  d'escroquerie,  (C.  pon.,  arl. 
405.)  (4). 

(Maubert.) 

Tribunal  correctionnel  de  Lille  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  qu'il  résulte  de  l'instruction  et  des  débats  que 
le  15  avril  dernier,  yers^onze  heures  du  matin,  à  Calais, 
Pion  .est  entré  dans  le  cabaret  de  Maubert;  que  ce  dernier 
Ta  fait  boire,  puis  lui  a  proposé  de  lui  faire  avoir  une  fem- 
me qui  se  trouvait  là:  que  Pion  ayant  accepté,  Maubert  l'a 
conduit  avec  cette  femme  chez  Ramon,  aubergiste,  et  les  a 
laissés  seuls  dans  une  chambre  ;  que  Pion  et  la  femme  en 
question,  y  sont  restés  pendant  un  certain  temps  et  y  ont 
bu  de  Teau-de-vie;  qu'ensuite  ils  sont  revenus  dans  le  ca- 
baret de  Maubert,  où  Pion  a  dîné  ;  que,  lorsque  Pion  fut 
en  étal  d'ivresse,  Maubert  lui  demanda  à  emprunter  300 
francs,  promettant  de  lui  rendre  le  double  de  cette  somme 
et  de  lui  payer  un  double  intérêt;  qu'il  lui  présenta  à  si- 
gner un  billet  en  blanc  ;  que,  comme  Pion  hésitait,  Mau- 
bert lui  dit  qu'il  allait  chercher  un  notaire  pour  donner 
plus  de  solidité  à  l'acte  ; 

»  Qu'en  effet  il  amena  le  nommé  Gamard,  marchand 
de  vins,  qui  dit  n'être  pas  notaire,  mais  seulement  clerc  de 
notaire  ;  que  Pion,  cédant  enfin  à  ces  obsessions  et  à  ces 
manœuvres  frauduleuses,  tendant  à  le  convaincre  qu'il  fe- 
rait une  bonne  affaire,  après  avoir  écrit  les  mots  :  Bon 
pour  trois  cents  francs  sur  deux  premiers  billets  et  les  avoir 
signes,  mais  illisiblement,  a  écrit  les  mêmes  mots  sur  un 
troisième,  et  l'a  signé  d'une  manière  un  peu  plus  lisible  ; 
que  Maubert  a  fait  remplir  le  corps  de  ce  billet  par  Gamard 
et  a  essayé  de  l'escompter,  mais  qu'il  n'a  pu  y  parvenir, 
parce  qu  il  n'était  pas  à  ordre  ; 

(l)Sur  les  caractères  de  l'escroquerie  et  delà  tentative  d'cscroq[ue- 
rie,  V.  pour  la  jurisprudence  delà  Gourde  Douai  :  27  mai  1843(Junsp. 
4,  240);  12ianv.,  lèjuill.,  14  nov.et Sdécemb.  1844(Jurisp.  2,75;2, 
3i2  ;  3,  487  et  190)  ;  5  mai,  22  mai  et  31  août  4846  (Jurisp.  4,  380;  7, 
87  et  4,  429);  21  fév.  1848  (Jurisp.  G,  176);  22  janv.  4849  (Jurisp.  7, 
1 4)  ;  22  avril  et  44  mai  4850  (Jurisp.  8,  234  et  237)  ;  44  cet.  1851  (Ju- 
risp. 40,46);  5  janv.  1857  (Jurisp.  15,  192);  20  janv.  1857  (Jurisp. 
15,  475). 


(336) 

Attendu  que  les  faits  ci-dessus  constituent  le  délit  d'es- 
croquerie prévu  et  puni  parTart.  405  C.  pén.,  mais  qu'il 
existe  des  circonstances  atténuantes  ; 

»  Le  Tribunal  déclare  Maubert  coupable  d'escroquerie, 
avec  circonstances  atténuantes; 

»  Et  vu  les  art.  4-05  et  463  G.  pén.,  le  condamne  à  13 
mois  d'emprisonnement,  et  par  corps  aux  frais,  d 

Appel  devant  la  Cour  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 
Attendu  que  les  faits  reconnus  par  la  sentence  dont  est 
appel  constituent  des  manœuvres  frauduleuses  pour  faire 
naître  Tespérance  d'un  succès  et  d'un  événement  chimé- 
rique ; 

Qu'en  effet  Maubert,  à  l'aide  de  ces  manœuvres,  a  per- 
suadé à  Pion  que  s'il  lui  remettait  une  obligation  de  300 
fr.,  dans  deux  mois  il  recevrait  une  somme  double  et  un 
double  intérêt; 

Que  Maubert  s'est  ainsi  fait  remettre  une  obligation  de 
300 fr.  qu'il  a  vainement  cherché  à  escompter; 

Que  ces  faits  constituent  une  tentative  d'escroquerie,  dé- 
lit prévu  et  puni  par  l'art.  405  C.  pén.  ; 

Emendant  le  jugement  dont  est  appel  dans  la  disposition 
qui  déclare  Maubert  coupable  d'escroquerie  ; 

Déclare  le  prévenu  convaincu  d'avoir,  en  employant  les 
manœuvres  frauduleuses  mentionnées  dans  la  sentence  des 
premiers  juges,  pour  faire  naître  l'espérance  d'un  succès 
et  d'un  événement  chimérique,  obtenu  de  Pion  la  remise 
d'une  obligation  de  300  fr.,  et  d'avoir,  par  ce  moyen,  tenté 
d'escroquer  partie  de  la  fortune  de  ce  dernier  ; 

Ordonne  que  le  surplus  du  jugement  sortira  effet; 

Condamne  le  prévenu  aux  frais  de  la  cause  d'appel,  etc. 

Du  19  juin  4860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
minist.  public,  M.  Carpenlier,  avoc.-gén.  ;  avoc,,McEm. 
Flamant. 


(337) 
DONATION  DÉGUISÉE.  —  vente.  —  rente  viagère.  — 

CONDITIONS  ET   RÉSERVES.  — APPRÉCIATION   DES  CIRCONS- 
TANCES. —  SURVENANCE  D'BNFANT, 

On  peut  voir  une  donation  déguisée  dans  un  acte  qualifié 
vente,  où  le  priûo  stipulé  consiste  en  une  rente  viagère  dont 
les  annuités  sont  en  disproportion  ûveo  la  valeur  des 
biens  qui  font  Vobjet  du  contrat. 

Il  nHmporle  que  certaines  réserves^  outre  la  stipulation  de 
rente  viagère,  aient  été  faites  au  profit  du  vendeur,  si,  eu 
égard  au  prix  des  biens  cédés,  elles  peuvent  être  considé- 
rées comme  de  simples  conditions  de  la  donation. 

Il  en  est  ainsi  surtout  si  les  circonstances  ne  justifiant  pas, 
pour  le  prétendu  vendeur,  la  nécessité  d'aliéner,  démon- 
trent, au  contraire,  son  intention  de  se  démettre  de  ses 
biens,  à  la  condition  même  de  se  libérer  de  ses  obligations 
personnelles  (1). 

Une  telle  donation  est  d^ailleurs  r^ocable  pour  survenance 
d^enfant,  alors  même  que,  depuis  cette  survenance^  le  do- 
nateur aurait  reçu  le  payement  de  prestations  convenues 
dans  le  contrat.  (C.  Nap.,  art.  960.)  (2). 


(l-2)V.etconsult.  sur  celle  double  question  pour  la  jurisprudence  ffé- 


Cass.  28  décemb.  1831  (Dali.  32,  1,  4i,  S.  V.  32,  1,  300);  id.  23  juin 
1844  (Dali.  41, 1,  293,  et  S.  V.  41,  j,  867). 

Id.  pour  la  doctrine  :  Chardon,  bol  et  fraude,  t.  3,  n»  55;  Potbier, 
Vente^  n»  615;  Toullier,  L  5,  n«  434;  Zacharia;  et  ses  annot.  Aubr}'  et 
Rau,  §  79  et  note  4;  Troptong,  t.  3 ,  n»  1500;  Dwranlon,  t.  16, 
no  400. 

Consult.  pour  la  jurispradenee  de  la  Cour  de  Douai  :  31  déc.  1819 
(AftB.  3, 56)  ;  6  mars  1825  (Jttrisp.  2,  411)  ;  7  noY.  1835  (Man.  2,  407)  ; 
20  fév.  4838  (Man.  3,  82);  11  nov.  1844  (Jurisp.  3, 17);  5  ianv.  4846 
(Jnrisp.  4, 83);  28  juill.  1846  (Jurisp.  4,  36l);  5o  nov.  1847  (Jurisp.  6, 
44);  2  février  1S50  (Jurisp.  8,  112);  7  juin  1850  (Jurisp.  8,  244);  14 
juin  1852  (Jurisp.  10,319) ,  22  juin  1853  (Jurisp.  11,  342);  21  mai  4854 
Jurisp.  13,  94/. 

La  Cour  de  Douai,  sur  le  principe  général  de  la  validité  des  dona- 
tions déguisées  sous  la  forme  de  contrats  onéreux,  principe  qui  a  sou- 
levé bien  d<s  doutes  et  des  incertitudes,  a  rendu  un  arrêt,  16  31  juill. 
4811,  sur  renvoi  de  IdCour  de^  cassation  d'un  arrêt  du  19nov.  1.810(J. 
Pal.,  3^  édit.  à  sa  date).  Il  se  trouve  aussi  dans  le  Jburnal  du  Palais, 
3e  édit.  a  Sa  date.  îl  peut  être  utile  de  le  restituer  à  noifre  recueil. 

(Schamp  C.  Vendehdaél.) 
ARRÊT. 

Xâ  COUR;  —  Considérant  que  les  donations  déguisées  sous  la  forme 

TOME  xvm.  22 


(338) 

(Béquet  C.  Demanez.) 

Un  acteauthentiquedulS  mars  1854  porte  ce  qui  suit  : 

»  Pardevanl  M©  Bottieau  a  comparu  M.  Augustin  Béquet, 
>  cultivateur,  demeurant  à  GoUeret,  lecjuel  a  déclaré  vendre 
»  avec  garantie  de  tous  troubles,  évictions,  hypothèques 
»  et  autres  empêchements,  à  Désiré,  Augustine  et  Floriska 
»  Demanez,  tous  les  trois  acquérants  par  tiers,  le  premier 
»  et  la  troisième  propriétaires,  demeurant  à  CoUeret;  la 
^  seconde,  marchande,  demeurant  à  Maubeuge  ,  tous  trois 
»  à  ce  présents  et  acceptants  :  1<*...  ;  2o*.. 

(Suit  fénumération  des  immeubles  en  42  corps  (Thé- 
ritage.) 

»  L'entrée  en  jouissance  sera  immédiate,  sauf  que  M.Bé- 
»  quet  se  réserve  pendant  toute  sa  vie  la  jouissance,  libre 
*  d'impôts,  de  réparations  et  de  caution,  de  une  place  et 
»  un  cabinet  au  nord  de  la  maison,  avec  une  cave  en  des- 
»  sous  de  son  logement. 

»  Les  acquéreurs  devront  faire  à  leurs  frais,  quand  le 
»  vendeur  l'exigera,  une  porte  pour  arriver  à  son  loge- 
»  ment,  sur  le  devant,  et  une  descente  particulière  allant 
»  du  logement  réservé  à  la  cave  conservée . 

d'un  contrat  onéreux  ne  sont  proscrites  qu'autant  qu'elles  ont  pour  ob- 
jet d'éluder  une  prohibition  formelle  de  la  loi  ; 

Considérant  que  l'art.  l«r  de  la  rubrique  11,  Coût.  d'Âlost,  ne  peut, 
ainsi  que  l'art,  ier  ord.  1731,  s'entendre  que  des  donations  expresses, 
pour  lesquelles  ladite  Coutume  exige  des  formalités  particulières  à  l'effet 
d'opérer  la  tradition  des  biens  donnés  ; 

Considérant  qu'il  en  est  autrement  à  l'égard  des  donations  tacites, 
déguisées  sous  la  forme  d'un  autre  contrat  ;  que  les  principes  de  droit 
commun  maintiennent  ces  sortes  de  donations,  quelle  qu'en  soit  la 
forme,  quand  elles  ne  tendent  pas  à  éluder  une  prohibition  légale  ; 

Considérant  que,  dans  l'espèce,  Schamp  et  sa  femme,  soit  à  l'époque 
du  décès  dudit  Schamp,  soit  à  la  date  de  l'acte  du  10  décembre  1794, 
avaient  capacité  pour  donner,  et  que  Louis  Vandendaêl  avait  capacité 
de  recevoir,  puisque  les  héritiers  n'ont  pas  atteint  la  preuve  du  con- 
cubinage dans  laquelle  ils  ont  été  admis  ;  que  le  contraire  est  prouvé 
par  la  conduite  qu'a  tenue  la  femme  Schamp  avec  Louis  Vandendaêl  et 
en  coopérant  avec  son  mari  à  l'acte  attaqué,  et  en  le  ratifiant  d'une 
manière  solennelle  depuis.  les  arrêts  rendus  en  cette  cause  ; 

Qu'il  en  résulte  que  l'acte  du  10  décemb.  1794  est  inattaquable,  soit 
qu'on  le  considère  comme  vente,  soit  qu'on  y  attache  l'idée  d'une  do- 
nation tacite,  déguisée  sous  le  nom  de  vente; 

Met  l'appellation  et  le  jugement  dont  est  appel  au  néant; 

Ëmendant,  déboute  les  intimés  de  leurs  demandes  et  conclusions. 

Du  31  jlilletlSll.  Aud.  solemn.  Présid.,M.  d'Haubersaert,  l^^prés.; 
minist.  publ.,  M.  Lambert,  avoc.-gén.;  avoc,  M«s  Deusy  et  De^prés 
père;  avou.,  Mes  Constant  Deusy  et  Després  fils. 


(339) 

]&  Réserve  faite  encore  par  M.  Béquet  du  jardin  de  gau- 
»  che  en  entrant,  faisant  la  gauche  du  sentier  du  milieu 
»  (6  ares  60  centiares).  ' 

»  Réserve  faite  encore  par  Béquet  du  droit  de  se  servir 
»  de  la  pompe  pour  son  usage  et  celui  de  sa  famille.  Les 
»  acquéreurs  sont  subrogés  dans  tous  les  droits,  titres  et 
»  actions  du  vendeur.  Ils  prendront  les  biens  dans  l'état  où 
»  ils  se  trouvent,  sans  garantie  aucune  de  la  mesure,  avec 
>  toutes  les  servitudes  actives  et  passives  qui  peuvent  en 
»  faire  partie. 

»  Cette  vente,  aux  frais  des  acquéreurs,  a  lieu  pour  une 
»  rente  annuelle  et  viagère  de  1,200  francs  l'an,  qui  pren- 
»  dra  cours  du  1er  avril  prochain,  et  ne  s'éteindra  qu'au 
»  décès  de  M.  Béquet. 

»  Cette  rente,  payable  en  or  ou  en  argent  au  domicile 
»  de  M.  Béquet,  est  garantie  par  une  hypothèque  que 
»  poun^a  requérir  M.  Béquet  sur  les  biens  vendus  pour  un 
*  capital  d'au  moins  35,000  fr. 

T>  Pour  la  perception  du  droite  les  biens  vendus  évalués 
i>  42,000  fr.,  et  la  réserve  d'usufruit  4,500  fr. 
»  Dont  acte  fait  et  passé,  etc.  » 

Un  acte  sous  seing-privé  de  la  mênie  date  contient  les 
stipulations  suivantes  •. 

»  D'après  un  acte  de  vente  devant  M«  Bottieau,  du  24 
»  avril  1835,  M.  Augustin  Béquet,  propriétaire  à  Colleret, 
»  doit  à  M.  Philippe  Laloyaux  une  rente  viagère  de  250 
»  francs. 

]»  Il  charge  M.  Désiré  Demanez,  son  neveu,  d'acquitter 
»  cette  rente  à  partir  d'aujourd'hui ,  ainsi  que  tous  sup- 
»  pléments  qui  pourraient  avoir  été  consentis  depuis  au 
}>  profit  de  M.  Laloyaux,  suppléments  déclarés  ne  pas  ex- 
»  céder  50  fr.  par  année. 

1^  Il  devra  exécuter  et  accomplir  en  tout  son  entier  l'o- 
»  bligation  de  loger,  fournir  feu  et  lumière,  et  blanchir 
»  M.  Philippe  Laloyaux,  telle  qu'elle  résulte  d'un  acte  de 
»  vente  mobilière  faite  par  Laloyaux  à  Béquet,  le  2  juin  1 837 . 
»  M.  Désiré  Demanez  devra  payer  à  la  décharge  de  M. 
»  Béquet,  avec  intérêt  du  30  novembre  1853,  une  créance 
»  au  capital  de  2,650  fr.,  du43  à  M^i®  Espoulet. 

»  M.  Désiré  Demanez  devra  fournir  à  ma  servante,  Alde- 
»  gonde  Déeamps,  et  pendant  toute  sa  vie,  le  logement,  la 
p  nourriture  et  l'entretien.  Dans  le  cas  où  il  plairait  mieux, 
>  soit  à  Demanez,  soit  à  Aldegoude  Décamps,  de  n'habiter 
»  plus  avec  M.  Désiré  Demanez,  ce  dernier  devra  payer  du 


(340) 

y>  jour  de  la  séparation,  et  pendant  toute  sa  vie,  à  Alde- 
»  gonde  Décamps,  une  rente  annuelle  et  viagère  deiôOfr., 
»  payable  en  or  ou  en  argent,  au  domicile  d'Aldegonde 
»  Décaraps,  ce  qui  a  été  accepté  par  Aldegonde  Décamps. 

»  Désiré  Demanez  fournira  dans  la  ferme  à  ce  jour  ha- 
»  bitée  par  M.  Béquet,  à  ce  dernier  une  place  pour  remi- 
s  ser  son  bois  et  son  charbon. 

»  Il  fera  tous  voiturages  de  bois  et  charbons  nécessaires 
»  à  M.  Béquet,  et  là  où  celui-ci  voudra  les  faire  conduire. 

»  Il  fournira  chaque  année  à  M.  Béquet  Tengrais  néces- 
»  saire  pour  sa  portion  de  jardin. 

»  Le  tout  en  considération  de  la  cession  que  M.  Béquet 
»  fait  de  toui  son  mobilier  meublant  et  dH exploitation  à  M, 
»  Désiré  Demanez,  situé  à  CoUeret,  dans  la  ferme  par  lui 
»  cédée,  compris  les  récoltes  engrangées  ou  à  battre,  sauf 
»  réserve  de  tout  le  scourgeon  à  battre.  Réserve  encore  par 
»  M.  Béquet  des  objets  mobiliers  nécessaires  à  garnir  la 
»  chambre  et  le  cabinet  par  lui  réservés  dans  l'acte  de  vente, 
»  et  des  objets  de  vaisselle  à  lui  nécessaires. 

»  Réserve  encore  par  M.  Béquet  du  droit  de  se  fournir 
»  en  usage  tout  le  linge  de  corps  et  de  table  dont  il  aura 
»  besoin,  et  ce  par  Désiré  Demanez. 

»  A  toute  demande,  Demanez  donnera  à  M.  Béquet  acte 
»  authentique  hypothéqué  des  présentes  à  ses  frais. 

i>  En  triple,  à  Maubeuge,  le  treize  mars  1854*.  » 

Le  sieur  Augustin  Béquet  était  un  célibataire  de. 46  ans. 
Il  avait  eu,  en  1854-,  la  pensée  de  se  marier,  mais  il  avait 
abandonné  ce  projet,  pai»  suite,  disait-on,  des  conseils  ou 
xles  influences  d'un  parent,  le  sieur  Modeste  Demanez,  ins- 
tituteur à  CoUeret.  La  position  de  Béquet  était  d'ailleurs 
celle-ci  :  Possesseur  de  terres  d'une  valeur  approximative 
de  100  mille  francs,  il  les  cultivait.  Son  père  était  mort  en 
1814,  et  sa  mère  en  1837.  Sa  mère  avait  épousé  en  se- 
condes noces  un  sieur  Laloyaux,  qui  avait  consenti  à  Bé- 
quet un  abandon  de  ses  biens,  moyennant  rente  viagère. 
Béquet  n'avait  qu'une  $œur,  laquelle  avait  épousé  l'institu- 
teur Demanez.  Sa  sœur  était  raere  de  trois  enfants,  Désiré, 
Augustine  et  Floriska  Demanez.    > 

Son  mariage  étant  rompu,  Béquet  passa  lès  actes  que 
nous  venons  de  rapporter,  lesquels  furent  pleiiientejît  exé- 
cutés. Augustine  et  Floriska  passèrent  bail  à  leur  frère  Dé- 
siré de  leur  part  dans  les  terres.  Désiré  se  mit  en  posses- 
sion de  toutes  choses,  notamment  du  mobilier  non  épu- 
méré  dont  il  était  seul  acquéreur.  Vécurent  sous  le  même 


(341) 

toit  :  Désiré,  sa  femme  et  ses  enfants  ;  Augustin  Béquet, 
Philippe  Laioyaux  et  Âldegonde  Décamps,  comme  le  vou* 
laient  les  actes. 

Le  5  octobre  4856,  décès  de  Laioyaux.  Béquet  revient 
alors  à  son  idée  de  mariage.  Il  épouse,  en  juillet  1857,  une 
jeune  domestique,  Catherine  Dehout,  et  (quitte  la  ferme. 
On  lui  loué  deux  chambres  dans  une  maison  étrangère, 
moyennant  120  fr.  par  an  ;  on  lui  donne  des  meubles  et  on 
lui  sert  une  rente  de  1,200  fr.  par  an. 

Au  15  février  1858,  survient  un  enfant  de  ce  mariage, 
et  le  11  mai  1859,  Béquet  assigne,  son  neveu  et  ses  deux 
nièces,  joints  les  maris  de  celles-ci,  devant  la  Tribunal  ci- 
vil d'Avesnes,  demandant  la  révocation,  pour  survenance 
d'enfant,  de  la  donation  d'immeubles  qu'il  leur  avait  faite. 

Demanez  et  ses  sœurs  prétendent  qu'il  y  a,  non  pas  do- 
nation, maïs  vente;  que  la  vente  n'étant  rescindable  que  du 
chef  delésion  dans  les  deux  ans  de  sa  date,  leur  contrat  est 
désormais  inattaquable.  Us  produisent  d'ailleurs  le  doubiede 
l'acte  sous  seing-privé,  où  se  trouvent  les  différentes  charges 
auxquelles  ils  se  sont  obligés  comme  acquéreurs,  et  ils  s'en 
font  leur  principal  appui  pour  soutenir  la  validité  des  con- 
trats du  13  mars. 

Le  Tribunal  a  rendu,  lé  23  juillet  1859,  le  jugement 
suivant  : 

JUGEMENT. 

€  Attendu  que  si  les  donations  déguisées  et  les  dona- 
tions déclarées  tombent  également  sous  l'application  de 
l'art.  960  C.  Nap.,  il  faut  bien  reconnaître  qu'il  n'y  a  pas 
de  donation  sans  l'intention  de  donner  et  de  recevoir,  bien 
manifeste,  si  pas  formelle  entre  les  parties; 

>  Attendu  que  l'acte  litigieux  du  13  mars  1854  se  pré- 
sente avec  le  nom,  la  forme  et  tous  les  caractères  d'une 
vente  ;  que  la  nature  de  cet  acte  se  détermine  mieux  en- 
core en  le  rapprochant  de  la  cession  verbale  du  mobilier 
feite  le  même  jour,  conséquence  et  complément  de  la  vente 
immobilière; 

»  Attendu  que  la  qualification  donnée  au  contrat  doit 
être  suivie,  à  moins  que  la  substance  même  de  l'acte  ne 
résiste  i  sa  qualification  ;  et  que,  dans  le  doute,  c'est  l'ém- 
t«?e  qui  doit  faire  la  loi,  in  re  dubid  malins  est  seimre 
verbis  ;  . 


(342) 

»  Attendu  qu'une  donation  ne  se  présume  pas  et  qu'un 
contrat  ne  cesse  pas  d'être  comraulatif,  si  ce  que  reçoit 
Tune  des  parties  n'est  pas  l'équivalent  de  ce  qu'elle  donne; 
qu'il  suffit,  aux  termes  de  l'art.  1104?  G.  Nap.,  que  son 
engagement  soit  regardé  comme  équivalent  ;  que  la 
différence  qui  existe  entre  la  véritable  valeur  de  la  chose 
et  son  prix  n'a  donc  rien  qui  répugne  à  la  vente,  des- lors 
que  le  prix  est  sérieux,  c'est-à-dire  qu'il  a  été  stipulé  avec 
l'intention  de  l'exiger;  que  la  vente  après  cela  peut  bien 
être  rescindable,  à  la  vérité;  mais  que  la  vililé  de  prix  au- 
torisant la  rescision,  ne  doit  pas  être  confondue  avec  le 
défaut  de  prix  sérieux,  qui  frappe  la  vente  de  nullité  ra- 
dicale ; 

»  Attendu ,  en  conséquence ,  que  les  biens  aliénés  par 
l'acte  du  13  mars  1854,  eussent-ils  même  la  valeur  loca- 
tive,  fort  exagérée,  sans  doute,  que  leur  assigne  le  de- 
mandeur, cette  disproportion  prétendue  avec  la  renie  via- 
gère n'ôterait  pas  à  cette  rente,  jointe  aux  charges  acces- 
soires stipulées  en  l'acte,  le  caractère  de  prix  sérieux  que 
lui  ont  donné  les  parties  ;  que  ces  biens,  au  surplus,  n'of- 
fraient, lors  de  l'aliénation,  aucun  revenu  par  prix  de  bail 
qui  peut  même  faire  réputer  vil  le  prix  de  vente  plus  ou 
moins  aléatoire  porté  audit  acte  ; 

j>  Attendu  que,  pour  apprécier  une  convention ,  il  Êiut 
s'attacher  à  la  cause  déterminante  et  non  aux  motifs  ac- 
cessoires, à  l'objet  même  et  non  aux  résultats  des  engage- 
ments des  parties  ;  qu'elle  doit  être  entendue  selon  Tidée 
principale  qui  domine  dans  l'acte  destiné  à  la  constater  ; 

,  »  Attendu  que  les  liens  de  parenté  existant  entre  les  par- 
ties et  la  modicité  du  prix  de  vente  peuvent  bien  faire  sup- 
poser qu'accessoirement  à  l'intérêt  personnel  qui  le  faisait 
agir,  le  demandeur  a  volontiers  offert  à  ses  neveu  et  nièces 
l'occasion  d'un  marché  avantageux,  mais  que  l'on  ne  peut 
dire  qu'il  n'a  été  mu  et  déterminé  à  faire  l'aete  du  13  mars 
1854  que  par  un  sentiment  de  bienfaisance  envers  les  dé- 
fendeurs et  pour  leur  procurer  un  avantage  purement  gra- 
tuit (art.  1105  G.  Nap.);  qu'il  est  plus  juridique  et  aussi 
plus  vraisemblable  de  penser  qu'il  a  agi  principalement 


(34â) 
pour  s^assurer  son  repos,  une  retraite  selon  ses  goûts,  avec 
une  rente  viagère  bien  suffisante  à  ses  besoins  et  solide- 
ment assise  sur  des  immeubles  dont  l'administration  lui 
était  à  charge,  tout  en  ne  voulant  pas  se  montrer  avec  les 
défendeurs  aussi  exigeant  qu'il  eût  pu  l'être  avec  des  tiers 
étrangers  à  sa  famille  ; 

>  Attendu  que  le  demandeur  en  recevant  encore,  depuis 
la  naissance  dé  son  fils,  une  somme  de  i  ,000  fr.  payée  par 
les  défendeurs  en  exécution  de  l'acte  litigieux,  a  montré 
lui-même,  par  ce  fait  très-significatif,  que  ledit  acte  était  à 
Fabri  de  la  révocation  demandée;  qu'il  serait  donc  au  moins 
téméraire  d'affîrmer,  en  raison  des  seules  circonstances  de 
la  parenté  des  parties  et  de  la  modicité  du  prix  de  vente, 
que  confraireinent  à  ce*  qui  a  été  dit  et  écrit,  le  demandeur 
et  les  défendeurs  ont  voulu  autre  chose  que  ce  qu'ils  ont 
déclaré  faire,  consentir  et  recevoir  une  donation,  alors 
qu'ils  disaient  vendre  et  acheter  ; 

»  Le  Tribunal,  statuant  en  matière  ordinaire  et  en  pre- 
mier ressort,  déclare  le  demandeur  non  fondé  dans  ses  con- 
clusions, l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens.  » 

Appel  par  Augustin  Béquet.  DevantlaCour,  dans  Tintérêt 
de  l'appelant,  on  présente  un  système  qui  se  résume  ainsi  : 

L'acte  du  43  mars  4854,  passé  devant  M^  Botlieau,  no- 
taire  à  Maubeuge,  est  une  donation  déguisée  sous  forme 
de  vente,  Béquet  qui,  alors,  n'avait  point  d'enfants,  était 
célibataire,  et  croyait  ne  plus  devoir  se  marier.  Il  a  néan- 
moins épousé,  le  44  juillet  4857,  Catherine  Debout,  et  de 
cette  union  est  né,  le  45  février  4858,  un  enfant  légitime, 
Oscar-Alexandre-Auguslin.  Par  suite,  aux  termes  de  Tart. 
960  C.  Nap.,  la  donation  est  purement  et  simplement  révo- 
quée dans  l'intérêt  de  cet  enfant  et  de  ceux  qui  pourront 
naître  encore.  Vainement  les  intimés  et  le  jugement  dont 
est  appel  dénient  à  l'acte  du  43  mars  4854  le  caractère  de 
donation  déguisée;  ce  caractère  ressort,  au  dernier  degré 
d'évidence,  tant  des  stipulations  de  l'acte  lui-même  et  de 
tous  les  documents  qui  l'accompagnent,  que  des  circons- 
tances constantes  au  procès.  En  effet,  les  biens  abandon- 
nés moyennant  une  rente  viagère  de  4,200  fr.,  et  sous  la 
simple  réserve  d'un  logement  composé  d'une  chambre, 
un  cabinet,  une  cave  et  un  jardin  de  6  ares,  sont  d'un  pro- 


(344) 

duit  moyen  de  2,400  fr.,  et  d'une  valeur  vénale  de  86,000 
francs  Ce  pr«:>duit  moyen  el  cette  valeyr  vénale  3ont  attestés 
f)ar  trois  cultivateurs  de  la  contréç,  très-éclairés  et  par- 
faitement honnêtes;  au  besoin  ils  seraient  confirmés  par 
expertise  contradictoire. 

Dès-lors,  on  ne  comprend  pas  comment,  dans  l'inten- 
tion de  donner,  Béquet,  cultivateur  lui-même  et  connais* 
sant  parfaitenaent  te  vateuT  soit  de  ses  terres^  soit  de  sa 
ferme,  aurait  cédé  le  tout  pour  une  rente  viagère  qui  ne 
représenta  que  moitié  du  revenu. 

En  supposant  que,  comme  le  dit  le  jugement,  en  Tab- 
sence  de  Texperlise,  non  faite  alors,  les  appréciations  de 
Béquet  fussent  fort  exagérées,  et  qu'il  fallût  descendre  de 
5,400  fr.  à  1,600,  et  de  86,000  fr.  à  60,000  fr.,  la  vente 
aux  conditions  connues  serait  encore,  comme  vente,  évi- 
demment inadmissible.  Enfin,  en  prenant  même  pour  base 
la  déclaration  faite  au  fisc  par  les  mtiméspour  le  payement 
des  droits  de  mutation,  déclaration  qui,  incontestablement, 
dissimule  si  grandement  la  véritable  valeur,  on  i^e  com- 
prend pas  encore  la  vente  comme  vente,  puisque  te  valeur 
déclarée  est  de  42,000  fr.,  tandis  que  lej:)rix  consiste,  en- 
core un  coup,  en  une  rente  viagère  de  i,wOfr.  Vainement 
on  voudrait  ajouter  à  celte  rente  certaines  charges  stipu- 
lées en  un  autre  acte  de  cession  mobilière,  puisque,  d'une 
part,  Augustine  et  Floriska  sont  étrangères  à  cette  cession 
mobilière,  et  que,  d'autre  part,  si  Désiré  s'impose  ces 
charges  additionnelles,  il  reçoit  en  échange  tout  le  mobi- 
lier de  Béquet,  mobilier  meublant  comme  d'exploitation. 
Dans  toutes  les  hypothèses,  il  y  a  si  peu  vente,  que  l'on 
chercherait  vainement  un  prix  à  payer  par  les  soi-disant 
acquéreurs,  en  échange  des  immeubles  à  eux  cédés,  etque, 
si  le  contrat  ne  tombait  pas  comme  donation  révoquée  pour 
survenance  d'enfant,  il  devrait  tomber  comme  vente  radi- 
calement nulle,  faute  de  prix,  étant  trop  manifeste  qu'il  n'y 
a  point  prix  quand  racheleur^  pour  se  libérer,  ne  fait  que 
laisser  au  vendeur  tout  ou  parlie  des  fruits  de  sa  propre 
chose.  D'ailleurs,  indépendamment  de  celte  absence  de 
prix,  suffisante  à  elle  seule  pour  écarter  le  contrat  à  l'un 
ou  l'autre  titre,  les  présomptions  les  plus  irrésistibles  mon- 
trent te  véritable  intention  du  soi-disant  acte  de  vente. 

En  effet,  Béquet,  au  13  mars  1854',  n'avait  ^ucun  motif, 
hprs  te  pensée  d'assurer  sa  succession  à  ses  héritiers^  pour 
se  déteire  tout  ensemble  de  sa  ferme,  ses  terrçs  et  son 
mobilier.  Agé  de  43  ans  seulement,  dans  la  force  de  l'âge, 


(345) 

exempt  d'infirraUés,  d'une  saBiéexcelleate,  rien  oa  le  pous- 
sait à  cesser  la  culture  qu'il  avait  dirigée  jusqu'alors.  U  oe 
voulait  pas  quitter  le  pays,  puisqu'il  se  réserve  ua  loge- 
ment dans  sa  ferme  ;  il  ne  cherchait  point  de  capitaux,  puis- 
qu'il vend  moyennant  rente  viagère  ;  il  ne  songeait  pas  à 
augmenter  ses  ressources,  quisqu'il  se  contente  d'une  reinte 
de  beaucoup  inférieure  au  revenu.  D'ailleurs,  s'il  eût  voulu 
vendre^  il  eût  chargé  un  notaire  de  là  faire  et  de  trouver 
des  amateurs. 

De  leur  côté,  les  intimés  n'avalent  aucuA  motif  pour 
faire  l'acquisition  entant  qu'acquisition.  Parmi euj;, Désiré 
seul  était  marié,  mais  sans  dot,  soit  de  son  côté,  soit  de 
celui  de  sa  femme,  Augustine  était  mercière  à  Maubeuge, 
ayant  besoin  de  toutes  ses  ressources  pour  son  commerce; 
Floriska  vivait  chez  ses  parents,  j wne  fille,  sans  avoir  au- 
cun bien.  Us  ne  possédaient  absolumeut  rien  pour  acheter. 
Augustine  et  Floriska  devaient  énergiquement  répugner  à 
acheter  des  droits  indivis  dans  uq  corps  de  ferme,  aes  terres 
et  des  pâtures. 

L'on  ne  comprend  pas  plus  Facquisîtion  par  leâ  ache- 
teurs que  la  vente  parle  vendeur,  dès  lors  qu  on  ne  voit  en 
l'acte  qu'une  vente  sérieuse  et  véritable,  comme  le  préten- 
dent les  intimés  contrairement  à  la  vérité.  Tout  s'expli- 
que, au  contraire,  dès  que  l'on  y  voit,  avec  l'appelant, 
conformément  à  la  vérité,  une  donation  déguisée  sous  forme 
de  vente,  ainsi  que  se  déguisent  aujourd'hui  toutes  les  do- 
nations entre  vifs. 

En  effet, Béquet,  célibataire,  quoique  âgé  de  4S  ans,  avait 
eu  tout  à  coup  la  pensée  de  se  maner.  Ce  prqjet,  traversé 
par  sa  famille,  avait  été  abandonné.  C'est  sous  Tinfluence 
de  cette  rupture  qu'il  a  été  amené  à  assurer  tous  ses  biens 
à  son  neveu  et  à  ses  deux  nièces,^  en  se  contentant  d'une 
rente  viagère  suffisante  à  ses  besoins,  et  que  ceux-ci  pour- 
raient payer,  puisqu'elle  serait  loin  de  dépasser  le  revenu. 
L'on  comprend  aloi's  comment,  d*une  part,  il  se  défait  de 
tout  au  profit  de  ses  héritiers,  sans  regarder  au  prix,  et 
d'autre  part  comment  ceux-ci,  de  leur  côté,  se  trouvent 
saisis  tout  à  coup  et  simultanément  de  la  pensée  d'acqué- 
rir, sans  ressource  aucune,  une  ferme,  aes  terres  et  des 
pâtures,  par  part  et  portion  égales.  Ces  éléments,  absence 
de  prix,  manque  de  motife  pour  vendre  ou  pour  acheter, 
parenté  intime,  célibat  de  Béquet,  rupture  a'un  mariage, 
résolution  momentanée  de  ne  plus  se  marier,  tout  nipntre 
comment  l'oncle  a  assuré  à  son  neveu  et  à  ses  deux  nièces, 


(S46) 

lors  ses  seuls  héritiers  etpectaûls ,  te  bénéfice  d*une  suc- 
cession à  exù.  promise  par  la  loi. 

Loin  que  la  cession  mobilière  porte  atteinte  à  ces  preu- 
ves, elle  les  confirme  au  contraire  de  la  manière  la  plus 
expresse. 

D'abord  elle  est  elle-même  évidemment  un  nouvel  avan- 
tage, une  nouvelle  libéralité,  puisque  si ,  envisagée  isolé- 
ment, elle  était  onéreuse.  Désiré,  le  préféré  de  la  famille, 
n'en  eût  pas  seul  assumé  les  charges.  Du  reste,  toutes  les 
stipulations  de  cet  acte  additionnel  marquent  du  sceau  de 
l'évidence  ce  caractère  de  libéralité. 

En  effet,  d'une  part,  Béquet  y  abandonne  totU  son  mo- 
bilier meublant  et  d'exploitation;  cet  abandon  universel 
embrasse  même  sa  vaisselle  et  son  linge  de  corps,  dont  il 
se  réserve  seulement  l'usage.  Il  est  feit  sans  estimation, 
inventaire  ni  état  ;  si  bien  qu'en  cas  de  nullité  ou  résolu- 
tion, on  ne  sait  pas  même  ce  qu'il  y  avait  de  chevaux,  bes- 
tiaux, instruments,  engrais,  récoltes. 

Le  prix  stipulé  consiste  en  obligations  qui,  par  leur  na- 
ture, ne  peuvent  être  que  la  condition  d'une  donation,  lo- 
ger, chauffer,  éclairer,  blanchir  Philippe  Laloyaux  aux  lieu 
et  place  de  Béquet;  loger,  nourrir,  entretenir  Aldegonde 
Décamps,  sa  vieille  servante. 

En  combinant  les  deux  actes,  on  voit  d'une  part  Béquet 
se  dépouillant  de  tout  ce  qu'il  possède,  sans  exception  au- 
cune, au  profit  de  tous  ses  héritiers,  et  d'autre  part  ceux- 
ci  se  charger,  aussi  sans  exception  aucune,  de  l'acquit  de 
toutes  les  charges  dont  il  est  grevé  ou  veut  se  ^ever, 
même  le  don  rémunératoire  qu'il  fait  à  sa  servante. 

Ne  pas  reconnaître  la  démission  de  biens  d'un  oncle  cé- 
libataire au  profit  de  ses  héritiers,  dans  cet  ensemble  des 
stipulations,  c'est  se  réfugier  dans  une  incrédulité  scepti- 

aue,  incompatible  avec  la  justice.  Il  faut,  au  contraire,  ren- 
re  d'autant  plus  fermement  hommage  à  la  vérité ,  que  la 
loi,  art.  918,  déclare  elle-même  libéralités  ou  donations 
déguisées,  les  ventes  à  rente  viagère  entre  successibles  en 
ligne  directe,  qu'un  oncle  célibataire  est  envers  ses  ne- 
veux bien  semblable  à  un  père  envers  ses  enfants, 
et  qu'enfin  il  est  d'expérience  pratique  que  les  do- 
nations entre  vifs  se  réalisent  toutes  ou  à  peu  près  toutes 
sous  forme  de  vente . 

La  Cour,  infirmant  le  jugement ,  a  prononcé  comme 
il  suit  : 


(Ul) 

ARRÊT. 
LA  COUR;  —  Attendu  qu'aux  termes  de  Tart.  i156  C* 
Nap.  on  doit ,  dans  les  conventions,  rechercher  quelle  â 
été  la  commune  intention  dés  parties,  plutôt  que  de  s'ar- 
rêter au  sens  littéral  des  termes;  que  pour  caractériser  lé- 
galement un  acte,  surtout  si  les  stipulations  qu'il  renferme 
semblent  d'une  nature  mixte,  on  ne  saurait  s'attacher 
d'une  manière  exclusive  à  la  qualification  que  lui  assignent 
les  parties  ;  qu'il  importe  de  déterminer  ,  d'après  les  cir- 
constances, la  pensée  prédominante  des  contractants  et  le 
but  principal  qu'ils  ont  voulu  atteindre  ; 
*  Attendu  qu'en  appréciant,  selon  ces  règles  d'interpréta- 
tion, la  portée  de  l'acte  authentique  du  13  mars  1854,  on 
est  conduit  à  reconnaître  qu'il  constitue  non  pas  une  vente, 
mais  une  véritable  donation; 

Qu'il  résulte  en  effet  des  documents  de  la  cause  que  Bé- 
quet,  alors  âgé  de  âS  ans,  célibataire  et  renonçant  à  un 
projet  de  mariage,  a  conçu  la  pensée  de  gratifier  son  neveu 
et  ses  deux  nièces  de  l'universalité  de  ses  biens; 

i>  Que  la  rente  viagère  de  4,200  fr.  et  la  réserve  relative 
au  logement  et  au  jardin,  stipulées  au  profit  de  l'appelant 
par  l'acte  susdaté,  doivent  être  considérées  comme  une 
simple  condition  de  la  donation  et  non  comme  le  prix  d'une 
vente,  eu  égard  à  l'importance  des  immeubles  cédés  dont 
aucun  bail  ne  fixe  le  revenu,  mais  qui,  évalués  en  capital  à 
42,000  fr.  seulement,  lors  de  la  perception  des  droits  de 
mutation,  sont  portés  à  86,000  fr.  dans  une  estimation  ex-, 
trajudiciaire,  de  nature  pourtant  à  inspirer  la  confiance,  et 
qui   n'a  point  soulevé  de  sérieuses  contradictions  ;  qu'au 
surplus ,  les  éléments  d'appréciation  constants  au  procès 
établissent  j  entre  la  valeur  des  immeubles  et  les  faibles  re- 
devances que  se  réservait  l'appelant,  une  disproportion  qui 
exclut  toute  pensée  de  vente  et  révèle,  au  contraire,  une 
intention  manifeste  de  libéralité  ; 

Attendu  que  d'autres  circonstances  encore  ne  permettent 
pas  d'attribuer  à  l'acte  le  caractère  de  vente  ;  que,  d'une 
part,  rien  ne  justifie  la  nécessité  pour  l'appelant  d'aliéner 
ses  biens;  que,  de  l'autre,  l'inégalité  de  position  des  ces- 


(348) 
sionnaires,  quant  à  leurs   ressources   personnelles,  rend 
invraisemblable  une  acquisition  sérieuse,  particulièrement 
pm*  les  nièces  de  l'appelant  ; 

Attendu  que  l'abandon  fait  le  même  jour  par  ce  dernier 
à  son  neveu  de  tout  son  mobilier  parait  avoir  le  même 
caractère  que  celui  des  immeubles,  nonobstant  la  condi- 
tion imposée  à  Demanez  de  payer  certaines  obligations  à 
l'acquit  de  son  oncle,  et  spécialement  de  modiques  rentes 
ou  pensions  viagères  k  des  personnes  d'un  âge  avancé;  que 
le  total  de  ces  prestations  ne  se  monte  d'ailleurs  qu'à  un 
chiffre  peu  élevé,  si  l'on  tient  compte  de  la  valeur  du  mobi- 
lier cédé,  qui  ne  comprenait  pas  seulement  quelques  meu* 
bles^  mais. encore  un  matériel  aratoire  proportionné  àFim- 
portance  des  terres  dont  Béquet  s'était  en  même  temps 
dessaisi  ; 

Attendu  que  les  stipulations  des  deux  actes  du  13  mars 
1854,  rapprochées  de  toutes  les  circonstance^  de  la  cause, 
démontrent  qu'à  cette  époque  l'appelant,  possesseur  d'une 
fortune  relativement  considérable,  a  voulu  s'en  démettre 
en  faveur  de  son  neveu  et  de  ses  nièces,  et  que,  se  rédui- 
sant ^ux  ressources  viagères  qu'il  s'était  réservées,  affran- 
chi désormais  de  tout  souci  d'administration,  il  a  chargé 
l'un:  de  sea  donataires  de  le  libérer  de  ses  obligations  et 
même  de  pourvoir  à  la  rémunération  qu'il  désirait  assurer 
am  services  d'une  ancienne  domestique  ; 

Attendu  que,  par  cet  ensemble  de  dispositions  consen- 
ties à  leur  profit,  les  intimés,  héritiers  de  leur  oncle,  jouis- 
saient ainsi  pair  anticipation,  depuis  trois  ans,  de  sa  succès^ 
sion toute  entière,  lorsque  celui-ci,  s' étant  marié  enl857,  est 
devenu  père  de  deux  enfants,  dont  l'un  est  né  le  15  février 
1858s  et  l'autre  depuis  l'appel  ; 

Atteftdu  qu'en  vertu  de  l'art,  960  G.  Nap.^  la  donation 
d'immeubles  faite  par  Béquet  aux  intimés  se  trouvait  ainsi 
révoquée  de  plein  droit  ; 

Que  vainement  oa  a  tenté  de  repousser  sa  demande  en 
r^titutio»,  en  lui  opposant  l'exécution  de  l'acte  du  13 
mars,  par  la  service  de  sa  rente,  postérieurement  à  la  nais- 
sance de  son  fils;  qu'une  telle  fm  de  non-recevoir  est  inad- 


(349) 

missible,  le  droit  qu'exerce  Béquet  étant  ouvert  par  la  loi 
dans  l'intérêt  de  l'enfant  ; 

Attendu  cependant  qu'une  appréciation  erronée  des  faits 
de  la  cause  a  entraîné  les  premiers  juges  à  donner  à  l'acte 
précité  le  caractère  d'une  aliénation^  au  lieu  d'y  reconnaî- 
tre, quoique  déguisée  sous  cette  apparence,  une  donation 
que  la  surveiiance  d'enfant  faisait  évanouir; 

Qu'il  y  a  donc  lieu,  en  réformant  leur  décision,  d'ac- 
cueillir la  demande  de  l'appelant  et  d'appliquer  la  di&posi- . 
tion  tutélaire  qui^  par  des  motifs  que  iUetaient  la  nature  et 
la  raison,  consacre  ici  une  dérogation  spéciale  aux  prin- 
cipes de  l'irrévocabilité  des  donations  entre  vifs  ; 

Attendu  que  les  éléments  acquis  au  procès  rendent  su- 
perflues l'expertise  et  l'enquête  demandées  très^subsidiai- 
rement  par  l'appelant  ; 

Par  ces  motifs,  sans  qu'il  soit  besoin  de  s'arrêter  aux 
conclusions  subsidiaires  de  ce  dernier,  infirme  le  jugement, 
décharge  Béquet  des  condamnations  contre  lui  prononcées, 
déclare  que  la  prétendue  vente  passée  devant  M©  Bottieau, 
notaire  à  Maubeuge,  le  18  mars  1854,  entre  l'appelant  et 
les  intimés,  n'est  qu'une  donation  déguisée,  laquelle  de- 
meure révoquée  par  survenance  d'enfants  ;  condamne  les 
intimés  à  restituer  à  l'appelant  les  biens   énoncés   audit 
acte,  ainsi  que  les  titres  y  afférents  et  les  fruits  perçus  de- 
puis la  demande,  et  ce,  dans  les  hùît  jôufô  du  présent  arrêt; 
sinon  et  faute  de  ce  faire,  autorise  l'appelant  à  rentrer  en 
possession  de  ses  biens  par  les  voies  de  droit,  en  vertu  de 
l'arrêt; — aux  offres  faites  par  i'appelantdelibérer  les  intimés 
de  toutes  les  obligations  contractées  envei^lui,  d'appliquer 
le  bénéfice  de  la  révocation  et  toutes  ses  conséquences  à  la 
cession  mobilière  du  même  jour43flMfl's1854f,«îtde  ratifier 
la  vente  faite  par  les  intimés  au  sieur  Gérard,  par  acte  passé 
devant  M^  Bottieau,  sauf  à  être  remboursé  du  pi*ix  en  prin- 
cipal et  intérêts,  et  sous  la  réserve  faîte  par  l'appelant  de 
poursuivre  ultérieurement,  par  action  régulière,  l'annula- 
tion de  ladite  cession  mobilière,  si  les  offres  ci-dèssusn'é- 
taient  point  acceptées. 


(350) 

Du  4«r  août  1860.  I^^  cbamb.  Pré&id.^  M.  de  Moulon,  i^r 

«résid.;  minist.  publ.,  M.  Morcrelte,4^raYOC.-gén.;  avoc, 
[es  Talon  et  Dunem  ;  avou.,  Mes  Lavoix  et  Debeaumont. 


1°  NOVATION.  —  PRIX  DE  VJBNTB.  —  BILLETS  A  ORDRE. 
2<>  INTÉRÊTS.  —  DEMANDE  DU    CAPITAL.    —    PRODUCTION    A 
FAILLITE.  —  CONTRAT  d'uNION.  —  RÉHABILITATION. 

i^  Le  vendeur  qui  reçoit  des  billets  à  ordre  en  payement  du 
prix  de  vente,  ne  fait  point  pour  cela  novation  à  sa 
créance  (1). 

^  Dans  les  obligations  consistant  en  un  payement  d^um 
somme  d'argent,  les  intérêts  ne  sont  dus  que  du  jour  ou 
ils  ont  été  forrneUement  demandés  en  justice,  la  demande 
du  capital  ne  suffit  pa>s  pour  leur  donner  cours,  à  moins 

Îue  ta  loi  neles  fasse  courir  de  plein  droit.  (C.  Nap.,  art. 
453,  4454,  4904.)  (2) 

(1)  y.  dans  ce  sens  ks  nombreuses  autorités  indi()uées  dans  le  Code 
annoté  de  Gilbert  sur  Tart.  1271  G.  Nap.,  n^S  et  saiv.  V.  en  outre  Caen 
3  janv.  1849,  S.  V.  1849,  2,  640.  —  Grenoble  mars  1850,  S.  V.  1851, 
2, 324. 

(2)  Ge  principe  est  admis  d'une  manière  générale  par  la  dociriDe  et 
la  jurisprudence.  V.  le  Gode  annoté  de  Gilbert,  art.  1153  G.  Nap.,  no40. 
V.  aussi  Cass.  13  janv.  1852,  S.  V.  1852,  1,  238.  Rej.  ch.  req.,  ik 
janv.  1856,  S.  V.  1857,  1,  288;  1er  mai  1857,  S.  V.  1857,  1,71^;  23 
février  1828,  S.  V.  1858, 1 ,  600.  — -  Il  est  même  admis  en  cette  matière 
qu'un  commandement  et  une  demande  devant  un  juge  incompétent  ne 
peuvent  faire  produire  d'intérêts.  Gilbert  sur  Tart.  1153,  n»  44;  Cass. 
rej.  ch.  req.,  16  nov.  1826  (J.  Pal.  3»  édit.  à  sa  date)  ;  Cass.  rej.  ch. 
eiv.,  15  avril  1846  (S.  V.  1846,  1,  818);  Cass.  ch.  civ.,  11  janv.  1847 
(S.  V.  1847. 1, 522).  V.  encore  S.  V.  1853, 2,  600,  en  ce  qui  concerne 
les  condamnations  aux  dépens. 

On  cite  en  sens  contraire  un  arrêt  de  rejet  du  20  nov.  1848  (S.  V. 
.1849, 1,  130,  J.  Pal.  1849,  t.  1er,  p.  540)  ;  mais  en  lisant  cet  arrêt,  on 
se  convainc  .que  la  chambre  des  requêtes  a  rejeté  le  pourvoi  formé 
contre  une  décision  de  la  Cour  de  Bordeaux,  par  ce  motif  que  le  grief 
invoqué  par  le  demandeur  en  cassation  constituait  un  moyen  de  requête 
civile  :  «  Attendu  en  fait,  dit  la  Cour  de  cassation,  qu'en  concluant  au 
9  payement  des  12,500  fr.,  Batrë  n'a  pas  conclu  spécialement  aux  inté- 
»  rets,  et  que  cependant  les  intérêts  lui  ont  été  alloués  du  jour  de  la 
»  demande  ;  —  Attendu  en  droit  que  ce  serait  un  moyen  de  requête  ci- 
>  vile  et  non  un  moyen  de  cassation,  etc.  » 

.  Il  est  vrai  que  le  rédacteur  de  l'arrêt  ajoute  ensuite  suréro^atoirc- 
ment  que  la  demande  du  capital  suffît  pour  faire  produire  des  intérêts 
moratoires  ;  il  cite  à  ce  sujet  Fart.  60  de  la  Coutume  d'Orléans,  et  un 
arrêt  du  17  décembre  1776,  rendu  par  le  parlement  de  Flandre.  Mais 
il  est  juste  de  faire  observer  que  ces  antorités  étaient  inapplicables  à 
un  procès  qui  devait  être  jugé  d'après  le  principe  édicté  dans  l'art.  1153 
C.  Nap.  Au  reste,  Merlin,  dans  son  Répertoire,  v»  Intérêts,  §  4,  ^^- 


(351) 

La  production  dam  une  faillite  peuU  être  assimilée  à  une 
demande  en  justice;  toutefois  elle  ne  saurait  avoir  une 
puissance  plus  étendue  :  de  telle  sorte  que  le  créancier 
produisant  serait  censé  avoir  demandé  à  la  fois  et  le  ca- 
pital et  les  intérêts  contre  le  faiUi,  —  En  conséquence 
le  créancier  qui,  postérieurement  à  la  clôture  du  contrat 
d'union,  demande  le  payement  de  sa  créance,  est  sans 
droit  pour  réclamer  contre  le  failli  les  intérêts  courus  de- 
puis la  production,  si  d'ailleurs  ces  intérêts  n'ont  pas 
été  spécialement  demandés  avant  ou  depuis  la  faillite. 
(C.  Nap.,  art.  1153, 1488  ;  G.  com.,  art.  539.)  (3). 

montre  aue  le  Code  a  fait  cesser  la  divergence  de  jurisprudence  qui 
existait  a  cet  égard  dans  les  différents  ressorts  des  parlonients  ;  il  éta- 
blit clairement  queTart.  1153  reproduit  Tosage  constant  du  Ghâteletde 
Paris,  d*après  lequel  la  demande  en  justice  seule  faisait  conriï*  les  inté- 
rêts moratoires,  et  que  ces  intérêts  enx-mémes  n'étaient  dus  que  lors- 
qu'ils avaient  été  spécialement  requis. 

(3)  La  question  jugée  par  la  Cour  de  Douai  est  neuve  en  jurispru- 
dence. 11  n'existe  a  notre  connaissance  aucun  arrêt  qui  Fait  résolue. 
On  admet  assez  généralement  qu'une  production,  dans  un  ordre  ou 
dans  une  distribution  par  contrioution,  est  une  demande  judiciaire. 

V.  l'art.  133  du  Tarif  civil,  Cass.  rej.  ch.  civ.,  2  avril  1833  (J.  Pal.  à 
sa  date).  ;  Carré,  revu  par  Cbauveau,  Lois  de  la  procédure  civàe,  ques- 
tion no  2604  ;  Gilbert,  C,  civ.  annoté,  art.  1153,  no  41.  —  Il  en  est  de 
même  de  la  demande  formée  entre  cohéritiers  renvoyés  par  le  Tribunal 
devant  un  notaire,  aux  termes  de  l'art.  976  C.  pr.  civ.  Cass.  22  février 
1813  (J.  Pal.,  3o  édit.,  et  S.  V.  C.  N.  à  sa  date), 

La  production  dans  une  faillite  est  de  même  nature  et  revêt  le  mêoie 
caractère.  Mais  comme  les  productions  dans  les  ordres  et  dans  les  con- 
tributions ne  font  courir  les  intérêts  qu'autant  qu'ils  auront  été  requis, 
il  est  juste  de  reconnaître  que  là  production  dans  une  faillite  ne  peut 
avoir  des  effets  plus  étendus.  On  voudrait  vainement  prétendre  que  le 
débiteur  a  été  suffisamment  mis  en  demeure  par  le  jugement  déclaratif 
de  faillite,  qu'il  y  a  impossibilité  et  inutilité  pour  le  créancier  d'exercer 
des  poursuites  à  partir  de  ce  jugement,  puisque  sa  dette  même  non 
échue  est  devenue  exigible,  et  que  la  personnalité  juridique  du  failli  est 
absorbée  par  l'administration  syndicale.  (Art.  442  et  443  C.  com.) 

Ces  raisons  sont  sans  valeur  en  présence  du  principe  posé  dans  l'art. 
1153  G.  Nap.,  qui  domine  toute  la  matière  des  obligations  civiles  et 
•commerciales,  et  aux  termes  du(|uel  les  intérêts  ne  sont  dus  que  du  kur 
où  ils  ont  été  demandés.  La  faillite,  de  même  aue  la  déconfiture,  fait  bien 
déchoir  du  bénéfice  du  terme  (art.  1188  C.  Nap.);  mais  nulle  part  la 
loi  n'a  voulu  rattacher,  à  l'état  de  débiteor  en  faillite  ou  en  déconfiture, 
cet  effet  de  faire  produire  de  plein  droit  de«  intérêts  aux  dettes  qui  sont 
devenues  exigibles.  D'ailleurs,  de  l'impossibilité  où  se  trouve  le  créan- 
cier d'agir  contre  le  failli,  peut*on  conclure  juridiouement,  dans  le  si- 
lence de  la  loi,  qu'il  est  censé  avoir  fait  ce  que  la  toi  ne  lui  permettait 
point  de  faire? 

V.  Pal  Rép.,  vo faillite,  no  2820,  et  Dalloz,Alphab.,  vo  Faillite, 
no  1545. 


(352) 

A  ce  cas  n*est  pas  applicable  VarL  604  C  corn.,  coficmiafit 
le  failli  qui  sollictte  sa  réhabililalion  {i). 

(Hanicotte  C.  Serdobel.) 

Dans  le  courant  de  l'année  4852,  le  sieur  Vantroyen 
vendit  au  eienr  Hanicotte^  agent  commercial  à  Bélbune, 
une  certaine  quantité  de  betteraves  pour  le  prix  de  4,263 
francs  45  centimes*  Le  règlement  des  factures  fut  opéré 
à  l'aide  de  billeti  à  ordre  garantis  par  la  femme  de  l'ache- 
teur. Hanicotte  ayant  fait  de  mauvaises  affaires,  sa  faillite 
fut  déclarée  par  jugement  du  28  janvier  4853.  Lors  de  la 
vérification  des  créances,  Vantroyen  produisit  ses  factures 
et  se  fit  admettre  au  passif  de  la  feillite  pour  la  somme  de 
4,263  fr.  45c. 

