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Full text of "Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne"

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LES 

LITTÉRATURES POPULAIRES 



TOME X 



LES 



LITTÉRATURES 



POPULAIRES 



DE 



TOUTES LES NATIONS 



TRAOmOKS, LÉGENDES 

CONTES, CHANSONS, PROVERBES, DEVINETTES 

SUPERSTITIONS 

TOME X 




PARIS 
MAISONNEUVE ET C»*, ÉDITEURS 

25, QUAI VOLTAIRE, 25 
1882 

Tous droits réservés 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 



TOME II 






1 



TRADITIONS ET SUPERSTITEONS 



HAUTE-BRETAGNE 



PAUL SÉBILLOT 



PARIS 

MAISONNnUVR ET C", EDITEURS 

Jî, QUAI VOLTAIHK, 2? 
1882 

Toni diolR léMiYtt 



m 




DEUXIÈME PARTIE 



2LES ANIMAUX, LES PLANTES ET LES MÉTÉORES 




CHAPITRE I 



LES MAMMIFÈRES DOMESTIQUES 



S I. — GÉNÉRALITÉS 




[LUSŒURS mammifères ont été domestiqués 
dès les temps préhistoriques, ainsi que le 
constatent de nombreuses découvertes, et 
les plus anciens documents écrits que nous ayons 
les représentent comme les compagnons de 
l'homme. « Les animaux, ces machines dédai- 
gnées par Descartes, défendues par La Fontaine, 
élevées par la science moderne à la dignité de 
personnes vivantes et intelligentes, ont joué un 
rôle capital dans la destinée humaine. Le chien, 
le bœuf, le cheval, le mouton, le porc, un grand 



4 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

nombre de poissons et d'oiseaux, ont été les 
compagnons, souvent les victimes et toujours les 
instruments de notre grandeur. Notre langage est 
plein de nuances empruntées à leurs formes, à 
leurs aptitudes, à leurs services et à leurs mœurs... 
Les animaux ne vivent pas seulement dans la 
nature ; ils ont vécu et vivent encore dans l'hu- 
manité en statues, en idées, en symboles. » 

(A. Lefèvre, Religions et mytholcgiês comparées, p. 51 etsuiv.) 

Les anciens poètes les font parler, verser des 
larmes, et ce n'est pas seulement une fiction 
poétique qu'ils expriment ainsi. De nos jours, si 
l'on ne croit plus guère qu'ils puissent prendre la 
parole, — sauf peut-être le chat, animal diabo- 
lique, — dans nombre de contes on leur prête 
un langage, et même en certains cas, ainsi qu'on 
le verra ci-après, on interprète et Ton traduit 
leurs cris. 

Voici un petit conte où les animaux domes- 
tiques dialoguent d'une façon assez plaisante. 

Une bonne femme qui avait une vache, un 
cochon, un poulain, un coq et une cane, alla à 
des noces, où elle s'amusa tellement qu'elle y 
resta trois" jours. 

Comme personne ne soignait ses bêtes, dles 
avaient faim, et la vache disait : 

— Jeanne I Jeanne ! 



DE LA HAUTE'BRETAGNE 



Le cochon : 

— Hé bien ! hé bien ! 
Le poulain : 

— La vois-tu veni', veni', veni' ? 
Le coq : 

— O s'en viendra tantôt. 
Et la cane répétait : 

— Quand ? quand ? quand ? 

(Conté en 1878 par Co&stant Joulaud, de Gosné.) 
Cf. dans Laisnel de la Salle, t. I, p. 222, la manière dont les 
paysans berrichons traduisent le langage des bètes^ principale- 
ment celui des oiseaux. 

Dans les monographies qui suivent, j'ai donné 
les noms patois des mammifères domestiques de 
la Haute-Bretagne, les proverbes, les dictons et 
les devinettes où ils figurent, les cris usités pour 
les appeler ou pour les commander, les supersti- 
tions et les croyances dont ils sont l'objet, etc. A 
la suite, j'ai brièvement indiqué les contes, publiés 
ou inédits, de ma collection où ils jouent un 
rôle, et j'ai noté aussi celui qui leur est attribué 
par les quelques contes gallots publiés avant mes 
recueils par divers auteurs. 

J'ai du reste suivi la même marche pour toutes 
les monographies des animaux de la terre, de 
l'air et de l'eau, qui composent la plus grande 
partie de ce volume. 



mîmm 



4¥> cf^ C?i^Cfà' 




s IL — MONOGRAPHIES 



L*ANE (Eojras Asivus) 

Noms patois (i) 

ES paysans emploient presque toujours le 
mot âne au féminin. 
Voici d'autres noms patois : bardoQ/L., 
Plouvara), fém. ; hardoche (M., Plouvara), fém.; 
hardiche (Tréveneuc); mais en réalité ce sont 
plutôt des espèces de surnoms, et la plupart du 
temps on y attache un sens moqueur. 




Proverhes 

— Cela li est défense (défendu) comme le Pater 
es ânes. 

Cf. Rolland, t. IV, p. 227 (Côte-d'Or). 

— Bête comme un âne de trois écus (Dol). 



(i) Abréviations : E. Ereé-prts-Lifi&é (Ille-et- Vilaine) ; M. 
Mati^on; S.-C. Saint-Cast; D. Dinan ; P. Penguily ; S.-D. 
Saint- Donan (Côtes-du-Kord); G. g. glossaire gallot inédit 
dont j'ai eu communication anti^efois. 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS ^ 

■ ■■ ■ ■ — — ■- ■■ 1 ■ ■ ■ ■ ■ ■■ — ■■ 1^ ™ I I f ■■ 

— Faire Tâne pour avoir du bran (M., E.)* 

Cf. Rabelais, livre ix, et Rolland, t. IV, p. aay. 

— Traître comme un âtie rouge. Cela se dit 
•d'une personne méchante qui frappe ses sem- 
blables et les animaux (S.-C.). 

— Jaune comme du pissat (urine) d'âne (E.). 

— Têtu comme un âne. 

Cf. Rolland, t. IV, p. 214 (Creuse). 

— Elle joXU comme un âne (P.). Cela se dit 
•d'une personne qui n'est pas trop dégourdie. 

-r- Brèr (crier) comme un âne (S.-D.). 

— Saoul comme une bourrique (E.). 

— Saoul comme la bourrique à Robespierre 
<M.). 

Cf. Rolland, t. IV, p. 242. Robespierre est sabstitaé au diable. 

Superstition, — IJâne dans la Littérature orale 

L'âne, de même que le bœuf, s'agenouille à 
minuit sonnant la nuit de Noël (E.). 

Le rôle que les contes gallots attribuent à 
l'âne est assez important ; dans la Hotde du Grouin, 
no X, 2« série, les fées empruntent un âne â leurs 
voisins sans leur permission, et la fréquentation 
des bonnes dames le rend sorcier. C'est sur un 
ine que voyagent le bon Dieu et saint Pierre (cf. 
Misère, n» Lii, 2© série). C'est l'âne de Jean le 



8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Dioty no XX, ire série, qui passe sur son dos le 
bon Dieu et saint Jean. Le héros de V Oiseau hleuy 
no XIV, ayant mangé du céleri, est transformé en 
âne, comme le héros du conte de Lucien. Dans le 
conte des Jaguens, i^e série, no xxxvni, les 
Jaguens forment le projet d'aller porter un 
poisson au roi; ils se rendent aux pêcheries, et 
lèvent dans leurs filets quelque chose qui leur 
semble un poisson gigantesque. Or, c'était un 
âne crevé. Cette facétie avait été rapportée au 
xvm» siècle par Chevignard de la Pallue, qui 
l'attribuait aux gens de Beaune. 

Cf. Rolland, t. IV, p. 248. 

Dans le conte de la Fève, no xn, i'* série, le- 
bonhomme qui est grimpé au ciel tout le long 
de sa tige reçoit en présent un âne qui fait des: 
écus. Cet âne figure aussi dans les autres versions^ 
de cette légende que j'ai recueillies (cf. Litt. orale y 
p. 215). 

Le conte de la CtirouUîe, 2^ série, no xLvm,, 
met en scène un paysan qui fait couver une 
citrouille, croyant que c'est un œuf d'âne. Dans 
les similaires cités par Rolland, t. IV, p. 202-20^ 
(Loiret, Côte-d'Or, Lorraine, etc.), l'œuf couvé 
est un œuf de jument, et non un œuf d'âne. 
. Dans un conte inédit de ma collecjdon, il est 
question d'un âne a â sept lieues le pas », gardé 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 



par trots géants, et dont le héros doit s'emparer 
avant de conquérir le merle blanc qui rajeunit. 

La marraine de Petit-Jean (conte inédit de ma. 
collection) vient chercher son fiHpul sur un âne* 
Il lui désobéit en ramassant une couroime ; alors 
elle l'abandonne, mais lui laisse l'âne. Grâce i 
ses conseils, le jeune garçon vient â- bout de 
toutes les difficultés. 

Dans une autre version du précédent, aussi 
intitulée Petit-Jeariy la Vierge, qui est sa marraine, 
vient le chercher sur un âne et lui défend de 
cueillir des fleurs; il désobéit. L'âne reste avec lui,, 
et par son conseil, après avoir triomphé de- 
plusieurs obstacles, il épouse la plus belle prin* 
cesse du monde. 

Un jour les Jaguens, habitants de Saint- 
Jacut-de-la-Mer (Côtes-du-Nord), ont la guerre 
avec un village voisin. Us hissent un canon sur 
le dos d'un âne et y mettent le feu ; mais, après- 
la détonation, l'âne se retourne du côté des 
Jaguens, qui l'accusent d'être du parti de leurs- 
ennemis et le jettent à la mer pour le punir. 

Quelques chansons mettent aussi l'âne en. 
scène» Dans ma Littérature orale de la Hautes 
Bretagne, p. 272, j'ai publié LÂne changé, dont je 
possède trois variantes inédites, et qui se retrouve 
en beaucoup de pays (cf. pour les similaires Rol- 
land, t. IV, p. 253, qui reproduit deux versions). 



10 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

J'ai aussi une variante de UÂm retrouvé par mor^ 
ceaux, chanson recueillie aux environs de Bain 
(Ille-et-Vilaine) par M. A. Orain, et publiée avec 
la musique par Rolland, t. IV, p. 263. 

Plusieurs pays de TlUe-et-Vilaine et des Côtes- 
du-Nord ont des sobriquets où le nom de Tâne 
entre en composition. On dit : 

— Les ânes de la Malhoure (canton de Lam- 
balle). Jadis, assure-t-on, ils mangèrent un âne, 
et le nom leur en est resté. 

— Les ânes de Pleudihen (près Dinan). On se 
sert beaucoup d'ânes en ce pays. 

— Les ânes de Saint-Suliac (Ille-et-Vilaine). 
On dit aussi les ânes de Rigourdaine. Ces deux 
sobriquets tirent leur origine d'une légende que 
rapporte M^^ de Cemy, et que voici, un peu 
abrégée. 

« Saint Suliac avait établi un monastère autour 
duquel il avait semé du blé et planté des vignes. 
La Rance n'était alors qu'un faible ruisseau qu'on 
traversait sur deux mâchoires d'ânes, et en face 
de Garot se voyait la métairie de. Rigourden, 
dont les ânes vinrent un jour brouter l'enclos des 
moines. Ceux-ci s'en aperçurent et les chassèrent. 
L'abbé alla reprocher au fermier sa négligence ; 
mais celui-ci ne garda pas mieux ses bêtes, et un 
matin l'abbé les trouva broutant sa vigne, et il 
les frappa de sa crosse en les maudissant. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE II 

« Le propriétaire alla à la recherche de ses ânes, 
qu'il retrouva immobiles près de Tenclos des 
moines, la tête retournée sur le dos. Il supplia 
saint Suliac, qui les délivra de cette position 
incommode ; mais les ânes en s'en allant firent 
un tel bruit que le saint, pour ne plus en être 
incommodé, élargit la Rance et lui donna la 
largeur qu'elle a aujourd'hui. 

« On voyait naguère dans les caves du pres- 
b3^ère un tableau sculpté en relief, fort vieux 
d'après la grossièreté du travail, et représentant 
les ânes la tête retournée sur le dos. » 

(M«« de Cerny, Saint-Suliacy p. 13.) 

Cette légende est citée par Manet et par Habasque, t. III, 
p. 323. 

LE BÉLIER (Aries) 

Noms patois 

Le mâle s'appelle hourdÇP.yS.-D.) (cf. le gallois 
howrd); hourdet (M,, S.-D.); éhourda (S.-D.); 
houro (S.-D.); la femelle berbis (M., E.); mou- 
tonne (E.) ; l'ensemble du troupeau les berhis, d'où 
herbiouxy qui se rapporte aux brebis, qui aime les 
brebis ; les agneaux, agni (S.-D.) ; agnaou (S.-D.) ; 
igniau (E.); ignê^ égné^ fém. (M.); ègnite (S.-D.); 
c^ite (Tréveneuc) ; aigneïU (M.). La brebis en 
chaleur est dite en lui; on la conduit au hourd 



12 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



qui la luette (P.). Les brebis qui mettent bas a/- 
neîlent (M.); aindellent (P.). Les béliers qui cornent 
doupent (M.); tossent (P.). Le rhume des brebis 
se nomme ballo (Tréveneuc); goètron (S.-D.). 

Les brebis n'ont point en général de noms 
propres; cependant on les désigne d'après des 
circonstances extérieures : celle qui a des cornes 
se nomme Cornette ; celle qui a la tête de plu* 
sieurs couleurs Moquarde (P.) ; la brebis qui n'a 
qu'une oreille Sorine (P.). 

Pour appeler les moutons, on leur crie ; 

duiens I quiens I (P.) 

Bara, bara, bara, bè (Tréveneuc). 

Comme en breton. 

Qjiéto, quéto, quéto, bée (P.). 
Koto, Koto, Koto, bée (P.). 

Pour les détourner : 

Chom' la 1 chôme id (JS.-D.). 
Taï-ci, taï-ci (P.). 
Chaboul (S.-D.) 

Cf. le breton chabouch. 

Pour faire battre les béliers, les patous (bergers) 
leur crient : 

Tosse, tosse (P.). 
Ou: 

Doupe, doupe (M.). 



DE LA HAUTE^BRBTAGKE I3 

Pour que les brebis, que plusieurs bergers ra- 
mènent ensemble, se séparent, ils crient le soir : 

Trie, térias I 
La plus belle de mon haras (P.). 

Proverbes 

Faut point appeler sa mère jambe de herJns 
t(P.)« Il ne faut pas se moquer des siens, car 
4;ela retombe sur vous. 

— r se laisse tondre comme un mouton (E.). 

— Têtu comme un houro (S.-D.). 

- — Berbis qui cloche n'a pas de ntérienne (sieste, 
repos) (P.). 

— Manger sans boire, c'est faire un repas de 
mouton. ' 

Dicton sâmUaire en Poitou (cf. Desaivre, Croy., p. aa). 
Croyances et SuperstiUans 

Les brebis sentent le loup de cent lieues loin 

<p.). 

Pour obtenir que les moutons jouissent d'une 
lx>nne santé, on oSre de la laine à saint Jean 

.<S.-C.). 

Les moutons jouent, ainsi qu'on le verra dans 
les dépositions ci-après, un rôle assez important 
dans la supeistition, et les lutins empruntent 



14 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

souvent leur apparence pour se moquer des gens 
crédules et peureux. 

Quelquefois, lorsque le pâtre croit avoir fait 
rentrer tous ses moutons à Tétable et qu'il vient 
de fermer la porte, il aperçoit dans le bas de 
Taire un mouton à moitié couché, et qui semble 
fatigué. Il va à lui, croyant qu'il fait partie de 
son troupeau ; alors le mouton se met à fuir, et 
le pâtre court après sans pouvoir l'atteindre. 

De temps en temps, quand la bête a un peu 
d'avance sur le pâtre qui la poursuit, elle s'assied 
de nouveau, mais pour repartir dès qu'on 
approche. Après avoir couru vainement, le mal- 
heureux berger revient à la ferme fatigué et 
chagrin, et s'il lui arrive de compter son trou- 
peau, il s'aperçoit que pas une bête n'y manque. 

C'est un lutin, c'est le mouton-errant qui 
s'est amusé à le faire courir. 

(Conté en 1863 par Emile Frostin, de Matignon.) 

Le mouton^errant va se promener à l'époque 
des pleines lunes, de onze heures du soir à quatre 
heures du matin. Il affectionne les avenues et les 
clairières. Si on s'approche de lui, il se précipite 
sur l'imprudent et le frappe de ses cornes. Si on 
ne lui dit rien, il reste tranquille. C'est une bête 
tout à fait redoutée : jadis, à Saint-Brieuc-des-IfEs, 
les habitants faisaient de grands détours pour ne 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I5 

pas passer par les endroits où se tenait le mouton- 
errant. 

(Conté en 1880 par J. Legendre, de Saint-Brienc-det-Iffs.) 

« Us (les lutins) s'ofïrent aux regards sous la 
forme d'un mouton égaré qui suit les gens, et 
semble implorer le retour au bercail. Malheur à 
celui qui se laisse attendrir, le charge sur son 
cheval ou le met sur ses épaules ! L'animal 
devient si pesant que celui qui s*en est chargé est 
forcé de le mettre à bas. Alors le lutin railleur se 
transforme et parait en feu follet ; il manifeste sa 
joie par de grands éclats de rire et s'enfuit vers 
les eaux. » 

(M»* de Cerny, p. $4 ei sqq.) 

Un soir un homme qui s'en revenait de Mon- 
contour vit un hourd qui semblait fatigué. U se 
dit: 

— C'est le hourd du Boumeuf ; vantie^ (peut- 
être) qu'i' sont en peine de li. 

Il le chargea sur ses épaules pour le rapporter 
à la ferme ; mais plus il marchait, plus l'animal 
devenait lourd, et il fut obligé de le laisser 
tomber, bien heureux d'en être débarrassé. 

(Communiqué par M. E. Hamonic, de Moncontour.) 
Cf. Rolland, t. IV, p. 159. 

Un nommé B... et son frère étaient partis tous 



l6 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

deux un soir pour aller chercher une sage-femme. 
Comme ils allaient franchir un échalier pour 
prendre un sentier, ils virent un mouton qui se 
tenait auprès; pensant que c'était un lutin 
xiéguisé, ils fie voulurent pas essayer de passer 
en employant la force. Ils prirent un autre sen- 
tier; mais au premier échalier qu'ils rencontrè- 
rent, le mouton se montra encore devant eux. 
•Cette fois ils ne retournèrent point sur leurs pas, 
vet le mouton ne leur fit aucun mal. 

(Conté en 1878 par Ângèle Q.uérinan, d'Ândouillè.) 

Il y a des pays où, dans la belle saison, les 
^chevaux passent la nuit dehors, et, ' pour les 
garder du loup et des voleurs, un garçoti couche 
dans une sorte de loge construite exprès et d'où 
il peut surveiller ses bêtes. A côté de lui est une 
trompe faite de la corne d'une vache, et dans la- 
quelle il souffle quand il a besoin de secours. 

Un garçon de ferme, de la commune d'An- 
douillé, qui couchait dans une de ces loges, se 
sentait toutes les nuits foulé et pressé jusqu'à en 
perdre la respiration ; mais il avait beau regarder 
«t tâter avec la main, il ne voyait et ne sentait rien. 

Cela dura quelques nuits, au bout desquelles il 
déclara à son maître qu'il ne retournerait plus 
garder les chevaux ; il lui raconta en même temps 
ce qu'il éprouvait chaque nuit. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE IJ 



Le fermier lui conseilla d'aller se confesser ; le 
recteur donna au gardien une bouteille pleine 
d'eau bénite, et lui dit d'en jeter des gouttes tout 
autour de la cabane, ce qui fut accompli. 

Le garçon ne ressentit plus d'oppression ; mais 
il vit un mouton qui tournait tout autour de la 
loge, en se tenant en dehors du cercle arrosé 
d'eau bénite. C'était le lutin, qui ne pouvait 
franchir cette limite, et qui devenait visible au 
lieu d'être caché comme auparavant. 

(Conté en 1878 par Angèle Q^érinan, d'Andoaillè.) 

En Bjisse-Bretagne (cf. Le Men, p. 419), les latins prennent 
Aussi la forme d'un bélier. J'ai traité, p. i$9 et suiv. du tome I, 
4les transformations des lutins en bêtes. 

Il était une fois un homme qui allait au bourg 
de Corseul. Sur sa route il vit, pas bien loin de 
lui, une bête qui ressemblait à un mouton, et ils 
5e trouvaient tous deux sur le point de passer un 
pont qui n'avait que la largeur d'une personne* 
L'homme se dit : 

— Je vais toujours passer le premier. 

Il coupa une branche d'arbre, et justement le 
mouton et lui se rencontrèrent sur le pont, et 
comme aucun ne voulait céder à l'autre, l'homme 
poussa le mouton, qui était Mourioche ; la bête.< 
tomba à l'eau et se mit à rire. 

— Ah 1 lui dit l'homme, tu t'es baigné le 
derrière I 

II 2 



l8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



— Oui, répondit le mouton, mais tu vas 
baigner le tien aussi. 

Ils firent route ensemble et arrivèrent au bord 
d'une petite rivière. M'ourioche sauta par dessus^ 
et quand l'homme voulut passer, il le jeta dedans 
et se sauva ensuite à toutes jambes. 

(Conté en 1881 par Isidore Poulain, boulanger, âgé de vingt- 
six ans.) 

Cf. sur Monrioche le tome I, p. 162. 

Aux Moulins - Neufs, le bonhomme Pierre 
Lenoir ^Ua un jour pour chercher son cheval, 
et il monta dessus, non sans remarquer qu'il 
paraissait en bon état. Arrivé au ruisseau, il 
passa par le milieu au lieu d'aller par le côté, 
comme c'était son habitude, et il fit tomber le 
bonhomme à l'eau. Alors celui-ci, se doutant de 
quelque maléfice, retourna à la pâture et vit son 
vrai cheval qui paissait tranquillement dans le 
champ à côté, et il monta dessus après avoir fait 
le signe de la croix entre ses oreilles. 

Le lendemain, il chargea son fusil et mit dedans 
une miette de pain bénit, et comme un mouton 
paraissait le suivre, il l'ajusta ; dès que le mou- 
ton eut été touché, il se mit à se plaindre comme 
une personne, et le bonhomme Lenoir y pensa 
de longues années après, en regrettant son coup 
de fusil. 

(Conté en 1879 par Françoise Damont, d'Ercé.) 



L= J 1 — -. — — — »» J- 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I9 

En Berry on se sert de balles qui ont été bénies (cf. Laisnel, 
t. I, p. 187). 

A Bréhand, il y avait un bonhomme surnommé 
Vieux-Loup. Tous les soirs cinq moutons, les uns 
blancs, les autres noirs, venaient chez lui à la 
tombée de la nuit, et ils attendaient dans le foyer 
le maître de la maison, qui souvent ne rentrait 
que tard. Alors ils passaient avec lui dans une 
pièce à côté. Les domestiques étaient habitués à 
eux, et ils ne leur disaient rien. 

Le bonhomme, qui était riche, passait pour ne 
jamais coucher chez lui ; à l'église il tournait le 
cul à l'autel (ceux qui tournent le cul à l'autel ou 
aux processions ont commerce avec le diable). 
Il ne voulut pas se confesser avant de mourir, 
et ses moutons suivirent sa châsse jusqu'au cime- 
tière; les porteurs assurèrent qu'il n'était point 
dans sa châsse. 

(Communiqué par M. £. Hamonic.) 

Il est souvent question de moutons dans les 
Contes populaires de h Haute-Bretagne^ soit comme 
personnages importants, soit comme personnages 
épisodîques. Voici le titre de ceux où ils figurent : 
ire série, La Brélneitt hUnche, no LTin; 2« série. 
Le Bélier courant et la Bergère aux champs^ no l 
(id le mouton est une forme du diable); Le petit 
Mouton Martinet y no xxix ; La Houle du Grouin^ 



20 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

no X (les fées les tondent) ; Lis Fées du GuildOf 
U9 XL'y La Houle de Beauçais (moutons noirs des 
fées), no XIV ; Le Mouton sorcier, dans Litt, orale ; 
La Houle de la Corbière, p. 6. 

Dans un conte inédit de ma collection, qui 
appartient au groupe des houles, une fée donne 
dçs fnoutons à conduire à un jeune pâtour afin 
qu'il les mène paître, et elle lui fait présent d'une 
baguette à Taide de laquelle il peut à volonté faire 
dispardtre son troupeau. 

Un conte non encore publié, recueilli vers 
Mpncontour, fait de trois moutons les gardiens 
de trois trésors composés d'or, d'argent et de 
cuivre, et ils sont blancs, gris et noirs; l'un d'eux 
adresse la parole à un tailleur qui a trouvé le 
moyen de pénétrer dans la grotte. 

LE BŒUF (Bos dombstzcus) 

Noms patois. —- Langage qu'on adresse aux haufs 

et aux vaches 

Dans le patois gallot, on donne souvent le 
nom de hœu\ soit au taureau, soit au bœuf 
proprement dit, car on les distingue assez rare- 
ment. Le taureau se nomme aussi tore (M., S.-D.); 
torm (M.)> pl* toriaoux (M., S.-D.); taré banal 
ou iorim bottier ; en ce dernier cas il est considéré 



mmmss^;;^ 



'ii-'~=_ =>■ sx:- 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 21 

comme étalon; îoueilîe (vers Gahard, Ule-et- 
Vilaine; ce mot vieillit). Qjiand il est encore 
jeune, il s'apelle torin (E.); iorilîon (S.-D.). 

Voici quelques noms propres des bœufs : \ 
Si l'animal n'a qu'une couleur, il porte le nom 
de sa robe, le Rouge, le Nèiry le Blanc, etc. (M., 
E., P.), Rougeaud, Noiraud (Loire-Inférieure, Sou- 
vestre). S'il est de deux couleurs, on l'appelle 
Gare, et c'est le nom de celle des deux couleurs 
qui est dominante qui sert à continuer le nom : 
un bœuf rouge et blanc, si le rouge domine, s'ap- 
pelle Gdre rouge ; blanc et noir, si le noir domine, 
Gdre noir (P.). 

D'autres noms leur sont donnés à cause de 
quelque circonstance particulière ou de leur con- 
formation : Tête Manche, Grosse épaule. Cou nèir. 

Cf. sur les noms des boeufs en Berry, Loisnel de la Salle, t. II, 
p. 140, et sur les noms des bœufs en général, Rolknd, t.V, p. 24-29. 

Vers Moncontour, surtout dans les communes 
de Plessala et de Saint-Gouéno, où le bœuf est 
employé aux travaux dts champs, le joug se 
nomme le jeue ; la paire de courroie, les conraie ; 
la croix en paille, une tocque (on n'y attache 
aucune idée superstitieuse ; c'est simplement pour 
que le joug fasse moins de mal). La cheville sert 
au conducteur à tirer ou â pousser les bœufs du 
côté qu'il veut les faire marcher. La hard en 



22 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

chêne s'appelle engUe ou emhiée ; la chaîne (quand 

on veut mettre deux couples de bœu£s), le cro. 
Pour aller à droite, on dît : Guia^har, 
Pour aller à gauche, on dit : Hardi hard 1 
On chante des chansons aux bœufs pour les 

encourager, mais je n'ai pu m'en procurer 

aucune. 
En voici une que Souvestre recueillit, dans la 

Loire-Inférieure, d'un paysan qui la répétait dans 

un mode plaintif et sur le ton élevé ordinaire aux. 

chanteurs de la campagne : 

« Hél 

Mon rougeaud. 

Mon noiraud, 
Allons ferme à Vbousteau (le logis) ; 
Vous aurez du renouveau (regain). 
Ubon Dieu aim' les chrétiens I 
L'blé a graine ben, 
Mes mignons ! c'est vot'gain 1 
Rjes gens auront du pain ; 
^os femm's vont ben chanter, 
£t les enÊints s'ront gais I 
Hé! 

Mon rougeaud. 

Mon noiraud, 
Allons ferme à Vbousteau ; 
Vous aurez du r'nouvfau, » 

{Les Jemiers paysans, p. 80.) 

Cf. Laisnel de U SaUe, t. II, p. 140, Les chants des Brioleux 
herricbanSf et Rolland, t. V. p. 30. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 2$ 

Quand les taureaux marent (frappent) la terre 
avec leurs cornes, on leur crie : 

Tore, bugne, bugne 1 (S.-D.) 

par imitation du beuglement du taureau en 
colère. 

En parlant d'une vache aux enfants, on leur 
dit que c'est une caunette (E.). 

La vache stérile s'appelle taure (E.). On dit 
aussi d'une vache qui est menée au tore et qui ne 
retient pas qu'elle est enveruée (S.-D.). 

La jeune génisse est un g'nisson (E.). Le pis de 
la vache se nomme pé (M. , E.), les trayons des 
iériants (M., S.-D.), des trèyans (Tréveneuc). 

D'une vache en amour on dit qu'elle est en 
hœu\ en chasse, en cour ou qu'elle est entorinée. 
En ce cas on la mène au bœu', c'est-à-<Jire au 
taureau, qui la chasse (P.). 

La joubarbe donnée aux vaches les rend'amou- 
reuses. 

Cf. an chapitre des Plantes^ le mot Joubarbe. 

Il y a des jours où l'on ne doit pas mener les 
vaches au taureau, dans les Trécoles par exemple, 
qui sont ou les trois premiers jours de mai, ou 
les trois derniers, ou les trois du milieu du mois. 
Le veau qui naîtrait de cet accouplement serait 
tortu ou bossu (E.). 



24 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Dans le Jura (cf. Laisnel de la Salle, t. I, p. 45), il y a les 
jours de la vieille qui sont les trois derniers jours de mars et le^ 
trois derniers jours d'avril. Cf. aussi Rolland, t. V, p. 85-84. 

Si, avant d'être menée au taureau, et le jour qui 
suit la saillie, une vache pâturait dans un endroit 
où a passé un hérisson, elle serait enhérissonnée et 
vêlerait difficilement. C'est pour cela que ce jour 
et le lendemain on évite de la mettre aux champs 

(E.). 

La vache pleine est dite embauinée (M.). 

Quand les vaches sont prêtes à vêler, on dit 
qu'elles sont ameillantes, parce qu'elles commencent 
à donner du lait (M.). 

Le veau que la vache a vêlé, respè de vous, 
s'appelle : viau (E., M.) ; vachet (M.) ; vachot (E.) ; 
kécho (S.-D.). 

Quand il tette, on le nomme laitron (S.-D.) ; 
sevron (S.-D.) quand on est en train de le sevrer 
et qu'on l'a mis en keîîion (M.). 

Les vaches qui composent un troupeau ont 
chacune leur nom propre^; il est tiré de la couleur 
de la bête ou de quelque circonstance particulière 
à elle. Parfois aussi la vache porte un nom de 
fantaisie, ou bien celui de son premier proprié- 
taire ou du pays dont elle vient. 

La vache noire se nomme la Naire (M.); la 
Nêre (P.) ; la Breune (P.) ; la Taupin (P.) ; la Chd^ 
taigne (E.) ; la rouge, la Rouge (P.) ; la rouge et 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 2$ 

' blanche, la Gdre rouge (P.) ; la Piolée, tachée de 
noir et de blanc ou de rouge; rouge avec des 
petits points blancs, la VergéUe (P.) ; la Virée (E.); 
la grise : la Gri5e\ celle qui a sur la tête du rouge 
et du blanc, la Moquarde ; celle qui a du rouge en 
petites taches sur le blanc, la Papillon ; la PietUe 
(E., G.), qui est d*un blanc taché de noir ou de 
rouge ; la Frinquetie, celle qui est fringante et frappe 
du pied ; la NaguetUy qui a la corne rabattue ; la 
Grand* Ventre, qui a le ventre gros; la Gran'- 
Cornée, qui a de longues cornes (P.)- D'autres 
s'appellent Rougette, Cornette, etc. ; Marie pisse 
trois gouttes^ c'est le surnom donné à celles qui 
ne donnent pas beaucoup de lait (H.). 

Èchoupicher une vache, c'est la traire pour en 
avoir jusqu'aux dernières gouttes de lait (S.-C). 

Si on oublie de traire les vaches, leur pis se 
gonfle; elles sont empissées (M.), 

La vache qui est épessée, c'est-à-dire dont le 
pis grossit, est sur le point d'émeiller, d'avob: du 
lait en abondance (S.-D.). 

duand les vaches sont difËdles à traire, on 
tâche de les enj'nouilletter. On plie le genou de la 
bête ; on place sous le jarret un bois long, et on 
noue solidement avec une corde le genou 
recourbé (S.-D.). 

On appelle herhagne (Plouvara) la vache qui» 
depuis un an, ne donne que peu ou point de lait ; 



26 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

la vache anouilîère (M.); meulière (S.-D.) est 
celle qui n'a pas de lait. 

On leur attache aussi la corne au pied avec 
une corde; cela s'appelle ensep'ler (S.-D.); ensépéter 
<Çi)ç euhender (M.). 

Les vaches qui passent facilement en dommage 
^'appellent des passardes, ou des vaches larronmSy 
ou coquines (P.). 

Les vaches qui beuglent bugïent. 

Qpand une vache est méchante, on se hâte de 
Vembaogner (E.) en lui mettant sur les yeux un 
morceau de bois ou d'étoffe qui l'empêche de 
voir devant elle. 

Les vaches qui ruminent sont à gouber (S.-D.); 
€(^er (M.). 

Si elles se battent, elles se hoinent (E.) ; quand 
«lies cornent, elles houïlUnt (Tréveneuc) ou caU" 
nent (E., M.). 

La vache qui est écornée est dite écaunée (M., 
P.) ou cornette (Plouvara). 

On dit qu'une vache a les pigeons quand elle a 
à la hanche une grosse excroissance sous-cutanée 
<S.-D.). 

Une vache météorîsée est empansée, d'où em- 
pansement y météorisation (M.). 

Si elle a mangé trop de pommes, elle est em^ 
pommée ou empiUmée (£.). 

On appelle hérisson une maladie des jambes 



DE LA HAUTE -BRETAGNE Tf 

•dont les vaches crèvent souvent; on assure que 
c'est le hérisson qui la leur communique (P.). 
Pour appeler les vaches, on dit : 

Tieu I tieu I (S.-D.) 
Qmeu I quieu I quieu 1 (Tréveneuc.) 
Qjiéva 1 quéva 1 (M.) 
Haïsse quio ! (P.) 

Pour les détourner : 

Alou ici I (S.-D.) 

Pour les chasser : 

Hait'si 1 

Houache que I (P.) 

Pour les faire boire : 

Volé I volé I volé ! (S.-D.) 
Vlau I v'iau I Vlau I (M., P.) 
Voleu 1 voleu I voleu I (P.) 
Jou la 1 jou la 1 joa la 1 (Tréveneuc.) 
Hol I hol 1 hol 1 (Tréveneuc.) 

On appelle les veaux en leur criant : 

Kécho 1 kécho l (S.-D.) 
Vachet I vachet ! (M.) 
Vichi I vichi 1 (P.) 

Pour faire moucher les vaches, on dit auK 
taons : 

Petit bourdon de saint Laurent, 
Qji'a piqué mon petit viau blanc. 



28 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Sous le pé, sous la quoue. 

Pour le £fure moucher plus doux. 

Ta kss, ta kss (E.). 

On leur crie aussi pour les faire ouider, c'est-à- 
dire moucher, mot employé à Plouvara : 

Oui déda I oui déda I 
(jtz, gzz, gz (S,-D.). 

Cette dernière syllabe contrefait le bruit des 
ailes du taon. 
Ou: 

Tan-gzz, tan-gzz, gzz 1 gzz 1 gzz 1 (Tréveneuc.) 

Pour les empêcher de moucher, on leur crie : 
Kio I kio I kio 1 (P.) 

Le jour de Saint-Sylvestre, on dit aux pâtours 
d'aller dans les étables couper une touffe de poils 
entre les cornes des vaches, en leur assurant 
qu'elles ne moucheront plus dans l'année. C'est 
une attrape analogue à celle du poisson d'avril 
(E., P.). A Penguily, c'est sous l'oreille gauche. 

Proverhes et Dictons 

Si bœuf savait, 
Si sourd entendait. 
Si taupe voyait, 
Homme sur terre ne vivrait (E., M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE l^r. 

L'œil du bœuf, dit-on, lui fait voir les hommes 
gros comme des momagnes (Morbihan). 

Cf. SoQché (Poitou)» p. 2$, et MéJ., col. $$$ (environs de 
Kantes). 

Il vaut mieux entendre un bœuf parler 
Cbi'une fille suhler (siffler) (P.). 

— Fille qui subèle (siffle), vache qui heilU (beugle 
comme un taureau), poule qui chante le coq, 
sont trois bétes qui méritent la mort (Ille-et- 
Vilaine). 

Rolland, t. V, p. x6, dte un »inûlaire wallon. 

n est malséant à une fille de siffler. 

Donner un œuf 
Pour avoir un bœuf (D.). 

— Tore du bié nier, ou tore bousoux. Taureau 
de blé noir ou taureau couvert de bouze, terme 
injurieux (S.-D.). 

Il est sorcier 
Comme une vache qui bouse us genêt (E.). 
Cf. Rolland, t. V, p. 8$. 

— y voudras HCt dans Vven^e d^une vache diqu^à 
(jusqu'à) Pâques (E.). — On emploie ce dicton 
en hiver, quand le temps est rigoureux et qu'on, 
voudrait bien être au chaud. 

— Jeter le pot après les vaches (E.). Jeter le 
manche après la cognée. 



30 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Les vaches donnent le lait par la goule 
(S.-C, P.). 

— Le pé (pis) de la vache est tombé dans le 
plaU (M.). Se dit quand on a fait une maladresse. 

— Avec lui, il n*y a ni petite vache, ni petit 
veau (E.). Il exagère. 

— r n'faut pas boire le lait comme la vache le 
donne (S.-C). Il faut économiser. 

— Méchant comme une vache enragée (M.). 

— Je ne m'y fie pas p'us qu'dans eune vache 
icânée (écornée) (M.). 

— Ce sont les viaux qui veulent mener les 
vaches es champs (Gilorguen). 

— Allongé comme un viaou (S.-D.), 

— Braire comme un viau. 

Similaire en Poitou (cf. Desaivre, Croy.f p. 23). 

A TÂscension, 
On laisse le veau, on prend le mouton* 

D*après Habasqne, qui cite ce proverbe, t. II, p. 297, il ferait 
allusion à la coutume des bouchers, qui ne débitent guère de 
viande de mouton que lorsque l*hiver est passé. 

— On li f rait croire que les nues sont de 
peaux d'viaux (E.). 

Devinettes 

Quatre allants, quatre tirants. 
Fouette au eu et broc devant. 

— Une vache. 

Cf. Mélus.^ col. a4$ ; Rolland, D. 43. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 3T 

duatre qui démêlent le bouillon, 
Qpatre qui portent le petit rainssion. 
Et quatre qui regardent en haut. 

— Une vache. 

Qjaatre qui vont. 

Quatre qui viennent, 

Qjiatre qui battent la charrière. 

— Une vache et son pis. 

Cf. Rolland, D. 44. 

Quatre petites bouteilles dans un pré, 
r pleuvrait toute la journée 
Elles ne seraient pas encore mouillées (D.). 

— Le pis d'une vache. 

Cf. Rolland, D. 45 , et le t. V de la Faune populaire^ p. 1 1 3 - x 14. 
Q}ii est couché sur la paille et qui n'y touche pas? (P.) 

— Un veau dans le ventre de sa mère. 

Cf. Rolland, D. 46. 

Superstitions et Croyances 

Pour que les vaches aient leur veau en jour, 
il faut que la dernière fois qu'on leur tire du lait 
soit un dimanche. 

A Saint-Cast, pour empêcher les vaches d'être 
malades, et pour que leur veau arrive à bon 
terme, on offre à saint Jean le beurre de la 
première barattée; ailleurs, c'est à la Vierge que 
l'ofirande est faite. 



32 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Le lait de vache noire passe pour avoir la vertu 
<i'éteindre les incendies (E., P.). 

Croyance analogue dans les Vosges (cf. Mil., col. $02). 

La main de la Vierge est marquée sur les côtes 
d'une vache écorchée (E.). Cest le grand 
pectoral, qui dessine la forme grossière d'une 
main. 

Un bâton de baratte "en ajonc empêche les sor- 
ciers d'ensorceler la baratte. 

En Poitou (cf. Desaivre, Cr<y.j p. 20) existe la croyance i 
<et ensorcellement ; mais le remède n*est pas indiqué. 

Si on croit que le lait des vaches a été soutiré, 
on va trouver le devin, qui ordonne de faire 
bouillir des épingles dans du lait de la bête ensor- 
celée : les épingles piquent celui qui a ensorcelé, 
<et il se hâte d'accourir pour enlever le sort (E.). 

Qpand une vache ne donne plus de lait, et 
<}u'on suppose qu'elle a été ensorcelée ou qu'un 
mendiant lui a jeté un sort, il faut lui faire faire 
le tour d'un champ à trois cornières (angles). 

Sur les sorciers qui soutirent le lait, cf. le t. I. du présent 
livre, p. 185 et 276, et Rolland, t. V, p. 94. 

Parfois, si une vache ne donne plus de lait, 
.c'est qu'elle a été mise à Tétable « dans une 
maison bénite » (Plouêr). 

Une croyance analogue existe en Franche-Comté (cf. Mil., 
<ol. J7I). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 3$ 

On accuse aussi les 'i/îins (reptiles) de tarir les 
vaches en leur suçant le pis; le même préjugé 
existe à l'égard des hérissons. (Voyez plus loin 
ies mots : Hérisson, Serpent, Couleuvre^ etc.) 

On met du sel sur les litières neuves, pour 
chasser les v'iins (reptiles), qui ne peuvent souffrir 
le sel (E.). A Penguilly, on met du seà ou haut- 
houée (sureau) sur le sol et à tous les coins de 
rétable, pour arriver au même résultat. 

Autrefois il y avait des lutins qui prenaient la 
forme de bœufs et faisaient l'ouvrage tout de 
travers, pour jouer des tours aux bouviers. 

C'est pour conjurer ces maléfices qu'on lie les 
jougs en croix. 

Un homme avait cinq bœufs dans une pâture. 
Il alla pour les chercher ; mais il n'en trouva que 
quatre. Le lutin avait caché le cinquième, qui 
était un petit bœuf gare. Après l'avoir cherché 
longtemps en vain, l'homme entendit dans un 
champ voisin le lutin, qui riait de sa déconvenue. 

(Conté en 1878 par Jean Bouchery, de Dourdain.) 

La croyance que le latin peut prendre la forme d'un bœuf oa 

d'un taureau existe aussi en Basse-Bretagne (cf. Le Men, 

p. 419). 

Un homme avait perdu sa génisse. Pensant 
qu'elle s'était adirée, il se mit à sa recherche, et 
il l'aperçut dans un chemin creux. 11 courut après 
elle; mais le chemin s'emplit tout à coup de feu. 

n 5 



14 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

L'homme entendit un beuglement à faire trembkr^ 
et jamais depuis il ne revit sa vache (P.). 

A la croix de Retiers, à Ercé, on voit passer 
des vaches qui ont sur le dos un panne (sorte de 
selle). Elles ne disent rien à personne; mais il ne 
faudrait pas les déranger (E.). 

Les loups-garous pouvaient aussi prendre la 
forme de bœuf, ainsi qu'on le voit dans le conte 
qui suit : 

Il y avait une fois aux Baulets des gens qui 
battaient de l'avoine; pendant que les autjres 
étaient à diner, l'un des batteurs resta à garder 
l'aire. Tout à coup survint un beau bœuf qui se 
mit à comailler l'avoine et à la répandre par 
monceaux dans l'aire. L'homme lui lança un 
gavdot (fourche de fer) dans la tête et le lui en- 
fonça si profondément que la fourche resta fichée 
dans le front du bœuf, qui se sauva à toutes 
jambes en beuglant. 

Le lendemain, cet homme étant allé à la foire 
à Plénée, entra dans une auberge et y vit son 
gavelot à la porte. Il y avait dans le coin du 
foyer un homme qui lui demanda s'il ne connais» 
sait pas cet instrument. 