Les  créanciers  n'ayant  pas  consenti  de  concordat,  restè- 
rent en  étot  d'union,  et  la  faillite  se  termina  pai*  une  liqui- 
dation définitive  qui  donnait  4  fr.  30  c.  %.  —  Ullérieure- 
mént,  le  46  janvier  4840,  Hanicotte  ayant  acquis  de  nou- 
velles ressources,  fut  poursuivi  en  payement  ae  4,465  li\ 
44  c,  dont  il  restait  débiteur.  L'exploit  introduclîf  d'ins- 
tance, signifié  i  la  requête  du  sieur  Serdobel ,  liquidateur 
et  administrateur  de  la  succession  de  Vantroyen,  récla- 
mait en  outre  4,752  fr,  pour  intérêts  courus  depuis  le  28 
janvier  4853,  jour  du  jugement  déclaratif  de  faillite. 

Devant  le  Tribunal  de  commerce  de  Béthune,  Hanicotte 
soutint  qu'il  y  avait  eu  novation  dans  sa  dette  primitive; 
que  cette  dette  avait  été  éteinte  et  remplacée  par  les  billets 
â  ordre,  et  que  le  payement  de  ces  blllels  n'ayant  pas  été 
réclamé  dans  les  cinq  ans  à  partir  de  leur  création,  il  in- 
voquait la  prescription^  aux  termes  de  l'art.  489  C.  com. 


■    «     ll..fci«fc.» >»*    I     >      t  f  ti0Ut*mt^ldiM,ÊU,l,*»*^,êmÊ^mÊi^tmmk^Jb*élktil^tM 


(4)  Pardessus,  dans  son  Traité  du  droH  commercial,  t.  6,  no  1316,  et 
après  lui  Bétfeirri de,  Trmté  deê  FailHtes,  n»  13H  ;  fioulay-Paty,  ««»6i9  ; 
Biochè',  to  Faillite,  n«  157&,  so«t4effttteïrt  qttele  faillLqui  vêttt  obtenir  sa 
féhabililaftt4m,  doit  p&f er  toote» ses  éesltes^n  capital  et  intérêts  courus 
depuis  le  jugemeni  déelirratif  de  faiiliui^  tis  donnent  ivour  motif  qu'à  par- 
tir de  eejiigeiiâ«nt,  le  débiteur  esi  mis  un  4Jlenieûre  de  payefies  intérêts. 
L'arrêt  ^ue  nous  recueilkiAs  sembla  se  ranger  à  cette  opmioB^  qui  est 
vitetnent  combattue  pàv  les  aotenrs  du  Répertoire  du  J.  du  Palais  et  de 
Dallos^v  cit.  Nousincliiionâ  à  adioptér  l'opinion  de  M.  Dalloz.  Le  failli 
<|ai  veut  <4itenir  sa  réhftl^litation  doit  sans  d^ute  désintéresser  intégra- 
lemeift  m%  créanciers»  il  449>tt  payer  lé  capital  de  sa  dette  et  les  intérêts 
({uand  ils  sont  dus;  mais  est-il  astreint  a  payer  les  intérêts,  qnand  ces 
intérdtsne  so^t  dus  fiienvertnd'uiie  stipulation  particuiiéi'e,  ni  en  vertu 
de  conclusions  ou  réquisitions  spéciales  formulées  en  justice?  La  ques- 
tion ne  nous  parait  ^as  pouvoir  recevoir  une  autre  solution  que  celle 
donnée  dans  Fespèce  jugée  par  l'arrêt. 


(353) 

Subsidiairement,  il  prélendit  tte  pas  devoir  les  intérêts  cou- 
rus députe  le  jfigement  déclaratif  de  faillite,  mais  seule- 
ment ceux  courus  depuis  la  demande  judiciaire  notifiée  le 
16  janvier  4860. 

Le  Tribunal  rejeta  ces  moyens  de  défense,  par  un  juge- 
ment du  3  février  1860,  dont  la  teneur  suit  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  qu'il  est  constant  et  d*ailleurs  reconnu  par 
les  parties  qu'en  1852  Vantroyen  â  fourni  à  Hanicolte  des 
betteraves  pour  uiie  somme  de  4,263  fr.  15  c.  ; 

»  Qu'à  raison  de  ces  fournitures,  Hanicotte  a  souscrit  au 
profit  de  Vantroyen,  le  18  novembre  1852,  quatre  billets 
à  ordre,  lesquels  ont  été  signés  p(^r  aval  par  Iphigéniè 
Pontfort,  femme  dudit  Hanicotte,  de  lui  autorisée  ; 

j  Attendu  que,  pour  repousser  la  demande  intentée  au- 
jôut'd''hui  Contre  lui  par  Serdobel,  liquidateur*  et  adminis- 
trateur judiciaire  delà  succession  dudit  Vantroyen,  Hani- 
cotte invoquant  la  to vallon,  prétend  1»  que  sa  première 
dette  à  été  éteinte  et  remplacée  par  Une  autre  procédant 
desdhs  billets  à  ordre  *  que  le  reiUboursettiènt  de  ces  bil- 
lets li'avâiit  pas  été  réclamé  dans  une  période  de  cinq  an- 
nées à  partir  de  leur  création,  il  est  fondé  â  invoquer  la 
prescription,  aux  termes  de  l'art*  189  C.  com  ;  2»  qu'en 
admeltaiit  même  que  la  noVation  n'ait  pas  été  opérée  par 
la  création  dès  billets,  il  ne  doit  pas  être  tenu  des  intérêts 
de  la  sotntne  réclamée,  puisque  ces  intérêts  n'ont  pas  été 
stipulés. 

3  Sur  le  premier  ttioyen  : 

:»  Attendu  ({\xë  nul  n'est  présumé  renoncer  à  ses  droits  ; 
que  la  dovation  ne  se  présume  pas  ;  que,  pour  qu'elle  s'o- 
père>  il  faut  qu'il  n'y  ait  aucun  doute  sur  Tinteation  des 
partie»  5 

3  Attendu  que  rien  denë  la  cause  ne  démontre  que  Van- 
troyen ait  abdiqué  ses  premiers  droits  ;  que  tout  semble 
indiquer)  au  contraire,  qu'il  a  tout  fait  pour  les  sauve- 
garder j  qu'il  n'a  fait  souscrire  les  quatre  billets  dont 
s'agît  avec  l'éval  de  la  femme  Hanicotte,  que  le  18  no- 
vembfe  iS52i,  après  qu'il  avait  à  tort  réclamé  le  mon- 
làïit  dé  sa  C!?éflft<ië  k  Déttisse  et  O^,  comme  le  constate  un 
TOME  xviii.  23 


(SU) 

jugement  du  Tribunal  de  Saint-Omer  du  9  février  précé- 
dent ;  qu'en  ce  faisant  il  se  procurait  une  reconnaissance 
de  la  dette  et  une  garantie  pour  en  obtenir  le  rembourse- 
ment ;  qu'il  n'y  a  aucun  motif  d'admettre  qu'il  ait  voulu 
substituer  à  sa  créance  primitive  une  autre  créance  moins 
avantageuse  ;  qu'il  y  a  donc  lieu  de  rejeter  les  conclusions 
de  Hanicolte  en  ce  regard. 

>  Sur  le  second  moyen  : 

>  Attendu  qu'aux  termes  de  l'arl.  1153  C.  Nap.,  les  in- 
térêts sont  dus  à  partir  du  jour  de  la  demande  ; 

»  Attendu  que  Hanicotle  ayant  été  déclaré  en  faillite 
par  jugement  du  28  janvier  1853,  Vantroyen  a  produit  au 
passif  le  5  février  suivant  et  a  été  admis,  le  19  mars,  pour 
la  somme  de  4,263  fr.  15c.; 

»  Attendu  que  cette  production  équivaut  à  une  mise  en 
demeure  ;  qu'elle  était  en  effet,  à  cette  époque ,  le  seul 
mode  que  pût  employer  Vantroyen  pour  faire  courir  les 
intérêts  de  sa  créance,  intérêts  non  stipulés  d'abord  ;  qu'il 
y  a  donc  lieu  de  décider  que  les  intérêts  de  la  somme  de 
4,263  fr.  15  c.  ont  commencé  leur  cours  le  5  février  1853; 
que  vainement  Serdobel  voudrait  faire  courir  ces  intérêts 
à  partir  du  jour  du  jugement  déclaratif  de  faillite  ;  que  la 
mise  en  faillite  ne  saurait  équivaloir  à  une  mise  en  de- 
meure, alors  surtout,  comme  dans  l'espèce,  que  cette  mise 
en  faillite  n'a  pas  été  provoquée  par  le  créancier  en  cause  ; 

>  Attendu  que,  de  la  somme  de  4,263  fr.  15  c,  il  y  a 
lieu  de  déduire  le  dividende  reçu  dans  la  faillite  et  calculé 
sur  le  chiffre  de  2  fr.  30  c.  p.  ^/oy  soit  98  fr.  5  c.; 

Par  ces  motifs,  le  Tribunal  condamne  Hanicotte,  même 
par  corps,  à  payer  à  Serdobel  ès-qualité  :  !<>  la  somme 
principale  de  4,165  fr.  15  c.  ;  2»  celle  de  1,735  fr.  41  c. 
pour  intérêts  de  la  première,  depuis  le  5  février  1853  jus- 
qu'au 16  janvier  1860,  soit  ensemble  la  somme  de  5,900 
fr.  52  c.  avec  intérêts  à  partir  du  jour  de  la  demande.» 

Appel  par  Hanicolte.  Devant  la  Cour  il  reproduit  les 
moyens  de  première  instance,  et  très-subsidiairement  il  se 
prévaut  de  la  prescription  établie  par  Tart.  2277  C.  Nap. 
pour  le  payement  des  intérêts  échus  depuis  plus  de  5  ans. 


(355) 

La  Cour  a  réformé  la  sentence  des  premiers  juges  dans 
les  termes  suivants  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —En  ce  qui  louche  la  novation,  adoptant 
les  motifs  des  premiers  juges; 
En  ce  qui  touche  les  intérêts  : 

Attendu  qu'aux  termes  de  Tart.  M53  C.  Nap.j  dans  les 
obligations  qui  se  bornent  au  payement  d'une  certaine 
somme,  les  dommages-intérêts  résultant  du  retard  dans 
l'exécution  ne  consistent  jamais  que  dans  la  condamnation 
aux  intérêts  fixés  par  la  loi,  et  qu'ils  ne  sont  dus  que  du 
jour  de  la  demande,  excepté  dans  les  cas  où  la  loi  les  fait 
courir  de  plein  droit  ; 

Attendu  que  si  la  production  à  la  faillite  peut  être  consi- 
dérée comme  une  demande  formée  devant  le  juge-com- 
missaire, à  laquelle  les  autres  créanciers  et  le  failli  lui- 
même  sont  appelés  à  contredire,  la  réclamation  de  Vanti'oyen 
n'a  porté  que  sur  le  capital  et  non  sur  les  intérêts  ; 

Attendu*  qu'une  simple  mise  en  demeure  de  payer  le  ca- 
pital ne  suffit  pas  pour  faire  courir  les  intérêts  moratoires  ; 
qu'il  faut  qu'ils  soient  expressément  réclamés  en  justice  ; 

Attendu  qu'en  vain  on  argumenterait  des  dispositions  de 
l'art.  604-0.  com.  pour  soutenir  que  les  intérêts  sont  dus 
de  plein  droit  du  jour  de  la  faillite  ; 

Que  le  législateur  a  posé  sans  doute  comme  condition 
de  la  réhabilitation  du  failli  le  payement  intégral  en  capital 
et  intérêts  des  sommes  par  lui  dues  ;  mais  que  cette  obli- 
gaiion  de  payer  les  intérêts  n'est  imposée  que  pour  obtenir 
la  faveur  de  la  réhabilitation,  le  débiteur  restant  dans  le 
di'oit  commun  lorsqu'il  est  poursuivi  en  payement  par  un 
créancier  ; 

Emendant,  réduit  à  4f,165fr.  41  c.  la  condamnation  pro- 
noncée contre  Hanicotte  avec  intérêts  à  partir  de  la 
demande  seulement  ;  ordonne  que  le  surplus  du  jugement 
sortira  effets  etc. 

Du  2  août  4860.  2®  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  mînist. 
publ.,  M.  Berr,  avoc.-gén.,  concl.  cont.  ;  avoc,  Mes  Merlin 
et  Coquelin;  avou.,  M^s  Lavoix  etHuret. 


(356) 
COMPÉTENCE  COMMERCIALE.  —  dette  coimERCiALE.— 

DEMANDE   RECONVENTIONNELLE    OU    EN    COMPENSATION.  — 
DÉLÉGATION  DE  CRÉANCE.  —  ACTE  CIVIL. 

Le  Tribunal  de  commerce,  saisi  par  un  commerçant  d'une 
demande  en  payement  d'une  dette  conmierciale  réclamée 
à  un  commerçant,  n'a  pas  compétence  pour  connaître 
dune  demande  reconventionnelle  ou  en  compensation 
opposée  directement  à  V action  principale  par  le  défen- 
deur, lorsque  cette  demande  est  fondée  sur  un  acte  civil, 
pula  la  délégation  d'une  créance  civile  (i). 

La  créance  du  demandeur  principal  étant  liquide  et  exi- 
gible, tandis  que  la  cession  et  la  réalité  de  la  créance 
cédée  sont  déniées  ,  le  juge  ne  doit  pas  surseoir  à 
statuer  (2). 

(Lemaire,  femme  Defrenne,  G.  Defrenne.) 

Le  28  janvier  4852,  le  sieur  Clovis  Defrenne,  marchand 
boucher  à  Arras,  épousa  la  demoiselle  Mélanie  ternaire. 
Dans  le  contrat  anténuptial,  Taïeule  de  Clovis,  la  veuve 
Longuepée,  lui  avait  constitué  en  dot  une  somme  de  3,500 
fr.,  dont  8,000  fr.,  paraît-il,  auraient  été  payés  le  15  no- 
vembre 1856. 

Le  commerce  des  époux  Defrenne  ne  prospéra  point.  En 
1857,  leur  situation  devint  tellement  embarrassée,  qu'ils 
furent  obligés  de  convoquer  leurs  créanciers.  Un  atermoie- 
ment fut  consenti,  et  les  créanciers  signèrent  un  concordat 
amiable  qui  leur  assurait  75  p.  ^Jo  payables  en  plusieurs 
termes.  Vers  la  même  époque,  la  femme  de  Defrenne  ob- 
tint sa  séparation  de  biens,  et  fit  régler  ses  reprises,  dont 
le  chiffre  fut  fixé  à  2,000  fr.  Elle  accepta  en  payement  tout 
le  mobilier  industriel  de  son  mari,  et  renonça  à  la  com- 
munauté. Bientôt  elle  ouvrit  un  étal  de  bouchère  pour  son 
compte  personnel  avec  l'autorisation  de  son  mari,  et  celui- 
ci,  qui  était  malade,  alla  se  retirer  chez  ses  père  et  mère. 

Avant  d'entreprendre  son  commerce,  la  dame  Defrenne 
avait  obtenu  de  son  beau-père ,  Simon  Defrenne ,  mar- 
chand boucher  à  Arras,  la  promesse  qu'il  lui  livrerait  les 
viandes  nécessaires  pour  subvenir  aux  besoins  de  sa  clien- 
tèle. Des  fournitures  assez  importantes  ftirent  feiles  par 
Simon  Defrenne  à  sa  bru,  du  11  février  4857  au  23  juillet 

■  ■      ■  »  I  I  ■  I    ■!  ■  I  • 

(1-2)  V.  dans  ce  sens  :  Douai  Î6  mars  et  19  nov.  1859, 2e  ch  (Jurisp. 
17,  Gi  et  299,  où  de  nombreuses  autorités  sont  indiquées.) 


(357) 

de  la  même  année  ;  le  chiffre  s'en  élevait  à  4,691  fr.  45  c. 
Des  à-comptes  avaient  été  payés,  et  il  restait  du  1 ,905  fr. 
45  c.  A  la  suite  de  difficultés  survenues  entre  la  dame  Clo- 
vis  Defrenne  et  son  beau-père,  celui-ci  l'assigna  en  paye- 
ment devant  le  Tribunal  de  commerce.  Les  parties,  ren- 
voyées devant  un  juge-commissaire,  île  purent  tomber 
d'accord,  et  Tafifaire  revint  à  l'audience.  Toutefois  Simon 
Defrenne  réduisit  sa  demande  à  1 ,750  fr.  80  c.  Quant  à  la 
dame  Clovis  Defrenne,  elle  prétendit  que  sa  dette  était 
éteinte^  elle  soutint  qu'il'  avait  été  convenu  entre  elle  et 
son  beau-pére  que  la  créance  de  3,500  fr.  qu'avait  son 
mari  contre  la  veuve  Longuepée  avait  été  acceptée  en  paye- 
ment des  fournitures  jusqu'à  concutrence  du  chiffre 
réclamé. 

En  présence  des  dénégations  formelles  de  Simon  De- 
frenne, elle  prit  des  conclusions  subsidiaires  par  lesquelles 
elle  demanda  à  prouver,  tant  par  titres  que  par  témoins  : 
1o  que  Simon  Defrenne  avait  accepté  en  payement  partie 
de  la  somme  de  8,500  fr.  due  par  la  veuve  Longuepée  à 
Clovis  Defrenne  ;  2o  que,  depuis  le  procès,  Defrenne  père 
avait  fait  frauduleusement  signer  par  son  fils  une  quittance 
de  la  somme  de  3,000  fr.  qu'il  n'a  jamais  reçue. 

Le  34  décembre  4859,  le  Tribunal  rejeta  les  conclusions 
de  la  dame  Defrenne,  et  la  condamna  à  payer  la  somme 
qui  lui  était  réclamée,  dans  les  termes  suivants  : 

JUGEMENT. 

c  Attendu  que  Defrenne  père  a  fait  des  fournitures  à  la 
dame  Clovis  Defrenne,  depuis  le  44  février  4857,  s'élevant 
à4,750fr.8Gc,; 

»  Attendu  que  la  dame  Defrenne  reconnaît  la  réalité  des 
fournitures,  mais  veut  en  compenser  le  prix  avec  une  par- 
tie de  la  somme  de  3,500  fr.  promise  par  la  veuve  Lon- 
guepée à  Clovis  Defrenne,  son  petit-fils  ; 

»  Attendu  que  la  promesse  de  la  veuve  Longuepée  est 
une  obligation  contractée  lor&  du  mariage  de  Clovis  ;  qu'elle 
ne  regarde  pas  Defrenne  père  ; 

»  Attendu  que  le  Tribunal  est  incompétent  pour  connaî- 
tre d'une  promesse  faite  à  l'occasion  d'un  mariage; 

»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal  se  déclare  incompétent  pour 
connaître  de  la  promesse  de  la  veuve  Longuepée  envers 
Clovis; 


(358) 

»  Statuant  sur  la  demande  de  Defrenne  père,  condamne 
la  dame  Clovis  Defrenne  à  payer  audit  Defrenne  père  la 
somme  de  1 ,750  fr.  80  c,  etc.  » 

Appel  par  la  dame  Defrenne.  —  On  invoque,  à  l'appui 
de  l'appel,  le  principe  que  le  juge  de  l'action  est  le  juge 
de  l'exception.  La  demande  déférée  au  Tribunal  de  com- 
merce, par  un  commerçant  contre  une  commerçante,  était 
commerciale  de  sa  nature.  Les  premiers  juges  devaient 
donc  connaître  de  toutes  les  exceptions  qui  étaient  une  dé- 
fense directement  opposée  à  l'action  principale.  La  dame 
Defrenne,  qu'on  prétendait  être  débitrice,  repoussait  éner- 
giquement  la  situation  qu'on  voulait  lui  faire  subir;  elle 
soutenait  que  la  dette  à  elle  réclamée  était  éteinte  à  l'aide 
d'une  dation  en  payement,  d'une  délégation  de  créance. 
Cette  défense  se  rattachait  d'une  manière  intime  à  l'attaque 
et  devait  être  examinée  ;  le  juge  avait  pouvoir  pour 
la  vérifier.  On  citait  à  l'appui  de  ce  système  l'opinion  d'O- 
rillard,  Traité  de  la  compétence  des  TrUmnaux  de  com- 
merce, no  98;  un  arrêt  de  rejet  de  la  chambre  des  requêtes, 
du  2  août  1827  (Sirey,  Coll.  n.  à  sa  date),  et  un  arrêt  du 
8  mars  4844  de  la  Cour  de  Bordeaux  (Sirey  4845,  partie 
2e,  p.  4.) 

Dans  l'intérêt  de  l'intimé,  on  reproduit  les  moyens  pré- 
sentés en  première  instance.  On  dénie  lormellement  la 
convention  alléguée  et  l'existence  même  de  la  créance  dé- 
léguée. La  dénégation  sur  ce  dernier  point  est  prouvée  par 
une  quittance  écrite  de  la  main  de  Clovis.  Au  surplus,  di- 
sait-on, pour  payer  il  faut  être  propriétaire  de  la  chose 
donnée  en  payement  (art.  4238  C.  Nap.).  Or,  la  créance 
dont  s'agit  appartenailiâ  Clovis  Defrenne  et  non  à  Mélanie 
Lemaire,  sa  femme.  Enfin  on  ajoutait  que  la  prétendue 
délégation  de  la  créance  n'aurait  été  valable  qu'en  accom- 
plissant les  formalités  de  l'art.  4690  C.  Nap.,  puisqu'elle 
était  civile.  C'était  donc  un  acte  de  non  commerçant,  un 
acte  civil,  et  en  ce  regard  le  Tribunal  de  commerce  était 
incompétent  pour  en  connaître. 

La  Cour  a  confirmé  le  jugement  dans  les  termes  sui- 
vants ; 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Attendu  qu'à  la  demande  en  payement  de 
marchandises  fournies  dirigée  contre  elle,  la  dame  Lemaire, 
épouse  séparée  de  biens  de  Clovis  Defrenne,  oppose  une 


(359) 

compensation  par  la  cession  qu'aurait  faite  son  mari  au  de-* 
mandeur  d'une  créance  à  lui  personnelle  sur  la  veuve  Lon- 
guepée,  résultant  de  son  contrat  de  mariage  ; 

Attendu  qu'à  bon  droit  le  Tribunal  s'est  déclaré  incom- 
pétent pour  connaître  de  la  réalité  de  cette  convention, 
acte  purement  civil  ; 

Qu'il  n'a  pas  dû  davantage  surseoir  à  statuer  jusqu'à  ce 
qu'il  ait  été  jugé  si  la  veuve  Longuepée  était  débitrice  et  si 
la  délégation  avait  été  faite  et  acceptée  ;  qu'en  effet  la  créance 
du  demandeur  était  liquide  et  exigible,  tandis  que  la  ces- 
sion aussi  bien  que  la  réalité  de  la  créance  cédée,  sur  les- 
queHes  reposait  la  compensation ,  sont  formellement 
déniées  ; 

La  Cour  met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  ju- 
gement dont  est  appel  sortira  effet,  etc. 

Du  2  août  1860.  2^  chamb.  Présid.,  M.  Danel;  minist. 
publ.,  M.  Ben',  avoc.-gén,,  concl.  conf.  ;  avoc,  M^s  Du- 
pont et  Duhem;  avou.,  M^s  Lavoix  et  Debeaumont. 


FEMME  SÉPARÉE  DE  BIENS.  —  obligation  contractée 

SANS   AUTORISATION  MARITALE.  —  NULLITÉ. 

La  femme  séparée  de  biens  judiciairement  ne  peut,  sans 
r autorisation  de  son  mari,  s'obliger  valablement  que 
pour  des  actes  relatifs  à  V administration,  de  sa  for- 
tune (1). 

Est  nulle  comme  ne  se  rattachant  pas  à  V administration 
de  sa  fortune,  la  convention  par  laquelle  une  femme  sé^ 
parée  de  biens  s'oblige  à  payer  une  somme  de  3,378  fr. 
à  un  entrepreneur  qui  s'engage  à  lui  construire  une  mai- 
son sur  un  terrain  a  elle  propre,  alors  surtout  que  les: 
reventes  annuels  de  la  femme  ne  s'élèvent  qu'à  660  fr., 
et  que  son  avoir  mobilier  n'est  que  de  i,600  fr.  (2). 

Dans  une  telle  hypothèse,  elle  a  le  droit  de  répéter  les  som-- 
mes  qu'elle  a  payées  en  à-compte  et  de  faire  enlever, 
conformément  à  l'art,  555  C.  Nap.,  les  constructions 
élevées  sur  son  terrain,  (C.  Nap.,  art.  217,  15â6  et 
suiv.)  (3). 

(1-2-3)  y.  sur  ce  point  :  Demolombe,  Cours  de  Code  Napoléon»  t.  4^ 
n<w|50  et  suiv.,  154,  161,  163),  et  les  autorités  iudiqui^es  ;  Troplong, 
Traité  du  Contrat  de  mariage,  n^  1417  et  suiv.  ;  Gass.  18  mars,  5  mai 


(360) 

(Ancreraan  C.  Daullé,  femme  Leblanc.) 

Le  30  août  1855,  la  dame  EuçhrasieDaullé  obtint  contre 
son  mari,  Agathon  Leblanc,  eultivaleur,  demeurant  à  Pain- 
ville,  arrondissement  d'Arras,  un  jugement  fie  séparation 
de  corps.  Une  liquidalion  fut  ouverte,  et  les  reprise?  de  la 
femme  furent  fixées  à  une  somme  de  1,600  fr,  qui  furent 
dépQsés  chez  sou  notaire. 

La  dame  Leblanc  avait  tout  d'abord  pris  la  résolution  de 
demeurer  à  Duisans,  arrondissement  d'Arras,  chez  ses  père 
et  mère  ;  mais  ceux-ci  étant  décédés,  elle  fut  obligée  de 
louer  une  maison  dans  cette  même  commune.  Plus  taix],en 
1858,  après  avoir  recueilli  les  successions  de  ses  parents 
et  d'un  oncle,  elle  ae  trouva  propriétaire  de  7  hectares 
environ  de  terre  dans  l'arrondissement  d'Arras^  d'^^^  re- 
venu de  660  fr.,  et  crut  devoir  faire  construire  wej  ha- 
bitation. Elle  s'aboucha^  avec  un  sieur  Ancreman,  fit,  le  18 
juillet,  une  convention  aux  termes  de  laquelle  cet  entre- 
preneur s'obligeait  à  lui  construire  une  maison  pour  le 
prix  de  3,378  fr.  Cette  maison  devait  être  bâtie  sur  un  ter- 
rain situé  à  Duisans  et  appartenant  à  la  dame  Leblanc.  Le 
payement  des  3,378  fr.  devait  être  effectué  en  deux  termes, 
1  ,bOO  fr.  immédiatement,  et  le  reste  dans  le  courant  des 
années  1858  et  1859. 

Ancreman  toucha  1,600  fr.  avant  de  commencer  les  tra- 
vaux. Postérieureni^ut,  quand  les  constructions  fureïit  ter- 
minées, il  réclama  les  1,778  fr.  qui  restaient  dq^  liais  il 
parait  qi^'à  ce  moment  les  époux  I^eblaue  s'étaient  récon- 
ciliés. 

Comme  ils  n'avaient  pas  besoin  de  la  nouvelle  demeure, 
la  dame  Leblanc  allégua  que  les  travaux  étaient  mal  exé- 
cutés et  défectueux.  Assignée  devant  le  Tribunal  civil  d'Ar- 
«.."»— ^-^^~'  Il  '     ■  ■'  11.  — — »— « 

et  7  décemb.  1829  (J.  Pal.,  3®  édit.  a  leur  date);  Cass.  3  janv.  1831 
(idem  et  S.  V.  31,  1, 22);  Poitiers  3  fôv.  1858  {J.  PaK  1859,  p.  Ui). 

V.  aussi  DftUos  alphab.,  2e  édit.,  to  GorUrat  de  numttffe^  ii%  1964,  et 
notamment  les  n«»  1975  à  198^,  où  oetante^?  ét^Mit  quela^  Ti^^té  ou 
la  nullité  de  TobligatioA  Qontnaçtée  par  la  feajune  s^épwée  de  biens  dé- 
pendent de$  circonstances.  La  question^  suivant  ce  jurisconsulte,  est 
d'appréciation  de  fait,  et  à  ce  sujet  il  cite  le  procès  de  la  baronne  de 
Feuchères,  où  il  s'agissait  d'une  obligation  de  20Ch,0ûû  fr.  oo)[iT6rtie  en 
une  rente  perpétuelle  do  10,OOQ  fr.,  ôû9HHiié&  ao  prajbt  d^  é#ou^Mo- 
jon.  La  Cour  de  cassation,  dans  un  arrêt  de  rejet  au  %i  ^oût  1839,  a 
décidé  que  cette  obligation  n'excédait  pas  les  bornes  dés  actes  d'admi- 
nistratiaxk  permis  à  la  dame  de  Fe\icl^es,.  çl;  me  l^  montant  d»  V-engi- 
gement  n'était  pâshorsde  proportion  avec  sa  forlui^e  i^obiliér?. 

V.  Paris  12  inai  1859  (J.  Pal.  1860,  p.  634). 


(361) 

rî^s,  elle  iavoqua  h  nullité  de  son  gbliffalioa,  soutint  que 
son  engagement  était  nul  pour  défaut  d'autorisation  mari- 
tale, aux  termes  de  Tari.  217  G.  Nap.  Subsidiairement  elle 
prétendît  que  les  bâtiments  avaient  été  construits  en  con- 
travention ant  conditions  stipulées  dans  le  devis,  en  de- 
manda Fenlèvement,  aux  termes  de  Tart.  5S5  G.  Nap,,  «1 
réclama  le  remboursera wtde?  1,600  fir.  qw'dla  avait  don« 
nés  en  à<*corupte« 

Le  29  novembre  1859,  le  Tribunal  d'Arras  accueillit  la 
défense  de  la  dame  Leblanc,  et  regeta  la  demande  du  sieur 
Ancreman  dans  les  ternies  suivants  : 

€  Considérant  eq  Mt  q«'EuphrasLç  DauUô,  femme  sôpai- 
rée  ilo  bien»  d'Ag^hon  Leblanc,  a,,  le  18  juillet  1858,  sans 
le  concours  ou  Fautorisation  d$  i^on  mQ^dt  fait  ^ived  le  dôr 
mandeuir  uji  traita  par  lequel  m  des^nier  s'obligeait  à  lui 
eonâtruire  un©  maison  sur  i\m  pièœ  à^  terre  dcMM  oUe 
était  propriétaire^  au^  conditions  stipulées  daqs^  Va^cte  et 
moyennant  un  prix  de  3,378  fr.,  dont  1,600  ûr.  furent 
versés  immédiatement  entre  les  mains  dudÂt  demandeur  ; 

»  Que  la  mailson  étant  achevée,  qeluiTci  poursuit  la  dé- 
fenderQSfie  en  réception  des  travaux  exécutés,  ^t  en  paye- 
ment de  la  somme  de  1,778  fir^.  c/amplément  du  pri^n  sti- 
pulé; que  la  défendieFessa  prétendit;  que  Içaqon^tirufitiQns 
ne  sont  pas  l'ei;;émtion  de$  oonditio^Si  de  l'acte  dm  18  juil- 
let 1858^  demande  à  son  tour  :  l<^la  nullité  4e  œt  acte 
comme  ayant  été  fait  par  elle  sans  rautorisatioo  marit^^le 
nécessaire  pour  lui  donner  un  caractère  légal  et  obligatoire; 
2o  l'eBlèvemeottt  des  constructious  élevées,  sur  sa  propriété, 
et  3^  lei  remboursement  d^s  $owmes  payées  par  elle^  en  à- 
Qompte  ; 

»  Considérant  qu'aux  termes  de  l'art;  217  G,  Napn  1^ 
femme  miariée  m  peut  aliéner,  bypathéquer,  acquérir  à 
titre  gratuit  ou  onéreux,  sans  W  Qoncomfs  du  mari  dans 
l'acte  qu  soQi  coBsentameut  par  éçj^iit  ; 

>  Que  si  l'art.  1449  du  même  Gode  a  rekvé  la  femme 
d'une  partie  de  côtte  incapacité,  eA  lui  a  attribué  1^  libre 
adm^inistration  de  ses  biens  et  la  di^pjp^ition  de  son  moln- 
lier,  ces  exceptions  à  un  principe  fondé  sur  le  respect  de 


(362) 

Taulorilé  maritale  ne  peuvent  pas  avoir  pour  conséquence 
de  donner  à  la  femme  le  pouvoir  de  faire  édifier  une  mai- 
son sur  un  de  ses  immeubles;  qu'une  telle  construction, 
alors  surtout  qu'elle  aurait  pour  effet ,  comme  dans  l'es- 
pèce ,  d'absorber  sans  utilité  réelle  la  plus  grande  partie 
des  ressources  delà  femme,  dépasse  évidemment  les  limites 
d'une  administration,  si  étendue  qu'on  la  suppose,  et  n'est 
pas  une  simple  aliénation  mobilière  ; 

»  Qu'elle  constitue  à  la  fois  une  acquisition  immobilière 
ti*ès-onéreuse  et  une  modification  importante  de  l'immeu- 
ble déjà  existant  entre  les  mains  de  la  femme  ;  que,  par 
conséquent,  la  convention  du  18  juillet  1858  excédait  les 
pouvoirs  légaux  de  la  défenderesse  et  se  trouve  par  suite 
entachée  d'un  vice  radical; 

>  Considérant  que  l'autorisation  du  mari  ne  peut  pas  être 
implicite,  suivant  les  termes  formels  de  l'art.  217  susvîsé; 
qu'il  n'échet  dès-lors  d'admettre  la  preuve  offerte  par  le 
demandeur; 

»  Considérant  que  c'est  en  vertu  d'une  convention  que 
le  demandeur  a  construit  la  maison  objet  du  procès,  ce  qui 
exclut  l'idée  qu'il  ait  pu  agir  en  qualité  de  negotiarum 
gestor  de  la  défendresse  ;  que  le  contrat  de  mandat  et  le 
quasi-contrat  de  gestion  ^affaires  sont  essentiellement  dis- 
tincts dans  leur  origine,  dans  leurs  caractères  constitutifs, 
et  dans  leurs  effets,  et  que  l'un  ne  peut  devenir  le  sub- 
sidiaire de  l'autre  ; 

>  Le  Tribunal  statuant  en  premier  ressort,  autorise  en 
tant  que  de  besoin  la  défenderesse  à  ester  dans  l'instance; 

»  Déclare  le  demandeur  mal  fondé  dans  ses  demande, 
fins  et  conclusions  principales  et  non  recevable  dans  celles 
subsidiaires,  et  l'en  déboute  ;  déclare  nulle  et  de  nul  effet 
la  convention  intervenue  le  18  juillet  1858  entre  lui  et  la 
défenderesse  ;  le  condamne  à  enlever,  dans  le  mois  de  la 
signification  du  présent  jugement,  les  èonstructions  par  lui 
élevées  sur  la  propriété  de  ladite  défenderesse,  et  à  réta- 
blir les  lieux  dans  leur  étal  primitif;  sinon  et  faute  de  ce 
faire,  autorise  ladite  défenderesse  à  faire  exécuter  les  tra- 
vaux aux  frais  dudit  demandeur  ; 


(363) 

»  Condamne  ce  dernier  à  remettre  à  la  défenderesse  la 
somme  de  1,600  fr.  qu'il  en  a  reçue,  et  le  condamne  aux 
dépens.  ». 

Appel  par  Ancreman.  —  Devant  la  Cour,  l'appelant  dé- 
veloppe les  conclusions  que  nous  transcrivons  ci-dessous 
et  qui  résument  complètement  les  moyens  à  l'aide  des- 
quels il  croit  pouvoir  demander  la  réformation  de  la  sen- 
tence des  premiers  juges  : 

Attendu  que  si  la  femme  commune  ne  peut  aliéner , 
hypothéquer,  acquérir  sans  le  concours  ae  son  mari 
dans  l'acte  ou  sans  son  consentement  par  écrit,  la 
femme  séparée  judiciairement  reprend  l'admmistration  de 
ses  biens  ;  que  non-seulement  elle  peut  seule  disposer  de 
son  mobilier  et  l'aliéner,  et  que,  quant  aux  immeubles,  il 
ne  lui  est  fait  qu'une  seule  défense,  celle  de  les  aliéner; 

Que,  libre  dans  l'administration  de  sa  fortune  mobilière 
et  immobilière,  la  femme  Leblanc  a  donc  pu,  comme  mode 
d'administration  de  sa  fortune,  améliorer  un  de  ses  im- 
meubles en  se  faisant  élever  des  constructions  ;  que,  pour 
payer  le  prix  de  cette  amélioration,  elle  a  pu  valablement 
s'obliger  en  disposant  d'une  partie  de  sa  fortune  mobilière 
dont  elle  était  parfaitement  libre  de  disposer  ;  que  d'ail- 
leurs, eu  égard  tant  à  la  nécessité  où  elle  se  trouvait  alors 
d'avoir  une  habitation  qu'à  l'ensemble  de  sa  fortune,  l'o- 
bligation de  3,378  fr.,  sur  laquelle  elle  a  même  payé  de 
suite  1,600  fr.,  n'a  rien  que  de  normal  et  n'excédant  pas 
les  ressources  dont  elle  pouvait  raisonnablement  disposer; 

Attendu,  en  toute  hypothèse,  que  le  sieur  Ancreman 
ayant  ainsi  construit,  au  su  et  vu  de  la  propriétaire  et  de 
son  mari,  et  ce  sans  aucune  opposition,  ne  saurait  être 
comparé  au  tiers  construisant  pour  lui-même  sur  le  terrain 
d'autrui,  et  à  qui  l'art.  555  C.  Nap.  est  alors  applicable; 

Qu'au  besoin  la  femme  Leblanc  serait  tenue,  vis-à-vis  du 
sieur  Ancreman,  par  les  principes  de  la  gestion  d'affaires, 
et  devrait,  aux  termes  de  l'art.  1375  C.  Nap.,  rembourser 
audit  Ancreman  les  sommes  utilement  déboursées. 

Plaise  à  la  Cour  dire  que  les  époux  Leblanc  seront  tenus 
de  recevoir  les  travaux  dont  s'agit;  condamner  la  femme 
Leblanc  à  payer  à  Ancreman  la  somme  de  1^778  fr.  ;  sub- 
sidiairement  condamner  la  femme  Leblanc  à  payer  à  l'ap- 

f celant  les  dépenses  par  lui  faites  pour  la  construction  de 
a  maison,  et  ce  suivant  état;  dire  qu'il  y  a  lieu  d'imputer 


(364) 

sur  ces  dépenses  les  1,600  fr.  payés  à  valoir  par  la  dame 
Leblanc,  etc. 

La  Cour  a  confirmé  la  décision  des  premiers  juges  dans 
dans  les  ternies  suivants  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  -—  Attendu  que  la  femme  séparée  de  biens  ne 
peut  libremem.  dispc^er  de  son  revenu  et  aliéner  son  mobi- 
lier que  dans  la  mesure  de  Tadministration  de  sa  fortune 
qui  lui  est  rendue  ; 

Attendu  que  l'on  ne  peut  considérer  comme  fait  ren- 
trant dans  ces  limites  l'engagement  pris  par  la  femme  Le- 
blanc de  payer  une  somme  de  3,378  fr,  pour  rérection 
d'une  maison  d'habitation  sur  un  de  ses  immeubles  ; 

Attendu  que  son  revenu  n'est  que  de  6  à  700  fr.  par 
an  ;  qu'elle  était  chargée  de  l'entretien  d'un  enfant  ;  qu'a- 
près avoir  épuisé  ses  ressources  mobilières  par  l'abandon 
entier  des  4,600  fr.  provenant  de  ses  reprises,  elle  eût  été 
à  l'impossible  de  payer  les!, 778  fr.  exigibles  en  août  1859, 
même  &n  délaissant  ses  revenus  entiers; 

Attendu  qu'on  ne  peut  faire  dégénérer  le  traité  passé 
entre  elle  et  Ancreinan  pour  la.  construction  de  la  niaison 
en  un  quasi-corUrçit  de  gestion  ^ affaires ^Xd  se  forme  sans 
convention; 

Attendu  que  l'art,  555  C.  Naç.  est  applicable,  soit  que 
le  propriétaire  ait  vn  et  su,  ou  ait  ignoré  l'existence  d'ou- 
vrages sur  son  fonds  par  un  tiers  avec  ses  matériaux  ; 

Adoptant  an  surplus  les  motifs  des  premiers  juges,  etc., 

La  Cour  confîrme,^  etc. 

Du  3  août  1860.  2^  chamb.  Présid.,  M,  Danel;  minist. 
pubU,M^  Berr,.  avoc.-gén, ;  avoc,  M^  Dubem  et  Dupont; 
avow,,  Mes  Huret  et  Valette. 


BAIL*  A  LOYER.  —  owJtGATio»  du  baillextr.  —  maison  de 

COilBIVIva;.  —  EX1SRGIG&  I>'lSiJS)USTniBU  —  HÂIS^N  VCHSIKE 
m  RIVAW.  ~  CONCTORENCB  DÉÏ.OYAJUE,  —  RBSPONSàJHUlTB 
f  U  PnaPRlàrAIRK.  -^  WASI^nÉLIT, 

Le  paropriétadre  d'une  mmsan  de  commeree  qiuHl  aexpkUèe 
personnMemenù  et  qu'il  a  ensuite  kmée^  avec  même  éesH- 


(S65) 

nation,  cession  de  clientèle  tst  engagement  de  ne  pus  eooer- 
cer  la  même  industrie  dans  la  même  ville,  ne  peut,  sans 
enfreindre  ses  obligations  et  se  rendre  passible  de  dom- 
mages-intérêts, donner  à  bail  à  un  tiers  une  autre  maison 
contiguë  à  celle-là,  m  permettant  qu'il  y  soit  formé  Ufi 
établissement  rival  du  premier.  Il  susmte  ainsi  à  son 
successeur  une  concurrence  déloyale  dont  il  devient  res- 
ponsable par  son  quasi-délit.  (C.  Nap.  arL  Î719,  4382 
et  1383.)  (1). 

(Bétrancourt,  dame  Plaisant,  C.  Coillet.) 

Par  bail  authentique  en  date  du  13  juin  4858,  la  dame 
Plaisanta  loué  aux  époux  Coillet  pour  neuf  années  consé- 
cutives, avec  la  clientèle  qui  s'y  trouvait  attachée,  une  tnai-* 
son  à  usage  d'hôtel  et  connue  à  Douais  place  d'Armes  » 
n»  \%  sous  l'enseigne  de  V Hôtel  du  Grand  Ifomwe,  moyen- 
nant un  loyer  annuel  de  l,200fr.  avec  pot-de-vin  de  3,400 
francs.  — Dans  le  même  acte,  la  dame  Plaisant  à  cédé  à 
ses  locataires  tous  les  obj'ets  mobiliers  qui  garnissaient  ré- 
tablissement, pour  le  prix  de  7,457  fr.  20  c.  Elle  s'est  de 
plus  obligée  à  relier  avec  eux  pendant  un  mois,  pour  les 
mettre  au  coûtant  du  service  (ce  qu'elle  a  fait),  et  à  ne 
tenir^  pendant  la  durée  du  bail,  dans  la  ville  de  Douai,  aucun 
établissement  à  usage  d'auberge  ou  d'estaminet. 

En  4860,  la  dame  Plaisant,  propriétaire  d'une  maison 
contiguë  à  la  précédente,  la  loua  à  M.  Jules  Pinquet,  bras- 
seur, sans  faire  défense,  dans  les  clauses  du  bail,  d'établir 
dans  cette  maison  auberge  ou  cabaret.  Alors  s'élève,  à  côté 
de  V Hôtel  du  Grand  Homm^,  un  établissement  rival  sous 
l'enseigne  de  Vlndùstrie.  M«  Pinquet  ne  l'exploite  pas  en 

Personne  :  une  licence  est  prisa  au  nom  du  âls  de  la  dame 
laisant;  elle  est  ensuite  reprise  au  nom  du  neveu  de  cette 
même  dame,  et  celui-ci  se  met  au  service  de  la  nouvelle 
auberge  ^Industrie,  avec  le  personnel  autrefois  attaché  à 
V Hôtel  du  Grand  Homme. 

Les  époux  Coillet  s'adressent  à  la  dame  Plaisant  et  lui 
imputent  de  manquer  à  ses  engagemettts.  Elle  leur  oppose 
les  termes  de  son  bail.  Le  Tribunal  civil  de  Douai  est  saisi 
de  la  contestation  ;  Jules  Pinquet  intervient  dans  le  débat, 
et  le  Tribunal  rend  le  jugement  suivant  : 

^111       I— i^»  Il  mil  II  »  !>— ^.M^— — — .— — i— H^    I       II     ■!    Il       I  I 

(1)  Ce  qui  a  d^â  été  jugé  pour  une  portion  de  maison.  Cass.  8  iuill. 
1860  (I.  Pâl.  i8&l,  t.  1,  p.  969),  TéSt  ici  pouf  UM  maison cotltigoé. 


(366) 

JUGEMENT. 

«  Considérant  que  les  conventions  obligent  non-seule- 
ment à  ce  qui  est  exprimé,  mais  encore  à  toutes  les  suites 
que  Féquité,  l'usage  ou  la  loi  donnant  à  l'obligation 
d'après  sa  nature;  qu'elles  doivent  être  exécutées  de 
bonne  foi  ;  . 

»  Considérant  que  le  bail  â  loyer  oblige,  par  la  nature 
du  contrat  et  sans  qu'il  soit  besoin  d'aucune  stipulation 
particulière,  de  faire  jouir  paisiblement  le  preneur  pen- 
dant la  durée  du  bail  ; 

»  Considérant  qu'en  louant,  le  30  juin  1858,  aux  époux 
Coillet  :  i^  une  maison  sise  place  d'Armes,  n®  i%  pour  la 
tenir  à  usage  d'auberge  avec  cession  du  mobilier  garnis- 
sant l'hôtel;  2o  la  clientèle  attachée  à  l'établissement,  la 
veuve  Plaisant  s'obligeait,  pai*  cela  même,  à  laisser  les 
époux  Coillet  jouir  paisiblement  de  l'exploitation  qui  leur 
était  transférée;  et  qu'il  lui  était  interdit  de  rien  faire  qui 
pût  porter  préjudice  à  l'usage  pour  lequel  la  chose  avait 
été  louée;  que  loin  de  là,  et  au  mépris  de  l'intention  com- 
mune qui  avait  présidé  à  la  convention,  la  veuve  Plaisant, 
dès  le  mois  de  mars  4860,  louait  à  l'intervenant  la  maison 
no  10,  contiguë  à  la  première,  et  qui  avait  fait  partie  de  l'é- 
tablissement pendant  qu'elle  l'exploitait  elle-même  ;  qu'elle 
la  louait  également  à  usage  d'auberge,  ce  qui  résulte  tant 
des  clauses  prohibitives  insérées  au  second  bail,  que  de 
rafifectation  qui  a  été  donnée  en  effet  à  la  maison  louée  ; 

>  Qu'une  licence  était  obtenue  au  nom  de  Louis  Plaisant, 
son  fils,  pour  l'exploitation  du  nouvel  établissement;  que 
bientôt  cette  licence  était  reportée  au  nom  du  neveu  de  la 
veuve  Plaisant  encore  mineur,  lequel ,  avec  tout  le  pei*son- 
nel  desservant  l'établissement  cédé  aux  époux  Coillet,  pas- 
sait dès-lors  au  service  de  l'établissement  nouveau  ; 

»  Qu'ainsi  la  veuve  Plaisant  élevait  ou  suscitait  aux  époux 
Coillet,  ses  locataires,  ses  successeurs  à  titre  onéreux,  une 
concurrence  ruineuse  et  déloyale,  en  installant  à  leur  porte 
une  entreprise  rivale  dans  des  conditions  propres  à  leur 
ravir  en  tout  ou  pour  notable  partie  les  profits  de  la  loca- 


(367) 

Uon  et  de  la  cession  qu'elle  leur  avait  consentie,  et  dont 
elle  percevait  le  prix  ; 

i>  Considérant  que  la  bâilleuse  qui,  pour  son  fait,  prive 
sciemment  et  volontairement,  et  au  mépris  des  conven- 
tions, son  locataire  des  profits  légitimes  du  contrat,  est  obli- 
gée, d'une  part,  de  réparer  le  préjudice  dès  à  présent 
prouvé,  et  d'autre  part  tenue,  soit  de  faire  cesser  le  trouble 
par  elle  apporté  à  la  jouissance  qu'elle  devait  garantir,  soit 
de  supporter  les  dommages-intérêts  qui  doivent  en  résulter 
pour  l'avenir;  que  les  dommages-intérêts  se  composent, 
dans  l'espèce,  tant  de  la  perle  éprouvée  sur  les  frais  cou- 
rants et  imprévus  de  l'hôtelier,  que  du  bénéfice  dont  il  au- 
rait été  privé  ; 

>  Sur  les  conclusions  de  la  partie  intervenante  : 

>  Considérant  que  l'intervention  est  régulière  en  la 
forme  ; 

>  Au  fond,  considérant  qu'il  ne  pourrait  être  prononcé 
de  condamnation  personnelle  à  la  charge  de  l'intervenant  ; 
que  dans  le  cas  où  il  serait  justifié  que,  par  collusion  ou 
par  tout  autre  fait  reprochable,  il  aurait  participé  au  quasi- 
délit  qui  porte  dommage  aux  époux  Coillet;  que  cette 
participation  ne  pouvait  pas  résulter  suffisamment  des  élé- 
ments de  la  cause  ; 

»  Par  ces  motifs ,  le  Tribunal  reçoit  Pinquet  intervenant 
en  la  cause,  et  faisant  droit  entre  toutes  les  parties  : 

»  Pour  le  préjudice  éprouvé  par  les  époux  Coillet  depuis 
l'ouverture  de  l'établissement  rival  jusqu'à  ce  jour,  con- 
damne la  veuve  Plaisant  à  leur  payer  la  somme  de  500  fr,  ; 

»  Pour  le  surplus  et  faute  par  ladite  veuve  Plaisant  d*a- 
voir,  dans  les  huit  jours  de  la  signification  du  présent  juge- 
ment, procuré  la  fermeture  de  l'étabUssement  rival  et  fait 
cesser  la  concurrence  dommageable  dont  s'agit,  la  con- 
damne à  leur  payer  par  chaque  trimestre  jusqu'à  l'expira- 
tion de  leur  bail,  sinon  jusqu'au  changement  d'usage  et 
destination  de  la  maison  n^  10,  une  indemnité  de  600  fr., 
laquelle  se  compensera  à  due  concurrence,  et  jour  par  jour, 
avec  le  trimestre  de  loyer  payable  par  les  époux  Coillet  aux 
époques  déterminées  par  le  contrat  ; 


(868) 

»  Condamne  la  veuve  Hâisant  àtix  dépens  envers  lès 
époux  Coillet; 

»  Condamne  Pinquet  aux  dépens  de  ^n  intervention; 

»  Déclare  les  parties  non  fondées  à  plus  ou  autrement 
prétendre.  % 

Appel  par  la  dame  Plaisant.  Poulr  elle,  on  dit  devant  la 
Cour  : 

La  dame  Plaisant,  en  donnant  à  bail  àU)c  époux  Coillet 
rét^lissemenl  et  Ift  dientèle  de  rétablissement  qfu'eUe  ex- 
ploitait à  Douai,  Grand'  Place,  n^  \%  s'était  obligée  à  res- 
ter avec  ses  successeurs  pendant  un  mois,  afin  de  les  meUre 
au  courant  du  service  de  la  maison  et  de  les  faire  entrer  en 
rapport  avec  la  clientelle  ;  elle  a  très-loyalement  exécuté 
son  obligation  ;  elle  s'est  en  outre  engagée,  pour  toute  la 
durée  du  bail,  à  ne  plti$  tenir  dans  la  ville  de  Douai  aucun 
établissement  à  usage  d'auberge  ou  d'estaminet  ;  eette  con- 
vention est  claire  et  précise.  Le  veuve  Plaisant  s'est  par  là 
interdit  de  tenir  eUe^même  ou  pout*  elle^méloe»  dans  son 
intérêt  personnel  et  ai  son  profit  particuli^,  un  établisse- 
ment rival  ;  mais  la  dame  Plaisant,  propriétaire^  de  diffé- 
rentes maisons  dans  Douai,  ne  s'est  nullement  interdit  de 
donner  ses  autres  maisons  à  bail  à  des  tiers  qui  y  établi- 
raient des  cabarets  ou  estaminets*  A  tort  les  premiers  juges 
om  déclaré  que  la  dame  Plaisant  n'avait  pu  louer  m  èieur 

Pinquet  la  maison  Grand'  Place,  n®  10. 

En  effet,  les  principes  consej^vateurs  du  droit  de  propriété 
et  de  libre  concurrence  industrielle  ne  peuvent  être  soumis 
à  d'autres  restrictions  que  celles  que  lui  imposent  la  loi  ou 
la  convention.  La  loi  n'mterdit  nullement  à  un  propriétaire 
de  louer  deux  maisons  distinctes  à  deux  personnes  diffé- 
rentes pour  y  exercer  une  même  industrie.  La  convention, 
dans  l'espéee,  n'a  d'ailleurs  défendu  à  la  dame  Plaisant,  qui 
louait  la  dientèle  spécialement  attachée  à  da  p^^sonne, 

Îu'uni^  seule  chose  :  s'établir  à  nouveau  dan^  la  ville.  Si, 
eux  aiis  après  la  cession  faite  aux  époux  Coillet ,  qui 
avaient  eu  ainsi  tout  !e  temps  de  consolider  rachalandage 
de  la  maison  Grand*  Place,  n»  42,  la  dame  Plaisant  a  donné 
à  bail  au  sieur  Pinquet  la  maïsôn  h^  40,  elle  n'a  feit  qu^user 
défebn  droit.  On  eût  c(5«ipri«  la  décisiotl  déë  ptiemiei^jùg^s, 
GÎ  lé  sieur  Pinquet  n'eût  été  que  le  prlte-^nom  de  la  dame 
veuve  Plaisant^  gérant  et  administrant  pour  la  dame  Plai- 
sant, au  profit  et  bénéfice  de  celte-ci^  le  cabaret  de  Y  In- 
dustrie, Mais  les  premiers  juges  eux-mêmes  sont  forcés 


L. 


(369) 

de  recoonaitre  que  le  sieur  Jules  Pinquet  exploite  réel- 
lement pour  son:  compte  le  cabaret  de  Y Indtistrie  y  en 
qualité  de  locataire  réel  et  sérieux  de  la  dame  Plaisant.  Le 
sieur  Pinquet,  dans  Un  intérêt  de  concurrence  dé  brasseur 
à  brasseur,  a  cru  devoir  établir  ce  nouveau  cabaret  dans 
les  conditions  spéciales  et  particulières  où  il  Ta  établi , 
prenant  à  son  service  des  employés  qui ,  il  y  a  deux  ans  , 
étaient  au  service  de  la  dame  Plaisant,  c'est  le  fait  spécial 
personnel  et  d'ailleurs  licite  du  sieur  Pinquet,  dont  l'en- 
semble de  la  gestion,  les  annonces,  les  enseignes,  repous- 
sent tonte  idée  de  confusion  ei^tre  les  deux  maisons  et  par 
suite  toute  concurrence  déloyale. 

La  Cour  a  confirmé  la  sentence  des  premiers  juges. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges,  et 
attendu  que  le  mode  d'allocation  déterminé  par  le  Tribu- 
nal jioùr  les  dommages-intérêts  qui  pourraient  être  encou- 
rus postérieurementau  jugement,  garantit  aux  intimés,  dans 
une  mesure  suffisante,  la  réparation  du  préjudice  éprouvé 
depuis  le  jour  de  la  sentence; 

Met  l'appellation  au  néant,  confirme  le  jugement,  or- 
donne qu'il  sortira  son  entier  effet,  et  condamne  l'appe- 
lante à  l'amende  et  aux  dépens. 

Du  18  juillet  1860.  l'^çhamb.  civ.  Présid.,  M.  de  Moulon, 
1er  pfési'd.  ;  minist.  publ.,  M.  Connelly,  subst.  du  proc- 
gén.  ;  avoc,  M^s  Dunem  et  Honoré  père;  àvou.,  Mes  flmet 
etLegrand. 

COURTIER  DE  COMMERCE.  —  privilège.  —  mandataire. 

COMMISSIONNAIRE.  —:  VÊI^TÉS  ET*  ACHATS  DIRECTS. —  COUR- 
TAGE sens  LA  VILLE. 

UnetnMsùH  de  commerce  peut  avoïr,  sur  une  place  m  eocisient 
une  bourse  commerciale  et  des  co^lrtierë  de  marcharidisès, 
un  mandataire , ou  un  commissionnaire  dans  les  termes 
de  Fart.  9i  €.  com.,  faisant,  pour  celte  maison,  ses 
achats  et  ses  ventes,  pourvu  que  leurs  opératioiis  soient 
sérieuse^,  qu'elles  aient  lieu  à  prûc  ferme  et  pour  les  in- 
térêls  du  commettant» 

Hors  èei'  dëûoû  hypothèses,  itn  producteur  où  un  ûêgvciant 

TOME  xviu.  24 


(370) 

qui  veut  se  servir  d'un  intermédiaire  pour  la  vmle  de  ses 
denrées  ou  marchandises,  doit  nécessairement  avoir  re- 
cours à  un  courtier  légalement  institué,  sous  peine  d!être 
poursuivi  comme  complice  du  courtier  clandestin. 

Ainsi  celui  qui  agit  comme  mandataire,  pour  vendre  à  prix 
ferme  sur  une  place,  ne  peut  être  considéré  s'être  im- 
miscé dans  les  fonctions  de  courtier. 

De  même  le  fait  d'acheter  des  marchandises  et  de  les  vendre 
ensuite  pour  son  propre  compte,  ne  peut  non  plus  cons- 
tituer le  courtage  clandestin  (1). 

Le  courtage  dans  un  marché,  qui  s'est  accompli  hors  du 
rayon  de  V octroi  d'une  ville  oà  sont  institués  des  cour- 
tiers, ne  peut  être  réputé  clandestin. 

Mais  celui-là  est  courtier  clandestin  qui ,  après  avoir  servi 
d* intermédiaire  entre  le  vendeur  et  V acheteur ,  hors  k 
rayon  de  f  octroi  de  la  ville  où  sont  légalement  établis  des 
courtiers,  revend  ensuite,  dans  cette  même  ville,  les  mar- 
chandises qui  avaient  fait  V objet  du  premier  marché. 
(L.  28  ventôse  an  9  ;  arrêté  du  27  prairial  an  10;  C. 
Nap.,  art.  1984-  et  suiv.  ;  C.  com. ,  art.  91  et  suiv.)  (2). 

(Sabatié  C.  chamb.  synd.  des  courtiers  de  Valenciennes  et 

le  rainist.  publ.) 

La  chambre  syndicale  des  courtiers  de  commerce  de  Va- 
lenciennes a  porté  plainte  contre  Sabatié,  négociant  com- 
missionnaire en  cette  ville,  qu'elle  a  accusé  de  s'être  livré 
à  dès  opérations  de  courtage  clandestin,  et,  sur  la  poursuite 
du  ministère  public,  elle  s'est  portée  partie  civile  dans  la 
cause. 

Les  faits  reprochés  au  prévenu  se  trouvent  suffisamment 
exposés  dans  le  jugement  du  Tribunal  de  Valenciennes  et 
dans  l'arrêt  de  la  Cour  qui  vont  suivre. 

JUGEMENT. 

«  Considérant  qu'il  existe  à  Valenciennes  une  boui-se  de 
commerce,  et  que,  pour  le  service  des  opérations  commer- 
ciales de  cette  place,  le  décret  du  24  février  1858  a  créé 
six  courtiers  de  marchandises;  que  chacun  de  ces  cour- 
tiers a  fourni  un  cautionnement  de  6,000  fr.  ; 

(1)  y.  Douai  14  juin  1858 ,  Jurisp.  16,  241  et  les  notes,  où  se  trouTe 
exposée  la  jurisorudence  en  cette  matière. 

(%  Quant  à  rétendue  territoriale  du  privilège  des  courtiers,  Y.  aux 
ilotes  précitées,  note  3,  2o. 


(371) 

»  Considérant  que  la  mission  de  ces  courtiers  officiers 
publics  est  de  servir  d'intermédiaire  entre  les  commer- 
çants, pour  engager,  faciliter  et  lier  les  opérations  de  com- 
merce, constater  les  marchés  et  coter  les  cours  des  mar- 
chandises ; 

»  Considérant  qu'aux  larmes  de  l'art.  78  C.  corn.,  les 
courtiers  ont  seuls  le  droit  de  faire  le  courtage  des  mar- 
chandises; que  la  loi  du  27  prairial  an  10,  art.  4f,  défend, 
sous  les  peines  portées  par  l'art.  8  de  la  loi  du  28  ventôse 
an  9,  à  toutes  personnes,  autres  que  celles  nommées  par  le 
Gouvernement,  de  s'immiscer  en  façon  quelconque  et  sous 
quelque  prétexte  que  ce  puisse  éU*e,  dans  les  fonctions  de 
courtier,  soit  à  l'intérieur,  soit  à  l'extérieur  de  la  Bourse; 

»  Considérant  que  c'est  là  un  privilège  établi  jmr  le  lé- 
gislateur dans  un  but  d'intérêt  général  et  pour  la  garantie 
des  transactions  commerciales  ;  que  le  devoir  des  magis- 
trats est  d'en  assurer  la  complète  exécution  ; 

»  Considérant  que  la  loi  elle-même  a  pris  soin  de  ren- 
fermer dans  d'étroites  limites  cette  dérogation  à  la  liberté 
du  commerce ,  en  déclarant  qu'il  était  permis  aux  parti- 
culiers de  vendre  par  eux-mêmes  leurs  marchanilises  ; 

j>  Considérant  que  ce  que  Ton  peut  faire  par  soi-même, 
on  peut  incontestablement,  mais  dans  une  certaine  mesure 
toutefois,  le  faire  faire  par  d'autres  ;  qu'ainsi  rien  ne  s'op- 
pose à  ce  qu'une  maison  de  commerce,  quelle  que  soit  sa 
résidence,  ait,  sur  la  place  de  Valenciennes,  un  mandataire 
ou  même  un  commissionnaire  dans  les  termes  de  l'art.  91 
C.  com.,  mais  sous  la  condition  expresse  et  formelle  que  le 
mandat  sera  sérieux  et  à  prix  ferme,  la  commission  de 
bonne  foi  et  bien  déterminée,  et  que  les  opérations  qui 
auront  été  faites,  l'auront  été  dans  l'intérêt  véritable  du 
commettant,  et  n'auront  pas  pour  but  de  cacher  sous  une 
fausse  apparence  des  actes  qui,  au  fond  et  en  réalité^  ne 
seraient  que  des  actes  de  courtage  clandestin  ; 

»  Considérant  qu'à  part  ces  deux  hypothèses,  lorsque, 
dans  une  ville  comme  celle  de  Valenciennes ,  un  produc- 
teur ou  un  pégociant  veut  se  servir  d'un  intermédiaire 
pour  la  vente  de  ses  denrées  .ou.  màrchandji>e&,  il  do^it  né- 


(372) 

cessaireraeiit  avoir  recours  à  un  courtier  légalement  insti- 
tué, et  ce,,  à  péril  d'être  lui-même  poursuivi  et  frappé  d'a- 
mende, aux  termes  de  l'art.  6  de  la  loi  du  27  prairial 
aniO  ; 

»  Considérant  qu'il  résulte  de  l'instruction  et  des  débats 
la  preuve  évidente  que,  dans  le  courant  de  1859,  ^batié, 
sur  la  place  de  Yalenciennes,  a  mis  à  la  disposition  de  tout 
le  commerce  des  sucres  ses  démarches  et  son  activité  ;  qu'il 
a  constamment  agi,  iK)n  comfme  mandataire  ou  commis- 
sionnaire, mais  bien  comme  un;  courtier  véritable  ; 

^  Considérant  en  effet  que,  sans  y  être  sollicité  par  per- 
sonne et  de  son  propre  mouvement^  il  a  mis  en  rapport  les 
négociants  qui  voulaient  vendre  et  ceux  qui  voulaient  ache- 
ter ;  qu'il  a  reçu  des  premiers  des  propositions  qu'il  trans- 
mettait aux  seconds  ;  qu'il  s'est  entremis  pour  rapprocher 
et  concilier  des  intéi^êts  différents  ;  qu'il  a  fait  toute  espèce 
de  démarches,  sans  mandât  ni  commission  préalables,  et 
qu'il  a  conclu  ou  fait  conclure  par  son  intermédiaire  dans 
les  limites  de  l'octroi  de  Yalenciennes  plusieurs  marchés; 

»  Considérant  que  c'est  ainsi  qu'il  a  vendu  ou  fait  vendre  : 
1o  à  la  OMusott  Hamoir-Serret  et  O^  les  mélasses  de  l'usine 
Gonnet,  de  Marly  ;  2»  les  sucres  de  la  maison  Les^ns^Har- 
pignies ,  de  Famars,  à  la  maison  Gaillard,  de  Paris,  repré- 
sentée sur  la  place  de  Yalenciennes  par  un  sieur  Dupas;  3» 
les  mélasses  de  M.  Mariage,  de  Thiant,  à  M.  Robert  de 
Massy,  de  Saint-Quentin,  et  la  reveoCe  de  ces  mêmes  mé- 
lasses à  M.  Durel,  de  Saint-Saulve ;  4»  celles  de  M.  Mau- 
rice^ de  Yalenciennes,  à  M.  Deslinsel,  de  Denain  ;  &>  celles 
de  M,  Dutemple,  aussi  de  Yalencienaes^  à  M.  Durel;  6» en- 
fin les  mélasses  de  la  maison  Fontaine  de  Joannes  et  C^^; 
de  cette  ville,  à  M.  Billiet,  de  Marly  ; 

ï  Considérant  que  tous  ceâ  marchés  dnt  été  commencés, 
traités,  ou  conclus  à  Yalenciennes,  et  que,  dansvtoutes  ces 
opérations,  SabaUé  a^  reçu  le  droit  habituel  de' courtage, 
c'est-à-dire  25  centimes  de  commissioii; 

9  Considérant  qtfil  i^é^utte,  de  tous  ces  faits  judiciaire* 
ment  constatés,  que  Sabatié  s'est  Mvré,  dans  l^  courant  de 
1859,  &  Yalenciennes,  à  dds  actes  de  courtage  clandestin,  au 


(873) 

mépri3  des  droits  exclusifs  des  parties  miles,  courtiers  lé- 
galeraentnnstitués  ; 

»  Que  l'action  de  ces  derniers  se  trouve  ainsi  parfaita- 
raent  établie,  et  que  Le  Tribunal  a  pardeTers  lui  tous  les 
éléments  nécessaires  pour  fixer  d'une  manière  équitable  les 
dommages-intérêts  qui  leur  sont  dus; 

»  Considérant  qu'en  s'immisçant  dans  les  fonctions  de 
courtier,  Sabatier  a  commis  le  délit  prévu  et  puni  parfart. 
8  de  la  loi  du  28  ventôse  an  9 ,  et  4  de  l'arrêté  du  27 
prairial  an  1 0  ; 

»  Considérant  que  les  trois  autres  chefs  de  prévenJiou 
imputés  au  prévenu,  dans  h  citation  qui  lui  a  été  délivrée, 
ne  sont  pas  guffisaramenX  établis  ;  qu'au  surplus.,  \in  de  ces 
chefs  serait  relatif  à  un  marché  de  mélas&es,  commencé, 
traité  et  conclu  soit  à  Marly,  soit  à  Hergnies,  dans  tous  les 
cas  au  dehors  du  rayon  de  Voctroi  de  Valencieunes  ;  , 

»  Considérant  que  s'il  est,  dans  l'intérêt  des  courtiers 
de  marchandises  légalement  institués,  que  des  commer- 
çants ne  s'immiscent  pas  dans  leurs  fonctions  et  ne  les  pri- 
vent pas  d^une  partie  des  bénéfices  qu'ils  doivent  légitime- 
ment en  attendre,  il  est  d'un  intérêt  bien  plus  élevé,  celui 
de  Tordre  public,  que  des  fonctions  que  la  loi  a  confiées 
aux  officiers  publics  qui  les  exercent  sous  les  conditions 
d'aptitude,  de  solvabilité  et  de  discipline  auxquelles  ils 
sont  soumis,  ne  soient  pas  usurpés  par  ceux  qui  s'ont  pas 
reçu  de  mission  de  la  loi  et  qui  ne  peuvent  pas  présenter 
au  commerce  toutes  ces  garanties; 

»  Par  ces  motifs  et  vu  les  art.  8  de  la  loi  du  28  ventpse 
an  9,  et  4  de  l'arrêté  du  27  prairial  an  10,  ^2  C.  peu.,  494. 
C.  inst,  crim.,  et  157  décr.  18  juin  1811  ; 

j>  Le  Tribunal  déclare  Sabatié  convaincu  de  s'être  livré, 
dans  le  courant  de  1859,  dans  les  limites  de  l'octroi  de 
Valenciennes ,  à  des  actes  de  courtage  clandestin  ^  et  de 
s'être  immiscé  dans  les  fopctions  de  courtier  de  naarchaur 
dises,  en  servant  d'intermédiaire  dans  les  actes  qui  pnt 
amené  la  réalisation  des  six  ventes  indiquées  plus  haut; 

^  CondamneSabatié,  même  par  corps,  àSOOfr.  d'amende, 
500  fip.  de  domipages-intérôts  envers  les  p^rim  civiles,  et 
Iç  condamne  de  plus  à  tous  les  dépens  ; 


(SU) 

>  Lesdiies  parties  civiles  tenues  peisonnellement  des 
Irais,  sauf  leur  recours  contre  le  condamné  ; 

>  Et  attendu  que  les  condamnations  pécuniaires  s'élèvent 
à  plus  dé  âOO  fr.,  fixe  à  six  mois  le  délai  de  la  contrainte 
par  corps  ; 

>  Pour  le  surplus  des  faits  incriminés,  met  Sabatié  hors 
de  cause.  » 

Sur  appel  de  Sabatié  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  louche  le  premier  chef  de  pré- 
vention : 

Attendu  qu'il  est  établi,  par  les  documents  produits  au 
procès,  que  Gonnet  a  été  nommé  liquidateur  de  la  Société 
Tancrède  et  O'e,  et  que  Sabatié  a  été  désigné  comme  com- 
missaire surveillant  de  celte  liquidation; 

»  Qu'il  résulte  des  débats  et  de  l'instruction  que,  pen- 
dant le  cours  de  cette  liquidation,  Sabatié,  en  sa  qualité 
de  commissaire,  a  été  chargé  par  le  liquidateur  d'acheter 
des  sucres  bruts  et  de  vendre  les  mélasses,  sans  aucune 
rétribution  de  commission  ; 

»  Que  notamment  le  2  avril  1859,  Sabatié  a  reçu  du  li- 
quidateur le  mandat  de  vendre,  au  prix  ferme  de  14  fr. 
leslOÔ  kilog.,  20,000  kilog.  démêlasses;  qu'en  exécution 
de  ce  mandat,  le  prévenu  a  vendu  cette  marchandise  à  la 
maison  Hamoir  : 

Que  Sabatié  ayant  agi  comme  mandataire  de  Gonnet,  ne 
s'est  pas  immiscé  dans  les  fonctions  de  courtier  ; 

En  ce  qui  touche  le  deuxième  chef  de  prévention  : 

Attendu  qu'il  est  établi,  par  la  déposition  de  Lessens- 
Harpignies  et  par  les  livres  de  ce  négociant,  que  Sabatié 
lui  a  acheté,  en  son  nom  et  pour  son  compte  personnel, 
190  sacs  de  sucre; 

Que  postérieurement  Sabatié  a  revendu  ces  sucres  à  la 
maison  Gaillard ,  de  Paris  ;  que  ces  faits  sont  licites  et  ne 
constituent  pas  le  délit  imputé  au  prévenu  ; 

En  ce  qui  touche  lé  troisième  chef  de  prévention  : 

Attendu  que  s'il  est  prouvé  qu'en  mai  1859,  Sabatié  a 
été  l'intermédiaire  entre  Mariage ,  de  Thiant ,  et  Robert 


(375) 

dé  Massy,  de  Saînt-Ouenlin,  et  a  conclu  pour  ces  négo- 
ciants, moyennant  la  perception  d'une  commission,  la  vente 
de  400  mille  kilog.  de  mélasses,  il  est  aussi  démontré  que 
ce  marché  a  été  commencé,  traité  et  conclu  hors  du  rayon 
de  l'octroi  de  Valenciennes  ; 

Mais  attendu  qu'il  résulte  des  débats  et  de  Tinstruction 
qu'en  mai  1859,  à  Valenciennes,  Sabatié  a  été,  sans  agir 
ni  comme  mandataire,  ni  comme  commissionnaire,  Tinler- 
médiaire  entre  Robert  de  Massy  et  Durel  pour  la  revente  de 
ces  100  mille  kilog.  de  mélasses,  et  qu'il  a  perçu  à  l'ache- 
teur une  commission  de  25  centimes  ; 

Qu'en  ce  faisant,  le  prévenu  s'est  immiscé  dans  lesfonc- 
tions  de  courtier; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  : 

En  ce  qui  louche  les  quatrième,  cinquième  et  sixième 
chefs  de  prévention  : 

Attendu  que  devant  la  Cour,  Sabatié  reconnaît  sa  culpa- 
bilité et  ne  conteste  pas  l'existence  des  délits  qui  lui  sont 
imputés  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  : 

En  ce  qui  touche  les  dommages-intérêts  : 

Attendu  que  le  prévenu  a  causé  aux  parties  civiles  un 
dommage  dont  il  leur  doit  réparation  ;  que  les  premiers 
juges  ont  bien  apprécié  l'importance  de  ce  préjudice  en 
condamnant  Sabatié  à  payer  aux  parties  civiles  la  somme 
de  500  fr.  à  titre  de  dommages-intérêts  ; 

Emendant  le  jugement  dont  est  appel  en  ce  qui  touche 
les  chefs  de  prévention  relatifs  :  1^  à  la  vente  de  20,000 
kilog.  de  mélasses  par  Gonnet  à  la  maison  Hamoir;  2»  à 
l'achat  de  190  sacs  de  sucre  de  Lessens-Harpignies ,  et  à 
la  revente  de  ces  sucres  à  Gaillard,  de  Paris;  S»  à  l'achat 
de  100  mille  kilog.  de  mélasses  de  Maiûage,  de  Thiant,pour 
Robert  de  Massy;  renvoie,  quant  à  ce,  Sabatié,  des  poursuites; 

Ordonne  que  le  surplus  du  jugement  sortira  effet; 

Condamne  le  prévenu  aux  frais  de  la  cause  d'appel. 

Du8aoûtl860.  Chamb.  corr.  Présid.,  M.  Dumon;rapp., 
M.  de  Guerne,  conseill.  ;  minîst.  publ.,  M.  Garpentier,  avoc- 
gén.;  avoc,  Mes  Dupont  et  Em.  Flamant  ;avou.,  M®  Huret. 


(376) 

io  PHARMACIEN.  —  PRÉPARATION  MÉPICINALE.  —  DÉBIT. 
—  CONTRAVENTION.  —  ARRÊT  DE  RÈGLEMENT  DU  PARLE- 
MENT DE  PARIS,  DU  28  JUILLET  4  748.  —  SOLUTION  D^IOBURE 
DE  POTASSIUM. 

2o  REMÈDES  SECRETS.  —  CARACTÈRES.  —  VENTE.  —  PHAR- 
MACIEN. 

i^  Le  pharmacim  qui  débite  une  préparation  médicinale 
sans  mie  prescription  faite  par  un  docteur  en  médecine 
ou  en  chirurgie,  ou  par  un  officier  de  santé,  commet  un 
délit  prévu  par  l'art.  32  de  la  loi  du  M  germinal  an  ii, 
et  pimi  par  V  arrêt  de  règlement  du  Parlement  de  Paris, 
du  23  juillet  iliS,  lequel  a  force  de  loi  dans  toute  la 
France  (i). 

Une  solution  dJiodure  de  potassium  doit  être  considérée 
comme  une  préparation  médicinale  (2). 

2o  Doit  être  réputé  remède  secret  toute  préparation  médici- 
nale qui  n'est  pas  inscrite  au  codex  pharmaceutique,  m 
qui  n'a  pas  été  composée  par  un  pharmacien  sur  Ûor- 
donnance  d'un  médecin,  pour  un  cas  particulier,  ou  qui 
n'apa^  été  spécialement  autœ^isée  mr  le  Gouvememmi, 
(L.  21  germinal  an  11,  art.  36.)  (3). 

Les  pharmacims  r^e  peuvent  vendre  aucun  remède  secret,  et 
la  loi  qui  en  réprirne  l'annonce  s'applique  pgaleniefU  à 
la  vente.  (L.  21  germinal  an  11  et  29  pluviôse  an  i 3.)  (4). 

(Desmarécaux.) 

I^e  ^rjbunal  correctionnel  de  Lille  a  rencju  le  jugj&ment 
suivant,  le  13  juin  1860  : 

(1)  Sur  la  non  abrogation  de  rarrét  réglem.  du  Parletm.  de  Pains,  y. 
Conf.  Trib.  correct,  de  la  Seine  (Gazçtte  desTrib.21déc,  1849,  elRép. 
Pal.,  Yo  Pharmacie,  no  96);  Cass.  7  fé?.  et25jain.  1851  (J.  Pai.  im, 
t.  1,  p.  319).  V.  aussi  Paris  23  août  1851  {L  PaL  1852,  t.  1,  p.  322).- 
Contrà  Cass.  4  juill.  1828  (J.  Pal.,  3e  édil.  à  sa  date)  ;  Mmi  çt  Chaude, 
Manuel  complet  de  médecine,  îégale,  p.  875;  Agen  28  fôy.  1850  (J.  Pal. 
1850,  t.  %  p.  166)  ;  Spécial.  Douai  27  mars  1844  (Jurisp.  2  ,  152),  et 
g3jmnl857(Jurisp.  15,329^. 

^2)  Les  Tribunaux  appelés  a  statuer  çur  une  coniravpnl|pn  ayx  Ipisire- 
latives  à  la  vente  des  médicaments  doivent  examiner  et  juger  si  là  substance 
vendue  est  ou  non  un0  préparation  p)iarnLQceutique.  pas^*  12  juillet 
1839  (J.  Pal.  1831),  t.  2,  p.  467),  Mais  que  doit-pn  cp.tendre  par  prépa- 
ration pharmaceutiqueV  V.  Rép.  Pal.,  v»  Drogue,  ïi<>  %  qulrappelle  la 
définition  de  Merlin,  Repefi.  w Droguiste.  —  V.  aussi  fîanai  9  ci  27  mai 
1844  (Jurisp.  2, 152  et  215);  id.  23  juip  1857  (Ju^p.  ^5,  329). 

(3)  V.  Douai  9  mai  ISà'f  (Jurisp.  2,  iib).        ^'  "^ 

(4)  Conf.  Douai  27  mai  et  9  mai  1844  (Jurisp.  2, 152  6t  2i5^.«-V.,  pour 
la  jnrisprùdeace  générale  conf.  les  antorito^  iifdiq^  Rçp.  Pi^],^  yf^  Re- 
mèdes secrets,  nos  11  et  12,  et  SuppL. 


(377) 

JUGEMENT. 

»  Attendu  que  Druon-Louis  Desmarécaux  a,  le  9  avril 
1860,  à  Lille,  livré  et  débité,  à  Théodore  Delecroix,  une  so- 
lution de  10  grammes  d'iodure  de  potassium  délayés  dans 
un  flacon  d'eau,  o/est-à-dire  une  préparation  médicinale; 
que  ce  remède  n*était  ni  inscrit  au  codex  pharmaceutique, 
ni  prescrit  par  un  docteur  ,eh  njédecine  ou  en  chirur^e, 
ni  par  un  officier  de  Santé,  ce  qui  constitue  à  sa  charge  la 
double  contravehtiop  d'avoir  vendu  :  i^  une  préparation 
médicinale  sans  prescription  de  médecin^  et  2»  un  remède 
secret,  faits  préyps  pi  puijis  par  Jeg  art:  32  et  36  de  la  loi 
du  29  germinal  an  11,  la  loi , du  29  pluviôse  an  13,  eiVsit- 
rêté  du  Parlement  de  P?ris  du  2.3  juillet  1 748  ; 

»lie  Tribunal  déclare  Druon-Louis  Desmarécaux  coupaMe: 
lo  d'avoir  vendu  une  préparation  médicinale  sans  prescrip- 
tion de  njédecin  ; 

»  En  conséquence,  Iç  condamne  à  une  araende  de500fr.; 

»  2o  D'avoir  vend}i  un  remède  secret; 

»  En  conséquence,  le  condamne  â  une  amende  de  25  fr. 
et  aux  frais,  le  tout  par  corps.  »  * 

Sqr  appel,  la  Ççyr  jej  ççpjrirmé  par  ya^yrèl  sjjivajit  :  ! . 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  —  Attendu  que  Desmai^éôïiux  est  prévenu  : 
lo  d'avoir  livré  et  débité  une  préparation  médioinâte  sans 
prescription  de  médecin;  2»  d'avoir  vendu  un  remède 
secret  ; 

Sur  le  premier  chef  de  prévention  : 

Attendu  qti-il  résulte  des  débats  et  de  TinstruotioB  quele 
9  avril  4860,  à  Lille,  De^arécauK  a  livre  et  débile  à  Théo- 
dore DelecBoix  une  fiole  avec  «ne  étiquett6|>ortantt  J^^^ton 
selon  la  formule  n^  1641^  et  contenant  une  solution  de  10 
grammes  d'iodure  de  potassiunï  dans  une  oertaûie  quantité 
d'eau  ; 

Que  cette  solution  est  une  vërilajble  préparation  «nédioî- 
nale,  et  que  Desiçarâcawî^,  ÇiP  h  Iwa^i  ^f,  m\  h  débitent 
sa»s  une  prescription  fftit^  R>r  m  àqfhi^ikv  m  méimim  op 
en  chirurgie,  ou  par  uH  <affiiQipc  ^e  sfti#,  q'eat  vmA^  poiç- 


(378) 

pable  du  délit  prévu  par  Tari.  32  de  la  loi  du  21  germinal 
an  11,  et  puni  par  l'arrêt  de  règlement  du  Parlement  de 
Paris  du  23  juiUet  1748; 

Que  cet  arrêt  de  règlement  a  force  de  loi  dans  toute  la 
France  ; 

Qu'en  effet  la  loi  du  21  germinal  an  11  a  disposé,  dans 
son  art.  29,  qu'il  serait  procédé  conformément  aux  lois  et 
règlements  existants,  et,  dans  Tart.  30,  qu'il  serait  dressé 
procès-verbal  des  visites  ordonnées,  pour,  en  cas  de  con- 
travention, être  procédé  contre  les  délinquants,  conformé- 
ment aux  lois  antérieures  ; 
Qu'il  résulte  de  ces  articles  que  la  loi  du  21  germinal  an  11, 
loin  d'abroger  les  lois  et  règlements  antérieurs,  se  les  est 
au  contraire  appropriés  et  leur  a  donné  une  vie  nouvelle 
en  leur  conférant  l'autorité  générale  qui  s'attache  à  la  loi; 

Que  le  rapport  fait  par  Garret,  sur  la  loi  de  l'an  11,  ne 
laisse  aucun  doute  sur  la  volonté  du  législateur  de  ne  por- 
ter aucune  atteinte  aux  anciens  règlements  ;  qu'il  y  est  dit 
que  les  nouvelles  dispositions  de  la  loi  sur  la  pharmacie 
ont  moins  pour  but  d'innover  que  de  perfectionner  cette 
partie  de  notre  législation  ; 

Que  du  moment  de  la  promulgation  de  la  loi  du  21  ger- 
minal an  11,  qui  s'appropriait  les  anciens  règlements,  l'ar- 
rêt de  1748,  qui  précédemment  n'avait  d'effet  que  dans  le 
ressort  du  Parlement  de  Paris,  a  force  de  loi  dau^  toute  la 
France  ;  ' 

Que  l'art.  33  de  la  loi  de  l'an  11  est  sans  application 
dans  la  cause  ; 

Que,  d'une  part,  cet  article  permet  seulement  le  com- 
merce en  gros  des  drogues  simples,  sanç;  que  les  droguistes 
et  épiciers  puissent  en  débiter  aucune  au  poids  médi- 
dnal; 

Que,  d'un  autre  -côté,  Desmarécaux  est  prévenu  et  con- 
vaincu d'avoir  débité  et  livré  une  préparation  médicinale 
hors  des  cas  anf orisés  par  la  loi  ; 

Que  c'est  donc  à  bon  droit  que  les  premiers  juges  ont 
prononcé  contre  le  prévenu  la  peine  édictée  par  l'arrêt  du 
Parlement  de  Paris  du  23  Juillet  1748;  m.. 


(379) 

Sur  le  deuxième  chef  de  prévention  : 

Attendu  que  doit  être  réputée  remède  secret,  dans  le  sens 
delà  loi  du 21  germinal  an 41,  toute  préparation  médici- 
nale qui  n'est  pas  inscrite  au  codex  pharmaceutique  ou  qui 
n'a  pas  été  composée  par  un  pharmacien  sur  Tordonnance 
d'un  médecin  pour  un  cas  particulier,  ou  enfin  qui  n'a  pas 
été  spécialement  autorisé  par  le  Gouvernement; 

Que  la  solution  dans  une  certaine  quantité  d'eau  de  10 
grammes  d'îodure  de  potassium,  composée  par  Desmaré- 
eaux  à  Lille,  le  9  avril  1860,  pour  être  livrée  à  Théodore 
Delecroix  pour  faire  passer  les  boutons  qu'il  avait  à  la 
figure,  doit  être  considérée  comme  une  préparation  médi^ 
cinale  qui  n'est  ni  inscrite  au  codex,  ni  composée  sur  or- 
donnance de  médecin,  ni  autorisée  par  le  Gouvernement; 

Qu'elle  constitue  par  suite  un  remède  secret,  et  queDes- 
marécaux,  en  vendant  ce  remède,  a  commis  le  délit  prévu 
par  l'art.  36  de  la  loi  du  21  germinal  an  11,  et  puni  par 
la  loi  du  29  pluviôse  an  13; 

Que  si  l'art.  36  précité  ne  parle  que  de  toute  annonce 
de  remède  secret,  il  doit  être  entendu,  d'après  le  décret 
du  25  prairial  an  13,  comme  interdisant  en  même  temps 
la  vente  de  ces  remèdes; 

Que  cette  disposition  est  générale  et  s'applique  aux  phar- 
maciens comme  à  tous  autres  individus  ; 

Adoptant  au  surpliis  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Attendu  que  la  sentence  dont  est  appel  a  omis  de. fixer 
la  durée  de  la  contrainte  par  corps,  qu'il  y  a  lieu  de  répa- 
rer cette  omission  qt  de  coippléter  sous  ce  rapport  le  juge- 
ment attaqué  ; 

Met  l'appellation  au  néant,  ordonne  que  le  jugement 
dont  est  appel  sortira  effet; 

Fixe  à  un  an  la  durée  de  la  contrainte  par  corps  ; 

Condamne  le  prévenu  aux  frais  de  la  cause  d'appel. 

Du  1er  août  1860.  Ghamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
rapp.,  M.  Cotteau,  conseill.  ;  rainist.  publ.,  M.  Carpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc,  M^  Dupont. 

.  M I  I       i 


(390) 

COMMUNE.  —  AUTOWSATION  DE  PLAIDER,  —  JURIDICTION 
CORRECTIONNELLE.  —  PARTIE  PLAIGNANTE.  —  ACTION 
CIYILE. 

L^  com/immes  doivent  $e  fuir e  autoriser  pour  plaider  devant 
la  juridiction  correctiomïeUe,  comme  partie  plaignante, 
exerçant  Pmtion  civik.  (L,  18  juillet  1837,  art.  49  ;C. 
înst.  crîm.,  art.  3.)  (1). 

n  peut  être  sursis  à  l'action  et  accordé  délai  W  appel  pour  que 
r autorisation  puisse  être  demandée  par  la  commune. 

(L4  ville  de  Douai  C.  Remy  de  Canopeau  et  autns$.) 

I^  vUJe  dç  Douai,  agissant  comme  partie  civile,  a  pour- 
sijdYi  les  sieurs  Sei^  /Auguste)  et  Robert  (Fraipiçois),  ou- 
vrier^  bychèrp^s,  et  Èdnaoud-Remy  de  Gampean,  prajprié- 
taire  comme  qvîlement  responsable,  pour  avoir  coupe  des 
aAres  qu'ils  savaîept  appartenir  â  la  ville  de  Douai. 

Les  prévenus,  devant  le  Tribunal,  ont  soutenu  qu'aux 
termps  de  l'art.  49  de  la  loi  du  18  juillet  1837 ,  nulle  com- 
mune oie  po^vaii  introduire  une  action  en  justice  sans  être 
autorisée  par  le  conseil  de  préfecture  ;  que  la  ville  de  Douai, 
bjbç»  ]çin  4e  rapporter  J'aujtprisîitioft  pres(3rite  par  l'article 
précité,  pe  justifiait  pi^i^e  pa3  (ju'eUe  jçût  faitdeç  diligeiices 
pour  ODtejiir  cette  autorisation  y  qu'elle  ne  pouvait  invo- 
voquer  aucune  des  exceptions  prévues  par  les  art.  55  et63 
de  la  même  loi,  et  non  applicables  dans  la  cause  ;  que  la 
ville  de  Dou^i  ip<^  rapportait  pa$  non  plus  la  délibération  du 
conseil  municipal  exigiée  par  l'art.  19,  §  10  de  ia  loi  du  18 
juillet  1837;  q^e,  par  jçoji^équent,  la  viUe  était  noa  rece- 
vab}e  dans  son  action. 

JLa  yille  répondait  que  l'autorisation  préfectorale  n'était 
pas  nécessaire  aux  communes  pour  agir  en  matière  correc- 
tionnelle. Cette  autorisation,  disait-on,  est  une  mesure  de 
tutelle  administrative  établie  tout  en  faveur  des  commu- 
nes ;  B'il  felUit  que  14  <coiïiHittne  s'en  prémunît  toutes  les 
fois  qu'elle  agit  pour  la  répression  d'm  4ol*t,eette  roeçure 

'■"■  '  '  11,1..  .1,  ,     I  t  y      .1  , > •»-• ' 

(1)  Avarutia  ïo?  été  1^9Î,  on  avait  Jugé  que  les  communes  n'étaient  pas 
tenuq$  4^  ^etfaipeputoFi^er pour ptei^^i* 69  fûQU^re  crlminoHç  et, laorrcc- 
lionhelle.  —  Cass.  3  août  1820  (J.  Pal.  Seédit.  à  sa  date).  Conf.  Cor- 
r^^m^ffroft  adm,  Bt  fubUa,  p,  253,  —  Cçpei^rtwt  Ift.  C^n»Qil  d-Etat 
avait  autorisé  pJjusieMrs  qomnmne^  à  suivre  des  procjçç  de  coUe  natwfc. 
t;  Heverèhon.p.  59et"60.— -Consult.  Bor(lea.i|x6janvîer  1831  (J.Pal., 
3e  édit.  à  sa  aate).  —  En  présence  des  termes  généraux  iié  Part.  A9,  L. 
18  juillet  1837,  on  n'admet  plus  aujourd'huiqu'il  y  ait  dispense.  V.  Conf. 
Reverchon,  p,  62,  et  Pal.  Rep.,  vo  Autorisation  de  Plaider,  n^  58. 


(381) 

deviendrait,  à  catise  des  foriftalîtés  et  des  leîiteUrg  qu'elle 
entraîne,  une  véritable  gôrie  qui  etttraîiïtei*aît  dans  tlrié  6ef^ 
laine  mesure  Taiîfâon  de  la  comiiiurie,  et  par  suite  devien-» 
drait  nuisible  à  ses  intérêts.  D'aiUéurs,  les  actions  de  la 
nature  de  celles  dont  il  s'agit  au  procès  n'ont  pas  les  ca>[ 
ractères  qui  puissent  leur  rendre  applicables  les  art.  1032 
C.  proc.  civ. ,  et  4Ô  de  la  loi  de  1837.  Ces  actions  tiennent 
essentiellement  à  l'ordre  public  ;  elles  sont  de  leur  nature 
bien  plutôt  des  aetes  conservatoires  et  d'administration , 
exercés  par  le  maire ,  en  sa  qualité  de  gardien  des  p^ro-^ 
priétés  de  la  comnmne  ;  elles  peikvènt  donc  être  classées 
parmi  les  excepticms  dont  les  caractères  généraux  sont 
mdiqués  dans  1  art.  55  de  la  de  la  loi  de  1837  ;au  surplus, 
cette  loi  n'a  fait  que  reproduire  presque  textuellement  leé 
dispositions  de  l'art.  1032  C.  proc.  civ.  Il  était  de  juris|>ru- 
dence  générale,  sous  l'empire  de  cet  article,  que  ses  pres-^ 
criptions  ne  s'appliquaient  pas  à  la  matière^  correction* 
nelle.  Le  Tribunal  ne  pouvait  donc  admettre  l'exceptioii. 

Le  Tribunal,  par  un  jugement  en  dute  du  26  mai,  a  dé- 
claré en  l'état  la  ville  de. Douai  non  recevable. 

Appel.  Devant  la  Cour ,  on  prétend  que  faction  de  la 
ville  est  bien  et  valablement  formée. 

Subsidiairement  on  demande  qu'il  soit  imparti  un  délai 
dans  lequel  la  ville  de  Douai  devra  rapporter  l'autorisa^ 
tion  du  conseil  de  préfecture. 

ARRÊT. 

LA  COUR;  -^Attendu  qu'aux  termes  de  Part.  4d^  de  la 
loi  du  18  juillet  18S7,  nulle  comm^me  ne  peut  intreduit^e 
une  action;  en  justice  sans  être  autorisée  par  le  conseil'  éè 
préfecture,  et  la  coiximane,  aprèë  totrtjugemfeiit  ifltei?V«enul, 
ne  peut  se  pourvoir  devant  une  adtre  juridi^^tioni  qu'on 
vertu  d'une  nouvelle  aiùlorisation  du  conseili  de  préfec- 
tvste  ; 

Que  cette  disposition  de  la  loi  dte  i^87  est  claire  ef  pi*^- 
cise  ;  qu'elle  ôst  générale  et'  qù'ellel  &"êtetld  à  toute  â[otît>h 
qu'une  commune  veut  introduire  en  justice,  que  l'âctîoii 
soit  internée  de vfittjt  la  jurîdîdiont  cîtilô  ou  deVant  fe  juri- 
dietiicm  correct»  oriflèlte  ; 

Que  l'art.  3'  G.  inst.  criih.  dbniié,  A  la  partie- fé^éë  pair 
lin  délîf ,  le  droit  de  porter  Faction  ërt  réparation'  dû  ptê- 


(382) 

judice  devant  le  juge  de  répression  ;  mais  que  cet  article 
ne  change  pas  le  caractère  et  la  nature  de  Taciion  civile, 
et  n'a  pas  pour  effet  de  dispenser  la  partie  plaignante  de 
se  munir  des  autorisations  exigées  par  la  loi  pour  l'habi- 
liter à  ester  en  justice  ; 

Attendu  que  les  motifs  d'ordre  public  qui  ont  déterminé 
le  législateur  à  soumettre  les  communes  à  la  garantie  tu- 
télaire  de  l'autorisation  préalable  s'appliquent  aux  actions 
civiles  qu'elles  portent  devant  les  tribunaux  cbrreclionnels; 

Que  d'ailleurs  la  loi  du  18  juillet  1837,  pour  lever  tout 
doute,  a  déterminé  les  exceptions  qu'elle  a  cru  devoir  ap- 
porter à  la  règle  générale  posée  par  l'art.  49  ; 

Qu'elle  a  disposé,  dans  l'art.  55,  que  le  maire  peut,  sans 
autorisation  préalable,  intenter  toute  action  possessoire  et 
faire  tous  autres  actes  conservatoires  ou  interruptifs  de 
déchéance  ; 

Que,  dans  le  cas  prévu  par  l'art.  63,  le  maire  peut  dé- 
fendre à  l'opposition,  sans  autorisation  du  conseil  de  pré- 
fecture ; 

Que  les  juges  ne  peuvent  ajouter  aux  exceptions  édictées 
par  le  législateur  ; 

Attendu  que  la  ville  de  Douai  a  interjeté  appel  du  juge- 
ment du  6  mai  1860,  qui  la  déclare  non  recevable  en  Té- 
tât dans  son  action;  qu'elle  ne  produit  pas  un  arrêté  du 
conseil  de  préfecture  l'autorisant  à  se  pourvoir  devant  le 
deuxième  degré  de  juridiction  ;  qu'elle  ne  peut  invoquer 
aucune  des  exceptions  consacrées  par  la  loi  du  18  juillet 
1837  ;  que  par  suite  elle  devrait  être  en  l'état  déclarée  non 
recevable  dans  l'appel  par  elle  interjeté  ; 

Mais  attendu  que  la  ville  de  Douai  conclut  subsidiaire- 
ment  à  ce  qu'il  lui  soit  imparti  un  délai  dans  lequel  elle 
devra  se  pourvoir  des  autorisations  nécessaires  pour  l'ha- 
biliter à  ester  en  justice  ;  que  cette  dojtnande  subsidiaire 
doit  être  accueillie; 

Surseoit  à  statuer  jusqu'au  lundi  27  août  prochain,  aux 
fins  par  la  ville  de  Douai  d'obtenir  les  autorisations  exigées 
par  la  loi  pour  régulariser  sa  procédure  ;  continue  la  cause 
à  ce  jour  pour  les  parties  comparaître  à  ladite  audience 


(383) 

sans  nouvelle  assignation ,  et  être  par  elle  conclu  et  par  la 
Cour  statué  ce  qu'il  appartiendra,  frais  réservés. 

Du  10  juillet  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
minist.  publ.,  M.  Carpentier,  avoc.-gén.;  avoc.  M®»  Ed. 
Lemaire  et  Legrand  ;  avou.,  Mes  Lavoix  et  Huret. 


lo  ARBRES.  —  CHEMIN  PUBLIC.  —  ÉLAGAGE.  —  BUCHERON 
DU  NON  PROPRIÉTAIRE. — MUTILATION. — DÉLIT.— INTENTION. 

2o  CHEMIN  PUBLIC.  —  DÉGRADATION  OU  DÉTÉRIORATION.  — 
CONTRAVENTION. 

3o  DOMMAGES-INTÉRÊTS.  —  RESPONSABILITÉ  CIVILE. 

¥  LOI  DU  28  SEPTEMBRE  1791 .  —  ABROGATION. 

\^  Le  fait  par  un  bûcheron  d'élaguer  des  arbres  plantés 
sur  un  chemin  public  par  ordre  de  celui  qui  se  prétend 
propriétaire  des  arbres,  ne  peut  constituer  le  délit  de  mu- 
tilation d'arbres,  alors  que  l'intention  délictive  n'est  pas 
établie  contre  le  bûcheron,  (G.  pén.,  art.  446  et  448.) 

2®  Il  ne  peut  non  plus  constituer  la  contravention  de  dé- 
gradation ou  de  détérioration  de  chemin  public.  (G.  pén., 
art.  499,  no  11.) 

3»  Par  suite  il  n'y  a  lieu,  dans  ce  cas,  de  prononcer  au- 
cuns dommages-intérêts  contre  celui  qui  se  prétendait  le 
propriétaire  des  arbres  et  quia  été  appelé  en  cau^e  comme 
civilement  responsable. 

4o  Le  Code  pénal  a-t-il  abrogé  les  art.  i4  et  43,  tit.  2  de 
la  loi  du  28  septembre  1791,  qui  édictait  une  pénalité 
contre  ceux  qui  avaient  écorcé  ou  coupé  des  arbres  sur 
pied  appartenant  à  autrui  ou  plantés  sur  les  routes  ?  Non 
résolu  (1). 

(La  ville  de  Douai  C.  Sen,  Robert  etRemy  de  Campeau.) 

La  ville  de  Douai  ayant  obtenu  Tautorisation  jugée  né- 
cessaire par  Tan'êt  précédent,  la  cause  a  été  plaidée  au 
fond  devant  la  Gour.  Les  faits  sur  lesquels  se  fondait  la 
plainte  de  la  partie  civile  consistaient  en  ce  que,  sur  Tor- 
dre donné  par  M.  Remy  de  Gampeau,  appelé  en  cause 
comme  civilement  responsable,  ses  ouvriers,  Sen  et  Ro; 
bert,  avaient  procédé  a  Téla^age  d'arbres  plantés  sur  des 
chemins  appartenant  à  la  ville  de  Douai.  De  là  venait  la 
question  de  savoir  si  ces  bûcherons  n'avaient  pas  commis 


>  »  i 


(1)  y.  pour  Taffirm.  Duvergier,  Colleet.  des  Lois  et  Cod,  pén.  annoté, 
sous  les  articles  cités. 


le  délit  pi'év»  et  jfmni  qoit  par  les^  ai^t.  M6  et  448  G.  pén., 
soit  par  les  art.  44^1  4p3  dek  lai  du  28  sèptenablre  4791,  ou 
bien  encore  la  contravention  prévue  par  Tart.  479,  n^  11 
ù.  pén.  De  plus^  celui  qui  avait  commandé  l*éîàgage  à  ses 
ouvriers  ii*était-il  pas  civilement  responsable  du  dommage 
causé  à  là  commune  par  le  délit  6u  la  contravention?  La 
Cour  a  décidé  ces  questions  par  un  arrêt  dont  la  teneur 
suit  :  .,.^ 

lACOUJl;  T^  Vu  Tarrêté  d»  o<)nseil  de  pyéfeoture  du 
Nord,  du  22  août 4 860; 

Attendi*que^>  par  cet  SHPrêté,  le  maire  de  la  ville  de  Douai, 
agissant  en  cette  qualité^  est  autorisé  à  ester  en  justice  daûs 
le  procès  entre  la  ville  et  les  sieurs  deCampeau,  Sen  et  Ro- 
bert, pour  mutîfàtïon  d*arbres; 

(Jué  là  pWDcédure  étàiit  ré^iiîarisée,  il  échét  de  recon- 
riàîtî^e  la  recevabilité  de  racliort  intentée  par  la  ville  de 
Bôuai  et  dé  Tappel  pat  elle  interjeté; 

Au  fond  :  Vu  1  art.  545  C.  irisï.  crira.  ; 

Attendu  qa^îl  résulte,  d'iïA  procès-verbal  rédigé  par  le 
gâtde-chatnpétre  dé  Frais-Marais,  lé  40  avril  4860,  et  qu'il 
est  d'ailleurs  reconnu  par  les  prévenus  que  Séri  et  Robert 
util  éfegiié  ^  arbféâ,  plaîltès  Sûr  le  cliémin  dû  Grahd-Ma- 
raîs,  et  70  péùplîérë  et'  bdîé  blancs,  plantés  sur  le  chemin 
Nôfd,  âû' bôKt  dù'èhemiti  dli  Grand-Marais,  en  face  des 
propriétés  de  Remy  de  Gampeau  ; 

Qu'il  est  é^aleihôhl  établi  que  àei  élagagé  à  eu  lieu  par 
Seti  et  ftôéeH  comme  ouvriers  et  pai*  ordre  de  Remy  de 
Câmpeau;  que  la  ville  de  Douai,  se  foiidàrtt  sûr  ces  faits,  a 
attrait  rfévààf  là  juridiction  cori^ectiônnelle  Seh  él-Robert  au 
principal,  pour  être  reconnus  coupables  du  délit  prévu  et 
^uniysoii  par  les'aH.  44&et  416  C.  pén.,  mii  pm  leâ  art. 
44  et  43  L.  .28:  sept.  4794  ;  subsidiairem^t,».  pour  avoir 
commis;  la  pontravention  prévue  et  punie  par  l'art,  479, 
no  44  a  pén.  i    . 

En  ce  qui  toucUe  les  conclusions  principales^  : 

Attendu  que  les  délits  prévus  par  les  art.  446  et  448  C. 

pén.,.  et  par  les  art.  44  et  43'  d^  la  loi  du  28;  sept.;  4794, 

*ne  peuvent  exister  que  lorsque  le^  auteurs  des  faits  que  la 

loi  a  voulwrépriiiner  ont  agi' avec  l0  dessein  deBuire,  avec 

une, intentio»  coupable; 

Oue,  dans  l'espèce^  non-seulement  il  n'est  pas  établi  que 
lorsque  Sén  et  Robert^  oAt  élagué  les  aÉ^breâpIan'tés  en  face 
des  propriétés  de  Remy  de  Gampeau,  ite  Si'eifit  a^gî  àVet  ce 


(385) 

dessein  et  avec  celte  intention,  mais  qu'il  est  au  contraire 
démontré  qu'ils  n'ont  procédé  à  cet  élagage  que  comme 
ouvriers  et  par  ordre  de  Remy  de  Gampeau  ; 

Que  Sen  et  Robert  avaient  la  conviction  que  les  arbres 
qu'ils  ^guaient  appartenaient  à  Remy  de  Gampeau,  et 
qu'ils  ont  agi  de  bonne  foi  ; 

Que  cette  appréciation  enlevant  aux  faits  imputés  aux 
prévenus  tout  caractère  délictueux,  rend  inutile  l'examen 
de  la  question  de  savoir  si  les  art.  44  et  43  L.  du  28  sept. 
1791  ont  été  abrogés  par  lé  Gode  pénal,  et  si  toutes  les 
conditions  exigées  pai'  la  loi  pour  constituer  les  délits  pré- 
vus par  les  articles  invoqués  se  rencontrent  dans  ^espèce  ; 

En  ce  qui  touche  les  conclusions  subsidiaires  : 

Attendu  qu'il  n'est  pas  établi  que  Sen  et  Robert  aient 
dégradé  on  détérioré,  de  quelque  manière  que  ce  soit,  les 
chemins  sur  lesquels  sont  plantes  les  arbres  qu'ils  ont  ébran- 
chés  ;  que  le  fait,  par  un  bûcheron,  d'élaguer  des  arbres 
plantés  sur  un  chemin  public,  par  ordre  de  celui  qui  se 
prétend  le  propriétaire  de  ces  arbres,  ne  constitue  évidem- 
ment pas  la  contravention  prévue  par  l'art.  4-79  G.  pén.; 

Attendu  que  les  faits  reprochés  à  Sen  et  Robert  ne  cons- 
tituent ni  délit  ni  contravention,  et  Remy  de  Gampeau  n'é- 
tant appelé  en  cause  que  comme  civilement  responsable 
des  faits  imputés  aux  prévenus,  il  ne  peut  échoir,  pour  la  ju- 
ridi<^tion  correctionnelle,  de  statuer  sur  la  demande  en 
dommages-intérêts  formée  par  la  ville  de  Douai  ; 

Vu  les  art.  194  et  212  G.  inst.  crim.  ; 

Met  ia  Sentence  dont  est  appel  au  néant,  et  statuant  par 
jtt^emeût  niouveau,  déclare  régularisée,  et  par  suite  rece- 
vaWe,  l'action  inteiméè  par  la  ville  de  Doiiai  et  l'appel  par 
elle  interjeté; 

Au  lond,  dit  que  les  faits  imputés  aux  prévenus  Sen  et 
Robert  ne  constituent  ni  délit  ni  contravention  ; 

Les  renvoie;  des  poursuites  ; 

Ditqu*il  tféchet,  pour  la  juridiction  correctionnelle,  de 
statuer  sur  la  demande  en  dommages-intérêts  formée  con- 
tre les  prévenus  et  contre  Remy  de  Gampeau  comme  civi- 
lement responsatile  ; 

Et  vu  l'ait.  IQi  C.  inst.  crim.,  condamne  le  maire  de 

TOME  XVIII.  25 


(386) 

la  ville  de  Douai ,  en  sa  qualité,  aux  frais  dé  première  ins- 
tance et  d'appel. 

Du  20  août  1860.  Chamb.  correct.  Présid.,  M.  Dumon; 
rapp.,  M.  deGuerne,  conseill.;  minist.  publ.  ,  M,  Carpen- 
tier,  avoc.-gén.;avoc.,M«*Ed.  LemaireelLegrand^,  avou., 
Me  La  voix. 


ACTES  DE  L'ÉTAT-CIVIL.  — RECTIFICATION.— PARTICULE. 
—  MINISTÈRE  PUBLiq.  —  APPEL. 

Le  Ministère  public  ne  peut ,  en  dehors  des  cas  où  il  y  est 
spécialement  autorisé  par  la  loi,  agir  directement  et 
d'office  pour  faire  rectifier  las  actes  de  Vétat-dvil  (1). 

Dès-lors  est  non-recevable  l'appel  interjeté  par  le  Ministère 
puMic  du  jugement  qui ,  sur  la  demande  dune  partie , 
a  ordonné  la  rectification  de  son  acte  de  naissance  par 
V adjonction  de  la  particule  de  (2). 

Celte  particule  n'étant  ni  un  titre,  ni  une  marqua  de  no- 
blesse y  le  Ministère  public  ne  saurait  légitimer  son  action 
en  invoquant  la  loi  du  28  mai  1858  (3).  (L.  16-24 
août  1790.  Tit.  8,  art.  1,  2,  5;  L.  20  avril  1810,  art, 
46;  L.  25  mars  1817,  art.  75;  L.  28  mai  1858). 

(Le  Ministère  public  C.  de  Laplane). 

Le  14  décembre  1859,  le  sieur  Henri-Pierre-Félix  de 
Laplane,  ancien  député,  chevalier  de  la  Légion-d'Honneur, 

■*■■■■  II"  "^^^^     ■■■■»■  I  »^i— ^M^^— ^1^— i^—^^M^i^^^^-^^^^^^^»^^^^^^^^— ■^■^^^M^i^— ^M^  ^B^M^^^^— ^i^^   ■  —  ■■ 

(1-2-3)  Avant  1789,  le  miuistére  publie  était  investi,  en  matière 
civile  ^  d'attributions  indéûnies.  Dans  un  grand  nombre  de  cas,  il  agis- 
sait directement  ;  les  édits ,  les  ordonnances  des  rois  et  les  arrêts  de 
règlement  n'avaient  donné  pour  limite  à  son  action  que  Tintérét  public. 

Lorsqu'un  procès  civil  avait  été  iugé  contrairement  à  ses  conclusions, 
il  pouvait  demander  la  cassation  de  Parrét  au  conseil  du  roi,  on  le  con- 
sidérait sous  ce  rapport  alors  comme  partie  publique.  (  V.  Merlin,  rép. 
v»  Ministère  public  ,  §  2. — Dalloi ,  Alph. ,  v»>  M.  P. ,  n*»  7  et  suivants). 
Des  attributions  aussi  étendues  avaient  donné  lieu  à  des  plaintes  cfe 
la  part  des  familles  et  des  citoyens  qui  ne  pouvaient  se  mettre  à  l'abri 
des  recherches  et  de  l'autorité  de  la  magistrature  du  parquet. 

L'Assemblée  constituante  était  trop  frappée  de  l'abus  du  pouvoir  dans 
les  mains  du  Ministère  public  pour  l'exposer  au  danger  de  le  faire  re- 
naître dans  la  reconstruction  de  l'ordre  judiciaire.  De  là  le  principe 
écrit  dans  l'article  2  du  titre  VIII  de  la  loi  du  16-24  août  1790 ,  c  qu'an 
»  civil  les  commissaires  du  roi  exercent  leur  ministère,  non  par  voie 
»  d'action,  mais  par  celle  de  réquisition  dans  les  procès  dont  les  juges 
»  auront  été  saisis.  »  La  législation  est  restée  invariablement  attachée 
à  ce  principe ,  qui  n'a  subi  qu'un  petit  nombre  d'exceptions  comman- 


i 


(387) 

propriétaire  à  Saint-Omer,  présenta  au  Tribunal  civil  de 
cette  ville  une  requête  dans  laquelle  il  exposait  que  le  Tri- 

dées  par  des  considérations  majeures  et  qui  sont  formeitement  expri- 
mées par  la  loi.  (V.  art.  184, 191,  302,  491, 1057  C.  Nap.) 

On  a  vainement  essayé  de  soutenir  aue  Tarticle  46  de  la  loi  du  20 
avril  1810 ,  tout  en  confirmant  cette  règle  dans  son  1^  §  ainsi  conçu  : 
«  Le  Ministère  public  agit  d'office ,  en  matière  civile ,  dans  les  cas  spé- 
»  cifiés  par  la  loi ,  t  l'avait  profondément  modifiée  dans  sa  seconde 
partie  en  ajoutant  qu'il  (  le  Ministère  public  )  surveille  l'exécution  des 
lois  ,  des  jugements  et  arrêts ,  et  potursuit  d'office  cette  exécution  dans  les 
dispositions  qui  intéressent  l'ordre  public.  L'arrêt  que  nous  recueillons 
démontre  que  la  situation  est  restée  la  même  en  1810  ,  et  qu'on  n'a 
nullement  songé  à  rétablir  les  traditions  suivies  par  les  Parlements  sous 
l'ancien  régime.  Merlin,  dans  son  répertoire,  5^  édition,  vo  mariage, 
section  VI ,  §  3  ,  épuisant  toutes  les  ressources  de  sa  dialectique ,  a 
tenté  de  prouver  que  les  procureurs  impériaux  ont  la  voie  d'action  au 
civil ,  d'une  manière  indéunie ,  pour  poursuivre  d'office  l'exécution  des 
lois  qui  intéressent  l'ordre  public  ;  mais  ses  efforts  ont  été  impuissants 
et  sa  doctrine  a  été  constamment  repoussée  par  la  Cour  de  cassation. 

Avant  1810 ,  comme  depuis  cette  époque ,  chaque  fois  que  le  Minis- 
tère public  a  méconnu  les  limites  de  ses  attributions ,  il  y  a  été  sévère- 
ment ramené  par  la  Cour  suprême.  De  nombreux  arrêts  nous  attestent 
combien  cette  respectable  gardienne  de  nos  institutions  judiciaires  est 
attentive  sur  les  entreprises  de  la  magistrature  du  parquet.  Outre  les 
arrêts  que  mentionne  le  texte  même  delà  décision  delà  Cour  de  Douai, 


accorde  la  voie  d'action  aux  procureurs  impériaux  pour  demander  la 
nullité  des  mariages  contractés  en  violation  de  certaines  règles  d'ordre 
public  par  lui  édictées;  cependant  la  Cour  régulatrice  a  toujours  décidé 
que  cette  voie  d'action  était  exclusivement  limitée  aux  cas  prévus  par 
les  articles  184  et  191  ;  à  ses  yeux ,  le  Ministère  public  est  sans  droit 
et  sans  qualité  pour  poursuivre  d'office  l'annulation  d'une  sentence  qui, 
sur  la  demande  des  parties ,  a  prononcé  la  nullité  d'un  mariage ,  (ar- 
rêts des  1er  août  1820  et  5  mars  1821 ,  Sirey  et  J,  Pal. ,  coll.  nouv.  ,  à 
leur  date)  ^  ou  pour  s'opposer  judiciairement  à  l'exécution  qu'on  vou- 
drait donner  à  un  jugement  ordonnant  ou  autorisant  un  divorce.  Arrêt 
du  5  juillet  1824  (Sirey  à  sa  date).  Cet  arrêt  est  d'autant  plus  digne  de 
remarque,  qu'il  s'agissait  dans  l'espèce  d'un  jugement  qui  avait  admis , 
antérieurement  à  la  loi  du  8  mai  1816,  un  divorce  que  l'officier  de  l'élat- 
civil  de  Toulon  avait  refusé  de  prononcer.  Un  nouveau  jugement  rendu 
en  1820  sur  la  demande  d'un  sieur  Niell][,  avait  enjoint  a  l'officier  de 
l'état-civil  de  prononcer  ce  divorce  contrairement  à  la  disposition  for- 
melle de  l'article  2  de  la  loi  du  8  mai  1816.  Sur  l'appel  interjeté  par 
le  procureur-général,  la  Cour  d'Aix  avait  déclaré  ce  magistrat  recevaole 
dans  son  action  et,  statuant  an  fond ,  avait  converti  le  divorce  en  sépa- 
ration de  corps.  Mais  à  la  suite  du  pourvoi  formé  par  Nielly  ,  l'arrêt  a 
été  cassé  dans  les  termes  suivants  :  «  Vu  les  articles  2,  titre  VIII,  de  la 
»  loi  du  24  août  1790  et  46  de  celle  du  20  avril  1810,  considérant 
*  qu'aux  termes  des  articles  ci-dessos  le  Ministère  public  ne  peut  agir 
»  par  voie  d'actiou  que  dans  les  cas  spécifiées  par  les  lois  et  qu'il  n'en 


(388) 

bunal  de  Sisleron,  par  jugement  du  21  novembre  1859, 
avait  rectifié  Facle  de  baptême  de  son  père,  Aimé-Edouard 

)»  existait  aucune  dans  l'ancienne  législation  du  divorce ,  qui  Fautorisât 
»  à  interjeter  appel  des  jugements  rendus  en  cette  matiéîre  ;  qu'ainsi , 
»  quelque  irr(^gulier  que  puisse  être,  dans  la  fornoe  et  au  fond,  le  juge- 
»  ment  qui,  depuis  la  loi  du  8  mai  1816,  permet  à  Nietly  de  faire  pro- 
»  noncer  son  divorce  par  Tofficicr  de  l'état-civil ,  Fappel  que  le  procu- 
>  reur-général  en  a  interjeté  n'était  pas  recevable  ,  et  que  par  consé- 
»  quent  l'arrêt  attaqué  a  violé  les  lois  ci-dessus.  »  —  Casse  ,  etc. ,  etc. 
—  A  l'ofûcier  de  l'état-civil  seul  appartenait  le  droit  d'appel  dans  cette 
circonstance. 