— Non, répondit le batteur d'avoine. 

— Si, dit l'autre, c'est le vôtre, et c'est vous 
qui m'avez délivré en me le lançant à la tête* 
Pour votre récompense, je vais vous mener à un 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 55 

endroit que je sais, et où se trouve one barrique 
d'argent. 

Les deux hommes allèrent a» Ch^onge et 
virent la barrique, qu*fls se mirent à monter en 
haut; ils y étaient bientôt arrivés quand l'un 
d'eux s'écria : « liens bon \ nous l'avons. » 

Mais il ne fallait pas parler, et aussitôt la 
barrique retomba dans le fond du trou. Le knde* 
main, on la vit passer au bas des Couets. 

(Conté en 1881 par J. M. Comanft, an Gcrany.) 

Xe Chalonge, coflSue an-dessns de Bonlet, commune dn 
Go«tay. Les Cooets sont dtat petite» mièies. Le taon où italt 
cette bo^^ae, et qu'on montra encore, «st d'une as«es grande 

profondeur. 

Il était une fois un jeune homme qui demeurait 
avec ses parents; comme ils étaient pauvres et 
que l'ouvrage manquait dans le pays, il se mit à 
voyager pour chercher à exercer son métier <fe 
^eur de pierres. Il marcha longtemps, longt^nps, 
sans trouver à s'employer. 

Un jour qu'il passait près d*un bois, il lui 
sembla entendre dès vadies beugler. S traversa 
le bois pour voir ce que c'était et pour demander 
à ceux qui, à ce qu'il pensait, gardaient le trou- 
peau, S'il' n'y aurait pas de l'ouvrage pour lui 
dans le pays. QjKmd U fut. sorti au bois, il vit 
plus de quarante vaches qui s'attiraient de dessous 
terre et s'envolaient aussitôt, car elles avaient 



$6 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

des ailes k II s*approcha de Tendroit d'où il les 
avait vues sortir ; il vit une carrière où des car- 
réyeurs étaient à extraire des vaches. Ils lui crièrent 
de venir leur aider, s*il connaissait quelque chose 
au métier. 

Il descendit dans la carrière; mais comme il 
était plus fin que les autres, dès qu'il les avait 
extraites, il leur coupait les ailes, de sorte qu'elles 
ne pouvaient s'envoler. Il eut ainsi un nombreux 
troupeau, et au bout de trois mois il alla les 
vendre et en retira cent mille francs. 

Le lendemain de ce marché, il descendit dans 
la carrière, et quand il eut extrait une vache, au 
lieu de lui couper les ailes, il monta sur son dos 
et dit adieu à ses camarades. 

La vache se mit à voler dans les airs; mais 
comme elle ne se pressait pas de descendre à terrç, 
il lui coupa les ailes. Il la conduisit dans son 
pays, et le seigneur de son village, qui n'avait 
jamais vu de vache ailée, la lui acheta cent mille 
francs. Le carréyeur se mit alors à son aise et 
resta à demeurer avec ses vieux parents. 

(Conté en 1882 par Isidore Poulain, de Pladuno, boulangera 
Saint-Cast.) 

La nuit de Noël, les bœufs se metteht à genoux 
quand minuit sonne ; mais il est dangereux d'aller 
vérifier le fait à cette heure-là. 

Un fermier, qui avait entendu dire que les 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 37 

boeufs s*agenooillaîent, voulut entrer dans son 
étable pour les voir. Il alluma une chandelle de 
résine, qui fut éteinte par deux fois par un souffle 
au moment où il entrait. Il la ralluma encore ; 
mais au moment où il passait le seuil, il reçut 
d'une main invisible un coup de poing sur la 
tête, et il comprit que c'était un avertissement 
pour ne pas aller plus loin. 

Croyance analogue en Poitou (cf. Souche, Croy.^ p. x), en Nor- 
mandie (cf. A. Bosquet, p. 221). 

Jadis on ne donnait point à manger aux boeuâ 
pendant la nuit de Noël, ni le lendemain jusqu'à 
midi. 

M. L. Desaivre, Essai de mythologie locale, p. 5 , rapporte presque 
dans les mêmes termes les superstitions du Bas- Poitou sur la 
nuit de Noël. 

Pendant la nuit de Noël, un maître entendit 
converser ses bœufs. L'un d'eux disait : « Qja'est- 
ce que je ferons demain ? » Un autre répon- 
dit : « Je porterons demain notre maître en terre, 
car c'est demain qu'il doit trépasser. » 

L'homme effrayé fut bien vite à confesse. Il 
mourut le lendemain, et les boeufs l'accompagnè- 
rent, selon leur prédiction, à sa dernière demeure. 

(Communique par M. Bonne.) 

Cf. dans Laisnel de la Salle, t. I, p. 16-17, un conte berri- 
chon similaire. Cf. aussi Souche, Proverbes, etc., p. 8, un récit 
poitevin analogue. 



38 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Voici les titres des contes gallots oîi les bœu&, 
Uureaux ou vaches jçmem un rôle : 

Contes populaires^ v^ série : Le Taureau Heu, 
no m; La HouU de Chêlin, n© xv ; — 2© série : JU 
Houle Saint-Michel, n^ v; La Houle du ChâieUt^ 
Qp I (vacbes invisibles des fées); La Houle du 
Grouin, n» x (vaches ensorcelées) ; Les Boeufs des 
fiesy no xxxni (bœufis qui ne doivent travailler 
que d'un soleil à l'autre et qui meurent si^ après 
le crépuscule, on les fait tirer la charrue). — LUt, 
oraUy La HouU delà Corbière et les notes, p. 12-13. 

Pour récompenser du lait qui leur a été donné 
gratuitement, les fées des houles (conte inédit) 
accordent à toutes les vaches de fournir du lait 
en abondance. 

Le domestique loup-garou du conte du Loup- 
garou, no xlvii, i« série, n'a pas attaqué le pre- 
mier homme qui a passé, parce que sa mère, étant 
enceinte de lui, avait mangé un cœur de veau ; 
mais il lutte avec le troisième, parce que sa mère 
avait mangé un cœur de bœuf. 

D'après un récit de la série inédite des Margot, 
les fées viennent la nuit manger la vache d'un 
homme. Il leur en demande un morceau; au 
matin, sa vache était intacte, sauf ce qu'il avait 
lui-même mangé. 

Cf. tome I*' du présent ouvrage» p. 156, un récit où les 
lutins remplissent le rôle attribué ici aux fées. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 39 

Une allégorie qui se retrouve dans plusieurs 
contes populaires fait des vadies des emblèmes ; 
j'ai en portefeuille un conte intitulé Li mariage 
du soleil, où le héros voit des vaches grasses dans 
des prés maigres, et des vaches maigres dans des 
prés gras. U demande l'explication, et on lui 
répond que les vaches grasses dans les prés 
maigres sbnt les riches qui, après leur mort, ne 
sont point heureux; les vaches maigres dans des 
prés gras sont au contraire les pauvres qui, après 
leiu: mort, sont allés en paradis. Cette allégorie a 
été trouvée — avec une addition pour le purga- 
toire — en Gascogne par M. J. F. Bladé. 



LE CHAT (Felis catxjs) 



Noms patois 



Le mâle s'appelle marlou ou marcou (£., M.); 
marcaou (cf. le breton mar-kas) ; mahud (S.-D.) ; 
màloar (Tréveneuc). 

On appelle mahon ou mahonnet les chats noirs 
(S.-D.). 

On donne aussi à tous les chats le nom de 
pitaou (S.-D.) quand on ne sait pas leur nom 
propre. La chatte qui met bas chatotme. 



9 



40 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Proverbes 

— Jamais chat ganté n'a fait bonne prise (M., 
E.). 

Cf. Rolland, t. IV, p. 102. 

^ — yétiens comme les chats : je parliens toutes 

les langues (S.-C). ^ 

— C'est de la bouillie pour les chats (E.)» 
C'est du temps perdu. ^ 

— Comme les chats, il retombe sur ses pattes 

(D.). 

— Cela arrivera ; la quoue à not'chat est bien 
venue (£.)• 

Cf. Rolland, p. 96. 

— Se mirer comme un chat dans une andouille 

(E.). 

— Vous n'arez point un bel homme ; vous 
n'aimez point les chats (D.). 

Cf. un dicton similaire dans Souche (Deux-Sèvres), Croy., p. 14. 

— On ne donne pas au chat comme il miaule 
(Calorguen). 

— Il a l'air d'un petit chat écorché. 

A vieux chat 
Jeune souris (E.). 
Cf. Rolland, p. 102. 

— Il a les yeux comme un chsLtfourgoU (agacé^ 
en colère) (S.-D.). 

Le jeu dé chien va devenir jeu de chat (Mon- 



\ \ 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 4I 

contour), c'est-à-dire : au lieu de s'amuser sans 
se faire mal, on va se griffer. 

Cf. RolUnd, p. 99. 

— Se débarbouiller par où les chats trottent 
(E.). 

— Donner à manger aux chats (Tréveneuc) : 
avoir de la chance. 

— n est parti avec les chats (Tréveneuc) : il 
n'a dit ni bonjour ni bonsoir. 

On donne le nom de chatfoinsé (E.) aux 
boutons qui viennent sur la main, le bras, etc., 
et qui parfois pourrissent. 

D'après Souche, Proverbes, p. 7, en Poitou, on appelle on 
bobo d'enfant « un p'tit maou d'chat ». 

On appelle les chats en criant : 
Piss I piss I piss I (S.-D.) 

Cf. le même mot en breton ; ou : 
PitaoQ I 



Ou: 



Mignon I mignon I (E., P.) 



Devinettes 



Qpatre pattes snr quatre pattes, 

Qpatre pattes attend quatre pattes. 

Qpatre pattes ne vient point. 

Quatre pattes s'en va et quatre pattes reste (E.). 

— Un chat sur une chaise, qui guette une 



42 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

sooris et qui quitte la chaise après Tavoir atocndiie 
en vain. 

Cf. Rolland, D. 40. 
Qjii a sept pieds, qaatie oreilles et une quove? (£.) 

— Un chat dans une marmite. 

Cf. Rdland, D. 40, 42. 

Superstitions et Croyances 

Si on avait le courage 4e tuer un chat et de 
manger sa cervelle toute chaude, on deviendrait 
invisible (D.). 

Ea Monnandie, i'après A. Boequet, p. 21 S, ce sont certains 
«s de la tète qui rendent invisible ; en £urs-et>Loir (cf. RollaA4| 
t. IV, p. 1 14), c'est Tos frontal d'an chat noir. 

Enterrer un chat crevé au pied d'un pommier 
qui souffre fait redevenir Tarbre florissant 
(S.-D., E.). 

Si on donne du pain bénit à un chat, il entre 
en fureur et devient comme enragé (M.). 

Jadis les chats avaient des cornes ; mais ils les 
ont vendues pour acheter du poisson, qu'ils 
aiment beaucoup (S.-D.). On dit aussi parfois 
qu'ils les ont vendues pour boire. 

Cf. Rolland, p. 106. 

Si on voit quelqu'un embrasser un chat, on dit : 

— Laisse-le, vtkdn sale; i' va t'donner des 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 4| 

dettes» On croit en effet que les chats peuvent 
communiquer des dettes ou d^utres (P.)* 

Cf. Rolland, p. iio. 

Les diats de mai sont mangés par le vieux 
mâle (P., S.-C). On dit qu'ils ne valent rien. 

Cf. dans VÈwngik des fuemuiUeSj, p. i^^ une supcntition 
analogue. 

Les chats d'/ouygr ne réussissent pas, c'est-à-dire 
ne vivent pas (S.-D.). 

On dit que pour qa*un chat soit bon à prendre 
les souris, il faut qu'il soit voleur (S.-C). 

CL Souche (Poitou), CrojaneeSf p. ix. 

Si on coupe les moustaches d un chat, il ne 
sent plus les souris (S.-D., E.). 

Cf. Rolland, p. 107 (Loiret). 

Un chat adulte retrouve son chemin si oa 
l'emporte niême loin de la maison où il est né. 

Superstition analogue dans les Voagas (Mil., col. 4$3), en 
Poitou. Cf. Souche, Croy. (Poitou), p. 32. 

On perd le chat ou on le noie en lui attachant 
une pierre au cou ; il est rare qu'on le tue autre- 
ment. 

Le chat, qui mange toutes sortes de viandes et 
de poissons a, dit-on, répugnance de l'ormée 
(ormier), d'où le proverbe ; « Les ormées ne 
passent point par le eu es chats » (S.-C). 



44 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Quand on voit les chats passer leur patte par 
dessus leur nez, c'est signe de pluie prochaine 
(S.-C, S.-D.). 

Cf. Rolland, p. m (Beance, Gâtinais). 

Le chat se venge quand on lui fait du mal. 

Une de ses vengeances favorites, c'est de 
monter dans le grenier et de pisser sur la personne 
à laquelle il en veut. 

A Saint-Cast, un chat battu monta dans le 
grenier pendant que celui qui l'avait frappé était 
au lit, et il lui pissait sur la tête. 

A Saint-Glen, un autre chat, pour se venger, 
pissait sur les galettes que mangeait celui qui 
l'avait battu. 

On coupe le bout de la queue des chats en 
certains pays, pour « tuer le ver » qui s'y trouve^ 
Ce ver n'est autre chose qu'un petit nerf. 
. Le même usage existe pour les chiens. 

Cf. Souchi Croy. (Poitou), p. 6 ; Rolland, p. 107. 

Lu cbats sorciers 

Si on ne coupait pas le bout de la queue des 
chats, ils seraient sorciers ; c'est un serpent qu'ils 
ont dans le bout de la queue (S.-C). 

Mbne croyance, quant & la sorcellerie, en Normandie (cf. A. 
Bosquet, p. 218), dans le Loiret (cf. Rolland, p. 107). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 45 

. Le soir du mardi gras, les chats vont faire le 
sabbat à tel ou tel endroit. 

Cf. Souche, Croy.t p. 17. 

On n'aime pas les chats noirs; on dit qu'ils 
amènent le diable dans la maison (P.). 

Sur les chats noirs et le diable, cf. Ch. Looandre, p. $2 et 89, 
cf. aussi Dttcom, Nouvelles gasconnes y p. 39. 

Ils se rassemblent ordinairement aux carrefours, 
autour des croix et dans les champs à trois cor- 
nières. 

A la Croix-de-Retiers, on voit un champ à 
trois cornières où les chats se réunissent pour 
faire leur sabbat. On les voit attelés, c'est-à-dire 
à la file les uns des autres (E.). 

Les croix de Saint-Cast, surtout celles qui sont 
en schiste et d'une forme particulière, passent 
pour avoir été plantées par les sorciers ; elles sont 
auprès de champs à trois ou cinq cornières, et les 
sorciers se réunissent autour. 

A la Croix-Bra, à la Croix-Renaud, les chats 
se rallient, surtout en mars, quand ils sont en 
amour ; jadis les sorciers y venaient (S.-C). 

« Les chats courtauds sont des chats de taille 
extraordinaire, qui tiennent conseil vers minuit sur 
les échàliers de la Haute-Bretagne. Ils sont 
méchants et n'aiment point à être dérangés. 
Q^and un intrus trouble leur grave entretien, ils 



4S TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Tentourent et lui font subir mille avanies. 
Ensuite le président du conseil se munit d'une 
longue aiguille et l'enfonce dans le cœur du 
patient, qui devient hypocondriaque et dépérit 
lentement. » 

(Paul Féval, Les dernières fées, p. 178, note i.) 

Les chats sorciers étaient rouges ; il y en avait 
un à Hénon sur lequel on a maintes fois tiré 
sans pouvoir l'atteindre ; tous les dimanches, à la 
même heure, il cassait une ribotte (baratte) ou 
quelque autre objet. Quand on voulait le tuer, il 
allait se cacher dans un bassin et avait Tair de 
narguer les gens. 

On vient chercher les chats sorciers pour 
démuîoiter les pourceaux ; on met le chat sous 
l'animal, et on lui fait gratter le ventre du cochon 
avec ses griffes. 

(Communiqué par M. Bonne.) 

Interprétation du sabbat des chats par une 
femme de Loudéac : Marca...ou, a*. .ou, pourqua 
qu'tu viens chez nou-ous? — Ciié qu'ça t'fout? 
qu'e qu'ça t'fout ?.*. Et i* s'eut* sautent à. la cri- 
gioasse. 

(GBomoniquè par M, . £. £niault.) 

Un pauvre homme qui s'en revenait de sa 
journée passait un soir par le chemin des Noes, 
non loin de la Cioix-^lu-Meurtel, lorsqu'il vit oa 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 47 

petit chat qui paraissait égaré. H eut pitié du 
pauvre abandonné, et ra3rant pris dans ses bias, 
il l'emporta à sa maison. 

Sa femme, qui était aussi bonne que lui, cafessa 
k chat et lui donna à manger. Qpand le chat eut 
mangé son content, il sauta sur les genoux du 
bonhomme et lui donna de tels coups de griffe, 
qu'il ne savait où se fourrer, puis il lui dit : 

— Reporte-moi où tu m'as pris, ou je vais 
t'étrangler; cela t'apprendra une autre fois à ne 
pas t'occuper de ce qui ne te regarde pas, et à 
sie riea dire à qui ne te dit rien. 

Un autre homme qui s'en revenait de couper 
des ajoncs passa auprès de la Ccoix-du^Meonel 
et y vit une centaine de chats qui s'étaient réunis 
pour danser. Comme ils ne paraissaient pas 
contents d'avoir un étranger auprès d'eux, et 
qu'ils le menaçaient déjà en lui montcarft leurs 
griffes, il eut peur et lança au milieu des chats 
sa faucille, qui en coupa un par le milieu et le 
tua. 

Aussitôt tous les chats disparurent en s'écriant : 

— Renault est mort I Renault est mort I 
L'homme^ de retour chez lui, raconta à sa 

femme comment il avait rencontré les chats, et 
comme, après qu'il en avait tué un, tous les autres 
s'étaient écriés : « Renault est mort I » 



48 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Son chat, qui était couché dans le foyer et 
avait écouté avec attention, se leva tout à coup, 
en s'écriant : 

— Ah ! Renault est mort t 

Et il disparut par la cheminée avec une rapidité 
étonnante (i). 

Quelques jours après, comme Thomme passait 
par le même chemin, il vit encore les chats sorciers 
qui dansaient. Il courut bien vite à la maison et 
revint avec son fusil chargé pour les tuer. Mais 
sur sa route, qui peu d'instants auparavant était 
très-unie, il trouva tant d'échaliers dressés et 
tant de fossés à sauter, qu'il était harassé de 
fatigue quand il arriva à l'endroit où il avait 
aperçu les chats. A sa grande surprise, il vit 
qu'ils avaient tous disparu : à leur place était un 
cercueil autour duquel se tenaient des prêtres avec 
des cierges allumés. 

(Conté en 1880 par Élie Mënard, de Plévenon.) 

Un soir un homme de Plénée s'en revenait 
avec son harnée (attelage) ; en passant près d'une 
croix, il vit des chats sorciers qui dansaient 
autour; ils s'enfuirent à son approche, excepté 
un qui resta et grimpa sur le haut de la croix, qui 
n'était pas très-élevée. L'homme lui frappa sur la 

(i) A Saint-Cast, i^ai trouvé la même légende, au nom prés 
dfx chat, qui s'appelle Robert. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 49 

tête un coup de pied de fouet, et le chat tomba. 
Les autres s'approchèrent de leur camarade et 
s'écrièrent : 

— Balthasar est mort I 

Quand le fermier fut de retour chez lui, il 
raconta à sa femme qu'en passant auprès d'une 
croix, il avait vu danser des chats, qu'il en avait 
tué un d'un coup de pied de fouet, et que les 
autres avaient dit : « Balthasar est mort 1 » 

Son chat, qui se chauffait dans le foyer entre 
ses jambes, se retourna vers lui et dit : 

<— Balthasar est mort 1 Balthasar est mort I 

L'homme leva son sabot et écrasa la tête de 
son chat en disant : 

— Et vous aussi. 

(Conté en 1880 par François Mallet, du Gonray.) 

Cf. dans Pluquet, p. 14, une légende normande assez 

semblable ; mais le rôle des chats est rempli par des loups. 
Dans une légende rapportée par G. Sand, L^. rust,, p. i$5 

«t soiv., un lapin atteint au cœur par une balle bénite s'écrie en 

mourant : « 1a lune est morte I la lune est morte ! » (Cf. aussi 

A. Bosquet, p. 138; Le Men, p. 240.) 

Près d*une croix, à la Rochevin en Saint-Cast, 
un garçon qui venait de voir les filles tomba au 
milieu d'une danse de chats. Il était perdu sans 
son propre chat, qui le reconnut et lui dit : 

— Sauve- toi, mon maître ! 

Un fermier du Guildo venait de finir de battre, 
II 4 



50 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

et il ne lui restait plus de cidre pour donner à 
ses hommes. Il prit un pot pour aller en chercher 
à l'auberge; en passant à côté de la Croix-auXr 
Mêles, il vit une danse de chats, et il fut entouré 
par eux. Son chat le reconnut, et il lui dit : 

— Nous allons à Bordeaux boire du vin ; quand 
nous en aurons bu et que tu auras rempli ton 
pot, ils diront : — Où allons-nous maintenant ? 
Tu répondras : — D'où nous venons. 

Le fermier se trouva transporté à Bordeaux, où 
il goûta du vin et en remplit son pot. Les chats 
demandèrent alors : 

— Où allons-nous? 

— D'où nous venons, répondit le fermier. 

Il se trouva aussitôt auprès de la Croix-aux-Mêles 
avec son pot rempli de vin. Il retourna à la ferme 
et dit aux batteurs : 

— Voilà du vin de Bordeaux. 

Mais ils ne voulurent le croire qu'après en 
avoir bu. 

(Conté en 1880 par Jacquemine Nicolas, de Saint-Cast.) 
Cf. dans la Littérature orale de la Haute- Bretagne , p. 188, une 
légende analogue. 

Fanchon Poilpré, qui s'en revenait un soîr seule 
de sa journée, entendit une dévorerie de chats; 
elle voulut les éviter et passa dans un champ, où 
elle s'assit auprès d'un échalier. Ils passèrent tous 
par là, et ils disaient : 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 51 

— Bique, bouc, va s'assire (s'asseoir). 

Et ils levaient la jambe et pissaient sur elle. Le 
dernier de la bande avait sur le dos une grande 
poêle de cuivre, et il clochait en marchant; elle 
lui donna un coup de pied, et il jeta à terre la 
poêle, qui était noire comme la cheminée. 

(Conté en 1879 par Rose Renand, de Soint-Cast.) 

Quelque temps avant la Révolution, il y eut sur 
le Mené un combat de chats, et il en resta plus 
de dix mille sur la place. Mon père, qui gardait 
ses chevaux, les vit aller à la bataille ; trois chats 
seulement survécurent. Il y avait un chariot au 
milieu des chats. Parmi ceux qui revinrent, il y 
en avait un qui parlait, et il racontait le combat. 

(Conte en 1879 par Rose Renaud, de Saint-Cast.) 

Ailleurs, on raconte aussi la bataille des chats. 

Ils se battirent sur la lande de Meslin ; quelque 
temps avant d'y aller, ils pleuraient. Il y avait au 
milieu d'eux un chat noir bien plus fort que les 
autres, et qui fut le seul à ne pas être blessé. 
Tous ceux qui s'en revinrent étaient estropiés. Ils 
prédisaient ainsi la Révolution. 

(Conté en 1880 par François Mallet, du Gonray.) 

U y avait une fois une bonne fenmie qui aimait 
beaucoup son chat. Un jour il disparut; elle 
se mit à sa recherche, et comme elle passait 
auprès d'une croix de bois, elle le vit qui dansait 



52 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

en rond autour de la croix, en compagnie de 
beaucoup d'autres chats. Parmi eux il y en avait 
qui étaient estropiés; d'autres étaient borgnes; la 
plupart n'avaient plus que la peau et les os. La 
bonne femme s'en alla sans rien dire, et les chats 
ne lui firent aucun mal. 

Un soir qu'elle prenait une vieiUe marmite 
pour la mettre sur le feu, elle vit sortir de derrière 
un chat qui ressemblait au sien, mais qui n'avait 
plus que la peau et les os, et encore sa peau était 
déchirée en maints endroits, car il revenait de la 
guerre des chats. Elle le soigna de son mieux, et 
le chat mangeait à table avec elle ; mais un jour 
qu'elle avait de la compagnie, elle ne voulut pas 
le laisser sur la table, suivant son habitude, et 
pour se venger le chat étrangla la bonne femme 
pendant la nuit. 

(Conté en i88(ypar]tPi«Bathilde Delasalle, de Matignon, qui 
tient ce rédt de sa gtand'mère.) 

Une légende irlandaise rapportée par Gubematîs, t. II, p. 67, 
parle d'une bataille de chats dans laquelle tous les combattants 
périrent, en laissant seulement leurs queues sur le théâtre de la 
lutte. 

H y avait une fois un homme qui s'en revenait 
de sa journée. Auprès d'une croix il vit un chat. 

— Le joli petit chat ! dit-il. Je vais l'emporter 
à la maison. 

En rentrant, il dit à sa femme de lui donner des 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 53 

peux (bouillie de blé noir); le chat en mangea, 
puis il s'écria : 

— Ah ! sont-ils bons ! 

— Tu parles, toi, dit l'homme ; sors d'ici I 

— Rapporte-moi où tu m'as pris, répondit le 
chat. 

L'homme prit le chat et emmena avec lui sa 
petite fille. Quand le chat eut été déposé auprès 
de la croix, il dit à l'homme : 

— Si tu n'avais pas ta petite fille, tu verrais 
bien d'autres choses, et tu ne t'en irais pas comme 
tu t'en vas. 

Une bonne femme avait un chat. Qpand elle 
était partie pour la messe, il prenait ses plus 
beaux habits, se £ciisait de la soupe qu'il allait 
manger sous la met (huch'^), puis se déshabillait. 
La bonne femme sut le manège que £ûsait son 
chat, et elle en parla au recteur, qui lui con- 
seilla de faire mine de sortir pour la messe et 
de revenir regarder par la fenêtre. 

Elle fit ce que le recteur lui avait dit; elle vit 
le chat s'habiller dans ses habits, et elle rentra en 
disant : 

— Ah ! c'est comme cela que vous £dtes 1 

Et elle se mit à frapper le chat, qui était 
empêtré dans ses cotillons. Il se sauva dans le 
soiier (grenier), et il disait : 



S4 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Pierre danse mieux que Jean, 

Vère, vèrc, yan I ^ 

La nuit, quand elle fut couchée, il descendit et 
l'étrangla. 

(Conté en 1881 par J. M. G>mault, du Gonny.) 

Une vieille dame avait un chat sorcier qui par- 
lait. Un jour elle invita le r^teur àdîner et lui dit : 

— Vous allez voir comtne mon chat parle et 
comme il mange à table. 

Mais dès que le matou vit le recteur, au lieu 
de se mettre à table, il se réfugia dans la che- 
minée ; le recteur lui dit : 

— Par où veux-tu t*en aller ? Par feu ou par 
vent? 

— Par vent, répondit le chat sorcier ; je ferai 
moins de dégât. 

En s'en allant, il abattit pourtant un coin de 
la maison. 

(Conté en i88z par J.-M. Comaalt du Gouray.) 

Ici le chat est une des fonnes du diable; cf. sur les nuisons 
ainsi abattues le t. I, p. 179 et 193. 

Les Chats dans les Contes populaires 

ire série : Le Chat, n© lyu ; Les Chats sorciers, 
no Li ; la Danse des chats, np lu (dans ces deux 
contes, les chats sont des chats sorciers) ; — 2^ sé- 
rie : Les Chats sorciers et les Bossus, no lx (les chats 



DE LA HAUTE-BRETAGNE $$ 

<iansent en chantant les jours de la semaine) ; La 
Houle du Grouitty no x (chats des fées : hommes 
métamorphosés); Cmdrouse^ no xxxi (chat qui 
•devient cheval) ; Lts trois petites Poules^ no lxii ; 
V Enfant qui va chercher des remèdes ^ no xxxiv (ren- 
contre d'un gros chat noir). 

Dans La fille qui devient mire d'un chat^ conte 
•que j'ai recueilli à Saint-dst, le chat parle ; il va 
diercher du pain à sa mère, et il la venge de ceux 
•qui l'avaient chassée de chez eux. 

Dans un conte inédit dont j'ai trois variantes, 
un garçon hérite d'un diat. Il va dans un pays où 
les rats dévoraient tout, et avec son chat il fait 
fortune. Dans la plus complète de mes versions, 
le seigneur qui achète le chat ne paie le prix que 
lorsque le garçon lui a amené une chatte. 

Le grand géant Grand-Sourcil (Contes de Marins) 
a à son service un gros chat noir qui aide au 
capitaine, héros du conte, à se débarrasser du 
géant et à conquérir sa bague magique. 



LE CHEVAL (Eqjjvs cabauvs) 

Noms patois 

Le cheval, sans désignation de sexe ou d'âge 
«st appelé cheva\ ch'va (M.) ; g*va (E.) ; bêtedech*va 
(M.) ; bête chevaline^ ou simplement bête ; chevauy 






$6 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

pluriel des chevàls (P.). L'étalon se nomme éfhn 
(M., P.) ; — on conduit les éflons aux assemblées 
pour les montrer; — lajument;'we«/(P;,S.-D.); 
jeument (Saint-Brieuc) ; le poulain poulicho (S.- 
D.); laitron (M.), quand il est encore sous la 
mère. 

On dit d'une jument en amour qu*elle est 
« en saut ». 

Faire saillir une jument, c'est la faire sauter. 
Qjiiand une jument a mis bas, on dit qu'elle a 
ponneU (M.). 

Hennir se dit ouiner (M.); hérer (Tréveneuc). 

Quand les chevaux hennissent avant de ruer, 
on dit qu'ils oinsent (E.). 

Quand ils ruent, ils « jettent le cul » ; s'ils se 
cabrent, ils <c se matent ». 

Le crottin se nomme couannée (M., S.-D.). 

L'ensemble des chevaux est désigné sous le 
nom de chevalerie (E.); avoir une belle chevalerie 
est un honneur pour les gros fermiers, qui s'en 
montrent très-glorieux. Quand un paysan dit 
simplement « nos bêtes », c'est des chevaux qu'il 
parle, et non d'une autre espèce d'animal. 

Le cheval est un animal noble; quand on 
parle de lui, on n'emploie point toujours : « en 
vous respectant », ou : « respé de vous », 
comme on ne manque jamais de le faire s'il s'agit 
des vaches, des cochons, etc. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 57 



Noms des chevaux 

Pêchard (M., E.), fleur de pêcher; Elm, gris de 
£er ; Soupe de lait. Souris , gris foncé ; Biard, de deux 
couleurs; Ftit-na (M.)» petit noir; Blond, rouge 
jaune ; les juments ont des noms analogues. 

D'autres portent le nom du pays où ils 
viennent, de leur ancien propriétaire, etc. Parfois 
ils reçoivent celui de personnages politiques ou 
autres peu aimés de leurs maîtres. Il y a eu des 
chevaux qui s'appelèrent PoîignaCy Badinguety etc» 

Langage employé pour parler aux chevaux 

Pour les faire avancer : Hei I (Tréveneuc) ; hue ! 
(partout). 

A droite : Huho, hue ! (E.) 

A gauche : Dia I (E.) 

Doucement : Ta t tô I (S.-D.) 

Pour qu'ils s'arrêtent : Ouôl chôme I (i) (Tré- 
veneuc); houâhl (M., E.) 

Pour faire reculer : Su ï (M., E.); rri'o (E.). 

L'attelage et ses noms 

Quand il y a quatre juments attelées à une 
charrette, voici les noms qu'elles portent, en 

(i) Cf. le breton chonif rester, demearef* 



58 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

commençant par la Umonière : la jument d'prée, 
la jument de faoute^ la jument de devant; on dit 
aussi la fment (S.-D.). 

L'ensemble des chevaux attelés à une charrette 
s'appelle harnoisy bamas (M., E.); harnèe^ masc. 

(P.). 

Les traits sur lesquels tire la jument s'appellent 
paronnes ; on donne encore ce nom à l'équipement 
complet, moins le collier, de la jument qui est 
dans les traits ; il se compose de la paronne 
proprement dite, de la frutailky pièce de bois qui 
est sur le collier et à laquelle sont attachés les 
traits, et de la sourvente (sous-ventrière) ou sour- 
venterière (S.-D.). 

Les chevaux de labour, quand ils sont montés 
par un cavalier, ne portent généralement pas de 
selle, mais une sorte de bât qu'on appelle un 
pané (M.). 

Proverbes et Dictons 

Bon Dieu d'en haut, 

Prends ma femme ; laisse mes chevaux (E.). 

Cf. des similaires messins, anglais et allemand, dans Rolland, 
t. IV, p. 14$. 

Un poulain, 
Une charretée de fain (D.). 

De tout poil bonne bète. 
Le rouge est rmait'e (E.). 
Cf. Rolland, p. 137. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 59 



Le cheval dit à son maître : 

En montant, ne me pousse pas ; 
En descendant, retiens mon pas ; 
En place droite ne m'épargne pas ; 
A récarie, ne m'oublie pas (Ploubalay). 

H y a deux bêtes à Paris qui parlent. 
Le cheval dit : 

Je me ferre, je me déferre ; 

Je ne demande que la guerre. 

Le bœuf : 

Jt me lie, je me délie ; 

Je ne demande que la vie (P.). 

Devinettes 

En vie du devant. 
Mort du mitan. 
Baptisé du dère (E.). 

— Une charrue qui est traînée par des chevaux 
et dont un homme tient la queue. 

Cf. Mélus.j col. 2$i, D. 97; Sauvé, D. $1. 

Un vivant entre deux morts (P.). 

— Un cheval en limon. 

Un peilîu (poilu) entre deux raides et un raide 
entre deux peillus. 

— Un cheval entre deux brancar4^ et une 
charrue entre deux chevaux. 

Cf. Rolland, D. )3. 



60 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Les ebevaux malades 

Voici quelques noms de maladies des chevaux» 
ainsi que plusieurs remèdes employés par les 
empiriques qui les soignent. S'ils ne sont pas 
consignés ici en plus grand nombre, c'est que 
cette médication est pour ainsi dire secrète, et 
ceux qui la pratiquent ne la révèlent pas vo- 
lontiers. 

Le cheval poussif s'appelle cheval coH (S.-D.) ; 
à Ercé, la pousse, maladie du cheval poussif, 
s'appelle la poûe. 

Pour guérir les chevaux malades, principale- 
ment des coliques d'urine, il faut les mener se 
promener dans trois communes différentes (E.). 

Cf. SoQchè (Poitoa), Croy., p. ao. 

On conduit les chevaux aux pardons. Voici 
quelques détails sur la manière dont cela se 
pratique. 

« A la fontaine de Saint-Ëloi en Landébia, des 
pèlerins viennent baigner leurs chevaux. » 

(Ogie, noQvelle idition.) 

Mais il y a nombre de fontaines où on les 
conduit ; je trouve dans Ogée deux descriptions 
de pardons de chevaux, l'une du siècle dernier, 
l'autre contemporaine. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 6l 



2> pardon de Saint-Éloi avant i*j8^ 

« A un quart de lieue de Plérin est une chapelle 
dédiée à saint Ëloy, dont la fête se célèbre au 
mois de juin. Les paysans des environs ont rendu 
ce saint le patron des juments et des chevaux. 
Tous les ans, au jour de la fête, les habitants des 
paroisses de dix lieues à la ronde y viennent en 
pèlerinage. Après leurs prières faites à la chapelle, 
ils vont à la fontaine qui se voit auprès, y puisent 
de l'eau avec une écuelle, et la jettent dans la 
matrice et sur les oreilles de leur jument, et en 
arrosent les testicules de leur cheval dans la 
persuasion que cette eau a des vertus prolifiques. 
Cette opinion est si gravée dans l'esprit de ces 
bonnes gens, qu'il seroit impossible de l'en 
déraciner. Ce n'est pas le seul abus de cette 
assemblée : les hommes s'enivrent, et lorsqu'on 
voit quelqu'un en cet état, tout le monde s'écrie : 
« Il a la goutte. » Celui qui est à cheval, pour 
montrer qu'on se trompe, se met à courir à toute 
bride, et il n'est pas surprenant de voir suivre ôit% 
accidents très-fâcheux de ces excès. Outre l'ivro- 
gnerie, on pourroit mettre encore au rang des 
abus le libertinage et le désordre qui se commet- 
tent en cette assemblée. Il n'est pas rare de voir des 
filles que la fontaine de saint Éloy rend aussi 
fécondes dans l'année. C'est à ceux qui dispensent 



62 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

la loi d'appliquer le remède ; c'est aux recteurs à 
veiDer avec soin sur ces pieux pèlerins, ou plutôt 
à recourir à Tautorité pour obtenir la suppression 
de ces fêtes. Mais n'y aurait-il point d'indiscré-* 
tion à exiger d'eux ce sacrifice? Avec cela, le 
recteur met la poule au pot. » 

Le pardon en i8$ù 

« Le pardon de Saint-Éloi, qu'Ogée a, contre sa 
coutume, assez durement traité, est loin d'être ce 
qu'il était autrefois. Ce pardon, qui se tient tou- 
jours le 24 juin de chaque année, n'a pas cessé 
d'être fréquenté par un assez grand nombre 
d'éleveurs; mais peu d'entre eux croient réelle- 
ment à la vertu des eaux de la fontaine de saint 
Éloy. Ils y voient pour la plupart, avec le bon 
sens qui caractérise le paysan des Côtes-du-Nord, 
un rendez-vous où chacun est fort aise de 
montrer ses pouliches et de faire valoir leurs 
qualités. Quand aux vicieuses coutumes dont 
parle Ogée, elles ont disparu aujourd'hui, et le 
clergé de la paroisse ne pousse â la création 
d'aucune autre réunion de ce genre. » 

(Marteville, sur Ogée, article PUrin.) 

« Près de l'ancienne chapelle de Saint-Ëloi en 
Plaine-Haute, sur la limite des deux langues, se 
trouvent deux étangs où les cultivateurs font 



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DE LA HAUTE-BKETAGNE 6$ 

baigner leurs chevaux en les recommandant à 
l'assistance du saint. Cette cérémonie, qui se 
termine par des courses telles que plus d'un 
cheval court risque de devenir poussif, est telle- 
ment enracinée dans le pays, que le paysan qui 
n'y aurait pas mené son cheval attribuerait à 
cette négligence tous les malheurs qui arriveraient 
à cet animal. » 

(Ogée, nouvelle éd., art. Plaine-HauU.) 

En pays bretonnant, on mène les chevaux à nombre de 
pèlerinages; presque toutes les chapelles sous Tinvocation de 
saint Éloi sont, à certaines époques de Tannée, entourées de che* 
vaux que leurs maîtres y conduisent. Souvent il y a auprès un 
étang dans lequel on les baigne. Parfois aussi on leur fait franchir 
d'un bond le ruisseau qui avoisine la chapelle. « L'animal qui a 
subi cette épreuve l'emporte en vigueur sur tous les autres. Une 
partie de sa crinière est déposée sur l'autel, et le cavalier s'en va 
couvert d'honneur. » (Guionvac'h, p. 59.) 

RcJland, t. IV, p. 197, parle de pèlerinages nombreux en 
Eure-et-Loir, Belgique, Bretagne, etc. D'après M. Desaivre, 
Croyantes j p. 7, en Poitou on dit des messes pour le bétail. Dans 
la Creuse (cf. L. Duval, Esquisses marchoises, p. 39), on £siit boire 
les chevaux atteints de tranchées dans une çspèce d'auge porunt 
des empreintes de polissage, où, d'après la tradition, saint Martin 
fit boire son cheval. 

En beaucoup de pays on mène les étalons aux 
pardons, non pour les guérir, mais pour les 
montrer. 

« A l'assemblée de Cesson, qui a lieu chaque 
année le lundi de Pâques, on promène de beaux 



64 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

étalons dont la tête et la queue sont ornées de 
fleurs et de rubans; mais cet usage n'est pas 
restreint à la commune de Cesson : il a lieu dans 
toutes les assemblées du même genre. » 

(Habasqae, t. II, p. 311.) 

Croyances et Superstitions 

Les chevaux, de même que le bœuf et l'âne, 
parlent la nuit de Noël. 

D y avait une fois un homme qui ne voulait 
pas croire aux contes de bonnes femmes. Il ouït 
dire que les bêtes parlaient la nuit de Noël, et il 
résolut d'éprouver par lui-même la vérité de ce 
dicton. Il alla dans son écurie et entendit un de 
ses chevaux qui disait à Tautre : 

— Dépêche-toi de manger, camarade. 

— Pourquoi ? répondit l'autre. 

— ' C'est pour aller demain conduire ton bour- 
geois au cimetière. 

La prédiction se réalisa, car Thomme mourut 
aussitôt, et il fut^ porté en terre par ses bêtes. 

(C>iité en X 881 par J. M. Comault, du Gouray.) 
Ordinairement, dans l.s similaires, c'est le bœuf qui parle de 
la sorte (cf. la page 37 du présent volume.) 

Si une jument en chaleur perd les poils de sa 
queue, ils deviennent serpents au bout de quelque 
temps, s'ils tombent dans une mare et que le 
soleil les chauffe (environs de Saint-Brieuc). 

(Communiqué par M. E. Eraault.) 



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DE LA HAUTE-BRETAGNE 6$ 

Ci. nne saperstitioii atulogne dn Finistère (Rolknd» t. IV^ 
p. 19$). Elle existe aussi en Poitou (cf. Souche, ProverheSy p. 7)» 
Elle avait déji été constatée en ce pays par Guerry an commen- 
cement du siècle (cf. Soc. des anttq.f t. VIII, p. 4$7)< 

Quand un cheval revient, il va plus vite qu'en 
allant; on dit qu'il sent son écurie. 

Le cheval a le gosier moins grand qu^une poule ; 
il ne peut avaler un grain d'avoine sans le mâcher 

Il vaut mieux trouver un fer de cheval qu'une 
pièce de monnaie ; cela porte plus chance (P.). 

Les lutins ei Us chtvaux 

Souvent le lutin, pour jouer des tours aux 
laboureurs et les mieux tromper, emprunte k 
forme des chevaux et s'amuse à les cacher. 

Un cultivateur avait laissé à pâturer, dans une 
prairie, trois chevaux, l'un rouge et les deux 
autres blancs. 

Le lutin cacha le cheval rouge dans un buisson, 
et, prenant sa forme, sa couleur et sa taille, 'û 
vint paitre avec les deux autres. 

Qjiand le laboureur vint le soir pour emmener 
ses bêtes à l'écurie, il monta, comme d'habitude, 
sur le cheval rouge, qui, arrivé à un ruisseau, fit 
un écart et laissa choir son cavalier dans l'eau. 

Le paysan se releva tout mouillé et remonta 
sur le cheval, qui se laissa faire ; mais quand on 

n 5 



66 TRADITIONS KT SUPERSTITIONS 

fut près de la ferme, il ne voulut pas s'arrêter, et 
le malheureux fut pendant trois jours et trois 
nuits promené sur le dos du cheval rouge, dont 
il ne pouvait descendre. 

A la fin le lutin se lassa et ramena chez lui le 
fermier, qui se coucha ; car il était, comme bien 
on pense, fatigué. Mais, pendant la nuit, le lutin 
vint s'asseoir sur sa poitrine, et le laboureur se 
ressentit longtemps de cette course et de la nuit 
qui l'avait suivie. 

(Conte en 1878 par Jean Bouchery, de Doordain.) 

Cinq jeunes filles partirent un soir pour aller 
chercher un des chevaux de la ferme qui était 
dans la prairie. L'une d'elles monta sur le dos de 
la bête, puis une seconde; alors le cheval 
s'allongea, et il y eut place pour la troisième, et 
les cinq filles finirent par s'asseoir sur son dos, 
qui s'allongeait à mesure. 

La monture des filles se mit en marche, et 
quand elle fut arrivée au milieu du ruisseau, elle 
disparut comme si elle s'était évanouie en fumée> 
et laissa les filles tpmber dans l'eau. Le vrai 
cheval était déjà rendu à la porte de son écurie 
(E.). 