Les  procureurs  impériaux  invoqueraient  en  vain  l'ordre  public  ou  l'in- 
térêt général  pour  agir  d'oftice  au  civil ,  le  droit  commun  les  déclare 
inhabiles  à  exercer  directement  leur  ministère.  V.  arrêts  de  rejet  des 
9  décembre  1819  et  28  décembre  1829  (  Collections  nouvelles  de  Sirey 
et  du  J.  du  Palais).  Ce  dernier  arrêt  a  été  rendu  dans  une  affaire  où  le 
procureur  du  roi  de  Vesoul ,  se  basant  sur  la  loi  du  22  germinal  au  IV 
et  sur  l'article  114  du  décret  du  18  juin  1811 ,  prétendait  y  par  la  voie 
civile,  contraindre  un  propriétaire  à  relouer  une  maison  à  l'exécuteur 
des  arrêts  criminels  qui ,  malgré  l'expiration  du  terme  convenu  pour  la 
durée  du  bail ,  refusait  de  vider  les  li^ux  loués  en  prétextant  n'avoir  pu 
se  procurer  un  logement  à  cause  de  sa  profession.  Le  pouvoi  formé  con- 
tre la  décision  de  la  Cour  de  Besancon  qui  avait  repoussé  une  pareille 
Prétention,  a  été  rejeté  dans  les  termes  suivants,  sur  les  conclusions  de 
[.  Laplagne-Barris  :  t  Attendu  que  les  pro€ureurs*généraux  toigours 
investis  d'une  action,  en  matière  criminelle,  correctionnelle  et  de  police, 
ne  sont  recevables  à  agir  par  voie  d'action,  en  matière  civile,  que  dans 
les  matières  spéciales  déterminées  par  des  dispositions  précises  des  lois 
exceptionnelles  au  droit  commun.  —  »  Atlenou  que  dans  les  cas  prévus 
par  les  articles  1  et  2  de  la  loi  du  22  germinal  an  lY  et  f)ar  l'article  lU 
du  décret  du  18  juin  1811,  l'action  est  déférée  aux  commissaires  du  gou- 
vernement, représentés  aujourd'hui  par  les  procureurs  du  roi,  pour  faire 
exécuter  leurs  réquisitions  par  voie  de  police  correctionnelle  ;  qu'au- 
cune disposition  soit  des  lois  et  décrets  susdatés ,  soit  de  toutes  autres 
lois  ,  ne  défère  au  Ministère  public  l'action  civile  dans  lesdits  cas ,  et 
que  dans  ce  silence  les  dépositaires  du  ministère  public  ne  peuvent 
1  exercer  au  civil  par  voie  d  action  (art.  2  ,  titre  VIII  de  la  loi  du  24 
août  1790);  qu'ainsi  la  faculté  de  se  pourvoir  en  cassatioaest  limitée, 
en  matière  civile,  par  les  lois,  aux  parties  qui  ont  l'exercice  des  actions 
civiles,  sauf  l'exécution  des  articles  80  et  88  de  la  loi  du  27  ventôse  an 
YIII  qui  n'est  pas  réclamée  et  ne  pourrait  être  réclamée  par  les  pro- 
cureurs généraux  prés  les  Cours  d'appel,  etc.,  etc.  »  — Il  est  donc  ce^ 
tain  et  incontestable  en  droit ,  comme  le  proclame  encore  la  Cour  de 
cassation  dans  son  arrêt  du  3  avril  1826 ,  oité  par  la  Cour  de  Douai  » 
que  le  Ministère  public  ,  d'après  la  législation  générale ,  n'a  point  qua- 
lité pour  intenter  d'office  une  demande  en  matière  civile. 

I^  Cour  de  Paris  en  se  rangeant,  le  13  août  1851 ,  à  l'opinion  de 
Merlin  (V.  aff.  Vergniol.  S.  V.  1851  ,  2,  465;  J.  Pal. ,  1852,  L  2. ,  p. 
143),  nous  parait  avoir  assigné  à  l'article  46  de  la  loi  du  20  avril  1810 
un  sens  et  une  portée  que  le  législateur  de  cette  époqiie  n'entendait 
nullement  lui  donner.  Ni  l'exposé  des  motifs ,  ni  les  travaux  prépara- 
toires de  cette  loi  n'autorisent  à  conclure  que  le  gouvernement  ait  songé 


(389) 

de  Laplane,  en  ordonnant  que  le  nom  patronymique  se- 
rait écrit  de  Laplane  et  non  Laplane;  il  demandait  que  son 

à  faire  cesser  des  abus  auxquels  aurait  donné  naissance  l'article  2  du 
titre  VIIÏ  de  la  loi  de  1790.  Loin  d'avoir  été  critiqué  comme  défectueux 
et  réduisant  à  une  impuissance  regrettable  le  rôle  du  Ministère  public , 
cet  article  était,  en  1905,  quinze  ans  après  sa  publication  ,  promulgué 
de  nouveau  comme  loi  fondamentale  i)ar  les  décrets  législatifs  des  20 
prairial  an  XIII  (art.  123)  et  15  messidor  an  XIII  (art.  112)  qui  orga* 
Disaient  l'administration  judiciaire  de  provinces  conquises  et  relevant 
de  la  souveraineté  de  Napoléon  I^r. 

Au  reste  ,  l'interprétation  adoptée  par  la  Cour  de  Paris  conduirait  à 
cette  étrange  résultat ,  qu'en  l'absence  d'un  texte  imposant  aux  par- 
tics  l'obligation  de  signifier  au  Ministère  public  une  décision  de  justice 
réglant  leur  état,  et  gu'à  défaut  d'une  disposition  légale  limitant  la  durée 
de  l'action  des  officiers  du  parquet ,  ta  position  juridique  de»  citoyens 
resterait  exposée  à  la  menace  permanente  d'un  appel  arbitraire  et  que 
les  situations  de  famille  seraient  perpétuellement  incertaines.  V.  les 
observations  judicieuses  de  M.  Dnvergier  dans  le  procès  Vergniol 
(S.  V.  1851.  Loc.  cit.) 

Les  demandes  judiciaires  relatives  aux  actes  destinés  à  contater 
r  état-civil  des  citoyens  ne  sont  pas  soumises  &  d'autres  régies  que  celles 
édictées  par  l'Assemblée  Constituante.  L'article  99  du  Code  Napoléon 
n'est  que  la  conséquence  du  principe  posé  dans  l'article  2  du  titre  VIlI 
de  la  loi  du  24  août  1790,  de  même  que  las  articles  ^5  à  858  du  Gode 
de  procédure  civile  en  développent,  en  cette  matière,  la  mise  en  appli- 
cation. Les  parties  seules  sont  demanderesses  en  rectification  des  actes 
ou  en  réparation  des  erreurs  ou  des  omissions  commises  par  les  officiers 
de  rétat-civîl.  Le  Ministère  publie  ,  d'après  le  droit  commun  ,  n'est 
appelé  qu'à  donner  ses  conclusions  ou  ses  réquisitions. 

L'avis  du  conseil  d'Ëtat  du  13  nivôse  an  X  avait  déjà  rappelé  cette 
rè^le  avant  la  promulgation  du  Code  Napoléon.  Les  consuls  avaient 
saisi  le  conseil  d'Ëtat  de  la  question  de  savoir  s'il  ne  convenait  pas 
d'investir  le  Ministère  public  du  soin  de  faire  rectifier  les  actes  de 
l'état^civil  dans  le  département  de  l'Àrdécfae ,  où  les  officiers  de  l'état- 
civil  avaient  commis  de  graves  et  nombreuses  erreurs  portant  préiudice 
aux  familles.  Le  conseil  refuse  nettement  d'accorder  une  semblable 
attribution  aux  officiers  du  parquet ,  les  parties  seules  sont  appelées  à 
demander  les  rectifications. 

(l  la  vérité  le  gouvernement  consulta  de  nouveau  le  conseil  d'Etat 
sur  une  difficulté  analogue.  Il  s'agissait  de  déterminer  les  formalités  à 
observer  pour  ipscrire  sur  les  registres  de  i'état-'Civil  des  actes  qui  n'y 
avaient  pas  été  portés  dans  les  délais  prescrits.  L'avis  du  Conseil ,  ap- 
fHTOuvé  le  12  brumaire  an  XI ,  décide  que  les  aoles  omis  ne  peuvent 
être  inscrits  q^u'en  vertu  de  jugements ,  et  que  le  soin  de  demander  ces 

i'iigements  doit  être  laissé  aux  parties,  sauf,  ajoute-t-il,  le  droit  qu'ont 
es  commissaires  du  gouvernement  d'agir  d'office  en  cette  matière  dans 
les  circonstances  qui  intéressent  l'ordre  publie.  Ultérieurement ,  Tar- 
iicle  122  du  décret  du  18  juin  1811 ,  interprétant  cet  avis  du  conseil 
d'Ëtat  en  ce  sens  qu'il  était  également  applicable  aux  rectifications  des 
actes  ,  se  borna  h  déclarer  que  le  Ministère  public  pouvait  demander 
d^office  ces  rectifications  ;  mais  une  interprétation  plus  nette  et  plus 
complète ,  selon  nous  ,  a  été  donnée  à  l'avis  du  conseil  d'Etat  de  l'an 


(390) 

nom,  indiqué  à  tort  Laplane  dans  son  acte  de  naissance^ 
rédigé  à  Saint-Omer  le  28  février  1806,  fût  remplacé  par 

XI  par  la  loi  du  25  mars  1817.  L'article  75  de  cette  loi  habilitant  les 
officiers  du  ministère  public  à  agir  d'office  pour  faire  réparer  les  omis- 
sions et  faire  opérer  les  rectifications  des  actes  de  Tétat-civil  concer- 
nant les  individus  notoirement  indigents ,  dispose  q^ue  les  mêmes  offi- 
ciers auront  aussi  qualité  pour  solliciter  et  poursuivre  les  jugements 
ayant  pour  objet  de  remplacer  les  registres  perdi  s  ou  incendiés,  et  de 
suppléer  aux  registres  qui  n'auraient  pas  été  tenus.  Cette  disposition 
donne  un  sens  clair  et  précis  à  la  formule  assez  vague  qui  se  trouve 
dans  l'avis  du  conseil  d'Ëtat  de  l'an  XI ,  elle  définit  avec  netteté  les 
circonstances  qui  intéressent  l'ordre  public ,  elle  en  caractérise  ,  d'ail- 
leurs ,  l'étendue,  en  déclarant  que  les  actes  de  procédure  et  jugements 
seront  enregistrés  gratis.  Ce  mode  d'enregistrement ,  entièrement  dis- 
tinct de  l'enregistrement  en  débet  dont  parlait  l'article  122  du  décret 
de  1811,  ne  concerne  que  les  actes  intéressant  la  société  entière,  et  les 
droits  afférant  aux  actes  de  cette  catégorie  tombent  à  la  charge  de 
l'Etat.  Y.  dans  ce  sens  un  arrêt  do  Toulouse  du  1er  août  1836  (S.  V. 
1837,2,  185). 

On  a  cité  quelquefois  comme  un  intérêt  d'ordre  public ,  pour  lequel 
le  procureur  impérial  peut  agir  d'office ,  celui  de  la  conscription  et  du 
recrutement  de  l'armée;  Mais  il  n'est  plus  nécessaire  aujourd'hui  d'agir 
à  cet  efiet  en  réparation  des  omissions  ou  rectifications  des  actes  de 
l'étal-civil  ;  car,  d'après  l'article  7  de  la  loi  du  22  mars  1832,  la  noto- 
riété publique  suffit  pour  faire  considérer  comme  ayant  l'âge  requis 
pour  le  tirage  au  sort  les  jeunes  gens  qui  ne  produisent  pas  h  ur  acte  de 
naissance. 

Depuis  1817  ^  les  lois  des  10  juillet  et  10  décembre  1850  ont  com- 

filété  les  dispositions  du  Gode  Napoléon  concernant  certains  actes  de 
'état-civil.  La  première  exige,  dans  l'intérêt  du  crédit  public,  qaeTacte 
de  mariage  contienne  une  mention  relative  au  contrat  de  mariage  des 
époux.  Dans  le  cas  où  cette  mention  aurait  été  omise  ou  serait  erronée , 
elle  investit  spécialement  le  Ministère  public  du  droit  de  demander  la 
rectification  au  point  de  vue  de  l'ordre  public.  Cette  nouvelle  attribu- 
tion donnée  au  nrocureur  impérial  était  assurément  inutile,  si  l'article 
46  de  la  loi  du  20  avril  1810  avait  la  portée)  qu'on  veut  lui  donner. 

La  loi  du  10  décembre  1850  a  pour  objet  de  faciliter  le  mariage  des 
individus  dans  l'indigence ,  la  légitimation  de  leurs  enfants  naturels  et 
le  retrait  de  ces  enfants  déposés  dans  les  hospices  S'il  était  vrai  que 
l'intérêt  des  indigents ,  qui  est  certainement  aussi  celui  de  l'ordre  pu- 
ki;«    ».i»^.:«A«  1^  ««^« — —  : — A«:^^  a  ^gjj.  ^»office  pour  poorsuivre 

concernant  la  célébration  du 


blic ,  autorisât  le  procureur  impérial  à  agir  c 
l'exécution  des  dispositions  du  Gode  Nap.  conce 


pris  le  législateur  de  1850  de  spécifier  les  nouvelles  attributions  dont 


il  investissait  le  Ministère  public  démontre  clairement ,  suivant  nous , 
qu'il  adoptait  l'interprétation  donnée  par  le  Cour  de  cassation  à  l'ar- 
ticle 46  de  la  loi  du  20  avril  1810. — Jusqu'ici  la  question  spéciale  rda- 
tive  aux  rectifications  des  actes  de  l'état-civil  n'a  pas  encore  été ,  à 
notre  connaissance,  soumise  à  la  Gour  suprême  ;  mais  nous  n'hésitons 
pas  à  penser  qu'elle  conservera  sur  ce  point  l'opinion  qu'eUe  a  cons- 


♦  (301  ) 

celui  de  de  Laplaiie^  nom  que  la  justice  avait  reconnu  être 
celui  de  son  auteur. 

Sur  les  conclusions  conformes  de  M.  Lebihan,  substitut 
du  procureur  impérial,  le  16  décembre  1859,  le  Tribunal 
de  Saint-Omer  rendit  le  jugement  dont  suit  la  teneur  : 

JUGEMENT. 

<  Considérant  que  l'exposant  présente  à  l'appui  de  sa  de- 
mande l'acte  de  naissance  de  son  père,  rectifié  dans  son  no  m 
patronymique  par  l'addition  de  la  particule  rfe,  suivant  ju- 
gement du  Tribunal  de  Sisteron,  daté  du  21  novembre 
1859; 

»  Que,  sans  devoir  s'arrêter  aux  motifs  de  cette  décision, 
mais  par  cette  considération  puissante  qu'il  est  d'intérêt 
public  que  le  noin  patronymique  du  père  se  continue  dans 
celui  du  fils,  il  convient,  en  l'état  de  fait  surtout,  de  déci- 
der que,  de  même  que  l'orthographe  du  nom  Laplane  a 

ta  minent  suivie,  en  matière  civile,  dans  les  nombreux  arrêts  cités  plus 
haut. 

D^uis  quelque  tems  les  Cour  imi)ériales  ont  été  appelés  à  se  pro- 
noncer sur  cette  difficulté.  Leurs  décisions ,  assez  divergentes ,  parais- 
sent cependant  refuser  en  thèse  générale  l'action  directe  du  Ministère 
public  V.  Montpellier  10  mai  1859  (J.  Pal.  1860,  p.  486);  Colmar  6  mars 
1860  (J.  Pal.  1860,  p.  492,  et  Monit.  trib.  1860,  p.  423);  Orléans  17  mars 
1860  (Munit,  trih.  1860,  p.  419)  ;  trib.  d'Angers  27  mars  1860  (  J.  Pal. 
1860  ,  p.  486  à  la  note ,  et  J.  Minist.  puhL ,  t.  3 ,  p.  112  avec  notes)  ; 
Dijon  11  mai  1860  (J.  Pal.  1860,  p.  486;  Monit  tnb.  1860,  p.  410)  ; 
Colmar  15  mai  1860  (J.  Pal.  1860 ,  p.  486)  ;  Agen  26  juin  1860  (Mmit. 
trib.  1860,  p.  420) ,  et  Metz  31  juill.  iSGO (Monit.  trib.  1860,  p.  412). 

Nous  approuvons  complètement  les  motifs  oui  ont  déterminé  la  Cour 
de  Douai  à  déclarer  non-recevable  Tappel  au  Ministère  public.  Nous 
pensons,  comme  la  Cour,  que  la  loi  du  28  mai  1858  laisse  dans  son  inté- 
grité notre  système  légal  sur  les  rectifications  d'actes  de  Tétat-civil  et 
n'a  point  changé  en  ce  regard  les  conditions  d'action  du  Ministère  pu- 
blic. Les  registres  de  l'état-civil  ne  sont  pas  destinés  à  constater  des 
titres  ou  distmctions  honorifiques,  au  Souverain  seul  appartient  le  djpoit 
de  conférer  ces  distinctions  et  d'autoriser  des  changements  ou  additions 
de  noms  ;  nous  croyons  ,  en  conséquence ,  que  nonobstant  tous  arrêts 
ou  jugements,  qui  auraient  à  tort  rectifié  des  actes  de  naissance ,  en 
modifiant  sans  droit  un  nom  patronymique  à  l'aide  duquel  les  parties 
voudraient  s'attribuer  uqo  distinction  honorifiçiue  ,  le  Ministère  public 
conserverait  intacte  l'action  correctionnelle  qui  est  créée  nar  la  loi  du 
28  mai  1858.  V.  dans  ce  sens  rej.  req.  16  novembre  1824,  et  Cass. 
dans  l'intérêt  de  la  loi  18  février  1824  (S.  V.  et  J.  Pal. ,  coll.  nouv.  à 
leur  date).  Consultez  Cass.  22  avril  1846  (Dalloz  1846.  1 ,172). 

En  ce  qui  concerne  la  particule  de ,  V.  J.  du  Palais  1860 ,  p.  426  et 
S.  V.  1860 ,  2,  369  ,  où  les  autorités  sont  indiquéesr 


été  rectifiée  dans  l'acte  de  naissance  du  premier,  de  même 
elle  doit  l'être  dans  l'acte  de  naissance  du  second  ; 

Le  Tribunal  ordonne  la  rectification  demandée,  dit  en 
en  conséquence  :  1^  que  dans  l'acte  de  naissance  dressé  sur 
les  registres  de  l'état-civil  de  Saint-Omer,  le  28  février 
1806,  le  nom  patronymique  dudit  exposant  sera  écrit  de 
Laplane,  au  lieu  de  Laplane;  dit  que  le  présent  jugement 
sera  inscrit  sur  les  registres  de  l'état-civil  de  la  ville  de 
Saint-Omer  pour  l'année  courante,  et  que  mention  en  sera 
faite  en  marge  de  l'acte  réformé,  etc.  » 

Dans  le  dernier  jour  qui  précédait  l'expiration  des  trois 
mois  depuis  le  46  décembre  1859,  le  procureur  impérial 
de  Saint-Omer,  obtempérant  à  des  instructions  émanées  de 
la  chancellerie,  a  interjeté  appel  de  cette  décisiop,  et  en  a 
demandé  l'infirmation.  Selon  ce  magistrat,  l'acte  de  nais- 
sance du  28  février  1806  ne  doit  pas  être  rectifié;  le  nom 
de  Laplane  qui  y  est  inséré  doit  être  maintenu  dans  son 
entier,  et  l'adjonction  de  la  particule  de  lui  parait  contenir 
une  violation  indirecte  de  la  loi  du  28  mai  1858. 

Devant  la  Cour,  on  oppose  au  ministère  public  une  fin 
de  non-recevoir  tirée  des  art.  2  du  titre  8  de  la  loi  du  16- 
24  août  1790,  et  46  de  celle  du  20  avril  1810,  q^î  refusent 
au  procureur  impérial  le  droit  d'agir  d'ofHce  en  matière 
civile.  Aucune  disposition  législative,  ajôule-t-on,  ne  donne 
qualité  à  ce  magistrat' pour  mt enter  directement  une  action 
au  civil,  et  à  plus  forte  raison  pour  interjeter  appel,  lors- 
qu'il n'a  pas  été  partie  principale  en  première  instance. 

La  Cour  a  déclaré  le  ministère  public  non  recevablô  : 

ARRÊT, 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'en  principe  et  aux  tenues  de 
l'art.  2  du  titre  8  de  la  loi  du  16-24  août  1790,  le  minis- 
tère public  n'agit  au  civil  que  par  voie  de  réquisition  dans 
les  procès  dont  les  juges  auront  été  saisis,  et  que  la  voie 
d'action  ne  lui  appartient  pas  ; 

Qu'aux  termes  de  l'art.  46  de  la  loi  du  90  avril  1810,  il 
agit  d'office  dafls  les  cas  spécifiés  par  la  loi  j  qu'en  le  char- 
geant, par  la  seconde  partie  de  cet  article,  de  surveiller 
et  de  poursuivre  d'office  Texécution  des  lois,  des  arrêts  et 
des  jugements  dans  les  dispositions  qui  intéressent  l'ordre 


(393) 

public,  le  législateur  n'a  pu  iBôtlre  à  néant  la  première 
partie  de  la  disposition  en  ouvrant  tu  minietère  puWio, 
d'une  manière  indéfinie,  la  voie  d'action  daris  tona  les  ça$ 
qui  lui  paraîtraient  intéresser  l'ordre  public  ; 

Attendu  que  le  législateur  de  1810  n'a  fiait  que  repro- 
duire, en  les  réaumanl,  les  art.  4  et  5  da  titre  8  de  la  loi 
du  â4:  août  1790  ;  qu'en  efifet,  aux  termes  de  l'art.  1er  de 
cette  loi,  les  fonctions  des  commissaires  du  roi  se  bornent 
à  faire  observer  les  lois  qui  intéressent  l'ordre  général,  et 
à  faire  exécuter  les  jugements ,  et  que  l'art.  5  déléguaiOt  à 
ces,  mêmes  commissaires  lesoiji  de  tenir  la  main  à  l' exé- 
cution des  jugements,  les  chargé  de  poursuivre  d'office 
cette  exécution  dans  toutes  les  dispositions  qui  intés^esseot 
l'ordre  public; 

Attendu  que  rien,  dans  les  travaux  préparatoires:  d^  J^iloi 
du  20  avril  1810  ni  dans  l'exposé  des  motifs,  ne  révèle 
l'intention  qu'aurait  eue  le  législateur  de  changer  d'unie 
manière  aussi  considérable  la  loi  de  1790,  et  de  donner 
l'action  directe  au  procureur  impérial  dans  tous  les  cas  qui 
intéressaraient  l'ordre  public  ; 

Attendu  qu'une  pareille  faculté  serait  en  désaccord  avec 
la  disposition  de  l'art.  83  G,  proo,  civ„  qui  ordonne  lacom- 
munication  au  ministère  publjo  ^  po«r  qu'il  soit  entendu 
dans  ses  condusions,  de  toutes  les  aâaires  qui  touobent  à 
Tordre  public  ; 

Attendu  que  la  jurisprudence  de  la  Cour  régulatw^  a 
constamment  repoussé  une  semblable  doctrine  ; 

Que  les  matières  de  minorité,  de  tutelle  et  d' in<i^(tiçti<?ia 
intéressent  à  un  hmt  degré  Tordre  public,  et  que  cepen- 
dant la  Cour  de  cassation  a  dénié  aux  procureurs  impé- 
riaux le  droit  da  provoquer  d'olfioe  l'annulatiojqi  d'avis  de 
parents,  l'organisation  d'une  tutelle,  la  destitution  d'un 
tuteur,  quel  que  fût  le  préjudice  épTouvé  par  le  mineur 
ou  l'interdit.  (Arrels  de$  37  frimaire  an  13,  20aoi)it  1807, 
8  mars  1814  et  11  août  1818)  (1)  ;  . 

Que,  par  les  mêmes  raisons,  ils  ne  peuvent  ni  demander 

(1)  S.  V.  J.  du  Palais,  coH.  %<miv;  à  lôwr  date. 


(SU) 

d'office  l'annulation  d'une  cession  de  droits  litigieux  opérée 
en  contravention  à  l'art.  1597  G.  Nap.,  ou  la  reddition 
d'un  compte  dans  l'intérêt  d'un  établissement  public.  (Ar- 
rêts des  29  février  1832  et  26  avril  1881.)  (1). 

Attendu  que  les  noms  des  citoyens  consignés  dans  les 
registres  de  l'état-civil  constituent  pour  ceux-ci  une  véri- 
table propriété  ;  qu'eux  seuls  sont  habiles  à  la  revendiquer 
lorsque  le  nom  a  été  omis,  altéré  d'une  manière  quelcon- 
ou  incomplètement  reproduit  par  l'oflîcier  de  l'état-civil; 

Attendu-que  ce  droit  résulte  des  dispositions  de  l'art.  99 
G.  Nap.  et  de  celles  des  art.  855  à  858  G.  proc.  civ.,  les- 
quelles n'appellent  le  ministère  public  qu'à  conclure  ;  qu'il 
est  confirmé  par  l'avis  du  Conseil  d'Etat  du  13  nivôse  an 
10,  et  proclamé  par  l'arrêt  de  la  Gour  de  cassation  du  3 
avril  1826  (2); 

Attendu  que  si,  aux  termes  de  l'avis  du  Gonseil  d'Etat 
du  12  brumaire  an  11,  et  de  l'art.  122  du  décret  du  18 
juin  1811,  en  cas  d'omission  d'actes  de  l'état-civil  sur  les 
registres,  lé  ministère  public  peut  agir  d'office  pour  les 
faire  réparer  dans  les  circonstances  qui  intéressent  l'ordre 
public,  il  ne  s'en  suit  pas  qu'il  soit  partie  principale,  lors- 
qu'une demande  en  rectification  est  introduite  par  un  par- 
ticulier dans  son  intérêt  privé  ; 

Attendu  qu'il  est  encore  autorisé  à  agir  d'office,  aux 
termes  de  l'art.  75  de  la  loi  du  25  mars  1817,  pour  faire 
réparer  les  omissions  et  faire  les  rectifications  sur  les  re- 
gistres de  l'état-civil  d'actes  qui  intéressent  les  individus 
notoirement  indigents  ;  mais  que  ces  exceptions,  autorisées 
par  un  texte  formel,  confirment  là  règle  pour  les  cas  non 
exceptés  ; 

Attendu  que  si  le  ministère  public  était  de  droit  partie 
principale  dans  les  demandes  en  rectification  d'actes  de 
l'état-civil,  on  eût  limité  le  terme  de  sa  faculté  d'appel; 
car  dans  l'état  des  choses  et  en  l'absence  de  signification 
du  jugement,  le  droit  d'appel  reste  toujours  ouvert  au  mi- 

(1)  J.  du  Pal.  à  leur  date.  S.  V.  1832.  1.  364  et  785. 

(2)  S.  V.  coll.  nouv.  et  J.  Pal.  à  sa  date« 


(395) 

nislère  public ,  puisqu'on  ne  peut ,  par  analogie  >  créer  une 
déchéance  du  droit  d'appel  que  le  législateur  n'a  pas 
édictée  ;  qu'un  tel  état  d'incertitude ,  sur  la  teneur  des 
actes  de  l'état-civil,  ne  saurait  exister. 

Attendu  que  la  loi  du  28  mai  1858  ,  qui  punit  d'amende 
celui  qui,  sans  droit,  et  en  vue  de  s'attribuer  une  distinction 
honorifique,  aura  publiquement  pris  un  titre ,  changé,  al- 
téré ou  modifié  le  nom  que  lui  assignent  les  actes  de  l'état- 
civil,  laisse  dans  toute  son  intégrité  notre  système  légal 
sur  la  rectification  d'actes  de  l'état-civil,  et  ne  modifie  pas 
la  position  du  ministère  public  et  les  conditions  de  son 
action. 

Que  sans  doute ,  elle  éveille  la  vigilance  dans  les  de- 
mandes en  rectification  du  nom  patronymique  qui  pour- 
raient favoriser  de  pareilles  usurpations ,  mais  qu'il  y  a 
loin  de  la  contradiction  légitime  qu'il  peut  exercer  par 
voie  de  réquisition  au  droit  d'action  qu'il  revendique. 

Attendu  que  dans. la  cause,  le  ministère  public  ne  sau- 
rait même  prétendre  qu'il  agit  pour  faire  respecter  les 
prescriptions  de  la  loi  du  28  mai  1858  ;  qu'en  effet  la  par- 
ticule dont  rintimé  réclame  l'adjonction  à  son  nom  patro- 
nymique n'est  ni  un  titre ,  ni  une  marque  de  noblesse ,  et 
qu'au  surplus,  si  dans  l'opinion  vulgaire  il  en  est  autre- 
ment, l'intimé  justifie  qu'il  est  noble,  par  la  production  des 
lettres  de  noblesse  héréditaire,  accordées  à  son  père  par 
le  souverain ,  le  7  septembre  1816. 

Attendu  qu'interjeter  appel  c'est  agir,  que  le  procureur 
impérial  de  Saint-Omer,  en  appelant  du  jugement  du  16 
décembre  1859  qui,  sur  la  requête  de  l'intimé,  ordonnait 
la  rectification  de  Tacte  de  naissance  de  celui-ci ,  a  exercé 
son  ministère  par  voie  d'action  dans  une  matière  purement 
civile,  concernant  des  intérêts  exclusivement  privés,  et  en- 
tièrement dégagée  de  circonstances  susceptibles  de  donner 
naissance  à  un  intérêt  d'ordre  public,  alors  qu'il  n'était 
autorisé  par  aucune  loi  à  former  pareille  demande. 

La  Cour  dit  que  le  procureur  impérial  de  Saint-Omer  , 
était  sans  droit  et  sans  qualité  pour  interjeter  l'appel  par 
lui  signifié  le  15  mars  1860,  déclare  ledit  appel  non  rece- 


(396) 

vable,  ordonne!  que  ce  dont  est  appel  sortira  son  plein  et 
entier  effet. 

Du  18  août  1860.  2e  chamb.  civile.  Prés.,  M.  Danel; 
minist.  publ.,  M.  Béer,  avoc.-gçn.  ;  conclus,  cont.  ;avoc., 
Me  Duheni  ;  avou. ,  M©  Huret. 


MATIÈRES  D'OR  ET  D'ARGENT.  —  registres.  —  vente 

POUR  AUTRUI.  —  DÉPÔT.  —  VENTE  PAR  ÉCHANTILLONS. 

Uobligation  de  tenir  des  registres  d'achats  et  ventes  de  ma- 
tières d!or  et  d'argent  est  imposée  à  Unis  ceux  qui  s'oc- 
cupent de  la  vente  de  ces  matières,  lorsquHls  en  tiennent 
en  dépôt  chez  eux. 

U  n'importe  qu'ils  fassenJt  cette  vente  j^our  leur  compte  per- 
$onml  ou  pour  cdui  d'un  tiers,  m  qu'ils  la  fassent  sur 
échantillons  préalablement  montrés  et  avec  livraison  pos- 
térieure, (t.  i9  brumaire  an  6,  art.  74  et  80.)  (1). 

(Delvainquier  G.  contrib.  indirectes  et  minist.  publ.) 

Sur  jugement  du  Tribunal  correctionnel  de  Lille,  en  date 
du  29  mai  1860,  ainsi  conçu  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  Tobligation  imposée  par  l'art,  74  de  la 
loi  du  19  brumaire  an  6,  à  tout  marchand  de  matières  d'or 
et  d'argent,  de  tenir  un  registre  destiné  à  T  inscription 
desdites  matières,  est  une  mesure  de  police  qui  assujettit 
tout  individu  s'occupant  de  la  vente,  lorsqu'il  en  tient  un 
dépôt  chez  lui  ;  qu'il  n'importe,  s'il  fait  cette  vente  pour 
son  compte  personnel  ou  pour  ce^^î  d'un  tiers  ,  ni  s'il  la 
fait  su;:  échantillons  préalablement  montrés  at  avec  livraison 
postérieure;  que  la  loi  a  voulu  soumettre  ce  commerce li 
des  garanties;  toutes  particulières,  tant  au  regard  du  public 
qu'à  celui  du  trésor,  garanties  qui  manqueraient  si,  sons  le 
prétexte  qu'on  s'y  livre  pour  le  compte  d'autrui,  on  pouvait 
en  être  dispensé  ;      , 

>  Attendu  eu  fait  que  Grégoire  Delvainquier  a  été,  le  9 
mai  1860,  à  Wïle,  trouvé  détenteur  de  dix  montres  en  or 

(1)  «Mf.  Cm.  imll  1884  <S.  Y.. 34, 1,  â98) ;  id.  2mai  1856  (J.  Paî 

57,  p.  187)  ;  id.  88  m  18Çe  (S.  V,  5Q,  1, 867). 


(897) 

et  vingt-quatre  en  argent  ;  qu'il  reconnaîl  s'occuper  de  la 
vente  de  ces  objets  pour  le  Comptoir  d'horlogeries  de  Genève; 
qu'il  n'avait  aucun  registre  servant  à  inscrire  leurs  nature, 
nombre,  poids  et  titre,  les  noms  et  demeure  de  ceux  de 
qui  il  les  tient  ; 

»  Qu'il  est  ainsi  contrevenu  à  l'art.  74  susmentionné,  et 
qui  est  puni  par  l'art.  80  suivant; 

»  Vu  lesdits  articles  et  l'art,  194  G.  inst.  crim.  ; 

»  Le  Tribunal  déclare  Grégoire-Joseph  Delvainquier  cou- 
pable de  n'avoir  pas,  étant  marchand  d'or  et  d'argent^  un 
registre  coté  et  paraphé  par  l'administration  municipale^ 
sur  lequel  il  inscrit  la  nature^  le  nombre,  le  poids  et  le  tKre 
des  matières  et  ouvrages  d'or  et  d'argent  qu'il  achète  ou 
vend,  avec  les  noms  et  demeure  de  ceux  de  qui  il  achète  ; 

>  En  conséquence,  reçoit  l'administration  dès  contribu-» 
tions  indirectes,  partie  civile,  intervenante  ;  condamne  Del- 
vainquier par  corps  à  une  amende  de  âOO  fr.  et  aux  frais^ 
dont  l'administration  sera  tenue  sauf  sou  recours  ;  fixe  à 
six  mois  la  durée  de  la  contrainte  par  corps  ;  déclare  que 
le  bénéfice  desdites  condamnatiotissera  abondonné  à  ladite 
administration^  etc.  » 

Appel  par  Delvainquier  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  —  Adoptant  lès  motifs  des  premiers  juges, 
met  l'appellation  au  néant  ;  ordonne  que  le  jugement  dont 
est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Condamne  Delvainquier  aux  frais  de  la  cause  d'appel; 
l'administration  des  contributions  indirectes,  partie  civile 
en  cause,  tenue  desdits  irais,  sauf  son  recours  contre  le  pré- 
venu ; 

Du  24  juillet  4860.  Chamb.  coirect.  Présid.,  M.  Dumon; 
rapp-,  M.  Mînart,  conseill.;  minist.  publ.,  M*  Carpentier, 
avoc.-gén.  ;  avoc.,  Mes  Talon  et  Merlin. 


MMi*lkfc_^»ÉMaMh*<M*»dMMÉiB<MlA«*«. 


VOL.  —  CULRACTBRE.  —  SOtJSTJRACTÎON.  *^  PIÈGE  TBNDVv. 

Vindividu  qui ,  par  fraude,  s'empare  de  la  chose  d^autrui^ 
dam  V  intime  croyance  qu'il  se  F  approprie,  commet  mi 


(398) 

vol  y  encore  bien  que  le  propriétaire  de  celte  chose,  averti 
que  la  soustraction  doit  se  commettre,  s'entende  avec  un 
tiers  pour  y  faire  coopérer,  surprendre  le  coupable  et 
conserver  ainsi  sa  chose.  (G.  pén.  art.  379).  (1). 

(Brochard). 

Le  Tribunal  correctionnel  de  Cambrai ,  par  jugement  du 
17  mars  1860,  a  condamné  un  sieur  Brochard,  Anselme, 
épicier  à  Wanbaix ,  pour  délit  de  vol  dans  les  circons- 
tances que  fait  connaître  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  le  vol  est  la  soustraction  frauduleuse  de 

la  chose  d'autrui,  que  pour  apprécier  la  criminalité  du 
fait,  il  faut  considérer  l'intention  qui  a  fait  agir  celui  à  qui 
il  est  imputé  ; 

9  Attendu  qu'il  résulte  des  débats,  que  Brochard  a,  par 
promesse  d'argent ,  excité  l'ouvrier  de  Moreau  à  l'aider 
pour  voler  l'huile  de  ce  dernier  ;  qu'après  une  seconde 
proposition  qui  parut  être  acceptée,  Brochard  se  rendit  au 
tordoir  et  y  emplit ,  de  concert  avec  l'ouvrier,  deux  cruches 
qu'il  emportait  au  moment  où  le  propriétaire ,  en  embus- 
cade, le  somma  de  s'arrêter  ;  ' 

»  Attendu  qu'il  y  a  de  la  part  de  Brochard ,  soustraction 
de  la  chose  d'autrui  et  fiaude  pour  y  arriver ,  qu'il  était 
dans  l'intime  croyance  qu'il  s'appropriait  la  chose  d'autrui; 

(i)  L'existence  du  vol  suppose  trois  conditions:  il  faut  1»  qn'il  y  ail 
soustraction  d'une  chose  quelconque  ;  2o  que  cette  soHstracUon  soit 
frauduleuse  ;  3»  que  la  chose  soustraite  appartienne  à  autrui.  Dans  Tes- 
pèce ,  il  ne  pouvait  y  avoir  doute  sur  les  deux  premières  conditions ,  il 
n'en  pouvait  surgir  que  sur  la  première. 

Or.  la  soustraction,  c'est  l'appréhension  de  la  chose  contre  le  gré  do 

Propriétaire.  V.  sur  ce  principe  :  Cass.  20  novjîmb.  1835  (J.  IPal.  à  sa 
ate);  id.  18  novemb.  1837  (J.  Pal.  t.  2. 1837  p.  405)  ;  id.  U  décemb. 


cela  ne  suftit-il  pas  pour  que  le  vol  existe  ?  On  décide  (v.  Chauveau  et 
Hélîe  t.  6,  p.  565  et  592J  que  l'adhésion  tacite  du  propriétaire  à  l'ap- 
préhension^si  cette  adhésion  n'était  pas  connue  de  celui  qui  appréhende, 
ne  détruirait  pas  la  criminalité  du  fait.  A  plus  forte  raison  si  elle  n'est 
que  fictive ,  si  ^en  déGnitive,  elle  n'existe  pas.  La  remise  qui  est  faite  de 
robjet  dans  notre  espèce  n'est  pas,  à  proprement  parler  la  remise  volon- 
ïaire,  ce  n'est  ni  le  don,  ni  le  prêt,  ni  le  dépôt  ;  ce  n'est  en  réalité  qu'une 
facilité  accordée  pour  le  vol  ,  ce  qui  est  une  action  peu  louable  peut- 
être  ,  mais  oui  n'empêche  pas  que  le  vol  ne  s'accomplisse ,  avec  ses 
conditions ,  la  fraude  et  la  soustraction  de  la  chose  d'autrui. 


(399) 

»  Attendu  que  la  circonstance  ignorée  de  Brochard  que 
le  propriétaire  était  prévenu ,  et  qu'il  tombait  dans  un 
piége^  ne  modifie  pas  le  fait  par  lui  commis,  et  ne  change 
point  l'intention  qui  Fa  poussé  à  le  commettre,  qu'elle 
n'empêche  pas  qu'il  ait  appréhendé  la  chose  d'autrui , 
et  qu'il  l'ait  appréhendée  frauduleusement  ;  qu'il  y  a  eu  de 
sa  part  intention ,  prise  de  possession  et  fraude ,  que  con- 
séquemment,  il  y  a  vol  ; 

j»  Considérant  qu'il  y  a  dans  la  cause  des  circonstances 
atténuantes  ; 

j»  Vu  les  dispositions  des  art.  401  et  463  et  51  C.  pén. , 
194  C.  Inst.  crim.  ; 

»  Le  Tribunal,  après  en  avoir  délibéré,  déclare  Brochard 
Anselme ,  coupable  de  vol  simple ,  en  conséquence  le  con- 
damne à  6  mois  d'emprisonnement ,  et  par  corps  aux 
dépens.  > 

Appel  par  Brochard. 

On  disait  dans  son  intérêt  :  Le  vol  ne  saurait  être  le 
fait  de  prendre  possession  d'un   objet    mobilier ,  qui  est 
livré  volontairement  par  le  propriétaire.  Où  serait  la  con- 
dition, contrectatio  fraudulosa  ?  de  n'est  pas  toutefois  que- 
la  remise  volontaire  repousse  tout  délit.  Evidemment  non. 
Ainsi  dans  l'escroijuerie ,  dans  l'abus  de  confiance ,  la  re- 
mise a  été  volontaire ,  mais  ces  délits  sont  complètement 
distincts  du  vol. — Voler  c'est  prendre,  ravir,    enlever, 
toutes  expressions  caractéristiques,   qui  emportent  avec 
elles,  ridée  d'un  fait  contraire  a  la  volonté  du  propriétaire 
de  Tobjet.  En  fait ,  le  propriétaire  a  lui-même  préparé 
l'objet  au  lieu  où  il  voulait  qu'on  l'enlevât.  Nullum  furtum 
sine  cpntrectatione  rei  alienœ,  Morin ,  Dict.  Droit  crim,  au 
mot  vol.,  2e  vol.  p.  842.  S'exprime  ainsi  «  N*»  7.  La  sous- 
j»  traction  a  dit  la  Cour  de  cassation,  est  plus  qu'une  main 
»  misesur l'objet.  (21  septemb.  1813  et 22 mai  181 8).  C'est 
»  le  fait  d'appréhender  la  chose  d'autrui  contre  son  gré, 
»  (Cass.  20  novemb.  1835,  J.  cr.  art.  1686)  de  la  faire 
j»  passer    ainsi  de  la  possession   du  légitime  détenteur 
»  dans  celle  de  l'auteur  du  délit,  et  conséquemment  de  la 
3>  prendre,  enlever,  ravir.  »  Chauveau  et  Faustin  Hélie, 
s'expriment  à  peu  près  dans  les  mêmes  termes.  Théorie 


(400) 

du  G*fi»h* ,  châp*  LIX  §  Sousti'action .  —  Le  premier  élé- 
ment et  le  caractère  dislinctif  du  vol,  est  la  soustraction 
amotio  de  loco  ad  tocum,  à  l'insu  et  contre  le  gré  du  légi- 
time détenteur.  Cette  circonstance  ne  peut  être  remplacée 
par  aucune  autre  équivalente.  Si  l'agent  a  reçu  du  déten- 
teur lui-même  à  quelque  titre  que  ce  soit ,  l'objet  qu'il 
â  dissipé,  il  commet  un  abus  de  confiance  ;  s'il  a  détourné 
la  chose  qui  lui  avait  été  coaiiée,  il  se  rend  coupable  d'une 
violation  de  dépôt  ;  s'il  s'est  fait  remettre  des  valeurs  quel- 
conques par  ses  manœuvres ,  il  commet  une  escroquerie. 
Dans  tous  ces  cas  la  fraude  est  la  même ,  le  mode  d* exécu- 
tion de  la  spoliation  diflëre  seul ,  c'est  donc  ce  mode  qui 
imprime  au  délit  sa  qmtifiGatiùn. 

On  objectera  :  Si  un  propriétaire  dépeçait  dao^  son  en- 
clos un  objet  comme  appât,  afin  d'attirer  et  de  prendre  un 
individu  qu'il  soupçonne  de  vol,  ce  dépôt  volontaire  n'em- 
pêcherait pas  le  Vol.. — Sans  doute,  car  du  côté  du  voleur, 
faction  reste  entière  ;  tuais  dans  Tespèce  ,  Brcchard  ne 

f)rend  pas ,  il  reçoit  des  mains  d'un  complice  autorisé  à 
ui  remettre.  Il  ne  déplace  pas  lui-même  et  quelque  blâ- 
mable qu'il  soit,  il  profile  de  la  situation  exceptionnelle 
qu'on  lui  a  faite.  C'est  une  mauvaise  aetion  qui  comme 
bien  d'autres  ^  échappé  à  la  qualification  légale. 
On  citait  pltrsieurs  arrêts  de  cassation. 
La  Cour  a  prononcé  la  confirmation  du  jugement. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  -^  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges , 
déclare  Anselme-Joseph  Brochard  ^  coupable  d'avoir ,  le  45 
février  4860,  à  Pdrenvîïlè,  soustrait  frauduletisémetit  au 
préjudice  de  Pierre- Joseph  Moreau,  fabricant  d'huile,  une 
certaine  quantité  de  ce  produit,  ce  qui  constitue  le  délit 
prévu  par  l'art.  401  G*  pép..; 

Confirme  te  jugenâent  dont  est  appel,  dit  qu'il  sortira  son 
plein  et  enUer  effet  ; 

Condamne  Brochard ,  Anselme- Joseph ,  aux  frais  de  la 
cause  d'appel. 

Du  30  avril  4860.  Ch.  correct.  Présid. ,  M  Duœon  ; 
ministv  pubL  ^  M»  Carpentier ,  avoc*-gçTi.  ;  rapp. ,  M.  Ca- 
hier^ co&seill.  ;  avoc.  ^  M^  £mile  Flamant. 


(  401  ) 

1»  COMMUNE.  —  BIENS  COMMUNAUX.  —  PARTIAUX.  — 
POSSESSION  SEIGNEURIALE.  —  LOIS  DE  1792  ET  1793. — 
POSSESSION  COMMUNALE.  —  PASSAGE  ET  PACAGE." — REVEN- 
DICATION. —  DISPENSE.  —  ATTRIBUTIONS  DE  COMMUNAUX 
A  l'état. 

2^  PRESCRIPTION.  —  TERRAIN  COMMUNAL.  —  MAIRE  DE 
COMMUNE  EN  POSSESSION. 

1»  Les  terrains  connus  en  Hainaut  som  le  nom  de  Partiaux. 
étaient  communaux  de  leur  nature. 

Les  communes  qui ,  antérieurement  à  la  loi  du  28  août 
il 92,  usaient  librement  sur  ces  terrains^  comme  sur  terre 
vaine  et  vague ,  du  passage  et  du  pacage,  avaient  une 
possession  suffisante  pour  être  dispensées  de  les  revendis 
quer  dans  les  cinq  ans  de  la  promulgation  de  cette  loi. 

Il  n'importe  que,  dans  ce  cas,  le  seigneur  y  eût  extrait  des 
terres  à  briques,  y  eût  fait  des  dépôts  de  bois  et  de  fumiers, 
qu'il  y  eût  même  construit  une  grange  en  bois  reposant 
sur  assises  en  pierres ,  ni  qu'il  y  eût  élevé  un  carrin 
pour  y  remiser  ses  charriots  et  déposer  ses  instruments 
aratoires;  alors  ,  surtout ,  que  ces  construj(^9ns  rurales 
ne  s'étendaient  que  sur  une  faible  partie  du  terrain. 

Tous  ces  actes  de  possession  seigneuriale  ne  pouvaient 
fonder  la  possession  eooclusive,  ni  tenir  lieu  du  titre  au- 
thentique exigé  du  seigneur ,  pour  la  preuve  de  son 
droit  de  propriété  à  rencontre  du  droit  attribué  à  la 
commune,  (L.  28  août  1792  art.  9  ,  et  10  juin  1793 
sect.  4-.  art.  1).    (1). 

(1)  D'après  l'arrêt  que  nous  recueillons,les  Parftat/aî  doivent  être  com- 
pris parmi  les  Communaux  énumérativement  mentionnés  dans  les  art. 
9  de  la  loi  du  28  août  1792  et  1er,  sect.  4  de  la  loi  du  10  juin  1793. 
Le  caractère  principal  attaché  à  ces  terrains  est  d'être  des  communs 
improductifs.  V.  Répert.  Pal.  V»  Terres  vaines  et  vagues,  [no»  3i,  suiv. 
et  suppl.) ,  et  Commune  (nos  759  et  suiv). 

Sur  ce  caractère,  l'appréciation  du  juge  du  fond  est  d'ailleurs  souve- 
raine. V.notam.  Cass,  U  mai  1850  (J.  Pal.  t.  2.  1850,  p.  319),  et 
3  février  1857,  id.  (1857  p.  636). 

Les  Partiaux,  suivant  l'art.  9  delà  loi  du  28  août  1792,  étaient  donc 
censés  appartemr  aux  communes  et  devaient  leur  être  adjugés  par  les 
Tribunaux,  à  la  condition  de  la  revendication  dans  les  cinq  ans  de  la 
promulgation  de  la  loi ,  dans  le  cas  où  elles  ne  pourraient  pas  justifier 
avoir  éàé  (tnciennemtnt  en  possession, 

La  présomption  légale  de  propriété  établie  en  faveur  des  communes, 
ne  pouvait  céder.Cfitm  titre  authentique  du  Seigneur ,  (art.  8 ,  sect.  4 
de  la  loi  du  IQ  juin  1793).  L'adjudication  dont  parle  le  législateur  de 
1792,  n'était  qu'une  réintégration  dans  la  propriété ,  comme  dans  la 

TOME  XVIII.  26 


(  402  ) 

Les  dispositions  légales  qui  ont  réuni  au  domaine  de  VÉial 
les  biens  communaux  possédés  par  des  bénéficieTS  eccU- 
sia^tiques  ou  des  monastères ,  n*ont  en  aucune  façon  affec- 
té le  droit  des  communes  ,  résultant,  suivant  les  lois  de 
d792  et  i793,  de  leur  possession  des  terres  vaines  et 
vagues  au  moment  de  la  publication  de  ces  lois.  (L.  10 
juin  1793  art.  42).  (i). 

2o  La  prescription  du  domaine  communal  ne  peut  courir 
au  profit  du  maire  de  la  commune. 

Çossession ,  si  celle-ci  n'existait  pas  à  Theure  de  la  promulgation  de  la 
oi. 

Aussi  les  communes  n'aTaient-elles  pas  à  s'inquiéter  du  délai  de 
cinq  ans  accordé  pour  la  revendication,  si  elles  avaient  alors  la  posses- 
sion. Elles  pourraient  toujours  s'en  prévaloir  dans  le  cas  où  elles  vien- 
draient à  la  perdre. 

Mais  quelle  devait  être  le  caractère  de  cette  possession  actuelle  qui 
garantissait  leurs  droits  sur  les  terres  vaines  et  vagues  ,  landes ,  etc  ? 
Les  actes  qui  la  constituaient  pouvaitmt  consister  dans  des  servitudes 
communes,  comme  la  vaine  pâture,  le  pacage,  le  passage,  etc.  En  effet, 
toute  autre  possession ,  comme  là  détention  à  titre  singulier ,  ou  l'ex- 
ploitation ,  i^lpae  commune ,  leur  aurait  justement  fait  perdre  leur  ca- 
ractère de  communs  improductifs, 

La  possession  existant  donc  ainsi  par  la  simple  servitude,  ne  pouvait- 
être  combattue  par  aucune  autre  possession ,  du  moins  seigneuriale , 
fût-elle  celle  de  40  ans ,  eût-elle  même  les  caractères  déterminés  par 
l'art.  9  de  la  loi  du  13  avril  1791  (art.  8  de  la  loi  du  10  jui»  1793). 
C'est  cette  possession  même  du  Seigneur  que  la  loi  révolutionnaire  a 
considérée  comme  une  usurpation. 

En  effet,  sous  l'assemblée  constituante ,  la  révolution  ne  classa  pas 
dans  la  propriété  communale  les  terres  vaines  et  vagues ,  les  landes , 
etc  ;  elle  respecta  la  possession  que  le  Seigneur  en  avait  prise  autrefois, 
publiquement  et  suivant  la  coutume  (Décr.  11  déc.  1789  ;  15  mars  1790  ; 
3  mai  1790  et  13  avril  1791).  Mais  la  Révolution,  sous  la  Législative  et 
la  Convention  a  été  plus  loin  ;  elle  a  investi  la  commune  du  droit  de 
propriété  de  toutes  les  terres  vaines  et  vagues,  en  dépit  de  toute  posses- 
sion seigneuriale,  qui  ne  serait  pas  fondée  sur  un  titre  authentique  d'ac- 
quisition. C'est  ce  que  fait  justement  ressortir  l'arrêt  de  la  Cour  que 
nous  rapportons  aujourd'hui. 

(1)  L'article  12  de  la  loi  du  10  juin  1793  ,  avait  distingué  entre  les 
biens  communaux ,  considérés  comme  ayant  été  usurpés  par  l'abus  de 
de  la  puissance  féodale,  et  la  partie  de  ces  biens  ci-devant  possédés  par 
les  bénéficiers  ecclésiastiques  ,  les  monastères ,  communautés  sécu- 
lières et  régulières ,  ordre  de  Malte  et  autres  c^rps  et  communautés , 
soit  par  les  émipés,  soit  par  le  domaine,  à  quelque  titre  que  te  soit,  et 
cet  article  décidait  que  tous  ces  derniers  appartiendraient  à  la  nation. 

Ou  cette  disposition  était  une  exception  a  la  régie  générale  posée  dans 
les  art.  1er  etSdelamême  loi  (V.  Cass.  1er  iuin  4824.  S.  V.  32.  1. 
312  ou  C.  N.  à  sa  date),  ou  elle  était  inexplicable.  Nous  pensons  d'ail- 
leurs qu'elle  ne  pouvait  s'appliquer  aux  terres  vaines  et  vagues  ei-devant 


(403) 

(Manesse  et  consorts  C.  Commune  de  Bermeries). 

En  1784,  Tabbaye  de  Cambron  donna  à  bail  à  Thomas 
Manesse,  pour  1088  livres  haynaut  de  douze  sols  et  demi , 
la  grande  "Censé  de  Bermenies.  La  propriété  se  composait 
d'une  ferme  et  de  terres,  près,   pâturages  et  terrages  — 

possédées  par  ceux  qui  comme  dans  la  cause  étaient  les  Seigueurs  de  la 
commune,  en  même  temps  que  bénéticiers  ecclésiastiques. 

Quoiqu'il  en  soit,  deux  décrets  de  la  Convention  sont  venus  interpré> 
ter  cette  disposition  restée  obscure. 

Par  le  premier  (8-13  août  1793).  c  La  Convention  nationale  déclare 
9  que  l'article  12  de  la  section  4  du  décret  du  10  juin ,  sur  le  mode  de 
»  partage  des  biens  commnnaux,  ne  porte  aucune  atteinte  aux  droits 

>  qui  résultent  aux  communes  des  dispositions  des  décrets  des  25  et  28 
j»  août  1792,  relatifs  aux  droits  féodaux  et  au  rétablissement  des  com- 

>  muDes  dans  les  propriétés  et  droits  dont  elles  ont  été  dépouillées  par 
-%  la  puissance  féodale.  »  Or ,  la  loi  du  28  août  sur  les  terres  vaines  et 
vagues ,  ne  faisait  pas  la  distinction  introduite  par  la  loi  du  10  juin 
1793.  On  pouvait  donc  en  conclure  qu'elle  était  inapplicable  à  ces  sortes 
de  terrains.  Mais  Finterprétation  n'ayant  pas  encore  paru  assez  nette , 
de  nouvelles  réclamations  s'étant  élevées  ,  il  a  été  déclaré  par  un  deu- 
xième décret  de  la  Convention  (27  pluviôse,  an  2)  que ,  vu  l'interpréta- 
tion déjà  donnée ,  il  n'y  avait  pas  lieu  à  délibérer. 

Un  arrêt  de  la  Cour  de  Douai  du  31  décombre  1831,  rapporté  dans  le 
receuil  de  Sirey-Devilleneuve  ,  collect.  nouv.  à  sa  date  et  qui  trouve 
naturellement  sa  place  aujourd'hui  dans  notre  receuil ,  a  décidé  cjue  les 
décrets  interprétatifs  avaient  restitué  les  communes  dans  les  droits  que 
leur  avait  enlevés  l'art.  12  de  la  loi  du  10  juin.  Le  même  arrêt  déci- 
de qHe  la  possession  déterminée  par  l'art  13  du  décret  du  13  avril 
1791  ,  peut  être  opposée  aux  communes  parles  bénéficiers ecclésiasti- 
ques (voyez  la  note  qui  précède). 
Voici  le  texte  de  cette  décision. 

(Lagonde  C.  Commvne  de  Somain). 
ARRÊT. 
LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  touche  le  moyen  tiré  par  l'appelant  de  l'art. 
12  de  la  section  4  du  décret  du  11  juin  1793. 

Attendu  que  tous  les  avantages  que  cette  disposition  avait  enlevés  aux 
communes  en  faveur  du  domaine  public  ,  leur  ont  été  restitués  par  la 
loi  du  8  août  1793,  et  que  les  termes  de  cette  dernière  loi,  aussi  bien 
que  l'interprétation  qu'elle  a  reçue  par  un  décret  de  la  Convention  na- 
tionale en  date  du  2/  pluviôse,  an  2,  établissent  que  cette  restitution  a 
eu  lieu  contre  le  domaine  public ,  soit  pour  des  droits  résultant  de  ci- 
devant  Seigneurs,  par  lui  possédés ,  soit  pour  des  droits  qu'avaient 
possédés  des  émigrés ,  des  bénéficiers  ou  des  corporations  abolies. 
£n  ce  qui  touche  la  preuve  offerte  substdiairement  par  l'appelant  : 
Vu  les  articles  8  et  9  de  la  toi  du  28  août,  14  septembre  1792  ;  1» 
et  8,  section  4  du  décret  du  10  juin  1763  et  9  de  la  loi  du   13-28  avril 

1791. 

Attendu  en  droit  qu'il  résulte  de  ces  dispositions ,  lo  que  le  législa- 
teur a  établi ,  quant  aux  biens  vagues  et  vacants ,  une  présomption  de 
propriété,  en  faveur  des  communes,  il  ne  les  a  autorisées  à  revendiquer 


(  404  ) 

268  huiitelées,  mesure  du  pays.— On  ne  donnait  les  terres 
ni  à  la  mesure,  ni  à  la  corde.  La  Censé  était  renseignée  au 
contrat  comme  contenant  «  1<^  une  maison  ,  chambre  , 
»  grange ,  écuries ,  bergerie  et  jardin  de  deux  huittelées 
»  (le /îim  passant  parmi)  tenant  au  chemin  du  Quesnoyà 
j  ■-■II. 

les  terrains  non  vacants,  à  l'époque  de  1789,  qu'à  la  charge  de  justifier 
qu'elles  les  avaient  anciennement  possédés  et  qu'elles  en  avaient  été  dé- 
pouillés par  abus  de  la  puissance  féodale,  et  2»  que  ces  terrains  oui , 
avant  Tôpoquedu  4  août  1789,  ont  été  clos  de  haies  ou  de  fossés,  plan- 
tés ou  mis  à  profit  de  toute  autre  manière,  pourvu  qu'ils  l'aient  été,  a 
titre  de  propriété,  ne  sauraient  être  rangés  aans  la  classe  des  biens  va- 
cants ; 

Attendu  en  fait ,  c^ue  pour  écarter  la  présomption  de  propriété  que 
la  commune  de  Somain  veut  tirer  de  l'état  du  terrain  litigieux  à  l'époque 
de  sa  prise  de  possession,  il  est  mis  en  fait  par  l'appelant,  que  dés  avant 
la  révolution,  le  prieuré  de  Beaurepaire  avait  fait  acte  de  possession,  à 
titre  de  propriétaire  de  ce  terrain,  en  y  plantant  des  arbres,  en  le  faisant 
entourer  de  fossés  et  en  fermant  ses  issues  par  des  bornes  garnies  de 
chaînes  ; 

Qu'il  suffit  que  ledit  terrain  ait  été  mis  en  cet  état  avant  le  à  août 
1789,  pour  Qu'aux  termes  de  l'article  8  de  la  loi  du  13-28  avril  1791 ,  le 
prieuré  de  beaurepaire  ou  le  domaine  qui  a  succédé  à  ses  droits  en  ait 
été  réputé  propriétaire  ; 

Que  dès  lors  les  faits  articulés  étaient  pertinents,  et  que  les  premiers 
juges  en  ont  mal  à  propos  refusé  la  preuve  ; 
Par  ces  motifs  : 

La  Cour ,  émendaut  le  jugement  dont  est  appel  admet ,  avant  faire 
droit,  l'appelant  à  prouver  tant  par  titres  que  par  témoins  que,  dès  avant 
la  révolution  et  notamment  à  l'époque  des  lois  des  28  août  1792  et  10 
juin  1793,  les  deux  pièces  de  gazon  litigieuses  étaient  possédées  à  titre 
de  propriété  par  le  prieuré  de  Beaurepaire  ;  qu'elles  étaient  closes  de 
fossés  et  aux  issuos  de  bornes  avec  chaînes ,  que  ces  terrains  étaient 
plantés  d'arbres ,  qui  étaient  ébranchés  par  le  prieuré  de  Beaurepaire , 
et  qui ,  arrivés  à  leur  maturité,  étaient  abattus  et  vendus  au  profit  dudit 
prieuré  qui  les  remplaçait,  que  le^prieuré  jouissait  seul  de  ces  terrains 
pour  la  paiisson  de  ses  bestiaux ,  l'intimé  entier  en  preuve  contraire , 
etc. 

Du  21  décembre  1831.  l^e  chamb.  civ.  Présid.  M.  Deforest  de  Quart- 
deville,  Iw  Prés.  ;  ioainist.  publ. ,  M.  Lambert ,  !«'  avoc*-gén.  ;  avec. , 
Mes  Dumont  et  Roty  ;  avou. ,  M«s  Guilmot  et  Pla. 

Sur  les  difficultés  que  peut  encore  faire  naître  l'article  12  du  décret 
du  10  juin,  v.  Cass.  21  février  1844.  J.  Pal.  t.  2  1844 ,  pag.  46  et  idem 
21  mars  1838,  J.  Pal, t.  1  1838  p.  384  ;  Amiens  21  juin  1838,  J.  Pal. 
t.  2.  1839  p.  306  ;  Cass.  2  décemb.  1833 ,  J.  Pal.  3^  édition  à  sa  date 
et  autres  encore  indiqués  Répert.  Pal.  v»  Terres  vaines  et  vagues,  n<» 
89  et  suivants. 

Gonsult.  pour  la  Jurisprudence  de  la  Cour  de  Douai  pour  les  questions 
diverses  qui  se  rattachent  à  celles  que  nous  venons  de  rappeler.  Douai 
1er  juillet  1840  (Màn.  4.  p.  24^)  ;  3  févr.  1840  (Man.  4. 183)  ;  3  juillet 
1840  (Man.  4. 216)  et  autres  arrêts  indiqués  à  notre  Tabl.  générale ,  V» 
Omtmym'  §  4  n^)  26  et  suivants. 


(  405  ) 

9  Mons  et  d'autres  côtés  aux  terres  et  pâtures  d'icelle 
»  abbaye.  2o....  (suivent  les  terres),  »  L'immeuble  repris 
sous  le  n®  2 ,  appelé  te  pâture  à  la  porte ,  était  indiqué 
comme  tenantau  chemin  du  Quesnoy  à  Mons,  ainsi  qu'une 
terre  désignée  sous  le  n<^  14?. 

Et  près  des  bâtiments  de  la  ferme  existait  un  terrain 
apfielé  le  Partiau ,  entouré  par  trois  chemins  dont  l'un 
était  celui  du  Quesnoy  à  Mons.  Sur  ce  terrain,  dés  1777 
avait  été  bâtie  une  grange  en  bois,  avec  fondations  en  grés, 
on  y  avait  construit  un  carrin,  on  y  avait  extrait  des  briques, 
le  tout  pour  la  Censé  de  l'abbaye  dont  on  remisait  là  les 
instruments  aratoires.  Mais  il  ne  se  trouvait  pas  désigné  au 
bail  de  la  Censé.  En  était  -  il  une  dépendance  ? 

En  Tan  4  de  la  République,  en  vertu  des  lois  de  i  792 
et  1793,  les  terres  des  moines  de  Gambron  furent  vendues 
comme  propriétés  nationales.  Le  fermier  Thomas  Manesse 
en  devint  adjudicataire  moyennant  3093  livres  16  sols. 
Elles  étaient  vendues  sur  désignations  identiques  à 
celles  du  bail.  Le  Partiau  n'y  figurait  pas  davantage  et  on 
y  déclarait  que  les  biens  étaient  vendus  tels  qu'en  avaient 
joui  ou  du  jouir  les  précédents  fermiers  ou  ceux  dont  ils 
provenaient. 

Thomas  Manesse,  acquéreur,  était  maire  de  la  commune 
de  Bermeries  dès  l'an  7,  il  avait  été  continué  dans  ses  fonc- 
tions jusqu'en  1812,  et  son  fils  Martial  Manesse  lui  avait 
succédé  en  cette  qualité  jusqu'en  1844. 

En  1806,  il  avait  été  procédé  aux  opérations  du  cadas- 
tre sur  la  commune  de  Bermeries  et,  sur  la  matrice  de  rôle, 
ûiait  portée,  au  nom  de  M.  Manesse  Thomas,  une  partie  de 
terre  appelée  le  Partiau,  sous  la  dénomination  de  \^  Landes, 
21  ares  44  centiares  ;  2®  sol  d'un  bâtiment,  un  are  12  cen- 
tiares, ensemble  22  ares  56  centiares. 

Sur  le  Partiau,  Manesse  avait  fait  planter  des  arbres. 

En  1830,  nouvelles  opérations  cadastrales.  Le  Partiau 
est  porté  au  nom  de  Manesse  sous  le  titre  de  terrain  planté 
à  lui  appartenant  et  d'une  contenance  de  65  ares  50  cen- 
tiares, avec  bâtiments  ruraux  delrois  ares  70  centiares. 

En  1837 ,  vente  par  les  héritiers  Manesse  à  leur  cohé- 
ritier Martial  Manesse  et  à  la  dame  Fauville  sa  femme  de  i^ 
la  ferme  de  Gambron  et  dépendances  ,  d'une  contenance 
de  65  ares  40  centiares,  tenant  au  chemin  de  Bavay  au 
Quesnoy  à  Gravis,  à  Thomas  Manesse  et  au  Partiau;  2^  un 
terrain  planté  d'arbres  dit  et    appelé   le    Partiau ,   aveo 


(406) 

gi'ange  et  remises ,  de  la  contenance  de  69  ares  20  cen- 
tiares. 

En  1 842  ,  Martial  Manesse  fait  abattre  les  arbres  qui  se 
trouvaient  sur  le  Partiau ,  après  les  avoir  vendus  devant 
notaire  pour  le  prix  de  2801  fr. 

Même  année,  Manesse  supprime  le  chemin  qui  longe  le 
Partiau  y  àTouest,  en  se  dirigeant  vers  le  nord  ;  il  englobe 
ce  chemin  dans  le  Partiau  et  entoure  le  tout  d'une  clôture 
continue  en  haie  vive. 

En  1857  ,  la  commune  de  Bermeries  prétendit  avoir  la 
propriété  du  Partiau  ;  Martial  Manesse  étant  décédé,  elle  fit 
assigner  sa  veuve  et  sa  fille  Lydie  Manesse,  pour  leur  deman- 
der la  restitution  de  cette  propriété  qu'elle  disait  d'abord 
consister  en  46  ares  64  centiares,  mais  auxquels  elle  ajouta 
ensuite  22  ares  56  centiares.  La  commune  s'appuyait  sur 
ce  que  Thomas  Manesse  n'avait  jamais  été  acquéreur  du 
Partiau,  que  cette  terre ,  toujours  laissée  vaine  et  vague 
n'avait  pas  cessé  d'être  communale,  malgré  les  usurpations 
qu'en  avait  pu  faire  la  famille  Manesse.  Après  communica- 
tion des  titres,  la  commune  demanda  encore  la  restitution 
des  fruits  perçus  sur  le  Partiau. 

Les  héritiers  de  Thomas  Manesse  intei-vinrent  dans  l'ac- 
tion et  un  jugement  du  Tribunal  civil  d'Avesnes  admit  la 
commune  à  prouver  que  le  Partiau  était  une  propriété 
communale  comme  excédant  de  chemin  public,  dit  de  S'. 
Wast  ou  de  Mons,  allant  de  commune  à  commune,  que  le 
Partiau  était  un  terrain  vague  ;  qu'il  était  resté  en  cet  état 
depuis  comme  avant  l'acquisition  faite  par  Thomas  Manesse, 
ju^u'en  1842,  époque  à  laquelle  le  chemin  avait  été  sup- 

1)rimé  par  Martial  Manesse  ;  que  tout  le  monde  fréquentait 
e  Partiau  avant  cette  époque  ;  que  tous  les  bestiaux  de  la 
commune  y  paissaient  liorement  ;  que  la  commune  de  Ber- 
meries était  ainsi  en  possession  de  ce  terrain  de  temps  im- 
mémorial et  notamment  à  l'époque  de  la  promulgation  des 
lois  des  28  août  1792  et  10  juin  1793. 

Après  enquête  sur  ces  faits  ,  les  héritiers  Manesse  sou- 
tinrent à  l'audience  du  .  Tribunal  civil  d'Avesnes ,  qu'en 
vertu  de  l'article  12  section  4  de  la  loi  du  10  juin  1793  , 
le  terrain  dit  le  Partiau  qui  avait  été  possédé  par  le  mo- 
nastère de  Cambron,  était  passé,  par  suite,  dans  le  domaine 
national,  d'où  il  suivait  que  l'adjudication  de  l'an  4  faite  au 
profit  de  Thomas  Manesse,  comprenait  nécessairement  ce 
même  terrain.  Ils  ajoutaient  que  depuis  l'acquisition  leur 


(  ^07) 

possession  avait  toujours  été  conforme  à  leur  titre  et  que 
la  prescription  leur  était  parfaitement  acquise. 
Le  Tribunal  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

JUGEMENT. 
«  Attendu  que  Martial  Manesse ,  l'auteur  commun  des 
défenderesses  au  principal  et  des  intervenants  au  procès,  en 
sa  qualité  prétendue  de  successeur  des  anciens  moines  de 
Gambron,  seî|[neurs  de  Bermeries ,  par  suite  de  la  vente 
domaniale  de  la  ferme  de  la  cidevant  abbaye  de  Gambron , 
au  profit  de  Thomas  Manesse,  son  père,  le  11  prairial  an  4, 
a  fait,  en  1842  ,  clore  de  haies  une  portion  de  terrain  dite 
le  Partiau,  jusqu'alors  restée  ouverte  ;  qu'il  a  de  plus  fait 
abattre  à  cette  époque  et  vendu  les  arbres  plantés  sur  ce 
terrain,  que  la  commune  demanderesse  revendique  comme 
sa  propriété,  en  vertu  des  lois  des  28  août  1792  et  10  juin 
1793; 

»  Attendu  qu'en  conséquence  de  l'abj^lition  de  la  féoda- 
lité ,  ces  lois  ont  déclaré  rendre  aux  communes  les  terres 
vaines  et  vagues  ,  c'est  à  dire  non  cultivées  et  affectées  à 
la  vaine  pâture,  sur  leur  territoire  ; 

»  Attendu  qu'elles  ne  créaient  en  cela  aucun  privilège 
révolutionnaire  au  profit  des  communes  ,  mais  ne  faisaient 
que  renouveler  plus  efficacement  les  dispositions  restées 
stériles  des  anciennes  ordonnances  contre  les  usurpateurs 
des  propriétés  communales  ; 

•  Attendu  que  cette  restitution  des  terres  vaines  et 
vagues  aux  communes  n'a  point  été  restreinte  par  l'arti- 
cle 12,  section  4  de  laloi  du  10  juin  1793  ; 
.  »  Attendu  que  l'esprit  de  cette  loi  et  sa  volonté  si  abso- 
lue de  rendre  aux  communes  ce  qui  leur  appartenait,  résis- 
tent à  la  supposition  que  la  loi  ait  pu,  par  son  article  12, 
réserver  à  l'Etat  le  profit  des  injustices  qu'elle  venait  de 
proscrire  entièrement  par  ses  autres  dispositions  ; 

»  Que  cet  article  12  expliqué  par  les  décrets  des  8  août 
1793  et  27  pluviôse  an  2,  ne  peut  raisonnablement  s'ap- 
pliquer qu'aux  biens  possédés  par  les  anciens  seigneurs, 
bénéfîciers  et  communautés,  à  titre  de  propriété  ,  voire 
même  à  titre  de  féodalité,  mais  régulièrement    et  non  par 


(  A08) 

un  abus  du  droit  féodal  ,  par  suite  d'usurpation  prouvée 
ou  légalement  présumée  sur  les  communes  ; 

:»  Qu'à  regard  des  terres  vaines  et  vagues,  il  y  a  présom- 
tion  légale  d'usurpation  résultant  des  lois  mêmes  de  4792 
et  1793,  qui  considèrent  ces  terres  comme  propriété  com- 
munale de  droit  et  par  leur  nature  ,  qu'il  en  doit  être 
surtout  ainsi  d*une  place  vide  et  vague ,  située  comme  le 
Partiau,  entourée  de  chemins  avant  4842  et  ouverte  au 
public  ; 

j  Attendu  qu'il  est  de  jurisprudence  administrative  en 
cette  matière,  que  l'Etat  n'ayant  pu  aliéner  que  ce  qui  lui 
appartenait,  si  c'était  à  titre  d'abus  féodal  et  non  à  titre  de 
propriété  que  les  anciens  seigneurs  jouissaient  de  la  chose 
litigieuse,  il  y  a  lieu  de  déclarer  qu'elle  n'a  pas  étéahénée, 
(Voir  notam.  ordonn.  5  mai  4830.  AfT.  Voyer  d'Argensôn 
et  Cormenin,  quest.  \^  Domaines  nationaux). 

»  Que  ,  dans  l'espèce ,  la  non  alinéation  par  l'Etat  est 
d'autant  moins  douteuse  ,  que  la  désignation  de  la  chose 
vendue  le  44  prairial  an  4,  aussi  bien  que  l'expression  de 
la  contenance,  sont  exclusives  du  terrain  dit  le  Partiau 
pour  l'acquéreur  ; 

"»  Attendu  au  surplus  que  la  possession  manquerait  aux 
défenderesses  pour  pouvoir  même  s'appuyer  sur  la  lettre 
de  l'article  42  ; 

»  Attendu  en  effet  qu'avant  4789  comme  depuis ,  le 
Partiau  est  presque  toujours  resté  inculte  et  vague  pour 
la  possession,  chacun  en  usant  comme  d'un  terrain  neutre 
et  n'appartenant  à  personne ,  jure  proprio  ; 

»  Que  dans  le  cadastre  dressé  en  4806,  il  était  désigné 
encore  sous  la  dénomination  de  Lande  ,  que  si  les  abbés 
de  Cambron  ,  seigneurs  du  lieu,  ont,  sur  le  Partiau,  sans 
résistance  des  habitants  qui  n'avaient  guère  intérêt  à  s'y 
opposer  ,  quand  ils  l'eussent  pu  ,  construit  une  grange  et 
un  carrin,  pour  y  abriter  quelques  fourrages  et  instruments 
aratoires  de  la  ferme,  extrait  de  l'argile  et  fait  quelques 
dépôts  de  bois  ou  de  fumiers  ,  ils  se  regardaient  si  peu  , 
néanmoins,  comme  propriétaires  de  ce  terrain  qu'ils  s'abs- 
tenaient de  le  comprendre  dans  leur  domaine  affermé  en 


(  409  ) 

17849  avec  une  désignation  si  minutieuse  des  conlenances; 
et  que  d'autre  part,  ils  le  laissaient  ouvert  et  accessible  à 
tous  les  habitants  de  Bermeries  ,  qui  en  recueillaient  les 
maigres  produits  et  y  faisaient  paître  librement  leurs 
bestiaux  ; 

»  Attendu  que  ces  actes  de  possession  étaient  d'autant 
plus  significatifs,  alors  que  le  pouvoir  du  seigneur  de  les 
interdire  était  plus  absolu  ;  qu'il  en  était  du  reste  de  la 
possession  de  ce  terrain  comme  de  toutes  les  possessions 
de  biens  communaux  en  général ,  où  le  laisser  faire  et  la 
négligence  sont  depuis  longtemps  passés  en  proverbe  : 
Naturale  vitium  est  négligera  qtiod  commune  possidetur  , 
disait  la  loi  romaine  ;  qu'ainsi  s'expliqueraient  par  une  in- 
curie générale  ,  plutôt  que  par  un  abus  de  pouvoir  indivi- 
duel, des  excès  de  jouissance  trop  facile  dont  les  défen- 
deresses veulent  se  prévaloir  contre  leur  adversaire  ; 

»  Attendu  d'ailleurs  qu'en  1792  et  1793,  les  moines  de 
Bermeries  ayant  émigré  et  Manesse  les  ayant  suivis  dans 
l'émigration,  la  commune  s'est  trouvée  seule  ,  par  le  fait , 
en  possession  du  Partiau,  jusqu'à  l'époque  du  retour  de 
l'émigré  Manesse  ;  que  la  commune  n'avait  donc  pas  à  se 
faire  réintégrer  alors  dans  une  possession  qu'elle  n'avait 
pas  perdue  ,  ni ,  par  suite  ,  à  se  prémunir  contre  une  dé- 
chéance qui  lui  était  inapplicable  ; 

:»  Attendu  que  devenu  acquéreur  de  la  ferme  de  Cambron 
en  Tan  4  de  la  république ,  Thomas  Manesse  et  son  fils 
Martial ,  après  lui ,  ayant,  presque  sans  interruption  ,  été 
maires  de  Bermeries  ,  de  1799  à  1844,  leurs  actes  de 
possession  fussent -ils  caractérisés  assez  par  eux-mêmes, 
étaient  inefficaces  contre  la  commune,  pendant  qu'ils  l'ad- 
ministraient et  hors  de  là  insuffisants  par  leur  durée  poui* 
produire  la  prescription  ; 

Qu'au  surplus,  pendant  tout  ce  temps  là  même,  la  com- 
mune ,  par  ses  habitants  n'a  jamais  cessé  de  jouir  du 
terrain  litigieux  ou  du  moins  d'en  disputer  la  jouissance 
à  la  famille  Manesse  ;  qu'il  y  a  preuve  acquise  au  procès 
que  cette  commune  a  toujours ,  jusqu'en  1842,  possédé  le 
Partiau  autant  qu'elle  Va  pu  faire  et  que  le   permettait 


(410) 

la  nature  du  terrain  ,  qu'à  tous  les  poinis  de  vue  donc  , 
elle  doit  réussir  dans  la  contestation  ; 

»  Attendu  quant  aux  arbres  abattus  et  vendus  en  1842, 
qu'eussent-ils  été  plantés  par  Martial  Manesse  ou  son  auteur, 
corame  ils  sont  l'accessoire  du  sol  communal  qui  les 
portait  ,  ils  doivent  en  suivre  la  nature  et  la  condition  et 
être  restitués  ,  ou  leur  valeur,  par  les  défenderesses ,  à 
moins  qu'elles  ne  prouvent ,  ce  qu'elles  ne  font  pas  suffi- 
samment, en  avoir  acquis  la  prescription  comme  propriété 
distincte  du  sol  ; 

»  Le  Tribunal ,  statuant  en  matière  ordinaire  et  en 
premier  ressort  reçoit  les  parties  de  M«  Paul  intervenantes 
en  la  cause  et  leur  donne  acte  de  ce  qu'elles  se  reconnais- 
sent obligées  à  garantir  les  défenderesses  au  principal  de 
toutes  évictions,  dit  que  la  commune  de  Bermeries  est 
propriétaire  du  terrain  dit  le  Par/iaw,  inscrit  au  plan  cadas- 
tral no  28,  section  A,  d'une  contenance  totale  de  69  ares 
20  centiares  ;  condamne  les  défenderesses  à  en  abandonner 
les  propriété  et  possession  à  la  dite  commune,  et  à  lui 
restituer  les  fruits  recueillis  sur  ce  terrain  et  à  libeller  par 
état  ;  les  condamne  en  outre  à  remettre  à  la  commune  la 
valeur  des  arbres  abattus  en  1842  et  qui  auraient  été 
vendus  pour  le  prix  de  2801  fr.  sauf  remboursement  ou 
retenue  des  frais  de  plantation  dûment  justifiés  ,  et  sauf 
aussi  le  droit  des  défenderesses  à  être  garanties  et  indem- 
nisées de  toutes  ces  condamnations  par  les  intervenants 
qui  reconnaissent  leur  obligation  à  cet  égard  ,  le  tout  avec 
les  intérêts  judiciaires  et  condamne  iesdites  défenderesses 
aux  dépens,  etc.  » 

Appel  par  Manesse  et  consorts  ;  dans  leur  intérêt  on  dit 
devant  la  Cour  : 
La  commune    ne   produit  aucun  titre  justificatif  de  sa 

Propriété  ;  en  vain  veut-elle  trouver  ce  titre  dans  les  articles 
delà  loi  du 28  août  1792  et  1er  de  laloidu  10  juin  1793 , 
le  terrain  dont  s'agit  n'était  pas  vain  et  vague ,  soit  le  4 
août  1789  ,  soit  lors  de  la  publication  des  lois  de  1792  et 
1793  ;  il  résulte  en  effet  des  enquête  et  contre  enquête  que 
le  terrain  litigieux  était  alors  comme  aujourd'hui  une 
dépendance   de  la  ferme  de  Bermeries  ,  appartenant  aux 


(  A\i  ) 

moines  deCambron.  11  contenait  une  grange,  des  carrins 
et  des  hangars  dépendant  de  la  ferme,  le  tout  bâti  sur  fon- 
dations en  grés ,  servant  de  dépôts  pour  les  instruments 
aratoires,  les  récoltes,  les  engrais  ;  il  était  destiné  au  pâ- 
turage des  moutons  de  la  ferme  ;  il  contenait  l'abreuvoir 
pour  la  ferme  ,  enfin  on  s'en  était  servi ,  en  1 777 ,  pour 
extraire  une  quantité  considérable  de  briques  destinées  à 
l'élévation  d'une  grange  importante  de  la  ferme. 

Ce  terrain  ne  peut  donc  être  considéré  comme  étant 
alors  un  terrain  vam  et  vague.  D'ailleurs  en  le  supposant 
tel ,  il  ne  saurait  encore  appartenir  à  la  commune  de  Ber- 
meries  ,  puisque  la  dite  commune  n'a  pas  agi  en  revendi- 
cation, dans  le  délai  de  5  ans,  accordé  par  l'article  9  de  la 
loi  du  28  août  1792  ;  qu'elle  ne  prouve  pas  qu'elle 
était  en  possession  du  terrain,  à  l'époque  de  la  promulga- 
tion de  ladite  loi,  et  qu'elle  est  demeurée  depuis  dans  cette 
possession.  Les  enquête  et  contre  enquête  établissent 
d'ailleurs  le  contraire.  Il  résulte  en  effet  des  témoins  produits 
que  le  terrain  litigieux  avait  nature  de  propriété  privée 
dont  jouissait  le  fermier  des  moines  de  Cambron  avant  et 
après  1789. 

La  commune  de  Bermeries  ne  pourrait  revendiquer  ce 
terrain  aux  termes  de  l'article  8  de  la  loi  du  28  août  1792, 
qu'en  justifiant  qu'elle  a  anciennement  possédé  ledit  bien 
et  qu'elle  en  a  été  dépouillée  en  totalité  ou  en  partie  par 
les  anciens  seigneurs  ,  en  vertu  de  la  puissance  féodale. 
La  commune  n'a  pas  fait  et  ne  pouvait  pas  faire  cette 
preuve  ;  la  commune  ne  justifie  pas  d'une  possession  Iren- 
tenaire,  paisible,  publique, continue,  ammo Dommi , anté- 
rieurement à  la  possession  incontestable  des  appelants. 
A  tous  les  points  de  vue  l'action  en  revendication  de  la 
commune  est  donc  non  recevable  et  non  fondée. 

Non  seulement  la  commune  ne  trouve  ni  dans  les  litres 
écrits  ni  dans  la  loi,  ni  dans  la  possession, la  justification  de 
sa  propriété;  mais  tout  démontre  que  le  terrain  litigieux  est 
au  contraire  la  propriété  des  appelants. 

En  effet,  antérieurement  à  1789,  le  terrain  litigieux  était 
possédé  par  les  moines  de  Cambron  ou  par  leurs  fermiers, 
animo  domini.  Le  fermier  détenteur  de  toutes  les  terres 
de  l'abbaye  détenait  ledit  terrain  comme  une  dépendance 
de  la  ferme  deCambron.  A  l'époque  de  la  révolution,  ce 
teiTain  est  alors  passé  à  la  nation  comme  bien ,  ayantappar- 
tenu  à  l'abbaye.  Il  est  d'ailleurs  devenu  propriété  nationale 


(  412  ) 

aux  lennes  spéciaux  de  Tarlicle  12  de  la  loi  du  10  juin 
1793,  qui  porte  que  les  parties  de  communaux  possédées, 
ci-devantpar  des  bénéficiers  ecclésiastiques  soitpar des  mo- 
nastères ou  communautés ,  soit  par  des  émigrés ,  à  quelque 
titre  que  ce  soit  appartiennent  a  la  nation  ,  et  comme  tels 
ne  peuvent  apparteniraux  communes;  que  ces  communaux 
aient  été  déjà  vendus  ^ou  qu'ils  soient  encore  à  vendre  au 
profit  de  la  nation.  L'État  a  alors  vendu Ze  Pariiau  litigieux, 
aux  auteurs  des  appelants,  par  Tacte  du  11  prairial  an  4, 
qui  cède  la  ferme  et  les  terres  de  Berraeries  ,  consistant 
entre  autres  choses  ,  en  granges  ,  et  tenant  au  chemin  du 
Quesnoy  à  Mons  et  aux  terres  et  prairies  de  l'abbaye 
auxquelles  elles  n'eussent  pas  tenu  ,  si  le  Partiau  n'avait 
pas  été  vendu. 

Si  la  contenance,  indiquée  dans  l'acte  de  vente ,  en  an- 
ciennes mesures  ,  est  inférieure  à  la  contenance  réelle , 
cela  s'explique  parfaitement  dans  une  vente  nationale. 
D'ailleurs  l'Llat  a  vendu,  quelle  que  ce  soit  la  contenance, 
les  biens  tels  qu'en  avaient  joui  les  fermiers  ;  et  les  acqué- 
reurs étaient  subrogés  à  tous  les  droits  de  la  nation. 

D'ailleurs,  les  plans  cadastraux,  dressés  en  1806  et  en 
1811 ,  et  les  actes  de  jouissance  des  différents  auteurs  des 
appelants,  établissent  d'une  manière  certaine  que  le  Partiau 
en  litige  a  été  vendu  aux  auteurs  des  appelants,  qui  en 
ont  joui  comme,  propriétaires,  en  exécution  des  actes  de 
vente  du  11  prairial  an  4. 

Enfin,  en  supposant  ce  terrain  communal  par  l'effet  des 
lois  de  1792  et  1793,  les  appelants  en  auraient  acquis  la 
propriété  par  prescription  : 

D'une  part,  ils  ontla  possession  de  10  ans,  avec  titres 
et  bonne  foi  ;  d'autre  part ,  il  résulte  des  enquête  et 
contre  enquête  que,  depuis  1789  ,  et  par  conséquent 
depuis  plus  de  30  ans  ,  sans  avoir  un  seul  jour  quitté  la 
ferme,  sans  avoir  émigré,  ainsi  que  le  porte  à  tort  la  sen- 
tence frappée  d'appel ,  les  appelants  ont  par  eux  ou  par 
leurs  auteurs  possédé  anima  domini,  avec  toutes  les  con- 
ditions exigées  par  la  loi  pour  prescrire,  le  Partiau  en  li- 
tige en  y  entretenant  la  grange  et  les  carrim ,  les  démolis- 
sant ,  y  plantant  des  arbres  ,  les  émondant ,  y  faisant  des 
dépôts,  y  creusant  des  fossés,  l'entourant  complètement  de 
haies  ,  le  cultivant. 

La  qualité  de  rnaire  de  Bermeries  qu'ont  eue  quelques 
uns  des  auteurs  des  appelants  n'a  pu  empêcher  la  près- 


(  413  ) 

criplion  de  s'accomplir,  surtout  à  raison  de  ce  que,  de  1824 
à  1837  ,  M,  Martial  Manesse  ,  maire  de  Bermeries,  n'était 
propriétaire  que  d'un  neuvième  indivis  du  terrain 
aujourd'hui  revendiqué. 

La  qualité  de  maire  n'est  pas  en  effet  un  motif  légal  d'in- 
terruption ou  de  suspension  de  prescription  commencée  ; 
la  prescription    est  d'ailleurs  encore  acquise  en  supposant 

3 u' elle  ait  été  suspendue ,  pendant  répoq[ue  où  les  auteurs 
es  appelants  étaient  magistrats  municipaux  ,  soit  au 
point  de  vue  de  la  prescription  de  10  ans ,  soit  au  point  de 
vue  de  la  prescription  trentenaire. 

D'ailleurs,  en  supposant  même  le  Pariiau  terrain  com- 
munal ,  les  plantations  faites  par  les  appelants  et  enlevées 
sans  dol  ni  fraude,  après  adjudicationpublique,  ne  sauraient 
soit  aux  termes  de  la  loi  de  1811,  soit  aux  termes  de  l'art. 
553,  C.  Nap.  donner  lieu  à  la  réclamation  par  la  commune 
du  prix  de  la  vente  desdits  arbres  ,  plantés  par  Thomas 
Manesse  ,  de  ses  deniers  ,  quand  il  n'était  plus  maire  ,  et 
vendus  depuis  par  ses  héritiers. 

La  commune  ne  justifie  pas  d'ailleurs  du  cliiffre  de  2801 
fr.  qu'avait  produits  la  vente,  et  elle  n'établit  p^s  que  tous 
les  arbres  vendus  proviennent  du  Pariiau, 

La  Cour,  après  partage^  a  rendu  l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT  (après  partage). 

LA  COUR; — Attendu  que  le  terme  Partiau  employé 
pour  désigner  la  propriété  en  litige  implique  tant  par  son 
étymologie  que  par  sa  signification  l'idée  d'un  terrain 
coinmun  ,  que  ce  mot  Partiau  ,  dérive  du  hiin  pars ,  cor- 
respond à  l'expression  de  basse  latinité  partialis  et  suppose 
un  droitde  conjouissance  au  profit  de  la  communauté  des 
habitants  ; 

Attendu  que  c'est  aussi  dans  ce  sens  que  lé  mot  Pariiau 
est  employé  dans  le  pays  ,  ainsi  qu'il  résulte  des  attesta- 
tions des  maires  et  conseillers  municipaux  des  communes 
environnantes  et  que  s'en  servèntdes  témoins  de  l'enquête^ 
notamment  le  premier  témoin  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  enquêtes  que  le  Partiau ,  en 
forme  de  triangle  ,  était  ceint  de  trois  chemins  ,  l'un  la 
route  du  Quesnoy  à  Bavay  ,  l'autre  à  l'ouest,  se  bifurquant 
avec  cette  route  et  se  dirigeant  vers  la  fontaine  du  Mai , 


(  AU  ) 

le  Iroisièmé  longeant  les  bâtiments  delà  ferme  de  Cambron 
et  menant  à  sa  porte  d'entrée  ; 

Attendu  qu'en  1792  et  1793  ,  ce  terrain  était  ouvert  à 
tous,  sans  contradiction  aucune  ,  soit  pour  le  parcours 
soit  pour  le  pacage,  que  ce  fait  est  établi  par  les  enquêtes  ; 
Attendu  qu'il  était  encore  désigné  sous  la  qualification 
de  Lande  pour  la  contenance  de  21  ares  que  s'attribuait 
alors  comme  propriétaire  Thomas  Manesse ,  maire  de  la 
commune  de  Bermeries,  dans  le  cadastre  de  1806; 

Attendu  que  d'après  l'art.  9  du  décret  du  28  août  1792, 
les  terres  vaines  et  vagues,  landes,  biens  herroes  ou  vacants 
dont  les  communes  ne  justifiaient  pas  avoir  été  ancienne- 
ment en  possession  sont  censés  leur  appartenir  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'art,  lersect.  4  du  décret  du  10 
juin  1793,  tous  les  biens  communaux  en  général  connus  sous 
les  divers  noms  de  terres  vaines  et  vagues,  gastes,  garrigues, 
landes,  pacages,  pâtis,  etc,  et  sous  toute  autre  dénomination 
quelconque,  appartiennent  de  leur  nature  à  la  généralité 
des  habitants  ou  membres  des  communes  dans  le  terri- 
toire desquels  ces  communaux  sont  situés  ; 

Que  d'après  l'article  8  du  même  décret,  le  seul  titre  que 
peut  opposer  le  ci-devant  seigneur  était  un  acte  authentique 
de  vente  et  que  la  possession  même  de  quarante  ans  était 
inefficace  ; 

Attendu,  du  reste,  que  les  seigneurs  n'étaient  censés  avoir, 
pris  publiquement  possession  des  terrains  aux  termes  de 
l'art.  9  de  la  loi  du  1 3  avril  1 791 ,  que  si ,  avant  1 789 ,  il  les 
avait  soit  inféodés,  accensés,  ou  arrentés,  soit  clos  de  murs, 
de  haies  ou  de  fossés,  soit  cultivés  ou  fait  cultiver,  plantés 
ou  fait  planter  ,  soit  mis  a  profit  de  toute  autre  manière  , 
pourvu  qu'elle  ait  été  exclusive  à  titre  de  propriété  ; 

Attendu  que  l'obligation  de  réclamer  dans  les  5  ans  à 
partir  du  décret  du  28  août  1 792  n'existe  pas ,  lorsque  la 
commune  était  alors  de  fait  en  possession  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  qu'en  1792 ,   les  habitants  de 
Bermeries  usaient  librement  du  passage  et  du  pacage  sur 
le  Partiau  ; 
Attendu  que  si  antérieurement  à  1792  ,  le  fermier  des 


(  415  ) 

seigneurs  de  Bermeries  a  extrait  du  Parliau  la  terre  néces- 
saire à  la  confection  des  briques  destinées  à  la  construction 
d'une  grange  ,  s'il  a  fait  des  dépôts  de  bois  et  de  fumiers 
sur  le  Parliau,  s'il  a  placé  une  grange  en  bois  reposant 
sur  assises  en  pierre ,  s'il  y  a  eu  un  carrin  et  déposé  ses 
charriots  et  instruments  aratoires  ,  les  faits  ne  constituent 
pas  la  possession  exclusive  du  Parliau  à  titre  de  proprié- 
taire; qu'ils  peuvent  s'expliquer  facilement  par  la  nature 
du  terrain  vain  et  vague  ,  l'ascendant  du  seigneur  sur  la 
commune  et  les  droits  qu'il  s'arrogeait  sur  celte  sorte  de 
terrain  ;  que  du  reste  les  constructions  rurales  ne  s'éten- 
daient que  sur  un  are  12  centiares,  tandis  que  sur  le  sur- 
plus du  terrain,  d'une  contenance  de  65  ares,  les  habitants 
passaient  et  faisaient  librement  paître  leurs  bestiaux; 

Que  dés  que  la  possession  par  les  habitants  était  suffi-  , 
santé  paur  conserver  leurs  droits ,  ils  n'avaient  pas  besoin 
d'agir,  et  qu'une  possession  croisée  de  la  part  du  ci-devant 
seigneur ,  alors  surtout  que  sa  nature  est  équivoque ,  était 
inefficace  pour  lui  constituer  un  droit  et  mettre  la  com- 
mune en  demeure  d'agir  ; 

Attendu  que  maintenue  dans  ses  droits  de  propriété  du 
Parliau  par  les  décrets  des  24  août  1792  et  10  juin  1793, 
la  commune  n'en  a  pu  être  dépossédée  que  par  titre  ou 
prescription  ; 

Attendu  qu'en  vain  les  appelants  soutiennent  que  le 
Partiau ,  fut-il  propriété  communale  ,  est  devenu  bien  de 
l'Etat ,  par  l'application  de  l'art.  12  de  la  loi  du  10  j>iin 
4793  qui  a  affecté  à  l'Etat  les  biens  communaux  ci-devant 
possédés  par  les  bénéficiers  ecclésiastiques  ,  soit  par  des 
monastères,  soit  par  des  émigrés,  et  que  dès-lors  il  leur  a 
été  vendu  avec  la  ferme  de  Cambron  le  1 1  prairial  an  A  ; 

Attendu ,  en  effet ,  qu'aux  termes  du  décret  interprétatif 
du  8-13  août  1793  et  de  celui  du  27  pluviôse  an  2  ,  l'art. 
12  de  la  sect.  4  du  décret  du  10  juin  sur  le  mode  de  par- 
tage des  biens  communaux  ne  porte  aucune  atteinte  aux 
droits  qui  résultent  au  profit  des  communes  des  dispositions 
du  décret  du  28  août  1792  ,  relatif  au  rétablissement  des 


(  416  ) 
communes  dans  les  propriétés  et  droits  dont  elles  ont  été 
dépouillées  par  l'effet  de  la  puissance  féodale  ; 

Attendu  que  la  vente  du  11  prairial  au  4  ne  comprend 
pas  le  Partiau;  qu'elle  reprend  pour  les  biens  vendus  les 
désignations  du  bail  de  1784  accordé  à  Thomas  Manesse  ; 
que  Thomas  Manesse  n'acheta  et  n'avait  loué  que  la  ferme 
avec  son  terrain  de  deux  huittelées  ou  59  ares  40  cent.  ; 
qu'on  ne  peut  considérer  commme  une  dépendance  de  la 
ferme  le  Partiau  contenant  69  ares  20  cent,  et  sur  lequel 
d'ailleurs  n'existe  pas  l'entrée  de  la  ferme  ; 

Attendu  que  loin  d'être  considéré  par  les  appelants 
comme  une  dépendance  de  la  ferme  ,  ils  font  dans  leurs 
actes  de  famille  deux  articles  distincts  de  la  ferme  et  du 
Partiau  ; 

Attendu  qu'il  faut  avoir  d'autant  plus  d'égard  aux  con- 
tenances reprises  dans  le  bail ,  que  chaque  pièce  est  dési- 
rée avec  sa  mesure  exacte  en  huittelées  et  verges  et  non 
par  approximation  ; 

Attendu  que  les  appelants  ne  peuvent  se  prévaloir  da- 
vantage des  abouls,  les  deux  limites ,  le  chemin  elles 
terres  de  l'abbaye  étant  exactes  ,  même  en  faisant  abstrac- 
tion du  Partiau  ; 

Attendu  que  Ton  ne  concevrait  pas  que  si  -  les  69  ares 
eussent  été  vendus  à  Thomas  Manesse  ,  il  ne  s'en  fût  attri- 
bué que  22  ares  66  centiares  en  1 806  ; 

Attendu  que  si  le  titre  fait  défaut  aux  appelants  ,  ils  ne 
peuvent  davantage  se  prévaloir  de  la  prescription  ; 

Que  pour  la  prescription  de  10  ans,  sans  qu'il  soit  besoin 
de  consulter  la  question  de  bonne  foi ,  ils  ne  peuvent  in- 
voquer ni  le  titre  de  vente  nationale  du  1 1  prairial  an  4, 
qui  est  muet  quant  au  Partiau  ,  ni  l'acte  de  licitation  de 
1837,  puisque  le  partage  est  déclaratif  ,  non  translatif  de 
propriété  ; 

Que  pour  la  prescription  trentenaire,  elle  n'a  pu  s'accom- 
plir contre  la  commune  au  profit  de  ses  maires,  obligés  de 
la  protéger  et  delà  défendre  et  spécialement  chargés  par 
l'art,  10  de  la  loi  du  18  juillet  1837  de  la  conservation  et 


(  ^^^7  ) 
de    Tadministration  des   propriétés  de  la  commune  et  de 
faire  tous  les  actes  conservatoires  de  ses  droits  ; 

Attendu  qu'en  fait  Thomas  Manesse  a  été  maire  de  Ber- 
meries  de  1798  à  1812  et  Martial  son  fils  dont  les  héritiers 
possèdent  le  Partiaua  exercé  la  mênïe  fonction  de  1812  à 
1844; 

Qu'ainsi  les  trente  années  de  possession  ne  peuvent  être 
invoquées  ; 

En  ca  qui  touche  les  arbres  : 

Attendu  que  lors  de  leur  abattage  ,  Manesse  était  maire, 
qu'il  n'a  pu  dès  lors  se  les  approprier  au  préjudice  de  la 
commune  ; 

Attendu  néanmoins  que  les  arbres  vendus  en  1839 
n'étaient  pas  situés  sur  le  Partiau  ,  qu'une  partie  était 
sur  le  terrain  de  la  ferme  ;  qu'on  peut  estimer  ,  d'après . 
les  documents  produits,  ces  derniers,  ainsi  que  les  frais  de 
plantation,  à  625  fr.,  tandis  que,  d'après  acte  authentique, 
la  vente  aurait  produit  2,625  fr.  ; 

La  Cour  vidant  le  partage  déclaré  par  son  arrêt  du  26 
avril  dernier  ; 

Emendaht,  réduit  à  2,000  fr.  la  condamnation  à  titre  de 
restitution  pour  prix  des  arbres  abattus  et  vendus  par 
Martial  Manesse  ; 

Ordonne  que  le  surplus  du  jugement  sortira  effet  ; 

Condamne  les  appelants  aux  frais  de  la  cause  d'appel,  etc. 

Du  13  juillet  1860.  2®  chamb.  Prés.  ,  M.  Danel;  minist. 
puW, ,  M.  Berr,  avoc.  gén.  ;  avoc,  M^^  Duhem  et  Dupant; 
avou.  ,  M»  Lavoix  et  Debeaumont. 


lo    NOVATION.  —  RENOUVELLEMENTS    DE  BILLETS. -^  BAN- 
QUIER. —  MOYENS  DE  CIRCULATION.  —  COMPTE  COURANT. 

2o.  Contrainte  par  corps.  —  non  commerçant.  —  compte 

COURANT.  — achat  ET  REVENTE  DE  TITRES.  —  COMPÉTENCE 
NON  DÉCLINÉE.  —  OUVERTURE  DE  CRÉDIT.  —  LETTRE  DE 
CHANGE. —  SOLDE  DE  COMPTE. 

lo.  Ne  peuvent  être  considérés  comme  opérant  novation  les 
renouvellements ,  avant  échéance ,  de  billets  souscrits , 

TOME  xviii.  27 


(  4t8  ) 

comme  moyms  Je  circulation  et  de  crédit,  pour  le  nivel- 
lement d'un  compte  courant  ouvert  par  le  banquier  au 
souscripteur  de  ces  billets.  (C.  Nap.  art.  1271  et  1273.)  (1) 

2o.  La  corUrainte  par  corps  ne  p&at  être  prononcée  contre 
un  non-commerçant ,  a  raison  d'une  condamnation  obte- 
nue par  les  liquidateurs  d'une  banque  pour  le  solde  d'un 
compte  courant  à  lui  ouvert  par  le  banquier. —  Il  n'im- 
porte que  le  crédité  ait  quelquefois  acheté  et  reveiidu  des 
actions  ou  des  titres  divers,  quand  il  n'est  pas  établi  suf- 
fisamment qu'il  avait  l'habitude  de  se  livrer  à  ces  sm^tes 
d'opérations; —  qu'il  n'ait  pas  décliné  la  compétence  du 
Tribunal  de  commerce,  —  ni  même  que  ces  billets  aient 
été  créés  par  lui,  au  profit  du  banquier,  en  vue  du  crédit 
et  contiennent  remise  d'argent  de  place  en  place.  (L.  17 
avril  1832,  art.  1er.)  (2) 

(Denis  Beugin  C.  Foucart  et  Minart). 

L'abbé  Foucart ,  prêtre  à  Hendecaurt-lez-Ransart,  avait 

(1).  Gomp.  à  cette  décision  qui  porte  ayant  tout  sur  une  question  de 
fait  et  d'intention  :  Douai  11  mai  1857  (Jnrisp.  16.  51)  où  il  est  décidé 

aue  des  renouvellements  de  même  espèce  opèrent  notation.  Dans  le  sens 
e  Farrôl  ci-dessus,  m.  Limoges  31  iany.  1857  (S.  V.  185g.  2.  90)  ; 
Lyon  9  mars  1858  (S.  V.  1858.  2.  523);  Metz  26  iany.1854  (S.  V. 
1854.  2.  743);  Grenoble  8  mars  1850  et  15  février  1851  (S.  Y.  1851. 
2.  324). 

(2).  La  contrainte  par  corps  est  toujours  applicable  à  toutes  dettes 
commerciales  et  particulièrement  aux  billets  contenant  remise  d'argeat 
de  place  en  place.  Si  les  termes  de  la  loi  de  1832  pouvaient  être  un 
instant  douteux  à  cet  égard ,  il  sufGrait ,  pour  les  apprécier ,  de  se  re- 
porter à  la  discussion  de  la  loi  du  13  décembre  1848.  Dans  la  séance 
de  TÂssemblée  nationale  constituante  de  cette  même  date,  le  représen- 
tant Brillier  proposa  un  amendement  qui  était  ainsi  conçu  : 

c  La  contrainte  par  corps  ,  en  matière  commerciale,  ne  pourra  être 
»  prononcée  que  contre  les  commerçants  condamnés  pour  dette  cori- 
»  merciale  eu  paiement  d'une  somme  principale  de  200  fr.  et  au-dessus. 
»  Dans  aucun  cas,  elle  ne  sera  prononcée  contre  les  veuves  et  héritiers 
>  des  commerçants  assignés  pour  dettes  commerciales  en  raison  de 
»  leur  qualité.  » 

Gçtte  disposition,  si  elle  eût  été  adoptée  ,  aurait  rendu  la  contrainte 
par  corps  .inapplicable  à  la  lettre  ie  change  souscrite  par  toute  person- 
ne non  commerçante.  Mais,  combattue  par  MM.  Bravard^Yeynèreset 
Boudet  c[ui  se  sont  appuyés  sut*  l'importance  de  la  lettre  de  change, 
comme  instrument  de  crédit  public  et  sur  la  nécessité  de  lui  conserver 
toute  sa  puissance  de  cireulation ,  elle  a  été  rejetée.  —  Il  ne  peut  donc 
se  faire  que  l'arrêt  deljr  Gour  ait  en  aucune  manière  déclaré  qu'une 
valeur  contenant  ren|ise  d'argent  d'une  place  sur  une  autre  place  et 
constituant  ainsi  un  acte  de  commerce ,  puisse  ne  pas  donner  lieu  à  la 
contrainte  par  corps.  Il  faut  entendre  l'an^él  dans  un  autre  sens.  En  effet, 


(  419  ) 

été  en  relations  d'affaires  avec  la  Caisse  Artésienne,  connue 
sous  la  raison  sociale  P.  Minart  et  G»».  Un  compte  courant 
avait  été  établi  au  nom  du  sieur  Foucart  sur  les  livres  so- 
ciaux ,  et  spécialement  ouvrait  par  un  arrêté  de  compte  en 
décembre  1856  ,  qui  constituait  un  solde  débiteur ,  à  la 
charge  de  Foucart,  de  1,698  f.  39  c.  Le  compte  continuait 
ensuite,  par  diverses  opérations,  jusqu'au  15  juin  1858. 

P.  Minart  vint  à  décéder. 

Le  compte  s'arrêtait  au  15  juin  1858  par  un  solde  ci'é- 
diteur,  au  profit  de  la  caisse,  de  8,729  f.  90  c.  Les  liqui- 
dateurs, ajoutant  les  intérêts  commerciaux  jusqu'au  15  avril 
1859,  soit  442  f.  25  c,  firent  assigner,  le  16  avril,  par- 
devant  le  Tribunal  de  commerce  d'Arras  ,  l'abbé  Foucart 
en  paiement  de  9,172  f.  15  c. ,  en  demandant  condamna- 
tion même  par  corps. 

Foucart>épondit  qu'il  avait  réglé  personnellement  avec 
P.  Minart  quelques  jours  avant  son  décès.  Les  héritiers  Mi- 
nart furent  appelés  en  garantie. 

Le  Tribunal  de  commerce  d'Arras  admit  la  version  de 
l'abbé  Foucart  ;  mais  la  Cour,  sur  l'appel  des  liquidateurs, 
et  après  avoir  entendu  les  parties  en  personne,  a  rendu 
l'arrêt  suivant  : 

ARRÊT. 

LA  COUR, — Attendu  que  la  maison  de  banque  Minart  et 
C>e  avait  ouvert  un  crédit  à  Foucart; 

Qu'un  compte  courant,  arrêté  tous  les  trois  mois,  existait 
entre  Minart  et  O^  jet  Foucart  ; 

Que  ce  fait,  d'abord  démenti  par  Foucart,  est  établi,  non 
seulement  par  les  livres  de  la  maison,  mais  encore  par  des 

la  Cour ,  ainsi  que  nous  nous  sommes  attaché  à  le  formuler  ici,  décide 
d*abord  que  quelques  opérations  d'achat  et  de  vente  de  valeurs  commer- 
ciales étaient  loin  d-étaolir  contre  l'intimé  l'habitude  de  ces  opérations 
et,  par  suite,  la  qualité  de  commerçant.  Partant  de  ce  fait  qu'il  n'est  pas 
commerçant,  la  Cour  examine  ensuite  s'il  est  condamné  pour  un  acte  de 
commerce.  Et  elle  répond  par  la  négative  ,  bien  C[ue  dans  les  circons- 
tances de  la  cause  se  fût  produite  celle-ci  :  que  l'intimé  avait  créé  des 
billets  commerciaux  ayant  caractère  de  lettre  de  change.  Elle 
s*appuye  sur  ce  motif  que  la  condamnation  qu'elle  vient  de  prononcer 

■^*^    a^nn   Kavi  y>»    MAmo/vn    Ar*    â* t%o    1affi*iic  An   /«lionrrA        moic;     KiAn    /l'im  /t/vnnv\4A 


qui  a  son  impor- 
tance dans  l'application  de  la  contrainte  par  corps  que  la  Cour  a  juste- 
ment  restreinte  autant  que  les  termes  du  droit  pouvaient  le  lui  permettre.^ 


(  420  ) 

documents  émanant  de  Foucart  lui-mêm^,  et  a  éié  du  reste 
formellement  avoué  par  lui  à  Faudience  de  la  Cour  ; 

Attendu  que  Touverture  du  crédit  était  garantie  par  un 
nantissement  de  titres  et  d'actions  aux  mains  de  Minart  ; 

Attendu  que  pour  qiyeler  les  oomptes  et  donner  à  la 
maison  de  banque  das  moyens  de  circulation  et  de  crédit , 
des  billets  étaient  souscrits  par  Foucart ,  ^t  qu'ils  étaient 
renouvelés  avant  les  échéances,  dans  Timpossibilité  où  était 
Foucart  d'acquitter  ceux  qui  étaient  en  circulation  ; 

Atteadu  que  les  billets  a'avaient  pas  pour  but  d'opérer 
une  novation,  mais  qu'en  constatant  la  reconnaissance  de 
la  dette  ,  ils  réseryaiept  aux  litres  et  moyens  d'exécution 
antérieurs  tous  leurs  effets ,  en  cas  de  non  paiement  des 
traites  souscrites  ; 

Attendu  que  Foucart  a  été  assigné  >  le  48  juillet  1859, 
par  les  liquidateurs  de  la  maison  Minart,  en  paiement  d'une 
somme  de  9i,172  Ç,  15  c,  pour  solde  de  compte  au  15  avril; 

Attendu  que  cette  somme  se  compose  de  frais  de  muta- 
tion sur  trois  actions  nouvelles  de  î'EscarpeUe ,  d'intérêts 
et  d'une  somme  principale  de  8,000  f.  pour  laquelle  Fou- 
cart avait  souscrit  trois  effets,  l'un,  au  27  février  1858,  de 
3,000  f .  ;  le  second  ,  à  h  même  date ,  de  2,000  f,  ;  le  troi- 
sième ,  de  3,000  f. ,  au  6  mars  ; 

Attendu  que  Foucart  a  soutenu  qu*îl  en  avait  payé  l'im- 
portance, le  20  ou  le  21  janvier  1858,  aux  mains  de  Minart 
qqi  les  avait  lacérés  en  sa  présence,  et  qu'il  S''étaît  procuré 
les  8,000  f.  par  la  vente  d'actions  Bonnard  et  de  TEscar- 
pelle,  et  par  un  prêt  de  5,000  f.  que  lui  avait  fait  son  frère; 

Qu'ainsi  la  dett^  doit  être  diminuée  de  8,000  f.  ; 

Mais  attendu  que  Foucart,  qui  invoque  sa  Ubératiou^  doit 
l^  j-ustifier  \  qu'il  ne  représente  pas  les  bitlets  a^uét^és  ; 
qu'il  ne  faurait  pas  davantage  de  quiittanoes  de  paiement; 
(jû'il  allègue  sei^lement,  que  le  créancier  a  reçu  8,060  f.  et 
lui  a  donfié  quittance  eo  lacérant  des  t,itre$  nouveaux,  tout 
$11  laissant  suoçister  les  titres  anciens  qui  étaienit  aux  ma^o^ 
d'uft  ti!erç-p,(?irt:eur  ;.  qu'évidemment  Foycart  ne  Mi  pas  la 
j^reuve  à  laquelle  il  est  a^tremt,  el  resàe  déèiAeur  d,e  tOAit 
le  solde  de  son  compte  courant  ; 


(  421  ) 

Attendu,  du  reste,  que  Foucart  a  reconnu  formellement 
à  Taudiehee  qu'il  y  avait  eu  erreur  relativement  aux  actions 
Bonnard  ;  que  ces  actions  avaient  été  vendues  des  juin  1857; 
qu'il  lui  avait  été  tenu  compte  ,  dans  les  règlements  anté- 
rieurs ,  de  toute  l'importance  de  la  vente ,  et  qu'ainsi  il 
n'avait  réellement  payé  que  7,000  f,  ou  7,120  f. ,  car  il  a 
varié  sur  le  chiffre; 

Attendu  que  rien  ne  justifie  le  prétendu  prêt  dé  5,000  f, 
qui  lui  aurait  été  fait  par  soii  frère  ; 

Attendu  ,  quant  au  produit  des  actions  de  TEscarpelIe  , 
que  DubruUe,  premier  mandataire  délégué  j  avertissait  Fou- 
cart, le  28  janvier  1858,  que,  préalablement  à  la  vente,  il 
fallait  régulariser  le  transfert  qui  n'était  pas  encore  signé , 
et  réclamait  35  f.  paa*  action,  et  que  cette  lettre  a  été  écrite 
de  là  main  de  Ch.  Quentin  ,  que  Foucart  désigne  comme 
ayaiit  acquis  antérieurement  les  actions  ; 

Attendu  que  la  vente  n'a  été  opérée  que  le  10  février,  et 
que  le  même  jour,  Foucart,  sur  les  injonctions  dé  ses  su- 
périeurs ,  versait  dans  la  caisse  de  la  liquidation  2,000  f. 
pour  un  appel  défends,  en  qualité  d'actionnaire  de  la  Caisse 
Artésienne,  appel  (jui  lui  avait  été  fait  dès  le  20  janvier; 

Attendu  enfin  que  le  prétendu  paiement  anticipé  du  mon- 
tant des  traites  non  échues  lé  20  oti  le  21  jstflVier,  est  dé- 
menti par  toutes  les  vraisemblance^  ; 

Qu'en  effet,  le  20  janvier,  Minart  écrivait  à  Foucart  pour 
lui  réclamer  d'une  manière  très- pressante  le  paiement  des 
dixièmes  appelés  ,  tandis  qu'il  ri'avait  rien  à  réclamer  sur 
les  traites; 

Attendu  que  Foucart  explique  le  paiement  fait  par  anti- 
cipation ,  par  le  désir  d'éviter  tout  protêt  à  Id  âignalure  et 
de  prévenir  toute  poursuite  ; 

Mais  qu'il  est  établi  par  la  déposition  dé  Dupont  dans 
l'instruction  correctionnelle,  et  par  ûft  dodumeM  irréfraga- 
ble, la  dopie  certifiée  par  le  juge  d'instruction  d'une  lettre 
éeHtë  le  é  janvier  par  Fouoan ,  jointe  au  dossier,  ainsi  que 
par  la  dêclat-âtion  dd  Foucart  lui-mêmç ,  qu'il  savait  très- 
bien  ,  le  6  janvier  ,  que  ses  billets  d'ensemble  30,000  f. 
élaienfl  en  la  possession  de  Dupont,  et  que  Dupont,  tout  en 


(  422  ) 

recevant  un  nantissement,  se  réservait  dans  tous  ses  droits; 
qu'ainsi  il  n'échappait  à  rien  par  le  paiement  anticipé  des 
traites  nouvelles  ; 

Attendu  qu'en  déposant,  le  6  février,  devant  le  juge  d'ins- 
truction ,  Foucart  se  plaint  de  ce  que  Minart,  tout  en  re- 
cevant 18,000  f.  de  prêt-Brognart,  et  en  lui  remettant  pour 
18,000  f.  de  ses  nouvelles  obligations,  a  néanmoins  laissé 
les  anciennes  aux  mains  de  Dupont  qui  pourrait  s'en  pré- 
valoir ,  et  qu'il  serait  ainsi  exposé  à  payer  deux  fois  ;  mais 
qu'il  garde  le  silence  le  plus  entier  sur  la  même  position 
que  lui  aurait  faite  le  paiement  de  8,000  f.  et  la  remise 
ou  plutôt  la  lacération  de  8,000  f.  de  nouvelles  traites  qui 
aurait  eu  lieu  le  20  ou  le  21  janvier  ;  qu'il  n'en  a  pas 
parlé  davantage  dans  sa  déposition  à  l'audience  ; 

Attendu  que  Foucart,  qui  connaissait  le  20  ou  le  21  jan- 
vier la  démission  de  Minart  et  l'état  de  liquidation  de  la 
Caisse  Artésienne ,  n'eût  pas  payé  alors  8,000  f.  à  Minart 
sans  prendre  au  moins  la  précaution  d'en  tirer  quittance 
ou  de  conserver  les  titres  acquittés  ; 

Attendu  que-si  Foucart  n'a  pu  payer  ,  dans  ces  circons- 
tances ,  une  dette  non  exigible ,  Minart  n'a  pu  davantage 
déchirer  pour  8,000  f.  de  traites  ,  alors  que  de  l'aveu  de 
Foucart  même  ,  il  n'en  recevait  pas  toute  l'importance  ,  et 
que  la  seule  inspection  des  comptes  lui  eût  appris,  s'il  reûl 
oublié,  que  le  bénéfice  de  l'affaire  des  actions  Bonnard,  qui, 
du  reste,  n'était  que  de  805  f.  50  c,  était  depuis  longtemps 
passé  au  crédit  de  Foucart; 

Attendu,  dès-lors,  que  non  seulement  Foucart  ne  prouve 
pas  sa  libération ,  mais  que  les  conditions  dans  lesquelles, 
d'après  lui,  elle  aurait  été  effectuée,  sont,  pour  partie  du 
moins,  démontrées  ne  pas  exister. 

En  ce  qui  touche  la  contrainte  par  corps  : 
Attendu  que  les  quelques  opérations  d'achats  et  de  revente 
d'actions  ou  de  titres  faites  par  Foucart,  sont  loin  d'éta- 
blir l'habitude  d'opérations  de  cette  nature  et  de  lui  con- 
férer la  qualité  de  commerçant  ; 

Qu'on  ne  peut  tirer  parti  contre  lui  de  ce  qu'il  n'a  pas 


(423) 

jugé  convenable  de  décliner  la  compétence  du  tribunal  de 
commerce  ; 

Qu'on  ne  saurait  davantage  se  prévaloir  de  ce  que  ses 
billet»  emporteraient  ou  non,  dans  Tintention  des  parties, 
remise  d'argent  d'une  place  sur  l'autre,  et  constitueraient 
un  acte  de  commerce;  que  quel  que  soit  leur  caractère  , 
ce  n'est  pas  en  vertu  des  billets  qu'agissent  les  liquidateurs, 
mais  en  vertu  d'un  compte  courant  ouvert  par  le  banquier 
à  un  non  commerçant  et  dont  ils  réclament  le  solde; 

Attendu  que  la  mise  en  cause  des  héritiers  Minart  a  été 
nécessitée  par  le  mode  de  défense  présenté  par  Foucart  ; 
que  le  succès  de  l'action  contre  Foucart  dispense  d'exami- 
ner la  valeur  de  l'action  subsidiaire  dirigée  contre  les  héri- 
tiers Minart  ; 

La  Cour  met  le  jugement  dont  est  appel  au  néant  ;  émen- 
dant  et  faisant  ce  que  les  premiers  juges  auraient  dû  faire, 
condamne  Foucart  à  payer  la  somme  de  9,172  f.  15  c.  pour 
solde  du  compte  courant  au  15avriH859,aux  intérêts  de 
cette  somme  à  partir  de  cette  époque,  aux  frais  de  première 
instance  et  d'appel  envers  toutes  les  parties. 