« Si le voyageur monte sur sa croupe (du 
cheval blanc), il ne tarde pas à s'en repentir, car 
il va par les chemins, cherchant tous ceux qui 



ma^mmmmmmmmmmmmmmmmmmm 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 67 

marchent de nuit et les invitant à prendre place 
près du premier voyageur. Trois, quatre, et par- 
fois quinze personnes, se trouvent sur son dos, et 
plus il est chargé, plus il va vite, et ils ont beau 
crier. Q.uand il est lassé, il s^arrête court et jette 
sa charge dans un ravin et disparaît en fumée. 
Ce lutin porte en Ille-et- Vilaine le nom de 
Gobino. » 

(M"« de Cerny, p. $$ sqq.) 

Souvestre, dans le Contg de Jean Bouge-Gorgi, Foyer hnkm^ 1. 1, 
p. 11$, dte nn cheval dont le dos s'allongeait i mesuxe qu'on le 
chargeait, si bien qu'il pouvait porter à lui seul autant de sacs 
que tous les chevaux de la paroisse. 

Jadis, à Plévenon, le petit cheval Pacoret se 
plaisait à jouer des tours aux garçons qui allaient 
voir les filles. U se couchait près d'un échalier et 
se laissait monter d'abord par un, puis par deux 
garçons. Son dos s'allongeait à mesure qu'il en 
montait sur lui, et parfois il se chargeait de vingt 
ou trente garçons. S'il passait auprès d'un 
ruisseau, il les jetait dedans et se mettait à rire. 

(Conti en 1880 par Élie Ménard, de Plévenon.) 

Vers Ploërmel, le cheval qni s'allonge se nomme le Cftbino. 

Le petit cheval Pacoret a poar similaire le cheval Bayaid (bai, 

de couleur rousse) en Normandie (cf. A. Bosquet, p. 128-129) ; 

en Poitou le cheval Malet (cf. aussi Georges Sand, Lig. nui., et 

Monnier, 242 (Jura). 

A Ercé, on voyait autrefois ener près du pont 



68 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

de rislette un cheval blanc dont k vue était fort 
redoutée. 

Aux environs de Saint-BfieùCy un cheval blanc 
se promenait aussi la nuit près d'une roche aux 
fées. Pas un paysan de la commune et des 
environs n'aurait osé, pour tous les tréscxs dii 
département, aller à minuit dans cet endrok 
hanté. M. le chanoine R. D. L., propriétaire 
d'une ferme peu éloignée de la roche aux fées, y 
conduisit une nuit ses fermiers. Ils ne virent rien, 
mais ils eurent néanmoins très^peur. 

(Commoniqaé par M*« P. Gnyot.) 

Il y avait des chevaux blancs qui hantaient les 
champs à trois cornières. Un homme de Hénon, 
foi en voyait souvent un, et qui même avait été 
enlevé par lui, alla consulter son recteur, qui \m 
dit de prendre une pièce de rnoomaie marquée 
d'une croix, de la mettre dans tui bois fourchu «t 
de la présenter au dieval. Le soir venu, l'homme 
akla dans le champ, et quand le cheval se présenta 
à lui, il lui montra son morceau de bois avec la 
pièce à la croix» Le cheval partit aussitôt en 
veculant; mais à l'autre extrémité du champ un 
autre homme lui montrait aussi une semblable 
pièce d'argent. Le cheval blanc alla pendant toute 
la nuit de l'un à l'autre ; au jour, il disparut, et 
on ne le revit plus jamais. 

(Communiqué [Mtr M. B. BtuBoaic.) 



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DE LA HAUTE-BRETAGNE 69 

D'après le conte qui suit, le cherol jonerait le rôle d'un lutin 
Appelé Mourioche (cf. 'vol. I, p. 162 et suit.). 

Il y avait une fois à Corseul un couturier qui 
s'en revenait de sa journée. Sur sa route il vit 
une bête qui avait l'apparence d'un poulain, et 
comme il était si lassé qu'il ne pouvait presque 
plus marcher, il se dit : ) 

— Si je pouvais attraper ce poulain, je monte- 
rais sur son dos, et je le ferais me porter. 

Il courut après, et il finit par le rejoindre; 
alors le poulain se coucha pour que le coutu- 
rier pût plus facilement monter sur lui. Qiiand 
il l'eut sur le dos, il se mit à galoper, et il 
frottait son cavalier sur les ronces et les épines 
du chemin. Le couturier était bien marri d'être 
écorché ; il prit ses ciseaux et les fit résonner, zig 
Eague, comme s'il voulait s'en servir, puis il dit 
au poulain : 

— Si tu fais le diot, et si tu ne me portes pas 
tout droit à ma maison, je te couperai les oreilles. 
Mais si tu fais le joli garçon, je te donnerai de 
l'avoine quand nous serons rendus. 

Le poulain, qui était Mourioche, eut peur, et 
il porta le couturier tout droit chez lui. En 
rentrant à la maison, l'homme lui dit : 

— Reste là ; je t'ai promis de l'avoinç, et je vais 
t'en chercher. 

Il monta dans son grenier, et quand il re^rda 



70 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

par la gerbière, il vit le poulain qui riait. U 
descendit ; mais quand il ouvrit sa porte pour 
donner Tavoine au poulain, celui-ci était plus 
grand que la maison. Alors le couturier referma 
sa porte et dit : 

— Tu es trop grand ; tu n'auras pas d'avoine, 
car si tu mangeais à proportion de ta taille, il 
t'en faudrait trop. 

(Conté en 1881 par Isidore Poulain.) 

Le cheval ludné ne mange pas, parce qu'il a 
été pansé par le lutin (D.). 

Sur les chevaux lutines, voyez le chapitre des Lutins, 
i^ partie de ce livre. 

Le cheval dans les, contes 

Le cheval joue un rôle dans plusieurs des 
contes de la Haute-Bretagne; en voici l'indica- 
tion : 

ire série : La demoiselle en blanc , n^ xxxi ; D'un 
vieux cheval et d'une vieille femme, n» xxxvi; Le 
Chat, no Lvn (association avec le chat); — 
2« série : Le Fersè, n» lv (lutin qui a la forme 
d'un poulain) ; La Houle de SaitU-Briac, no xiv his 
(poulains des fées); Litt. orale: Le Merle Sor^ 
p. 63. 

Un des attributs du diable est d'avoir un pied 
de cheval dans tous ses déguisements. 

Cf. le chapitre du diable, t. I, p. 177-202. 



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DE LA HAUTE-BRETAGNE Jl 

Dans un conte inédit, un cheval bknc vient au 
secours d'un jeune honune qui ne savait que 
devenir, et il lui aide à surmonter des obstacles, 
tels que d'aller chercher la belle aux cheveux 
d'or, ses clés, son château. Grâce à lui, il y par- 
vient, et le cheval blanc « eut de l'avoine jusqu'à 
la fin de ses jours. ^> 

Dans un conte inédit, le diable ordonne à son 
domestique de frapper tous les jours sur une 
jument; un jour elle parle au garçon, qui se 
sauve sur son dos après une poursuite acharnée; 
par son conseil il entre au service du roi, gagne 
des batailles et finit par épouser la princesse. 

Le héros de La Belle aux clés d'or (Contes de 
Marins, no xv) doit bien nourrir un cheval gris 
et frapper sans relâche une jument blanche; 
celle-ci lui parle, et il fuit sur son dos, jusqu'à 
la terre sainte, son patron qui était le diable. La 
jument le fait s'engager au service du roi, qui lui 
ordonne plusieurs choses qu'il accomplit à l'aide 
de la jument. Après cela, il veut épouser la prin- 
cesse aux clés d'or; mais la jument lui déclare 
qu'auparavant il faut qu'il la tue et coupe son 
<œur en deux morceaux. Q.uand il l'a fait, il voit 
devant lui une belle dame qui le maudit et lui dit 
qu'il aurait pu être heureux avec elle, mais 
qu'il sera malheureux avec la princesse. 



72 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Dans un conte de marins intitulé Jean le Tei- 
gnons ou Jean Ujin^ n^ ix, le diable a un cheval qui 
parcourt dix lieues à Theure et saute par dessus 
les plus hautes murailles. Jean doit avoir soin de 
deux^chevaux du diable et battre sa mule. 

Pour l'étude du rôle du cheval au point de vue 
m3rthologique, on pourra consulter Gubematis, 
Mythologie xpol(^ique\ Max Jaehns, Ross und Reiter 
in Leben und Sprache, Glauben und Geschichte des 
Deutschen. Eîn kulfur-hislorische Monographie, Leip- 
zig, 1872, dont Rolland analyse le premier vo- 
lume, et la monographie du cheval dans le IV^ vo- 
lume de la Faune populaire de la France. 

LA CHÈVRE (Capka hucus) 
Noms patois 

Le mâle s'appelle bouc, parfois hou* ; la femelle 
chieuve ou cheuve (M.); les petitSy hichets,biqmonSy 
hiquetons (M., E.); hiquins (S.-D.); la chèvre qui 
met bas, biquionne (P.) ; hiquetoune (E.). 

Proverbes et Dictons 

— C'est un bouc hanné (en culottes) (E.). 
C'est un débauché. 

— C'est comme les chèvres, qui ont la graisse 
(ailleurs l'esprit) en dedans (S.-C.). 



• DE ^A HAUTE-BRETAGNE 75 

— C'est Une mauvaise chieuve (M.). C'est une 
personne méchante. 

— C'est la route aux chèvres (E.). C'est un 
mauvais chemin. 

Superstitions et Croyances 

On prétend que les enfants qui ont été élevés 
avec du lait de chèvre sont lestes et sautent 
comme des chèvres (Montauban, D.). 

En plusieurs pays de TlUe-et-Vilaine, on met 
wi bouc dans les étables à vaches et dans les 
écuries. On prétend qu'il les assainit en prenant 
pour lui le mauvais air (environs de Rennes). 
Le bouc et la chèvre enflent, parce qu'ils prennent 
tout le venin des étables (E.). Pour les faire 
désenfler, on leur donne du tabac. 

Une superstition analogue existe en Franche-Comté (cf. 
Mélusine, col. 371), en Poitou (Souche, Croy., p. 51). 

Le diable prend assez souvent la forme d'un 
bouc. Cette croyance est générale en France. 

C'est la chèvre qui a appris aux tailleurs à 
faire les ailiettes (aiguillettes). Un jour un tailleur 
était bien embarrassé ; la chèvre lui cria : « De 
biais ! de biais 1 » Et le tailleur suivit son conseil 

(P.). 

Qjiand on mène une chèvre au bouc, il faut 
mettre à l'envers son bonnet ou son chapeau ; si 



74 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

on a sur soi une peau de bique, il faut aussi la 
mettre à l'envers ; sans cela, la chèvre ne conçoit 
pas (E.). 

Q^iand un galant a reçu son congé d'une jeune 
fille, on dit qu'il a reçu sa chieuve. 

Il la jette dans un champ, et elle reste là 
jusqu'à ce qu'un autre aille la chercher. 

On dit du bâton qui a servi à un porteur 
de chausses naïres (c'est le nom donné aux entre- 
metteurs de mariages) qu'il apporte la chieuve 

<p.). 

Voici, parmi les contes gallots, ceux où il est 
<}uestion du bouc et de la chèvre : v^ série : Lt 
Chaty no Lvn (il fait société avec la chèvre) ; — 
2e série : Lu Boucs de Saint-Brieuc-des-IffSy no Lxn; 
La Chèvre de TrigavoUy n© lxvi ; La Biquette et ses 
petits, n© Lxvra; La Chèvre blanche, n© xm; Le 
Pertus es Fêtes, n© ix; Le Pillotous, n© xxvni 
(princesse métamorphosée en chèvre verte ; dans 
un conte de marins (Contes de marins, n» iv), il 
est aussi question d'une princesse emmorphosée 
en chèvre, et que le matelot Tribord-Amures finit 
par délivrer). — Litt, orale, La Chèvre, p. 242. 

D'après un autre conte de marins inédit, le 
héros, un soldat nommé Décampe, délivre une 
princesse emmorphosée en chèvre verte. 

Plusieurs chansons mettent en scène des 
chèvres ; telles sont : La Bique à Jacques André, 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 75 

dans UtUraiure oraUy p. 288, et La Chèvre de 
Trémaudan, iînd.^ p. 293. 

Dans un conte inédit, ' qui est une variante 
•du Petit roi Jeannot, i>« série, n» i, c'est une 
chèvre qui sauve, du puits où ses frères Pavaient 
jeté, le jeune garçon qui a conquis Foiseau mer- 
veilleux. 

Dans Tun des contes facétieux où les Jaguens 
sont mis en scène, ils prennent une chèvre pour 
le diable. 

LE CHIEN (Camis familuris) 

Noms patois 

A Saint-Donan on donne à tous les chiens 
dont on ne sait pas le nom le nom amical de 
chutaou» 

Attainer ou attêner un chien, c'est l'agacer pour 
le faire houamery c'est-à-dire aboyer (M., E.); 
^^igner ou lui chercher grigne, c'est l'exciter 
pour qu'il /égrignache (S.-D.). 

Pour appeler les chiens, on leur crie : 

duien I quien I (S.-D.) 
Qjie 1 que 1 (P.) 

Pour les chasser : 

Kélkéal 

La nuit, les gros chiens disent : 



76 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

» 

Ah 1 si je me leuve, kuve, leave, 
J'vas mord'e dans tes hanses, hannes, hamm 

{culottes) (E.). 

Proverles et Dictons 

— J'étîens comme les mauvais chiens; je 
houamions (aboyions), et je VLavanciens point 

(S,-C.). 

— Un chien regarde bai un évêque et s'en 
retourne cor o sa tête (Saint-Coulomb). 

Cf. Rolland, t. IV, p. 63. 

— r serft sa gamme; la mer monte (S.-C.)» 
On croit que les chiens enragés viennent prendre 
leur écume au bord de la mer. Le mot gamey 
iynon3rme de rage, est usité en argot. 

Cf. Halbert d'Angers, cité par Rolland, t. IV, p. 7$. 

F nVaut pas les quatre fers d'un chien (M.). 

Cf. Rolland, t. IV, p. 24. 

J'aimeras mieux être chien 
Et aboyer dès demain (M.). 

Cela se dit pour exprimer la répugnance qu'on 
éprouve à faire un ouvrage. 

— On ne tue point son chien pour une 
mauvaise année (E.). 

Dicton similaire en Poitou (cf. Souche, Prov.f p. 6). 

— Quat' pieds quat'e pouces, la taille d'un 
chien (M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 77 

^ — Qjiand on compare quelqu'un à un chien, 
on dit : sans comparaison, puisqu'il (un tel) a été 
baptisé. 

— Gras comme un petit chien qui tette (H.)* 

— Garder un chien de sa chienne. Garder 
rancune. 

Cf. le prov. contraire breton, dans Rolland, t. IV, p. 35. 

— Cela ne vaut pas une merde de chien. 

Cf. Rolland, t. IV, p. 21. 

— Cela n'est pas de la merde dé chien. 

-~ Tremhler des fesses comme un chiea de 
mercier (D.). 

Cf. Rolland^ t. IV^ p. ],i. 

— Nager comme un chien de plomb (M.). 

a. Rolland, t. lY, p. 41, et Soucbë, Prov., p. 6. 

— Il faut toujours trouver des chiens mocts 
pour tuer le sien (P.). 

— Ah l dame ! i:( étaint douane, et in'n'ont tous ^u 
leur content, et cor un chien qui n'Va pas fini (P.). 

Cela se dit ironiquement d'un repas chichement 
servi. 

Mieux vaut trouver un chien enragé 
Qu'un lima dans Tmois d*janvier (P.). 

On se sauverait d'un chien enragé, au lien 
qu'en janvier la limace serait précoce,, et Le iroid 
qui viendrait ensuite ferait périr les récoltes. 



78 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

« 

— Adîé:(i (sot) comme un chien en carHnme 
(en carême) (S.-D.). 

— Bas les pattes I les chiens donnent des puces 
(D.). Cela se dit à quelqu'un qu'on trouve trop 
familier. 

Dicton similaire en Poiton (cf. Sonché, Prov.^ p. 6). 

Superstitions et Croyances 

Quand on voit dans les champs des broussées 
d'herbe bien toufïiies et que le bétail ne veut pas 
manger, on dit que les chiens ont pissé dessus 

(P.). 

Si les chiens aboient avec force, c'est signe de 
mort pour quelqu'un de la maison (P.). 

QjLiand on est mordu par un chien, il ne faut 
pas le tuer, ou bien la morsure ne se guérit pas 
CE.). 

En Poitou (cf. Desaivre, Cray., p. ii) existe la superstition 
inverse. Si le chien enrageait par la suite, l*honune mordu enra- 
gerait aussi. 

En certains pays, on coupe le bout de la queue 
des chiens pour a tuer le ver » qui s'y trouve. 

« Année de hannetons, année de chiens en> 
rages », dit un proverbe des environs de Rennes. 
C'est parce que les chiens mangent les hannetons 
et qu'ils enragent. 

Superstition analogue en Poitou (cf. Souche, Prov., p. $). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 79 

On prétend que les chiens enragés ne s'arrêtent 
point sur la commune d'Ercé ni sur celle de 
Vendel. Cela tient à ce que les églises de ces deux 
endroits sont sous l'invocation de saint Jean. 

Par contre, tous les chiens enragés qui se 
trouvent dans le pays viennent à la statue de 
saint Hubert, qui est dans une des cours du fort 
La Latte en Plévenon. C'est très-exact, m'afl&rmait 
une femme du .pays; si on peut embrasser la 
statue du saint, on est guéri de la rage. 

Em Seine-et-Marne existait une croyance analogue (cf. Fourtier, 
Dictons de Seine-et-Marne). 

Les chiens surongUs n'enragent point. On 
appelle ainsi ceux qui ont à la patte de devant 
une sorte d'ongle recourbé (P.). 

Cf. Rolland, t. IV, p. 75. 

Ce n'est qu'au bout de treize lunes qu'un chien 
mordu ou un homme est â l'abri de la rage (P.). 

A Gaêl, on distribue des eaux qui sont, dit-on 
dans le pays, un spécifique contre la rage 
(Ogée). 

Cf. dans Rolland la description du pèlerinage de Saint-Hubert 

(Belgique), p. 77-80 (cf. aussi Galerie bretonne, t. II, p. 49). A 

. une fontaine de saint Hubert, dans la Creuse (cf. L. Dnval, 

Esquisses marchoisa, p. 92), on puise de Teau dont on arrose du 

pain qu'on fait manger aux bestiaux pour les préserver de la rage. 

Qjiand on aperçoit un chien suspect, on crie : 
Au chienn' enraigé I 



^ TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Voici une conjuration pour en préserver : 

Noter dame et ses enfants. 

Préservez-nous du loup et des serpents^ 

Et du chien q^ui court le vent (Moncontour). 

Cf. dans Sauvé, Proverbes^ $ 904, une conjuration contre les 
chiens enxagës. 

Le chien dans les contes populaires 

Il en est souvent parlé, bien que la plupart da 
temps il ne joue pas le rôle principal. 

U Chien capitainey no xxx, v^ série, est un 
prince métamorphosé qui commande un navire 
et qui, après une série d'épreuves, redevient 
homme. Le début de ce conte présente des 
ressemblances avec un roman de Jules Verne. 
L'auteur, qui a fréquenté les marins, leur avait 
peut-être entendu faire ce récit, qui est populaire 
sur les côtes de la Manche. 

Voici d'autres contes où figurent des chiens : 
Lr roi dis poissons, no xvin (àts boyaux du roi des 
poissons naissent trois chiens dont les deux 
premiers sont, comme leur maître, métamorpho- 
sés par une vieille qui déteste les chiens) ; Li MerU 
et h Renardy no Lix(le merle appelle le chien de la 
ferme pour l'aider à se venger du renard); — 
2« série : Le Pertus es Fêtes, q9 ix (c'est un chien 
qui vit avec les fées) ; La Fille aux bras coupéSy 
09 XXXIX (un chien vient lui apporter à manger 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 8l 



dans la forêt); Misère, no lu (il voyage en 
compagnie de son petit chien Pauvreté) ; Venfant 
qui entend le langage des bêtes, n*» xxv (les chiens, 
mal nourris par leur maître, déclarent qu'ils ne 
le défendront pas contre les voleurs). 

Dans L'Oiseau de vérité, conte de marin inédit, 
un chien vient donner à manger à une jeune fille 
réfugiée dans un arbre. Un marin, dans un autre 
conte, sur le point de faire un pacte avec le 
diable, le grise, et sur le papier met « chien » 
au lieu de « âme ». Le chien est donné à l'é- 
poque fixée, mais il noie le démon. 



LE MULET (Eqîjus Mulus) 

Le Mulet dans la littérature orale 

Il y a fort peu de ces animaux en Haute-Bre- 
tagne, et ils sont, je crois, tous importés. On dit 
en proverbe : « Têtu comme un mulet ». 

Mais il est assez souvent parlé de mules dans 
les contes ; dans l'un de ceux que j'ai en porte- 
feuille, le héros, pour arriver à son but, doit sauter 
à une certaine heure sur une mule blanche et ne 
pas réveiller les géants qui gardent la fontaine où 
se trouve l'eau qui rajeunit, et cette eau n'a 
d'efficacité que si la mule chante. 

Jean le Teignons (Contes des Marins, no ix) fuit 

II 6 



82 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

le château du diable sur une mule qui, comme la 
jument des contes similaires, devait être maltraitée 
par lui ; il échappe à toutes les poursuites, et sa 
mule lui fait épouser une princesse. 

LE PORC (SusscROPHÂ domesticus) 

Noms patois 

PoutTy pouêf (M., S.-D.); pouds (M.); pourcé 
(S.-D., M., E,y, pourciau (M., E.), pluriel /««r- 
ciaoux (M., S.-D.). Ces deux derniers mots s'ap- 
pliquent en général aux moyens cochons et aux 
petits. 

On dit aussi un quiou quiou (M., Tréveneuc) : 
c'est un terme enfantin. Le mâle se nomme 
vérot (M., S.-D.); la femelle trée (M., E., S.-D.). 

La truie en chaleur est en ru; on la mène 
gibier (couvrir) au verrat (P.). Quand elle met 
bas, elle pourcelle (P.). 

On donne le nom de nourriture (M., E.) aux 
cochons de six mois environ; quand le porc est 
bien gros, on dit : Il est raisonnabley le v'ià bon à 

tuer (D.). 

Les appendices charnus qui sont placés à l'ex- 
trémité dos mâchoires de certains cochons, vers la 
naissance du cou, se nomment margeîies (S.-U); 
le groin, guèrouin. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 83 

Le cochon a plusieurs surnoms plaisants : not* 
monsieu', noC ndb*e, not* syndic, nof rohan. 

On le nomme aussi un Anglais. 

A Dinan, Tendroit où se tient le marché aux 
cochons s'appelle le parc aux Anglais. 

Cf. des appellations analogues dans Laisnel de la Salle, t. Il, 
p. né. 

En Basse-Bretagne, le cochon est surnommé Jdab Rohan (fils 
de Rohan). 

Quand on engraisse le porc, on dit qu'on le 
met en paisson ou en patsson (M., E.). Son 
étable se nomme sou. 

Pour appeler les cochons, on leur crie : 

Qjié, que I (M.) 

Qjiiou I quiou I (S.-D., M., Tréveneuc.) 

Niquia I niquia I nîquia I (Tréveneuc.) 

Pour les chasser : 

Chiénal chiem 1 chiem I (comme en breton) (S.-D.). 
Sou 1 Sou cil (S.-D., M.) 

Pour empêcher les cochons de passer en dom- 
mage, on leur met au cou une sorte de triangle 
en bois, qu'on appelle bangeret (P.) ; barriaux (M.). 

Le porc qui gratte la terre avec son grouin 
revunge (M.); dérunge (P.). 

Proverbes et Dictons 

— Braire comme un cochon pris entre deux 
portes. 



84 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— r chante, respé dVous, comme un pourcé 
qu'a la quoue prise sous eune porte (E.), ou 
comme un pourcé prin' enter deu' port' (S.-D.). 

— Ça n'est pas la graisse de cochon qui l'era- 
pose (empêche) de couri'. 

T- Gros comme un pourcé de cinq sous (E., 
M.). 

— S'acouter comme un pouer qui pisse (E.). 

Cf. Noël du Fail, t. II, p. 46, éd. Assézat. 

— Sale comme un pouer (M.). 

— Sau (ivre) comme un pouer (M.). 

— S'y prendre comme une trée à ramer des 
fauves (M.). 

— Tu t'y prends comme une trée à ramer 
des pées (pois) (S.-D.). 

Cf. Perron, p. 132 (Franche-Comté); BUdé, Prw., p. 100 
(Agenais). 

— Les cochons n'ont point d'amis (S.-C). 
C'est la contre-partie du proverbe « amis comme 
cochons. » 

Qjaand on parle d'un cochon, on dit toujours ; 
en vous respectant, respé de vous, ou respé de la 
compagnie. 

Croyances, Usages et Superstitions 

Si une musaraigne passe sur le dos d'un 
cochon, elle le fait crever (P.). 

A Saint-Cast, on tue le cochon à la Cateline 



DE LA HAUTE-BREÏAGNE 85 

I > « I ■ III. 

(25 novembre). On dit qu*à cette époque le lard 
est meilleur. 

La tuerie de cochon est une occasion de fêtes 
et de politesses entre voisins. 

n en est de même en Basse-Bretagne (cf. Galerie hret.^ t. II, 
p. €9.) 

Pour que le cochon profite, on offre un mor- 
ceau de lard à divers saints. A Saint-Cast, 
l'offrande se fait à saint Jean ; â Plurien, c'est à 
saint Antoine. 

Dans le charnier où est le lard, on met un 
morceau de fer à cause de Forage. 

Le cochon ne prend (de sel) que ce qu'il lui 
en faut, le bœuf tant qu'on en veut lui donner 
(M.). Cela se dit en parlant du lard qu'on sale. 

Le lutin prend parfois la forme d'un cochon; 
toutefois il figure assez rarement dans la suj»ers- 
tition. 

Une femme d'Ercé, un soir qu'il y avait eu foire 
aux environs, vit sur la banquette un cochon qui 
était couché et ne remuait pas. Elle se dit : 

— Il est à un marchand de cochons qui vient 
d'entrer à l'auberge ; il faut aller le prévenir. 

Elle était avec une de ses amies. Après avoir 
fait quelques pas, elle se retourna : le cochon 
avait disparu. C'était le lutin. 

(Conté en 18S0 par Françoise Dumont, d'Ercé.) 



86 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Dans le récit qui suit, il est question d'un homme métamor- 
phosé en cochon k cause de son impiété. 

Il était une fois un homme qui voulait tuer 
son cochon le lendemain. Dans la nuit, il alla 
chercher le prêtre pour le confesser et lui apporter 
le bon Dieu. Il frappa à la porte du presbytère, et 
le prêtre se leva. L'homme lui dit qu'il avait à la 
maison une personne sur le point de mourir, et 
qui avait besoin de recevoir les derniers sacrements. 

— Est-ce qu'elle est bien malade ? demanda le 
prêtre. 

— Oh ! oui, monsieur le recteur ; je pense 
qu'elle ne passera pas la journée de demain. 

Le recteur se décida à. suivre l'homme, qui 
l'emmena chez lui et prit une lumière, puis sortit 
de la maison. Ils marchèrent encore, et le prêtre de- 
mandait toujours s'ils n'étaient pas bientôt arrivés. 

Enfin ils s'arrêtèrent devant une petite hutte. 
L'homme ouvrit la porte et dit au recteur : 

— Nous y voici; entrez. 

— Malheureux I s'écria le recteur. 

Dès qu'il eut dit ces mots, l'homme fut changé 
en cochon, et il était si semblable à l'autre qu'on 
ne pouvait le reconnaître. Les deux cochons de- 
vinrent si méchants que, huit jours après la 
métamorphose, on fut obligé de les tuer tous les 
deux et de les encaver. 

(Conté en 1881 par J. M. Comanlt, du Gouray.) 



DE LA HAUTE-UKETAGN 



Voici les contes où le cochon joue un râle : 

2= série ; La Houle Sainl-Michel, np v (les Kes 
voient un coclion) ; La Houle du Lmg-Vd, 
tt" xvm (tmie des fëes) ; La Cbomlte mouliiwin, 
DP Lni (elle est traînée par des cochons); La 
Houle de la Teignouse, n<> m (une fée métamor- 
phose en cochon ua homme qui avait dédùgné 
sa fiUeuIe). 

Dans un coate inédit recueilli aux environs de 
MoDContour, des fïes se plaisent i nourrir les 
petits cochons d'un fermier. 

Une fin de conte très-ft^uente est celle-ci, 
qui décrit une grande ripaille: 

Les petits cochons couraient par les rues, tout 
rôtis, tout bouillis, la moutarde au derrière ou au 
eu et la fourchette sur le dos, et qui voulait en 
coupait u 




CHAPITRE II 



LES MAMMIFÈRES SAUVAGES 



S I. — GÉNÉK ALITÉS 




N retrouve en Haute-Bretagne la plupart 
des mammifères sauvages qui vivent dans 
la partie moyenne de la France, et dont 
les uns habitent les champs, d'autres les forêts. 
Celles-ci, bien qu'assez nombreuses, n'occupent 
pas, comme celles de l'Est et du Centre, de vastes 
étendues ; elles sont médiocrement peuplées, et 
les animaux de grosse espèce qu'on y rencontre 
le plus fréquemment sont le loup, le sanglier et 
le chevreuil. J'ai fait une enquête assez longue, 
principalement sur la lisière des forêts de Haute- 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 89 

Sève et de Rennes (Ille-ei-Vilaîne), de Bosquen 
(Côtes-du-Nord); j'ai interrogé moi-même nombre 
de gens, bûcherons, charbonniers, cultivateurs, 
et j'ai prié mes correspondants de me commu* 
niquer ce qu'ils pourraient recueillir. Le nombre 
des faits de superstition qui ont été ainsi cons-^ 
tatés est, en somme, assez peu considérable. Les 
légendes aussi sont peu nombreuses, et cela 
concorde tout à fait avec ce qui résulte de l'en- 
semble des contes gallots ; les animaux qui sont 
les compagnons de l'homme y interviennent 
fréquemment, tandis que les mammifères sauvages 
ne s'y montrent que rarement, et la plupart du 
temps à titre de personnages épisodiques. 

Les bêtes sauvages ne vivent pas avec l'homme 
comme les animaux domestiques; les rencontres 
sont fortuites, et, de part et d'autre, ne sont pas 
toujours volontaires. Il est donc naturel que les 
documents soient moins nombreux que pour les 
bêtes qui sont les compagnes de l'homme, et 
vivent parfois sous le même toit que lui* 

Ceux qui s'étaient occupés avant moi des 
fauves et des mammifères sauvages en général 
avaient, eux aussi, trouvé un assez petit nombre 
de faits. M. de Gubernatis leur consacre 
174 pages, moins du quart de sa Mythologie 
:(poîogiquey et M. Eugène. Rolland a pu consigner 
en un mince volume le résultat de ses inves- 



90 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

tigations personnelles et de celles qu'avant lui 
avaient faites dans toute la France, et même 
en dehors, les auteurs qui se sont occupés de 
ce sujet, alors qu'il avait peine à faire tenir en 
deux gros volumes les riches matériaux qu'il 
trouvait sur les mammifères domestiques. Il n'est 
pas surprenant que mon enquête, bornée à une 
seule province, comprenne, elle aussi, un nombre 
de pages assez restreint. 

On trouvera ci -après la monographie de chacun 
des animaux au sujet desquels j'ai pu me procurer 
des renseignements. 

Il est question de bêtes sauvages, sans désigna- 
tion d'espèce, dans les contes suivants de ma 
collection ; La Princesse Félicité, n» xxii, 2« série, 
est gardée par des bêtes féroces qui ne s'endorment 
que de midi à une heure ; U Enfant qui va cher- 
cher des remèdes, n© xxxiv, est obligé, pour 
parvenir au but de son voyage, de tuer à coups 
de flèches une multitude de bêtes qui gardent un 
château par lequel il faut qu'il passe. 

Dans le grand Géant Grand-Sourcil, Contes de 
Marins, no xxii, il s'agit d'aller dans un pays où 
le roi des bêtes et s^s sujets dévorent les naviga- 
teurs, à moins que ceux-ci n'apportent des vivres 
en quantité suffisante pour contenter l'appétit des 
bêtes. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 9I 

Plusieurs contes, LEnfant qui entend le langage 
des biles, 2* série, n» xxv, dont j'ai d'autres va- 
riantes, mettent en scène des personnages qui com- 
prennent le langage des animaux; dans un conte 
encore inédit que j'ai recueilli àSaint-Cast, Petits- 
Yeux-voit-clair entend aussi le langage de toutes 
les bêtes, et ce don lui sert à éviter plusieurs em- 
bûches. 

Dans les récits gallots, il est parfois parlé d'ani- 
maux fantastiques, tels que la Licorne (conte 
inédit où le héros doit ramener Licorne prisonnier 
(c'est un nom propre masculin) ; le Dragon, 
moitié bête, moitié serpent : celui qui figure dans 
Les quatre fils du meunier, i« série, n» viii, 
retient prisonnière la fille du roi sur un rocher 
au milieu de la mer. 

Mais la bête à sept têtes est celle qui se repré- 
sente le plus souvent (cf. i^e série, n© xi, Jean- 
sans-Peur ; n» xvm. Le roi des poissons ; no xxv, 
La Princesse Dangobert, etc.), et le héros doit 
couper toutes ses têtes avant d'arriver au but de 
son entreprise. Cette bête fantastique, que la 
mythologie^ grecque faisait rencontrer à Hercule 
dans les marais de Lerne, se retrouve dans 
nombre de contes français ou étrangers. 







§ IL — MONOGRAPHIES 



LA BALEINE (Balena mysticetus, L.) 

Superstition 

[A baleine ne peut pas avaler de poisson 
plus gros qu'un hareng; depuis qu'elle 
a avalé Jonas, la gorge lui a apetissé 
(S.-C). 




LA BELETTE (Mustela vulgarzs, L.) 

Noms patois 
Belette (P.); hélette (M.); Uron (M.). 

Proverbe 

— Tête de belette, c'est-à-dire étourdi. 

Superstitions 
Les belettes portent bonheur dans les maisons. 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 93 



Cette superstition, déjà constatée par Habasque, t. I, p. 304, 
existe aussi en Poitou (cf. Souche, Croy., p. 3) ; l'antiquité la 
connaissait aussi (cf. Plaute cité par Gubematis, t. II, p. 54). 

En Basse-Bretagne, au contraire (cf. Galerie brelontu, t. II, 
p. 156), le regard de la belette porte malheur. 

I 

Les belettes viennent super (avaler) les œufs 
dans les poulaillers (E.). 



LE BLAIREAU (Ursus bibles, L.) 

Noms patois 
Biéreau (P.)> tesson (Morbihan; G. g.). 

l^overhes 

— Crier comme un blaireau (M., E., P.). 

— Dormir comme un blaireau (P.). — Le 
blaireau passe pour dormir six mois de suite. 

— r pue comme un tesson (Morbihan ; G. g.). 

Cf. Rolland, t. I, p. 49. , 

Superstition 

Si on prend la graisse d'un blaireau tué et 
qu'on en frotte les souliers d'une jeune fille, tous 
les chiens viennent lui pisser sur les pieds. C'est 
de cela qu'on menace les jeunes filles en disant : 
« Je ferais bien tous les chiens pisser sur toi » 

(P.). 



94 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LE CERF (Cervus blaphvs) 

Lt Cerf dans la littérature orale 

Je n'ai aucune superstition locale sur cet 
animal, qui est rare en Bretagne ; mais dans un 
de mes contes, Les sept garçons et leur sœur, 
2« série, no xxvii, les sept frères sont changés en 
cerfs, et leur métamorphose doit cesser quand 
leur sœur pourra leur placer un mouchoir entre 
les cornes. 

LA CHAUVE-SOURIS (Vespbrtilio) 

"^Noms patois 

Souris-chaude ou souris-chauve (M.); souris- 
chaoude (S.-D.). 

Superstitions 

Si une cliauve-souris s'accroche aux cheveux, 
on ne peut Tôter, à moins de couper les cheveux 
(E.). 

Cette superstition existe en Alsace et à Lille (cf. Rolland, t. I, 
P-7)- 

On les cloue vivantes sur les portes, après les 
avoir martyrisées. 

On dit qu'elles perdent les murs; c'est pour 
cela qu'on les tue (E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 95 

Les chauves-souris passent pour être aveugles 

(P.). 

Quand les chauves-souris volent le soir, c'est 
signe de beau temps pour le lendemain (P.). 

Jusqu'à ce qu'on ait vu le soir les souris- 
chauves, le beau temps n'est pas revenu (S.-C). 

Cf. Rolland, t. I, p. 4. 

L'ÉCUREUIL (SciuRus vulgaris, L.) 

Noms patois 

Chat d'écureuil, chai écureu, écureUy chat ècurouSy 
écurieu (M., E.); écurieux, chat d'équeuré (S. -D.yy 
chaif-écuréy masc. (P.). 

Proverbe 
— Grimper comme un chat d'écureuil. 

Superstition. — Conte. 

D'après M^e de Cerny, le lutin prend parfois 
la forme d'un écureuil. Je n'ai pas personnelle- 
ment trouvé trace de cette superstition. 

Dans La Princesse aux pêches, i^ série, no xiii, 
le héros, au moyen d'une baguette, métamorphose 
en chevaux rouges deux écureuils qu'il fait 
descendre d'un arbre. 



96 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LA FOUINE (MusTELA foinâ, L.) 

« 

Noms patois 

Fouène (P.) \ de fouine viennent : fouiner^ 
fouinasser (finasser), fouinassiery qui agit de ruse. 

Dicton 

Vers le Mené, pays montagneux du centre de 
la Bretagne, où les animaux ont des noms, la 
fouine se nomme Jacques, ainsi que le constate ce 
dicton, qui fait allusion à la malice de cet animal : 

Glaume le Leu, 
Pierre le Renard 
Et Jacques la Fouèae 
Sont treis bons gâs. 

LE FURET (MusTELA furo, L.) 

Superstition 

Le furet suce le sang des lapins ; il dort ensuite 
sept heures. Pour le faire s'éveiller, il faut mettre 
à l'entrée du trou où il est endormi des feuilles 
de parelle (M.). 

LE HÉRISSON (Erinaceus europaus, L.) 

Noms patois 
Hurusson (S.-D.); borue de hérisson (E.}. Ce 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 97 

•dernier nom lui vient de sa ressemblance avec la 
bogue, enveloppe épineuse de la châtaigne. 

Superstitions 

On tue les hérissons, parce qu'on prétend qu'ils 
vont téter les vaches (E:, P.). Cette croyance, 
qui paraît être générale dans l'IUe-et- Vilaine, 
avait été déjà constatée, a On accuse le hérisson 
de détruire la santé des vaches, de les téter, de les 
faire avorter, et après le part d'empêcher la déli- 
vrance de sortir. Si on rencontre cet animal, on 
le brûle à petit feu. » 

(Bull, de la Soc. prot. des anim.f t. V, p. 524.) 

On prétend que le hérisson va se rouler sur 
les tas de pommes pour les emporter sur ses épis 
et les manger ensuite (P.). 

On dit aussi que si une vache, avant d'être 
menée au taureau et le jour suivant, pâturait 
dans un endroit où a passé un hérisson, elle 
serait enhérissonnée et ne se dépêcherait point de 
vêler. Aussi on évite de la mettre aux champs la 
journée qu'on la mène au taureau et le lende- 
main (£.). 

Le hérisson donne aux vaches des hérissons^ 
maladie des jambes, dont elles crèvent (P.). 

Le hérisson passe aussi pour venir manger les 
canards (P.). 

Il 7 



98 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

L'HERMINE (Mvstbla erminsa, L.) 

Noms patois 
Laitiche (E.) ; héleUe (environs de Lamballe). 

Superstitions 

L'hermine passe pour s'introduire dans les 
poulaillers et super les œufs. Elle est si hardie 
que, pendant que la poule pond, elle se glisse 
sous elle pour être prête à gober l'œuf (E.). 

On dit qu'elle dort tout l'hiver (P.). 

LE LAPIN (Lsras cunicvlus, L.) 

Noms patois 

Lapatn (P.). Son trou se nomme taine^ ténière 
(M., P.); halot (Morbihan, G. g.). 

Proverhes 
— ^ Propre comme un petit lapin. 

Cf. Rollaiid, 1. 1. p. 91. 

— Beau comme un petit lapin. 

Cf. Rolland, t. I, p. 90. 

Les lapins dans les contes 

Dans un conte de marins (I^ bateau qui va sur 
terre et sur mer, n© vii), un jeune garçon a pour 
tâche de garder trois cents lapins. Il essaie de le 
faire à l'aide de l'homme qui, les jambes attachées» 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 99 

attrapait les lièvres à la course ; mais il ne peut y 
réussir. Alors une vieille fée à qui il avait donné 
un morceau de pain lui présente un sifflet qui fait 
les lapins se rassembler et marcher au pas comme 
des soldats à l'exercice. Il eut encore d'autres 
aventures avec ceux qui voulaient les lui acheter; 
mais il en vint à bout et épousa la princesse. 

Le lapin figure aussi, mais comme personnage 
épisodique, dans L$ Taureau bleu, i^ série, no m 
(lapin qui est envoyé pour faire la cuisine). 

Dans un conte inédit de ma collection qui 
appartient à la série des houles, quatorze frères 
protégés àes fées, s'étant un jour amusés à se 
changer en lapins, sont tués par des chasseurs. 

LE LÉROT (Mtoxvs nitbuil, L.) 

Noms patois 

GU, On l'appelle aussi un sept-^ormant (prononcé 
sédormant), parce qu'il passe pour dormir sept 
heures de suite. On confond à la campagne les 
différentes variétés du genre myoxus. 

Proverbes . 

— Dormir comme un glé (M.). Dormir conïme 
un loir. 

Cf. Rolland, 1. 1, p. 57. 

— Gras comme un loir (E.). 



100 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LE LIÈVRE (Lipus TiMiotJS, L.) 

Noms patois 

LieuvCy liève, femelle, îiévresse (E.); hd (S.-C, 
M., E., S.-D.). 

Proverbes 

— En v'ia ua biau lieuve ! (M.) Cela se dit 
ironiquement. 

— Il n*y a point de vilain li^vrç ni de beau 

loup (£.)• 

Cf.^dans RoUand, p. 86, un proverbe Iprrftin nnilaire. 

— Je suis comme le lièvre : je perds ma 
mémoire en courant (S.-C). 

Dicton analogue en Poitou (cf. Desaivre, Cn^.^ p. 22). 

— Avoir une mémoire de lièvre. 

Cf. Roflimd, p. 8;. 

— Il en faut cinq jours (deux hectares et demi) 
pour nourrir un lièvre. Cela se dît en parlant 
d'un mauvais terrain. 

— MaiifU (matinal) comme un lièvre (M.)- 

— Il a attrapé un biau lieuve (S.-D.). Cela se 
dit plaisamment de quelqu'un qui est tombé. 

— Fin comme un lièvre (S.-C). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE lOI 



Devinettes 

Qpatre courettes. 

Deux aiguilles,. 

Bistourette au ras du eu (£.)• 

— Un lièvre. 

Deux petits aigus, 

Et bistourette au ras du eu (P.). 

— Un lièvre. 

Superstitions et Croyances 

Rencontrer un lièvre le matin ou le jour d'un 
mariage porte malheur (E.). 

Cette superstition est ancienne; cf. les textes cités par Rolland, 
p. 87, et VÉvangiU des quenouilles, p. 33. 

Porter sous l'aisselle gauche une patte de 
lièvre ou de lapin est un préservatif contre le 
mal de dents (M.). 

En temps de neige, le lièvre ne voit pas devant 
lui (P.). 

Le lièvre passe â la campagne pour sorcier. 

Un meunier de Hénon, qui était braconnier, 
tira un jour sur un lièvre. Il le vit culbuter et 
courut pour le ramasser ; mais le lièvre se releva. 
Le meunier tira un second coup, puis un troisième, 
et toujours le lièvre faisait le même manège. 

— Qu'est-ce que cela veut donc dire ? s'écria 
l'homme. 



102 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Tu n'as qu'à d'couri, courte quette (courte- 
jambe), répondit le lièvre; tu ne me tiens 
point. 

(Conunaiiiqaé par M. E. Homonic.) 

Un soir, à la tombée de la nuit, un homme 
vit un lièvre qui se traînait comme s'il avait été 
pris au lacet. U courut à lui pour s'en emparer ; 
maïs quand il approcha, le lièvre s'enfuit. Pour- 
tant il s'arrêtait dé temps en temps, et l'homme 
courait encore après. Quand le lièvre eut bien 
lassé et bien essoufflé celui qui le poursuivait, il 
disparut, et l'homme comprit alors qu'il avait eu 
devant lui un lièvre-lutin. 

(Conté en 1879 par Jean Bouchery, de Dourdain.) 

Au Gouray, il y avait autrefois un lièvre qui 
passait pour sorcier. On racontait des légendes à 
son sujet, et on prétendait que les balles passaient 
à travers son corps, et qu'arrivé à un certain 
endroit il s'évanouissait. 

Un chasseur, qui savait que ce lièvre, après 
s'être laissé poursuivre par les chiens, dispa- 
raissait à un endroit, — toujours le même, — 
alla se cacher près de là, et il vit en effet le 
lièvre prendre son élan et sauter dans le creux 
d'un vieux chêne. 

Un homme qui était à l'affût vit venir un 
lièvre ; il tira dessus, et presque aussitôt après il 



DE LA HAUTE-BRETAGNE IO3 

sentit sur sa bouche comme une poupée de 
£lâsse. Il mourut quelques jours après (E.)* 

D'après Mme de Cemy (Saint-Suliacy p. 26), le 
lièvre à Campion était une sorte de lièvre-lutin 
sur lequel les chiens n'avaient point de pouvoir, 
•qui se moquait des honmies et paraissait avoir le 
don d'ubiquité. Il courut bien des histoires sur 
son compte, entre autres celle de Campion. 

« Campion était un jeune marin qui, voyant un 
soir les Suliacais terrifiés, leur reprocha leur 
couardise et promit de rapporter le lièvre mort 
ou vif sous trois jours. Campion ne vit point le 
lièvre et perdit son pari... Mais un soir qu'il 
marchait en rêvant à sa bonne amie, il heurta 
-quelque chose du pied et tomba sur le lièvre, qui 
s'échappa et alla à dix pas se frotter les oreilles... 
Campion poursuit le lièvre, qui se nargue de lui. 
Arrivé près du bourg, il saisit une trique et 
frappe le lièvre, qui tombe sur le flanc ; mais au 
moment où Campion veut le ramasser, il grandit 
et, arrachant la trique des mains de Campion, il le 
fit s'enfuir sous une grêle de coups. Le pauvre 
•Campion entra dans un veillois et tomba évanoui. 
Il fut malade ; mais depuis ce temps-là le lièvre 
ne reparut plus dans le pays. » 

En Berry (cf. Làisnel de la Salle, t. I, p. i$;), le lièvre blanc 
liante les carrefours ou se plaît & jouer des tours (cf. aussi ih.^ 
p. Z77, lièvre-lutin). En Franche-Comté, le lièvre errant d'Auge- 



104 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



rans, sur les bords de la Loire, se plaît aussi à hlxt endiver 
les chasseurs; on le retrouve aux environs de Valendennes (cf. 
Monnier, p. 677). 

Dans plusieurs contes gallots, le lièvre joue un 
rôle: Le Merle d*or. Littérature orale, p. 58*^ 
l'c série, Le Géant aux sept femmeSy n© ix ; — 
2e série, Le corps sans âme, n© xxvii. 

Le domestique loup-garou du conte du Loup- 
garou, 2e série, n» xlvii, ne lutte pas avec un 
passant, parce que sa mère, étant enceinte de 
lui, avait mangé un cœur de lièvre. 

Dans La Bdle aux clés à* or (Contes des Marins^ 
no xm), un chasseur poursuit toute la journée 
un lièvre qui s'arrête quand il s'arrête, se 
remet en marche quand il marche, et qui, à la 
nuit tombante, finit par disparaître dans une 
caverne. 

Le héros d'un conte inédit de ma collection est 
forcé à garder un troupeau de lièvres qu'il doit 
ramener le soir à la maison sansN qu'un seul se 
soit égaré. 

LE LION (Léo) 

Les contes populaires en font le gardien des 
trésors ou des princesses : c'est entre ses jambes 
qu'est la Belle aux cheveux d'or (cf. Le petit roi 
Jeannoty i« série, n© i) ; dans une autre variante 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 10^ 

îoédite, il s*endort à minuit sur le giron de 
« mam'zelle aux cheveux d'or ». 

Dans Jean le soldat (Contes des Marins , n» xxi)^ 
sa mère désirant le perdre, le prie d'aller lui cher- 
cher du )ait de la lionne qui est dans la forêt» 
Cf. aussi La princesse Dangoberty i^e série, no xxv,. 
où les aventuriers qui veulent délivrer la princesse,, 
enfermée dans un château suspendu entre le ciel 
et la mer par quatre chaînes d'or, saoulent le lion 
avec de l'eau- de-vie. 

LE LOUP (Camis lupus, L.) 

Noms patois 

Leu (E., P.). On l'appelle aussi: vilaine hééte 
deleit^,). 

Surnoms du loup 

Quette (potic) grise; G/a«i«« (Guillaume) (P.). 

Proverbes 

— Fait comme un loup de brousse (de buisson) 
(M.), c'est-à-dire mal peigné et mal habillé. 

— Cest un loup de brousse. 

— Sauvaïge comme un loup de brousse. 

— Connu comme le loup blanc. 

Cf. Rolland, t. I, p. 114; Desaivre, Croyances, f, 31. 



r 



I06 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Quand on conte (parle) du loup, on en voit 
la quoue (£.)• 

Cf. dAns Rolland, p. ii8, plusieurs similaires; cf. aussi 
Desaivre, p. 21 ; Souche, Prov., p. 3. 

— Il n'y a point de vilain lièvre ni de beau 
loup. 

Cf. un proverbe messin identique, Rolland, p. zxi. 

— Avoir une faim de loup ; manger comme un 
loup. 

Cf. Desaivre, Croy., p. 21. 

— Le temps au loup (E., P.) : le brouillard. 

Glaume le Lea, 

Pierre le Renard 

Et Jacques la Fouène 

Sont trée (trois) bons gAs (P.). 

C'est comme à Trigavou, 
Où la chieuve print le loup. 

Vojrez dans les Contes popuhiira de la Haute-Bretagne ^ %* série, 
La Chèvre de Trigavou^ où l'origine de ce dicton est expliquée. Il 
n'est pas d'ailleurs particulier À la Bretagne. 

Cf. Rolland, t. I, p. 13$, une histoire picarde sur « Paplenz, 
x>ù la Cabre a pris le leu. » 

Superstitions et Croyances 

L*haleine du loup enroue les personnes qui 
•crient sur lui. Si ceux dont le loup emporte les 
brebis crient sur lui, il se détourne, et son ha- 
leine les fait enrouer. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE IO7 

Quand on voit un loup dévorer les brebis, si 
on met dans sa bouche une gousse de cheveux, 
on n'enroue pas (P.). 

Si le loup aperçoit quelqu'un le premier, celui 
qu'il voit attrape un rhume. ou une extinction de 
voix. 

On dit à quelqu'un qui est enroué : — T'as 
vpù rieù 1 — Nonna ; 'était lu qui m'a veû Tper- 
mier. Arait mieux faillu que j'I'arée veù l'per- 
mier (environs de Lamballe). 

(Communiqué par M. E. Eraault.) 

En Berry, si le loup voit la bergère avant d'en être vu, elle 
«st enrouée ; si elle le voit la première, il perd tout pouvoir sur 
le troupeau (cf. Laisnel de la Salle, t. II, p. 129, et aussi 
V Évangile cUs quenouilles y p. 47). 

Quand une personne est enrhumée à ne pou- 
voir parler, on dit qu'elle a ouvert la bouche au 
moment où passait un loup, et que le loup lui a 
^ioafflé dedans (P.). 

Cf. Rolland, 1. 1, p. 117-118. 

Le loup sent la poudre, mais non les cartouches 

<p.). 

On pendait autrefois les loups tués à l'entrée 
4es forêts; il y a quelques années, j'ai vu un loup 
pendu sur la lisière de la forêt de la Hunaudaye. 

A Plénée-Jugon, il y a un loup de Bosquen qui 
fait sa tournée le dimanche des Rameaux en 
suivant toujours la ligne droite. 



\ 



I08 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

■ —IMII I !!■■■- I W ■ I M ■! Il I - ■ - » ■ ■ ■ ^ ■ ^ 

Le loup sent les brebis de cent lieues loin (P.)- 

Les loups sont de plusieurs espèces. 11 y en a, 
qui n*aiment que les brebis : on les appelle loups 
herhioux ; d'autres s'attaquent aux chevaux : ce 
sont les loups chevalins. 

Il y a des mois de Tannée où le loup ne vit 
que de vent, et alors il laisse les moutons tran^ 
■quilles ; d'autres où il vit de sarig ; il les saigne 
sans les manger; enfin d'autres où il vit de viande, 
et c'est alors qu'il dévore les moutons (P.). 

Ils vivent trois mois de chaque manière : trois 
sur la viande, trois sur le sang, trois sur l'herbe^' 
et trois sur le vent (P.)- 

En Berry (cf. Laisnel de la Salle, t. II, p. 129), le loup est 
pendant neuf jours affamé, et pendant neuf jours il ne peut 
desserrer les dents. En Poitou (cf. Souche, i*rw., p. 3), le' 
loup n'a pas toujours la gueule ouverte ; dans ces moments, il 
ne peut dévorer les moutons. 

Il y a des conjurations contre les loups (E.).. 
Voici la seule que j'aie pu me procurer: 

Notër-Dame et ses enfants, 
Préservez-nous des loups et du serpent. 
Et du chien qui court le vent. 

(Environs de Moncontour.) 

Cf. dans Rolland, p. 124 et suivantes, des conjurations de 
divers pays ; en Berry, Laisnel, t. I, p. 229. 

Quand on aperçoit le loup, on crie : 
Gare le loup I 
et il s'en va (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE IO9 

Ou: 

Harzez Tleù (Tréveneuc). 

Cf. le breton harx, ar hlei\ : sus au loup ! Cf. aussi pour les 
cris': au loup I Rolland, t. I, p. 108. 

On raconte nombre d'histoires sur -les loups. 

Un jour que mon grand-père revenait de Saint- 
Ajibin, où il s'était un petit encbaudeboiriy il se 
^ucha dans une châtaigneraie et se mit à dormir. 
Tin loup arriva et regarda si le bonhomme 
^tait mort; celui-^ ne remua pas. Alors le 
loup pissa sur lui et le cacha avec de la feuille 
mort^, puis il partit et se mit à hurler. Le bon- 
homme se leva et grimpa dans un chêne. Bien 
lui en prit, car cinq ou six loups arrivèrent et se 
mirent à chercher, et comme ils ne trouvaient 
rien, iU battirent celui qui les avait fait venir à 
p^ni^ de rien. 

(Gottté en 1878 par Aimé Pieore, àe ÎJ&ré.) 

Un joueur de violon qui traversait la lande de 
Baugé tomba dans une cave qui avait été creusée 
pour prendre les loups ; peu après, un loup y 
tomba à son tour. Le musicien se mit alors à 
jouer du violon, et il joua toute la nuit, car, dès 
quH cessait, le loup s'élançait sur lui. duand vint 
le matin, il ne restait plus qu'une corde à son 
violon. 

(Conté en 1879 par Françoise Dumont, d'Ercè.) 
Cf. le Biniout Contes J^^ 2« série| ^« t?cvii. 



IIO TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Mais les loups ont parfois un rôle qui touche 
de près à la sorcellerie ; il y a des gens qui ont le 
pouvoir de les faire servir à leurs desseins et de 
leur commander ce qu'ils veulent. On les appelle 
des meneurs de loups. 

Un homme qui revenait de travailler en journée 
s'égara dans la forêt ; comme il essayait de 
retrouver son chemin, il aperçut un grand feu 
près duquel était un bonhomme qui gardait les 
loups. 

— Que cherchez-vous ? lui demanda le meneur 
de loups. 

— J'ai perdu mon chemin, et j'ai grand froid. 

— Asseyez- vous à vous chauffer sur l'un de 
ces escabeaux. Il désignait par là un des loups. 

Il s'assit en effet sur l'un d'eux, qui ne bougea 
pas. Quand il voulut s'en aller, le gardeur de 
loups lui demanda où il désirait se rendre. 

— Chez moi, dit-il. 

— Je vais te donner deux de mes loups pour 
te guider ; mais tu leur fourniras un pain ou 
quelques galettes de blé noir. 

Le journalier eut si peur qu'il tomba mort à sa. 
porte. Les loups y grattaient avec fureur, et la 
bonne femme dut, pour les faire s'en aller, leur 
donner du pain. 

(Conté eu 1879 par Aimé Pierre, de LifTré.) 



DE LA HAUTE-BRETAGKB III 

Cf. aa sujet des meneurs de loups en HAute-Bretftgne le 
conte du Meneur de leupsy a* série, n^ ii. 

Une superstition analogue existe dans le Centre (cf. Rolland^ 
t. I, p. 159, et Martinet, p. 3). 

Le loup joue assez fréquemment un rôle dans 
les contes gallots; mais en général il n*est pas 
des plus fins, et il est souvent dupé. (Cf. i^^ série, 
Le Géant aux sept femmes, np ix; Le Loup et le 
Reuardy no lvi ; — Littérature oraUy Le Rat et la 
Rdiesse, p. 232; Les Loups, p. 237; La Chèvre^ 
p. 242.) 

Dans un conte encore inédit que j'ai recueilli à 
Saint-Cast, une fée métamorphose un petit gar- 
çon en loup ; mais un jour il surprend celle qui 
Tavatt emmorphosé et la force à lui rendre sa 
première forme. 

LA LOUTRE (Mustbla Lutsa, L.) 

Koms patois 

Loutre (jaSiSOjMn, M.» E.); chien $eau (P.); 
huhr (P.). 

LE MULOT (Mvs stlvaticus, L.) 

Superstition, — Présage 

Il y a une herbe qui chasse les mulots et qui 
porte le nom de chasse-mulot. Elle a de grosses 
graines et est puante (£.). 



112 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Oiiand les nids de mulots fkits sur les sillons 
•dans le gU (paille qui reste debout après que le blé 
a été scié) sont très-élevés au-dessus du sol, cela 
annonce de la pluie ; si au contraire ils sont au 
ras du sol, c'est signe d*un temps sec (P.). 

LE MARSOUIN (DuraiNus nocxtuk, L.) 

Dicton. — QmU 

Voilà encore les coquins de marsouins qui 
arrivent ; il n'y a pas besoin de quêter du poisson 
après eux (S.-C, Tréveneuc). 

Dans un conte intitulé Le Marsouin^ 2« série, 
09 XVI, un Êiitaud (fée mâle) qui a pris la forme 
<le cet animal sauve des pécheurs en danger de 
se noyer et les amène à terre, où il quitte sa 
forme pour redevenir faitaud. 

LA MUSARAIGNE (Soux akanbus, L.) 

Noms patois 
Mèserangne, miser ange (P.). 

Superstition 

Lorsque la musaraigne passe sur le dos d'un 
•cochon, elle le fait crever. C'est pour en préserver 
les bestiaux qu'on met du haut houèe (sureau) 
dans les étables (P.)* 

Cf. snr le rftle malfaisant de cet animal RoUâsd, 1. 1, p. 18-19. 



DE LA I^AUTE-BRETAGNE II3 

Si une musaraigne passe par un sentier où se 
trouve un homme, elle crève aussitôt (P.). 

L'OURS (Ursus arctos, L.) 

Nom patois 

Ourse. Ce mot est toujours féminin. 
L'ours n'existe plus en Bretagne, probablement 
depuis les temps préhistoriques. 

JJOwrs dans les contes 

Il figure dans plusieurs contes populaires : dans 
Blanche neige (Contes des Marins ^ n» xiv), un ours, 
qui est un jeune homme métamorphosé, vient se 
chauffer au feu l'hiver. 

La Peau d'ourse^ autre conte de marins inédit, 
est un jeune prince qui, pour se déguiser, a revêtu 
une peau d'ours. 

Dans un conte inédit de ma collection, une 
femme qui va chercher sa fouée au milieu des 
bois, emportant avec elle ses enfuits, voit un 
ours ; elle se sauve et laisse tomber l'un d'eux, 
qui est élevé par l'ours, et devient fort et velu 
comme une bête. 

LE PUTOIS (MusTSLA pvtorh;», L.) 

Noms patois 
Chat-pitois, pitois. 

II 8 



114 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE RAT (Mus rattus, L.) 

Nom patois 

Le féminin est parfois rdtesse (E.) ; le piège à 
rats s'appelle ratouère ou couyé (E.). 

Proverhes 

— Puer comme un rat pourri-mort. 

Cf. Rolland, t. I, p. 22. 

Gros comme un rat, 
Méchant comme un chat (D.). 

— Pris comme un rat dans un couyé (E.). 

Cf. dans Rolland, t. I, p. 61, un provetbe poitevin similaire. 

Superstitions et Croyances 

Il y avait jadis des gens qui menaient les rats 
et les souris (E.). 

Il y a du monde qui mènent les rats. Ils vont 
à leur besogne et ne paraissent pas les mener; 
mais où ils vont, les rats viennent. 

Un homme des environs d'Ercé avait, dit-on, 
^ ce pouvoir. Un soir qu'il passait, une femme lui 
dit: 

— N'est-ce pas, Hougrie, que vous ne menez 
point les rats? Ce sont des mentiries, pas vrai? 

Hougrie ne répondit pas ; mais les rats man- 
geaient tout chez la bonne femme. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE II5 

Un an après, Hougrie passa par là, emmena les 
rats, et ils ne revinrent plus. 

(Conté en 1880 par Françoise Dumont, d'Ercé.) 

Dans la Manche, la même croyance existe (cf. Rolland» Marnm. 
sauv.y p. 23 ; A. Bosquet, p. 283). Elle existait au moyen Age, 
et au xYii" siècle Thiers la citait comme superstition courante. 

Le rat figure comme personnage dans plusieurs 
contes gallots (cf. Le Rat et la Râtesse^ dans Litt, 
orale, p. 232, et la mort du Rat, n© lvi des Contes 
populaires, i*"* série). Dans ces deux contes, le rat 
étant mort, tous les objets de la maison, ainsi 
que les animaux, se mettent à se réjouir. 

D'après un conte inédit de ma collection, un 
petit garçon ne doit pas grandir jusqu'à ce qu'il 
ait fait sa marraine et son parrain se tenir le 
ventre à brassées à force de rire. Cela arrive un 
jour où, monté sur un rat, il veut le mener boire 
à la rivière. 

Dans un conte de marin que j'ai recueilli à 
Saint-Cast, les rats et les souris, ayant ouï dire 
qu'il n'y avait point de chat en Alger, s'y font 
porter par un capitaine; mais comme ils ne 
savaient pas le langage dts rats du pays, ceux-ci 
les tuèrent jusqu'au dernier. 

Dans Le château suspendu dans les airs, Contes 
des Marins, n° xviii, le héros arrive au royaume 
dos rats et des souris. C'est un rat qui, en fourrant 



Il6 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

sa queue dans la bouche de celui qui avait dé- 
robé la tabatière magique, permet au héros de la 
reprendre. 

Plusieurs contes gallots que j'ai en portefeuille 
parlent de pays où les rats et les souris étaient 
si nombreux, qu'on ne savait comment s'en dé- 
barrasser; survient un garçon qui apporte un 
chat et fait fortune en les détruisant. Cest, avec 
des variantes assez importantes, le thème du cé- 
lèbre conte de Grimm : Les trois héritiers chanceux. 

LE RENARD (Cahis vulpbs, L.) 

Noms patois 

Rmd (S.-D.); go^pih petit renard (G. g.); 
renarder (M.), agir avec ruse. 

Proverbes 

— Faire le renard (M., E.); faire l'école 
buissonnière. 

Cf. Rolland, t. I, p. 165 ; cf. aussi Souche, Proverbes^ p. 4. 

— Dans sa piau mourra le renard, à mains 
qu'i' ne set écorché tout en vie (M.). 

Cf. dans Rolland, p. 168, plusieurs proverbes similaires. 

-Glaume le Leu, 
Pierre le Renard 
Et Jacques la Fouène 
Sont trée bons gâs (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE II7 

Croyances et Contes 

Quand on voit le renard rôder autour des 
poulaillers, on lui crie : 

Ta renard 1 ta renard I 

Et il s'en va bien vite (P.). 

Le renard jouait déjà un rôle dans les récits 
gallots du xvi« siècle, ainsi que le constate un 
passage de Noël du Fail. 

« Et ainsi occupés à diverses besongnes, le bon- 
homme Robin... commençoit le conte de la 
cigogne, du temps que les bestes parloient ou 
comme le renard desroboit le poisson [aux 
poissonniers] ; comme il fit battre le loup aux 
lavandières lorsqu'il Tapprenoit à pescher. » 

(Propos rustiques et facétieux ^ p. 41.) 

Le premier passage fait sans doute allusion à 
un conte encore très-populaire en Haute-Bretagne : 
le renard, voyant des charrettes chargées de 
morues, court devant et fait le mort ; les chane- 
tiers, pour avoir sa peau, le jettent sur les morues ; 
alors le renard en fait tomber quelques-unes par 
terre et saute dextrement de la charrette pour 
aller les mai^er. 

Je n*ai pas trouvé trace du deuxième conte 
cité ; mais le renard joue souvent des tours à son 
compère le loup. Cf. dans mes Contes populaires ^ 
irc série, le n® lvi, dont voici une variante : 



Il8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Il y avait une fois un renard et un loup qu 
jouaient ensemble à se faire tourner. Le renard 
tira sur la queue de son compère si fort qu'il la 
lui écourta. 

Le loup se mit en colère, et le renard lui dit : 

— Je sais où il y a une forge où l'on remet les 
queues. Viens avec moi. 

Le maréchal fit chauffer un fer, et quand il fut 
bien rouge, il le mit sous la queue du loup, qui 
s'enfuit en hurlant. 

Q.uelque temps après, le loup rencontra le 
renard et lui dit : 

— Tu m'as joué un mauvais tour ; aussi, si tu 
ne me trouves pas à manger, ja te croquerai à 
mon dîner. 

— Je sais bien, répondit le renard, un endroit 
où il y a des andouilles. 

Qjiand ils se furent emparés d'une andouille, 
le renard la portait par un bout, et le loup par 
l'autre. 

Tout d'un coup, le renard s'écria : 

— Voici des chasseurs ! 

Et il tira violemment sur l'andouille que le 
loup avait dans la gueule; il la lui enleva et 
monta dans un arbre. 

Il se mit à la manger, et le loup, qui était au 
pied, ramassait les miettes et disait : 

— Oh ! que ces miettes sont bonnes l 



DE LA HAUTE-BRETAGNE Il6 



— Les grosses sont encore meilleures, répon- 
dait le renard du haut de son arbre. 

Le loup se mit en colère, et il alla chercher ses 
«compères pour se venger du renard. Ils accouru- 
rent, et comme ils ne pouvaient grimper, il fut 
convenu que Courtaud — c'était celui qui avait la 
queue écourtée — se mettrait dessous, debout et 
les pattes de devant appuyées sur le tronc, et 
que les autres grimperaient sur ses épaules jus- 
qu'à ce qu'ils fussent arrivés à l'endroit où se 
tenait le renard. 

Il n'en manquait plus qu'un pour l'atteindre, 
quand le renard se mit à crier : 

Maréchal d'ahaut. 
Apporte vite un fer chaud 
Pour le eu à Courtaud. 

Le loup, qui croyait encore sentir le fer rouge 
qui l'avait brûlé, eut une telle peur qu'il se laissa 
tomber sur ses pattes et se sauva à toutes jambes. 
Les loups tombèrent les uns sur les autres, et ils 
attrapèrent le pauvre Courtaud, qui fut étranglé 
par ses compères. 

(Conté en 1880 par Jean Pion, de Gosné, ftgl de treize ans.) 
Cf. parmi les contes français où le loup et le renard sont mis 
«n scinj : Webster, Achèria^ Le Renard^ et Bladè, Lou lou peujat, 
conte de l'Armagnac. Oi^ peut aussi consulter les curieux cha- 
pitres de La Mythologie \oologique de M. de Gubernatis, t. Il, 
consacrés au loup et au renard, et La Faune populaire de M. E. 
Rolland, Les Mammifères sauvages^ où se trouve dans un conte 
(lorrain ?) l'épisode final du conte gallot. 



120 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Mais le renard est aussi dupé à son tour, et 
assez fréquemment (cf. le Merle et le Renardy 
ire série, no lix ; Le Colimaçon et le Renard, dans 
Liit, orale y p. 237). 

Le renard figure encore, mais à titre de 
personnage épisodique, dans Moitié de coq, 2^ série,, 
no un. 

Le petit roi Jeannot, i«« série, n© i, met en 
scène un renard secourable qui n'est autre que 
rame d'un pauvre que le héros du conte a fait en- 
terrer. Dans une variante inédite, le renard est, non 
plus une âme, mais une fée. Un autre conte du 
même type fait secourir le héros par un renard 
auquel il a donné un morceau de pain. 

Un de mes contes inédits, intitulé Le marquis 
de CarabaSy diffère en plusieurs points importants 
de celui de Perrault; le rôle ordinairement dévolu 
au chat y est rempli par un renard. 

LA^ SOURIS (Mus musculus, L.) 
Expression patoise 

m 

Souricer veut dire tromper (M.), et aussi prendre 
des souris (en parlant des chats) (M.). 

Praverles 

— Éveillé comme une souris, ou éveillé comoid 
une pochée de souris (M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 121 

— Les souris mterront (entreront) dans la mef 
(la huche). Cela se dit d'un ménage où Thomme 
— couvercle de la met — est plus petit que la 
femme (E.). 

La souris dans les contes 

Dans un conte inédit, une fée se transforme ea 
souris grise pour se venger; elle touche â un 
morceau de lard, et aussitôt il se forme autour 
d'elle une tente qui est fermée à dé. La fille de 
la maison l'ouvre par curiosité, et la souris grise 
s'en échappe. Elle avait pouvoir sur la fille jus- 
qu'à ce que celle-ci eût dix-huit ans accomplis» 
Elle essaie de la faire pécher par curiosité ; mais 
n'ayant pu y réussir, elle doit rester encore mille 
ans en souris grise. 

Plusieurs contes parlent du royaume des rats et 
des souris (cf. la page 115 du -présent volume). 

LA TAUPE (Talpa buxop^, L.) 

Nom patois, — FormuJetU 

Taâpe (P.). 

Les taupes chantent, dit-on : 

SiKe mmi en. 

duatid les taupes font leur taupinière, on dit* 
qu'elles houUnt, 

\ 



122 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Dictons 

— Il sera bientôt labouré par les taupes. Il 
mourra bientôt, ou : Les taupes vont lui passer 
■sur le dos. 

Cf. dans Rolland, t. I, p. ii, des dictons analogues. 

— Noir comme une taupe (S.-C). 

Cf. Rolland, p. 1 1 (Saintonge et Suisse romande). 

Si taupe voyait. 
Si sourd entendait. 

Homme sur terre ne resterait (M., E.). 
Cf. Rolland, p. 13, et Mil., col. $$$ (Nantes). 

Si taupe verrait, 

Si sourd oyait, 

N'y aurait pas d'homme sur terre (P.). 

Croyances et Superstitions 

Les taupes sont sorcières ; elles ne se laissent 
pas prendre, et elles font endéronner (enrager) les 
fermiers (Hénon). On dit à la campagne : « Ceux 
•qui les attrapent les mènent bien. » Si un fermier 
ne fait pas prendre les taupes de son champ 
^juand le taupier est dans le champ voisin, son 
<:hamp en est écrasé (£.). 

Les branches de sureau chassent les taupes. Il 
y avait jadis des gens qui menaient^ c'est-à-dire 
amenaient les taupes dans les champs de ceux 
auxquels ils en voulaient (E.). 



WÊ 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I25 

Le sang de taupe guérit les cors, les verrues et 
les loupes, si Ton se frotte avec. J'ai connu des 
personnes qui y croyaient fermement (E.). 

Cf. sur les vertus curatives du sang de taupe. Souche, Croy., 
p. 26 ; Desaivre, Croy.f p. 8 (Poitou), et Rolland, p. 13. 

Q.uand les taupes poussent en hiver, c'est signe 
de dégel. 

Pour avoir de la chance au jeu et gagner à tous 
coups, il faut tuer une taupe en amour, lui ôter 
tous ses os un à un, et les mettre dans un 
ruisseau qui vient d'une fontaine ; l'un de ces os 
remonte à la source, et c'est celui-là qui porte 
chance (P.). 

En Beny (cf. Laisnel de la Salle, t. I, p. 284), un os de taupe 
placé sous Faisselle gauche préserve des maléfices. 




^i^m^ 



CHAPITRE in 

LÈS OISEAUX DOMESTIQ.UES 




5 I. — GÉKÉRALITëS 

l'inverse des mammifères, dont les plus 
riches au point de vue légendaire sont 
'ceux qui vivent avec Thomme, les oiseaux 
domestiques m'ont fourni bien moins de faits que 
les oiseaux sauvages. Il est juste d'ajouter qu'ils 
sont en plus petit nombre, et le coq est le seul qui, 
en raison du rôle qu'il joue dans la sorcellerie 
rustique et dans les contes populaires, soit le 
sujet d'une monographie un peu étendue. Il est 
plus rarement parlé des autres. 
Presque tous cependant servent à présager le 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 125 

I _ 11.1 I ■ a I I I III , 

temps qu'il fera, et les paysans ont confiance en 
•ces pronostics. Ce rôle de baromètre n'avait pas 
échappa à Noël du Fail, judicieux observateur 
^es coutumes de la campagne, et il le constatait 
en ces termes : 

« QjLiand les poules ne se retirent sous le cou- 
vert pendant la pluye, d'assurance elle continuera. 
Les oyes et canes se plongeant continuellement 
<en l'eau sentent la pluye prochaine. » 
. (NQël du FAa> 1. 14 p. 33.) 

Ainsi qu'on le verra d-après, ces pronostics, 
auxquels croyaient les Gallots du xvi« siècle, sont 
-encore des articles de foi pour leurs descendants 
lacdiels. 

A Matignon, on désigne sous le nomé&voUirre 
<vole à terre) l'ensemble des oiseaux de basse- 
cour. 





#^^^^$^;^^# 



S n. — MONOGRAPHIES 

LE CANARD (Anas domestica) 
Noms patois 

Aux environs de Dinan, les jeunes canards se 
nomment cani, canoriy les jeunes canes canettes. 

On donne aussi aux canards les noms de : gouri, 
gourèy gourin (D.). 

Pour désigner les canards en général, on dit : 
« les canes ». 

Pronostic 

Qpand les canards se plongent à plusieurs 
reprises dans l'eau, c'est signe de pluie (S.-C). 

Langage dont on se sert pour leur parler 

On dit aux canards pour les appeler : 
Gouri, gouri, gouri (M., E., P.). 

Ou: 

Hattaï, mon gonrin, 
Mon gouri, mon gouré ; 
Hattaï, mon coco (Calorguen). 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 12J 

Pour les faire se coucher : 

Musse, musse, musse, 
Musse, mes petites. 
Musse (S.-C). 

A ma connaissance, le canard ne joue dans le.<r 
contes populaires gallots qu'un rôle épisodique ;. 
dans plusieurs récits où la fille du diable, de l'ogre 
ou du sorcier est poursuivie par son père parce 
qu'elle se sauve avec un homme, elle se change 
en cane et transforme l'homme en canard. 

LE COQ. (Gallus domisticus) 

Noms patois 

Co\ pouliauy poulet, iplundpwiliaoux (E., M.); 
piopio (P., M.). 

En chantant, les poules cadaquent (M.) ; trocohni 
(E.) ; quédaquent (Plouvara). Elles disent alors : 
Cot I cot I cot 1 cotas 1 (M.) 

Ou: 

Quédac 1 quédac (Plouvara). 

Quand elles viennent de pondre, elles s'écoqail- 
lent (M.). Lorsque le coq fait : quet 1 quet ! pour 
appeler la poule à pondre dans un nid qu'il vient 
de faire, il se met à écoà^locher (S.-D.). 

Le coq chauche les poules (M.). 

L'œuf qu'on laisse pour que la poule retourne 



;128 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

pondre se nomme Vénija (S.-D.), Vanijoir, le 
nichet ; fixer la poule dans un nid en y laissant 
un œuf se dit enijer (S.-D.). 

Par suite de trop grands efforts pour pondre, 
la poule perd parfois sa ponoère (S.-D.) ou ponasse 
^E.); son boyau se retourne et devient pendant. 

La pépie se nomme poupie (E.). 

Pour empêcher les poules de gratter la terre, 
<m les eng*llaounette en leur mettant aux pattes 
des entraves faites avec des ronces. Ces entraves 
:se nomment des g'IIaounés (S.-D.). 

Les poules grabeîlent le fumier pour y trouver 
leur vie (S.-D.), 

Les poules ont des noms d'après leur aspect 
extérieur : on appelle Petite clmpée celle qui a sur 
la tête une huppe ; Petite nère, la noire ; Petite poule 
hassettey celle qui est basse sur jambes; Poulette 
jaune, la jaune ; la VergeUe, celle qui est chinée ; 
la VérUy la Gâre^ la noire et blanche ; la Favoris^ 
celle qui a une sorte de barbe, etc. 

Pour appeler les poules, on leur dit : 
Petit 1 petit 1 petit I 

Pour les chasser : 

Cheù 1 cheù 1 (P.) 
Chou 1 chou-d 1 (S.-D.) 

D*oû échouter les poules, les chasser. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I29 

Pour les faire se coucher : 

Joug, joug, joug, 
Mes petites, 
Joug, joug I (S.-C.) 

Quate, quate, quate (P.). 

On appelle nijous de poules ou anijotous de 
poules les hommes qui s'occupent à des ouvrages 
<de femme. 

. Langage du coq et de la poule 

Trois coqs sont chacun dans Taire de fermes 
différentes : 

Ah I que l'hiver est long I 
s'écrie le coq d'une moyenne ferme. 

Nous le passerons, 
répond d'une grosse voix le coq d'un fermier cossu. 

Ben en ahanant, 
dit d'une voix grêle le coq d'un petit fermier (E.) . 

Cf. Sauvé, Proverbes bretons, n* 264. 

— Que Thiver est long, 

— Qjii qui rpass'ront ? 

— Ceux qui pourront (P.). 

Dialogue entre deux coqs : 

Que l*hiver est long I 

— Tébahis pas. 

J'ai du blé dans mon gâspas (débris de paille) 

[(S.-C). 

n 9 



130 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— J'embrasse quand je veux. 

— Tu es bien heureux I (E.) 

— I* y a des filles à marier sez nous ; 

— r s'marieront tantôt (P.). 
Cf. Laisnel de la Salle, t. I, p. 205. 

On traduit le langage de la poule par : 
Je ponds pour Piques. 

En Bcrry, la tiaduction est la même, sauf que Jacques est 
substitué & Pâques (Laisnel de la Salle, I, p. 222). 

Proverbes et Dictons 

— Au temps jadis où les poules pissaient par 
la patte (E., M.). 

— Au temps jadis où les poules pissaient dans 
n'un bassin (E.). 

Ces deux dictons, qui désignent une chose 
invraisemblable, sont assez fréquemment employés 
comme commencement d-^ contes. 

— Les poules donnent les œufs par le bec 
(Penguilly). 

— Le labour d'une poule : un petit champ (E.). 

— Emprunté comme une poule do iun (un 
seul) poulet (M., E.). 

— r fait d'z yeux comme une poule qui perce 
un sas (E.). 

— Tendre comme une poule de deux jours 
(E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I31 

— Le champ oit chanter le coq. Il est près de 
la maison. 

— Un bon coq vaut sept poules. 

— Jamais bon coq ne fut gras. 

— La poule n'ennoblit pas le coq (M.). 

A la campagne, le coq est souvent employé 
comme désignant le mâle qui féconde, d'où les 
dictons suivants : 

On dit à une femme qui n'a pas d'enfant : 
Vot' co' ne vaut fen. — Vous n'ez point l'air 
d'avaï un bon co*. 

D'un homme qui a beaucoup d'enfants, on dit 
au contraire : C'est un bon co' (E.). 

— Il n'est ni de coq ni de pie (Calorguen). Il 
n'a pas d'opinion, ou il ne veut pas la dire. 

— Honteux comme une poule mouillée (E.). 

Dicton similaire en Poitou (cf. Desaivre, Croy.^ p. 25). 

Poule qui chante, 

Fille qui subie (siffle) 

Ht coq qui pond, 

A la maison tout y fond (E.). 

Pou!e qui chante. 
Coq qui pond. 
Amène le diable dans la maison (P.). 

Fille siffler. 
Poule chanter. 
Et coq qui pond. 
Trois diables dans la maison (P.). 



132 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Devinettes 
Je ne suis pas cavalier, et j*ai des éperons ; j'ai 
une couronne, et je ne suis pas roi; je dédare la 
guerre, et je signe la paix (S.-C). * 

— Le coq. 

Cf. Rolland, D. 51. 

En m'en revenant du bourg d'Ercé, 
J'ai trouvé un eu renversé 
Qli'avait un peigne sur la tête. 
Devinez quelle bête (E.). 

— Un coq. 

Q^i a plus de mille pièces sur le dos sans une 
seule couture ? 

— Une poule. 

Qjai n'a ni chai' ni os. 

Et qu'a une petite chemise blanche 

Qfii n'a ni couture ni manche ? 

' — Un œuf. 

Cf. Rolland, D. 66 (Dordogne). 

Une petite maison qui n'est ni liée ni che- 
vronnée, et qu'est pleine diqu'au faîte. 

— Un œuf. 

Cf. Rolland, D. 64-6$ ; Cerquand, t. Il, p. 7$, E. 43 ; Sauvé, 
D. 44 ; Bladé, D. 97, xao. 

Q}ii est-ce qui entre blanc et qui sort jaune ? 

— Un œuf. 

Cf. Thuriaolt, p. 21s ; Rolland, D. 61. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I33 



Croyances, Superstitions et Présages 

Jjss œufis pondus le vendredi saint doivent 
Être mangés pour se dicarémer (S.-C.)* 

Si les poules mangent de la graine de chanvre, 
elles cessent de pondre et se mettent à cottver 

(E.). 

Si on jette les coques d'oeufs dans le feu, cela 
empêche les poules de pondre (P.). 

Grojrance analogue en Poitou (cf. Soucbè, Fnw., p. 14). 

Il y a des moments de l'année où l'on ne met 
pas les poules à couver. En mars par exemple, 
on prétend que la coque des œu£s est trop dure 
et que les œufs ne peuvent éclore. 

Le nombre d'œufis qu'on met à couver ne doit 
pas être pair. 

Snpentition analogue en Poitou (cf. Souche, Croj.^ p. 6; 
DesaiTre, p. lé). 

Les poulets mis à couver le jour de la Saint- 
Jean sont plus beaux que les autres, et ils profi- 
tent mieux (E.). 

Les coqs couvés par des pies chantent toutes 
les heures (S.-C). Les poules couvées par les 
pies ^ont méchantes (E.). 

On met un morceau de fer sous les nids pour 
empêcher les poulets d'être tués dans l'œuf par 
le tonnerre (E.). 



134 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Si les couvées ne réussissent pas, on dit que 
c'est à cause des orages. 

Cf. des superstitions analogues en Franche-Comté (Mél.f col. 
371); en Poitou (Souche, p. 6). 

Quand les poulets commencent à devenir 
grands, la poule va caqueter avec le coq et 
délaisse ses petits, auxquels elle répète : 

Troquons, troquons. 

Les poussins répètent : 

Ça fait pitié 1 ça fait pitié ! (E.) 

Si on donne du pain bénit à une poule, cela la 
rend enragée (E., P.). 

Si on donne du pain aux poules, on prétend 
qu'elles sautent à la figure de celui qui le leur a 
donné (P.). 

Qjiand on voit la poule faire la poudrettây c'est- 
à-dire se rouler dans la poussière, c'est signe de 
pluie (S.-C). Si, au moment où commence la 
pluie, les poules se hâtent de se ramasser, la 
pluie sera de peu de durée (P.). 

Pendant les avents, les coqs folîenty c'est-à-dire 
qu'au lieu de chanter aux heures habituelles, ils 
chantent à toute heure. Ce changement d'habi- 
tudes est d'un mauvais augure, et on croit y voir 
un présage de mort. Cette superstition existe 
aussi dans le Morbihan gallot; voici, un peu 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I35 

abrégée, la partie du conte intitulé Clémence de 
Cancoêt où elle est rapportée. 

Clémence était une jeune fille qui servait 
<x)mme femme de chambre au château ; ordinai- 
rement gaie, elle tomba en langueur et dépérit. 
La cause de son mal était bien petite pourtant : 
^lle avait entendu chanter le coq à minuit, ce 
qui, dans sa croyance, était une signifiance de 
mort, et elle n'avait osé confier cela à personne. 

Une nuit que la cuisinière la veillait, le coq 
chanta. 

— Allons, dit la Fanchon, T/7a cor nof coq qui 
Jolie; on voit ben qu'on est dans Vs avents... Heureu- 
sement que ça va finir ; demain f tenons J' dernier 
dimanche t et nof coq va s* régler. 

— Cest'i sûr? demande Qémence. 

— Sûr, répond la cuisinière. 

Et à preuve elle lui raconte une histoire à la 
fin de laquelle elle ajoute que, si pendant les 
avents les coqs chantent à toute heure, c'est la 
mort des maitres qu'ils annoncent, et non celle 
des domestiques. 

(Fouquet, Légendes du Morbiharty p. 138-146.) 

En pays bretonnant, le chant du coq avant aiinait est 'd'un 

sinistre augure ; il annonce la mort ou quelque calamité 

(Galerie hreionnej t. I, p. i;9). 

Quand les poules cJxintent le coq, c'est d'un 
mauvais présage. La poule qui chante ainsi chante 



136 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

sa mort ou celle de soa mattre; on doit la tuer ou 
il arrive malheur (P., S.-C). 

Q.uand une poule chante le co', 

Il £siut la tuer aussitôt, 

Ou elle crève comme un pot (S.-C.), 

Superstition connue aussi en Normandie (cf. A. Bosquet,, 
p. 219 ; Mèlusine, col. 47) ; en Poitou (cf. Desaivre, Lt Coq, U 
PouU et l'Œuf ^ 1876); dans les Vosges (Mr/., col. 498); en 
Franche- G>mté (Perron, p. 19) ; dans le Berry (Laisnel de la. 
Salle, t. II, p. 238). Voyez aussi à ce sujet Roulin, Hist. na$.,, 
?• 337 > Gubematis, Mythologie jpoiogique, t. II, p. 299. 

« Cette superstition, dit-il, est très-répandue en Italie, ea 
Allemagne et en Russie, et Ton croit généralement qu'il fiuit 
tuer sur-le-champ la poule, si on ne veut pas mourir avant elle. 
La même croyance existe en Perse. » 

On prétend que certains œufs plus petits que 
les autres sont pondus par les coqs ; si une poule 
les couve, elle fait éclore des serpents (E., M.). 
A Saint-Brieuc, on dit que ce sont des dragons» 

Cette superstition est connue dans les Hautes-Pyrénées (cf.- 
E. Cordier, p. 34); en Normandie, où cet œuf se nomme 
eodrill* (ycjei de curieux détails dans A. Bosquet, p. 207); ta 
Berry (cf. Laisnel de la Salle, t. I, p. 196-198). 