Du  20  juillet  1860.  2e  chambre.  Prés.  M.  Danel.  Minist. 
publ.  M.  Berr.  Avoc.  M^s  Dupont,  Duhem,  Emile  Flamant  ; 
avou.  M«s  Lavoix,  Estabel  et  Legrand. 


lo.  TIERCE-OPPOSITION.  — RECEVABILITÉ.— SAISIE  IMMO- 
BILIÈRE. —  DEMANDE  EN  CONVERSION.  —  APPEL.  —  CRÉAN- 
CIERS INSCRITS. 

2o.  SAISIE  IMMOBILIÈRE. — DEMANDE  EN  CONVERSION. — REFUS. 
— APPEL. 

i^.  La  sommation  faite  par  les  créanciers  poursuivant  une 
saisie  immobilière  aux  créanciers  inscrits  (art.  692  C. 
proc.) ,  alors  surtout  qu'elle  n'a  pas  été  transcrite  (art. 
693) ,  ne  peut  impliquer,  pour  les  premiers ,  V obligation 
(Rappeler  les  derniers ,  dans  une  instance  d^ appel  formée 
contre  un  jugement  qui  avait  refusé  la  conversion  de  la 
saisie,  —  Par  suite ,  les  créanciers  inscrits  ne  sont  pas 
recevables  à  former  tierce-opposition  à  V arrêt  qui,  réfor- 
ynant  la  sentence  des  premiers  juges ,  a  admis  la  conver- 
sion de  la  saisie  (G.  proc.  art  474). 


(  AU  ) 

2°.  Le  jyjgement  qui  refuse  la  conversion  est-il  sujet  à 
appel?  (C.  proc.  art.  743  el  746).  (1) 

r 

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(1)  En  nous  reportant ,  suprà  p.  277,  à  Tarrêt  Capet ,  veuve  Martin 
(ire  espèce)  qui  précède  Tarrét  (2©  espèce)  auquel  se  rapporte  celui 
que.  nous  recueillons  ici  ,  nous  nous  sommes  aperçus  qu  à  tort  nous 
1  avions  indiqué  ,  comme  jugeant  une  question  d'appel  d  un  jugement 
de  conversion.  Les  faits  ae  la  cause  que  nous  avons  pu  vérifier  ne  com- 
portaient pas  cette  question. 

Au  contraire,  un  arrêt  du  28  mars  1860  avait  jugé  cette  même  ques- 
tion ,  en  admettant  à  Tappel  une  décision  du  Tribunal  civil  de  Dunkerqiic 
qui  avait  refusé  la  conversion  ,  et,  en  infirmant  ce  même  jugement. 
\oici  cet  arrêt  que  nous  aurions  dû  rapporter  plus  haut  au  Heu  et 
place  de  Tarrét  du  9  janvier  1860  auquel  ne  s'appliquait  pas  la  ques- 
tion ici  posée. 

(Dubois  C.  de  Kersabiec  et  Cutters  Winckel). 

20  janvier  1860  ,  saisie  immobilière  de  divers  corps  d'immeubles 
situés  sur  le  terroir  d'Esquelbecq  ,  appartenant  à  M^®  ae  Kersabiec. 

Dénonciation  aux  parties  saisies  et  sommation  aux  créanciers 
inscrits  de  prendre  communication  du  cahier  des  charges  et  d'assister 
à  l'audience  des  criées  du  Tribunal  civil  de  Dunkerque,  du  9  mars,  à 
la  lecture  et  à  la  publication  du  cahier  des  charges,  et  à  la  fixation  du 
jour  de  l'adiudication. 

Requête  de  toutes  les  parties  au  Tribunal,  afin  qu'il  lui  plaise  de  con- 
vertir la  saisie  en  vente  aux  enchères  pardevant  notaire  et  les  ren- 
voyer en  conséquence  pour  y  procéder  pardevant  M®  Debruyne  ,  no- 
taire à  Wormhoudt,  dépositaire  des  titres. 

9  mars  1860  ,  jugement  du  Tribunal  civil  de  Dunkerque  qui  refuse 
de  faire  droit  à  la  requête  des  parties. 

Requête  par  Dubois  et  consorts  à  M.  le  premier  Président  ,  Prési- 
dent et  conseillers  aux  fins  qu'il  leur  plaise  mettre  le  jugement  dont 
est  appel  au  néant ,  etc. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Attendu  qu'à  raison  de  la  nature  et  de  la  situation 
des  biens  assez  éloignés  de  Dunkerque  ,  il  y  a  lieu  d'accueillir  la  de- 
mande en  conversion  formée  par  toutes  les  parties  ;  que  leur  intérêt 
commun  rend  en  effet  préféraole  la  vente  par  le  ministère  du  notaire  , 
résidant  prés  des  lieux  de  la  situation  des  immeubles  et  qui ,  d'ailleurs, 
est  déjà  dépositaire  des  titres  de  propriété; 

Par  ces  motifs  ,  la  Cour  infirme  le  jugement ,  ordonne,  en  consé- 
quence, qu'aux  requête,  poursuite  et  diligence  du  sieur  Dubois,  proprié- 
taire et  cultivateur  à  Herzèele  ,  créancier  saisissant ,  il  sera  procéaé  en 
l'étude  et  par  le  ministère  de  M<^  Debruyne ,  notaire  à  Wormhoudt  , 
que  la  Cour  commet  à  cet  effet ,  en  présence  des  sieurs  dame  de  Ker- 
sabiec ,  parties  saisies  ,  du  sieur  Outters-Winckel  et  consorts  ,  créan- 
ciers inscrits  ,  ou  eux  dûment  appelés  ,  à  la  vente  aux  enchères  publi- 
ques ,  au  plus  offrant  et  dernier  enchérisseur  de  la  ferme  en  17  lots  ; 
ainsi  qu'ils  sont  mentionnés  et  sur  les  mises  à  prix  ixées  au  caliier 
des  charges  ,  sauf  à  les  réunir  ensuite ,  pour  le  tout  être  adjugé  en  un 
seul  lot  sûr  la  mise  à  prix  qui  sera  formée  par  l'addition  totale  des  prix 
atteints  par  chaque  lot  particulier,  le  tout  après  Faccomplissement  des 
formalités  voulues  par  la  loi  ; 


(  425  ) 
Duvivier  C.  époux  Quéval,  de  Gantés  et  Marcotte.) 

Un  arrêt  de  la  Cour  de  Douai  du  29  mai  1860  a  infirmé 
uo  jugement  du  Tribunal  civil  de  Saint-Omer  {vid.  suprà 
p.  277 — 2«  espèce)  qui  avait  rejeté  une  demande  en  con- 
version de  saisie  immobilière  en  vente  volontaire  devant 
notaire,  conversion  autorisée  par  Fart*  743  G*  proc. 

Pendant  l'instance  d'appel,  en  se  conformant  à  l'art.  692 
C.  proc.  sur  les  errements  de  la  saisie  immobilière,  les  pour- 
suivants ont  fait  sommation  à  la  demoiselle  Duvivier,  créan- 
cière inscrite ,  de  prendre  communication  du  cahier  des 
charges,  de  fournir  ses  dires  et  observations,  etc. 

Au  jouf  indiqué  pour  la  publication  (24  juin),  la  demoi- 
selle Duvivier  se  présenta  à  l'audience  pottr  y  exercer  les 
droits  que  lui  reconnaissait  la  sommation  à  eUe  délivrée  ; 
on  lui  opposa  l'arrêt  du  29  mai  ordonnant  la  conversion. 

Elle  demanda  sursis  à  la  lecture  du  cahier  des  charges, 
en  déclarant  former  tierce-opposition  à  Tarrêt  du  29  mai. 
On  prétendit  alors  qu'elle  était  sans  qualité  et  irrecevable 
dans  sa  demande. 

Intervint,  à  l'audience  du  même  jour,  un  jugement  ainsi 
conçu  : 

JUGEMENT. 

€  Considérant  que  la  non-reOevabilité  prétendue  des  con^ 
clusions  de  la  demoiselle  Duvivier,  repose,  d'après  au  moins 
la  plaidoirie  des  poursuivants ,  sur  un  double  moyen  de 
forme  et  de  fond,  à  savoir  :  sur  un  défaut  d'assignation  et 
un  défaut  de  qualité; 

1»  Considérant,  quant  au  défaut  d'assignation,  que  sommée, 
en  tant  que  créancière  [inscrite ,  par  les  poursuivants  eux- 
mêmes  ,  de  prendre  au  gt'effe  communication  du  cahier 
des  charges ,  d'y  fournir  ses  dires  et  observations ,  et  d'as- 
sister à  l'audience  de  ce  jour,  pour  en  entendre  la  lecture, 
la  demoiselle  Duvivier  n'avait  évidemment  aucune  assigna- 
tion particulière  à  délivrer  à  ces  derniers  pour  les  attraire 
devant  le  Tribunal  et  pour  y  débattre  sur  la  lecture  dudit 
cahier  des  charges,  telleâ  conclusions  qu'elle  jugerait  utile 

Fixe  au  jeudi  iOmai  prochain ,  le  jour  auquel  aura  Heu  ladite  adju- 
dicatioti. 

Du  28  mars  1860.  fre  chamb.  Présid. ,  M.  de  Moulon,  i^^  Président  ; 
minist.  publ. ,  M  Morcrette  ,  lor  avoc.-gén.  ;  avec. ,  Me  Ed.  Leraaire  ; 
avou.,  Mes  Lavoix  et  Debeaiimont. 


(426) 

de  produire;  qu'elle  était  nécessairement  autorisée  parla 
sommation  dont  il  s*agit ,  et  que  du  reste  la  comparution 
des  poursuivants  ^  la  part  qu'ils  ont  prise  aux  débats  d'au- 
dience auraient  couvert  toute  fin  de  non  recevoir ,  s'il  en 
eût  existé  ; 

>  Considérant,  quant  au  défaut  de  qualité,  que  depuis  la- 
dite sommation  ,  la  partie  de  Cossart  est  devenue  naturel- 
lement ,  et  en  vertu  de  l'art.  743  C.  proc.  civ. ,  partie  en 
l'instance  ; 

»  Quevainementon  objecte  qu'elle  ne  pouvait  l'être  qu'au- 
tant que  cette  sommation,  prescrite  par  l'art.  692,  eût  élé 
complétée  par  la  mention  exigée  par  l'art.  693  ; 

»  Que  c'est  évidemment  ajouter  ici  au  texte  de  l'art.  743, 
qui  ne  renvoie  (même  sous  forme  indicative)  qu'à  Fart.  692, 
méconnaître  la  véritable  position  des  parties,  ainsi  que  le 
sens  exact  de  l'art.  693,  et  argumenter,  en  définitive,  d'une 
omission  qui  ne  peut  être  reprochée  qu'aux  poursuivants, 
puisqu'à  eux  incombait  l'obligation  de  ladite  mention  ; 

>  Qu'ainsi  partie,  désormais,  en  la  poursuite ,  étrangère 
à  l'instance  d'appel  et  non  notifiée  de  l'arrêt  qui  aurait, 
malgré  l'art  746 ,  réformé  le  jugement  de  ce  Tribunal ,  que 
de  graves  motifs  avaient  porté  à  rejeter  la  conversion  de- 
mandée ,  la  demoiselle  Duvivier  avait  le  droit  d'en  exiger 
ou  d'en  prendre  elle-même  communication  et  celui ,  tout 
au  moins  apparent ,  d'y  former  tierce-opposition  ; 

»  Qu'en  déclarant  donc  vouloir  user,  à  cet  égard,  du  bé- 
néfice de  l'art.  474,  et  en  demandant,  en  vue  de  sa  tierce 
opposition  ,  qu'il  fût ,  jusqu'après  décision  sur  ce  point  et 
conformément  à  l'art.  477,  sursis  à  la  lecture  du  cahier  des 
charges,  elle  a  agi  dans  les  limites  légales  de  sa  position  ; 
»  Par  ces  motifs,  le  Tribunal,  sans  s'arrêter  à  la  fin  de  non 
recevoir  proposée  contre  la  partie  de  Cossart ,  donne  acte 
à  celle-ci  de  sa  déclaration  formelle  de  se  pourvoir  par  tierce 
opposition  contre  l'arrêt  du  29  mai  dernier,  l'autorise  à  le- 
ver elle-même  expédition,  si,  dans  les  trois  jours  du  pré- 
sent ,  la  partie  adverse  ne  réalisait  l'offre  qu'elle  a  faite  à 
l'audience  de  le  lui  communiquer  ;  dit  qu'il  sera  ,  jusqu'a- 
près décision  sur  la  tierce -opposition,  sursis  à  la  lecluredu 


(  427  ) 

cahier  des  charges  ,  comme  à  tout  jugement  sur  les  dires 
et  conclusions  y  exprimées  par  les  parties,  celle  de  M.  Gos- 
sart  tenue  toutefois  d'introduire  sa  tierce-opposition  avant 
le  15  juillet  prochain  ; 

»  Dépens  de  T instance  réservés,  etc.  » 

Ensuite  de  ce  jugement ,  mais  après  le  12  juillet  seule- 
ment, alors  qu'avaient  eu  lieu  les  adjudications  ordon- 
nées par  Tarrêt  du  29  mai ,  la  demoiselle  Duvivier  porta  sa 
tierce-opposition  devant  la  Cour.  Pour  elle  on  a  dit  :  Toute 
partie  peut  former  tierce-opposition  à  un  arrêt  qui  préju- 
dicie  à  ses  droits,  et  lors  duouel  ni  elle  ni  ceux  qu'elle  re- 
présente n'ont  pas  été  appelés.  La  demoiselle  Duvivier  était 
créancière  hvpolhécaîre  inscrite  des  époux  Quévàl.  Lors  de 
l'arrêt  du  2Ô  mai  1860,  elle  avait  été  frappée  d'une  som- 
mation de  prendre  communication  du  cahier  des  chargés,  etc. 
Par  l'efTet  même  de  cette  signification,  et  d'après  les  prin- 
cipes des  art.  693  et  743  G.  proc.  civ. ,  elle  était  devenue 
partie  dans  l'instance  en  saisie  immobilière ,  et  aucune  dé- 
cision ne  pouvait  dès-lors  intervenir  hors  sa  présence.  Il  a 
été  ainsi  décidé  entre  les  parties,  suivant  jugement  du  22 
juin  1860,  ayant  autorité  de  chose  jugée.  N'ayant  pas  été 
appelée  à  l'arrêt  du  29  mai  1860,  elle  a  incontestablement 
le  droit  d'y  faire  tierce-opposition.  Elle  a  du  reste  intérêt 
à  faire  rapporter  cet  arrêt  dont  l'annulation  aura  pour  effet 
de  donner  suite  à  une  saisie  régulière  qui ,  purgeant ,  de 
plein  droit,  les  hypothèques,  fera  participer  les  créanciers 
inscrits  à  rintégralité  du  prix  d'adjudication  sans  perte  de 
frais  de  purge.  La  recevanilité  de  la  tierce-opposition  se 
trouve  ainsi  justifiée.  D'un  autre  côté,  ajoutait-on,  le  juge- 
ment rendu  par  le  Tribunal  de  Saint-Omer,  le  4  mai  1860, 
rejetant  la  demande  en  conversion ,  n'était  pas  susceptible 
d'appel;  les  termes  de  l'art.  746  sont,  en  effet,  généraux 
et  absolus;  en  aucun  cas,  les  décisions  en  matière  de  con- 
version ne  sont  susceptibles  d'appel.  En  vain  on  soutien- 
drait que  l'appel  n'est  pas  recevable  au  cas  seul  où  le  Tri- 
bunal accorde  la  conversion ,  et  qu'il  l'est,  au  contraire,  au 
cas  où  le  Tribunal  la  refuse.  En  effet,  puisque,  pour  obte- 
nir la  conversion  ,  il  faut  l'assentiment  des  intéressés  sai- 
sissants, saisi,  créanciers  dénoncés,  agissant  unanimement 
ar  une  requête  collective,  il  était  inutile  de  dire  que  ceux- 
à  qui  avaient  tous  obtenu  gain  de  cause,  ne  pouvaient  pas 
interjeter  appel.  C'eût  été  un  non-sens  de  la  loi.  Enfin,  on 


K 


(  428  ) 

ne  concevrait  guère  que  la  loi ,  si  elle  eût  permis  l'appel , 
n'eût  pas  Indiqué  le  délai  dans  lequel  cet  appel  eût  été  in- 
terjeté ,  et  le  point  de  départ  du  délai.  Enfui ,  en  confeidé- 
rant ,  par  pure  hypothèse  ,  l'appel  comme  étant  J'èaèvàble 
en  principe,  on  soutenait  qu'il  ne  l'était  pas  dans  l'espèce, 
parce  que  les  créanciers  saisissants  avaient  volontairement 
exécuté  le  jugement  qui  refusait  la  conversion,  Taisant  pos- 
rieurement,  eleti  exécution  du  jugemetit,  là  sommation 
prescrite,  aux  créanciers  hypothécaires  liifecrîî&,  par  l'art. 
692,  et  se retidant  formellement,  pat^ là,  t^6ëmblé«  à  cri- 
tiquer désormais  ce  jugement.  D'ailleurs,  disak-titi  efloore, 
il  faut,  pour  obtenir  la  conversion,  l'unanimité  de  t0us  les 
intéressés  •  du  moment  que  le  créancier  inscrit  a  été  frappé 
de  la  notification  de  l'art.  692 ,  il  est  intéressé  ;  te  conver- 
sion ne  pouvait,  par  suite,  être  prononcée  sans  le  consen- 
tement de  la  demoiselle  Duvîvier,  créancière  hypothécaire, 
frappée  de  notification  depuis  le  18  mai  186Ô.  Non  seiile-^ 
ment  ce  consentement  n'a  pas  été  donné ,  mais  il  est  tou- 
jours et  a  touJDUi's  été  refusé. 

On  répondait  pour  les  intimés  : 

«  D'après  l'art.  743  C.  proc,  la  demande  de  conversion 
doit  émaner  des  seuls  intéressés ,  et  les  seuls  intéressés , 
jusqu'à  la  sommation  prescrite  par  l'art.  692,  sont  les  pour- 
suivants et  ie  saisi.  Or,  ce  n'est  que  postéi  ieurenient  à  l'ap- 
pel, le  26  mai,  que  la  sommation  a  été  notiflêe  mt  créan- 
ciers inscrits.  Ceux-ci  n'étaient  donè  pas  parties  itttéressées 
Jors  de  l'appel,  et,  dès-lors,  il  n'y  avait  pas  lieu  d«  tes  ap- 
peler en  cause.  L'opposante  est  doue  sans  qualité;  D'un 
autre  côté,  d'après  1  art.  4-74  C.  proc.  et  suivarit  la  juris- 
prudence, il  faut,  pour  que  l'opposant  sait  recévable,  (ju'il 
éprouvé  un  préjudice  et  qu'il  ait  un  iillérêt  sérieux  à  la 
rélraclalion  dû  jugement.  Ur,  l'arrêt  du  29  mai,  qui  a  or- 
donné la  conversion,  a  été  très-avantageux  à  toU^;  on  peut 
eti  juger  paf  le  prix  de  vente ,  et  riutérêt  de  l'opposante  se 
conçoit  d'autant  moins  qu'elle  n'a  fôrrfté  tierèfe  opp^mitiofl 
que  deux  jours  après q[ue  les  adjudicalionsélalenl  teiriîiiriééf&. 

»  Quant  à  l'appel,  il  est  de  droit  commun,  et,  eu  matière 
de  Saisie  îmmobuière ,  il  eât  autorisé  contre  lès  jugements 
d*încident ,  sauf  ceux  qui  sont  expressément  exceptés  par 
i*aît.  730  C.  proc.  L'art.  746  ne  contient  aucune  autre  dé- 
rogation aux  régies  du  droit  commun.  Il  fessort,  ait  effet, 
de  Terisemble  des  2«  et  3«  paragraphes  de  cet  article,  que 
le  jugement  intervenu  sur  ufie  demande  en  ccifiVÉffôion 


(429) 

n'est  susceptible  ni  d'opposition  ni  d'appel  que  dans  le  cas 
seulement  où  la  demande  ^  été  admise.  Dans  ce  cas,  en 
effet ,  il  était  inutile  d'ouvrir  la  voie  de  l'appel  contre  ce 
jugement  qui  ordonne  la  conversion,  puisque  le  consente- 
ment de  toutes  les  parties  était  indispensable  pour  que  la 
demande  fût  formée.  Mais  si  au  lieu  de  constater  et  homo- 
logua lô  cOQsanjtement  des  parties  ,  le  Tribunal  rejette  la 
demande  et  fait  ainsi  un  acte  d'autorité  qui  peut  leur  por- 
ter grief,  sa  décision  rentre  dans  le  droit  commun  et  est 
sujette  à  appel.  » 

La  Cour,  sans  juger  la  question  d'appel,  a  rendu  l'arrêt 
suivant  sur  la  recevabilité  de  la  tierce  -  opposition  : 

ARRÊT. 

LA  COUR; — Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  474-  C.  proc. 
civ.,  la  tierce-opposition  n'est  recevable  qu'à  la  charge  par 
la  partie  qui  use  de  ce  recours  „  d'établir  que  la  décision 
rendue  en  sçm  absence  porte  préjudice  à  ses  droits  ; 

Attendu  que  la  demande  en  conversion  dont  il  s'agit  au 
procès,  a  été  régulièrement  introduite  de  concert  entre  les 
saisissants  et  les  parties  saisies  ; 

Attendu  que  si,  pendant  l'instance  d'appel,  et  pour  obéir 
aux  exigences  de  la  procédurç,  les  saisissajil$  ont,  â  toute 
éventualité,  fait  à  la  demoiselle  Duvivierla  sommation  pre$- 
eritiep^  l'art^.  692  du  Code  précité,  laqiielle,  au  surplus, 
n'a  pas  éié  trausoiite  conformément  à  l'art.  693,  celte  no- 
tiiiokion  lui  laissait  bien  la  faculté  d'intervenir  ,  soit  pour 
adhérei:  à  la  deipande  en  conversion  ,  soit  pour  la  com- 
battre, mais  qu'elle  n'imposait^  en  aucune  manière,  Tobli- 
gatioa  de  l'appeler  ;  qu'en  pareille  occurrence ,  elle  se 
trouvait  virtuellement  représentée ,  comme  tous  les  autres 
créancier^,  par  les  poursuivants  qui,  maîtres  de  la  procé- 
dure, par  Ç-W^  commencée,  alors  que  seuls  ils  avaient  qua- 
lité ^  cet;  effet,  aux  termes  de  l'art.  473»  ont  pu  seuls  la  con- 
tiauei?  jusqu'à  décision  définitive  ;  qu'une  marche  contraire 
entraînerait ,  notamment  lorsque  les  créanciers  s^ont  nom- 
breux ,  des  entraves  et  des  lenteurs  incompatibles  avec 
celte  célérité  que  le  législateur  a  voulu  imprimer  à  la  pro- 
cédure en  cette  matière  ; 

Qu'il  suit  de  ces  considérations  que  les  parties  appe)an- 


(  430  ) 

les,  ayant  légalement  agi  sans  le  concours  de  la  demoiselle 
Duvivier  ,  l'arrêt  intervenu  ,  lé  29  mai  dernier  ,  sur  leurs 
conclusions ,  n'a  pu  porter  atteinte  à  des  droits  qu'elle 
n'avait  point,  et  qu'ainsi  sa  tierce-oppo  si tion  doit  être  rejetée  ; 

Attendu  ,  au  surplus  ,  que  non  seulement  elle  n'établit 
point,  mais  qu'elle  n'allègue  même  pas  la  réalité  d'un  pré- 
judice quelconque ,  actuel  et  appréciable ,  ou  Tévenlualité 
d'un  dommage  pouvant  résulter  pour  elle  du  mode  de  vente 
ordonné  par  l'arrêt  ;  que  son  impuissance  à  cet  égard  res- 
sort d'ailleurs  de  toutes  les  circonstances  de  la  cause,  puis- 
qu'il est  manifeste  qu'à  raison  du  chiffre  comparatif  des 
créances  qui  priment  la  sienne  et  du  produit  des  adjudi- 
cations ,  la  demoiselle  Duvivier  n'a ,  soit  à  présent ,  soit 
pour  l'avenir,  aucune  espèce  d'intérêt  à  critiquer  une  déci- 
sion si  avantageuse  à  toutes  les  parties ,  qu'elles  s'accor- 
dent unanimement  à  en  demander  le  maintien; 

Attendu  que  s'il  fallait  démontrer  surabondamment  en- 
core l'impossibilité  où  se  trouvait  la  demoiselle  Duvivier  de 
motiver  ses  griefs  contre  l'arrêt,  cette  nouvelle  preuve  ré- 
sulterait de  la  circonstance  grave ,  qu'avertie  dès  le  22  juin 
qu'en  vertu  de  la  conversion  ordonnée  le  29  mai,  la  vente 
des  biens  aurait  lieu  les  8  et  12  juillet  suivant ,  elle  ace- 
pendant  différé  de  saisir,  en  temps  utile ,  la  Cour  de  sa  ré- 
clamation, et  n'a  formé  la  tierce-opposition  par  elle  annon- 
cée le  22  juin  devant  le  Tribunal  de  Saint-Omer,  qu'après 
les  adjudications  consommées;  portant  ainsi,  par  ce  recours 
tardif  et  sans  profit  possible  pour  elle-même  ,  une  égale 
atteinte  aux  droits  de  toutes  les  parties  intéressées  jusqu'a- 
lors et  à  ceux  des  tiers  acquéreurs  ; 

Attendu  que  dans  cet  état  des  faits,  et  sans  qu'il  y  ait  lieu 
de  s'arrêter  aux  articulations  qui  se  sont  produites  dans  la 
cause ,  touchant  le  mobile  peu  favorable  qui  aurait  dicté  la 
tierce-opposition  ,  il  est  constant  qu'aucun  motif  sérieux  et 
légitime  né  justifie  ce  recours  que  repoussent  également  ici 
le  droit  et  l'équitté  ; 

Attendu  que  cette  solution  rend  sans  objet  l'inteiTenlion 
de  Violand  et  consorts  ; 

Par  ces  motifs,  déclare  la  demoiselle  Duvivier  non  rece- 


(  431  ) 

vable  en  sa  tîerce-opposition ,  et  la  condamne  à  50  f.  d'a- 
mende et  aux  dépens,  sauf  ceux  de  rintervenlion ,  lesquels 
demeurent  à  la  charge  des  parties  intervenantes. 

Du  28  août  1860.  i^^  chamb.  Présid.  M.  de  Moulon,  1er 
présid.  Minist.  pubL  M.  Morcrette,  l^r  avoc.-gén.  Avoc. 
MesDuhem  et  Coquelin;  avou.  M®»  Estabel  et  Lavoix. 


lo  OUTRAGES  ET  INJURES.  —  dépositaires  on  agents 

DE    l'autorité   publique.  —  EMPLOYÉS   DE    L'OCTROI.  — 
MINISTÈRE  PUBLIC.  —  POURSUITE    d'OFFICE. 

2»  MINISTÈRE  PUBLIC.  —  OCTROI.  —  OPPOSITION  A  L'EXER- 
CICE  DES  EMPLOYÉS.  —  POURSUITE  D'OFFICE  —  NON  RE- 
CEVABILITÉ. 

l»  JjCs  employés  de  l'octroi  ont  le  caractère  de  dépositaires 
OU  agents  de  l'autorité  publique  et  iion  celui  d'agents 
dépositaires  de  la  force  publique. 

Par  suite ,  les  outrages  qui  leur  sont  adressés  ,  dans  V exer- 
cice de  leurs  fonctions  constituent  un  délit  prévu  et  puni 
par  la  loi  du  il  mai  i8i9  ,  non  par  Part,  224  C.  Peu. 
et  la  poursuite  du  ministère  public  pour  la  repression  de 
ce  délit ,  ne  peut  avoir  lieu  que  sur  la  plainte  de  la 
partie  lésée.  (L.  17  mai  1819  art.  16  et  19  ,  et  26  mai 
même  année,  art.  5).  (1). 

2»  Le  ministère  'public  ne  peut  (T office  intenter  une  poursuite 

pour  oppositton   à    Veocerciee  des  fonctions  aemployé 

de  l'octroi  ;  il  faut  pour  le  rendre  recevable   Vinterven- 

lion  de  l'administration  de   V octroi.   (Loi  27  frimaire 

anSart.  15).  (2). 

(Delaplace). 

JUGEMENT. 

«  Attendu  que  Delaplace  est  convaincu  d'avoir  lo  à 
Boulogne,  le  23  août  1859,  résisté  avec  violence  et  voies 
de  fait  ,  envers  Courterelle  ,  préposé  de  l'octroi  de  la  ville 
de  Boulogne ,  agissant  pour  l'exécution  des  ordres  de  Tau- 

(1)  V.  de  Grattier.  Comment,  sur  les  lois  de  la  Presse  t.  1er  p.  205 
et  SUIT.  idem.  p.  212  à  la  note.  —  Y.  aussi  Parent.  Gomment.  Loi  du 
17  mai  1819,  art.  6. 

(2)  CofUrà  ,  Douai  26  juin  1835.  (Man.  1.  188),  idem  Gass.  13nov. 
18à3  et  Orléans  8  février  1834.  (J.  du  Pal.  à  leur  date.) 


(  432  ) 

torité  publique  et  la  perception  des  droits  ;  que  la  résis* 
tance  a  été  telle  qu'elle  a  eu  pour  résultat  de  soustraire 
le  prévenu  à  la  visite  de  sa  voiture  ;  2^  au  même  lieu  et 
le  même  jour,  outragé  pai*  paroles  et  menaces  ledit  pré- 
posé, et  le  préposé  en  chef  Boidin  appartenant  à  la  même 
administration,  tous  deux  dans  l'exercice  de  leurs  fonqtioDS, 
en  proférant  contre  eux  des  injures  grossières  telles  que 
canailleSy  manants,  en  les  menaçant  de  les  faii'e  destituer 
et  en  provoquant  Boidin  en  duel  ; 

>  Attendu  que  l'article  224  G.  Pén.  est  applicable  à  l'es- 
pèce ;  que  le  paragraphe  sous  lequel  se  trouve  comprise 
cette  disposition  est  intitulé  :  «  des  outrages  et  violences 
envers  les  dépositaires  de  l'autorité  et  delà  force  publique.  > 
Que  les  diverses  autres  di$positions  ,  notamment  l'article 
230  ,  tendent  à  démontrer  que  le  législateur  a  entendu 
protéger  en  général  les  divers  agents  chargés  -d'un  minis- 
tère de  service  public  ^  malgré  ce  que  peuvent  présenter 
de  restrictif  les  termes  de  l'article  224  ;  que  d'ailleurs  si  y 
en  toute  circonstance  les  préposés  de  l'octroi  ne  peuvent 
être  considérés  comme  des  agents  dépositaires  de  la  force 
publique,  les  lois  et  règlements  sur  la  matière  leur  délè- 
guent néanmoins ,  dans  le  cercle  de  leurs  attributions , 
l'exercice  de  la  force  publique ,  puisqu'ils  peuvent  arrêter, 
en  certains  cas  ,  et  conduire  derant  l'autorité  supérieure 
les  personnes  soupçonnées  de  fraude  ; 

»  Attendu  en  otttre  qu'il  est  établi  que  le  24  mars 
dernier  à  S*  Etienne  ,  par  suite  de  l'explosion  d'une  mine 
dépendant  des  travaux  d'exploitation  de  minerai  dirigés 
par  Delaplace ,  le  nommé  Vanwadenove  a  reçu  une  bles- 
sure extrêmement  grave  h  la  figure. 

)  Attendu  quant  à  l'application  requise  par  le  minis- 
tère public  de  l'article  15  de  la  loi  du  27  frimaire  an  8 
pour  opposition  à  l'exçrcice  des  fonctions  des  employés 
de  J'octr^li  ;  que  le  nnuislère  public  n'a  pas  qualité  par 
Suite  de  l'abstensîon  dé  Fadministratiôn  ; 

>  Le  Tribunal  déclare  Delaplace  coupable  ï»  de  rébellion; 
2»  d'outrages  par  paroles  et  menaces  envers  des  agents  dé- 


(  433  ) 
posilaires  de  la   force  publique  dans  l'exercice  de  leurs 
fonctions  ;  3o  d'avoir  par  imprudence  et  défaut  de  précau- 
tion été  involontairement  la  cause  de  la  blessure  reçue 
par  Vanwadenove  ; 

»  Déboute  le  ministère  public  quant  à  l'application  de 
la  loi  de  frimaire  an  8 ,  et  vu  les  art.  209 ,  212 ,  218,  224, 
319 ,  320  C.  Pén. ,  194,  365  C.  Instr.  crim.  ; 

p  Condamne  Delaplace  à  15  jours  d'emprisonnement 
par  corps  à  cent  francs  d'amende  et  aux  frais.  » 

Appelparleprévenuetparle  ministère  public  àminimâ, 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Donne  acte  au  ministère  public  -de  ce 
qu'il  déclare  interjeter  appel  à  minimâ  du  jugement  atta- 
qué ;  statuant  sur  cet  appel  et  sur  celui  du  prévenu  ; 

En  ce  qui  touche  le  délit  d'outrages  par  paroles  et  me- 
naces envers  un  agent  dépositaire  de  la  force  publique  : 

Attendu  que  les  préposés  de  l'octroi  ne  sont  pas  des 
agents  dépositaires  de  la  force  publique  ;  que  dès  lors  les 
outrages  qui  leur  sont  adressés  dans  l'exercice  de  leurs 
fonctions  ne  sont  pas  réprimés  par  Fart.  224  C.  Pén. 

Attendu  qu'il  résulte  des  débats  et  de  rinstruction  que 
le  23  août  1859  à  Boulogne  ,  sur  la  voie  publique  ,  le  pré- 
venu a  adressé  des  propos  outrageants  et  des  termes  de 
mépris  à  Courteville ,  employé  de  l'octroi  et  à  Boidin ,  pré- 
posé en  chef  de  Fadministration  ,  dans  l'exercice  de  ses 

fonctions  ; 

Que  ces  faits  constituent  le  délit  prévu  et  puni  par  les 
articles  16  et  19  de  la  loi  du  17  mai  1819  ; 

Mais  attendu  qu'aux  termes  de  Fart.  5  de  la  loi  du 
26  mai  1819,  dans  le  cas  d'injures  publiques  contre  up 
agent  de  Fautorité  pubUque  ,  la  poursuite  ne  peut  avoir 
lieu  que  sur  la  plainte  de  la  partie  qui  se  prétend  lésée  ; 

Que,  dans  Fespèce^  les  préposés  de  Foctroi  Courteville  et 
Boidin  n'ont  porté  aucune  plainte  ; 

Que  les  poursuites  sous  ce  rapport  soni  uon  recevables  ; 

En  ce  qui  touche  les  autres  chefs  de  la  prévention  , 
adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

TOME  xviii.  28 


(434) 

Ëmendant  le  jugement  dont  est  appel  daas  la  dispo- 
sition qui  a  déclaré  Delaplace  coupable  d'outrages  par 
paroles  et  menaces  envers  les  agents  dépositaires  de  la 
force  publique  ,  renvoie  Delaplace  de  ce  chef  de  préven- 
tion ,   ordonne  que  le  surplus  du  jugement  sortira  efiet  ; 

Et  vu  l'art.  494  C.  Inst.  crim. 

Condamne  le  prévenu  aux  frais  de  la  cause  d'appel. 

Du  14  août  1860.  Chamb.  corr.  Présid.  ,  M.  Dumon  ; 
rapp.,  M.  Cahier,  conseill.;  minist.  publ.,  M.  Carpenlier, 
avoc.-gén.  ;  avoc. ,  M«  Talon. 


ENFANT  (exposition  et  délaissement  d'). —  lieu  non  so- 
litaire. —  mère  naturelle.  —  tutelle  légale. 

La  mère  naturelle  qui  expose  el  délaisse  son  enfant,  au-dzs- 
sous  de  Vâge  de  sept  ans,  dans  un  lieu  non  solitaire,  doit 


(Pagnier.)    » 

Zélie  Pagnier  avait  été  condamnée  à  la  peine  de  trois 
mois  d'emprisonnement ,  pour  exposition  et  délaissement 
de  son  enfant  naturel,  âgé  de  3  mois  ;  on  lui  avait  appliqué 
les  dispositions  de  Fart.  252  C.  pén.  pai:  le  jugement  sui- 


vant 


(1)  La  question  ici  résolue  en  comportait  deux  ,  à  savoir  :  l»  Si  la 
mère  naturelle  est  la  tutrice  légale  de  son  enfant  ;  2o  Si  Tart.  353  C. 
Pén.  qui  agj^rayc  la  peine  prononcée  par  l'article  252 ,  alors  que  le  délit 
a  été  commis  par  les  tuteurs  ou  tutrices ,  instituteurs  ou  institutrices , 
s'applique  à  la  mère  tutrice  légale.  La  Cour  résout  ces  deux  questions 
afnrmativement. 

Pour  la  première  ,  elle  reste  d'accord  avec  son  arrêt  du  13  février 
1844.  Y.  la  discussion  de  cet  arrêt  où  sont  exposées  la  doctrine  et  la  jo- 
risprudence  sur  ces  matières.  (Jurisp.  2.  97). 

V.  d'ailleurs  pour  la  Jurisp.  générale  les  nombreux  arrêts  et  les 
auteurs  cités  R&ert.  Pal.  Vo  TPutelle  no  309  et  310  et  Suppl.  no  309. 

Pour  la  deuxième,  coasult.  Répert.  vo  Enfant  no  195  et  suiv.  notamm. 
Suppl  no  196. 

IJn  arrêt  de  la  Cour  de  Cassation  du  20  avril  1850  (J.  Pal.  t.  2. 1852 

Sag.  202)  juge ,  du  reste ,  les  deux  questions  de  même  que  la  Gourde 
)ouai  ,  pour  le  cas  de  l'exposition  dans  un  lieu  solitaire.  Il  y  a  raisons 
identiques  de  décider  pour  le  cas  de  l'exposition  dans  un  lieu  non 
solitaire. 


(  435  ) 

JUGEMENT. 

«  Considérant  qu'il  résulte  de  l'instruction  orale  et  des 
débals,  que  le  29  juin  4860,  à  Lez-Fontaine,  la  prévenue  a 
exposé  et  délaissé  ,  dans  un  lieu  non  solitaire  ,  son  enfant 
au-dessous  de  l'âge  de  sept  ans; 

»  Qu'en  effet,  la  prévenue,  qui  avait  annoncé  à  l'avance 
son  intention  de  se  décharger  de  ses  devoirs  maternels  sur 
les  adminisrateurs  de  la  commune,  a  effectivement  délaissé 
son  jeune  enfant  de  trois  mois  dans  une  grange  attenant 
à  une  habitation  ;  qu'une  femme  du  voisinage ,  attirée  par 
les  cris  de  cet  enfant ,  l'a  trouvé  abandonné  le  lendemain 
30  juin  au  soir  ; 

>  Vu  les  dispositions  des  art.  252  C.  pén.  et  194  C.  inst. 
crim.  ; 

»  Le  Tribunal  déclare  Zélie  Pagnier  coupable  du  délit 
d'exposition  et  de  délaissement,  dans  un  lieu  non  solitaire, 
d'un  enfant  au-dessous  de  l'âge  de  sept  ans  ;  en  consé- 
quence, la  condamne  en  trois  mois  d'emprisonnement,  et 
par  corps  en  16  francs  d'amende  et  aux  frais.  » 

Appel  par  Zélie  Pagnier  et  appel  à  minimâ  par  le  minis- 
tère public. 

La  Cour  a  appliqué  les  dispositions  de  l'art.  253  C.  pén. 
par  un  arrêt  dont  suit  la  teneur  : 

ARRÊT. 

LA  COUR;  — Donne  acte  au  ministère  public  de  ce  qu'il 
déclare  interjeter  appel  à  minimâ  du  jugement  attaqué  ; 

Statuant  sur  cet  appel  et  sur  celui  de  la  prévenue  ; 

Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Attendu  ,  au  surplus  ,  qu'il  est  établi  par  les  aveux  de  la 
prévenue  et  par  les  documents  produits  au  procès ,  que 
Zélie  Pagnier  est  la  mère  naturelle  de  l'enfant  exposé  et 
délaissé  par  elle  ; 

Que  par  suite ,  le  délit  commis  par  la  prévenue  est  puni 
par  l'art.  253  C.  pén.  ; 

Vu  ledit  article ,  ensemble  l'art.  194  G.  inst.  crim.  ; 

Emendant  le  jugement  dont  est  appel ,  déclare  Zélie  Pa- 
gnier coupable  d'avoir  exposé  et  délaissé ,  en  un  lieu  non 


(  436  ) 

solitaire,  son  enfant  naturel  âgé  de  moins  de  sept  ans  ac- 
complis, dont  elle  était  la  tutrice  légale  ; 

Pour  réparation,  condamne  la  prévenue  à  un  emprison- 
nement de  six  mois  ,  à  une  amende  de  25  fr.  et  aux  frais 
de  première  instance  et  d'appel. 

Du  14  août  1860,  Chamb.  correct.  Présid.  M,  Duraon; 
rapp.  M.  de  Guerne,  conseill.;  minist.  publ.  M.  Carpentier, 
avoc.-gén.  Avoc.  M^  Pellieux. 


PÉREMPTION  DiNSTANCE.—  iNTEKRUPTiON.  — ACTES  de 

t»OURSUITE. —  ACTES  DE   PROPRIÉTÉ. 

La  péremption  n'est  interrompue  que  par  des  actes  ayant  le 
caractère  d'actes  de  poursuites  qui  tendent  à  V instruction 
et  au  jugement  de  V affaire.  (G.  Proc.  art.  397  ,  399 
et  4rt/ *  ) .  y^y 

Ainsi  ne  sont  pas  vnierruptifs  de  la  péremption,  des  actes 
dans  lesquels  les  parties  se  sont  bornées,  pendant  l'ins- 
tance restée  impoursuivie ,  à  maintenir  le  fond  de  leurs 
droits  respectifs,  et,  notamment ,  leurs  prétentions  réci- 
proque à  la  propriété  de  Vimmeuble  dont  la  revendi- 
cation fait  V  objet  au  procès,  (2) 

(La  ville  de  Douai  C.  l'État.) 

Un  arrêt  de  la  Gour  de  Douai  du  11  avril  1859  (Jurisp. 
17.  157)  a  rejeté  une  demande  en  péremption  d'instance 
de  la  ville  de  Douai  contre  l'Etat  dans  les  circonstances 
déjà  rapportées  (Yid.  Jurisp.  lac.  cit.)  ;  pourvoi  a  été 
formé  contre  cet  arrêt  que  la  Cour  suprême  a  cassé  dans 
les  termes  suivants  : 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  Vu  les  articles  397 ,  399  et  401  C.  Pr .  civ.  ; 

Attendu  que  la  péremption  a  principalement  pour 
objet  de  mettre  un  terme  aux  procès  après  une  intenup- 
tion  de  poursuites  pendant  un  certain  temps ,  et  d'infiiger 
à  la  partie  la  peine  d'uoe  inaction  que  £^it  présumer 
l'abandon  de  la  procédure  ; 

Que  ,  sans  doute ,  cette  disposition  peut, fléchir  devant 


4      <.)■'■<■ 


(1-2)  Aux  autorités  citées  sous  Tarrôt  du  H  avril  1859  (Jurisp.  loc. 


cit).  ajoutez  les  notes  de  MM.  Dalloa  ,  18C0.  i.  311. 


{ mi  ) 

des  actes  commuas  aux  parties,  desquels  résulterait  que  le 
demandeur  a  eu   de  justes  motifs  pour  arrêter  ses   dili-. 
gences,  tels  qu'un  compromis,  des  projets  d'arrangement , 
une  transaction  plus  tard  annulée  ; 

Que  la  péremption  accomplie  n'a  même  pas  lieu  de 
plein  droit  et  peut  encore  se  couvrir  par  les  actes  valables 
de  Tune  ou  de  l'autre  des  parties,  antérieurs  à  la  demande, 
pourvu  que  ces  actes  soient  de  même  nature  que  ceux  qui , 
aux  termes  de  Fart.  397,  auraient  empêché  la  péremption 
de  s'acquérir  ,  et  aient  le  caractère  d'actes  de  poursuites 
tendant  à  l'instruction  et  au  jugement  de  la  cause  ; 

Attendu  que  l'arrêt  attaqué  ne  relève  aucun  acte  qui  ait 
pu  avoir  pour  effet  soit  de  suspendre,  soit  de  couvrir  la 
péremption  de  l'instance  d'appel  dont  la  Cour  impériale 
de  Douai  avait  été  saisie  par  le  Préfet  du  Nord  ; 

Que  si  ,  en  1850  ,  des  propositions  d'arrangement  ont 
été  faites  par  la  ville  de  Douai  ,  ces  propositions  ont  été 
rejetées  le  24  juin  de  la  même  année  ,  et  que  ,  de  cette 
époque  au  jour  de  la  demande  en  péremption  ,  il  s'est 
écoulé  un  temps  plus  que  suffisant  pour  que  cette  péremp- 
tion fût  acquise  ; 

Que  les  autres  faits  relevés  par  l'arrêt  attaqué  ,  d'après 
l'appréciation  même  que  cet  arrêt  en  donne ,  aboutissaient 
uniquement  à  ce  résultat  ;  que  la  ville  de  Douai  et  l'Etat  , 
pendant  que  l'instance  d'appel  restait  impoursuivie  ,  n'en 
avaient  pas  moins  maintenu  leurs  prétentions  respectives  à 
la  propriété  du  terrain  litigieux  ; 

Que  la  péremption  ne  s'attaque  qu'à  la  procédure  qui 
seule  est  éteinte  ;  qu'il  n'y  avait  donc  aucun  rapport  juri- 
dique a  établir  entre  cette  procédure  anéantie  faute  de 
poursuites  pendant  plus  de  trois  années  et  les  actes  par 
lesquels  en  dehors  de  l'instance  ,  le  Préfet  avait  manif^té 
l'intention  de  conserver  ou  avait  même  conservé  son 
droit  au  fond  ; 

D'où  il  suit  qu'en  rejetant  la  demande  en  péremption 
de  la  ville  de  Douai ,  l'arrêt  attaqué  a  violé  les  articles  de 
loi  ci-dessus  visés  ; 

Casse  etc. 


(  438  ) 

Du  23  juillet  1860.  C,  de  Cassation.  Ch.  civ.  Prés.  , 
M.  Pascalis  ;  rapp. ,  M.  Glandaz,  conseill.  ;  minist.  public, 
M.  Raynal,  avoc-gén.  ;  concl.  conf.  ;  avoc.  ,  M«s  Minierel 
et  Fournier. 


TESTAMENT  OLOGRAPHE.  — fausse  date.  —  erreur.— 

RECTIFICATION. 

Est  nul,  comme  non  daté,  le  testament  olographe  poria7it 
une  date  fausse  ou  erronée  qu'on  ne  peut  rectifier  à  Vaide 
des  documerUs  du  testament  même,  (G.  Nap.  art.  970.) 

(Hérit.  Antier  C.  Scoufflaire.) 

La  Cour  de  cassation  a  rejeté ,  dans  les  termes  suivants , 
le  pourvoi  interjeté  contre  l'arrêt  de  la  Cour  de  Douai  du 
29  nov.  1859,  et  rapporté  dans  ce  recueil,  1859,  p.  352: 

ARRÊT. 

LA  COUR; — Sur  le  moyen  unique  du  pourvoi  : 

Attendu  qu'aux  termes  de  Tart.  970  G.  Nap. ,  le  testa- 
ment olographe  n'est  valable  qu'autant  qu'il  a  été  écrit  en 
entier ,  daté  et  signé  de  la  main  du  testateur  ;  que  la  date 
consiste  dans  l'indication  exacte  de  l'an,  mois  et  jour  où  le 
testament  a  été  fait  ;  qu'une  date  erronée  n'est  point  une 
date  ,  puisqu'elle  n'indique  pas  réellement  l'époque  où  le 
testament  a  été  fait  ;  qu'ainsi  l'erreur  dans  la  date  entraîne 
la  nullité  du  testament,  comme  le  défaut  de  la  date; 

Attendu  que  ce  principe  ne  reçoit  exception  que  lorsque 
l'erreur  de  date  peut  être  réparée  et  la  certitude  de  la  date 
rétablie  par  les  énonciations  contenues  dans  le  testament 
même  ; 

Attendu  que  l'arrêt  attaqué  constate  que  le  testament 
dont  s'agit  ne  contient  aucune  énonciation  qui  puisse  servir 
à  rétablir  l'erreur  de  date  du  testament  de  Charles  Antier, 
portant  la  date  du  31  novembre  1858,  tandis  que  le  mois 
de  novembre  n'a  que  30  jours  ; 

Attendu  que  l'arrêt  attaqué,  en  décidant  que  le  testament 
de  Charles  Antier ,  portant  une  date  erronée  qui  ne  pou- 
vait se  rectifier  au  moyen  des  énonciations  contenues  dans 
le  testament  lui-même,  était  nul  comme  manquant  de  date, 


(  439  ) 

loin  d'avoir  violé  l*ai  t.  970  précité,  en  a  fait,  au  contraire, 
une  juste  application  ; 
Rejette,  etc. 

Du 31  juillet  1860.  C.  cass.  Chamb.  req.  Présid.  M.  Brière- 
Valigny,  conseill.;  rapp.  M.Nicolas,  conseill.;  rainist.  publ. 
M.  de  Peyramont,  avoc.-gén.  Avoc.  Me  Fournier. 


lo  purge.  — surenchère. — hypothèque  légale. — subro- 
gation tacite. — déchéance. 

2^  Hypothèque  conventionnelle.  —  inscription.  —  hypo- 
thèque LÉGALE .  — SUBROGATION .  — EXCLUSION .  — DÉBITEURS 
SOLIDAIRES. 

S^  Droits  de  suite  et  de  préférence. — purge. — extinc- 
tion.—hypothèque  LÉGALE. — LOI  DU  21  MAI  1858. 

lo  U acquéreur  sur  surenchère  n'est  pas  obligé  de  faire  la 
purge  si  l'adjudicataire  qui  Va  précédé  y  a  déjà  fait 
procéder.  Et  dans  ce  eus ,  le  créancier  ayant  un  droit 
de  subrogatio7i  tacite  dans  une  hypothèque  légale  est 
déchu  de  son  droit,  s'il  n'a  pas  pris  inscription  dans  le 
délai  prescrit  par  la  loi  sur  la  purge,  (C.  Nap.  art. 
2185). 

2»  L'inscription  prise  sur  une  partie  des  biens ,  en  vertu 
d'une  hypothèque  conventionnelle ,  peut  être  considérée 
comme  exclusive  de  la  convention  d'une  subrogation  à 
l'hypothèque  légale ,  bien  qxûil  soit  déclaré  dans  Vim- 
cription  qu'elle  est  prise  contre  le  mari  et  la  femme , 
débiteurs  solidaires.  Il  faut,  dans  ce  cas,  que  V intention 
de  conserver  la  subrogation  soit  clairement  manifestée, 
(G.  Nap.  art.  2134  et  2135). 

3<^  La  purge  des  privilèges  et  hypotlièques  a  pour  effet 
d'éteindre  à  la  fois  le  droit  de  suite  et  de  préférence  sur 
le  prix  de  l'immeuble  non  distribué..,,  Ella  loi  du  2i 
mai  1858 ,  d'après  laquelle  la  purge  de  l'hypothèque 
légale  laisse  subsister  le  droit  de  préférence,  sou^  les 
conditions  déterminées  par  l'art.  772 ,  est  introductive 
d'un  droit  nouveau  inapplicable  aux  ordres  ouverts  avant 
cette  loi.  (G.  Nap.  art.  2193  et  2195.  L.  21  mai  1858  , 
art.  772). 

(Florent  C.  syndics  Bouilliez.) 

Nous  avons  rapporté  un  arrêt  de  la  Cour  qui  décidait 


(  440  ) 

ces  questions ,  à  la  date  du  8  juillet  1858  (v.  Jurisp.  46. 307). 
Pourvoi  en  Cassation  a  été  formé  contre  cet  arrêt  ,  par 
Florent  pour  violation  des  articles  2421  ,  2435  ,  4483  , 
4422,  4328  Cod.  Nap.  et  fausse  application  des  articles 
2494  et  2495  même  code,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  a  dé- 
claré éteinte  ,  par  suite  de  purge  ,  Thypothèque  légale  de 
la  dame  Bouilliez  ,  à  laquelle  le  demandeur  en  cassation 
était  subrogé  ,  bien  que  ,  d'une  part  ,  cette  purge  ait  été 
suivie  d'une  surenchère  qui  en  avait  anéanti  les  effets  ; 
que  ,  d'autre  part ,  l'hypothèque  légale  ait  été  conservée 
tant  par  l'inscription  que  le  demandeur  en  cessation  avait 
fait  faire  de  sa  propre  hypothèque  ,  avec  mention  de  la 
solidarité  consentie  par  la  dame  Bouilliez  ,  que  par  celle 
dont  cette  hypothèque  légale  avait  été  elle-même  l'objet , 
à  la  diligence  d'un  autre  subrogé  ;  et  qu'enfin  ,  la  purge 
ne  frappât  d'extinction  l'hypothèque  légale,  même  supposée 
non  inscrite  en  temps  utile,  que  dans  le  droit  de  suite  ,  et 
non  dans  le  droit  de  préférence.  — A  l'appui  du  pourvoi  , 
on  a  dit  :  4^  La  surenchère,  lorsqu'elle  n'est  pas  suivie 
d'une  adjudication  au  profit  de  l'acquéreur  primitif ,  a  à 
l'égard  de  la  vente  qui  en  a  été  frappée  ,  les  effets  d'une 
condition  résolutoire.  Par  conséquent  la  purge  opérée  par 
cet  acquéreur  primitif  est  également  résolue ,  et  dès  lors, 
les  hypothèques  qu'elle  avait  anéanties  peuvent  être  vala- 
blement inscrites  jusqu'au  jour  de  l'adjudication  sur  su- 
renchère. —  2o  Dans  tousles  cas,  l'inscription  de  l'hypo- 
thèque légale  résultait  suffisamment  dans  l'espèce ,  soit  de 
l'inscription  de  l'hypothèque  conventionnelle  du  deman- 
deur en  cassation,  en  date  du  7  août  4854  ,  soit  de  l'ins- 
criçtion ,  que  le  sieur  Dellisse-Engrand  ,  autre  subrogé  , 
avait  faite  de  cette  hypothèque  légale  elle-même,  le  4er  du 
même  mois.  La  première  inscription  conservait  l'hypo- 
thèque légale ,  car  elle  était  nominativement  dirigée  contre 
la  dame  Bouilliez  en  même  temps  que  contre  son  mari  ; 
elle  énonçait  l'engagement  solidaire  de  cette  dame  ;  elle 
faisait  donc  connaître  aux  tiers  le  droit  d'indemnité  qui 
naissait  au  profit  de  la  dame  Bouilliez  et  de  son  engage- 
ment, la  sunrogation  du  créancier  dans  ce  droit  ,  et  ,  dès 
lors,  l'hypothèque  légale  qui  le  garantissait  ;  l'hypothèque 
légale  de  la  dame  Bouilliez  n'était  pas  moins  conservée 
par  l'inscription  du  sieur  Dellisse-Engrand  ,  puisqu'elle 
était  prise  pour  sûreté  de  toutes  les  sommes  que  le  sieur 
Bouilliez  pourrait  devoir  à  sa  femme,  et  qu'il  est  de  prin- 


(  441  ) 

cipe  que  Tinscriplion  prise  par  un  créancier  subrogé  , 
sans  distinction  entre  ses  droits  propres  et  ceux  de  la 
femme ,  profite  à  tous  les  autres  subrogés.  —  3^  Enfin,  et 
à  supposer  même  ,  d'une  part ,  que  la  purge  ait  conservé 
sa  force,  nonobstant  la  surenchère  dont  les  notifications 
faites  aux  créanciers  inscrits  ont  été  suivies  ,  et ,  d'autre 
part ,  que  l'hypothèque  légale  de  la  dame  Bouilliez  se  soit 
trouvée  atteinte  i)ar  cette  pur^e  ,  comme  non  inscrite  en 
temps  utile,  c'était,  avant  la  loi  du  21  mai  1858,  une  grave 
question  que  celle  de  savoir  si  la  purge  des  hypothèques 
légales,  en  produisant  Textinction  du  droit  de  suite  ,  fait 
perdre  également  à  la  femme  son  droit  de  préférence. 
La  cour  de  Cassation  s'est  ,  il  est  vrai ,  prononcée  pour 
Taffirmalive  ;  mais  ,  depuis ,  est  intervenue  la  loi  du  21 
mai  1858  ,  qui  a  donné  aux  articles  2180  et  2195  une  in- 
terprétation opposée.  Dans  celte  situation  nouvelle  ,  il  est 
permis  d'espérer  que  la  Cour  ne  persistera  pas  dans  une 
doctrine  contre  laquelle  le  législateur  lui-même  se  dé- 
clare dans  les  ordres  ouverts  depuis  cette  loi. 

ARRÊT. 