Quand un coq pond un œuf, il faut que celui 
qui voit Tœuf le premier crie : « Basélic ! basélic I » 
Si c'est le coq qui voit l'œuf le premier, il sort 
de l'œuf un haUlic ; c'est une sorte de bête qui 
mange les gens auxquels le coq appartient (S.-C). 

Si un f/lin (reptile) attrape un œuf de coq et 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 137 



qu'il le couve, il en sort une bote qui a des yeux 
tout autour du corps. Si elle voit un homme la 
première, il meurt immédiatement ; si au contraire 
un homme la voit, elle crève aussitôt. 

Il y avait une fois une de ces bêtes qui était 
dans le fond d^un puits, et toutes les personnes 
qiii allaient y puiser de Teau mouraient sur-le- 
champ. Un monsieur des environs, qui en enten- 
dît parler, fit faire une glace qu*il plaça sur le 
puits ; il regarda dedans et vit la bête, qui creva 
aussitôt. 

(Conté par J. M. G>nuialt, du Gonray.) 

Quand on tremble les fièvres, il faut casser un 
œuf par vm bout et le porter dans une fourmilière : 
à mesure que les fourmis le mangent, la fièvre passe 

(P.). 

Le coq et la poule dans les [superstitions et dans les 

contes 

Certaines poules noires sont fées. Voici, à ce 
sujet, une histoire que j'ai entendue en 1872. 

Les enfimts d'un fermier qui venait de mourir 
se partageaient à l'amiable sa succession. Pendant 
qu'on faisait les lots, une poule noire rôdait 
autour des héritiers et chantait d'une Éiçon assez: 
distincte ces mots: « Qui qui m'prenra? qui quî 
m'prenra ? » (qui est-ce qui me prendra ?). 



138 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Un des enfants entendit le langage de la poule 
•et comprit qu'elle était fée ; aussi s*enipressa-t-il 
de la faire mettre dans son lot. Il la nourrit avec 
soin et n'entreprend, 'dit-on, aucune affaire sans 
la consulter (S.-C). 

On dit aussi que les poules noires qui sont fées 
ou sorcières pondent tous les matins un œuf et 
une pièce de cent sous. 

Les poules noires à crête rouge chient l'argent. 
Si quelqu'un a perdu de l'argent, les poules 
noires lèvent la tête en haut pendant la nuit ; le 
diable vient leur fourrer cet argent dans le eu ; 
les sorciers la rattrapent, et ils l'emmènent chez 
«ux. 

On dit en proverbe : « Tu es comme une poule 
noire; tu chies l'argent », ou bien: « Il a une 
poule naïre qui lichie l'argent », ou : « Il a la poule 
noire ». 

(Conté par Joseph Legendre, de Saint-Brieuc-des-I&, 1880.) 

La croyance au pouvoir surnaturel des poules noires existe 
«nssi dans les Hautes-Pyrénées (cf. Cordier, p. 69) ; en Basse- 
Bretagne (cf. Souvestre> p. 187); en Berry (cf. Laisncl de la 
■Salle, t. II, p. 240). 

D'après Gïllin de Plancy, cité par Monnier, p. 672, le juif 
Samuel Bernard, banquier de la cour, mort à qualre-vingt-diz 
ans en 1739, avait, dit-on, une povile noire qu'il soignait 
«xtrèmement. Il mourut peu de jours après sa poule, laissant 
trente-trois millions. 

Un homme qui passait dans un champ à trois 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I39 

cornières, où il y avait deux échaliers à franchir, 
vit une poule noire qui se montrait devant lui 
chaque fois qu'il voulait passer un des échaliers. 
Cela lui fit très-peur (S.-C). 

Quand on lève la charpente d'une maison, on 
tue un coq qu'on mange ; s'il n'y a pas de coq à 
la maison, c'est une poule qu'on tue (E.). 

A la NeuviUe-Chant-d'Oisel, oa sacrifiait jadis un coq pour 
consacrer l'édifice (cf. Baudry, ap. Mèlusine, col. 12). Cette 
coutume existe aussi dans l'Allier, (Mèl., col. 72). 

Voici ceux de mes contes publiés où le coq et 
la poule jouent un rôle : i^e série, Le Chat y 
no LVii ; — 2e série, Moitié de Coq, n» lxi ; Les 
trois petites Poules, no lxii. 

Dans un conte inédit que j'ai recueilli à Saint- 
Cast, un petit garçon ayant mangé une poule qui 
appartenait aux fées de la Corbière, est changé en 
coq pour sa punition. 

Dans deux contes inédits, semblables quant au 
dénoûment, mais qui diffèrent par les détails, 
un garçon, qui n'a pour héritage qu'un coq, va 
dans un pays où on allait chercher le jour dans 
des charrettes ; il dit aux gens que sa bête a le 
jour dans le gosier, et il la vend un bon prix. 



I4d TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LE DINDON (Mblea<^is gallo rivo) 

Nom patois. — Proverhe. — Conte 

Co' d'Inde. 

On dit : Orgueilleux comme un dindon. C'est 
pour cela que lorsqu'on veut \t faire agacer, on^ 
lui crie : 

Plus rouge que toi 1 

Dans Césarine, up xxvii, i« série, lliéroïné 
garde les oies et les dindons. 

L'OIE (Amas amsbr dombstictjs) 

Noms patois. «^ Langage 

Un dit une houdSy au pluriel des houds âi 
aspirant 1'^^ Ceux qui se piquent de bien pailâ' 
disent une :(pie; on dit aussi dés cdsaques (M.)l 
Le mâle se nomme jds ; les petits des ptrotofii; les 
oies adultes des pirottes ou pirots (S.-C); de 
piroton vient le verbe pirotonn&r (E.), tourner tout 
autour. 

Les oies couaquent quand elles crient (M.); 
caqueni (S.-C.). 

Poiir appeler les oies, on leur dit : 

Piro, mes petites, 

Piro, pîro, mes petites (S.-C). 



1 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I4I 

Les oies chantent : 

GUaque, saque, saque, 

La grand'mère à Jacques (S.-D.). 

C'est pour cela qu'on les appelle parfois des 

Proverhes 

— Bête comme une oie. 

■ Cf. Soaché, Prw.j p. 14. 

— Les pirotons mèneront vantiez (peut-être) 

les houâs ès-champs (M.). 'Sont les pirotons qui 

veulent mener les houâs. 
« 

— Les oies de Bécherel et les piquots de 
Dinan. 

Je ne sais à quelle circonstance fait allusion ce 
«licton. 

— F touche les houâs : il va de travers ; il est 
ivre (M.). 

— Ce que les houâs n'witendent pas, les murs 
le répètent (E.). 

— Qjiand une personne allonge le cou et 
qu'elle a la figure niaise, on dit qu'elle a « l'air 
oie » (M.). 

— Marcher comme un piroton (M.). 

— r court comme un p'tit piroton (S.-D.). 



142 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Tronostic. — Formulettes 

Quand on voit les oies battre âits ailes et 
caquer,-on dit : « J'arons du vent » (S.-C, P.). 
Quand il neige, on dit : 

V'ià la petite bonne femme qui plume ses houis. 

Ou : 

V'ià saint Nicolas 

Q)ii plume ses houâs (M.). 

Saint Thomas qui plume ses houâs, 

Saint Christophe 

Qjii les met à la broche, 

Et saint Crépin 

Qui les mange au matin (D.). 

L'Oie dans les contes 

Dans mes contes populaires, il est assez rare- 
ment parlé des oies, qui n'y figurent que comme 
personnages épisodiques; c'est ainsi que dans 
Césarine, no xxvii, i^e série, les oies tournent 
autour d'elle en chantant : 

Casaque, saque, saque 1 

La jolie petite paturette de houâs que j 'avons. 

Les fées du GuiîdOy n© xi, 2^ série, ont des oies. 

Dans un conte du type, très-fréquent, où il 
s'agit de remonter sur terre sur le dos d'un oiseau, 
l'oiseau est une grosse oie, qui est ici substituée 
à l'aigle ou au corbeau. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I45 



LE PAON (Pavo) 

Proverbes 

— Fier comme un paon. 

On dit d'une personne orgueilleuse : — C'est 
un paon. 

J*ai connu sur le littoral de la Manche bre- 
tonne deux personnes, le mari et la femme, qui 
étaient appelés, Tun le Paon et Tautre la Paonne 
(panne), parce qu'ils avaient fait une rapide 
fortune dont ils étaient quelque peu glorieux. 

LE PIGEON (CotuMBA domestica) 

Noms patois 

Le pigeon domestique s'appelle />a/^//«' (E.) ou 
pigeon de palette; la femelle pigeonne (Morbihan, 
G. g.). 

Pronostic. — Chant 

Quand ils roucoulent beaucoup, c'est signe de 
beau temps (E.). 
Le pigeon a un chant peu varié ; il dit : 

Coue I coue 1 
Coue I coue 1 
Fou I (P.) 



144 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Lt pigeon dans les contes 

Voici quelques contes où le pigeon joue un rôle : 
ire série, no xiii, La Princ&sse aux pêches (pigeons 
■employés comme courriers) ; n© lx, Les Souliers 
rouges (la Vierge fait avec les os d'un petit garçon 
un pigeon blanc) ; — 2* série, n© xxvi, Petite ha- 
guette, grand pigeon auquel il faut toujours 
donner à manger ; no xxxvm. Point du jour (pi- 
geons reconnaissants). 





CHAPITRE IV 



LES OISEAUX SAUVAGES 



S I. — GÉNÉRALITÉS 




UAND les oiseaux — qu'on nomme en 
patois oisé et oisiau (au singulier, on pro- 
nonce comme s'il y avait un h aspiré), 
ou un xpi^eaity un goê:^o^ au pluriel des hoistaoux^ 
ou des ga^iaux — font entendre leur cri, on dit 
qu'ils cuitent (M.) ou cuîqiieni (S.-D.), et l'on 
entend les mèros dire à leurs enfants : « Écoute 
les oisiaux qui font cuit ! cuit I » 

« Tout oiseau a son langage », disent les 
paysans, et ils l'interprètent à leur manière... Ils 
attribuent à chacun de ces chanteurs ailés des 
phrases qu'ils récitent ou qu'ils modulent, en 



II 



10 



146 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

imitant leur chant ; mais ils se contentent d'ap- 
proximations. Presque toutes ces interprétations 
sont en vers, faiblement rimes, souvent pauvres 
d'idée; pourtant il en est qui, comme une des 
formulettes de l'alouette, sont de véritables prières 
et ne sont pas dépourvues d'une espèce de poésie 
rustique. D'autres sont moqueuses ou font allusion 
aux contes dont les oiseaux sont les héros. 

Ainsi qu'on le verra ci-aprè^, ils jouent un 
rôle important dans les légendes et aussi dans la 
superstition, et l'on tire de leurs manières d'être 
des pronostics et parfois de véritables augures. 

Les oiseaux présagent le temps, et leur altitude 
est observée par les gens de la campagne. Noël 
du Fail l'avait déjà constaté en ces termes : 

« Les oyseaux... vous monstrent d'aucuns 
signes futurs, avec autres pronostiqz, que avez de 
nature et par commune coustume aprins, comme 
le héron, triste sur le bord de l'eau et ne se 
mouvant, signifie l'hyver prochain ; l'arondelle 
volant près de l'eau prédit la pluye, et volant en 
l'air le beau temps. Le geay, se retirant plus tost 
que accoustumé, sent l'hyver qui approche. Les 
grues volans haut sentent le beau temps et 
serain. Le pivert infailliblement chante devant la 
pluye. La chouette chantant durant la pluye 
signifie temps beau et clair. » 

(Noël du F.iil, t. I, p. 31, éd. Assézat.) 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I47 

Le jour de Saint-Joseph est celui où les oiseaux 
des champs se marient (E.). 

Dans les chansons populaires, les petits oiseaux 
sont souvent cités; les contes les mettent fré- 
quemment en scène. J*ai indiqué à la mono- 
graphie de chacun les contes où ils figuraient 
nommément ; en d'autres, ils sont désignés sous 
le titre général de petits oiseaux ; le rôle qu'on 
leur prête est presque toujours sympathique. 
Dans Rodotnonty ire série, n© XLvm, ce sont eux 
qui révèlent au mari de Mariton le nom que le 
diable lui avait fait oublier ; dans Les petits souliers 
rouges y Liit. orale, p. 224, ils crient à la petite fille : 

Tu cuis ton petit frère. 

Ce sont eux qui découvrent (Le Taureau bleu, 
no m) la supercherie de la fille qui s'était coupé 
les pieds pour entrer dans la petite pantoufle. 

Dans un conte de marins inédit, tous les petits 
oiseaux, en voyant Décampe arriver, se mettent 
à crier : — Té 1 té I té ! te voilà, Décampe. 

L'oiseau bleu qui figure dans le conte de ce 
nom, i« série, n© xiii, se laisse mettre en cage, 
et il porte écrit sur ses ailes en lettres d'or : 
« Celui qui mangera ma tête sera roi ; celui qui 
mangera mon cœur trouvera tous les matins de 
l'or sous son oreiller. » 

Une variante inédite de ma collection parle 



148 TRADITION^ ET SUPERSTITIONS 

d'un petit oiseau qui avait sur son aile : « Celui 
qui mangera mon cœur aura tous les matins cecit 
écus sous son oreiller. » 

Dans Li château suspendu dans Us airs (Contes 
des Marins, n» xvm), le marin, héros du conte, a 
pour beau-frère le roi des oiseaux, qui lui indique 
où est le château suspendu dans les airs, et k 
fait transporter par un aigle vorace. 

Dans un autre récit, le prince garde des oiseaux 
qui ont sur la tête une épingle ; quand on la lear 
ôte, elles deviennent de belles demoiselles. 

Sur les tnuiitioiis relatives axa. oiseaux sauwges, cm peut con- 
sulter GubernatÎB, Mythologie ^oologifue^ et Rolland, Les Oittâu» 

sauvages. 




s n. 



MONOGRAPHIES 




L'AIGLE (AaviLA, Bnason) 

Nom paioif 

OUR les paysans gallots, aigle est toujours 
fémîxûn. 

Croyances 

On dit que le roi des oiseaux, c'est Taigle; pour- 
tant, ainsi qu'on le verra plus loin à l'article 
TrogJodyiCy cette royauté lui est contestée. 

Quand un pâtour en aperçoit un, il se hâte de 
s'enfuir avec son troupeau; mais l'aigle court 
après lui, et en descendant il lui crie : 

Sauve-toi ou ne te sauve pas, 
Tu vas être bientôt en fricot 
Sur une souche de bois (S.-C). 



VmgU dans Us eontts 

L'aigle âgure dans plusieurs de mes contes 
gallots (cf., v^ série : Lt capUaim Pierre^ no v, où 



150 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

une vieille aigle ramène le héros à la surface de 
la terre). 

Dans le conte inédit de Décampe^ c'est un vieil 
aigle vorace qui transporte le héros par dessus les 
mers jusqu'à la ville de la princesse des Mon- 
tagnes-d*Or. 

L*ALOUETTE (Alauda arvensis, L.) 

Formulettes 

Les formulettes de l'alouette sont assez nom- 
breuses, et quelques-unes sont de véritables 
prières; aussi on assure qu'elles prient le bon 
Dieu le matin (£.). 

Les pâtours disent aux alouettes : 

Alouette, alouette. 
Monte en haut. 
Pour dire à Notre-Seigneur 
D'nous accorder un peu de son Chaud, 
Pour nos pauv' petits pâtourîaux, 
Qjii n'ont ni robes ni mantiaux, 
Ren qu'la quoue de lous p'tits agneaux, 
Qfii n'est pas encore toute à eux, 
Q}ii est à Robin Piedevache, 
Qui nous m'nit, qui nous m'nace, 
Qjii nous dit que la verge était su' le banc 

Pour nous fouetter jusqu'au sang. 
Et que la mailloche était dans la fenét'e 
Pour nous cotir l'os de la tête. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I5I 



Je m'fourris dans un p'tit pertus ; 
Je croyais que le bon Dieu y fût. 
.Mais non, i' n'y avait que madame Sainte qui trope 
Qpi m'a battu de coups de sa poche (cuiller). 
Et qui me dit, si j'y retournas, 

Cheveux j'y laisseras. 

Et j'y retournis, 

Cheveux j'y laissis (S.-C). 

Cf. une fbnnalette du pays de la Hague dont le commence- 
ment est analogue (M«7., col. S}8). 

Alouette, alouette. 

Monte en haut, 
Pour attirer le temps chaud 
Su' les p'tits pâtouriaux, 
Q]ii n'ont ni cotte ni mantiaux (E.). 

Alouette, monte en haut ; 

Amène une brouée de ton chaud 
Pour tes petits pâturiaux 

Qpi n'ont ni robes ni manteaux, 
-Qui n'ont que la queue de leurs agneaux, 

Qjii n'est pas encore à elles, 
Qjii e^t à la pie qui est sur le banc, 

Qjii défouit jusqu'au sang, 
A la corneille qui est sur Thussé (la porte) 
Q]ii dit que c'est un bienfait (P.). 

Ainène du chaud 

Pour nos p'tits pâturiaux 

Q}ii n'ont ni robe ni mantiaux, 

Ren qu'la quoue des p'tits aigniaux 



152 IRADllIONS ET SUPERSTITIONS 

Qpi n'est pas encore à eux ; 
Olle est aux filles du roi 
KIb, kerll, kerli, kerli, ki. 
(Emirons de Moncontonr.) 

Les alouettes disent en volant en Tair : 

Tu m'oublies, 
Tu m'oublies. 
Tu m'oublies 1 

Quand elles sont bien haut, elles disent : 

Ouvrez-moi la porte dujparadis» 
Je ne pécherai plus {ter). 

Qpand elles sont descendues : 

Mille diables, que j'étais haô (haut) t (E.) 

Si elles sont haut, elles crient : 
\ Je n' jurerai p'us (ter). 

Je jurerai cor (ter), 
disent-elles quand elles sont descendues (E.). 

En montant elles disent : 

Mon petit soleil, aide-moi à monter. 

Mais en descendant, elles répètent : 

Couyon I couyon I (S.-C.) 

Cf. Rolland, t. Il, p. 209, où plusieurs formnlettes relatives 
à Palouette sont rapportées. Laisnel de la Salle, t. I, p. 234- 
32$, dit qu'en Berry Talouette s'élève dans les airs et demande & 
saint Pierre d'entrer dans le panulis : 
Pierre, laisse-moi entrer; 



DE LÀ HAUTE-BRETAGNE l^$ 

Jamais pka ne faiit'Kii, 
Jamais plus ne faut'rai. 

Mais il parait que l'entrée du paradis lui a été refusée, parce 
que quand elle descend, elle chante de dépit : 
J'faut'rai, j'faut'raî, j*faut'rai f 

Cf. aussi dans Desaivre une formulette de l'alouette (Myib. 
'^^'» P* 9) ; quelques pages de cet ouvrage sont consacrées à 
l'alouette. 

On assure encore qu'elles disent : 

Dieu a bon soin des champs dans c*pays-ci ; 
Chez nous la récolte est mangée par les souris (S.-C.)» 

LA BÉCASSE (Scolopax rusticola, L.) 
Noms patois 

Bégasse (E., M., P.). 

Les grosses bécasses, qui se trouvent en général 
dans les. fossés remplis de feuilles, se nomment 
feuiUardoires (M.). 

Proverbe 
— Année de bégasses, année de coucou3 (E.)» 

LE BOUVREUIL (Loxu pterhi^aX 
Nom paieit 

Bouvreu (M., P., E.). 

FormuletU 
Cet oiseau picote les boutons des pommiers et 



154 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

■ ■ I 11 I I ■ ■ ^. ■■■ ■ ■ ■ I II ■ ^^»^^»^— ^^M^^ 

les arrache; c'est pourquoi il dit aux personnes 
qui sont à le regarder : 

Trinque, trinque. 

Je tire le cidre, moi I 

Je tire le cidre, moi I (P.) 

Nicolas Guillau, 
Qji'a vendu sa femme pour un maquériau. 
Et l'a à racheter pour un brin de porée, 

Nicolas Guillau (S.-C). 

LA CAILLE (CoTURNix comkukis, Bonnaterre) 

Proverbe 

— Chaud comnie une caille. 

Cf. Rolland, t. Il, p. 336. 

FormuletUs et Croyances 

Les cailles disent : 

Bout pour bout 1 

La caille a appris aux maçons à mettre les 
pierres en place. Un maçon était à faire un mur, 
et il ne savait comment s'y prendre pour faire 
tenir une pierre; une caille qui était derrière lui 

cria : 

Bout pour bout I 

tx le* maçon sut comment faire tenir sa pierre (E.» 
Plévenon). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I$$ 

Elles disent encore : 

Sème du blé na (noir), 
Pour que je m'régale une fa (fois) (S.-C). 

Chique taba' (tabac), 
Chique taba' (S.-C). 

Paye tes dettes. 
Paye tes dettes (P.). 

Identique en Beny (Laisnel de U Salle, t. I, p. 2x2). 

En pays breton : 

Pemp guennek 1 

Dialogue entre deux cailles : 

Paï (poil) d'carotte, 
Paï de carotte. 

L'autre répond : 

Mais ouah 1 
Mais ouah I 

La première reprend : 
Ah I garce 1 



Autre : 



Ah ! garce 1 

N'y a pas d'taba*. 
Ah I dame, sia (oui). 
Ah I dame, sia. 



L'autre répète toujours : 

Mais ouah ! 
Mais ouah 1 



156 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Ah I garce ! 
Ah 1 gfirce i 
Ah I àtme, sia I 
Ahl dzmç, sia I (P.) 

Dicton et Croyances 

Plus la caille carcaille, 

Plus chère est la semaille (lUe-et- Vilaine), 

Le grain (i) vaut dans Tannée autant de francs 
le demeau que la caille répète son chant de fois. 
Quand elle chante pendant les foins, c'est ce que 
le foin vaudra (E.). 

Plus il y a de cailles, moins le grain est cher (E.)- 

La même croyance existe en Toscane (cf. Gubernatis, t. II, 
«92); en Poitou (cf. Desaivre, M)ih. locale, p. 13); dans le 
Maine, les Hautes-Alpes, etc. (cf. Rolland, t. II, p. 344) ; en 
Berry (Laisnel de la Salle, 1. 1, 222). 

On dit que la caille « bannit » le prix du blé ; 
autant de fois elle répète son chant, autant de fois 
le blé vaudra de pièces de cent sous. L*amîée où 
le blé monta jusqu'à 45 fr., me disait une bonne 
femme, la caille chantait neuf fois (S.-C). 

LE CANARD SAUVAGE (Anes boschus, L.) 

N(m pûim 
Morette (S.-C). 

(i) Gros grain : elles chantent davantage à ce moment que 
quand il y a du bl£ noir. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 157 



La Cane de Montfort 

Le canard sauvage ne joue, à ma connaissance 
du moins, aucun rôle dans les superstitions ; mais 
il figure dans une des légendes les plus populaires 
de la Haute-Bretagne, celle de la Cane de Mont- 

Jort. 

Montfort fut surnommé Montfort-la-Cane jus- 
qu'en 1790. Officiellement, la ville s'appelle 
Montfort-sur-Meu ; mais beaucoup de personnes 
disent encore Montfort-la-Cane. Chateaubriand 
donne une version du miracle de la cane, auquel 
la ville doit, dit-on,^son nom : « Certain seigneur 
avait renfermé une jeune fille d'une grande beauté 
dans son château de Montfort. A travers une lu- 
carne, elle apercevait l'église Saint-Nicolas; elle 
pria le saint avec àos yeux pleins de larmes, et elle 
fut miraculeusement transportée hors du château. 
Mais elle tomba entre les mains des serviteurs du 
félon, qui voulurent en user comme ils supposaient 
qu'aurait fait leur maître. La pauvre fille éperdue, 
regardant de tous côtés pour chercher du secours, 
n'aperçut que des canes sauvages sur l'étang du 
château. 

« Renouvelant sa prière à saint Nicolas, elle le 
supplia de permettre à ces animaux d'être témoins 
de son innocence, afin que, si elle devait perdre 
la vie sans pouvoir accomplir son vœu à Saint- 



I$8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

^^^^^^™^^ ' ■ I ■■ I M il ^»^^— ■■■■■Il I I ■ . I . . ■■■II. ^— ^^^^^ I l IBIMH 

Nicolas, les oiseaux le remplissent eux-mêmes à 
leur façon, en son nom et pour sa personne. Par 
la permission divine, elle échappa des mains des 
soldats sans aucune offense, mais elle mourut 
dans Tannée. Or, voici qu'à la fête de la trans- 
lation des reliques de saint Nicolas, le 9 de mai, 
une cane sauvage, accompagnée de ses petits 
canetons, vint à l'église de Saint-Nicolas. Elle y 
entra et voltigea devant l'image du bienheureux, 
pour l'applaudir par le battement de ses ailes, 
après quoi elle retourna à l'étang, ayant laissé 
un de ses petits en offrande. Quelque temps 
après, le caneton s'en retourna sans qu'on s'en 
aperçût. 

« Pendant trois cents ans, et plus, la cane, tou- 
jours la même cane, est revenue à jour fixe, avec 
sa couvée, dans l'église du grand saint Nicolas de 
Montfort, sans qu'on ait jamais pu savoir ce 
qu'elle devenait le reste de l'année. » 

^Mémoires d'Ouire-Tombe.") 

Cf. aussi Oresve, Histoire de Montfort. Montfort, 1858. 

Dans la jeunesse de Chateaubriand, on chantait 
une chanson dont il cite quelques vers. Elle a 
été recueillie par le docteur Roulin, et figure 
. à la page 1 3 des Instructions relatives aux poésies 
populaires de la France. Celle que j'ai recueillie est 
très-différente de celle du docteur Roulin : 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I59 



\ 



LA FILLE DU PAYS DU MAINE 

Cest une fille du pais (pays) du Maine ; 
Voilà les soldats qui remmènent. 
Sa mère était à la coiffer ; 
Elle ne fut pas plutôt coiffée 
Que les soldats Font emmenée. 

Le père s'en va les poursuivant. 

— Soldats, rendez-moi va ma fiUe ; 
Je vais vous compter cinq cents livres. 

— Non, ta fille tu n'auras pas, 
Les compterais-tu. mille fois ; 
JTons promise à not' capitaine ; 
Il faut donc qu'on la lui mène. 

Quand Tcapitaine la vit venir, 
De rire ne pouvait se tenir. 

— Est-ce ici donc la jolie fille 

Que mes soldats m'ont tant promise? 

— Tenez, capitaine, la voilà ; 
Faites-en ce qu'il vous plaira. 

— Portez-va la dedans ma chambre ; 
Ce soir nous parlerons ensemble. 

A toute marche que la belle montait, 
Son petit cœur il soupirait. 

— Est-ce ici la maudite chambre 
Où il faut que mon Dieu j'offense? 



l60 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Ton Dieu tu n'offenseras pas ; 
Not* capitaine est un brave homme ; 
Il ne fait de peine à personne. 

Quand elle fut seule dans ce lieu, 
Elle se mit à prier Dieu, 
A prier Dieu et Notre-Dame, 
Ah ! que de fille elle devînt cane. 
La belle elle a tant prié Dieu 
Que sa prière a eu aveu : 
S'est envolée par une grille 
Dans un étang plein de lentilles. 

Le capitaine dit aux soldats : 

— Allons voir si elle est là-bas ! 

On lui tira cinq cents coups d'armes : 
N'ont jamais pu tuer la cane. 
Le capitaine dit dans le lieu : 

— Si j'avais su ma mie si sage. 
Je l'aurais prise en mariage. 

(Chantée en 1880 au château de la Saudraîe par Joseph André, 
de Trébiy.) 



LE CANIARD (Stercorasjus, Brisson) 

Nom patois 
Canids (M). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE l6l 



Proverbes 

— Estoma' d'caniâs (M.). 
^ Manger comme un caniâ (M.). 
Le caniard est à juste titre renommé pour sa 
voracité et la capacité de son estomac. 

Croyance. 

Le caniâ cousse (poursuit) les mauves pour 
manger leur fiente (S.-C). 

LE CHARDONNERET (Frihgilla cardueus) 

Noms patois 

Cherdonnette, clxirdonneîU (M.) ; cher donner et 
^E.) ; chierdonnet (P.) ; echerdonneite (M.) ; chardon" 
nadoré (Tréveneuc). 

Formulette 

Le chardonneret dit : 

Mélie, 

Qjiiou ! quiou 1 (S.-C). 

Conte 

Dans un conte populaire, 2* série, no xliv, 
L'instruction et le Jugement, il est question d'une 
fée qui a été changée en chardonneret. 

II II 



l62 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE CHAT-HUANT (Stmx otus, L.) 
Noms patois 

m 

Chouhan, chouan (M., £., S.-D.). 

Proverbe 

— r sont environ li comme la pie après le 
chouhan. C'est peut-être à cause de son mauvais 
cœur que Ton dit cela. 

Cf. le Bpugê-Gorge. 

Formulettes 

Le chat-huant dit à la chouette : 
Coucherai-je avec vous ? 

Elle répond : 

Je le souhaite, je le souhaite, je le souhaite (S.-C). 
Cf. le Petit-Duc. 

Veux-tu que j'irais coucher o ta ? 
— Oui, oui, oui (P.)' 

Parfois la chouette lui répond : 
Mais ouah, mais ouah. 

Après elle change ; elle dit : 

Qji'éoui, qu'éoui. 
Après cela, je ne sais s'il y va. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 163 



Ou encore elle dit aux gens en hiver : 

Coucherai-je o (avec) vous ? {bis) 

Ah I haie, coucherai-je o vous, vous, vous? (P.) 



Croyances et Présages 

Les chouans sont des oiseaux de mauvais 
augure ; leur cri répété annonce la mort. 

Rqnsard constatait cette croyance : « Les chouans annonceurs 
de mauvaises nouvelles ». Même superstition en Basse-Bretagne, 
où le chat-huant est surnommé hucheur de nuit (cf. Dulaurens 
de la Barre, Veillées de l'Armor.^ p. 20 et suiv.). 

On les cloue à la porte des granges pour dé- 
tourner les maléfices. 

Cf. Rolland, t. II, p. 43. 

Le chant du chat-huant annonce le froid. Il en 
est de même de celui de la chouette (Plédran). 

Chouan est synonyme de blanc ou légitimiste. 
Dans riUe-et- Vilaine, pour désigner un légitimiste, 
on dit parfois qu'il « a de la plume aux pattes ». 
En 1877, je faisais partie d'un bureau électoral, 
et un paysan, après avoir voté, me demanda s'il 
y avait « beaucoup de plume dans l'urne », 
voulant par là désigner les bulletins du candidat 
réactionnaire. 

On appelle aussi chouan un homme sournois 
(S.-D.). 



164 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Facétie de marin. — Conte 

Il y avait à la houle de Chêlin un chat-huant 
qui criait : Houhou 1 

Un capitaine qui passait auprès avec son navire 
crut qu'on lui demandait où il allait. 

— A Bréhat, répondit-il. 

— Houhou I répéta le chat-huant. 

— Chargé de triques et de fagots pour le gou- 
vernement. 

— Houhou I 

— Abré au trou ? (Je ne sais ce que cette 
ligne veut dire; mon narrateur ne le savait pas 
davantage.) 

(Conté par F. Marquer, de Saint-Cast.) 

Dans L'enfant qui va chercher des remèdes, 2* sé- 
rie, no XXXIV, Therbe qu'il s'agit de conquérir 
est gardée par un chat-huant. 



LE CHEVALIER CU-BLANC (Totahus ochrofus, 

Temmlnck) 

Nom patois. — Pronostic 

Cu'bîanc (S.-C). 

Q.uand les cu-blancs rasent la terre, c'est signe 
de vent. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 165 



LA CHOUETTE (Strix ulula, Leach) 

Dicton. — Pronostics 

— Malin comme une chouette. 

Opand les chouettes chantent le soir, c'est 
signe de beau temps (£.). Si la chouette chante, 
c'est qu'elle Sifret es pieds (P.). 

Superstitions 

Quand les chouettes viennent sur les cheminées, 

elles disent : 

Coudre 1 coudre 1 

indiquant que c'est pour coudre l'homme dans 
son linceul. A chaque fois qu'il y a une personne 

malade, elles vont sur la cheminée (S.-C). 

* 

Superstitions analogues en Normandie, dans le Limousin, etc. 
(cf. Rolland, t. II, p. 47-48). 

« Dans les campagnes aux environs de Cha- 
teaubriand, on croit que les vieilles filles sont chan- 
gées en chouettes après leur mort. Un soir, un 
paysan qui s'en revenait d'une partie de grillons 
(cretons) entend une chouette qui s'envole à tire- 
d'ailes. — Je parie que c'est Tiennetle qui 
perchait là, s'écrie-t-il. Je lui avais toujours dit : 
« Tiennette, marie-toi ; marie-toi donc, ma Tien- 
« nette. » Si elle m'avait cru pendant qu'elle 



l66 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

vivait, elle ne serait pas toutes les nuits à cJjouetter 
dans le brou des vieilles troènes. » 

(Histoire et légendes de Chateaubriand, p. 37-38.) . 

Dans les Vosges, on dit que les filles qui arrivent k trente ou 
quarante ans sans être mariées vont crier la chouette (cf. Mél.f 
col. 4J4). 

CORBEAUX ET CORNEILLES (Corvus, L.) 
Ncifns patois 

Corbiaou (Tréveneuc) ; corhin (S.-C.)> ce mot 
vieillit; cônilîe (M., E.); cornille (S.-D., P.). 

On appelle morelle ou cornille morelle (P.) une 
espèce de gros corbeau qui vit isolé et qui pour- 
suit les corbeaux qui vont par bandes. Ceux-ci 
n'osent pas l'attendre et s'enfuient (S.-D.). 

• Proverbe 

— N'y a point d'cônille qui ne trouve ses cô- 
nillons biaux (M.). 

Superstitions. — Langage 

Si les corneilles parvolent (volent çà et là par 
groupes), c'est qu'elles demandent de la pluie. 

Cf. Rolland, t. II, p. iio (Franche-Comté, Gironde, etc.). 

Q.uand un seul corbeau vient dans un champ 
où se trouvent des corneilles, elles s'enfuient, 
car elles ont peur de lui (Hénon, près Moncon- 
tour). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE ï6j 

Quand les corbeaux restent longtemps à chan- 
ter dans un endroit, qu'ils picotent autour de la 
maison, c'est signe que quelqu'un mourra dans 
les environs (S.-C, E.). Ils crient : 
Tagar 1 tagar I 

On dit que les corneilles, quand elles sont dans 

le voisinage d'un malade, disent : 

J't'areu, j't*areu (je t'aurai). 
J't'attends. 
Couac ! bougre I bougre 1 

Si quelqu'un est mort, elles disent : 

Est-i ben gros ? 
I n'a qu'la piau 
Et les rouchiaux (E.)* 

Là est gras ? 

Les pies répondent : 

N*y a que du sieu (suif). 

Quand elles font entendre une sorte de grin- 
cement, on dit « qu'elles scient des châsses » 
(bières). 

Quand elles sont à grabaler l'avoine, l'une dit : 
Qjie c*est gras I que c'est gras I 

— Pas là, 
répond une autre. 

— Mais sia I (oui) 

disent les autres (P.)* 



l68 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



On crie aux corneilles dans les champs : 
Cônille pigaloue, 
Le feu est sous ta quoue. 
Vad (voici) Guimolet, 
Do son pistolet. 
Cônille pécaloue, 
Fourre-li Pfeu sous la quoue. 

Dans les environs de Brest, on dit aux corbeaux 
pour les chasser ; 

Corbeau, corbeau. 

Le feu est dans ta maison. 

Cf. dans Rolland, t. Il, p. 113-115, plusieurs formulettes qui 
diffèrent de celles-ci. 

A Landébia, canton de Plancoët, existe la 
croyance que les corbeaux ne grattent jamais ni 
ne mangent les blés de Landébia, tandis qu'ils ra- 
vagent ceux des communes voisines. Cela tient, 
disent les gens du pays, à ce que jamais les 
veuves de Landébia ne se remarient. Et ils 
content à ce sujet la légende d'une veuve à qui 
il arriva malheur pour avoir voulu convoler â de 
secondes noces. 

Il y avait une fois un galant qui était trop 
petit pour embrasser une fille. Une corneille qui 
passait lui cria : « Camber-la ! » (courbe-la), ce 
que fit le galant (P.). 

Le corbeau dans les contes 
Dans un conte inédit de ma collection, le roi 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 169 

des corbeaux, pour récompenser le héros d'un 
service rendu, lui donne une plume de son aile, 
et il vient à son secours quand il en a besoin. 

M™« de Cerny a recueilli à Saint-Suliac une 
légende dans laquelle Satan, pour tourmenter les 
habitants du village bâti dans la forêt de Scicey, 
autour du tombeau de saint Colomban, leur 
envoya des corbeaux. J'ai reproduit cette légende 
en l'abrégeant, t. I, p. 363-36$ du présent ou- 
vrage. 

LE CORMORAN (Cauo corhoiumvs, Meyer) 

Superstition 

Le cormoran est un oiseau de mauvais présage ; 
certains pêcheurs disent : 

Qjiand on les voit sur les rochers, 
La marée est manquée. 

Plusieurs rochers sur les côtes de la Manche se 
nomment la Cormorânière. 

LE coucou (Cucutus camorus, L.) 
Nom patois 

Cocu (P.), rarement employé. Surnom : le pa- 
rmi (S.-C). 



lyO TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Proverbes et Dictons 

— Maigue (maigre) comme un coucou. 

Cf. Rolland, t. II, p. 88. 

— C*est.un bric-à-brac à faire descendre les cou- 
cous des chênes (M.). C'est une invention inutile. 

On dit d'une personne qui a les yeux rouges et 
malades, qu'elle a les yeux rouges comme un 
coucou (S.-C). 

Croyances, — Superstitions. — Formuîettes 

La, gomme que distillent certains arbres se 
se nomme merde de coucou (M.). 

M&me nom en Poitou (cf. Desaivre, Croy., p. 27). 

L'époque où arrive le coucou se nomme cahée 
(pluie de peu de durée) du coucou (S.-D.). 
On lui dit : 

Coucou, coucou, 
Ramène le temps doux. 
(Recueilli en Bretagne par M. £. Rolland.) 

Qiiand on l'entend, c'est signe qu'on est tiré 
d'hiver (P.). 

A l'arrivée du coucou, on dit : — Le coucou est 
venu ; qu'est-ce qui' dit ? — Ah ! i' n'a ren appris 
de nouviau (P.). 

A l'époque des foins, on lui dit : 
Méfie-toi de ma faux. 

Coucou ; 
Je te coupe le cou. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I7I 



Ou: 

Va-t'en aller, coucou. 
Ou gare ma faux; je te coupe le cou (S.-C). 

Quand le coucou étend ses ailes, on lui crie : 

José, 
Mets tes voiles au se (sec). 

Le ramier et le coucou parlent ensemble (E.)» 
Le coucou dit : 

Coucou, coucou, 
Qjiat' coucou (P.). 
Ou: 

Cocu, cocu, 
Quat' cocu (P.). 

Coupe tout I coupe tout 1 
Sac et tout (Le Gouray). 

Qjiand le coucou est prêt à partir, on dit : 

A la Saint- Jean, 
Cocu, va-t'en. 

Il répond : 

Donnez-ma encore cin' jou's d'aller ; 
A la Saint-Pierre je m'en irai (P.). 

Si, la première fois qu'on entend le coucou 
chanter, on est à jeun, on mourra de faim dans 
Tannée (S.-C); quand on Tentend avant de 
déjeûner, on ne mange pas de caillihotes (caille- 
botes) de Tannée (P.). Si, la première fois qu'on 



172 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— ^^™ ■ - I ■ llll II -IM M ■ [■^■^^■^M^— I II M^»^^»^^^^ ■! ■ MMM 

l'entend, on est à faire ses besoins, on aura 
pendant toute Tannée un dérangement de corps 

(S.-C). 

Qpand on entend chanter le coucou pour la 
première fois, on regarde combien on a d'argent 
dans sa poche, car on dit qu'on aura toute 
l'année autant d'argent qu'on en a sur soi ce jour- 
là (M., E., etc.). 

Si l'on n'a pas de monnaie dans sa poche, on 
est gueux toute l'année (S.-C). 

Croyance analogue dans les Vosges (cf. MéL^ col. 452), en 
Poitou (cf. Desaivre, Myth. locale^ p. xi), et on peu partout (cf. 
Rolland, t. II, p. 92). 

Lorsque les pêcheurs partent le matin pour la 
pêche et qu'ils entendent chanter le coucou avant 
qu'ils n'aient déjeuné, ils disent : 

Nous pouvons nous en aller, 

Car nous somm* bien faînes (ensorcelés) ; 

Nous avons ouï Tparent chanter, 

Et nous n'avons pas déjeuné (S.-C). 

La première fois que le coucou vint en 
Bretagne, il fit son nid comme les autres oiseaux ; 
puis, tout joyeux, il alla se promener dans une 
prairie. Une charretée de foin lui passa sur le 
corps et lui cassa les reins : c'est pour cela qu'il 
a le derrière cassé et qu'il vole lourdement. 
Depuis ce moment, il s'en va quand les foins sont 
mûrs (M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I73 

A Ercé, on dit en proverbe : « Les coucous 
n'aiment point entendre battre les faux. » 

Ou bien : « Le coucou n'est pas heureux ; n'on 
va batt'e les faux ; ça leus agace les dents ; les 
coucous vont s'en aller » (E.). 

Quand le coucou entend les faux qu'on 
aiguise, il s'en va, de peur d'être sané (châtré) 
par les faucheurs (environs de Bécherel). 

Le coucou a peur des faux, et il s'en va parce 
que jadis il a été blessé d'un coup de faux (S.-C). 

Cf. sur le départ du coucou une légende assez semblable à la 
première dans la Myth. locaîe de L. Desaivre, p. 10. 

Facétie 

Deux marchands qui allaient à Rennes, enten- 
dirent le coucou chanter : 

— Le coucou chante pour ta, dit l'un à son 
compagnon. 

— Non fait, 'est pour ta, répondit l'autre. 

— Si fait, 'est pour ta. 

— Nonna, 'est pour ta. 

Ils continuèrent à se disputer, et quand ils 
furent arrivés à Rennes, ils allèrent chez un 
avocat auquel ils demandèrent de les mettre 
d'accord. Q.uand ils eurent expliqué leur af&ire, 
l'avocat leur dit : 

— Ce n'était point pour vous que le coucou 
chantait ; c'était pour moi. 



174 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Ah 1 nous en sommes bien aises. Combien 
est-ce pour votre consultation ? 

— C'est six francs, répondit l'avocat, pour qui 
le coucou avait chanté (E.). 

Dans plusieurs des facéties où les Jaguens sont 
mis en scène, il est question du coucou. 

L'ÉPERVIER (AcciPiTBR nisus, Pallas) 

Noms patois 

Éprévier, espervier, épurvier, épruvier (E.); es- 
perveîier (Tréveneuc, cf. le breton sparfel); espri- 
vier (P.) ; faux-mouchet (Trigavou). 

Superstitions 

De même que tous les oiseaux de proie, les 
éperviers sentent la poudre (E.). 

En Périgord et en Limousin (Rolland, t. II, p. ix6), en Poitou 
(cf. Souche, Croy.y p. 30), c*est le corbeau. 

Ils disent aux petits oiseaux : 

Sauvez-vous, petits oiseaux, 
Ou je vous mange tous en fricot. 

Plus un épervier est haut dans les airs, mieux 
il voit les petits oiseaux qui sont sur la terre 
(S.-C). Il leur dit : 

Sauvez-vous où vous voudrez; 
Plus je serai haut, mieux je vous verrai (S.-C). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I75 

Les éperviers battent des ailes pour endormir 
les oiseaux (P.). 

L'ÉTOURNEAU (Sturmus vulgarxs, L.) 

Noms patois 
Ètoumiau (M., E.); étournieu (S.-D.). 

Proverbe. — Pronostic 

— C'est la grand* bande qui rend les étour- 
niaux maigres. 

Cf. Lespy> p- 108, Prov. 6. 

Quand les étourneaux sont en bande, c'est 
signe que l'hiver sera rude; on dit qu'ils se 
réunissent pour ramasser ^es provisions (E.). 

LA. FAUVETTE (Motacilla orphea) 

Dans un de mes contes, Point du jour, 2^ série, 
no xxxvm, le héros sauve les petits d'une fau- 
vette qui, en récompense, lui donne une plume 
de son aile, et vient à son secours quand il en a 
besoin. 

LE GEAI (Garrvlus olakdarius, Vieillot) 

Noms patois 
Jaye (M.); jai-ye (Tréveneuc); jo (Plouêr). 



176 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Proverbes 

— Ébouriffé comme un jaye en colère (M.). 

Mo et to, 
La téet' (tête) d'un jo (Plouër). 

— Fait comme un geai marri. 

— 11 a Tair d*un geai en colère. 

— En voilà un beau jaye ! 

Cf. Rolland, t. II, p. 145 (pays messin). 

Dans les mariages de mai, 
La pie bat le geai (E.). 

Croyances 

Les geais qui font leurs nids dans les chênes 
ne s'apprivoisent pas, parce qu'ils tombent du 
md caduc (sorte d'épilepsie) (S.-C). 

A Matignon, on dit la même chose des geais 
du mois de mai : « qui cheyent du mal cadu* ». 

Lattage des geais 

(ipand on déniche leurs petits, les geais miau- 
lent comme des chats (M., P.). 

Au mois de mai, les geais disent : 
On traine de la rame 1 

Les autres qui sont par derrière : 
Ahaïte I ahaite I (dépêche-toi). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I77 

D'autres en grinçant répètent : 
Maracan 1 maracan I 

Quand les geais se marient, ils disent : 

I' n'pleurera pus demain. 
Parce qu'il est cor ché (tombé) ent' nos mains (E.). 

On dit encore qu'ils crient : 

Ma' (mal) aux reins 1 
Ma' aux reins 1 



Ou 
Ou 



Jacques, Jacques (P.). 



Appuie, Jacques, appuie, Jacques, 
J'ai ma' aux reins. 

L'autre répond : 

Tu plains toujours. 
Tu plains toujours. 

Lorsque les geais vont demander une femelle 
en mariage, ils se rassemblent au nombre de sept 
à huit. La femelle passe devant tous les mâles et 
se met à voler en criant : 

Q.ui m'attrapera m'aura I 

Aussitôt tous les geais prennent leur volée; 
celui qui tient la tête dit : 
De rang en rang. 

Celui qui vient après : 

Les plus délibérés vont devant. 

n 12 



178 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Celui qui vient le dernier de tous crie : 
Vieille bougresse I (bis) 

Le geai qui le précède dit : 

Ce n'est pas de tant pis. 

C'est celui qui attrape la femelle qui se marie 
avec elle (S.-C). 

Q^and les geais s'en vont par bandes, ils font 
du bruit en se rassemblant ; puis ils se mettent 
sur deux files, les jeunes en tête, les adultes au 
milieu et les vieux à la queue. 

Les jeunes disent : 

Va qui peut I 
Va qui peut 1 

Les adultes : 

Ran' à ran' I (rang à rang). 
Ran* à ran* 1 

Les vieux : 

Pitié dia vieillesse I 

Pitié d'ia vieillesse 1 (Hénon, près Moncontour.) 

Le premier dit : 

J'ai ma' aux reins 1 
J'ai ma' aux reins 1 

Le deuxième : 

Tu plains toujours I 
Tu plains toujours 1 



DE LA HAUTE-BRETAGNB I79 

Le premier reprend : 

Pai bîau plaindre, 
Ren ne me plaint (P.). 

Qjiand les geais voient des demoiselles, ils 
leur disent : 

Garce, salope, ordouse, 
Tacré couyon, couyon (P.). 

Lorsque les geais sont à manger les pois, un 
des leurs, perché sur un arbre, est en sentinelle, 
et il dit aux autres : 

Jacquot, écontez-les. 

Us lui répondent, en les becquetant : 
Ils repousseront (S.-C). 

Selon les paysans, ces oiseaux, qui ont la 
réputation d*être sorciers, imitent tous les cris des 
animaux : ils aboient comme les chiens, bêlent 
comme les moutons, miaulent conmie les 
chats, etc. Ils savent aussi contrefaire les bruits 
de divers métiers. 

Par exemple, comme les tessiers (tisserands) : 

Trie trac de oln. 
Trie trac de olu, 
Tire les vênes de mon eu. 

Comme les scieurs de long : 

Hire o zigne, 
Hire zigne, etc. 



î80 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Ils parlent comme les conducteurs de chevaux 
et les toucheurs de bœufs quand ils commandent 
pour faire la charrue recommencer un nouveau 
sillon (P.). 

Guia, gris, 
Tire-là, debout à la latte, 
Tire la barre 1 
Gouch* i' I 

Rue ha ha, gai, gai. 
Sait gai, tire à té. 
Déboute à té. 
Hai' ho*, biar {bis), 
Guîa gar (bis), 
Déboutez la latte (bis). 

Celui qui dans leur attelage tient la queue de la 
charrue crie : 

Sacré charretier de merde. 

On dit alors qu'ils sont àguêrOter; c'est quand 
ils volent çà et là dans les champs (P.). 

Il y avait une fois une jument aveugle qui 
pâturait dans les champs sur le bord d'un fossé 
profond; un geai la vit et se mit à crier : 

Sue, biard I sue 1 
Sue, biard I sue I 

La jument, croyant qu'on lui commandait de 
reculer, s'en allait à reculons; elle finit par arriver 



DE LA HAUTE-BRETAGNE l8l 

au bord du fossé, où elle tomba et se tua. Quand 
le geai la vit morte, il s'écria : 
T'a la bonne heure. 
(Conté en 1881 par Amateur Audet, de Saint-Glen.) 

LE GOËLAND (Larus camus, L. ; Lauus marinus, L.) 

FormuUtte 

Goéland, 
Va-t'en aux bruments (hannetons). 
Si tu n'y vas pas, 
Je te couperai ton sang (S.-C). 

Au Croisic, d'après Cambry dté par Rolland, 
t. II, p. 387, jadis les filles et les femmes récitaient 
aux goélands la formulette suivante : 

Goélands, goélands. 
Ramenez-nous nos maris, nos amants. 

LE GRÈBE (PoDicEPS cmstatus, Lathaœ) 

On appelle les grèbes voleurs de coups de fusil 
ou sacs à plomb (M.). 

LE GRIMPEREAU (Cbrthia famiuaris, L.) 

Noms patois. — Pronostic, — Langage 
Grippe^chène^ mesûrous de feuves (E.) ; raclons 



/ 



l82 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

â^feuves (M.) ; monte en bouée (S.-D.) ; rocenbois 
(vers Bécherel). 

Q.uand les grippe-chêne picotent et font du 
bruit, c'est signe de pluie. 

Ils disent : 

Greu I greu 1 greu 1 (gros) (E,), 

LA GRIVE (TuRDUS musicus, L.) 

Noms patois, — Proverhes 

Trd (cf. drasky bret. de Belle-Ue-en-Mer) ; trie 
(Tréveneuc, P., E.). 

— Malin comme une grive. 

— Saoul comme une grive. 

Cf. Rolland, t. U, p. 235 ; Desaivre, Croy., p. 26. 

— Gras conmae une trée (P.). 

Langage de la trâs ou grive 

Ohuho 1 houpe aïe 1 

Si la trée est perchée en haut d'un arbre, c'est 
signe de beau temps ; si elle est au milieu, signe 
de mauvais temps (P.). 

La trée dit : 

Coupe da bois, 
Tu te rôtiras, 
Gros comme ma cuisse, 
Cuisse, cuisse (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I85 

Coupe du bois, 
Tu t'rôtiras, 
ChauiFe ton eu après cela. 

Elle dît aussi : 

Cu rôti, eu rôti, 
Tu Trôtiras cor. 
Tu verras pire, pire, 
De pire en pire, 
Pire, pire (P.). 

L'HIRONDELLE (Hirundo, L.) 

Nom patois 

HérondelU (M.). 

FormuJettes 

Quand j'étais chez mon père, 
Il me logeait dans sa guérite. 
Guérite. 

Et elle s'envole en répétant : 

Guérite, guérite (P.). 

EUedit: 

Chez nous on n'se chauffe que de gros boi3. 
Gros comme ma cuisse, cuisse, cuisse. 

Elle écouabouit (écrase) les mouches, puis elle 
appelle ses petits. On prétend qu'elle dit : 

Je les écouabouis. 
Je les tue, je les cuis. 
Petits, petits (P.). 



l84 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Croyances et Superstitions 
L*hirondelle est la chance des maisons. 

Cf. Souche (Poitou), Croy., p. 27 ; Laisnel de la Salle (Berry), 
t. II, p. 263. 

On emploie pour le mal d yeux la pierre 
d'hirondelle : c'est une pierre que les hirondelles 
vont chercher quand leurs petits ont mal aux 
yeux. On défait leur nid pour la trouver. 

Cf. sur les pierres d'hirondelle, Rolland, t. H, p. 317-318 j 
A. Bosquet, p. 2x7. 

Quand les hirondelles volent en rasant la terre, 
c'est signe de pluie. 

Cf. Souche (Poitou), Croy.f p. 4. 

La fiente des hirondelles, si elle tombe sur les 
yeux, fait perdre la vue. 

Cette croyance existait un peu partout à la fin du XVI" siècle 
(cf. Rolland, Mamm. sauvages ^ p- 7). 

Les hirondelles arrivent toujours avant le 
vendredi saint, pour assister à la passion. 

Cf. dans Rolland t. II, p. 320^ une légende saintongeoise où 
l'hirondelle passe pour avoir essayé d'arracher les épines sur la 
tète de Jésus-Christ. 

LA HUPPE (Upupa epops, L.) 

Nom patois. — Dicton 
Houpe (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 185 

— C'est une huppe : c*est une personne mal- 
propre (E.). 

Huppe est synonyme de femme de mauvaise vie. 

Superstition. — Langage. — Conte 

La huppe trouve toujours moyen de déboucher 
son trou (E.). En d'autres pays^ c'est le pivert 
qui a ce privilège. 

Elle répète : 

Mon nid pute 1 (bis) 
Mon nid pute, pute I (D.) 

Cest sans doute à catise de son chant qu'en nombre de pays 
on la nomme putput ou puputi (cf. Rolland, t. II, p. 99 et 103). 

La huppe est la compagne du pivert. Le pi- 
vert et la huppe avaient résolu de quitter leur 
pays natal pour aller à l'étranger ; mais il leur 
fallait traverser la mer. Quand ils furent rendus 
à mi-chemin, le pivert, qui était lassé, s'endor- 
mait, et la huppe, pour empêcher son compagnon 
de tomber à l'eau, lui criait : « Houpe ! houpe ! » 
Il se réveillait et prenait un peu de courage. A 
force de le ranimer ainsi, la huppe lui fit faire la 
traversée sans encombre. Le pivert, qui savait le 
service que sa compagne lui avait rendu, voulut 
lui montrer aussi sa reconnaissance, et il se mit à 
percer dans les arbres des trous pour servir d'abri 
au nid de la huppe. C'est depuis cette époque 
seulement que les piverts creusent les arbres. 

(Conté en 1881 par J. M. Comault, du Gouray.) 



l86 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA LINOTTE (Frikgilul camuabimà) 

Noms patois. — Langage 

Ldnot, masc. (M.) ; linro (Trigavou). 
Autrefois on sonnait la messe avec de toutes 
petites clochettes; la linotte veut ramener cette 
mode qui a disparu, et elle dit : 

Tein I tan I 
Tein I tan I (P.) 

LA LAVANDIÈRE (Motaolla, L.) 

Formulette, -— Lattage 

Lavandière, ma jolie lavandière, 
Va me chercher un poisson dans la rivière ; 

Quand tu arriveras, 

Tu auras des pois ; 

Si tu n'y vas pas, 
Je t'assommerai avec un fusil de bois (S.-C). 

EUedit: 

Fourre ton nez dans mon drère. 
Flau, flau 1 je m*fous de té, té. 

Puis, en frétillant de la queue, elle répète : 
Flau 1 flau 1 (P.) 

LE LORIOT (Oriolus «auol*, L.) 

Noms patois 
Jjfrieux; cîoucburiou (£.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 187 

Croyance. — Langage 

Le loriot dît : 

Tu déniges mon nid ; 
Tu seras pendu. 

U arrive presque toujours quelque chose à 
ceux qui dénichent les Loriots (E.). 

Mettez les viaux dehau (dehors). 

Fermez la hachette. 

Mettez les viaux dehau, 

Je les garderai du loup. 

Cf. une fbrmulette analogue en Berry (Laisnel, 1. 1, 223). Ea 
ce pays, le loriot est appelé garde-veaux. 

Le traquenard, sorte de loriot, chante : 
Fils de garce ! (bis) 

LE MARTINET (Ctpsblus avus, Illiger) 

Nom patois. — Croyances 

Oiseau Saint-Martin (E.). 
. On laisse, pour qu'il puisse se reposer, le plus 
beau brin de chanvre (E.) (cf. le mot Chanvre). 

Si les martinets volent bas, c'est signe de pluie; 
s'ils volent haut, signe de beau temps (E.). 

LE MARTIN-PÊCHEUR (Alcedo HisM»à, L.) 

Noms patois, — Croyance 
Poissonnier (E.); coq saint Martin (G. g.)« Les 



l88 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

martîns - pêcheurs sont aussi appelés mesurous 
d^feuves, 

La nuit, leur tête éclaire presque comme les 
feux follets ou écîairous (E.). Ils jurent (E.). 

LE MAUVIS (TuRDus iliacus, L.) 

Noms patois. — Langage 

Maovis (P.). Une petite espèce se nomme lus- 
iugai (M.). 

Les mauvis disent : 

Où étais-tu, eu grillé î 
Tu ne m*as pas appelé 
Dans le coin de ton fouyer. 
Qjieue bétel (E.) 

Jambes rôties, 
Cu kait (cuit) (E.). 

CuitI cuit 1 fit I fit I 
Fait mon nid avec des couanes (crottin). 
Et des œufs 
Tout bleus. 
Tout pigassés (parsemés de taches), cinq ou six (P.). 

On leur dit : 

Mauvis, 
Va-t'en chercher des chenilles. 
Pour donner à tes petits ; 
Si tu n*y vas pas, 
Ils crèveront de faim et n'deviendront pas gras. (S.-C). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 189 

LE MERLE (Turdus hbrula, L.) 

Noms patois 

Mêle (M., E., S.-D.) ; melle (P.). La femelle 
se nomme nUUise ou merhche (E.). 

Proverles 

— Siffler comme un merle. 

— Le vilain merle ! 

— Promettre un merle blanc. 

Cf. Rolland, t. II, p. 249. 

— Tout mêle qui chante avant de déjeuner. 

Est plumé avant qui set (soit) net (nuit) (S.-C). 

Pronostics. — Fortnuîettes 

Q.uand les merles galopent le long des haies 
«n criant, c'est signe de froid (E.). (iiand le 
merle chante, c'est signe de pluie (S.-C). 

Si on déniche son nid, il crie au dénicheur : 

Couyon I couyon I 

Au printemps, les merles disent : 

11 y aura bien des maladies, 
Colérique (ter). 
Faudra p'tit bois su' dTonguent gris, 
Pour les guéri', 
*Uyest-i'bêtel(E.) 

r fait beau temps 
Pour le printemps, 
^J*en suis sûr (P.). 



190 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Le merle dît : 

Dors-tu, Tantinc, 
Le tonton 
Turlute. 

Cu rôti. 
Tu n'en mangeras pas c*t'hiver-ci (E.). 

Cu 'ôti {bis). 

Tu 'ôtiras cor (P.)- 

Au printemps, ils disent : 

J'étas su* la haie d'mon courti'. 
Tu n*m'as pas pris (E.). 

J*ai perdu ma femme 
Et cinq petits 
Tout petits (P.). 

Ceux qui sont montés sur la maison disent : 

Il pleut, il vente, il grêle 
Su* la maison aux mêles ; 
La mêlesse est dedans 
Et dit qu*i* fait biau temps. 
Le mêle est dessus; 
I* dit qu'i* pleut p*us. 

J'ai tiré d'hiver 
Ma femme et mes petits 
En filant des étoupes, toupes, toupes, toupes (P.). 

J'ai tiré cinq petits d'hiver 

Et la mère aussi. 
Tous en fils, fils, fils (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I91 

duand la merlesse n'agit pas au gré du merle, 
il lui dit : 

Godiche 1 bougresse I 

Faut filer brin et têture, 

Tout ça pour nos p'tits enÊints. 

r y a mérite, 

Brin têturé (his) (P.). 

Quand il y a des fruits, le merle chante, et il 
dit: 

Ma petite fille aime bien tous les fruits. 
Surtout les figue' et les badies (cerises) (S.-C). 

Il est souvent parlé du merle dans les Contes po- 
pulaires ; c*est lui qui, sous le nom de merle 
blanc, du « zoizeau merle blanc », du merle 
d'or (cf. Le petit roi Jeannot, !« série, no i; !,« 
Merle d'or, dans Litt. orale, p. 56), est gardé par 
des lions ou des géants, et dont le héros doit 
s'emparer après avoir surmonté plusieurs obsta- 
cles. J'ai nombre de variantes de ce thème. 

Dans Le Merle et le Renard, i^e série, no lix, 
le merle se venge du renard et joue un rôle fa- 
cétieux. 

LA MÉSANGE ÇPhkls, L.) 

Noms patois 

MésiUe (E.) ; médrange (M.) ; merdrange (G. g.) ; 
chéri hibi (Ille-et-Vilaine). La mésange noire se 



192 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

nomme brunette (M.) ; la mésange à longue queue 
(parus caudatus, L.) ; queue de pèlette (poêlon). 

FonnuUttes 

En courant après les mouches, les mésanges 
dialoguent ainsi : 

— La tueras-tu ? (quater et très-vite) 

— OUe est étêtée. 

Dans Thiver, les mésanges, qui sont des 
oiseaux très-rusés, vont auprès des ruches, et il y 
en a une qui frappe à la porte avec son bec pour 
tâcher d'attirer dehors une abeille. Près de là se 
tient sur un arbre une autre mésange qui chante : 
La tiens-tu ? la tiens-tu ? 

L'autre répond : 

Elle est étêtée. 

Et ce dialogue se poursuit longtemps (E.). 
Si la mésange voit pisser quelqu'un, elle lui 

crie : 

Cutte (cache) ta bibite (bis) 
Ou je vas l'étêter (P.). 

Elles disent aussi : 

Virginie, 
Toupie (E.). 

Tirez vite I 
Tirez vite ! 



DE LA HAUT£*BRETAGNE I95 

Q^and elles aiguisent leur bec, elles disent : 

Petit nu, petit nu. 
Tétinus I tétinus I 

Cf. Rolland, t. II, p. 30$. 

LE MOINEAU (Pa,ssbr douesticus, Brisson) 

Noms patois, — Proverbe 

Pigri (M.) ; péche^ pilUri (environs de Rennes) ; 
JUri, fiyeri (Tréveneuc). 

— Pillard comme un moineau. 

Langage du moineau 

Mettez l'pain dans l'four. 
Parce qu*i va ferdi', ferdi*, ferdi' (froidir) (E.). 

Le bois est gros comme des colonnes dans ce pays-ci ; 
Chez nous il n'est pas plus gros que le bout de mon bec 

[(S.-C). 
Ramassez votre blé. 

Ou bien je vas le manger (S.-C). 

LE MOUCHET (Accbntor moduiaius, Bechstein) 

Noms patois. — Langage 

Pèche de M (haie) ; à Nantes, paisse de haie et 
moineau de haie, 

Opaud la pêche de hâ vole haut, elle dit ; 

Ouvrez-moi la porte du ciel ; 
Je ne pécherai p*us. 

II 13 



194 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Quand elle est redescendue, elle dit: 

Bougre, que j'étas haut I 
Cf. YAUnuta. 

LA MOUETTE (Larus risiiundus) 

Nom patois 
Maoufe (Tréveneuc); mauve, maôve (S.-C). 

Croyances. — Formuîeties 

Si on entend les mauves crier : « Caré, caré, 
caré », on peut caretter les lignes, c'est-à-dire les 
replier; on ne prend pas grand 'chose. 

QjLiand une mauve a un brin de lançon, les 
autres lui crient : 

Goulue, goulue, goulue. 

Qjiand on voit un équéré (hirondelle de mer), 
on dit : 

C'est un équéré, 
Prends ta ligne et va au macré (maquereau) ; 

'Est une mauve. 
Serre ta fouée et te chauffe. 

Qpand une mauve bat des ailes au-dessus 
d'une maison, c'est signe de vent. 

Lorsqu'elle vient sur la terre picoter les vers, 
c*est signe de pluie ou de froid. 

Quand une mauve voit un bateau, elle va 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I95 

auprès; elle chante, et on assure qu'elle dit aux 
matelots : 

Je suis venue près de vous 
Pour vous annoncer une nouvelle ; 
Posez, virez, tournez vot* chique de bord : 
Je vous donne deux minutes. 

Et après les deux minutes, elle dit : 

Carettez vos lignes, matelots. 

Vous n*prenrez pas d'maquereaux (S.-C). 

L'ORFRAIE (Strtx flâmmba, L.) 

Noms patois. — Proverbe 

Fer\d (M., E»); ferscUe, 

— r s'ébrait (crie) comme eune ferzaie (P.). 

Superstitions 

L'orfraie ou fresaie est un oiseau de mauvais 
augure. Si elle fait le chêne piqué au-dessus d'une 
maison, c'est-à-dire si elle vole les pattes en l'air, 
quelqu'un y mourra le jour ou le lendemain. 

Superstition analogue en Poitou (cf. Souche, Croy., p. 9); 
en Nonnandie, Franche-Comté, etc. (cf. Rolland, t. II, p. 47 
et SUIT.). 

Quand la fer:(d vole les pattes en l'air, c'est 
signe de mort pour celui qui l'aperçoit (E.). 



196 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LE PERROaUET (Pittacus) 

Le perroquet est un oiseau exotique ; mais il 
est de longue date connu en Haute-Bretagne, où 
il a été apporté par les marins. Voici un petit 
conte où il figure : 

Il y avait une fois un perroquet qui, étant 
ennuyé dans son pays, voulut voyager. 11 prit à 
son service Jean le Merle, et tous les deux 
entreprirent de faire un tour de France. Che- 
min faisant, ils rencontrèrent un épervier. 
L'oiseau de proie se précipita sur le perro- 
quet comme pour le dévorer. Le perroquet se 
défendit quelque temps; mais comme Tépervier 
était plus fort que lui et lui avait déjà arraché 
quelques plumes, le perroquet prit son vol et 
arriva jusqu'à un bourg où il trouva la porte de 
Téglise ouverte. Il y entra, et il alla se placer 
derrière la tête de saint Pierre. Une bonne femme 
qui venait faire ses prières était agenouillée aux 
pieds de saint Pierre, lorsqu'elle entendit une 
voix qui disait : 

— Ah ! le fils de garce, qui me plumait pendant 
qu'il me tenait 1 

La bonne femme en fut saisie de frayeur ; elle 
alla chez le recteur et lui dit : 

— Comment I monsieur le recteur, saint Pierre 
est damné : il jure. 



DE LA HAUTE-BRETA'GNE 197 

— Vous radotez, répondit le recteur ; allons 
donc voir. 

Tous les deux entrèrent à Téglise et entendirent 
encore une voix qui criait : 

— Garce I putain 1 couyon, couyon I 

— En vérité ! dit le recteur. Restez là ; je vais 
aller chercher de l'eau bénite. 

Quand il fut arrivé auprès de saint Pierre, il se 
mît à lui jeter de l'eau bénite avec son aspergesme ; 
mais il le lançait tant avec force que le goupillon 
se brisa, et le pied alla frapper dans la tête à saint 
Pierre et la lui cassa. Le perroquet, qui était 
derrière, dit encore : 

— Cré fils d'ene garce y je mè se H* tiré d'une belle ! 
' Alors le recteur leva les yeux, et il vit le 

perroquet qui s'enfuyait à tire d'aile en criant : 

Couyon ! couyon I 
(Conté en 1881 par J. M. Comanlt, du Gonray.) 

LE PERROaUET DE MER (Alca arctici, L.) 

Nom patois, -^ Croyance, — FormuUtte 

Cordonnier y calculo, usité aussi dans le Finistère. 

On lui dit : 

Cordonnier, 

Tu me fas (fais) chier. 

On prétend que son bec est venimeux. 



198 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE PETIT-DUC (Stryx scops, L.) 

Langage du petit-duc 

Il dit à sa femelle : 

Coucher do (avec) ta ? 

La femelle répond : 

Ah 1 que nenni (E.). 
Cf. la Chouette et le Chat-Jjuant. 

LE PÉTREL (Procelluiu. pbulgiga., L.) 

Croyance 

Le pétrel, qu'on appelle aussi Toiseau satanique 
(cf. Oiseau du diable, Finistère), suit les navires 
en mer. A bord des longs courriers, on prétend 
que les pétrels sont les âmes des capitaines qui 
ont été méchants envers leur équipage et qui, 
pour leur punition, sont condamnés à errer. 
D'autres disent que ce sont les âmes des matelots 
morts en mer qui viennent implorer des prières. 

D'après La Chasse illtutrèe^ citée par Rolland, selon la croyance 
des marins, un pétrel est un matelot naufragé changé en oiseau, 
et le meurtre d'un pétrel rend impopulaire k bord d'un navire. 

LA PIE (PiCA. CA.UDATA, L.) 

Noms patois 

Agace, égace (M., E.) ; surnoms : margo (S.-D.) ; 
karaga (Saint-Juvat). Les objets noirs et blancs 



DE LA HAUTE-BRETAGNE I99 

sont appelés pigassés (M., E.) ; on nomme le piège 
à pie échtouère (E.). 

Proverhes et Dictons 

— Fripon comme une pie. 

— Voleur comme une pie. 

Les lavandières prétendent que les pies sont 
friandes de savon, et que si, quand elles s'absen- 
tent d'auprès de leur pierre, elles n'avaient soin 
de le cacher, les pies viendraient, le leur voler 

— Conter (parler) comme une pie borgne 
(M.,E.). 

Cf. Rolland, t. II, p. 135 ; Desaivre, Croy.f p. 24. 

— En v'ia cor eun d'enterré ; les pies ne li ker- 
v'ront pas l's zieux (ne lui crèveront pas les yeux) 
(M.)- C'est une plaisanterie que l'on fait parfois 
au retour d'un enterrement (M.). 

— r sont environ li (autour de lui) comme la 
pie après le chouan. 

Devinettes 

a) J'ai vu blanc, j'ai vu na (noir) 

J'ai vu châ (tomber) dans mon geneta (genêts). 

b) Qjii est tout gare, tout noir, 
£t qui tombe dans mon blé noir ? 

— Une pie. 



300 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

c) Noir dans k hâ (haie) 
Et blanc dans la râ (raie). 

— Un merle et une pie. 

Cf. Rolland, D. 71. 

FormuUtte. — Croyances et Superstitions 

La pie chante : 

Petit couyon, petit couyon. 
Cré petit couyon (P.). 

Si les pies font leur nid dans le jardin d'une 
ferme où il y a des filles à marier, il y en aura 
une qui se mariera dans Tannée (S.-C). 

Si on déniche les nids de pie, cela porte 
malheur aux gens de la maison, ou les bestiaux 
crèvent, parce que la pie maudit les dénicheurs. 
Il en est de même si Ton tue le père ou la mère 
avant que les petits soient grands (S.-C). 

Si les pies font leurs nids à Textrémité la plus 
élevée d'un arbre, c'est signe d'une année 
mouillée ; si au contraire ils sont placés bas, cela 
annonce de la sécheresse (P.). 

« En Beny, quand l'année doit être orageuse, les pies 
construisent le&rs nids dans les basses branches des arbres^ 
lorsque Tannée doit être calme, elles nichent, au contraire, tout 
à fiit au sommet. » (Laisnel de la Salle, t. II, p. a82.) 

Si on suspend dans un grenier une pie tuée 
dans le décours d'août, on est préservé de la 
vermine (P.). 



\ 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 201 

On pend les pies dans les champs pour chasser 
les corbeaux (E.). 

Si en partant on voit une pie seule, c'est 
mauvais présage : il faut rebrousser chemin. 

Voir une pie qui s'envole à gauche quand on 
va faire une visite, c'est signe qu'on sera mal reçu 

(E.). 

Si une pie passe à droite, c'est signe de male- 
chance"; si elle passe à gauche, c'est signe de 
chance (S.-C). 

Croyance analogue en Vendée (Desaivre, Myth. Iccalt, p. 12). 

Si une pie a la mine renfrognée, c'est signe 
qu'on aura prochainement du chagrin; si elle a 
l'air joyeux et qu'elle chante, c'est signe de 
nouvelle agréable. 

Si de bon matin on voit une pie, c'est signe 
qu'on aura une lettre (S.-C). 

En Basse-Bretagne (cf. Perrin, Galerù bretonne^ cité par Rolland, 
p. 140), les pies sont des oiseaux de mauvais augure. 

A Saint-Cast, quand les petits enfants vont à 
l'école, ils tirent des augures de l'aspect des pies, 
pour savoir s'ils arriveront à l'heure. S'ils voient 
le blanc, ils se disent : « Nous serons à l'heure » ;. 
s'ils voient lé noir, ils disent : « Nous serons en 
retard ». 

Une femme qui était jalouse de son mari 
consultait les pies pour savoir s'il la trahissait ; 



202 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

elle disait : « La pie m'a viré le noir ; il est cor 
«(encore) à voir les filles » (S.-C). 

Cf. sur la pie consultée : Mélusitif, col. 5 18. 

Contes où figure la pie 

Il y avait une fois un petit pinson qui était 
perché sur une épine blanche, et qui s'exerçait à 
chanter ses plus beaux airs pour fêter le prin- 
temps. Il fut abordé par la pie, fière de son 
plumage noir et blanc; elle s'avança en lui disant 
d'an ton orgueilleux : 

— Apprends-moi une chanson, petit pinson. 

— Oh 1 madame la pie, vous jasille^ si bien 
que vous n'avez pas besoin d'apprendre à chanter. 

La pie mal reçue s'en alla, et sur sa route elle 
tuait tous les petits oiseaux qu'elle rencontrait. 

(Conté par François liarquer, de Saint-Cast, mousse, Agé de 
treize ans.) 

Sur la lande du Mené, il y a des sillons tracés 
qui sont maintenant couverts de bruyères; 
chaque année les gens des pays voisins vont les 
tondre, pour les brûler pendant l'hiver. On dit 
que c'est une duchesse de Rohan qui avait fait 
défricher ces landes. Elle ne savait pas qu'on 
devait mourir, et le défi-ichement était bien 
avancé quand un jour elle vit sur la lande une 
pie crevée. 



DE LA HAUTE -BRETAGNE 203 

• 

— Qu'est-ce que cela ? demanda-t-elle. 

— C'est une pie morte, répondit un des 
ouvriers; tout ce qui a vie doit mourir. 

— Puisqu'on meurt, dit la duchesse, je ne 
ferai plus défiricher d'autres landes. 

(Qjntéen 1881 par J. M. Comault, du Gonray.) 

A la Poterie, près Lamballe, un dolmen à demi- 
renversé se nomme le Coffre de Margot la fée. 
La fée Margot portait sur sa tête la pierre et 
tricotait en cheminant; elle rencontra une pie 
morte et demanda à une bonne femme : 

— Qu'est-ce que cette bête immobile ? 

— C'est une pie morte. 

— Les oiseaux meurent donc dans ce pays-ci? 
Il y a-t-il d'autre chose à mourir ? 

— Mais oui, tout meurt, et les gens aussi. 

— Et moi qui portais cette pierre-là pour un 
monument ; ce n'est pas la peine de le construire. 

Et elle jeta là sa pierre. 

(Conté par M. Méheust, maire de la Poterie.) 

Cette légende de la pie morte se retrouve souvent en 
Bretagne (cf. le 1. 1 du présent livre, p. 86). 

Dans La Fille aux bras coupés, l'c série, n» xxv, 
la pie joue un rôle secourable. 



204 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA PIE-GRIÈCHE (Lamius excubitor) 

Nom patois, — Langage 

Pie marâtre (P.). Ce nom lui vient de ce 
qu'elle habite souvent près des marais. 

Elle chante : 

Pie huit I pie huit 1 
Célestin 1 Célestin 1 

LE PINSON (FUKGILLA. CŒLBBS, L.) 

Noms patois 

Pinso (Plaine-Haute) ; glaumi (M.) ; moustron 
(Ploubalay) ; moistron (P.) ; cyprien (Le Gouray). 

Proverhes 

— Gai comme pinson. 

Cf. Rolland, p. 178. 

— Qianter comme un pinson. 

Langage du pinson 

Veux-tu m'enseigner le chemin 
Pour aller à Saint-Citoyen, 
Failli chien ? (S.-C.) 

Veux-tu m'dire le ch'mio 
"D'Châteaugiron, toi, citoyen ? (E.) 

Cf. dans Rolland, t. II, p. 179, plusieurs interprétations du 
chant du pinson. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 20$ 



Veux-tu m*prêter ta civière 
Pour porter du fien (fumier) dans un jardin. 
Toi, citoyen î (P.) 



Ou 



Cyprien, Cyprien? (P.) 



LE PIVERT (Picus viridis, L.) 

Noms patois 

Pivé (S.-D., P.), TpLpiviaoux (P.). 

On appelle le pivert rateîous d'/euves, parce qu'il 
est très-friand de fèves (M.). Les vilbrequins 
se nomment becs de pivert (E.). 

Superstitions. — Pronostics 

Les piverts chantent pour appeler la pluie ; 
c'est à cause de cela qu'on les nomme les avocats 
des meuniers (E.)- Ce nom leur est donné en Nor- 
mandie, en Bourgogne, dans le Centre, etc. 

Quand le pivert chante, c'est signe de pluie ; il 
dit en chantant : 

Pleut 1 pleut 1 (S.-C.) 
Ou ; 

Pic, picl 

Cf. Desaivre, Myth. iocale, p. 8 (Poitou) ; Rolland (Eure-et- 
Loir, Snd-Est) ; A. Bosquet (Normandie), p. 217 ; Laisnel 
de la Salle, 1. 1, p. 224 (Berry). 

Le pivert trouve toujours Jmoyen de déboucher 



106 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

le trou qu'il a creusé dans les arbres (E.). Il va 
aiguiser son bec sur des tiges d'anis, et il perce 
ensuite mieux les arbres. On prétend que dès que 
le pivert a donné un coup de bec dans un arbre^ 
il va de l'autre côté regarder s'il est percé (P.). 

Cf. la Hupptf un conte où la huppe et le pivert font sodité. 

LA POULE D'EAU (Fulica chloropus) 
Noms patois 
Poule d'iau (P,)-, poule d'ève (d'eau) (E.). 

Devinette 

Q.ui passe sous l'ève sans s'naye? (E.) 
— Une poule d'eau. 

LE RAMIER (Columba Pàtxnaxn, L.) 

On dit au ramier : 

Tu ne pousses p'ns, 

Tonton I 

Tonton. 
Paies- tu un pot ? (E.) 

LE ROSSIGNOL (Stlvia luscinu, Latham) 
Noms patois 
Roussignol (M., P.) ; rossignolet. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 207 

Croyances et Superstitions 

II ne dort que deux heures par nuit. Si on 
mange le cœur d*un ^rossignol, on ne dort non 
plus que deux heures par nuit. Mais c'est dan- 
gereux, car si le vent vient à changer dans les 
vingt-quatre heures, on s'expose à foUier, c'est- 
à-dire à devenir fou (E.). 

Si une personne mange son cœur, elle chante 
aussi bien que lui (Saint-Brieuc-des-IfFs). 

Pendant que sa femelle couve, le rossignol 
chante pendant quarante jours. On dit qu'il ne 
sait pas que sa femelle couve, et que quand les 
petits sont édos il s'écrie : 

Ah I que j'étais béte I 

Cf. une croyance analogue dans Desaivre, Crœf.f p, 26. 

Formulettes du rossignol 
On dit au rossignol : ^ 

Rossignol, rossignol, 
Va-t'en à Rome chercher du pétrole. 

Pour mettre le feu 
Dans la ville de Saint-Brieuc (S.-C). 

Le rossignol dit : 

Tire, tire, tire. 
Tiens bon. 
Cf. une interprèution du chant dans Desaivre, p. 26. 

En m'en revenant de Broons, 

J'ai trouvé une petite bonne femme 



208 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Q.ui avait un nez si long, si long, si long, 

Qji'il lui pendait sur son menton ; 

J*ai pris mes ciseaux, et je le lui ai coupé, 

Puis je Tai jeté, 
Et il a passé un p'tit bonhomme par là 
Qui l'a pris et qui Ta ramassé. 
Et qui Ta fourré dans son pertus, tue, tue, tue, tue, tue 

[(S..C,). 
Le rossignol et son chien 

Autrefois le rossignol avait un chien qu'il 
aimait beaucoup. Un jour il l'attacha au pied 
d'un sicot (chicot de bois) pour aller se promener. 
Le chien, pendant son absence, arracha le sicot, et 
le rossignol se mit à crier : 

Kaie va I kaie va I 
Fuit, fuît, sicot, sicot 1 

D'autres racontent que le rossignol était 
chasseur, et qu'il avait quatre chiens ; il les 
attacha à un sicot, et pendant qu'il était à l'au- 
berge, ils l'écourtèrent. 

(Conté par J. M. Comiult, du Gouray). 

Le rossignol est un des oiseaux que chantent le 
plus volontiers les chansons populaires. 

LE ROUGE-GORGE (Stlvu rubecuia, Latham) 

Noms patois 
Rutasse ou érutasse (S.-D., Tréveneuc) ; routasUy 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 209 

fera. (P.); daudrette, fém. (M.); daudetU, fém. 
(Jugon) ; houîou, fém. (vers Bécherel); hourîoUy 
masc. (M.); gorge-rouge (M.). 

Croyances, — Langage. — Légendes 

Si les rouges-gorges chantent de bon matin dans 
les arbres, c'est signe de beau temps, ef ils aver- 
tissent l'homme du danger, s'il veut bien écouter 
leurs chansons (E.). 

Quand il couche dans son lit, avant de s'en- 
dormir il dit : 

Pisse pour aller te coucher. 
Vite, vite. 

Puis, si on l'a entendu, il dit : 
duitte, quitte (P.). 

Les gorge-rouge disent des préfaces en latin ; 
ce sont eux qui ont été chercher le feu. 

On dit qu'ils parlent latin. Ils disent : 

Cusse, eusse, eusse, eusse : 
Istine spiritum sanctum tuum, 
Il y a dix bons dieux (S.-C). 

[j On dit aussi qu'ils répètent : 
Glorieux d' chouan 1 
Glorieux d'chouan 1 ^ 

Q}iand le gorge -rouge alla chercher le feu, ses 
plumes furent toutes brûlées ; alors les oiseaux en 
eurent pitié, et ils résolurent de lui donner 

II 14 



210 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

chacun une plume pour le rhabiller. Seul le chat- 
huant, oiseau orgueilleux et peu compatissant, 
refusa. C'est pour cela que, lorsqu'il se montre 
au jour, tous les petits oiseaux crient après lui^ 
et le rouge-gorge en particulier qui, par son cri, 
lui reproche son orgueil (E.). Vers Bécherel, on 
dit que le rouge-gorge alla chercher un tison dans 
l'enfer. 

Cf. dans Luzel, quatrième rapport, p. 203,^ une l^ende bre* 
tonne analogue ; elle existe aussi en Normandie (cf. A. Bosquet, 
p. 22o) ; mais le rôle du ronge-gorge est attribué au roitelet. 

La boulou et la fauvette chantent pitié auprès 
des corps morts, et l'on dit qu'elles se tiennent 
auprès jusqu'à ce qu'ils aient été ensevelis (vers 
Bécherel). 

Cf. dans Rolland une légende irlandaise analogue, t. II, p. 264^ 

Le rouge-gorge est rarement déniché. 

LA TOURTERELLE (Columba turtur, L.) 

Noms patois 
TeurU (M.) ; tourte (P.). 

Croyances et Légendes 

On dit qu'elle bâtit l'arche de Noé. 
Rien qu'à regarder son nid, on la fait l'aban-^ 
donner. 



DB LA HAUTE-BRETAGNE 211 

Elle répète toujours la même chose : 

Toure 1 toare I 
Ou: 

Troue, troue, ouel 

La tourterelle revient en Bretagne au moment 
de la récolte des foins, vers la Saint-Jean. 

Au temps jadis, quand elle arriva, elle prit le 
coucou à son service pour ramasser son foin. Au 
moment de passer une barrière, le coucou resta 
embourbé avec sa charretée. La tourterelle se mit 
à crier sur lui en criant : 

Troue I troue I oue I 

Le coucou fit de si grands efforts qu'il faillit se 
casser les ailes. C'est depuis ce temps que quand 
il chante il a les ailes élargies, tandis que les 
autres oiseaux les ont resserrées. Maintenant, dès 
que le coucou entend la tourterelle, il s'enfuit tant 
qu'il peut. 

(Conté par J. M. Gimault, du Gouny). 

LE TROGLODYTE (TaoctODriBS ivrcpjbus, Vieillot) 

Noms patois 

Berruchd (M.) ; berruchot (E.) ; berrichet (S.-C.) ; 
héré (Ploubalay); birie, fém. (Tréveneuc, P.); 
mussoi (£.), ainsi nommé parce qu'il cache soi- 
gneusement son nid. 



212 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

N. 

Langage 

Le berruchet chante en dansant sur les branches : 

C*est-i* solide ici ? 
Chez nous il n'est pas plus gros 
Que ma cuisse, cuisse, cuisse (S.-C). 

Il y a dans mon pays des fagots 

Qjii sont gros 
Comme ma cuisse, cuisse, cuisse (E.). 

Cf. dans Desaivre, Croy., p. 17, un dialogue similaire entre 
le roi^-breteau et le moineau. 

Un gros fût de persoué (pressoir) 
Gros comme ma kaisse fendue en trois. 
Ça craquille (bis). 

C'est-à-dire : cela va peut-être casser sous moi. 

Sez mon père il fait biau; 

Iz ont des fagots 
Qjai sont gros comme ma kaisse 
Fendue en quatre quartiers, 

Kerli ki cui (P.). 

Le bois n*est pas gros dans c'pays-ci ; 
F n'est pas pus gros qu* ma petite cuisse. 

Cuisse, cuisse, 

Fendue en quat', 

Qjiat*, quat*. 

Qjiand j'étais chez mon père. 
J'avais des morceaux d'iard 
Qji'étaient gros comme ma cuisse, 
Cuisse, cuisse, cuisse (P.). 



■^^3B3in«MHHaa*9aaaBB«a^HiHi 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 213 

Cest dans mon paie (pays) 

dui' y a de biau bouée 

Fendu en quat* quartiers 

Et gros, gros comme des kesses (P.). 

Le roitelet se met sur la grosse poutre d'un 
pressoir et dit : 

Ne te casse pas I 
Me port*ra-tu ben ? 

En Basse-Bretagne et dans le Forez, le roitelet fait un chant 
analogne (Rolland, p. 395). Cette facétie dn roitelet a peot-ètr« 
son origine dans nne redevance féodale où l'on apportait an 
seigneur une bûche de Koël d^ns une charrette k laquelle était 
attaché un roitelet lié avec un gros c&ble (cf. Desaivre, Myth. 
loeaUf p. 6, et Rolland, p. 297 ; Laisnel de la Salle, t. Il, 
P- 249). 

Voici une autre explication qui m'a été fournie 
par mon ami, M. Eugène Rolland, l'auteur de la 
Faune populaire: « Tous les jours, m'écrit-il, je 
vois le roitelet troglodjrte, posé sur un fagot ou 
sur une branche, se hausser et se baisser alterna- 
tivement sur SCS pattes, ayant l'air d'essayer si la 
branche est assez solide pour le porter, lui tout 
petit ! Le roitelet troglodyte seul a cette spécialité. » 

Chez mon père i' y a des gloses (morceaux de bois) 
Fendues en quat'e, quat'e, quatre (P.). 