LA  COUR  ;  —  En  ce  qui  touche  l'inscription  du  27 
août  1855: 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'art.  2193  C.  Nap.  ,  les  ac- 
quéreurs d'immeubles  appartenant  à  des  maris  et  à  des 
tuteurs  ,  lorsqu'il  n'existe  pas  d'inscription  sur  lesdits  im- 
meubles à  raison  de  la  gestion  des  tuteurs  ou  des  dots  , 
reprises  et  conventions  matrimoniales ,  peuvent  purger  les 
hypothèques  qui  existeraient  sur  les  biens  par  eux  acquis  , 
en  remplissant  les  formalités  prescrites  par  Fart.  2194  ; 
qu'aux  termes  de  l'art.  2195,  si,  dans  les  deux  mois  de  l'ex- 
position du  contrat,  il  n'a  pas  été  fait  d'inscription  du  chef 
des  femmes,  des  mineurs  ou  des  interdits,  sur  les  immeu- 
bles vendus  ,  ces  immeubles  sont  définitivement  affranchis 
de  l'effet  de  l'hypothèque  appartenant  auxdits  femmes  , 
mineurs  ou  interdits  ;  que  cet  effet  de  la  purge  est  indé- 
pendant de  l'exercice  du  droit  de  requérir  la  mise  aux  en- 
chères accordé  aux  créanciers  inscrits  et  des  conséquences 
qui  peuvent  en  résulter  ,  soit  que  l'acquéreur  ,  qui  a  ac- 
compli la  purge  ,  conserve  Timmeuble  ainsi  purgé  ,  soit 
que  cet  immeuble  passe  aux  mains  du  tiers  qui  se  rend  ad- 


(  442  ) 

judicataire  sur  la  surenchère  ;  que  vainement  le  deman- 
deur se  prévaut  de  Teffet  résolutoire  renfermé  dans  la  se- 
conde adjudication  pour  effacer  la  purge  accomplie  par 
Tacquéreur  surenchéri  et  dépossédé  ;  qu'investi   du  titre 
de  propriétaire  jusqu'à  Tavénement  de  la  condition  réso- 
lutoire, cet  acquéreur  a  eu  le  droit  d'affranchir  ,  dans  ses 
mains  ,  l'immeuble    des  charges  hypothécaires   inscrites 
et  non  inscrites  qui  le  grevaient  ,  qu'à  l'égard  des  unes  et 
des  autres,  l'effet  de  ces  formalités  régulièrement  accom- 
plies par  celui  qui ,  au  moment  où  elles  l'ont  été  ,  avait 
qualité  pour  les  requérir ,  ne  peut  cesser  quand  celte  qua- 
lité elle-même  vient  à  être  effacée  ;  que  l'immeuble  dé- 
sormais affranchi  des  hypothèques,  qui  ne  sont  pas  révélées 
dans  le  délai  fixé  par  la  loi  ,  passe  libre  dans  les  mains  du 
tiers  qui   se  rend  adjudicataire  sur  la   surenchère  ;  — 
Attendu,  en  fait,  que  les  ventes  effectués  les  17  et  30  août 
1854  ont  été  suivies,  dès  le  mois  de    septembre   et   d'oc- 
tobre de  la  même  année ,  à  la  requête  des  acquéreurs  ,  au 
nombre  desquels  était  le  demandeur  lui-même,  des  forma- 
lités de  purge  des  hypothèques  inscrites  et  de  l'hypothèque 
légale,  et  que  l'inscription  dont  excipe  le  demandeur  n'a 
été  prise  que  le  27  août  1855  ,  au  cours  de  la  procédure 
d'ordre,  près  d'un  an  après  la  déchéance  écrite  dansTart. 
2195  C.  Nap.  ;  que  c'est  donc  à  bon  droit  que  l'arrêt  atta- 
qué a  considéré  cette  inscription  comme  tardive  ; 
2»  En  ce  qui  touche  l'inscription  du  7  août  1854  : 
Attendu  que  cette  inscription  ne  mentionne  pas  la  subro- 
gation, au  profit  de  Florent,  dans  l'hypothèque  légale  de 
la  dame  Bouilliez  ;  que  renonciation  de  la  solidarité  a  pu 
ne  pas  être  regardée  comme  une  expression  suffisamment 
directe  pour  avertir  les  tiers  de  l'existence  de  cette  subro- 
gation; —  Attendu,  d'ailleurs,  qu'en  donnant  à  cette  men- 
tion toute  la  portée  que  le  demandeur  y  attache  ,   elle  ne 
présenterait  pas  les  conditions  exigées  par  la  loi  pour  l'ins- 
cription de  l'hypothèque  légale  elle-même ,    et  ne  saurait 
remplacer  cette  inscription  ; 

3<>  En  ce  qui  touche  l'inscriplion  de  l'hypothèque  légale 
prise  parle  sieur Dellisse-Engrand  ,  le  1^^^  août  1854  : 


(443  ) 

Attendu  qu'il  résulte  des  termes  de  cette  inscription 
qu'elle  n'a  été  prise  que  dans  l'intérêt  du  sieur  Dellisse- 
Engrand,  et  qu'elle  ne  peut  profiter,  au  préjudice  de  celui-ci, 
aux  autres  créanciers  subrogés,  qui  n'ont  pas,  comme  lui, 
veillé  à  la  conservation  de  leurs  droits  ; 

Attendu ,  enfin ,  que  la  purge  des  hypothèques  légales 
éteint ,  tout  à  la  fois  ,  le  droit  de  suite  et  le  droit  de  préfé- 
rence ;  que  le  demandeur  se  prévaut  inutilement ,  pour  la 
première  fois  devant  la  Cour  ,  des  termes  de  la  loi  du  24 
mai  1858,  modificatifs  de  l'art.  717  G.  Pr.  ;  que  cette  loi 
introductive  d'un  droit  nouveau ,  ne  peut  recevoir  d'appli- 
cation aux  ordres  ouverts  au  moment  de  sa  promulgation  , 
4o  parce  qu'il  ne  s'agit  pas  ,  ici ,  d'une  simple  règle  de 
procédure  ,  mais  d'une  disposition  qui  touche  au  fond 
même  du  droit  ;  2^  parce  que  l'art.  4  de  cette  loi  déclare 
expressément  que  les  ordres  ouverts  avant  sa  promulgation 
seront  régis  par  les  dispositions  des  lois  antérieures  ;  que 
c'est  donc  à  bon  droit  que  l'arrêt  a  rejeté  la  coUocation 
obtenue  par  le  sieur  Florent  dans  le  règlement  provisoire 
du  10  mars  1855  ;  —  Rejette. 

Du  1er  juin  1859.  C.  deCass.  Chamb.  req.  MM.  Nicias- 
Gaillard  ,  présid.  ;  Nachet ,  rapp.  ;  Blanche  ,  avoc.-gén.  ; 
concl.  coni.  ;  Miraerel,  avocat. 


TABLE  CHRONOLOGIQUE 

DES  ARRÊTS  PUBLIÉS  DANS  LE  TOME  XVIIL 


Années 

Mois. 

Pages.  (1} 

Années.        Mois. 

Pages. 

i8il 

21  décembre 

401(2) 

1860        1er  mars 

102 

1819 

31  août 

261(3) 

1 

132 

31  décembre 

261(4) 

2    ^ 

113 

1827 

12  février 

58(5) 

5 

188 

1832 

30  mars 

58(6) 

6 

108 

— 

6  juillet 

261(7) 

6    — 

154 

183G 

(3  juillet 

261(8) 

7 

108 

1859 

ierjuin 

439(9) 

8 

116 

7  novembre 

237 

10 

94 

- 

21  novembre 

48 

12 

127 

19  décembre 

82 

16 

140 

— 

31 

92 

20 

190 

1860 

3  janvier 

8 

21 

318(1) 

6 

36 

24 

89 

9 

277 

24 

184(2) 

U 

5 

26 

121 

14 

28 

26 

180(3) 

16 

58 

27 

97 

— 

23    — 

14 

27 

119 

23    — 

21 

28 

423(4) 

24    — 

31 

—         29 

145 

26 

59 

30 

196 

26 

138 

—         20  avril 

207 

28 

140(10) 

23 

165 

... — 

30 

83 

24 

329 

31 

12 

25 

162 

31    - 

77 

25 

167 

31 

79 

25 

170 

— 

2  février 

67 

25 

170 

__ 

7 

134 

25 

175 

10    — 

73 

25 

218 

15 

8 

30 

186 

16    — 

215 

~         30  ' 

397 

23 

48 

—         1er   niai 

223 

28 

191 

—           2 

223 

— — 

28 

220 

—           4    — 

287(5) 

28 

224 

5    — 

193 

• 

—           5 

300 

(1)  Les  pages  indiquées 
des  sommées  qui  préceden 

.sont  celles 

9    — 

213 

t  les  arrêts. 

"~         10    — 

225 

(2)  à 

la  note 

—          12 

229 

(3)  à 

la  note. 

—          14 

199 

(4)  à 

la  note. 

16 

201 

(5)  à 

(6)  à 

la  note, 
la  note- 

(1)Trib.  de  Douai. 

(7)  à 

la  note. 

. 

(2)  Cass.  rejet. 

(8)  à 

la  noie. 

(3)  C.  d'Amiens. 

(9)  Cass.  rejet. 

(4)  à  la  note. 

(10)  Trib.  d'Avesnes ,  à 

la  note. 

(5)  Cass.  rejet. 

(  445  ) 


Années. 

Mois. 

Pages. 

Années.         Mois. 

Pages. 

1860 

22    mai 

257 

1860        18  juillet 

289 

22    — 

283 

18 

364 

26    - 

203 

-          20    - 

417 

29    — 

277 

23 

436(1) 

30    - 

223 

—         24    — 

397 

30 

231 

25    - 

320 

30 

326 

-         26    - 

332 

5  juin 

268 

-         31 

438(2) 

7 

241 

—             1er  août 

337 

_— 

7 

254 

—               1      — 

376 

— - 

Il     -- 

250 

-           2    - 

350 

11 

279 

2    — 

356 

— 

11     — 

281 

-           3    ~ 

359 

12    - 

324 

8    — 

369 

U    — 

248 

-          14    - 

431 

— 

15    - 

261 

14    -- 

434 

19    - 

334 

-          18    - 

386 

20 

273 

20    - 

383 

— 

20    - 

307 

28 

423 

28 

10  juillet 

267 
380 

— ^ 

(1)  Cass. 

"^■^^ 

13    - 

NOMS 

401 

(2)  Cass.  rejet. 

DKS 

PARTIES. 

Adam  C.  Davies. 

Amblard  fils  C.  syndic  Leroy-Soyez. 

Ancreman  C.  Daullé,  femme  Leblanc. 

Anlier  (héritiers^  C.  Scoufflaire. 

Arnouts  (syndics)  G.  Boileux,  femme  Arnouts. 

Assurances  maritimes  G.  Delrue  et  Cuvelier. 


257 
67 
359 
438 
180 
203 


BahrC.  ministère  public. 

Bailly  G.  Lésasse. 

Baisier  G.  Lélienne. 

Bataille  et  autres  C.  Soyez  et  C'^. 

Beaucourt  G.  Ghesquières. 

Béquet  G-  Demanez. 

Bermeries  (commune  de)  G.  Manesse  et  consorts. 

Bétrancourt,  dame  Plaisant  G.  Goillet. 

Blanchard  G.  Judet. 

Blavoët  G.  ministère  public. 


188 

83 

320 

318 

73 

337 

401 

364 

14 

77 


(  446  ) 

Bocquel  frères  C.  Denfert  et  syndic  Dewaleyne  frères.  324 

Boileux,  femme  Arnouts  G.  syndics  Arnouls.  180 

Bois  G.  Bois.  237 

Boitelle  et  consorts  G.  Topino  et  consorts*  254 

Bondu  G.  Hénin.  261 

Bonnet  G.  Dubois.                                         261  à  la  note. 

Bouillez  (syndic)  G.  Florent.  439 

Boutry  et  consorts  G.  Gailleret.  241 

Brebanl  G.  Mabille.  5 

Brochard.  397 

Brunfaut  frères  et  G^^  G.  hauts-fourneaux  de  Denain 

et  d'Anzin.  184 

C 

Gailleret  G.  Boutry  et  consorts.  241 

Gapet ,  veuve  Martin .  277 

Capon  G.  Gouture.  94 

Garlier  et  Legay  (syndic)  G.  Duprez.  170 

GarpentierG.  Pureur,  Denoyelle  et  G^e.  59 

Garpentier  et  Duwart  G.  Gillon  et  consorts.  31 

Cauvain  et  autres  G.  GîUiot.  289 
Ghamponnois  et  autres  G.  de  Rocquigny  et  autres.        307 

Gharlemaigne  G.  Lambert.  213 

GoilletG.  Bétrancourt,  dame  Plaisant.  364 

Goppens  G.  Lambert.                                     264  à  la  note. 

Gourtiers  de  Valenciennes  G.  Sabatié.  369 

Gousin  et  autres.  329 

Gouture  G.  Gapon.  92 

Dassier  G.  syndics  Haletle  fils.  28 
Daullé,  femme  Leblanc  G.  Ancreman.  359 
DaviesG.  Adam.  257 
Debève  et  G^^  G.  DubruUe-Ghevalier.  267 
Defrenne  G.  Lemaire,  femme  Defrenne.  356 
Dehée-Lefebvre  G.  DuUorier  et  consorts.  268 
DehoUain  et  O^  G.  Dubrunfaut.  79 
Delaplace  G.  ministère  public.  431 
Delcourt  (veuve)  G.  Glorieux.  229 
DelepouUe  (syndics)  G.  Lenfant.  97 
Delrue  et  Guvelier  G.  assurances  maritimes.  203 
Deltombe  et  consorts  G.  Demousselle  et  consorts.  193 
Delvainquier  G.  ministère  public  et  contributions  indi- 
rectes. 396 


(  447) 

DenianezC.  BéqueJ.  337 

Demousselle  et  consorts  G.  Deltombe  et  consorts.  193 

Denain  et  d'Anzin  ( hauts- fourneaux  de)  G.  Brunfaut 

frères.  184 

Denfert  et  syndic  Dewaleyne  frères  G.  Bocquet  frères.  324 
Denis-Beugin  G.  Foucart  et  Minart.  417 

Deret  etDupuich  G.  Deret.  116 

Deroubaix  C.  ministère  public.  48 

Desespringalle  G.  Tristam  et  Grujeot.  248 

Desfrennes  et  Sénélar  G.  ministère  public.  231 

Desmarécaux.  376 

Desmoltes  G.  syndic  Lévy  et  Lévy.  145 

Delrez  G.  Legrand.  176 

Devillers  et  Gonsorts  G.  Vanheddheghem.  119 

Devineux,  veuve  Messéant  G.  les  époux  Penton  et 

Cordier  de  la  Houssaye.  261  à  la  note. 

Ditte  G.  ministère  public.  191 

Domaines  (administration  des).  201 

Douai  (ville  de)  G.  TEtat.  436 

Douai  (ville  de)  G.  Remy  de  Gampeau.  380 

Douai  (ville  de)  G.  Sen,  Robert  et  Remy  de  Gampeau.  383 
Dubois  G.  Bonnet.  261  à  la  note. 

Dubois  G.  de  Kersabiec  et  Outters  Winckel.  424  à  la  note. 
Dubois  G.  ministère  public.  154 

Dubois  G.  Pottiez.  165 

DubruUe-Ghevalier  G.  Debève.  267 

Dubrunfaut  G.  DehoUain  et  O^.  79 

Duflos-Descarpenterie  G.  Evrard,  Verdavaine  et  autres.  92 
DuUorier  et  consorts  G.  Dehée-Lefebvre.  268 

Dupas  et  autres  G.  ministère  public.  127 

Dupire  G.  Vasseur.  113 

Duprez  G.  syndic  Garlier  et  Legay.  170 

Duvivier  G.  époux  Queval,  de  Gantés  et  Marcotte,  424 

Empis.  220 

Erraux  G.  commune  de  Saint-Aubin.  140 

Etat  (r)  G.  Sergeant  et  consorts.  21 

Etat  (1')  G.  ville  de  Douai.  437 

Evrard,  Verdavaine  et  autres  G.  Duflos-Descarpenterie.    92 

F 

Faille  G.  Ruez-Delsaux.  8 

Fîévet-Herbaux  G.  syndic  Herbaux  et  David.  199 


(  448  ) 

Florent  C.  syndic  Bouillez.  439 

Foucart  et  Minart  C.  Denis-Beugin.  4Î7 

Francomme  G.  Lescieux ,  veuve  Banquart.  196 

Franque  (héritiers)  C.  Oyez,  femme  Ponthieux.  250 

Frénor  G.  Orense  et  G^^.  261  à  la  noie. 

et 

Ganlès  (de)  G.  Quéval.  277 

Garçon  G.  Wacogne.  58 

Gavel  G.  Mouret.  435-287 

Gellé  G.  Lerat.  140  à  la  note. 

Gentil  (le).  273 

Ghesquières  G.  Beaucourt.  73 

Ghislain.  332 

Gilliot  G.  Gauvain  et  autres.  289 

Gillon  et  consorts  G.  Garpentier  et  Duwart.  31 

Glorieux  G.  veuve  Delcourt.  229 

Godart-Bonnel  G.  Leblanc-Bonnel.  108 

Godart-Bonnel  G.  Leblanc-Bonnel  et  Masson.  108 


Habourdin  G.  Lenglard.  58  à  la  note. 

Halette  fils  (syndics)  G.  Dassier.  28 

Halgand  G.  Huret.  207 

Hanicotte  G.  Serdobleel.  350 

HeninG.  Bondu.  261 

Herbaux  (syndic)  G.  Fiévet-Herman.  199 

Hernequet  et  consorts  G.  Jonas.  121 

Huret  G.  Halgand.  207 

jr 

Jesupret,  Delattre  et  Brachet.  283 

Jonas  G.  Hernequet  et  consorts.  121 

Judet  G.  Blanchard.  U 

ML 

Kersabiec  (de)  et  Outters  Winckel  G.  Dubois.  423  à  la  note. 

Ma 

Lahousse  et  Grandel-Parvillers  G.  Windsor.  8 

Lahousse  G.  Windsor.  186 

Lagonde  G.  commune  de  Somain.  401 

Lambert  G.  Gharlemaigne.  213 
Lambert  G.  Goppens.                                     264  à  la  note. 


(  M9  ) 

Laplane  (de)  G.  ministère  public.  386 

Laude  et  Warnet  G.  ministère  public.  279 

Lebeau  G.  préfet  du  Nord.  167 

Leblanc-Bonnel  G.  Godard-Bonnel.  108 

Leblanc-Bonnel  et  Masson  G.  Godard-BonneL  108 

Lefebvre  G.  commune  de  Vendegies.  132 

Lefebvre  G.  Pluchart  et  consorts.  36 

Legrand  G.  Detrez.  176 

Lemaire,  femme  Defrenne  G.  Defrenne,  356 

Lenfant  G.  syndic  DelepouUe.  97 
Lenglard  G.  Habourdin.  58  à  la  note, 
Lerat  G.  Gellé.                                              128  à  la  note. 

Leroy  G.  ministère  public.  218 

Leroy-Soyez  (syndic)  G.  Amblard.  67 

Lesage  G.  Bailly.  83 

Lescieux,  veuve  Banquart  G.  Francomme,  196 

Létienne  G.  Baisier.  320 

Lévy  (syndic)  G.  Desmottes.  145 
Loir  G .  Sim  on .                                                58  à  la  note . 

Loisel  G.  l'Union.  225 

Jfl 

MabilleG.Brebant.  5 

MaloG.  Woussen.  215 

Manesse  et  consorts  G.  commune  de  Bermeriés.  401 

Marchand  G.  ministère  public,  326 

Maubert.  334 

Ministère  public  G.  Bahr.  188 

Ministère  public  G.  Blàvoët.  77 

Ministère  pnblic  G.  Delaplace.  431 

Ministère  public  G.  Delvainquier  et  coiltrib.  indii*.  396 

Ministère  public  G.  Deroubaix.  48 

Ministère  public  G.  Ditte.  491 

Ministère  public  G.  Dubois.  154 

Ministère  public  G.  Dupas  et  autre».  127 

Miilistère  public  G.  de  Laplane.  386 

Ministère  public  G.  Leroy.  218 

Ministère  public  G.  Mopty.  224 

Ministère  public  G.  Pagnier.  434 

Ministère  public  G.  Pocholle  et  Gafier.  190 

Ministère  public  G.  Remy.  138 

Ministère  public  G.  Troquenez.  83 

Mopty  G.  ministère  public.  224 

TOME  xvni.  29 


( 


(  450  ) 

Morel  et  G»e  G.  Yvo  Vandenheede.  12 
Mourel  G.  Gavel  et  ministère  public.                      134-287 

Noël-Dieu  et  autres  G.  Soyez  et  G*©.  i02 

Notaires  (chambre  des)  G.  Rohart.  162 

o 

Orense  et  G^^  G.  Frénor.  261  à  la  noie. 

Oyez,  femme  Ponthieux  G,  héritiers  Franque.  250 

Pagnier  G.  ministère  public.  434 

Pêche  G.  ministère  public.  223 

PeUt-Solignac  G.  Pérot  et  G^e.  300 

Pisson  G.  Salvan.  89  . 

Pluchart  et  consorts  G.  Lefebvre  36 

PochoUe  et  Gafier  G.  ministère  public.  190 

Pottiez  G.  Dubois.  165 

Préfet  du  Nord  G.  Lebeau.  167 

Pureur,  Denoyelle  et  G»e  G.  Garpentier.  59 

9 

Quéval  G.  de  Gantés.  277 

Queval,  de  Gantés  et  Marcotte  G.  Duvivier.  424 

Remy  G.  ministère  public.  138 

Remy  de  Gampeau  G.  ville  de  Douai.  380       ( 
Rocquigny  (de)  et  autres  G.  Ghamponnois  et  autres.      307 

Rohart  G.  chambre  des  notaires.  102 

Roux  (de)  de  Lusson.  281 

Ruez-Delsaux  G.  Faille.  8       . 

Sabatié  G.  courtiers  de  Valenciennes,  369 

Saint- Aubin  (commune  de)  G.  Erraux.  140 

Salvan  G.  Pisson.  89 

Schamp  G.  Vendendaël.  337 

Scoufflaire  G.  héritiers  Antier.  436 
Sen,  Robert  et  Remy  de  Gampeau  G.  ville  de  Douai.    383 

Serdobbel  G.  Hanicotte.  350 

Sergeant  et  consorts  G.  l'Etat.  21 
Simon  G.  Loir.                                                 58  à  la  noie. 


(  451  ) 

Somain  (commune  de)  C.  Lagonde.  4M.  à  la  note. 

Soyez  etCie  G.  Bataille  et  autres.  348 

Soyez  et  G*©  G.  Noël-Dieu  et  autres.  402 

Topino  et  consorts  C.  Boitelle  et  consorts.  254 

Tristan  et  Grujeot  G.  Desesprîngalle.  248 

Troquenez  G.  ministère  pumic.  82 

Union  (!')  G.  Loisel.  225 

Vasseur  G.  Dupire.  443 

Vendegies  (commune  de)  G.  Lefebvre.  432 

Vandendaël  G.  Schamp.  337 

.  Vanheddeghem  G.  Devillers  et  consorts.  449 

HT 

Wacogne  G.  Garçon.  58 

Warnet  et  Laude.  279 

Windsor  G.  Lahousse.  8-486 

Woussen  G.  Malo.  245 

Yvo-Vendenheede  G.  Morel  et  G»^.  42 


TABLE  ALPHABÉTiaUE  DES  MATIÈRES. 


Nota.  Chaque  notice  de  celle  table  est  suivie  d'un  renvoi 
aux  numéros  des  mois  correspondants  de  notre  Table 
générale;  il  suffit  de  porter  en  marge  de  ces  numéros  les 
notices  de  la  table  de  Tannée,  pour  tenir  la  Table  génétale 
au  courant  de  la  Jurisprudence  de  la  Cour, 


J-L^ 


ABUS  DE  BLANCS  SEINGS. 

(Preuve  et  présomptions) .  Le  commencement  de  preuve 

Ear  écrit  d'une  remise  de  blancs  seings  peut  s'éta- 
Hr  sur  des  présomptions  tirées  de  la  nature  et  du 
contenu  de  l'écrit.  —  Si  uti  premier  arrêt  a  jugé 
qu'il  y  a  avait  commencement  de  preuve  par  écrit, 
il  y  a  chose  jugée  sur  cette  question  préalable»  4S 

Mot  nouveau. 

ABUS  DE  CONFIANCE. 

1  (Mandataire).  Le  mandataire  qui  a  cOttirttis  et  pres- 
crit ,  d'ailleurs ,  le  délit  d'abus  de  coiïfîànêé  ,  efl 
plaçant  en  son  nom  ,  sur  hypothèque  ,  tlile  sortiitle 
d'argent  qui  lui  était  confiée ,  ne  se  retid  pas  côii^ 
pable  d'un  nouveau  délit,  en  percevant  les  intérêts 

de  cette  somme.  48 

A  annoter  au  mot  Abuis  de  tonfiànaé  n»  2. 

2  (Réparation  civile, — Parenté),  Le  mari  de  la  belle- 
fille  de  celui  au  préjudice  de  qui  ont  été  commis 
des  abus  de  confiance  ou  de  blanc  seing  ne  peut 
être  considéré  comme  son  parent  ou  son  allié  et 
n'être  soumis  qu'à  des  réparations  civiles.  48 

A  annoter  au  même  mot  in  fine. 

ACTE  DE  L'ETAT-CIVIL. 

1  (Rectification),  On  peut  faire  rectifier  un  acte  de 
l'état-civil  même  dans  le  but  de  faire  constater  que 
le  nom  s'écrit  en  se  séparant  de  la  particule  de  pour 
former  deux  mots  et  non  un  seul.  273 

A  annoter  au  même  mot  n»  1 . 

2  ( — Ministère  public), he  ministère  public  ne  peut,  en 
dehors  des  cas  où  il  y  est  spécialement  autorisé 
par  la  loi ,  agir  directement  et  d'office  pour  faire 
rectifier  les  actes  de  l'état-civil.  —  Il  ne  peut  inter- 


(  453) 

jeter  appel  d'un  jugement  qui  a  ordonné  Fadjonction 
à  un  nom  de  la  particule  de ,  même  en  invoquant 
la  loi  du  28  mai  1858.  S86 

A  annoter  eod,  loc. 

ACTION  EN  GARANTIE.  V.  Frais  et  dépens. 
ADOPTION. 

(Enfant  naturel).  L'adoption  d'un  enfant  naturel  re- 
connu est  valable.  89 
A  annoter  au  même  mot  n^  i . 

ADULTÈRE. 

(Séparation  de  corps).  Lorsqu'un  mari  a  poursuivi 
devant  la  juridiction  civile  contre  sa  femme  la  sé- 

[>aration  de  corps  pour  cause  d'adultère ,  et  devant 
a  juridiction  correctionnelle  contre  le  complice,  la 
réparation  du  préjudice  causé  par  l'adultère  ,  il  y  a 
lieu  de  surseoir  à  cette  dernière  action  ,  jusqu'à  ce 
qu'il  ait  été  prononcé  définitivement  sur  la  1^.  279 

A  annoter  au  même  mot  m  fine. 

AMNISTIE.  V.  Délit. 

APPAREIL  A  VAPEUR.  V.  Imprudence. 

APPEL. 

1  Appel  correctionnel, — Délai).  Le  délai  d'appel,  en 
matière  correctionnelle,  court  dès  avant  l'expiration 

du  délai  d'opposition.  218 

A  annoter  au  même  mot  no  400  bis. 

2  (Domicile).  Lorsque,  dans  le  cours  de  la  procédure, 
le  domicile  de  l'une  des  parties  a  été  indiqué  dans 
la  signification  d'un  jugement  dont  est  appel ,  c'est 
à  ce  domicile  et  non  ailleurs  que  doit  être  faite  ,  à 
peine  de  nullité  ,  la  signification  de  Tappel ,  si  elle 

ne  Test  pas  à  personne.  262 

A  annoter  au  môme  mot  r\9  12. 
V.  Etranger ,  Saisie  immobilière. 

ARBRES. 

(Délit).  Le  fait  par  un  bûcheron  d'élaguer  des  arbres 
plantés  sur  un  chemin  public  par  ordre  de  celui  qui 
se  prétend  propriétaire  des  arbres,  ne  peut  consti- 
tuer le  délit  de  mutilation  d'arbres  ,  alors  que  l'in- 
tention délictive  n'est  pas  établie  contre  le  bûcheron. 
— Il  ne  peut  non  plus  constituer  la  contravention  de 
dégradation  ou  de  détérioration  de  chemin  public.  383 
A  annoter  au  même  mot  n»  9  bis. 


{  454  ) 

ARME. 

Les  pistolets  de  poche  et  les  couteaux  en  forme  de 
poignard  sont  des  armes  prohibées.  326 

Mot  nouveau. 

ARRESTATION  PROVISOIRE.  V.  Etranger. 

ASSURANCE  MARITIME. 

(Emprunt  à  la  grosse).  En  cas  de  sinistre  d'un 
navire  ,  lorsque  le  capitaine  a  souscrit  une  lettre  de 
grosse  pour  payer  ses  dépenses  et  a  donné  son 
chargement  en  garantie  ,  l'assureur ,  à  l'arrivée 
du  navire ,  doit  payer  le  règlement  d'avaries  après 
justifications  suffisantes  ,  sans  que  le  consignataire 
ni  le  destinataire  assuré  ne  soient  obligés  à  faire 
les  avances  de  ce  payement.  203 

A  annoter  au  même  mot  n^  12. 

ASSURANCE  MUTUELLE. 

4  (Caractère).  Une  association  entre  bateliers  ayant 

Îour  but  l'assurance  mutuelle  contre  les  risques  de 
a  navigation  sur  les  canaux  et  rivières  n'a  le  carac- 
tère d'une  société  ni  civile  ni  commerciale;  par  suite, 
elle  ne  peut  être  non  plus  une  société  anonyme.  589 
A  annoter  au  même  motn®  3. 
2  (Plaider  par  procureur).  Une  telle  association, 
d'ailleurs  licite  et  régie  par  les  principes  du  droit 
commun  peut  être  réprésentée  en  justice  par  des 
mandataires  malgré  la  maxime  :  Nul  en  France  ne 
plaide  par  procureur.  289 

A  annoter  au  même  mot  in  fine. 

ASSURANCE  TERRESTRE. 

Les  estimations  des  objets  assurés,  faites  dans  la  po- 
lice d'assurances,  ne  lient  pas  l'assureur,  quoiqu'elles 
aient  été  acceptées  par  lui  ,  et  qu'elles  aient  servi 
de  base  à  la  détermination  de  la  prime.  225 

A  annoter  au  même  mot  n»  5  bis. 

AUTORISATION  DE  FEMME  MARIÉE. 

(Séparation  de  biens).  Est  nul  comme  ne  se  ratta- 
chant pas  à  l'administration  de  sa  fortune  ,  la  con- 
vention par  laquelle  une  femme  séparée  de  biens 
s'oblige  à  payer  une  somme  de  3,378  fr.  à  un  en- 
trepreneur qui  s'engage  à  lui  construire  une 
maison  sur  un  terrain  à  elle  propre  ,  alors  surtout 


(  455  ) 

que  les  revenus  annuels  de  la  femme  ne  s'élèvent 
qu'à  660  fr.  ,  et  que  son  avoir  mobilier  n'est  que 
de  1,600  fr.  —  Dans  une  telle  hypothèse  ,  elle  a  le 
droit  de  répéter  les  sommes  qu'elles  a  payées  en  à- 
compte  et  de  faire  enlever,  conformément  à  l'art, 
licle  555  C.  Nap.  ,  les  constructions  élevées  sur  son 
terrain.  359 

A  annoter  au  même  mot  n»  12. 

AVARIE. 

1  (Abordage).  Le  délai  de  vingt-quatre  heures  im- 
parti au  capitaine  de  navire  pour  faire  sa  réclama- 
lion  en  indemnité  pour  dommage  causé  par  l'abor- 
dage, ne  court  que  du  moment  où  le  capitaine  est 
complètement  affranchi  des  soins  que  peut  exiger 
son  navire.  207 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

2  L'abordage  survenu,  par  suite  de  non  surveillance, 
sur  l'un  des  deux  navires  abordés,  doit  être  imputé 

à  faute  au  capitaine  de  ce  navire.  207 

A  annoter  eod.  loc, 

AVEU  JUDICIAIRE. 

1  (Caractère),  Ce  n'est  point  un  aveu  judiciaire  que 
la  déclaration ,  sansdomié  arie,  consignée  dans  les 
motifs  d'une  sentence  ou  décision  judiciaire.  94 

A  annoter  au  même  mot  n»  1 . 

2  Un  aveu  ne  saurait  avoir  d'effet  au-delà  du  litige 
engagé  ;  et,  par  suite,  l'aveu  au  possessoire  ne  com  - 

{►roraet  en  rien  au  pélitoire  la  cause  de  celui ,  qui 
e  passe.  94 

A  annoter  eod.  loc. 


BAIL. 

(Acte  sous  seing  privé).  V.  4. 

(Action  irrecevable),  V.  1. 

1  (Bail  à  ferme.  — Dommages).  Aux  termes  de  l'art. 
1766  C.  Nap. ,  les  infractions  aux  clausQ^  du  bail 
ne  peuvent  donner  lieu  à  des  dommages-intérêts  au 
profit  du  propriétaire,  qu'autant  qu'il  en  soit  résulté 
pour  lui  un  préjudice.  —  La  prise  de  possession  des 
terres  par  le  nouveau  fermier  rend  l'action  irre- 
cevable ,  surtout  si  des  actes  nouveaux  de  culture 


(  456  ) 

ont  modifié  l'état  des  terres  au  moment  de  la 
remise  par  le  fermier  sortant.  73 

  annoter  au  même  mot  n^  33  bis. 

2  ( — Mauvaise  culture).  Ce  n'est  point  commettre  une 
faute  de  culture  que  ne  point  se  conformer  stricte- 
ment aux  clauses  de  son  bail ,  si  d'ailleurs  il  est 
établi  que  le  fermier  a  apporté  ,  à  la  culture  des 
terres  louées ,  les  soins  d'un  bon  père  de  famille  et 
s'est  conformé  aux  usages  des  lieux.  73 

A  annoter  au  même  mot  n®  36. 

3  ( — Pigeons).  Il  est  loisible  au  fermier  sortant  de 
faire ,  à  sa  sortie ,  une  vente  générale  des  pigeons 
du  colombier  de  la  ferme  ,  pourvu  qu'il  laisse  Ja 
quantité  de  couples  nécessaires  pour  constituer  un 
fond  de  colombier  en  rapport  avec  l'importance  de 
l'exploitation.  73 

A  annoter  au  même  mot  n^  42  bis. 

(Cession  de  cuentèle).  V.  6. 

À  (Congé).  Doit  être  réputé  fait  sans  écrit,  le  bail  qui 
n'est  constaté  que  par  un  acte  sous  seing-privé  , 
revêtu  de  la  signature  unique  du  bailleur,  le  pre- 
neur ne  sachant  ni  écrire  ni  signer.  —  Quoique  le 
Ereneur  soit  entré  en  jouissance  des  lieux  loués,  le 
ailleur  a  pu  signifier  congé  en  considérant  la  loca- 
tion comme  verbale  et  faite  à  l'année.  5 
A  annoter  au  même  mot  n»  92, 

5  Si ,  postérieurement  au  congé  ,  l'immeuble  a  élé 
vendu,  l'acquéreur  a  le  droit  d'expulser  le  locataire, 
conformément  à  l'art.  4743.  G.  ISap. 

A  annoter  au  même  mot  n»  96. 

(Infraction  AUX  clauses  du  bail).  V.  1. 
(Maison  de  commerce).  V.  6. 

6  (Obligation  du  bailleur.  —  Concurrence  déloyale). 
Le  propriétaire  d'une  maison  de  commerce  qu'il  a 
exploitée  personnellement  et  qu'il  a  ensuite  louée 
avec  même  destination ,  cession  de  clientèle  et  en- 

Sagement  ^de  ne  pas  exercer  la  même  industrie 
ans  la  même  ville  ,  ne  peut ,  sans  enfreindre  ses 
obligations  et  se  rendre  passible  de  dommages- 
intérêts  ,  donner  à  bail  à  un  tiers  une  autre  maison 
contiguë  à  celle-là,  en  permettant  qu'il  y  soit  formé 
un  établissement  rival  du  premiei*.  Il  suscite  ainsi 


5 


(  457  ) 

.  à  son  successeur  uoe  concurrence  déloyale  dont  il 
devient  responsable  par  son  quasi-délit.  364 

A  annoter  au  même  mot  n^  1  bis, 

(QuAsi-DÉLrr).  V.  6. 
(Signature  unique).  V.  4. 
(Usage  des  lieux).  V.  2. 
(Vente  de  l'immeuble).  V.  5. 

V.  Compétence  commerciale. 
BANQUIER.  V.  Compte-courant,  Novation^ 
BLESSURES  PAR  IMPRUDENCE.  V.  Imprudence. 
BREVET  D'INVENTION. 

1  (Addition).  La  validité  du  brevet  d'invention  étant 
établie,  la  demande  en  nullité  des  certificats  d'addi- 
tion devient  sans  objet.  83 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 
(Ayant  cause).  V.  5. 
(Brevet  étranger).  V.  5. 

2  (Contrefaçon),  Bien  que  le  contrefacteur  ne  fasse 
pas  usage  des  moyens  employés  par  le  breveté 
pour  éviter  certains  inconvénients  (l'explosion  dans 
l'espèce)  et  qu'il  reste  ainsi  exposé  à  certains 
accidents,  il  n'en  a  pas  moins  porté  atteinte  aux 
droits  du  breveté  en  s'appropriant,  au  préjudice  de 
celui  -  ci ,  le  moyen  faisant  l'objet  principal  du 
brevet,  83 

A  annoter  au  même  mot  n^  6 

3  Ne  peut  être  considéré  commij  contrefaçon  l'emploi 
d'un  procédé  tombé  dans  le  domaine  public  ,  mais 
rignalé  dans  un  brevet  comme  préférable  à  un 
autre.  —  Ainsi  des  poulies  à  eslroppes  extérieures 

ou  intérieurs.  —  Celles-ci  étant  préférables.  215 

A  annoter  au  même  mot  n®  5. 

(Domaine  public).  V.  3. 
(Héritiers  du  breveté).  V.  5. 
(Moyens  négligés).  V.  2. 

4  (Moyens  nouveaux).  C'est  un  résultat  complet  et 
nouveau ,  portant  avec  lui  tous  les  caractères  sus- 
ceptibles de  constituer  une  invention  ou  découverte 
industrielle  nouvelle  ,  remplissant  toutes  les  condi- 
tions exigées  par  la  loi ,  pour  être  justement  bre- 
vetée ,  que  le  brûlement  des  gaz  qui  se  dégagent 


(  4^58  ) 

cl  se  développent  dans  les  opérations  de  vidange 
des  matières  fécales  à  l'aide  d'un  fourneau  hermé- 
tique ne  recevant  d'air  par  aucune  ouverture  exté- 
rieure, brûlant  complètement  lesdits  gaz,  sans  qu'il 
y  ait  dispersion  d'odeur  méphitique  au  dehors.  83 

A  annoter  au  même  mot  n®  22. 

(Opération  de  vidange).  V.  4. 

5  (Validité).  Est  valable  le  brevet  pris  en  France  par 
l'héritier  ou  ayant-cause  du  breveté  à  l'étranger 
pour  la  même  invention.  184 

A  annoter  au  même  mot  in  fine, 

V.  Compétence  civile. 

BRIS  DE  CLOTURE.  V.  Clôture. 

CAUTIONNEMENT.  V.  théâtre. 

CHASSE. 

(Clôture).  Onnepeutréputer  clos  un  terrain  entouré 
de  fossés  qui  sont  à  sec  et  que  l'on  peut  franchir 
facilement.  191 

A  annoter  au  même  mot  n»  9. 

CHEMIN  PUBLIC,  V.  Arbres. 

CHOSE  JUGÉE. 

(Faux),  Il  y  a  chose  jugée  vis-à-vis  de  ceux  qui,  ayant 
été  parties  dans  une  instance  en  exécution  de  tes- 
tament, viennent  attaquer  ce  même  testament,  soit 
Ear  action  de  faux,  soit  par  voie  de  faux  incident. — 
a  chose  jugée  existe  encore  ,  alors  que  de  la  pre- 
mière demande  ont  été  rejelées  toutes  réserves  ci'ac- 
tion  en  dol  et  fraude  pour  le  même  acte.  108 

A  annoter  au  même  mot  n^  35. 

CLOTURE. 

(Bris  de  clôture. — Réparations  civiles)  L'immunité 
accordée  à  ceux  qui  ont  commis  des  soustractions 
au  préjudice  de  leurs  parents  ou  alliés ,  de  n'être 
soumis  qu'à  des  réparations  civiles ,  ne  peut 
s'étendre  au  délit  de  bris  de  clôture,  alors  même 
qu'il  se  rattache  à  un  vol  commis  dans  les  condi- 
tions de  l'article  380  C.  pén.  82 
A  annoter  au  même  mot  in  fiiu. 

V.  Chasse. 


(  459  ) 
COMMISSAIRE-PRISEUR. 

(Vente  de  meubles).  Les  commissaires  -  priseurs 
peuvent ,  sans  sortir  de  leurs  attributions  et  sans 
empiéter  sur  celles  des  notaires  ,  procéder  à  la 
vente  publique  aux  enchères  d'objets  mobiliers  , 
et  insérer  dans  leurs  procès-veabaux  la  stipulation 
de  terme.  162 

A  annoter  au  même  mot  in  fine, 

COMMUNAUTÉ  ENTRE  ÉPOUX. 

1  (Administration, — Dispositions  gratuites).  Le  mari, 
dans  l'administration  delà  communauté,  peut  dis- 
poser des  effets  mobiliers  qui  la  composent ,  h 
titre  gratuit  et  particulier  ,  au  profit  de  toutes  per- 
sonnes capables  ,  sans  en  excepter  ses  héritiers 
présomptifs  qui  ne  doivent  dans  ce  cas  aucun 
rapport  à  la  communauté,  pourvu  qu'il  ne  s'en  soit 
pas  réservé  l'usufruit ,  et  alors  qu'il  ne  peut  êlre 
présumé  avoir  fait  aucune  fraude  aux  droits  de  la 
femme  ou  à  ses  héritiers.  113 

A  annoter  au  même  mot  n»  21 . 

2  (Préférence  pour  reprises).  L'hypothèque  légale  de 
la  femme  mariée  ,  en  cas  de  faillite  de  son  mari  , 
peut ,  pour  les  obhgations  conctractées  avec  lui  et 
résultant  d'actes  sous  seing-privé  sans  date  certaine, 
s'exercer  vis-à-vis  des  créanciers  de  cette  faillite  , 
du  jour  même  des  obligations. — En  cas  d'admission 
des  créances  de  la  femme  au  passif  de  la  faillite, 
les  créanciers  chiro^raphaires  ou  les  syndics , 
ayants  cause  du  failli ,  sont ,  dans  tous  les  cas  , 
sans  droits  pour  refuser  l'exercice  de  l'hypothèque 
légale.  180 

A  annoter  au  même  mot  n»  81 . 

COMMUNE. 

(Action  civile).  V.  1. 

1  (Autorisation  de  plaider.  —  Juridiction  correclion" 
nelle).  Les  communes  doivent  se  faire  autoriser 
pour  plaider  devant  la  juridiction  correctionnelle  , 
comme  partie  plaignante  exerçant  l'action  civile. 
Il  peut  être  sursis  à  l'action  civile  et  accordé 
délai  en  appel  pour  que  l'autorisation  puisse  être 
demandée  par  la  commune.  380 

A  annoter  au  même  mot  n©  3  bis. 


(  460  ) 

2  (Bieiis  communaux).  Les  communes  qui,  aniérieu- 
reraent  à  la  loi  du  28  août  1792,  usaient  librement 
sur  les  Partiaux,  comme  sur  terre  vaine  et  vague, 
du  passage  et  du  pacage ,  avaient  une  possession 
suffisante  pour  être  dispensées  de  les  reveqdiquer 
dans  les  cmq  ans  de  la  promulgation  de  celte  loi. — 
Des  faits  de  possession  seigneuriale  ne  pouvaient 
fonder  la  possession  exclusive,  ni  tenir  lieu  du  titre 
authentique' exigé  du  seigneur  ,  pour  la  preuve  de 
son  droit  de  propriété  à  rencontre  du  drort  attribué 

à  la  commune.  -401 

A  annoter  au  même  mot  n®  38  bis. 

3  (Domaine  de  UEtat),  Les  dispositions  légales  qui 
ont  réuni  au  domaine  de  TEtat  les  biens  commu- 
naux possédés  par  des  bénéficiers  ecclésiastiques  ou 
des  monastères ,  n'ont  en  aucune  façon  aflecté  le 
droit  des  communes,  résultant,  suivant  les  lois  de 
1792  et  1793  ,  de  leur  possession  des  terres  vaines 

et  vagues  au  moment  de  la  publication  de  ces  lois.  401 
A  annoter  au  même  mot  n^  30. 
(Maire).  V.  5. 

4  (Partiaux),  Les  terrains  connus  en  Hainaut  sous  le 
nom  de  Partiaux  étaient  communaux  de>  leur 
nature.  *  401 

A  annoter  au  même  mot  n»  46  bis, 
(Passage  et  pacage).  V.  2. 
(Possession  seigneuriale).  V.  2. 
(Possession  utile).  V.  6. 

{Prescription),  La  prescription  du  domaine  communal 
ne  peut  courir  au  profit  du  maire  de  la  commune.  401 
A  annoter  au  même  mot  n»  38  bis, 
6  (Rues  et  places  publiques).  Un  terrain  affecté  de  tout 
temps  à  l'usage  des  habitants  et  qualifié  place  pu- 
blique ne  peut  être  l'objet  d'une  possession  utile 
à  prescription.  92 

A  annoter  au  même  mot  n^  49. 

(Sursis).  V.  1. 

(Terre  vaine  et  vague).  V.  2. 

COMPÉTENCE  CIVILE. 

1  {Cession  d^  brevet  d* invention).  Est  de  la  compé- 
tence des  Tribunaux  civils  la  contestation  née  de  la 
cession  d'un  brevet  d'inventipn,  faite  à  un  fabricant 


486 


(  461  ) 

par  rinventetr ,  moyennant  une  prime  fixe  ou  une 
redevance  proportionnelle  sur  les  bénéfices  du 
fabricant.  79 

A  annoter  au  même  mot  n®  12  bis. 
2  {Routes  impériales).  Les  Tribunaux  sont  compétents 
pour  connaître  des  prétentions  de  l'Etat  au  droit 
d'assujétir  les  propriétés  voisines  des  routes  impé- 
riales à  une  servitude  particulière  d'écoulement 
des  eaux.  21 

A  annoter  au  même  mot  n^  22. 

COMPÉTENCE  COMMERCIALE. 
(Acte  civil).  V.  2. 

1  {Bail  de  matériel  d'usine).  Le  bail  fait  par  un  coitt- 
merçant  d'objets  mobiliers  formant  un  matériel 
industriel  destiné  à  l'exploitation  d'une  usine  ,  est 
un  acte  commercial.  Les  constestations  relatives  à 
cet  acte  sont  de  la  compétence  des  Tribunaux  de 
commerce. 

A  annoter  au  même  mot  n^  32  bis. 

2  {DécUnatoire) .  Le  Tribunal  de  commerce  ,  saisi 
par  un  commerçant  d'une  demande  en  payement 
d'une  dette  commerciale  réclamée  à  un  commer- 
çant ,  n'a  pas  compétence  pour  connaître  d'une 
demande  reconvenlionnelle  ou  en  compensation 
opposée  directement  à  l'action  principale  par  le 
défendeur  ,  lorsque  cette  demande  est  fondée  sur 
un  acte  civil,  puta  la  délégation  d'une  créance 
civile.  —  La  créance  du  demandeur  principal  étant 
liquide  et  exigible,  tandis  que  la  cession  ella  réalité 
de  la  créance  cédée  sont  déniées  ^  le  juge  ne  doit 
pas  surseoir  à  statuer.  356 

A  annoter  au  même  mot  n^  98. 

(DÉa^ÉGATION).  V.  2. 

(Liquidité).  V.  2. 
(Reconvention)  V.  2. 

3  {Saisie-arrêt).  Les  Tribunaux  de  commerce  sont 
incompétents  pour  connaîti^e  de  la  validité  d'une 
saisie  arrêt.  145 

A  annoter  au  même  mot  n^  105  bis, 

COMPTE. 

(Révision).  Les  comptes  approuvés  et  suivis  de 
règlements  entra  parties  ne  peuvent  donnéf  lieu  à 


(  462  ) 

aucune  révision,  s'il  n'est  allégué  aucune  fraude  ou 
doL  97 

A  annoter  au  même  mot  n^  10  bis. 

COMPTE  COURANT. 

(Banquier),  Le  banquier  qui  s'est  chargé  pour  un 
tiers  avec  lecjuel  il  a  un  compte  courant ,  de  faire , 
par  l'entremise  d'agent  de  change,  à  la  Bourse  de 
Paris,  des  reports  à  terme ^  peut,  à  une  liquidation, 
exécuter  son  client,  en  portant  au  compte  de  celui-ci 
le  prix  d'achat  et  le  prix  de  vente  des  valeurs. en 
report ,  sans  plus  reporter  ,  et  peut  exiger  son 
solde.  59 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

V.  Contrainte  par  corps,  Novalion. 

CONCURRENCE  DÉLOYALE.  V.  Bail. 

(CONTRAINTE  PAR  CORPS). 

(Non-commerçant).  La  contrainte  par  corps  ne  peut 
être  prononcée  contre  un  non  commerçant  à  raison 
d'une  condamnation  obtenue  ,  pour  le  solde  d'un 
compte  courant  par  les  liquidateurs  d'une  banque  , 
alors  même  que  le  crédité  a  acheté  et  revendu  des 
titres  divers.  418 

A  annoter  au  même  mot  n»  22  bis, 

V.  Etranger,  Frais  et  dépens. 

CONTREFAÇON.  V.  Brevet  d'invention. 

CONVENTION  MATRIMONIALE. 

(Loi  applicable.  —  Coutume  de  St.-Am^nd.-^  Gains 
de  survie).  Les  avantages  matrimoniaux  ou  gains 
de  survie  résultant  des  coutumes  locales  (ici  de  la 
coutume  de  St.-Amand)  ont  été  abolis  par  la  loi  du 
17  nivôse  an  2 ,  quant  aux  époux  mariés  depuis 
cette  loi.  193 

A  annoter  au  même  mot  n^  7  bis. 

CONVERSION.  V.  Saisie  immobilière ,  Tierce-oppo- 
sition. 

COURTIER. 

(Courtage  clandestin).  Une  maison  de  commerce  peut 
avoir ,  sur  une  place  où  existent  une  bourse  com- 
merciale et  des  courtiers  de  marchandises ,  un 
mandataire  ou  un  commissionnaire  dans  les  termes 
de  l'art.  91  C.  com.,  faisant,  pour  cette  maison,  ses 


(  463  ) 

achats  et  ses  ventes  ,  pourvu  que  leurs  opérations 
soient  sérieuses ,  qu'elles  aient  lieu  à  prix  ferme  et 

Eour  les  intérêts  du  commettant.  —  Hors  ces  deux 
ypothèses,  un  producteur  ou  un  négociant  qui  veut 
se  servir  d'un  mtermédiaire  pour  la  vente  de  ses 
denrées  ou  marchandises,  doit  nécessairement  avoir 
recours  à  un  courtier  légalement  institué ,  sous 
peine  d'être  poursuivi  comme  complice  du  courtier 
clandestin.  369 

A  annoter  au  même  mot  n^  i . 

COUTUME  DE  SAINT-AMAND.  V.  Convention  matri- 
moniale. 

CUMUL  DE  PEINES.  V.  Peine. 

DÉBIT  DE  BOISSONS.  V.  Police  administrative. 
DEGRÉ  DE  JURIDICTION. 

(Héritier).  Le  taux  de  la  demande  dirigée  contre  des 
co-héritiers  se  divise  entre  eux,  suivant  leurs  droits 
successifs  ,  de  manière  que  le  quotient  de  chacun 
et  non  la  somme  demandée  à  tous ,  règle  le  degré 
de  juridiction.  Il  n'importe  que  la  demande  men- 
tionne un  recours  éventuel  à  une  liquidation.  121 
A  annoter  au  même  mot  n^  30. 

DÉLIT. 

1  {Amnistie).  L'amnistie  du  16  août  1859  s'applique 
aux  délits  dont  les  poursuites  sont  engagées  ou  à 
introduire  comme  à  ceux  qui  ont  été  jugés ,  pourvu 
qu'ils  soient  antérieurs  au  décret. 

Mot  nouveau. 

2  {Qualificaiion).  Il  appartient  aux  juges  correction- 
nels saisis  par  le  juge  d'instruction  de  la  connais- 
sance des  délits ,  d'en  faire  l'appréciation  légale  et 
d'en  préciser  la  qualification. 

A  annoter  eod.  loc. 
V.  Arbres. 

DEMANDE.  V.  Intérêts. 

DEMANDE  NOUVELLE. 

1  {Nullité  d'acte.  — Enquête).  Doit  être  considérée 
comme  nouvelle  et  non  recevable  en  appel ,  la  de- 
mande afin  d'être  autorisé  à  recommencer  une  en- 


(  464  ) 

quête  dont  on  réclame  la  nullité ,  si  cette  demande 
n'a  pas  été  produite  devant  les  premiers  juges.  237 

A  annoter  au  même  mot  n»  42  bis, 

2  (Privilège).  Il  ne  naît  pas  une  demande  nouvelle  , 
mais  un  moyen  nouveau  de  ce  qu'en  appel  est  in- 
voqué un  privilège ,  alors  qu'en  première  instance 
on  n'avait  prétendu  qu'à  un  droit  général  de  dis- 
traction sur  un  cautionnement.  145 
A  annoter  au  même  mot  no  13  bis. 

DÉNONCIATION  CALOMNIEUSE. 

{Partie  civile).  La  preuve  de  la  dénonciation  calom- 
nieuse peut  ,  par  la  partie  civile  comme  par  le 
ministère  public,  se  faire  tant  par  les  procès-verbaux 
et  rapports,  qu'au  moyen  de  la  preuve  testimoniale. 
Il  n'importe  que  l'on  ne  puisse  rapporter  la  dénon- 
ciation écrite.  134  et  287 
A  annoter  au  même  mot  n^  2  bis. 

DÉSHÉRENCE.  V.  Succession. 

DÉSISTEMENT. 

(Réserves).  Est  nul  le  désistement  fait  avec  réserves, 
même  générales,  il  doit  être  pur  et  simple.  48 

A  annoter  au  même  mot  no  7. 

DOMICILE. 

1  (Femme  mariée).  La  femme  ne  peut  être  con- 
trainte d'habiter  avec  son  mari  qu'autant  que 
celui-ci  justifie  qu'il  peut  la  recevoir  suivant  son 
état.  213 

A  annoter  au  même  motno  Âbis. 

2  (Femme  séparée  de  ùorps).  L'ordonnance  du  pré- 
sident du  Tribunal,  qui  autorise  la  femme  deman- 
deresse eii  séparation  de  corps  â  se  retirer  dans 
une  maison  autre  gué  celle  de  son  mari  ^  a  pour 
effet  d'attribuer  à  la  femme  ,  vis  â  Vis  ce  dernier 
et  relativement  à  la  procédure  en  séparation  ,  un 
domicile  propre.  237 

A  annoter  au  même  mot  no  5. 

3  Si  c'est  hors  de  la  France  que  la  femme  a  été  atïto- 
risée  à  résider,  les  assignations  à  elle  délivrées, 
notamment  celle  dont  il  est  parlé  en  l'art.  261  C. 
proc*  civ.  en  matière  d'enquête,  doivent  l'être  avec 
observation  des  délais  spéciaux  prescrits  par  l'art. 


(m) 

73  C.  proc.  ;  riiiQbservatioQ  de  çe^  déiftis  e^itr^iR^ 
la  nullité  de  l'enquête.  237 

A  annoter  eod  loc. 

PRÉSIDENCE  A  l'étranger. — ASSIGNATION).  V.   2. 

V.  Appel. 
DONATION. 

(Alinéation  à  rente  viaçère)^  On  pejiit  voir  une  dona- 
tion déguisée  dans  u^  acte  qualifie  venie^  où  le  prix 
stipj^i^é  coAsi^te  en  ùnç  rente  viagère  dont  les  an- 
nuités spiît  en  disproportion  avçç  la  valeur  des 
biens  qjui  font  robjçt  du  contrat,  r- Une  telle  dona- 
tion .çst  4'(iilleurs  j^évacable  pour  survenançe  d'en- 
fant ,  a^ors  même  que  ^  depuis  celte  survenançe , 
le  donateur  aurait  reçij  le  payement  de  prestation^ 
convejptues  dans  le  contrait.  337 

A  annoter  au  raême  mot  n^'  i . 

V.  Partage  d'ascendant. 

DONATION  ENTRE  ÉPOUX.  V.  Q^oUté  lOisponiblç. 

ECOLE.  V.  Jnslruction  publique. 

EFFET  DE  GOMMEBCE.  Y.  NoyA^iop. 

ENFANT, 

{Exposition  fit  délaissement).  La  mère  natureH^  ^u«i 
expose  et  délaisse  çon  enfant,  au-dessous  deFàge 
de  sept  ans  ,  dans  un  lieu  non  solitaire  ,  doit  âtre  , 
comme  tutrice  légale  ,  punie  en  vertu  des  disposi- 
tions de  l'art.  358  G.  pén. ,  et  non  en  vea^tu  /des 
dispositions  de  l'art.  ^53  du  même  Code.  ASi 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

ENFANT  NATUREL.  V.  Adoption. 

ENQUÊTE.  ' 

jÇFaculté  du  juge).  L'énumération  des  causes  de  reprf9r 
ches  contenue  en  l'art.  283  C.  proc,  ,civ.  p'e?|t  pas 
limitative  rj  tQ3ulie3  les  fois  jpe  le  jîip|if  de  r.eprocne 
n'^^  point  4?  qeyj  pi;évus  ç^r  fi'^ticle  pr^cït^  ,  les 
nifigistrats  o^t  pn  j)|0i,iV;0ir  disçrétioppaire  pouf  l'ç^d- 
môUw  çu  le  rejeter ,  my^^t  h^  q^const^çe^^— 
{Smvenii  plusjmrs  espèfi^).  140 

V.  9ew«àe  »f)1iiwllie. 

TOME  xvm.  30 


(466) 

ENREGISTREMENT  (droits  d*).  V.  Frais  et  dépens. 

ESCROQUERIE. 

(Billets  escomptés).  \.  A. 

1  (Caractère).  Ne  rentre  pas  dans  les  fermes  de  Tart. 
405  G.  pén.  le  fait ,  par  un  préposé  coniptable , 
d'avoir  inscrit  sur  une  liste  de  paye  des  noms  d'ou- 
vriers supposés,  si  celte  indication  mensongère  n'a 
été  fournie  que  pour  parvenir  au  remboursement 
d'une  somme  précédemment  avancée  par  le  comp- 
table de  ces  deniers.  —  Il  en  est  ainsi  même  des 
insertions  ,  sur  des  feuilles  de  quinzaine  ,  de  noms 
qui  ne  devaient  pas  s*y  rencontrer,  si  Ton  ne  prouve 
pas  contre  le  rédacteur  des  listes  le  concert  frau- 
duleux et  la  remise  d'espèces. — Le  fait  seul  de 
l'inscription  d'un  nom  d'ouvrier  sur  une  liste  de 
paye  ,  qui  sera  d'ailleurs  vérifiée ,  ne  constitue  pas 
une  manœuvre  frauduleuse.  127 

A  annoter  au  même  mot  n»  4 . 

2  (Caractère.  —  Tentative).  Doit  être  condamné 
comme  ayant  commis  le  délit  de  tentative  d'escro- 
querie celui  qui,  par  des  manœuvres  frauduleuses , 
a  fait  tout  ce  qu'il  a  pu  pour  se  faire  remettre  et 
s'approprier  des  valeurs  d'autrui ,  alors  même  que, 
prévenu  de  faux  pour  les  actes  sur  lesquels  il  ap- 
puyait ses  manœuvres,  il  y  aurait  eu  ordonnance 

de  non^lieu,  quant  à  ce  dernier  délit.  48 

-k  annoter  eod.  loc. 

3  Ne  constituent  pas  les  manœuvres  frauduleuses  né- 
cessaires pour  établir  la  tentative  d'escroquerie ,  le 
fait  d'avoir  réclamé  dés  sommes  d'argent  pour  dom- 
mages-intérêts où  indemnités  ,  avec  sommation  et 
offre  de  remettre  ,  en  cas  de  paiement  et  contre 
récépissé  ,  toute  note  ou  document  établissant  la 
dette.  ;  48 

A  annoter  eod.  loc. 