Dans mon pays. 
Les vire de pressoué 
Sont gros comme ma cuisse 
Fendue en quat'e, quat'e, quat'e. 
Fendue en quat*e (P.). 



214 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Croyances et Légendes 

On dît qu'il ne faut pas faire de mal aux 
berruchets, parce que ce sont eux qui ont apporté 
le feu sur la terre (S.-C). Le gorge-rouge alla 
chercher le feu du ciel, et le berruchet Talluma 
(E.). 

La même croyance existe en Poîtoa (cf. Desaivre, Mytb., p. 6); 
en Normandie (cf. Rolland, p. 295). 

Dans les environs de Dol, on croit que le 
dénicheur de berruchets reste estropié des doigts 
qui ont perforé le nid et enlevé les œufs ou les 
petits. J'étais dans mon enfance un intrépide 
dénicheur ; mais cette croyance m'a toujours fait 
respecter les nids des berruchets. 

(G)minuniqaé par M. B. Robidou.) 

A Saint-Donan, on prétend que si les enfants 
touchent les petites hérées dans leur nid, ils attra- 
pent le feu Saint-Laurent : ce sont des boutons 
qui couvrent la figure, les jambes, etc. (P., S.-D). 

Si on met la main dans la fiente de bérée, on 
attrape des panaris (P.). 

Les bérées mangent des araignées ; quand elles 
fientent ensuite sur des bros d'épines, si on se 
pique avec ces épines, on reste estropié (P.). 

Quand le béré alla chercher le feu, il demanda 
une plume de l'aile de chaque oiseau ; ils la lui 
donnèrent tous, sauf le chat-huant qui dit : « Mes 



pliimes sont trop belles pour £tre brûlées, » C'est 
pour cela que les autres obeaus, et surtout la pie, 
sont toujours après lui (P.). 

Lorsque J&us-Christ était sur la terre, il 
assembla tous les oiseaux et leur dit que celui 
qui aurait volé le plus haut aurait été leur roi. 
C'est l'aigle qui s'cleva â la plus grande hauteur. 
Mais la petite bérée s'était mise sur sa tSte, et 
quand l'aigle fut à bout d'haleine, elle s'éleva en 
l'air bien plus haut que lui. 

(Coati pir J. M. Conuuli. da Gouny.) 



CHAPITRE V 



LES REPTILES 



S I. — GÉNÉRALITÉS 




ES paysans gallots ont horreur et crainte 
des reptiles de toute sorte, même de ceux 
qui, comme Torvet et la couleuvre, sont 
inofFensifs. Dès qu'ils les voient, ils les tuent. Il 
n'y a guère que'.le lézard qui trouve grâce devant 
eux. Ils les désignent sous le nom générique 
de serpent, et plus généralement de i/lin ou 
v'nin. 

J'ai mis avec les reptiles tous les animaux à 
sang froid. Cette propriété est bien connue des 
paysans qui,î'pour exprimer que quelqu'un a très- 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS llj 

froid, disent en proverbe : « fret comme un 
v'iin, » ou : « fret comme un p'tit v'iin. » 

On dit d'un couteau qui a le tranchant bien 
affilé : « F coupe comme un v*lin » (E.), ou : 
« Mo coutiau coupe comme un v*lin » (S.-D.). 

Croyances relatives aux reptiles en général 

L*aspic a un A marqué sur la tête, la vipère a 
un V, la couleuvre un C (P.). 

On assure que les reptiles tettent les vaches ; si 
on ne peut tuer le serpent qui les tette, elles 
dépérissent. 

Cf. Soachi, Croy., p. a8 ; Rolland, t. III, p. 29; Légier (So> 
logne), p. 20$. 

Les arbres meurent. quand ils ont été piqués 
par un i/îin (JE.). 

Le sureau chasse les serpents (E.). 

Les œufs des coqs passent pour donner 
naissance à des serpents quand ils éclosent sur 
du fumier. 

Cf. Rolland, t. II, p. 41-42. 

A la mi-août, les couleuvres et les vipères 
s'assemblent à de certains endroits, et Tune 
d'elles apporte une petite pierre. Si on peut la 
trouver, on est toujours chanceux (E.). 

Une superstition analogue existe en Sologne; seulement 
l'assemblée des serpents a lieu le 13 mai (cf. Légier, Mém. de 
l'Acad. celtique^ t. II, p. 202). 



2l8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

A une certaine époque, ou quand ils ont fini 
leur vie, tous les reptiles vont à Babylone; ils 
montent dans la grande tour, qui est si haute, si 
haute qu'elle n'en finit plus, et quand la cloche 
sonne, ils retombent dans un trou. 

On raconte que naguère — les anciens l'avaient 
vu — il y avait un serpent ailé à sept tètes, qui 
était gros comme le bras d'un homme. Ils le 
virent s'envoler et lui tirèrent un coup de fusil 
sans l'atteindre. Une autre fois, quelqu'un lui 
coupa une tète ; mais elle repoussa aussitôt. 

(Recueilli i Hinon, près Moncontour, par M. Bourie.) 

Quand les serpents n'ont pas vu de monde 
pendant sept ans, ils allongent comme des pieds 
<de mare (houe) ; c'est à ce moment qu'ils vont à 
la tour (P.). 

Cf. une superstition de k Sologne analogue, Légier, p. 204, 
et une superstition berrichonne. Laisnel de la Salie, qui la 
rapporte, t. I, p. 222, £ait de curieux rapprochements. 

Si trois personnes boivent ensemble dans une 
fontaine ou dans un ruisseau, l'une boit le cra* 
paud, l'autre la grenouille, et la troisième la 
couleuvre (P.). 

Qjiand un individu a été piqué, c'est-à-dire 
mordu par un reptile, tous les ans, à pareille 
époque, il se ressent de la morsure (E.). 

Qpand on a une enflure produite par la 
morsure d'un serpent, on prend une branche de 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 219 

groseillier, et on frappe sur l'enflure avec les 
piquets (E.). 

Les enfants nés le 25 janvier, jour de la Con- 
version de saint Paul, pansent du v*îin et peuvent 
impunément manier tous les reptiles (E.). 

La peau de serpent guérit les blessures. En 188 1, 
à Dinan, des gens de la ville achetaient encore 
des morceaux de peau de serpent au directeur 
d'une ménagerie. 

Cf. dans Rolland, p. 33, des croyances analogues. 

Le v*Un (venin) et le hro (dard) des serpents 
portent bonheur à tous ceux qui les ont sur eux ; 
mais il faut qu'ils n'en sachent rien. 

Un homme avait réussi à s'emparer du v'iin et 
du bro d'une vipère, après l'avoir tuée. Le 
dimanche suivant, il alla avec un de ses amis à 
une assemblée, et pendant la route il lui glissa 
adroitement dans la « pouchette » du gilet les 
débris du reptile. Celui qui avait les dépouilles 
de la vipère joua à toutes sortes de jeux, et tou- 
jours il gagna. 

Le conscrit qui, sans le savoir, a dans la pou- 
chette de ses hannes (culottes) un bro et un v'iin 
de reptile est assuré de tirer un bon numéro, si 
le talisman se trouve dans la poche du même 
côté que la main qui puisera dans l'urne. 

(Recueilli aux environs de Moncontoar par M. Bourie.) 



220 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Quand on parle de la grosseur d*un v'Un, il 
faut bien se donner garde de montrer un de ses 
membres comme terme de comparaison : le mem- 
bre indiqué pourrait devenir semblable (comme 
peau) à l'animal dont on parle (£.). 

Une superstition analogue existe en Franche-Comté. On ne 
doit pas montrer sur soi, ni surtout toucher pour le faire voir, 
l'endroit d'un mal dont on parle, de peur de le voir paraître à 
l'endroit même (Mél.f col. 348). 

En Poitou, il ne faut pas dire que le serpent est gros comme 
la jambe, le bras, parce que le serpent entendrait et viendrait se 
mesurer au membre indiqué (Desaivre, Croy.y p. 29). 

Qpand on a sur soi un reptile, on voit les 
choses telles qu'elles sont. 

Un homme faisait passer une brouette sur une 
corde tendue, ce qui émerveillait tout le monde; 
seule une bonne femme ne s'en étonnait pas et 
voyait que la brouette passait sur un fût de 
pressoir. Elle avait dans sa poche un crapaud 
mort (E.). 

Un jour il y avait nombreuse compagnie 
autour d'une société de saltimbanques qui mon- 
traient une charrette traînée par un coq. 

Par là vint à passer une vieille qui portait un 
faix de bois sur son dos; on voulut lui faire 
admirer la merveille. 

— Ma foi, dit-elle, ce n'est pas la peine de 
m'arréter pour me faire regarder un coq qui traîne 
une paille de blé noir. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 221 

— Bonne femme, repartit un des saltim- 
banques, faites bien attention en rentrant chez 
vous à ce qui est dans votre paquet. 

En le défaisant, elle y trouva une vipère. 

(Conté en 1878 par Jean Bouchery, de Dourdain.) 

Cf. dans Rolland, t. III, p. 12, une saperstition recueillie 

ianx environs de Lon'ent, et p. 80, une historiette analogue du 

pays de la Hague (Normandie). 

Le dimanche des Rameaux, les trois coups 
frappés à la porte avec le bâton de croix font 
retomber dans les enfers Lucifer et toutes les 
bêtes venimeuses (P.). 

Voici une prière qui préserve du serpent ; 

Noter Dame et ses enfants. 
Protégez-nous des loups et du serpent. 
Et du chien qui court le vent. 

Dans les contes populaires gallots, les reptUes, 
même étrangers ou fantastiques, figurent parfois. 
La princesse Dangoberty i« série, n® xxv, a été 
métamorphosée en scorpion ; dans le même conte 
il est aussi parlé d*un serpent ailé. Dans Les 
petites CaudéeSy 2© série, n© xxiii, un serpent vert 
est un prince métamorphosé; il redevient 
homme dks que la princesse Crépuscule a con- 
senti à le prendre pour mari. 

Dans un conte inédit intitulé Louis, roi de 
France, le héros sauve la vie à un serpent qui 
assemble toutes les couleuvres pour savoir quelle 



222 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

récompense il donnera à son libérateur, et lui fait 
présent d'un gilet magique au moyen duquel il 
devient roi de France. Le héros est tué ; alors le 
serpent le change en un beau cheval normand, 
puis en poirier ; enfin il finit par le faire revenir à 
la vie. 

« Un moine de la suite de saint Samson, qui 
venait visiter saint Suliac, fut surpris de la 
pauvreté des mets des cénobites, et il trouva leur 
pain si mauvais qu'il en cacha une partie dans sa 
robe, pour ne pas le manger. Mais bientôt il fut 
pris de convulsions : c'était un serpent qui lui 
déchirait la poitrine. Saint Suliac l'exorcisa, lui 
passa son étole au cou et le fit précipiter dans la 
mer, où son trou, qui s'appelle trou de la Guivre, 
se voit sous Garot. » 

(M"> de Cerny, SaintSuliac, p. 16-17 (abrégé). 

« La drague de Sérent, sur la limite du breton 
et du français, mais dans la partie galaise du 
Morbihan, était un serpent que les seigneurs de 
Sérent tuèrent, et ils instituèrent une procession 
commémorative, où tout le monde devait laisser 
passage à la Drague. » 

(Foaquet, Légendes du MorbihaHf p. 54 (trés-abrégé). Cette 
procession rappelle celles de la Gargonille de Rouen, de la 
Tansque de Tanucon, etc. 







S IL — MONOGRAPHIES 

LA COULEUVRE (Colvbbr matrix, L.) 

Nom patois. — Proverbe 
Cdeuve (M., E., S.-D.). 

— Faignant (fainéant) comme une couleuvre 
(S.-D.). 

Créances et Superstitions 

La couleuvre est amie de Tanguilie (£.). 

Cest probablement un dicton qui fait allusion à une croyance 

que je trouve précisée par Viaud-Grandmaison cité par Rolland, 

p. 104 : « Q.uand l'été l'anguille s'envase par suite du desséche* 

ment des canaux, le maraîcher croit qu'elle mène la vie des 

' serpents et qu'elle s'accouple avec eux » (Loire-Inférienre). 

Si une couleuvre reste sept ans sans voir 
âme, c'est-à-dire sans voir un homme ou une 
femme, elle devient serpent (S.-C). 

Cette croyance, dont je ne connais pas de similaire en France» 
eiiste en Sicile (cf. Cattelli, Creden^t ed usipopolari sicilimnif p. 9. 
IVderme, 1878). 

La couleuvre tette les vaches, et sa morsure 



224 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

passe pour être aussi dangereuse que celle de la 
vipère (P.). 

Si un homme ou un animal boit dans une 
fontaine où une couleuvre s'est désaltérée, il 
devient malade ; pour le guérir, on lui fait avaler 
du beurre fondu (P.). 

Il y avait une fois un cheminiau (un ouvrier ter- 
rassier) qui logeait chez une vieille bonne femme 
qui passait pour être sorcière. Un jour il lui 
apporta une couleuvre qu'il avait tuée. La vieille 
la prit, la mit à cuire et l'arrangea propre à être 
mangée. Le matin, quand la bonne femme se fut 
absentée, il en mangea un petit bout. Il sortit ; 
mais il fut bien surpris d'entendre le langage des oi- 
seaux. Il s'en retourna dire cela à la bonne femme, 
qui s'avisa qu'il avait mangé de sa couleuvre ; elle 
lui souôia dans la bouche, et depuis ce moment 
il n'entendit plus le langage des oiseaux. . 

(Conté par J. M. Comault, du Gouray, 1881.) 

Si on a sur soi un hro (langue) de couleuvre, 
on est sûr d'avoir de la chance (S.-D.). 

Il faut ramasser le piquet sans tuer la couleuvre, 
l'envelopper dans un drap, le mettre dans sa 
poche, et si on joue, on a de la chance (P.). 

Pour confondre les charlatans, il faut prendre 
le piquet d'une couleuvre, sans lui faire de mal, 
et le mettre dans la poche d'un ami, sans qu'il 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 225 

s'en aperçoive ; on le coud entre la doublure et 
Tétoffe (P.). 

La peau de couleuvre appliquée sur une bles- 
sure amène une prompte guérison (E.). 

La couleuvre dans Us contes 

La Couleuvre, ire série, n^ xxiv, est une fée 
•qui a pris cette forme. 

Dans un conte inédit de ma collection,, une 
<:ouleuvre vient à bord d'un navire ; elle donne 
des conseils au capitaine, et un jour que le vais- 
seau était attaqué par des sauvages, elle leur jette 
5on venin, et ils en meurent tous. Un autre récit 
inédit parle d'une fée métamorphosée en cou- 
leuvre, qui est tuée par un bûcheron au moment 
où elle allait piquer un homme qui dormait. 

D'après un autre conte inédit que j'ai recueilli 
aux environs de Moncontour, une Margot la Fée 
a une fille qui, à un certain jour de l'année, est 
condamnée à passer toute la journée sous la 
forme d'une couleuvre. Sa mère va trouver un 
paysan et lui dit de se placer i un endroit qu'elle 
•désigne, et de tenir d'un soleil à l'autre la cou- 
leuvre cachée sous son bassin ; il le fait, et au 
5oir, à la place du reptile, il voit une belle prin- 
cesse. 



II 15 



226 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE CRAPAUD (Bufo, Laurenti) 
Noms patois 

Crapé, crapiau (M., E.); crapaô, pi. crapaouXy 
crapaoû, crapiaoux (S.-D.); grape^ fém. (P.). 

Labourer, c'est, en certains pays, soulever les 
crapiaux. Dire de quelqu'un qu'il soulève les cra- 
piaiiXy c'est dire qu'il est laboureur (S.-D.)- 

Proverhes et Dictons 

— r bouze des barbes comme un crapaud qui 
va aux frases (fraises) (E.). 

— Sauter comme un crapaud d'Uzé (M.). 

— Les crapauds de Pless'la. 

Ce sobriquet vient de ce que les gens de 
Plessala s'appellent entre eux « crapaud », comme 
d'autres diraient : « mon gars » ou « mon ami ». 

— r n'est pas si mal à tuer qu'un crapaud : 
cinq jours après qu'il a sa tête coupée, n'on li 
voit les yeux comme à un luzard (M.). 

Croyais et Superstitions 

Les crapauds passent pour annoncer la pluie ; on 
leur dit alors : 

Saute, crapaud; 
Nous aurons dTeau (M.). 
Cf. Rolland, p. 49. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 227 



Ils chantent : 

Clouk I clouk I 
pour l'annoncer (P.). 

Ainsi que tous les animaux à sang froid, le 
crapaud est un objet d'horreur et de crainte. 
Vers Bécherel, on prétend qu'il est mortel pour 
l'homme. A Plévenon, on raconte qu'une femme 
ayant baratté du lait dans lequel se trouvait un 
crapaud, tous ceux qui en mangèrent moururent. 

De même que la couleuvre, il passe pour téter 
les vaches (P.). 

Aussi, quand un paysan en voit un, il se hâte 
de le tuer. D'après le Bulletin de la Société protec- 
trice des animauXy V, 258, cité par Rolland, « en 
Ille-et- Vilaine, lorsqu'on rencontre un crapaud, 
on l'exécute de la manière suivante : on le place 
sur l'extrémité d'une planche, et le patient est 
ainsi lancé à une grande hauteur. Comme il a la 
vie très-dure, il n'est pas mort du premier coup ; 
on recommence deux ou trois fois, puis ou le 
perce d*un bois bien pointu, et, ainsi empalé, on 
l'expose au soleil pour terminer sa malheureuse 
existence. » Je me suis assuré que cette exécution 
avait lieu fréquemment. 

La même coutume cruelle existe dans le Finistère, le Centre^ 
la Loire, etc. (cf. Rolland, p. 50; Desaivre, Croy.^ p. 28). 

Voici un jeu qui porte le nom du crapaud et 
qui avait lieu naguère : 



228 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Quand la tâche, siuxfilouds, était finie de bonne 
heure, on demandait aux nouveaux venus : 

— Sais-tu comment on mène le crapaud à son 
pertus (trou) ? 

— Non. 

— Monte sur mon dos. 

Quand le garçon était monté sur le dos de 
celui qui devait lui enseigner le jeu, celui-ci se 
mettait à quatre pattes et disait i l'autre de 
tâcher d'allonger aussi ses mains et d'appuyer 
sur la terre pour le soulager. Un troisième garçon 
avait embrené un bâton et le passait entre les 
jambes de celui qui faisait le crapaud. Le naïf 
qui était sur son dos n'apercevait pas le bâton 
embrené; il mettait la main dessus, et les 
autres se moquaient de lui en se bouchant le 
nez. 

(Conté par J. Legendre, de Samt-Brieuc-des-IflFs.) 

Si on coupe un crapaud avec une faucille, le 
tranchant de l'instrument sera en meilleur étaî 
pendant toute la moisson (E.). 

Quand on voit un crapaud, il faut le tuer; 
sinon, à quelque distance que soit enterrée la per- 
sonne qui l'a vu, il va sur sa tombe jeter du venin 

(P.). 

Si on blesse un crapaud sans l'achever, oa dit : 
— Vas bédé là (fait une sottise), mo vieux, forée 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 229 

ééu Vkhuer bien, pasce qu'i* vienrc^ coucher o té d'ser 
(S.-D.). 

Ea B4<se<BrtttagM (cf, GakrU hnt.^ t, III, p. iji)» ci on 
blesse «m ciapaud sani {'««bever, on 4 U fièvre, et l'on ne peut 
s'en dèbsmsser que si on k tue. 

Mais sa vengeance n*est pas toujours aussi 
anodine ; aussi dit-on qu'il faut bien se garder de 
ne pas le tuer tout à fait. La même croyance 
existe dans la Loire-Inférieure (cf. ^fél., col. $55). 

Le crapaud qui a été mart3rrisé se traîne jus- 
qu'à la maison de celui qui Ta blessé, et il 
Tétouffe dans son lit (P.). 

Un homme avait coupé les deux cuisses d'un 
crapaud. Trois ans après, comme il dormait sous 
un chêne, le même crapaud vint lui monter sur 
les jambes. Les compagnons du dormeur riaient 
comme des fous; mais quand le crapaud fut 
arrivé aux reins, il s'écria, et Thomme mourut 
(S.-C). 

Un faucheur avait par mégarde coupé avec sa 
faux la patte de derrière d'un crapaud. Le lende- 
main matin, il trouva auprès de sa maison le 
crapaud, qui était venu de la prairie, assez éloignée, 
pour se venger, mais n'avait pu entrer. 

Un homme était couché dans une fonère^ pour 
dormir. Ses camarades, qui étaient éveillés, vi-i> 
rent un crapaud monter sur lui. Quand il fut 
arrivé à l'endroit du cœur, il s'écria trois fois, se 



230 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

dressa sur ses pattes de derrière, et Phomme ne 
se réveilla plus : il était mort. 

Cette histoire se trouve en d'autres pa3rs, et on la raconte 
un peu différemment à Saint-Brieuc-des-I£Es. On dit que l'homme 
avait fait exprès de couper la patte au crapaud en étaupinant sa 
prairie, et qu'au moment de la faucherie le crapaud vint pour se 
venger. Sur les vengeances du crapaud, cf. Gubematis, t. II, 
p. 401. 

Où il y a de gros potirons (champignons), 
il y a de gros crapauds (E.). 

Cependant on paraît lui accorder quelque uti- 
lité : il passe pour prendre le mauvais air (S.-C.)» 
ou ramasser le v'iin de la terre (P.). 

Cf. A Luchet, Souvenirs de Jersey ^ p. i$o. On trouve la même 
croyance dans le Loiret, le Poitou, etc. (cf. Rolland, p. $1, et 
Souche, Croy.^ p. 28). 

Dans un de mes contes intitulé ; Lr roi des 
Crapauds, le crapaud, auquel la grenouille re- 
proche sa laideur, lui répond : 

— Si je suis laid, je ramasse le venin de la 
terre, et je purifie l'eau qui te nourrit. 

Si on applique un crapaud vivant sur un cancer, 
il le suce, et l'homme qui Ta est guéri (E.). 

Cf. une croyance analogue dans Rolland (Charente), p. 82. 

Si l'on veut qu'une personne s'endorme, il 
faut mettre un crapaud mort à sécher aux rayons 
du soleil, prendre un de ses os, le moudre et en 
introduire la poudre dans une tabatière; ceux qui 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 23I 

■priseront resteront vingt-quatre heures sans se 
réveiller (P.). 

Jji crapaud dans les contes 

Il est question de crapauds dans plusieurs de 
mes contes : Ix Crapaud à bord (Contes des marinsy 
no II) est une princesse métamorphosée en 
•crapaud, et qui cesse de le devenir en passant la 
patte dans un anneau magique. Le roi des Cra- 
pauds et la reine des Grenouilles (2e série, n© xxx) 
n'a rien de commun avec une légende recueillie 
dans rille-et-Vilaine par M. Orain et reproduite 
par Rolland, p. 56etsqq., sous le titre du Crapaud 
qui se marie. 

Voici deux autres contes où le crapaud a une 
apiparence diabolique : 

Le crapaud qui parle 

Il y avait une fois deux garçons qui allaient 
voir une fille ; un soir ils rencontrèrent sur leur 
route un gros crapaud qui sautait à côté d'eux, et 
qui ne se sauvait pas à leur approche. Us se 
mirent à jurer; mais plus ils juraient, plus il 
sautait. 

— Où allez- vous, malheureux? leur dit le cra- 
paud. 

— Voir les filles. 

— Vous allez voir une fille qui est damnée ; 



232 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

die a eu trois enfants qu'elle a tués à leur nais- 
sance. 

Les garçons continuèrent leur route et allèrent, 
chez la fille: mais ils entendirent sous terre un 
bruit de tambours et de violons qui faisait 
trembler la maison ; alors ils eurent peur et par- 
tirent à s'en retourner. Ils trouvèrent encore le 
crapaud qui leur dit : 

— Eh bien I retournerez-vous encore chez cette 
fille damnée? 

H disparut, et le lendemain un des garçons alla 
raconter au recteur ce qu'il avait vu ; 

— Le crapaud, c'est le diable, répondit le 
prêtre ; si vous retournez encore, il percera la. 
terre et vous emportera (S.-C). 

La fille maudite 

Il était une fois une petite fille qui avait été 
maudite par ses parents. Tous les jours, quand 
elle allait aux champs, un gros crapaud s'attirait 
de dessous terre et la suivait partout. Elle avait 
beau lui jeter des pierres et tâcher de l'effrayer; il 
ne se dérangeait point, et il la suivait aux champs 
comme son ombre. 

Elle alla à confesse et raconta au recteur que 
tous les jours elle voyait un gros crapaud qu'elle 
ne pouvait chasser. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 235 

— N'avez-vous point été maudite? demanda 
le prêtre. 

— Si, monsieur le recteur. 

— Eh bien! venez demain à dix heures au 
presbytère. 

Le lendemain, elle arriva à l'heure dite. Le 
[»iètre prit son étole et un vase d'eau bénite, et 
dit à la petite fille de sortir dans le jardin. Dès 
qu'elle y fut, le gros crapaud se mit à la suivre 
en sautillant ; mais le recteur passa son étole au 
cou du crapaud et lui jeta de l'eau bénite. Le 
crapaud disparut, et on ne le revit plus. 

(Gjnté en 1880 par François Marquer, de Saint-Gist, monssey 
flgë de quatorze ans.) 

Dans nn autre conte identique k celui-ci comme trame et 
comme dénoûment, le crapaud suit, non une petite fiUe qui a 
été maudite par ses parents, mais une fille mère qui s*est 
délMrrassée de ses neuf enjànts en les tuant. 

Cf. dans Luzel, Ug. chrèi.y t. II, p. 179, une l^;ende où le 
crapaud poiu'suit un fils ingrat. 

Dans un conte inédit de ma collection, il est 
parlé d'un château où tout le monde est malade,, 
parce qu'il y a un crapaud sous im lit. Le héros 
du conte, Petits-Yeux, tue un coq et répand son 
sang auprès du lit, et le crapaud s'éloigne en 
sautillant. J'ai pu constater l'horreur que k 
présence d'un de ces animaux sous un lit inspirait 
â des marins. 



234 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA GRENOUILLE (Rama, L.) 

Noms patois 

Guernoutîle (E., M); le têtard se nomme téeta; 
batouè, à cause de sa forme, qui rappelle celle du 
battoir (S.-D.); palette (Plaine-Haute, Saint- 
Brieuc) ; petite loge (P.) ; chboché (D.) ; les œufs 
de grenouille, couvin d* grenouille (S.-D.) ; couvan 

(E.)- 

Interprétations du langage des grenouilles 

Un homme passait sur la chaussée d'un étang ; 

il entendit les grenouilles l'appeler par son nom 

et lui dire : 

Malard, 

D'où t'en viens-tu si tard ? 

— D'où j'ai affaire, bougresse ! répondit-il. 
Et les grenouilles de répéter très-vite : 

Affaire, affaire, affaire, etc. (E.). 

J'ai perdu mon rosaire : 
Qjii qui l'a trouvé ? 
— Ce n'est pas ma, 

— Ni ma, ni ma, ni ma, etc. (Saint-Brieuc-des-Ifis). 

Le roi est kué ; qui qui l'a kué (tué) ? 

— Ce n'est pas ma. 

— Ni ma, ni ma, ni ma (très-vite). 

— 'Qjii qui f ra la cuisine ? 

— O ne s'ra pas ma. 

— Ni ma (plusieurs fois et très-vite). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 235 



— Q.ui est-ce qui ira es noces ? 

— Ce sera ma (plusieurs fois et très-vite). 

— Qui lavera Tz écuelles ? 

— Ce n'sera pas ma. 

— Ni ma, etc. (ut supra). 

— Qiii a cassé la baratte ? 

— Ce n*est pas ma. 

— Ni ma, ni ma, ni ma, etc. (très- vite). 

(iuand elles sont toutes ensemble, il y en a 
une qui demande : 

Qui qu*a cassé la ribotte? (bis) 

Elles répondent toutes ensemble : 
Ni mé, ni mé (moi). 

Les bourgeoises disent aux cuisinières : 

Pèle les oeufe (bis), 
Tu auras la coque et mé les moyeux. 

Autre langage : 

— Apperche-té, apperche-té ; 
Monte sur mon dos. 

— Tu m'écrases. 

— Mais ouab 1 mais ouah ! 

Qjiand les grenouilles parlent ce dernier lan- 
gage, on peut s'assurer qu'il fera beau temps 

(P.). 



236 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Croyances. — Superstitions. — Jeux 

Q.uand on entend chanter les grenouilles, c'est 
signe de beau temps (E.). 

Cf. Souche, Croy., p. 4 (Poitou). 

Si on entend au mois de mars les grenouilles 
chanter le soir, c'est signe de beau temps ; si elles 
chantent au midi, c'est signe de pluie (S.-C). 

La grenouille dit au crapaud : « Il fera beau 
temps demain. » Le crapaud répond : « Tempête 
dans huit jours » (S.-C.)* 

Habasque, t. II, p. 45, cite un texte d'où il 
appert que dans les Côtes-du-Nord on faisait par- 
fois battre l'eau pour faire taire les grenouilles. 
Vers 1688, au jour de la Vigile de saint Jean- 
Baptiste, les propriétaires de deux maisons étaient 
obligés de battre l'eau d'un ruisseau près de la 
résidence seigneuriale en disant ces paroles : 

Renouesselles, taisez-vous (trois fois). 
Monsieur dort ; laissez dormir monsieur. 

Ils étaient tenus ensuite de se transporter au 
manoir et d'y déclarer qu'ils avaient fait leur 
devoir ; que les grenouilles ne disaient plus rien^ et 
qu'elles ne faisaient plus de bruit. 

Cette servitude s'appelait le dépry des grenouilles. 

Cf. dans Rolland, p. 7a, un autre texte où il est question de 
cette servitude fiodale. 

A Ercé, il est de tradition que les anciens 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 23/ 

seignçurs du Bordage obligeaient les paysans à 
happer Teau des fossés du château pour empêcher 
les grenouilles de coasser. 

Qpand il y a besoin d'eau, les grenouilles mon- 
tent dans les chênes pour en demander, et elles 
Client : Coax 1 coax 1 (P.) 

Il y a en Haute-Bretagne un jeu qui se nomme 
écaisser (déchirer) la grenouille. Il a été décrit 
dans un conte de Paul Féval intitulé La Gre- 
nouille (Contes bretons, p. 149, 155, i$8). 

Si on peut se procurer une grenouille verte, il 
iaut la mettre dans une pannette percée de petits 
trous. Ensuite on met la pannette et la grenouille 
4ans une fourmilière. Mais comme on ne doit pas 
entendre la grenouille jeter un cri, on s'éloigne 
de ce lieu le plus tôt possible. Elle est aussitôt 
dévorée par les fourmis ; on prend tous ses os ; on 
les met dans un ruisseau. Parmi eux, il y en a un 
qui remonte le courant ; c'est celui-là qu'on doit 
ramasser; on l'écrase et on le réduit en poudre 
qu'on mêle dans du tabac à priser, et on en offre 
A la jeune fille que l'on veut enchanter. Une fois 
qu'elle a aspiré la prise, elle ne se connaît plus, 
et elle suit celui qui l'a enchantée. 

(Conté par J. M. Comault, du G^uray.) 

La grenouille dans les contes 

Plusieurs contes populaires mettent en scène 



238 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

les grenouilles, entre autres : Le roi des Crapauds 
et la reine des Grenouilles^ 2© série, n» xxx; 
L'enfant qui entend le langage des bêtes, np xxv 
(grenouille qui a avalé une hostie). Dans un 
autre conte inédit, variante de celui-ci, une gre- 
nouille a avalé Fhostie qu'une dame a vomie dans 
un étang, et pour ravoir l'hostie on ouvre la 
grenouille, qui était plus grosse que les autres. 

LE LÉZARD (Lacerta agilis) 

Noms patois. — Proverbes et Dictons 

LouisardiE.) ; veurdet (Bécherel) ; /«^(ari (Saint- 
Briac, D.) ; lée^a (S.-D.). Le lézard vert se 
nomme vert-creux. 

— Le luzard aime ben Ts hommes, mais i' 
saute à la crasse- (visage) es femmes (Saint-Briac). 

— Des yeux de luzard vif (D.). 

Superstitions et Croyances. — Conte 

Aux environs de Moncontour, le lézard vert 
est redouté à l'égal de la vipère. 

Une superstition analogue existe dans l'Yonne (cf. Rolland, 
p. is). 

Si le lézard pique les vaches au nez, elles 
crèvent (E.). 

Le lézard passe pour sucer le sein des femmes 
et les faire ainji maigrir. Une bonne de ma belle- 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 239 

mère, nommée Gabrielle Leray, de Gosné, ra- 
contait qu'étant petite et gardant les vaches, elle 
avait apprivoisé un lézard qui venait familièrement 
sur elle et entrait sous son « mouchoir de cou ». 
La petite maigrissait; on lui demanda si elle 
n'avait rien d'extraordinaire, et elle raconta qu'elle 
mettait souvent un lézard sur sa poitrine, mais 
qu'il ne lui faisait rien. Les parents dirent que 
sûrement le lézard suçait les seins à la petite fille ; 
ils le tuèrent, et aussitôt elle engraissa. 

Le lézard est l'ami de l'homme, mais non de 
la femme. Un jour une jeune fille qui gardait ses 
vaches vit un lézard vert à qui elle jeta des miettes 
de pain ; le lendemain, elle en fit autant, et le 
lézard était habitué à elle. Mais un jour qu'elle 
n'avait pas de pain, il lui sauta à la figure, et il 
allait la dévorer, quand des gens survinrent qui 
chassèrent le lézard. 

Une autre fois un homme dormait dans l'herbe, 
et il y avait un aspi* mortel (vipère) qui s'appro- 
chait pour le mordre. Un lézard, qui vit le danger, 
se mit à courir sur l'homme et lui chatouilla les 
oreilles, et le dormeur se réveilla à temps pour 
n'être pas piqué. 

(Conté en 1880 parj. Legendre, de Saint-Brîeuc-des-Iflfe.) 

En beaucoup de pays de France, le lézard passe aussi pour 
être l'ami de l'homme. La même croyance existe en diverses 
contrées d'Europe, et même en dehors (cf. Rolland, Les reptiles. 



240 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

t. III, p. II et 15; Gubernatis, Mythohjpe ^oologiqut, t. II» 
p. 409; Souche (Poitou), Cray., p. 27). 

Dans les contes populaires, le lézard se montre 
reconnaissant quand Thomme lui a rendu service 
(cf. Point du jour, 2e série, no xxxviii). 

L'ORVET (Amgvis fiugilis, L.) 

Noms patois 

Anva, anvatUy anvat, anvé (M., E.); lanvert 
(Saint-Brieuc). 

Cf. le breton anv (serpent), et dans Rolland tout une série 
4le mots patois où le radical anv entre eu composition. 

Superstitions 

A la campagne, on tue cet inofFensif petit rep- 
tile, qui passe pour dangereux; on croit qu*il est 
aveugle, d'où ce dicton : 

Si an va vayait (voyait), 
Si sourd entendait, 
Homme su' terre ne vivrait. 

Il se retrouve à peu près dans toute la France (cf. Rolland, 
^. 20-21 ; Laisnel de la Salle, t. I, p. 24$, et t. Il, p. 199). 

a Dans certains cantons, on ne croit pas que 
l'orvet soit aveugle, 'puisqu'on assure que son 
regard peut donner la mort. On dit aussi qu'il a 
deux tètes, dont Tune veille tandis que l'autre 
dort. » 

(Journal d'Agriculture d'IlU-et-Filairu, cité par Rolland.) 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 241 

LA SALAMANDRE (S^&manora maculosa, Laurenti) 

Noms patois, — Proverbes 

Sourd (E., M.); sourd-gare (Ille-et- Vilaine) ; 
gendarme (S.-D.). 

— Il est comme un sourd, i' ne démord pas 

<M.). 

— Jaune comme un sourd (S.-D.). 

— r oit (entend) dur comme un sourd (M.). 

Si anva vayait, 
Si sourd entendait. 
Homme sur terre ne vivrait. 

Cf. des dictons analogues dans Rolland, p. 20 et 78. 

Croyances et Superstitions 

Les sourds et les taupes sont les deux plus 
mauvaises bêtes de la terre (E.). 

Cette croyance, qui se retrouve dans Pline (liv. xxix, ch. 23)» 
existe aussi en Berry (cf. Laisnel de la SaUe, t. I, p. 199). 

Le sourd passe pour s'introduire dans les écuries 
pour pomper le lait des vaches (Calorguea). 

Un homme dormait dans un champ pendant 
Tété; ses compagnons aperçurent un sourd qui 
tournait autour de lui plusieurs fois de suite. 

— Regardons, dirent-ils, ce qu'il veut faire. 
Et de peur qu'il ne fît du mal à leur camarade, 

ils le couvrirent de leurs habits. 

n 16 



242 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Tout d'un coup, ils ne virent plus le sourd, et 
quand ils voulurent réveiller l'homme, il était 
mort. Ils allèrent chercher un médecin (?) qui 
leur dit que, lorsque le sourd faisait le tour de 
l'homme, c'était pour chercher l'endroit où 
piquer le cœur. 

(Conté en 1880 par Scolastique Durand, de Plévenon.) 

Une superstition analogue existe en Normandie (cf. Rolland, 
p. 80). 

Si une femme qui a ses règles se couchait et 
s'endormait au-dessus d'un endroit où une sourde- 
chaude (femelle de sourd) est sous terre, elle serait 
estropiée de quelque membre, si la sourde n'était 
pas à plus de sept pieds sous la terre. 

(Conté en 1880 par Joseph Legendre, de Saint-Brieuc-des-Iffs.) 

Il est dangereux de se coucher sous des châtai- 
gniers et surtout sous des noyers, car il y a des 
sourds entre leurs racines. 

Un homme qui s'était ainsi couché avait eu 
mal au bras ; il alla trouver un reboutous, qui lui 
dit que si le sourd avait été un pied plus près de 
la terre qu'il n'était, son bras aurait été estropié. 

Les sourds n'ont pas besoin de toucher pour 
faire du mal (E.). 

Une femme avait avalé un sourd ; elle enfla, et 
le devin qu'elle consulta lui conseilla de placer 
dans son soîier (grenier) un bassin plein de lait et 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 243 

de se mettre au-dessous d'un trou pratiqué dans le 
plancher. Dès que le sourd sentit le lait, il quitta 
la femme et sauta dans le grenier (P.). 

LA TORTUE (Testudo) 

Nom patois. — Superstition. — Contes 

Teurtue (S.-C). 

Une charrette peut passer dessus n'importe 
comment, sans Técraser (E.). 

Dans un de mes contes populaires de la Haute- 
Bretagne, La Bergère des champi, op ii, une prin- 
cesse est métamorphosée en tortue; dans la 
2e série, La vieille qui veut rajeunir y no XLi,'est 
aussi changée en tortue pour avoir insulté les 
fées. 

LA VIPÈRE (Pblias bekvSj Merrem) 

Noms patois. — Superstitions. — Contes 

Viper ey masc. aspi^ mortel (E.); espi (P.). 

Quand on a blessé une vipère et qu'elle n'est 
pas tuée, il faut mettre du lait devant elle. Elle 
siffle ; alors toutes les autres vipères accourent 
pour boire le lait, et on les tue (E.). 

Si on peut écraser la tête de la vipère qui a 



i44 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

mordu et la mettre sur la morsure, on est bientôt 
guéri (S.-C). 

La même croyance existe en beaucoup de pays (cf. Rolland, 
p. 29). 

Un aspi' était sauté au sein d'une fille et la 
tétait; elle ne savait comment lui faire lâcher 
prise. On lui conseilla de monter à cheval sur une 
jument; quand la jument pissa, l'aspic lâcha la 
fille, croyant que c'était du lait, et elle en fiit 
ainsi débarrassée (P.). 




CHAPITRE VI 



LES POISSONS 



A. — LES POISSONS DE MER 



SI. — GÉNÉRALITÉS 




IN s'est jusqu'à présent peu occupé du rôle 
que les poissons de mer jouent dans les 
superstitions et dans les contes, des for- 
mulettes qu'on leur adresse, des proverbes où ils 
sont nommés, soit comme sujet principal, soit 
comme point de comparaison. Dans la Mythologie 
écologique de M. de Gubematis, on trouve pour- 
tant quelques passages où ils figurent; mais, 
outre que leur rôle est restreint, quelques-uns 
seulement y sont indiqués, tels que le crabe. 



246 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

l'oursin, etc. M. Eugène Rolland, dans le 
tome III de sa Faune populaire de la France, a 
relevé avec beaucoup de soin les noms patois des 
différents poissons de mer, et il a fouillé avec 
une grande conscience de nombreux livres pour y 
trouver tous les dictons, les formulettes, les 
superstitions, etc. , que les pêcheurs y attachent ; 
mais comme l'exploration a été jusqu'à ce jour très- 
peu tentée, dans son livre, excellent par ailleurs, 
on voit beaucoup d'articles où figurent seuls les 
noms des poissons. 

Ils tiennent cependant leur place dans la litté- 
rature orale : outre les contes dont ils sont, sinon 
les héros, du moins des personnages épisodiques 
importants (cf. Le roi des Poissons, !*■« série, 
no XVIII ; Le Marsouin, 2e série, no xvi, etc.), des 
fables où ils sont mis en scène (cf. le présent cha- 
pitre, et dans les Contes des Marins la série inti- 
tulée Fables et petites légendes), ils partagent avec 
les autres classes d'êtres animés le privilège des 
superstitions et des erreurs d'histoire naturelle : on 
leur adresse des formulettes et des incantations. 
Le chapitre qui suit, et dont les matériaux ont 
été presque entièrement recueillis en 1880 et 188 1 
dans la commune maritime de Saint-Cast (Côtes- 
du-Nord), peut donner une idée de ce qu'on 
pourrait trouver ailleurs en poursuivant l'enquête 
plus à fond que je n'ai pu le faire. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 247 

Voici, avant de passer à la monographie de 
-chaque poisson, quelques généralités qui se 
rapportent à l'espèce en général. 

Quand on ne prend rien, on dit : « Il n'y a 
pas ici plus de poisson que dans les landes du 
Mené 1 » (Montagne des Côtes-du-Nord). 

Lorsque la ligne touche le fond, les pêcheurs 
disent : « Si on pouvait au moins ramener 
l'Antéchrist ! » 

Sur le banc de Terre-Neuve, on prétend qu'il 
faut laisser de vieilles tripes de poisson dans les 
bateaux, pour que la morue sente leur odeur 
et soit plus disposée à approcher. C'est pour la 
même raison que, sur le littoral de la Manche, 
•on prétend qu'il ne faut pas tenir les bateaux trop 
propres. 

Les œufs de squale, qu'on nomme diables à 
cause des cornes qui les terminent et de leur cou- 
leur noire, passent pour être la gamme du diable, 
c'est-à-dire l'écume de sa bouche en colère. 

Quand le pêcheur met l'amorce à son haim 
(hameçon), et qu'il jette la ligne à l'eau, le 
poisson regarde la houette (l'appât) et lui dit : 

Qui t'a mis ici, toi qui n'es pas d'ici ? 

La bouette répond : 

Celui qui m'a mis ici n'es pas loin d'ici ; 
Si tu me mords, il te mangera. 



248 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Les poissons dans Us contes 

Dans Le château suspendu dans les airs (Contes des 
Marins y n© xvm), le marin, quî possède une taba- 
tière magique, a pour beau-frère le roi des poissons^ 
qui, en interrogeant ses sujets, lui fait connaître 
où est le château suspendu dans les airs (c'est un 
vieux marsouin qui le lui dit). 

C'est le roi des poissons qui permet à ses 
sujets de retrouver au fond de la mer les clés 
que la Belle aux clés d*or y avait jetées (Contes des 
Marins y n» xm). Dans Petit-Jean (Contes des Ma-- 
rins, no xni his), le roi des poissons, au moyen 
d'un "marsouin, rapporte les clés d'or de la plus 
belle princesse du monde. 

Dans Les fées de la mer et les marins (Contes des 
Marins y n© v), une fée de la mer fait présent à 
des matelots d'un petit poisson doré qui leur 
accordera tout ce qu'ils lui demanderont en 
répétant une certaine formule. 