4  Le  fait  par  un  individu  de  demander  à  un  autre  , 
après  se  l'être  rendu  favorable'pàr  certaines  ma- 
noeuvres ,  dé  lui  prêter  une  somme  d'argent  ,  en 
en  promettant  de  rendre  le  double  de  cette  somme 
et  de  payer  un  double  intérêt  ,  et  ,  pour  obtenir 
cette  somme  ,  de  faire  'au  prêteur  un  bon  de  cer- 
taine somme,  de  faire  remplir  le  billet  par  un  lîérs 


(  m  ) 

et  de  le  présenter  à  l'escompte ,  sans  cependant  en 
recevoir  le  montant,  constitue  non  le  délit  d'escro- 
querie ,  mais  celui  de  tentative  d'escroquerie.  334 
A  annoter  eod.  loc. 

(Dommages-intérêts).  V.  3. 

(Faux).  V.  2. 

(Feuilles  de  quinzaine).  V.  4. 

(Manœuvres).  V.  1.  2.  3.  4. 

(Paye  d'ouvriers. — Avances).  V.  1. 

(Prêt  a  double  intérêt).  V.  4. 

ÉTABLISSEMENT  INCOMMODE. 

{Voisinage).  Peuvent  donner  lieu  à  des  dommages- 
intérêts  comme  nuisant  au  voisinage: — Les  vibra- 
tions et  ébranlements  causés  par  le  jeu  des  appa- 
reils industriels.  —  L'incommodité  plus  qu'ordinaire 
d'un  bruit  continuel  occasionné  par  la  machine  qui 
meut  l'usine.  — 11  appartient  au  juge,  à  raison  du 
caractère  transitoire  de  la  situation,  de  substituer, 
aux  travaux  indiqués  par  les  experts,  une  somme . 
d'argent  à  titre  de  doinmages-intéréts.  12 

A  annoter  au  même  mot  in  fine. 

ÉTRANGER. 

i  (Appel).  L'acte  d'appel  vis-à-vis  d'une  personne 
domiciliée  à  l'étranger  et  n'ayant  pas  de  résidence 
connue  en  France  ,  doit  être  signifié  ,  à  peine  de 
nullité  ,  au  parquet  du  procureur-général  près  la 
Cour  devant  laquelle  l'appel  est  porté  et  non  au 
parquet  du  Tribunal  qui  a  rendu  le  j  ugement  attaqué.  261 
A  annoter  au  même  mot  n^  35. 

2  (Arrestation. — Formalités) .  Lorsque ,  pour  procéder 
à  l'arrestation  d'un  débiteur  dans  son  domicile  ,  le 
juge  de  paix  ,  conformément  à  l'art.  781  ,  §  -5  C. 
proc,  modifié  par  la  loi  du  26  mars  1855,  commet 
le  commissaire  central  de  police,  et,  à  son  défaut 
deux  autres  commissaires  de  police  ,  l'arrestation 
peut  valablement  être  faite  avec  l'assistance  de  l'un 
de  ces  deux  derniers  magistrats,  sans  que  l'huissier 
soit  tenu  de  mentionner ,  dans  son  procès-verf)al 
d'arrestation ,  l'empêchement  du  commissaire 
central,  premier  délégué.  257 

A  annoter  an  même  mot  n^  59. 

3  L'ordonnance  du   président  /rendue  en  vertu  de 


(468) 

Fart.  15  de  la  loi  du  17  avril  1«32,  à  l'effet  d'auto- 
riser l'arrestation  provisoire  d'un  étranger,  ne  doit 
pas  comnieltre  d'huissier  pour  y  procéder  ;  cette 
arrestation  peut  être  opérée  par  l'huissier  choisi  par 
le  créancier.  257 

A  annoter  au  même  mot  n^  59  bis, 

EXCUSABILITÉ.  V.  Faillite. 
EXPLOIT.  V.   Huissier. 

FAILLITE. 

1  {Action  individuelle).  Le  créancier  d'une  faillite  , 
admis  au  passif  pour  sa  créiance  caulionnée  par  la 
femme  do  failli,  ne  pmi,  du  cbét  de  celle-ci,  parti- 
cimr  à  la  distribution  de  l'actif  ,  pour  la  même 
créance.  --Le  droit  ma  repris  de  la  femme  du 
failli  'doiît  étne  justifié  &i  établi ,  pour  permettre  à 
son  créancier  de  Tetiercer  vis^à-vis  de  la  faillite. — 
Ce  icréandver  «ke  sautât  être  admis  pour  telle  justi- 
fication à  sprouveT,  devait  la  juridiction  commer- 
ciale ,  que  le  failli  la  toiïcbé  la  dot  de  sa  femsie.  199 

A  annoter  au  même  mot  n^  69  Us, 

(Banqueroute  simple).  V.  6. 

2  (Cessation  depaiememl).  La  «cessation  de  pa^ments , 
daitô  les  cas  m  les  conditioiis  d'un  atermoiement 
accordé  au  débileur  par  le  Tribunal  de  commerce 
n'^Bt  pas  éèé  rempUes^  ne  doit  pas  is'ent^idre 
comioe  existant  iseulensbeot  dès  le  jaur  du  sursis. 
Le  juigiemienit  d'aitercnoiement  non  Téailisé  ^constate 
par  lui-même  un  état  atntérieor  de  ^^essation  de 
payiemeatSv  Par  .suite ,  l'ouverture  de  la  faillite  doit 
être  fixée  à  l'époque  dies  poui^ites  antédeurevient 
dirigées  cOTtre  ie  débçbteur,  102 

A  annoter  an  même  mot  n°  13. 

3  La  juridiclion  correctionnelle  a'M  f)as  bée  par  le 
j^gement  du  Tribunal  de  commerce  (^i  a  fixé  la 
date  deJaH}essation  depayemients  d'un  rcOfiHDerçaiat 
failli.;  JJihii  appartient  d';en  apprécier  eft  d'en.déler- 
minier /l'^q^KKiue.  326 

A  annoter  eod.  loc. 

4  (Droits  des  syndics, — Inscmptian  cimservaiaire)^ 
Les  syndics  en  opér^Hrt  i'inscriplioiii  de  l'art.  ^0 
CL  comi9.  ae  font  ^' un  «icte  çons^rtvatoîre,  itoquel 


(469) 

ne  suffirait  ni  pour  décliner,  vis<*à*vis  de  la  fail- 
lite ,  la  validité  de  quittances  de  loyers  non  échus 
qui  n'auraient  pas  été  transcrites....  470 

5  Ni  pour  conférer  aux  créanciers  un  droit  hypo- 
thécaire qui  pût  modifier  les  droits  de  chacun  à 
Touverture  de  la  faillite»  .  480 

A  annoter  au  même  mot  n^  52  bis, 

6  (Excusabilité).  La  condamnation  correctionnelle 
du  failli  n'est  pas  un  obstacle  à  son  excusabilité , 
qui  ne  doit  cependant  paâ  être  prononcée  dans 
certaines  circonstances. 

A  annoter  au  même  mot  n<>  448. 
^Femme-caution).  V.  4. 
(Hypothèque).  V.  5. 
(Juridiction  civile).  V.  4. 
(Juridiction  correctionnelle).  V.  2. 

7  {Ouverture, — Liquidation  antérieure).  Lorsqu'avant 
la  déclaration  d'une  faillite  et  dans  rintervalle  de 
temps  qui  remonte  de  cette  déclaration  à  Touverture 
de  cette  même  faillite ,  définitivement  fixée  sur  de- 
mande en  report ,  il  y  a  eu  mise  en  liquidation  de 
la  maison  du  commerçant  en  vertu  d'un  traité ,  les 
créanciers  de  cette  liquidation  ont  un  droit  de  pré- 
férence sur  les  créanciers  signataires  du  traité  ,  et 
les  créanciers  ,  non  signataires  du  traité  ,  dont  les 
créances  sont  antérieures  à  l'ouverture  de  la  faillite, 
doivent  recevoir  leur  dividende  au  marc  le  franc , 
comme  tout  créancier  de  la  faillite ,  sans  participer 
au  privilège  de  ceux  qui  ont  traité  avec  les  liquida- 
teurs ,  ni  sans  souffrir  de  \^  préférence  que  les 
créanciers  signataires  doivent  subir.  —  Il  n'y  a  pas 
lieu  non  plus  à  constituer  pour  eux  une  masse  dis- 
tincte qui  serait  formée  avec  les  éléments  existant 
avant  la  conclusion  du  traité  ou  à  l'ouverture  de  la 
faillite.  28 

A  annoter  au  même  mot  n®  22. 

8  (Paiement  de  loyers  non  échus.)  Le  locataire ,  en 
avançant  à  son  bailleur,  sur  les  loyers  à  échoir,  des 
fonds  qui  ont  aidé  celui-ci  à  remplir  ses  obligations, 
dans  un  temps  plus  ou  moins  rapproché  de  sa  fail- 
lite, ne  fait  pas  un  paiement  qui  puisse  être  annulé. 
—  Il  n'en  peut  être  de  ce  paiement  comme  de  celui 
qui  serait  fait  par  le  débiteur  à  l'un  de  ses  créan^ 


(  470  ) 

ciers  au  préjudice  des  autres  ;  alors  d'ailleurs  que 
la  connivence  et  la  fraude  n'ont  pas  été  démontrées 
avoir  préjudicié  à  la  masse,  170 

A  annoter  au  même  mot  n®  84  bis. 

(Quittance  de  loyers).  V.  4. 
(Reprises  de  la  femme. — preuve).  V.  1. 
(Sursis).  V.  2. 

FALSIFICATION  DE  DENRÉES. 

(Cafés).  Des  cafés  vendus  avec  un  mélange  de  20  ou 
40  p.  o/o  de  grains  inertes  et  impropres  à  l'alimen- 
tation doivent  être  considérés  comme  denrées  falsi- 
fiées. 231 
Mol  nouveau. 

FAUX  INCIDENT  CIVIL. 

{Action).  La  procédure  de  faux,  en  matière  civile ,  est 
toujours  incidente  et  ne  peut  donner  lieu  à  une 
action  civile  principale  autre  que  la  plainte.  108 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

FEMME  MARIÉE,  V.  Domicile. 

FRAIS  ET  DÉPENS. 

(Actes  produits  au  cours  d'une  instance).  V.  2. 

1  {Action  en  garantie).  Les  acquéreurs  de  propriétés, 
menacés  d'y  voir  s'y  établir  des  servitudes  ,  sont 
fondés  dans  leurs  recours  contre  les  vendeurs  et  ne 
doivent  pas  supporter  les  frais  de  leur  appel  en 
garantie.  21 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

2  {Enregistrement).  Les  droits  d'enregistrement  dus 
au  domaine  pour  les  actes  produits  au  cours  d'une 
instance  judiciaire  et  non  soumis  de  leur  nature 
à  l'enregistrement  dans  les  trois  mois  de  leur  date 
doivent  rester  à  la  chai'ge  de  la  partie  qui  suc- 
combe. 254 

A  annoter  au  même  mot  n^  4  bis. 

S  (Mineurs  acquittés).  Les  prévenus  de  crimes  ou 
délits,  mineurs  de  moins  de  16  ans,  ayant  agi  .sans 
discernement ,  doivent  être  condamnés  aux  frais 
de  la  procédure.  329 

4  (—Contrainte  par  corps).  Les  frais  qui  précè- 
dent ayant  le  caractère  de  réparations  civiles  envers 


(m) 

le  trésor,  la  conlrainte  par  corps  ne  pe^t  ,  dans 
ce  cas,  être  prononcée  contre  les  mineurs.  329 

A  annoter  au  même  mot  n^  21  bis. 

FRANÇAIS. 

{Séparation  de  territoire).  Est  étranger  tout  individu 
né  en  France  d'un  père  qui ,  né  lui-même  en 
France ,  est  fils  d'étranger  devenu  Français  par 
habitation  du  sol  où  par  réunion  de  territoire  ,  et 
ensuite  redevenu  étranger,  en  1814  ,  par  sépara- 
tion de  territoire ,  alors  que  ni  Tun  ni  l'autre  n'ont 
fait,  dang  les  délais  de  la  loi  de  1814  et  du 
C.  Nap.  ,  la  déclaration  de  vouloir  se  fixer  en 
France  ou  de  devenir  Français.  167 

A  annoter  au  même  mot  in  fine. 

GAINS  DE  SURVIE.  V.  Convention  matrimoniale. 

GARDE  CHAMPÊTRE. 

( Injures.  —  Outrages) .  Lorsqu'un  garde-champêtre 
agit  pour  l'exécution  soit  d'un  jugement,  soit  des 
lois  et  règlements  de  police  ,  dont  la  surveillance 
lui  est  confiée  par  l'autorité  municipale  ,  il  doit 
être  considéré  comme  un  agent  dépositaire  de  la 
force  publique  ,  et  les  outrages  publics  qui  lui  sont 
adressés  dans  l'exercice  de  ces  actes  ,  doivent  être 
punis  suivant  les  dispositions  de  l'art.  224  C.  pén. , 
non  d'après  celles  de  l'article  6  de  la  loi  du  25 
mars  1822.  220 

A  annoter  au  même  mot  n^  21 . 


HUISSIER. 

{Exploit).  Un  huissier,  associé  commanditaire  ne  peut 
instrumenter  pour  la  société  dans  laquelle  il  est 
intéressé.  Les  exploits  qu'il  délivre  et  signifie  dans 
ce  cas  sont  viciés  de  nullité.  267 

A  annoter  au  même  mot  n»  1  bis. 

HYPOTHÈQUE. 

(Droits  de  suite  et  de  préférence).  V.  4. 

i  {Hypothèque  légale.— Femme  ma^^iée).  L'inscription 
prise  sur  une  partie  de  biens,  en  vertu  d'une  hypo- 
ihèque     conventionnelle ,     peut    être  considérée 


coïtitàè  excilâ^ivè  âe  la  convention  d'âne  subrogatioà 
à  rhyçothô^Ëie  légalô  ^  bien  qu'il  soit  défclaré  dans 
rinscription  qu'elle  est  prise  contre  le  «rari  et  la 
femme,  débiteurs  solidaires.  Il  faut ,  dans  ce  cas  , 
que  l'intention  de  conservef  la  subrogation  soît 
clairement  manifestée.  4â9 

A  annoter  au  même  mot  n^  42; 

2  (Légataire  apparent).  L'hypothèque  consentie  par 
un  légataire  universel  apparent  tombe  avec  le  tes  ■ 
tameûl  même  qui  servait  de  base  au  prétendu 
droit  de  celui-ci ,  alors  d'ailleurs  que  le  béné- 
ficiaire, 46  cette  hypothèque  ne  prouve  pas  une  , 
bonne  foi  fondée  sur  une  erreur  insurmontable.        4 19 

A  annoter  au  même  mot  n®  85. 

(Loi  DU  21  MA1 1858).  V.  4. 

3  (Purge).  L'acquéreur  sur  surenchère  n'est  pas 
obligé  de  faire  la  purge  si  l'adjudicataire  qui  Ta 
précédé  y  a  déjà  fait  procéder.  Et  dâîiS  Ce  cas  ,  le 
créancier  ayant  un  droit  de  subrogation  tacite  dans 
une  hyjpolhèque  légale  est  déchu  de  son  droit ,  s'il 
n'a  paâ  pris  inscription  dans  le  délai  prescrit  pai*  la 

loi  sur  là  purge.  439 

A  annoter  aii  même  mot  n^  76. 

4  La  pufge  des  privilèges  et  hypothèques  a  pour 
effet  d'éteindre  à  la  fois  le  droit  de  suite  et  de  pré- 
férence sur  le  prix  de  l'immeuble  non  distribue.... 
Et  la  loi  du  21  mai  1858  ^  d'après  laquelle  la  purge 
de  l'hypothèque  légale  laisse  subsister  le  droit  de 
préférence,  sous  les  conditions  déterminées  par  Fart. 
772 ,  est  introductive  d'un  droit  nouveau  inappli- 
cable aux  ordres  ouverts  avant  celte  loi.  439 

A  annoter  eod.  loc, 

5  (Subrogation):  V.  1.  3. 
V.  Communauté  entre  époux. 


IMPRUDENCE  (BLESSURES  ET  HÔMlCIDE  PAR). 

(Appareils  à  vapeur).  Tout  fabricant  qui  a  livré  ùù 
appareil  queléonquë  déslinè  à  dohteiilr  de  là  VâpèUr 
sàriâ  que  éette  piéée  ait  été  soumise  aux  éprôuvei 
prësci4tës  par  les  règleitiénts  d'adttiinistration  pu- 
blique j  ëJlcouri  la  responsabilité  prévue  par  les  arti-  - 


(473) 

des  319  et  320  C.  pén. ,  si  la  confe<îtioii  et  les  défec- 
tuosités de  l'appareil  ^  non  conformes  aux  prescrip- 
tions des  mêâiés  règlements»  le  eonstitueiit  eu  faute.  S83 
A  annoter  au  même  mot  n<^  1 . 

INSTRUCTION  PUBLIQUE. 

(Ouverture  d* école).  La  déclaration  au  maire  ,  exigée 
sotis  les  peines  édictées  par  Tart.  29  de  la  loi  du 
15  iXïSitÉ  1850 ,  de  tout  mstituteur  qui  veut  ouvrir 
une  école  libre,  doit  être,  en  diitré,  adressée  par  le 
poétulant  au  recteur  de  racadémie  ,  au  procureur 
impérial  et  au  sous-préfet  ;  il  ne  suffirait  (jué  trois 
déclarations  distinctes  fassent  adressées  ,  Tune  au 
maire,  une  autre  au  procureur  impérial,  tinè  autre 
au  sous-préfet.  154 

A  annoter  an  rhêitie  hiot  m  fine. 

INTÉRÊTS. 

(Demande),  fiaiis  les  obligations  consistant  en  uii 
paiement  d'une  ôomitie  d'àrgéiit,  les  intérêts  ne  sont 
dus  que  du  jour  où  ils  ont  été  formellement  deman- 
dés en  justice  ,  là  demande  dii  capital  ne  Suffit  pas 
pour  leur  dolmer  cours  ,  à  moins  que  la  loi  ne  les 
fasse  épurir  de  plein  droit.  Si  la  production  dans 
uUe  faillite  peut  être  assimilée  à  une  demande ,  le 
créancier  qui,  postérieurement  à  la  clôture  du  con- 
trat d'union ,  demande  le  paiement  de  la  créance  , 
n'en  n'est  pas  moins  sans  droit  pour  réclamer 
contre  le  failli  les  intérêts  courus  depuis  la  produc- 
tion ,  si  ces  intérêts  n'ont  pas  déjà  été  demandés.  350 
A  annoter  au  même  mot  n»  4  bis* 

jr 

JUGE  DlNSTilUCTrON. 
(Appel).  V.  3. 

1  (Ëtendué  de  V information).  Le  juge  d'instruction, 
saisi  d'une  information  par  le  procureur  impérial , 
peut  instruire  non-seulement  sur  le  fait  et  les  cir- 
constances qui  font  l'objet  spécial  dii  réquisitoire , 
mais  encore  constater  tout  ce  qui,  dans  le  cours  de 
l'informalion ,  est  porté  à  sa  connaissance ,  alors 
surtout  que  les  faits,  révélateurs  de  différents  délits, 
ont  un  rapport  direct  avec  le  fait  principal  qui  a 
motivé  cette  information.  48 

A  annoter  au  même  mot  n»  2. 


(  474  ) 

(Incompétence).  V.  3. 

2  ( Liberté  provisoire  sous  caution).  Les  dispositions 
de  la  loi  du  4  avril  1855 ,  sur  la  faculté  donnée  aux 
juges  d'instruction  d'accorder  la  main-levée  des 
mandats  de  dépôt ,  sont  tout-à-fait  indépendantes 
des  dispositions  des  art.  H3  et  1140.  mst.  ciim. 
sur  la  liberté  provisoire  sous  caution.  Par  suite ,  il 
reste  toujours  interdit  aux  juges  d'instruction  d'ac- 
corder à  l'inculpé  la  mise  en  liberté  sous  caution , 
lorsque  le  titre  de  l'accusation  emporte  une  peine 
afflictive  ou  infamante.  281 

A  annoter  au  même  mot  n®  1  bis. 

(Mandat  de  dépôt),  V.  2. 
(Opposition).  V.  3. 

3  (Ordonnance  de  renvoi) .  Le  droit  d'opposition  ac- 
cordé au  procureur-général,  par  la  loi  du  17  juillet 
1856,  contre  les  ordonnances  du  juge  d'instruction, 
dans  le  cas  de  renvoi  devant  la  police  correction- 
nelle, ne  peut  s'exercer  postérieurement  au  juge- 
ment du  Tribunal  qui  s'est  déclaré  incompétent , 
encore  bien  que  le  délai  de  dix  jours  depuis  l'or- 
donnance ne  soit  pas  encore  écoulé,  r— Il  n'y  a  ,  dans 
ce  cas  ,  d'autre  recours  contre  le  jugement  que  la 
voie  de  l'appel.  332 

A  annoter  au  même  mot  n«  2  bis, 

(Renvoi  en  police  correctionnelle),  V.  3. 

LEGS. 

1  (Argent  comptant).  Le  legs  de  tout  le  mobilier  qu'on 
délaissera  au  jour  de  son  décès  ,  ne  comprend  pas 
nécessairemejit  l'argent  comptant  ni  les  créances. — 
Une  signification  plus  restreinte  doit  être  donnée 
à  ces  expressions,  si  des  faits  et  circonstances  appa- 
raît que  telle  a  été  l'intention  du  testateur.  250 

A  annoter  au  même  mot  n®  34. 

2  (Interprétation),  Si  des  époux ,  s'étant  mariés  sous 
le  régime  de  la  communauté  telle  qu'elle  est  régie 
par  le  Code  Napoléon ,  avec  donation  au  profit  du 
mari  de  la  moitié  en  usufruit  des  immeubles  que  la 
femme  délaissera  à  son  décès ,  la  femme  donne 
ensuite  à  son  mari,  parteslament,  une  rente  viagère, 
différentes  sommes  et  différents  objets  mobiliers  de 


(  475  ) 

la  communauté,  en  disant  que  «  ces  legs  seront  con- 
fondus avec  les  donations  qu'elle  a  faites,  à  quelque 
titre  que  ce  soit,  par  son  contrat  de  mariage  ,  »  les 
avantages  faits  au  mari  doivent  être  limités  aux 
legs  résultant  du  testament.  —  Le  mari  ne  peut  les 
cumuler  avec  la  moitié  des  objets  de  la  commu- 
nauté. —  Encore  moins  peut-il  prétendre  à  cette 
moitié  sans  charge  de  dettes. — Il  en  est  ainsi,  alors 
surtout  que  le  mobilier  de  la  communauté  a  été 
apporté  en  entier  par  la  femme ,  et  que  le  passif  de 
cette  communauté  est  supérieur  à  l'apport  de  la 
femme.  175 

A  annoter  au  même  mot  n9  4S  bis. 
V.  Hypothèque. 

LIBERTÉ  PROVISOIRE.  V.  Juge  d'instruction. 

LITISPENDANCE. 

(Cautionnement).  Il  y  a  litispendance  alors  qu'une 
demande  en  remise  de  cautionnement  est  formée 
devant  un  Tribunal  de  commerce  ,  et  que  la  ques- 
tion de  validité  de  saisie  du  même  cautionnement 
à  été  portée  devant  un  Tribunal  civil.  145 

A  annoter  au  même  mot  n»  1 . 

LIVRES  DE  COMMERCE. 

(Représentation  et  communication) .  h^  créancier  d'une 
faillite  ne  peut ,  en  s' opposant  à  l'admission  d'un 
autre  créancier  au  passif ,  demander  la  communi- 
cation de  tous  les  livres  et  registres  de  ce  dernier  , 
dans  le  but  de  vérifier  la  créance  qu'il  conteste  ; 
il  doit  indiquer  les  documents  dont  il  entend  parti- 
culièrement se  prévaloir  à  l'appui  de  ses  préten- 
tions.— Les  syndics  d'une  faillite  doivent  en  appel, 
communication  aux  créanciers  qui  auraient  négligé 
delademand.er  plus  tôt,  de  tous  les  documents  qui 
concernent  la  faillite  et  dont  ils  sont  dépositaires.  324 
A  annoter  au  même  mot  n^  2. 

LOUAGE.  V,  Bail. 

MANDAT.  —  MANDATAIRE. 

(Emprunt).    Le    mandat  général  n'embrasse  pas  le 
pouvoir  d'emprunter.  67 

A  annoter  au  même  mot  n^  5. 


(  476  ) 
V.  Abus  de  confiance. 

MATIÈRES  D'OR  ET  D'ARGENT. 

(Registre).  L'obligation  de  tenir  des  registre  d'achats 
et  de  ventes  de  matières  d'or  et  d'argent  est  im- 
posée à  tous  ceux  qui  s'occupent  de  la  vente  de  ces 
matières,  pour  leur  compte  personnel  ou  d'un  tiers , 
par  échantillons  ou  autrement ,  lorsqu'ils  en  tien- 
nent en  dépôt  ctiez  eux.  396 
A  annoter  au  même  mot  n^  2. 

MINEUR  DE  MOINS  DE  SEIZE  ANS.  V.  Contrainte 
par  corps,  Frais  et  dépens. 

MINISTÈRE  PUBLIC.  V.  Acte  de  l'élat-civil ,  Octroi. 

NOTAIRES.  V.  Commissaire-priseur. 

NOVATION. 

(Effets  de  commerce).  Ne  peuvent  être  considérés 
comme  opérant  novation  ni  les  renouvellements , 
avant  échéance  ,  de  billets  souscrits  comtne  moyeu 
de  circulation  et  de  crédit ,  pour  le  nivellement 
d'un  compte-courant,  417 

—  Ni  les  billets  à  ordre  que  reçoit  le  vendeur  en 
paiement  d'un  prix  de  vente.  350 

A  annoter  au  même  mot  n"  2. 

o 

OCTROI. 

4  (Action  du  ministère  public).  Le  ministère  pnblic 
ne  peut  intenter  une  poursuite  pour  opposition  & 
l'exercice  des  fonctions  d'employé  de  l'octroi  que 
sur  l'intervention  de  l'administration  de  l'octroi.        431 
A  annoter  au  même  mot  n®  i . 

2  (Outrages  et  injures).  Les  employés  de  l'octroi  ont 
le  caractère  de  dépositaire  ou  agetits  de  l'autorité 
publique ,  et  non  celui  d'agents  dépositaires  de  la 
force  publique.  Les  outrages  qui  leur  sont  adressés 
sont  punis  par  la  loi  du  17  mai  1819 ,  sur  la  plainte 
delà  partie  lésée.  431 

A  annoter  au  même  mot  n^  16  bis. 

OUTRAGES  ET  INJURES.  V.  Garde-champêire ,  Oc- 
troi. 


(  477  )   . 

ip 

PARTAGE  (act«  de),  V.  Servitude. 
PARTAGE  D'ASCENDANT: 

( Acceplalion ) .  Lorsqu'à  la  suite  d'un  acte  de  par- 
tage et  donation  d  ascendant,  les  copartageaots  èe 
déclarent  bien  et  dûment  partagés,  en  s'interdisant 
aucune  réserve  l'un  contre  l'autre ,  il  ne  peut  plus  y 
avoir  lieu  â  rapport  par  aucun  d'eux  à  la  succession 
du  donateur  ,  a  moins  qu'il  ne  soit  prouvé  que  ^es 
sommes  ou  objets  ont  été,  antérieurement  au  par- 
tage ,  employées  au  seul  profit  de  l'un  des  copar- 
tageants  à  l'insu  du  donateur.  416 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

PARTIE  CIVILE.  V.  Dénonciation  calomnieuse. 

PEINE. 

(AggravaUon).  Les  agents  de  radminislratioû  des 
douanes  ,  encore  bien  qu'ils  eussent  été  chargés  de 
la  surveillance  d'un  navire  épave,  par  suited'échoue- 
ment ,  ne  peuvent  encourir  une  aggravation  de 
peine ,  pour  Iç  vol  qu'ils  commettent  sur  ce  navire , 
alors  que  la  vent^  en  avait  été  faite  et  que  leur  ?^ur- 
veîJIance  avait  dû  cesser.  190 

A  annoter  au  même  mot  n®  ^ . 

(Cumul).  Le  principe  du  non  cumul  4es  peiftes  e'^r 
plique  au  délit  d'importation  frauduleuse  id^  mar- 
chandises prohibées ,  commis  en  même  temps  que 
celui  de  rébellion  contre  la  douane.  77 

A  annoter  eod,  loc. 

PÉREMPTION. 

(Actes  irUerruplifs) .  La  péremption  n'est  interrompue 
que  par  des  actes  ayant  le  caractère  d'adesde  pour- 
sikites  qui  tendent  à  l'îiiâliiuctian  ^t  au  jugement 
de  i'affaii\e.  436 

lA.anikoter  ^au  même  mot  ^  i . 

PHAfRMAGIE.  —  PHARMACIEN. 

i  (Tréparottlonmédidnalé) .  Le  pharmacien  qui  débite 
une  préparation  médicmale  ^ans  une  prescription 
fôite  par  un  docteur  ou  par  un  officier  de  santé 
commet  un  délit  prëvçi  par  la  loi  de  germinal  an 
XI,  et  puni  par  l'arrêt  de  règlement  du  parlement 


.    (  478  ) 

de  Paris  du  23  juillet  4748,  lequel  à  force  de  loi. — 
Une  solution  d'iodure  de  potassium  doit  être  con- 
sidérée comme  une  préparation  médicinale.  376 
A  annoter  au  même  root  ûo  6  bis, 
2  (Remèdes  secrets).  Doit  être  réputée  remède  secret 
toute  préparation  médicinale  qui  n'est  pas  inscrite 
au  codex  ou  qui  n'a  pas    été  composée  par  un 
pharmacien  ,  sur  l'ordonnance  d'un  médecin  pour 
un  cas  particulier  ou  qui  n'a  pas  été  autorisée  par 
le  gouvernement.  —  Les  pharmaciens  ne  peuvent 
vendre    aucun  remède  secret  et  la  loi  qui  en  ré- 
prime l'annonce  s'applique  également  à  la  vente.       376 
A  annoter  au  même  mot  m  11  bis, 

PLACE  PUBLIQUE.  V.  Commune. 
POLICE  ADMINISTRATIVE. 

1  (Débit  de  boissons).  Pour  que  le  délit  d'ouverture 
illégale  de  débit  de  boissons  puisse  exister ,  il  faut 
que  le  débit  ouvert  soîtl'objet  principal  dé  l'industrie 
exercée.  188 

Mot  nouveau. 

2  Un  débitant  dont  le  cabaret  était  ouvert  antérieure- 
ment au  décret  du  29  décembre  1851  ne  commet 
pas  de  délit  si ,  ayant  cédé  depuis  1851  sa  maison  et 
ses  ustensiles  de  cabaret  à  un  tiers ,  il  continue  de 
débiter  dans  le  même  local  au  nom  et  pour  le  compte 

de  son  concessionnaire.  224 

A  annoter  eod.  toc. 

PRESCRIPTION.  V.  Commune. 

(Privilège).  V.  Demande  nouvelle. 
(Purge).  V.  Hypothèque. 

« 

QUOTITÉ  DISPONIBLE. 

(Donation  entre  époux).  Doit  être  réputée  caduque  et 
de  nul  efiet  la  disposition  testamentaire  par  laquelle 
répoux,  ayant  trois  enfants,  donne  à  l'un  d'eux 
l'usufruit  d'un  immeuble,  pour  en  jouir  à  partir  du 
décès  de  son  conjoint ,  sauf  réduction ,  si  la  c^uotité 
disponible  était  dépassée,  au  quart  en  usufruit  de  la 
totalité  de  ses  biens ,  alors  que  le  testateur ,  dans  le 
même  acte ,  donne  d'abord  à  son  conjoint  la  moitié 
de  tous  ses  biens  en  usufruit.  14 

A  annotier  au  même  mot  n^  5. 


(  479  ) 

REMÈDES  SECRETS.  V.  Pharmacie,  Pharmacien. 
RENTE  VIAGÈRE.  V.  Donation ,  Vente. 
RÉPARATION  CIVILE.  V.  Abus  de  confiance ,  Clôture. 

SAISIE  ARRÊT.  V.  Compétence  commerciale. 

SAISIE  IMMOBILIÈRE. 

f  Cofwersion) .  Le  jugenaent  qui  refuse  la  conversion 
d'une  vente  d'immeubles  sur  saisie  arrêt  devant 
notaire  esl-il  sujet  à  appel  ?  277  et .423 

A  annoter  au  même  mot  n»  40  bis. 

SENTIER.  V.  Servitude. 

SÉPARATION  DE  BIENS.  V.  Autorisation  de  femme 
mariée. 

SÉPARATION  DE  CORPS.  V.  Adultère /Domicile. 

SERMENT. 

{Formule).  Le  serment-litis-décisoire  doit  porter  exclu- 
sivement sur  le  point  en  litige  et  ne  rien  contenir 
dans  sa  formule  qui  y  soit  étranger.  116 

A  annoter  même  mot  n^  5  bis. 

SERVITUDE. 

(Arcs  boutants).  V.  3, 
(BoETEs).  V.  3: 
(Copropriété).  V.  1. 

i  (Destination  du  père  de  famille) ,  L'article  694?  C. 
Nap.  s'applique  exclusivement  à  l'existence  des 
servitudes  en  faveur  d'un  fond  aliéné.  Il  ne  peut 
être  invoqué  pour  établir  la  copropriété.  —  Il  ne 
concerne  pas  d'ailleurs  les  servitudes  non  apparentes, 
comme  la  servitude  du  tour  d'échelle.  229 

A  annoter  au  même  mot  n^  i  bis. 

2  (Égout  des  toits).   Les  conditions  de  la  servitude 
d'égout  des  toits  peuvent  aussi  bien  s'exécuter  au . 
moyen  d'un  récipient  que  par  la  chute  des  eaux  sur 
le  sol. 

A  annoter  au  même  mot  n^  15. 

3  (Mitoyenneté. — Preuve).  La  mitoyenneté  d'un  mur 
est  suffisfianrnent  démontrée  par  l'existence  d'arcs- 


(  480  ) 

boulants  et  de  boëles  du  côté  de  celui  qui  l'invoque.  229 
A  annoter  au  même  motn®  34  bis. 
A  (Partage).  Bien  qu'un  acte  de  partage  soit  muet 
sur  les  conditions  d$  Fe^çrcice  d'nndl^oît  depa^ 
sage  ,  il  doit  être  entendu  virtuelleraent  ej  néces- 
sairement que  le  droit  devra  s'exercer  suivant 
l'usage  le  plus  complet  du  bâtiment  où  conduit  le 
passage,  d^ns  toutes  les  parties  de  ce  bâtiment  où  il 
faut  avoir  accès.  94 

A  annoter  au  même  mot  n^  59. 
5  {S^Uiêr).lje  sentier  qui^  existant  de  temps  imnté'- 
môrial,  sert  à  relim*  deux  grandes  voies  de  commu* 
nication,  doit  être  considéré  comme  ayant  le  carac- 
tère   de  sentier  publie  communal  ,  alors  surtout 
Ju'il  n'est  qu'une  portion  d'un  çhemjiB  publij^  çoi^i- 
érable  menant  d'une  comoiuoe  à  un^  autre.  132 

A  annoter  au  même  mot  n^  50. 

(Tour  d'échellç).  V.  1. 
SOCIÉTÉ. 

(ACTJ5  WODIjFIC^TÏF  DES  STATUTS).  V.  9, 
(GOBÎMANWTB.— €oa|>IANPITAliRE).  V.  1-9* 

1  (^Concours  de  société  ç^^u^antfi).  Ç^^ui  ^  a  sov&- 
crit  des  actions  à  une  ô<?ciété  à  la  formatiop  4e  la- 
quelle a  concouru  une  autre  société  pour  y  appor- 
ter le  principe  d'une  assurance  contre  les  pertes,  ne 
peut  se  refuser  à  effectuer  le  paiemeat  de  ces  ac- 
tions, par  le  motif  que  la  société  d'assuran<5es 
n'existe  plus.  800 

Aaniïoterau  mên^  motiiï^?^. 

(Décès  d'assO€îé).  V.  2; 
(Déubérations),  Vi  5.  8. 
(Dépenses  limitées).  'V.  8 

%.{Purée).  La  société  commerciale  qui  est  stipulée,  au 
cas  de  décès  defun  des  sociétairjes  en  nom ,  devoir 
continuer  avec  ses  héritiers ,  peut  être  considérée 
comme  existant  vis  a  vis  de  ceux-ci  ,  pendant  leur 
minorité.  241 

A  annoter  au  même  mot  n»  49  bis. 

S  {Gérant. — Révocation).  La  révocation  d'un  gérant 
nommé  pour  toute  la  durée  d'une  société  en'^îom- 
mandfte  ne  peut  être  f^ïoaonoée  par  Vasseoibléô 
générale  des  actionnaires  ;  elle  ddft  Cièliretpar  le 


(481) 

Tribunal  de  commerce  à  l'arbitrage ^duquel  soial 
laissés  les  motifs  de  cette  révocation.  Doit  être  con- 
sidéré comme  un  motif  suffisant  de  révoçalion  le 
fait  par  le  gérant  d'aggraver  sciemment  une  cause 
de  ruine  pour  la  société.  ,  268 

A  annoter  au  même  mot  n^  51, 

(Héritier  mineur).  V.  2. 

4  (Immixtion,  —  Avantages  partictiUers  à  l'un  dei 
associée):  La  convention  faite  dans  les  statuts 
d'assurer  un  avantage  particulier  à  Tun  des  socié- 
taires ,  mais  soumis  aux  chances  de  durée  de  la 
Société,  n'est  pas  incompatible  avec  la  commandite 
et  ne  peut  imprimer  à  la  Société  le  caractère  d'une 
Société  en  nom  collectif.  307 

A  annoter  au  même  mot  n^s  39-40. 

5  ( —  Conseil  de  surveillance).  Le  conseil  de  surveil- 
lance constitué  par  les  statuts  d'une  Société  en  com- 
mandite peut ,  sans  faire  encourir  à  ses  membres , 
vis*à-vis  des  tiers,  la  responsabilité  de  l'immixtion , 
approuver  ou  autoriser  des  actes  de  la  gestion 
sociale,  comme  prendre  toute  espèce  de  délibération, 
pourvu  qu'il  n'y  ait  aucune  relation  directe  ou  indi- 
recte de  ce  conseil  avec  les  tiers.  318 

A  annoter  eod.  loc, 

6  ( — Emprunt^.  Les  autorisations  données  au  gérant 
par  les  associés  commanditaires  de  contracter  des 
emprunts ,  alors  que  les  statuts  ne  l'y  autorisent 
pas,  ne  constituent  pas  l'immixtion  de  ces  associés 
dans  la  gestion  de  la  société. — L'associé  commandi- 
taire peut  sans  engager  sa  responsabilité ,  prêter 
personnellement  à  la  société  les  fonds  qu'il  a  pu 
emprunter  lui-même. d'un  banquier.  307 

A  annoter  eod  loc. 

7  (  —  Preuve).  Pour  être  admis  à  prouver  qu'un 
associé  s'est  immiscé  dans  la  gestion  sociétaire  ,  il 
ne  suiTit  pas  d'alléguer  qu'il  s'est  mis  en  rapport 
avec  des  tiers  pour  la  ventQ  des  produits  sociaux , 
il  faut  encore  énoncer  le  temps,  le  lieu  et  les 
diverses  circonstances  qui  ont  accompagné  l'im- 
mixtion. 307 

A  annoter  eod.  loc. 

8  ( — Statuts  sociaux)  .On  ç^mV,  par  l'acte  constitutif 

TOME  XVIÏI.  \     '  '  31 


(  4«3) 

d'utte Soeiélê è?n "commandite,  détermmer  eilimîtèr 
le  mandai  du  géraiit,  poarvu  que,  dans  les  limites 
fixées,  celut-cisoil  libre  de  gérer  el  àdmtofelrer  la 
Société  saris  entrave  ,  sous  sa  responsabilité  r  -^ 
Comme  limiter  certaines  dépenses  ,  réserver  aux 
commanditaires  la  surveillance  ,  rinspeclion  ,  le 
droit  de  participer  aux  délibérations,  etc.  307 

A  lannoter  eod,  loc. 

9  (Publicité,  -^  Acte  modiâcaiif).  La  publication  de 
l'acte  wwrfi/îcalî/' d'une  Société  dont  l'acte  cùnsti^ 
iutif  n'a  point  été  publié ,  est  régulier  et  suffisant 
pour  éviter  la  nullité  de  l'art.  42  G.  com.,  si  d'ail- 
leurs elle  a  été  faite  en  contenant  toutes  les  énon- 
cialions  prescrites  par  Tart.  -43  C.  com. ,  et  si  cette 
publication  a  eu  lieu  avant  toute  demande  en  nul^ 

iité  pour  défaut  de  publication.  320 

A  annoter  au  même  mot  no  57. 

10  ( — Retraite  d'associé),  La  publicité  exig^ée  pour 
la  retraite  d'un  associé  ne  Test  que  vis  à  vis  des 
tiers  ,  non  à  l'égard  des  associés  entre  eux.  Le  fait 
de  cette  retrarte  peut  résulter  contre  l'assdôé  de  sa 
renonciation  manifestée  par  des  actes  d'une  va<^ 

-  lonté  non  équivoque.  .    :         ^i 

A  annoter  eod.  loc. 

SUBROGATKM.  V.  Hypothèque. 

SUCCESSION  vacante:  ; 

(Déshérence).  Lorsque  VElatr.éclameune  siiccpssipn  à 
litre  de  succcesseur  ïrrèguUer,  cette  succession 
n'est  plus  réputée  vacante ,  et  si  un!  curateur  a  été 
nommé  ,  celui-ci  ne.  peut  conserver  la  geslioa  de 
J'hérédité  jusqu'à  ce  que  le  domaine  ait  été  envoyé  \ 
en  possession.  201 

A  annoter  au  même  mot  in  fine, 

/  .  -  .  I  • 

.    •  'X    ■ .  -  î 

testament:-  .  •■ 

(ABSEnjïCES  PÀRTIELtES  DE  RAISON).  V,  2. 

(Action  EPiFRAtDE).  V.  5.  ' 

îi,( Capacité.  —^  Sanilé  d'esprit. —  Volonté).  Pour 
tester  valablement  ,  il  suffit,  au  moment  au  testa- 
mçnt,  ^e  n'être  pas  privé  d'une  volonté  intelligente 
et  libre  ,   et  de  jioiivoii*  apprécier  la  nature  et  les 


(483) 

conséiiuences  de.cet  acte,  —  Laï^mité  d'esprit  est 
présumée  en  faveur  de  Tacte.    ,  36 

A.ai>nQlar au  mcmemot  n"  9.   : 

2  L'insanité  ne  résulte  nécessairement  ni  d'absencos 
parlielles  de  r.iison  ,  ni  d'accès  de  monotoanies 
momentanées  ne  se  rapportant  pas  à  TinstaiM- ou  à 
l'époque  de  la  confection  du  testament ,  ni  de  la 
mobilité  delà  volonté  ,  ni  die  raffaîbliss^raenl  des 
organes  produit  par  Tapoplexie.  ;  ,     -36 

A  annoter  eod.  loc, 

3  La  preuve  de  la  suggestion  ou  captatîon  tendant  à 
démontrer  la  fraude  etlcdol  ,  comme  causes  de' 
nullité  d'un  testament ,  n'est  pas  admissible ,  alors .  . 
que  les  manœuvres  sont  imputées  à  d'autres  qù'^à 
ceux  à  qui  elles  auraient  pu  profiter.  36 

A  annoter  au  même  mot  n^  1 . 

4  La  violence  propre  à  vicier  la  volonté  du  testateur 
ne  peut  être  présumée  et  dônner^lieu  à  une' arti- 
culation pertinente ,  si  l'on  allègue  la  séquestration 
du  testateur  ,  alors  que  ,  près  de  lui  ,  étaient  ad- 
mises certaines  personnes ,  comme  son  filleul,  une 
religieuse,  un  notaire.  36 

A  annoter  eod.  loc. 

5  (Clause  pénale) .  La  disposition  ou  clause  pénale 
par  laquelle  le  testateur  déclare  que  nVun  des^  hé- 
ritiers vient  à  contredire  ou  critiquer  sa  volfinlé,  il 
entendu  priver  d'une  partie  de  ses  biens,  s'applique 
au  cas  oùrhéritier  attaque  le  testament  du  chef  de 
faux.  108 

A  annoter  au  même  mot  n^  53  bis. 

(Envoi  en  possession).  V.  7. 
(Fraude  ou  dol. — Manœuvres).  V.  3. 
(Monobtanie).  V.  2. 
(Organes  affaiblis).  V.  2. 
(PouYom  m  juge).  V.  8. 
■(Séquestration).  V.  4. 

6  (Testament  olographe,— Date).  Est  nul  comme  non 
daté  le  testament  olographe  portant  un^  date  fausse 
ou  :  erronée  qu'on  ne  peut  rectifier  à  l'aide  des 
documents  du  testament  même.  438 

A  annoter  au  même  root  n*'  37. 

7  (-r^Dén^ation  d! écriture).  C'est  à  l'héiiliei' légal  et 


(484) 

non  au  légataire  institué  par  testament  olographe  et 
envoyé  en  possession  qu'incombe  la  preuve  de  là 
non -sincérité  du  testament,  alors  que  les  circons- 
Irances  de  la  cause  élèvent  des  présomptions  en 
faveur  de  sa  sincérité.  31 

  annoter  au  même  mot  n®  39. 

8  fVérifwalion).  Le  juge  peut,  sans  expertise,  vérifier 
par  lui-même  la  smcérilé  du  testament  olographe.      31 
A  annoter  au  même  mot  n^  44. 

(Volonté  mobile).  V.  2. 

V.  Legs. 

THÉÂTRE. 

(Cautionnement.  —  Cession  de  gérance).  Les  avances 
faites  à  un  directeur  de  théâtre  pour  payer  ses 
artistes  sont  aux  termes  des  règlements  adminis- 
tratifs ,  privilégiés  sur  le  cautionnement  de  ce  di- 
recteur.— En  vertu  des  mêmes  règlements,  la  gé- 
rance et  l'administration  des  théâtres  interdites  à 
toutes  autres  personnes  qu'aux  titulaires,  sont  inces* 
sibles,  et  les  actes  résultant  d'une  cession  de  cette 
nature  sont  nuls  comme  la  cession  elle-même.  145 
Mot  nouveau. 

TIERCE-OPPOSITION. 

(Créancier  hypothécaire).  La  sommation  faîte  par  les 
créanciers  poursuivant  une  saisie  immobilière  aux 
créanciers  mscrits ,  alors  surtout  qu'elle  n'a  pas  été 
transcrite,  ne  peut  impliquer  ,  pour  les  premiers  , 
l'obligation  d'appeler  les  derniers  ,  dans  une  ins- 
tance d'appel  formée  contre  un  jugement  gui  avait 
refusé  la  conversion  de  la  saisie.  —  Par  suite  ,  les 
créanciers  inscrits  ne  sont  pas  recevables  à  former 
tierce-opposition  à  l'arrêt  qui ,  réformant  la  sen- 
tence des  premiers  juges,  a  admis  la  conversion  de 
la  saisie.  433 

A  annoter  a.u  même  mot  no  3  bis. 

TRANSCRIPTION. 

(Quittances  de  loyers  ).  Ne  sont  pas  assujetties  à  la 
transcription ,  pour  pouvoir  être  opposées  aux 
syndics  d'une  faillite  ,  les  quittances  ae  loyers  non 
échus,  délivrées  par  le  bailleur ,  avant  sa  faillite,  en 


« 


(  485  ) 

compensation  de  sommes    dont 'il  était  débiteuF 
envers  son  locataire.  170 

A  annoter  au  même  mot  Tfi  i. 

TUTELLE.  V.  Enfant. 


VENTE.  '  •     •        '    '  • 

1  (Délivrance.~Conienaf}ce  apparetùe).  La  Vente  qui 
se  fait  d'un  immeuble  d'une  contenance  approxima-  .. 
tive  et  à  prendre  par  quotité  dans  une  totalité  éga- 
lement approximative ,  de;  telle  sorte  que  cette  tota- 
lité doive  être  mesurée  pour  la  fixation  de  la  quo- 
tité vendue  ,  se  trouve  comprise  dans  les  cas  pour 
lesquels  l'expression  de  la  mesure  ne  donne  lieu  à 
aucun  supplément  de  prix,  en  faveur  du  vendeur, 
si  Texcédant  de  mesure  ne  dépasse  pas  un  vingtième^  . 
—  L'excédant  de  moins  d'un  vingtième  de  la  con- 
tenance portée  au  contrat  de  vente  ,  ne  donne  pas 
lieu  non  plus,  dans  ce  cas,  à  la  restitution  de  l'excé- 
dant en  nature.  '  i% 

A  annoter  au  même  mot  n^  29  bis. 

2  (Obligation  du  vendeur. — Rente  viagère).  Le  ven- 
deur qui  a  stipulé  pour  prix  de  son  immeuble 
vendu,  la  jouissance  à  son  profit  de  cet  immeuble 
jusqu'à  son  décès,  sans  aucune  indemnité  de  loyer, 
.ni  contributions ,  etc. ,  plus  une  rente  viagère  qui 
lui  sera  payée  sans  aucune  espèce  de  retenue  à 
quelque  titre  que  ce  soit ,  ne  s'est  point  par-là 
même  exonérée  des  obligations  de  l'usufruitier  or- 
dinaire.— 11  est  tenu  de  toutes  les  charges  de  l'en- 
tretien.— Le  nu -propriétaire  peut  le  contraindre  , 
pendant  la  durée  de  l'usufruit ,  à  faire  les  répara- 
lions  nécessaires  à  l'entretien  de  la  chose.  165 

A  annoter  au  même  mot  ijfi  30  bis. 

VENTE  DE  MARCHANDISES.  ' 

(Réception).  La  marchandise  vendue  et  présentée  à 
la  livraison  peut  n'être  pas  considérée  comme  défi- 
nitivement acceptée  par  l'acheteur,  alors  que,  restée 
en  la  possession  du  vendeur,  elle  n'a  pas  été  recon- 
nue par  celui-là  posséder  ses  qualités  substantielles, 
quoiqu'elle  fût  cependant  supérieure ,  à  certains 
égards,  à  la  qualité  promise.  —  Il  y  a  lieu  d'ailleurs 

31* 


(  486  ) 

à  foire  experti$er  là  marcbaBdise  dans  h  cas  où 
Tacheleur  se  plaint  des  vices  cachés  qu'elle  contient.  248 
A  annoter  au  même  mot  n^  30. 

VENTE  DE  MEUBLES.  V.  Gommissaire-priseur. 

VÉRIFICATION  D'ÉCRITURE.  V.  Testament. 

VOIERIE.  V.  Compétence  civile. 

VOISINAGE.  V.  EtabUsseraent  incommode. 

VOL. 

4  (Caractère).  L'individu  qui ,  par  fraude ,  s*empare 
de  la  chose  d'autrui,  dans  Tîntime  croyance  qu'il  se 
l'approprie ,  commet  un  vol ,  encore  bien  que  le 
propriétaire  de  celte  chose ,  averti  que  la  soustrac- 
tion doit  se  commettre  ,  s'entende  avec  un  tiers 
pour  y  faire  coopérer ,  surprendre  le  coupable  et 
cofiserver  ainsi  sa  chose.  397 

A  annoter  au  même  mol  n^  S  bis. 

2  fVoiturier).  La  soustraction  frauduleuse ,  dans  une 

Îfare  de  •chemin  de  fer,  par  un  employé  salarié  de 
a  Compagnie ,  au  préjudice  de  cette  Compagnie  ou 
d'autres  personnes ,  de  choses  qui  lui  avaient  été 
confiées  en  sadite  qualité  d'employé,  doit  être  qua- 
lifiée vol  commis  par  un  voituner  et  non  vol  domes- 
tique. 138 
A  annoter  au  même  mot  in  fine. 

V.  Paine. 


FIN  DE  LÀ  TABLE  DES  MATIERES. 


(487) 

1 

i 

Confirmation. 

dem. 

dem. 

dem. 

Idem. 

Arrêt  d'exécution. 

Arr.  préparatoire. 

Réformation. 

CoDtirmaUon. 

Réformation. 

Validité  décrétée. 

Confirmaiion. 

Réformation. 

Confirmation. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

dem. 

dem. 

dem. 

dem. 
Idem. 

Idem. 
Idem. 

1 

ce 

■g 

S 

o 

1 

'S 

1 

Demande  en  payement. 

Liquidation  de  communauté. 
Eicusabilité  de  failli. 
Testament.  —  Validité. 
Vente  d'immeubles. 
Dommages-intérêts. 

Propriété  de  chemin. 
Bail  sous  seing  privé. 
Faillite.  — Créance. 
Désistement. 
Donation,— Nullité. 
Servitude  de  passage. 
Vente  de  marchandises. 
Faillite —Privilège. 

Compte  courant.— Banquier. 
Servitude  de  passage. 
Bail.— Résiliation. 
Dommages-intéréls. 
Compétence. 

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Trib.  de  comm.  de  Lille. 
Trib.  civ.  i&  Valencienoes. 
Trib.  ciï.  d'Arras. 
Cour  de  Douai. 

Trib,  ciï,  de  Cambrai. 
Trib,  ciï,  de  Si  Omer. 
Trib.  ciï.  d'Avesnes. 
Trib.  de  coram.  d'Arras. 
Trib.ciï,  deMontreuiL 
Trib.  civ.  de  Si  Pol. 
Trib.  civ.  deBéthune. 
Trib.  de  comm.  de  Lille. 
T,  de  comm.  de  Béthune, 
Trib.  civ.  d'Avesnes. 

Trib.  civ.  de  Boulogne. 
Trib.  de  comm.  d'Avesnes. 
rrib.  civ.  d'Arras. 
r.  de  com.  deValenciennes. 
rrib.  civ.  de  Hontreuil. 
Tr.bi  civ.  d'Avesnes. 
Trib.  civ.  de  Lille, 
'rib.  civ.  de  Cambrai. 
Trib.  civ.  de  Lille. 

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Frison  Leveulec.  Savreux. 

Windsor  e.  Lahousse  et  Detrei.. 

Lcfebïre  c.  Barbier  et  autres. 

Capet ,  ïeuve  Martin  c.  le  Procureur  cénéral. 

Loeder,  KnappetC»c,  Jacquot  et  Baudin. 

Leprétre ,  veuve  Machu  c.  veuve  Jourdain- 

Leprétre. 
Parent,  veuve  Cauvet  c.  Decroix. 
Brebanl  c.  Habille. 
Syndics  Haiette  c.  Dassier. 
Garson  c.  Wacogne  et  Lafontaine  Solar. 
Meiiler  c.  Cossart. 
Ep.  Dorémieuxc.  Becqnart. 
Delerue-Badart  c.  Coipaert. 
Capron  et  Tresnois  c.  Syndic  Levéque. 
Judet  c.  Blanchard. 

Préf.  du  Pas-de-Calaisc.  Seraeant  etDevot. 
Gillon  c.  Gillon. 

CaisBO  etFuzier  c.  Spdic  Beghin. 
Prévost  c.  Sarraiin  et  Lheurelte. 
Carpentierc.  Pureur,  Denoïelle  et  C» 
Lefi^n  c.  Leflon. 
Boëns  c.  Mahieu. 
Tesse  frères  e.  Dooze. 

More!  et  C»  e.  Vandenheide 

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Cunfirmatiou. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 
Réformalion. 
Conlirmation. 

Idem. 
Préparatoire. 
Ré  forma  lion. 
Confirmation. 
Réformalion. 
Confirmation. 

Idem. 

Idem. 
Réformalion. 
Arrêt  surincident- 
Préparaloire. 
Confirmation. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 
Réformalion. 
Icnfirmation. 
léformation. 
'réparaloire. 

Idem. 

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1 

Abordage. 

Nullité  d'actes. 

Location. 

Société  en  commandite. 

Demande  en  partage. 

Résiliation  de  bail. 

Concordat. 

Séparation  de  corps. 

Puissance  maritale. 

Cantonnement. 

Assurance  terrestre. 

Copropriété.— Servitude. 

Servitude. 

Revendication  de  terrain. 

Idem. 
Faillite.—  Créancier. 
Déshérence. 

Dem")»  en  reddition  de  compte. 
Interrog.  les  faits  et  articles. 
Livon  de  marchandises. 
Canirainte  par  corps. 

E"    ~  de  marchandises. 

ression  de  travaux. 

alion.. 
Réglem.  d'assurances. 
Vente  d'immeubles.— Conversion. 
Exécution  de  travaux. 
Domm.-iniéréls.—  Blessures. 
Recours  en  garantie.  —  Ecroulemt. 
Haie  mitoyenne. 

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Trib.  de  C.  de  Boulogne. 
Trih.  ciï.  d'Avesnes. 
Trib.  civ.  de  Lille. 
Trib.decomm.  de  Lille. 
Trib.  civ.  de  Valeucienncs. 
Trib.  civ.  de  Lille. 
Trib  de  C.  de  Béthunc. 
Trib.  civ.  de  St  Pol. 
Trib.  civ.  de  Dunkerqne. 
Trib.  civ.  de  Montreuil. 
Trib.  de  com.  de  Cambrai. 
Trib.  civ.  de  Valenciennes. 
Trib-  ciï.  de  Cambrai. 
Trib.  ciï.  de  S'  Pol. 
Trib.  civ.  de  S»  Orner. 
Trib.decomm.de  Lille. 
Trib.  civ.  de  Lille. 
Trib.  comm.  de  Lille. 
Trib.  civ.  de  Douai. 
Trib. 
Trib. 
Trib. 
Trib. 

Trib  civ.  de  Lille. 
Trib.  de  C.  de  Dunkerque. 
Trib.  civ  de  S'  Orner. 
Trib.  ciï.  d'Arras. 
Trib.  civ.  de  Boulogne. 

Idem. 
Trib.  civ.  de  Mflntreiiil. 

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Idem. 

Idem. 
Confirmation. 

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dem. 

dem. 
Réformalion. 
Arr.  préparai. 
Confirmation. 

Idem. 

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Idem. 

Idem. 
RéformatioD. 
Confirmation. 

Idem. 

Idem. 

1 

Défaut-joint. 

Séparation  de  corps.  —Enquête. 
tesponsabilité  civile. 
Jaif,  interprétation. 
haie  d'immeubles. 
Assurance  contre  la  grêle. 
Honoraires  d'architecte 
)ommages-intérêts. 
Compte  courant. 
Responsabilité  d'avoué. 
Servitude  d'égout. 

Faillite.  —  Eicusabilité. 
Arbitrage. 

Demande  en  payement. 

tesponsabilité  d'avoué, 
^mmnnauté  ontw  épopi. 
Adoption. 
Exécution  démarché. 

5 

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Trib.  de  Comm.  de  liUe. 
Trib.  civ,  d'Avesnes. 
Trib.  ciï.  de  Cambrai. 
Trib.  civ.  de  Lille. 
Trib.  ciï.  de  Lille. 
Trib.  civ.  d'Arras. 
Trib.  ciï.  de  Lille. 
Trib.  civ.  de  Lille. 
Trib.Com.  deDunkerque. 
Trib.  civ.  de  S'  Orner. 
Trib.  civil  de  Lille. 
Tirb.  civil  de  Cambrai. 
Trib.  Comm.  de  Cambrai. 
Cour  de  Douai. 
Trib.  ciï.  de  Douai. 
Trib.deC.deValenciennes. 
Trib.  deC.de  Boulogne. 
Trib.  civ.  de  Boulogne. 
Trib.  ciï.  d'Avesnes. 
Trib.  cjvil  d'Arras. 
Trib.  civil  de  Douai. 

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