^?S^55^?S^i^îS^55^îSg^:^ 



s IL — MONOGRAPHIES 

L'ANATIFE (Aïiatifa uevis, L.) 
Nom patois, — Croyance 

Bemache (S.-C). 

On croit encore que les anatifes sont des œufs 
de Toiseau appelé bernache. 

Cf. Rolland, t. III, p. 222. 

L'ANÉMONE (Actinu, Brown) 

Noms patois, — Dicton 

On appelle les anémones patssards (poisseux), 
culs de cheval^ culs de jument ou "bonnets hasques, 
gamme de chien ; ces derniers sont, dit-on, Técume 
des chiens enragés. 

Qpand on mouille sur un fond où les petits 
cailloux sont parsemés d* anémones, on dit : 

Bonnet basque et eu de jument. 
Nourriture du flétan. 

Le flétan est une sorte de grosse limande 
commune à Terre-Neuve et rare dans la Manche. 



252 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

■_ _ _ - ■ - -, . ^^ ^ 

qui font chavirer les navires. On raconte la même 
chose des tw/wari^ (pieuvres), et on dit qu'il y 
en a qui pèsent plus de vingt barriques (S.-C). 

LE CAPELAN (Gadus minutus, L.) 

Nom patois, — Proverbe 

Capian (Tréveneuc). 

— Sec comme un capelan (M.). 

LE CHIEN DE MER (Carcharias claucus, Cuvier; Galeus 
CANis, Bonaparte ; Mustslus, Cuvier) 

Noms patois 

Chien toussé, chien hro (peau lisse), lice (à la 
tête plus ronde), arcasson (noir aux ouïes), haû 
(ces deux dernières espèces ont la peau presque 
lisse), rousseïette (S.-C.) ; orhiche (Cancale). 

On appelle les chiens de mer coquins, parce 
qu'ils coupent les filets et les avançons. 

La marachey qui est une sorte de haû plus 
petit qu'un requin^ et qui a quatre rangées de 
dents, a un poisson qui la conduit; sa femelle 
s'appelle /»eaM bleue. 

Proverbes. — Croyance, — Conte 

— Roudche (rêche) comme une orbiche (Can- 
cale). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 253 

— Dur comme une piau d'rousselette (S.-C). 

— Dur comme une piau dVoussette (Tréve- 
neuc). 

Les chiens font peur aux autres poissons ; quand 
•on en voit, on dit : « V'ià les maudits chiens 
<iui arrivent ; la marée est perdue : nous pouvons 
nous en aller. » 

Dans un conte de marins inédit on raconte 
qu'un jour il y eut tant de chiens bros que les 
bateaux échouèrent dessus. 

LE CLOPORTE DE MER (Oniscus) 

Nom patois, — Croyance 

Trée (truie). 

On appelle les trées rongeurs de navires ou 
noyeurs de chrétiens, et les marins, surtout les 
calfats, les maudissent. 

LE CONGRE (Comger vulga&is, Cuvier) 

Nom patois. — Proverbe. — Croyances 

Congre est toujours féminin ; le petit congre se 
nomme conguériau. A Tréveneuc, on appelle can- 
guériau une espèce d'anguille ; elle n'est pas grosse 
et ne vaut rien. Quand les pêcheurs en prennent 
sur leurs lignes, ils les laissent sur le sable sans 
les ramasser. 



254 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Avoir des yeux de congre mort. 

Le roi de la Basse (banc où Ton pêche), c'est 
la congre : elle mange tous les autres poissons. 

Le homard est Tami de la congre ; toutefois, la 
congre le mange quand il est mou. 

LA COQUILLE SAINT-JACQUES (Pectem maximus, L.) 

Noms patois 

Ricardeau (S.-C.) ; dahin (Saint- Jacut, Saint- 
Brieuc); grenelle (Saint-Brieuc). On dit aussi des 
cordilles de ricardeau (M.) ou des crodilles (S.-D.). 

Formulette. — Conte 

On dit au ricardeau : 

Ricardeau, 
Clisse donc que je te prenne 1 

Ricardeau, 

Clisse en haut. 

Que je te trouve ; 
Si tu n*y clisses pas, 
Tu seras mangé adesa (ce soir). 

Le ricardeau, qui souvent est caché sous 
l'herbier de mer, décèle en effet sa présence par 
l'eau qu'il jette en l'air en ouvrant ses valves. 

Dans un conte de marins, n© uii, le courlleu 
a)rant fourré son bec dans les valves d'un ricar- 
deau, celui-ci, malgré les supplications deroiseau, 
le tue. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 255 

LE CRABE (Cancer, L.) 

Noms patois 

Grappe (fém.); les petits crabes se nomment 
grapiîîons; l'étrille (PortunuSy Fabrîcius), grappe 
pdue (crabe poilu) ; le dormeur (cancer paguruSy 
L.), poincîos. 

Proverbe. — Conte 

— r va de travers comme une grappe. 

Le grapillon dit un jour au brigot (vignot) : 

— Brigot, toi qui n'as rien pour te retenir à 
l'ancre, comment fais-tu à soutenir la tempête ? 

— Ce que je fais ? Je ferme mon écdutille, et je 
vais au gré des flots. Quand le beau temps 
revient, je remonte, et je me promène sur le 
sable. Et toi, comment fais-tu, grapillon ? 

— Je jette tous mes grappins dehors, et je résiste 
au mauvais temps. 

— Ah I grapillon, ta maison n'est pas forte ; 
tu n'as qu'une faible coquille, et on peut t'écraser 
avec le doigt de pied. 

— Toi, brigot, tu es comme le colimaçon: tu 
portes ta maison sur ton dos, et tu ne peux aller 
loin, et à moi tout pays m'est bon, car je vais 
où je veux. 

(Conté en 1880 par Etienne Piron, de Saint- Cast, pécheur , 
âgé de cinquante-buit ans.) 



256 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA CREVETTE (Ckangon vulgaris, Fabricius) 

Noms patois. — Croyance 

Chevrette, chieuvreite (M., S.-C). 

On prétend que le bopyre parasite que Ton 
trouve incrusté sur la tête de la chevrette contient 
une petite plie ou limande, parfois une sole. 

Ce préjugé existe ailleurs qu'en Bretagne (cf. Rolland, p. 105 ; 
Desaivre, Croy., p. 29). 

La crevette grise, qu'on appelle bouc, est peu 
estimée sur la côte bretonne de la Manche. 

LA DORADE (S«arus aurata, L.) 

Croyance 

La dorade change sept fois de couleur en 
mourant (S.-C). 

LE GRONDIN (Trigla gurnardus, L.) 

Noms patois. — Formuîette. — Croyance 

Grondin pu gourneau. 

C^uand on prend un grondin, il grogne, et 
l'on dit qu'il répète : 

Ma femme est grosse I 
Ma femme est grosse 1 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 2$/ 

Ou: 

Fous-moi dehors. 
Ma femme est grosse. 

Celui qui mangerait la tête d*un grondin en 
mourrait. Ceci est une plaisanterie : il n'y a pas 
de chair sur la tête de ce poisson, qui est très- 
cartilagineuse et très-dure. 

LE HARENG (Clupea harbngus, L.) 

Proverbe 
— Sec comme un hareng, 

LE HOMARD (Astacus mmukus, Fabricius) 

Noms patois. — Croyance, — FormuletU 

Homa ; la nasse se nomme cavette, casier, 
A Tintérieur de la tête du homard se trouve 
une sainte Vierge avec deux anges. 

Homard t 
Q.ui es plus fin que le renard. 
Hâte- toi de venir dans nos casiers; 
Tu seras un de nos lottiers (tu auras ton lot)» 

L'HUÎTRE (OsTREA, L.) 

Noms patois. — FormuUtte 
Huife, hit'e, hître (S.-C). 

n 17 



258 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Quand on jette la drague pour les huîtres, on dît : 

Va au bon Dieu ; 

Prends garde de te perd'e. 

Et reviens-t'en pleine. 

Les Fées de Lâla, n» xiii, 2* série, vont manger les huîtres 
dans les parcs. 

On ne mange pas d'huîtres pendant les mois 
qui n'ont pas d'r. 

Les hanards (fausses huîtres) ont été maudits, 
car ils détruisent les huîtres. 

LE LANÇON (AïoiODTrBs tobiamus, Cnvier) 

Fortnulettes. — Conte 
On appelle îançonniers, fém. lançonnouèrCy les 
pêcheurs de lançon (S.-C). 
On dit au lançon : 

Lançon, petit lançon tout rond^ 

Fais-moi prendre du poisson ; 
Si tu ne veux pas me faire prendre du poisson. 
Je te pilerai à grands coups de bâton. 

Lançon, 
Prends ton bond ; 
Si tu ne prends pas ton bond, 
Tu auras du bâton. 

Quand on ne trouve pas de lançons, on dit : 

Lançon, petit lançon. 
Fais bondir le sable, que je te prenne ; 
Ou déserte à Compiègne. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 259 

Dans le Pêcheur de lançons (Contes des Marins, 
no LVi), une fée fait présent à un pêcheur d'un 
lançon merveilleux, grâce auquel il prenait tout 
le poisson qu'il voulait, en lui adressant quelques 
mots. 

LE MANCHE DE COUTEAU (Soleh, L.) 

Noms patois. — Formulettes 

Manço, manceau, plur. manceaux (S.-C). 

On l'emploie comme appât; le fil de fer 
recourbé au bout avec lequel on le prend se 
nomme mançôtoué. On les prend aussi en leur 
présentant auprès de leur trou une pincée de sel 
blanc. 

On dit aux manceaux : 

Manço, sers-nous à boitter (i), 
Ou si tu n*y sers pas. 

Tu seras haché 

Comme chair à pâté (S.-C). 

On donne le nom d^puron de mer à un manço 
recourbé qui ne devient pas aussi gros que le 
manço ordinaire; quand il fait du soleil, il s'attire 
sur le sable, et on le prend avec la main. 






(i) Faire de l'appât pour les poissons : on pile les manches de 
couteau, et on les jette auprès des canots pour attirer le poisson. 



260 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

On lui dit : 

Puron, sors de ton trou, 

Ou je te coupe le cou (S.-C). 

LE MAQpEREÂU (Scomber scomber, L.) 

Noms patois, — Formulettes 

Macrèy maquMau, 

En jetant les lignes dehors, on dit : 

Les ch*loupes 
Qjii sont dans la Guadeloupe ; 

Les séchards 
Qui sont dans TafFare (appât) ; 

Les maquériaux 

Qui sont dans Tiau : 
Mords du plus petit au plus gros. 

Q.uand les pêcheurs jettent leurs filets pour 
pêcher le maquereau, ils disent : 

Sainte Marie, mère des flots, 
Faites la grâce que nous prenions quelques maquereaux. 

Des petits et des gros (S.-C). 

Quand il y a beaucoup de séchards (ripons), on 

leur dit : 

Séchard, 

Pars de Taffare ; 

Maquereau, 

Reviens aussitôt, 

Et ne t'en vas d'ici que tantôt. 

On prétend que cela fait s'en aller les séchards. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 261 



Dorade, 
Prends ta rage. 

Séchard, 
Pars de TafFare. 

Maquereau, 
Viens sur Teau. 

Maquereaux, 
Prenez-vous sur le manceau. 

Le maquereau dans Vîconographie et dans les contes 

« A Saint-Briac, rornementation architerturale 
de l'église révèle une origine populaire : des 
maquereaux sont sculptés en sautoir dans les 
bénitiers, sur la paroi intérieure des murailles et 
sur les pignons des chapelles, qui portent la date 
de 1688. La pêche de ce poisson étant alors très- 
abondante, les lots fournis par chaque bateau fu- 
rent employés pour la reconstruction de Téglise. » 

(B. Robidou, Histoire et panorama d'un heaupays^^p. 234.) 
Depuis, l'église a été rebâtie ; mais une partie de ces ornements 
ont été détruits par le cleigé, qui ne comprenait plus cette tou- 
chante symbolique d'autrefois. 

Dans La Houle du VâU (Contes des Marins, 
no xi), les fées donnent à un pêcheur le pouvoir de 
pêcher des maquereaux autant qu'il voudra. 

Un autre conte de marins, no lix, met en 
scène le roi des maquereaux et le roi des brèmes, 
qui, mécontents de leurs sujets, prennent la réso- 
lution de les quitter. 



262 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

I , j 

LE MAQUEREAU BÂTARD (Caramx twlchtous, Cuvicr) 

Noftis patois 

Séchard ; même mot à Lorient (Rolland) ; ripon 
(S.-C.) ; chinchar (vers la côte bretonne) . 

Formulettes 

Quand il est pris, il fait entendre une sorte de 
plainte; on prétend qu'il dit : 

Tu me fais mal. 

Ou: 

Je chante, (Us) 
Je me plains. 

On prétend qu'il dit aussi en se plaignant : 

Je viens d'un beau pays, 
Où sont des arbres remplis de fruits ; 
Mets-moi dans Teau à y retourner ; 
Je vais aller t'en chercher, 
Et je t'en rapporterai (S.-C). 

Place, place. 
Ma fille est grosse d'un pape. 

On lui dit : 

Ripon, 
Mors sur l'hameçon, 
Ou tu auras du bâton. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 263 



LA MÉDUSE (Mbdvsà) 

Noms patois 

Pèlerine (Saint-Brieuc) ; gluant d'eau (S.-C), 
sougale. On prétend que la méduse est la crasse 
de la mer (S.-C.) ; vers Tîle de Ré, on la nomme 
gale de mer. 

La méduse passe, comme la sèche, pour donner 
mal au& yeux à ceux qui se les frottent après 
l'avoir touchée (S.-C). 

LA MORUE (MoRRHUA vulgaris, Cuvier) 

Formulette. — Croyances» — Superstitions 

Mords, morue, mords. 
Cent ans après ma mort, 
Je crierai cor : 
Mords, morue, mords. 

On récite cette formulette à tous les poissons, 
sans changer le mot morue, 

La morue a auprès des ouïes deux arêtes qui 
ressemblent à des lames courbées ; on les appelle 
05 de vérité, et les pêcheurs en tirent des présages ; 
voici comment : 

On jette en l'air l'os de vérité, sans le regarder ; 
il ne faut pas qu'avant de tomber il touche la 



264 IRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

moindre chose ; celui qui consulte Tos de vérité 
prononce en même temps ces paroles : 

« Si tu ne me dis pas si je prendrai (dix, vingt^ 
poissons, je vais te hacher avec mon couteau. » 

Si Tos de vérité tombe les deux extrémités 
recourbées vers la terre, c'est qu'il répond non ; 
si au contraire elles sont en l'air et que le milieu 
touche la terre, cela veut dire oui. 

Quand l'os de vérité répond non, on le frappe 
à coups de botte, puis on l'interroge de nouveau. 
Il y a à Terre-Neuve des marins qui conservent 
pendant plusieurs mois des os de vérité, et qui 
les interrogent souvent. 

On demande aussi aux os de vérité s'il fera 
beau ; quand la réponse est défavorable, on ne se 
tient pas pour battu, et on les rejette jusqu'à ce 
qu'ils aient dit oui. 

LA MOULE (Mttilus bdvlis, L.) 

Noms patois. — Croyance 

Mouque (S.-C.) ; corbin (S.-D.) ; béfiny moule 
d'Erquy; mouîière, lieu où les moules sont abon- 
dantes. 

On prétend que la neige les engraisse et les 
blanchit (S.-C). 



mmmmmaÊmmmmmm 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 265 

L'ORMIER ou OREILLE DE MER (Haliotis, L.) 

Noms patois. — Dictons 

Ormée, f. (S.-C); ourmier, m., ormaie^ f., or- 
meau, m. (Tréveneuc) ; ottrmt&j, f. (Saint-Brieuc). 

— Les armées ne passent point par le eu es 
chats. 

— Jamais ormée n'a passé par eu de chat 
(S.-C). 

L'OURSIN (EcHiNus, L.) 

Noms patois, — Proverbes, — Fortnulette 

Doucine (S.-C); œuf de mer, pluriel des œufs 
de mer (Tréveneuc). 

— Poilu comme un oursin. 

— Avoir le poil debout comme un oursin. 

Petit oursin, deviens gros ; 
Tu serviras à m'faire un pot. 

LE PAGEL (PA6EU.VS, Cnvier) 

Noms patois. — Formuîettes 

Pironneau, pironniau. 
On dit au pironneau : 

Pironneau, 
Saute en haut, 
Hors de Teau, 
Qjie je te tue o mon fasi' chassepot ! 



266 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Il répond : 

Je n'y sauterai pas, 
Q}iesi tu veux me donner de ton appât (S.-C). 

LA PATELLE (PiTELLà, L.) 

Noms patois. — Proverbes. — Croyance 

Béni, Vni^ hemi (S.-C); hemi, hemin (Tréve- 
neuc) ; hernie (Saint-Brieuc) (cf. le breton hrinic). 

— Se coller comme un Vni, 

— G)llé comme un b*ni sur un caillou (en 
parlant des jeunes gens et des jeunes filles). 

On emploie les bemis bouillis pour les cochons 
malades. 

LA PLIE (Platbssa wlgaris, Cuvier) 

FonnuletU 

PUe, pUe I 
Viens dans not' pêcherie ; 
Nous t'éclairerons avec de la bougie (S.-C). 

LE POISSON SAINT-PIERRE (Zbus pabbk, L.) 

Nom patois. — Contes 

Poule de mer (S.-C). 

Qjiand le bon Dieu prit la poule de mer, il lui 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 267 

marqua ses cinq doigts sur le dos, puis il la remit 
i la mer en lui disant : 

— Va, croîs et multiplie (S.-C). 

Cf. deux légendes où le rôle du bon Dieu est rempli par saint 
Pierre (Rolland, p. 161). 

Un jour le bon Dieu, qui voulait manger du 
poisson, s'embarqua dans un petit bateau pour 
aller en pêcher, et il prit une poule de mer; mais 
il ne voulut pas la manger, car il n'y en avait 
pas beaucoup dans ce temps-là, et il la trouvait 
trop belle. U la prit entre deux de ses doigts et 
la remit à Teau en lui disant : 

Fuis, Fannie, 
Crois et multiplie. 

Depuis ce temps, il y a toujours eu des poules 
de mer, et elles portent toutes aux côtes la 
marque des doigts du bon Dieu (S.-C.). 

Cf. CoHtes da Marins, n« Lvii, La Poule de mer. 

LE POULPE (OcTOPUs, Cuvier) 

Noms patois, — Croyances 

Minard (S.-C, Tréveneuc) ; terpted, plus usité 
que minard (Tréveneuc). 

Les minards sont une race maudite; on les 
injurie en les appelant mangeurs de moules, 
coquins ou enfants du diable. Parfois les pêcheurs 



268 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

s'amusent à leur crever les yeux ou à leur passer 
un bois dedans, puis ils les rejettent à la mer. 

On disait à Saint-Cast, d'un pêcheur qui 
prenait beaucoup de poisson, que sa chance tenait 
à ce qu'il avait toujours un minora dans le fond 
de son bateau. 

Forntuîettes. — Conte 

On maudit le minard, et on lui dit : 

Maudit minard, 
Tu viens toujours trop tard ; 
Viens donc dans le mois de mar'. 
On déserte dans Tdépartement dn Var ; 
Et que Dieu ^se la grâce 
De ne plus jamais te revoir (S.-C). 

Maudit minard. 
Tu arrives toujours trop tôt ou trop tard ; 
Si tu n'arrives ou ne vas pas à mon gré» 

Je te faudllonnerai. 

C'est-à-dire je te frapperai à coups de faudllon. 

On emploie le minard à faire de la hoitte (appât) ; 
s'il n'y en a pas, on prend peu de chose ; s'il y 
en a trop, ils détruisent le poisson ; alors les pé- 
cheurs les maudissent. 

Trop tôt, c'est quand en avril ils font peur aux 
maquereaux ; trop tard, quand il n'y en a pas 
pour boitter pour les congres. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 269 

Le minard dit à la margate (sèche) : 

— Comment fais-tu, toi, margate, qui as les 
filets si petits, à te tenir bon pendant les tempêtes ? 

— Je ramasse mes petits filets dans ma coque, 
et je me laisse aller; et toi, minard, comment 
fais-tu ? 

— Je mets tous mes grappins dehors, et je tiens 
bon. 

— Ah 1 minard, tu es mou comme un gant ; 
tu n*as de dur que le bec ; moi j'ai un os qui me 
conserve (S.-C.)- 

LA RAIE (RAjà, Cuvier) 

Noms patois. — Croyances 

R4y étique (raja, pastenaca, L.), ftd (grosse raie 
qui a le nez plus pointu que la raie commune) 
^S.-C.); rê (Tréveneuc). 

Sur les bancs de Terre-Neuve, on maudit la 
taie; on lui coupe le nez, et on la rejette à l'eau. 

On dit que sa figure ressemble à celle du bon 
Dieu. Dans la tête de la raie, comme dans celle du 
homard, se trouve une sainte Vierge avec deux 
anges. 

On appelle esprit de raie deux petits os qui 
sont dans sa tête; ils se trouvent aussi dans la 
morue : c'est Vesprit de morue. 



270 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE ROUÉ (Ctclopterus lampus, L.) 

Croyances. — Contes 

Le roué a un poisson qui le conduit. Quand 
on le voit battre de la queue sur Teau, c'est signe 
de vent. 

D'après un conte de marins, n» liv, le roué de 
mer est un pêcheur emmorphosé par les fées aux- 
quelles il avait désobéi. 

Dans un autre conte de marins, np lviu, le 
homard, pour se venger du roué de mer, saisit 
avec sa pince le poisson qui lui sert de guide, et 
le roué de mer, livré à lui-même, vient s'échouer 
sur les cailloux. 

LE ROUGET (Mullus barbatvs, L.) 
Croyance 

Le rouget, qu'on nomme aussi poisson royal, 
est le roi des poissons; on dit que les autres lui 
obéissent (S.-C). 

LA SARDINE (Clupba sardima, L.) 

Noms patois. — Proverbe 

Sardrine(S.'C,, Tréveneuc), serdrine. La petite 
espèce de sardine se nomme baguette (S.-C). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 27I 

— Pressés comme des sardines (M., E., Tré- 
veneuc). 

LA SÈCHE (Sepia officinalis, L.) 

Noms patois. — Proverhe. — Croyances 

MargaU(S.-C.); morgate (D., Tréveneuc, Saint- 
Suliac). Cf. le breton môrgaden. 

— Sec comme une margate. 

La margate a, dit-on, la figure d'une personne. 

Si on se frotte les yeux après avoir touché une 
méduse ou une margate, on peut devenir aveugle 
(S.-C). 

LA SOLE (SoLEA vuLGARis, Cuvier) 

Formulette 

Sole, sole, 
Mors sur l'hameçon qui est attaché à nos cordes, 
Ou nous te fions bouillir dans not' casserole (S.-C.). 

LE TALITRE (Talitrus saltator, Mont.) 

Noms patois. — Croyances 

Puce de mer, pusseau. 

On maudit les pusseaux, parce qu'ils viennent 
sucer le poisson ; on les injurie en les appelant 
« curés en retraite ». 



272 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Quand on les voit sauter sur le sable, le di- 
manche, on dit qu'il fera beau pendant huit jours. 

LE TURBOT (Rhombus maximus, Cuvier) 

Farmulette 

Mors sur nos lignes, turbot ; 
Tu ne s*ras pas un diot (sot), 
Car il y a un bon morceau d'maquereau (S.-C). 

LA VIEILLE (Labrus variegatus, L.) 

Noms patois. — Croyance 

Le mâle se nomme vraichot ou mouïard. 
La vieille a le commandement sur tous les 
poissons, petits ou gros, qui sont sur la basse. 



LE VIGNOT (Turbo littorbus, L.) 

Noms patois. — Formulette^ 

Brigoty hrigaud (S.-C.) ; farin, bergeau, fait 
^réveneuc); hernigot, higuerneau (D.). Cf. le 
breton higornen. 

On dit au brigot : 

Petit brigot. 

Tu es bien petit ; 

Mais que tu es beau 



DE LA HAUTE-BRETAGNE IJ^ 

LA VIVE (TiucHiirus vipera, Cuvicr) 

Noms patois. — Croyances. — Formulette 

Guigri (S.-C); 5Wtt (Saint-Brieuc); à Tréve- 
neuc, marte-piquant. 

Le guigri a sur le dos une arête bleue qui se 
redresse et pique. Le venin qu'elle contient est 
assez subtil pour que la piqûre en soit très- 
redoutée des pêcheurs de la Manche. Si on est 
piqué par un guigri, il faut le tuer et baigner la 
partie atteinte dans de la soupe grasse. On pisse 
aussi dessus. 

Les guigris sentent la tempête, et ils piquent 
bien plus quand souffle nord-est que lorsque 
régnent d'autres vents. 

Si on est piqué par un guigri, on souffre d'une 
marée à l'autre ; on peut rendre sa piqûre inof- 
fensive en écrasant dessus le fiel du poisson ou 
en se frottant avec ses tripes. 

Toutefois, quand la piqûre a été profonde et 
faite par un gros guigri, on prétend qu'on s'en 
ressent pendant toute sa vie. 

On maudit le guigri, et on lui dit, pour le 
chasser : 

Va-t'en, maudit guigri, 
Et ne viens pas mordre sur nos lignes ; 
Va-t'en ^ans les eaux ou dans les airs. 

Il l8 





B. — LES POISSONS D'EAU DOUCE 



i'ai peu de détails sur les poissons d'eau 
douce, bien que j'aie fait de mon mieux 
pour m'en procurer. On trouvera ci- 
après ma récolle. 

Si on veut prendre beaucoup de poisson, il faut 
étouffer des petits chats aussitôt qu'ils sont nés, 
les renfermer dans un pot, puis les hacher avec 
de la graisse, et se frotter ensuite avec quand on 
va à la pêche. Le poisson accourt aussitôt (£.)> 

L'ANGUILLE (Anguilla vtjlgaris) 

Proveries et Dictons 

— Les anguilles sont les mères des fontaines 

(S.-C). 

— Bougeant comme une anguille. II se faufile 
comme une anguille. 

Croyances 
L'anguille est la cousine germaine de la cou- 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 275 

leuvre; elle court après elle et fraie avec. Elle 
passe pour être venimeuse (E.). 

« duand Tété T anguille s'envase par suite du 
dessèchement des canaux, le maraichin croit 
qu'elle mène la vie des serpents, et qu'elle s'ac- 
couple avec eux. » 

(Loire-Inférienre, Viaud - Gmndmands, cité par Rolland, 
p. 104.) 

LE BROCHET (Esox ltcitts, L.) 

Noms patois. — Croyance 

On appelle « goule de brochet » les gens qui 
ont la bouche en avant et très-fendue. 
L'épinoche se nomme petit brochet (E.). 
Le brochet est le compère de la carpe (S.-C). 

LA CARPE (Ctpriktts ca&pio, L.) 

Proverbes, — Croyances 

— Faire des yeux de carpe frite. 

— Bâiller ou dormir comme une carpe au 
soleil. 

Si la carpe frappait, étant dans l'eau, la main 
de l'homme avec sa queue, elle pourrait le para- 
lyser (E.). 

Les carpes font mauvais ménage avec les 
tanches, et on prétend qu'elles les mangent. 



276 TRADITIONS ET SUP1 



LE DARD (Liuciicui vulguis, Cnvier} 
Criijatue 

Le jour Saint-Pierre d'Antioche (23 février), 
c'est la moulée du dard, qui monte au rebouis 
de l'eau pour aller frayer (E.), 



Nom palois, — Froatrhe 

Sangswe. 'Même nom en beaucoup de dialectes. 
— Se coller comme une sangsue. 




CHAPITRE VII 



LES INSECTES 




S I. — - GÉNIÈRALITÉS 

|E nombre des insectes que les paysans 
connaissent n'est pas très-considérable : 
en Haute-Bretagne, je ne crois pas qu'ils 
puissent en désigner plus d'une quarantaine par 
un mot patois. Pour eux les nombreuses variétés 
des coléoptères à corsage foncé se réduisent à 
trois. Les espèces de papillons sont confondues 
sous le même nom; la plupart du temps, ils 
n'indiquent même la couleur que des blancs ou 
des jaunes. Ce sont d'ailleurs ceux qui jouent 
dans la superstition populaire le rôle le plus 
important, ainsi qu'on le verra à la monographie 
du papillon. 






s II. — MONOGRAPHIES 



L'ABEILLE (Apu, L.) 




Notns patois 

[OUCHE à mié, mouche à miel (M., E.); 
aveite, monche à miéy ruche (P.) ; monche, 
monche de ruche (S.-D.). La ruche s'appelle 
cavéy couette (M.); cachot (P.); son couronne- 
ment, un caîibournet (P.) ; la nichée, une caveUe 
(M.) ; Tessaim qui en sort, jet ou jiet (P.) ; jiet 
cF manches, jiet d* ruches (S.-D.). 

On donne le nom de pillardes aux abeilles 
vagabondes (S.-D.). Quelquefois les mouches 
sont saisies d'une sorte de panique : c'est Véverdin 
(E.). 

Devinette 

Qui est fait comme un fou* (four)» qui n*est pts fou*. 
Où il y a cent mille habitants 
Qjii volent comme le vent? (E.) 

— Une ruche d'abeilles. 

Cf. Bladé, D. 80. 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 279 

Croyances et Superstitions 

Si les mouches essaiment beaucoup, c'est signe 
^ue Tannée sera bonne ; si elles ne profitent pas, 
c'est un présage de guerre ou de mauvaise année 

<E.). 

Si pn peut attraper le premier papillon blanc 
qu'on voit, on trouve un essaim dans l'année 

On met entre la pierre et la ruche un morceau 
«de cierge bénit pour empêcher les abeilles de s'en 
aller. 

Cf. Rolland, t. III, p. 267 (Vosges). 

Un morceau d'acier mis sous une ruche préserve 
les abeilles du tonnerre (P.)» 

Qpand les abeilles sont sur le point d'essaimer, 
-elles se parlent ; si on va les écouter de près, on 
■entend la mère qui dit : 

KaBj kan« kan. 
Ce bruit s'arrête un peu, puis il reprend (P.)« 

Si les abeilles essament le jour Sainte- Anne 
(26 juillet), il y a un cierge dans le milieu des 
ruches ; c'est la ruche du roi. Si elles essaiment 
un des jours consacrés â la Vierge, les railes 
{rayons) sont en croix, et c'est la ruche de la 
reine. Si on fait périr ces ruches, les autres 
périssent aussi (E., P.). Si les abeilles essaimçiit 



280 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

un jour de fête d'un grand saint, il y a un roi 
dans la ruche (P.). 

Cf. dans Rolland, p. 268, des croyances analogues. 

Après la Saint-Laurent, les abeilles n'essaiment 
plus (E.). 

Pour rassembler les essaims, on frappe sur un 
bassin, ou l'on heurte deux fers à cheval l'ua 
contre l'autre, et on dit aux mouches en chan- 
tonnant : 

Alla (i), mère, alla, mère (ou mé). 
Alla, alia, mère (P.). 
Allie, allie^ 
Alliez-vous, mes petites, en ménaïge (E.). 

En ménage, mes petites. 
Montez, mes petites, en ménage. 
En ménage, en ménage (E.). 

Sia, sia, mes mouches^ sia; 

Ne va pas par les montagnes. 

Et viens t'enfermer dans les ruches (S.-C.)- 

Ali meur I Ali meur 1 (Tréveneuc) 
O la méère I ô la méère I (S.-D.') 

Sur les formulettes de Tabeilie, cf. Rolland, t. III, p. 267 ;. 
Desalvre, Essai de mythologie locale (Poitou et Vendée), p. 4. 

En plusieurs pays, il y a un homme dont le 
métier est de partager les essaims ou de les faire 



(1) Allier ou alier est en ce pays un terme technique et veut 
4ire rallier. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 281 

rentrer; il n*a aucun vêtement pour le préserver 
des piqûres. Il envoie ceux à qui sont les mouches 
lui chercher différents objets, et c'est pendant 
leur absence que l'opération a lieu (P.). 

Certains hommes qu'on appelle des mieîîiers 
savent arrêter les mouches à miel. C'est un don 
qui se transmet de père en fils ; mais l'aîné de la 
famille peut seul le posséder. Le mieillier dit une 
oraison particulière, tient son chapeau derrière 
son épaule gauche et a l'œil fixé sur le milieu de 
l'essaim où se trouve la mère, qui ne tarde pas à 
venir se poser sur sa main (E.). 

Les sorciers, pour faire réformer les conscrits^ 
leur font piquer les testicules par des abeilles 
(lUe-et-Vilaine). 

Quand il meurt un proche parent, on met les 
ruches en deuil. Si c'est le père, la mère x)u le 
chef de la maison, le deuil est blanc ; on attache 
à la ruche un morceau du drap qui a enseveli le 
défunt, ou on coupe dans ses chemises propres un 
petit guéniîîon qu'on met sur la ruche. Sans cela, 
les abeilles s'en iraient ou périraient (E.). 

Qiiand la mort a enlevé le chef de la maison, 
presque toujours elles meurent dans l'année, ou 
elles ne profitent plus (E.). 

Si le maître des ruches est mort, les abeilles 
portent le deuil six mois et ne chantent plus. 
Qjiand le père de famille est défunt, on leur 



282 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

porte un morceau d*ua chapeau de laine lui 
ayant appartenu (P.). 

A Saint-Cast, on leur met un drap noir. 

En Basse-Bretagne (cf. Galerie hreUmne^ t. I, p. X73); en 
Picardie (cf. Mél.f col. 73) ; dans TOrae (A., col. ^^ ; Aaièlie 
Bosquet, p. 217); dans la FFsnche-Comtè (Ift,, col. 346,note]^; 
^ns les Vosges (Ib.^ col., 4$i)i dans le Poitou et dans la 
Vendée (cf. Sonché, Croy.y p. 18, et Desaivre, Mytbol, loeaUy 
p. 4), on met aussi les ruches en deuil. 

Si la personne la plus chanceuse de la maison 
vient à mourir, elle emporte avec elle la chance 
des ruches (P.). 

Les mouches à miel vendues après le décès de 
quelqu'un profitent rarement ; mais celles qui 
ont été volées réussissent (E.). 

Cf. Rolland, t. III, p. 268. 

Vendre une ruche porte malheur à celles qu'on 
ne vend pas. 

L'ARAIGNÉE (Akam^, L.) 

Noms patois, — Dicton 

Irangne, irangnée, d'où irangnery araigner (E., 
S.-D.) ; les toiles se nomment teks d*irangnes (S.- 
D.); Jî' d'irangne (E.); arantele (pays de Retz, 

Xî. g). 

Araignée du matin. 
Chagrin; 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 285 

'Araignée da midi, 

Plaisi* ; 
Araignée du soir, 
Espoir (P., S.-C). 

Se retrouve presque exactement dans les Vosges. Cf. Mil., 
col. 451, et Rolland, p. 241, pour les nombreux similaires. 

Qpand il y a des toiles d'araignée dans une 
maison, on dit qu'il y a des jeunes fiOUes à marier 
{M.)y mais s'il y en a trop, on les appelle dç$ 
chasse-galants. 

Croyances et Superstitions 

Q}iand les araignées travaillent plus que de 
coutume, c'est signe de pluie ; si elles essaient 
de s'approcher de la fenêtre, c'est signe de beau 
temps (E., P.). 

Les araignées sont d'un mauvais augure. 

Q}iand le temps change, elles disent : « Tac- 
tac, » comme un balancier d'horloge (P.). 

En filant leur toile, les araignées chantent une 
chanson; en tuant les mouches qu'elles ont 
prises, elles en disent une autre, mais je n'ai 
pu m'en procurer le texte (E.). 

Si certaines araignées de grosse espèce passent 
sur la figure d'une personne, elles lui donnent 
un cancer (P.). 

Cétait une croyance du moyen Age (cf. Deschamps dté par 
Rolland, p. 238). 



284 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

On croit à la campagne que les panaris sont 
produits par une araignée qui s'est introduite 
dans le doigt (Calorguen). 

LE BOURDON (Bombus) 
Croyance 

Le bourdon passe pour être le mâle de Ta- 
beille (E.). 

LE BOUZIER (Meloe) 

Nom patois 

Marguerite (M.); sangvinsang (S.-C); sergent 
de merde (S.-D.); diable^ fouille-merde (P.). 

Jeu et Formulettes 

Les enfants crachent sur les bouziers et leur 
disent ; 

Marguerite, Marguerite, 

Donne-moi du sang rouge. 

Et je te donnerai du sang blanc (M.). 

Sangvinsang, 
Donne-moi de ton sang rouge ; 
J'te donnerai du sang blanc (S.-C). 

Sur la limite de l'Anjou et de la Bretagne, 
on leur dit : 

Morelle, morelle, 



DE LA HAUTE-'BRETAGNE 285 

Vends-moi de ton sang rouge ; 
J'te donnerai du vin blanc. 

Cf. dans Rolland, p. 54$, des fbrmulettes similaires. 

LE CERF-VOLANT (Lucahus cbrvus) 
Noms patois 

Diable (P.); cer, fém. cer-résse (S.-D.); cerf 
volante (P.). 

Croyances. — FormuUtte 

Qpand ks cerfs-volants volent le soir en bour- 
donnant, c'est signe de changement de temps (E.). 

On a de la chance si on porte dans sa pochette 
une tUte de cer ; mais une tête de cer^ésse ne 
ferait pas le môme effet (S.-D.). 

Même sai>erstition dans le Loiret (cf. Rolland, p. 328) ; en 
Berry (cf. Laisnel de la Salle, 1. 1, p. 284), un cerf-volant mis 
au chapelet préserve des maléfices. • û 

Cerf-volant, 
Donne-moi de ton sang ; 
J'te donnerai du bran. 
Si tu ne veux pas, 
Pte donnerai des coups de bois (S.-C). 

LA CHENILLE 

Noms patois, — Croyances 

CharpelouseQA.f E.); cherpéhuse (P.); téte-naïre 
(Hénon). 



a86 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

On les tue, parce que leur rencontre est d'un 
mauvais présage (E.). En beaucoup d'endroits on 
ne croit pas que les chenilles soient les larves du 
papillon. 

LA COCCINELLE (Coccikella) 

Noms patois 

Bite à bon DieUf parvoUy pervole (E.). 

Croyances. — Formulettes 

Qjiand on tue une bête à bon Dieu, on perd 
un de ses meilleurs chevaux (P.). 

La coccinelle est la chance des champs ; plus 
elle s'envole facilement, plus les enflants sont 
sages (S.-C). 

Parvole (his^ ; 
Si tu m'aimes, que tu t'envoles (E.). 

Petit ange du bon Dieu, 

Envole-toi. 
Si le bon Dieu ne veut pas de toi, 
Tu viendras à moi (S.-C). 

Bête à bon Dieu 

Monte au ciel. 

Et m'apporte du miel ; 

Si tu vas en enfer, 

Tu m'apporteras de la bière ; 



^^^^mtmammmmmmmmi^mmt^ÊÊ^mmmm 



DE LA HAUTE-BRETAGNB 2Sj 



Si tu vas en purgatoire, 
Tu m'apporteras des poires (S.»C.). 
Cf. Souchèi Croyinus, p. i6. 

Petit ange, vole, vole. 

Si le bon Dieu m'aime, t'envoie ; 

S'il ne m'aime pas. 

Ne t'envoie pas (S.-C). 

Cf. dans Rolland, p. 350 et suiv., les formulettes de la 
coccinelle. Cf. aussi Desaivre, Form.^ p. 4, et sur la coccinelle 
en général un article de M, Mannhardt, intitulé La CoecituUe 
et Holda Freya, dans Mil., col. 441-446. 

Les criocères (crioceris), qu'on appelle petits 
violons y merciers (E.), sont souvent confondus avec 
les bêtes à bon Dieu. 

^ Si on tient longtemps un petit violon auprès 
de ses oreilles, on ne devient jamais sourd, parce 
que le petit violon prie le bon Dieu de conserver 
Touïe à celui qui Ta écoulé (E.). 

LE COUMAÇON (Hblix, L.) 

Noms patois 

Colimaçon^ lima à coque. On l'appelle aussi 
mercier y parce qu'il porte sa maison sur son dos, 
comme le mercier sa hotte. On ne distingue pas 
toujours le lima du colimaçon. 

Proverbes 
— Aller comme un Uma. 

Cf. Rolland, p. 212 (CAte-d*Or). 



288 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

A Noël les limas, 

 Pâques les grouas (E.)< 

Cest-à-dire : s*il fait chaud à Noël, à Pâques il 
y aura de la glace. 

Il vaut mieux trouver un chien enragé 
Qji'un lima en janvier (P.). 

Devinettes 

à) Qpi est-ce qui peut se promener sans 
quitter sa maison ? (S.-C.) 

h) Qui est-ce qui porte sa maison sur son 
dos ? 

— Le colimaçon. 

Q,uel est celui qui ne va pas vite à la messe ? (£.) 

— Le colimaçon; mais il est tout de même 
rendu à la Saint-Jean avec les autres. 

Superstitions, — Formvlettes 

Quand on trouve un lima qui a Toeil tourné 
du côté gauche, c'est signe que Tannée sera 
bonne ; si au contraire il est tourné du côté droit, 
c'est d'un mauvais présage (P.). 

Calimaçon (^'0, montère tes cônes ; 
Je te dirai où sont ton père et ta mère : 
r sont dans le bois de Fosses (S.-C). 

Calimaçon borgne, 
Montère tes cornes (M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 289 

Calimaçon, montère tes caûnes, ou biea ton 
père et ta mère vont v'ni' do un grand coutiau 
<i*bois pour te couper le keu (cou) (Saint-Briac). 

Lima, lima, 
Montère tes cônes ; 
Ton père et ta mère sont dans la terre jaune (D.). 

Var. : Ton père et ta mère sont dans la Basse-Corne 

(Moncontour). 

Calimaçon, attire tes cônes, 

Ou j'vas t*casser ta maison (Ploubalay). 

Les enfants prétendent que le colimaçon a peur et qu'il 
s'attire quand on lui répète ces formulettes. Cf. dans Rolland, 
p. 196 et suiv., une nombreuse série de formulettes françaises 
et étrangères dont quelques-unes sont très-voisines de celles 
Avl paysgallot; cf. aussi Desaivre, Form.f p. ;. 

Dans le conte Le Colimaçon et le Rtnard (Liit. orahf p. 237), 
le colimaçon trouve moyen d'arriver avant le renard i un but 
■déterminé. Cf. dans Rolland, p. 208, un conte similaire de la 
Côte-d'Or, et les citations à la suite. M. Souche, Proverbes, 
p. 19, l'a également recueilli en Poitou. Sur le colimaçon, 
■ voyez aussi 2« série, a? xlix, le conte du Mercier. 

LA DEMOISELLE (Libbllula) 
Noms patois 

Lavandière (S.-C.) ; monsieu, pi. monsieux (P.) ; 
d'mouë:(elle (S.-D.); lavandière d'eau (E.); cheva' 
d'cdleuve (S.-D. ; cf. le breton mardh aêr, dont 
ce nom est la traduction) ; dame, gendarme (P.)* 
La grosse espèce se nomme à Saint-Donaa 

II 19 



290 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

aiguille ou aiguille du diahle (cf. nado^ aêr, aiguille- 
serpent, Bretagne). 

Croyances et Superstitions 

On appelle les demoiselles les agents du diable, 
et Ton a peur d'être piqué par elles. Quand oa 
les voit autour des doués, on dit ; 

Prenez garde aux agents du diable 1 

Pour les chasser, on leur crie : 
Zi, zi^ zi I 

Et elles s'en vont (S.-C). 

Si on peut attraper une demoiselle, on se marie 
dans l'année (E.). 

Si les demoiselles volent en rasant l'eau, c'est 
signe d'eau pour le lendemain; si elles volent 
haut en courant après les mouches, le temps est 
au beau. 

LE DYTIQ.UE (Drriscus, L.) 

Noms patois 

Cheval d* anguille (M.) ; mère anguille, chevau du 
diahle (S.-D.) ; poule d'éaiou (Tréveneuc). 

L'ÉPHÉMÈRE (Ephemera, L.) 

Noms patois. — Pronostic 

Guthette, fém. (M.); guibet, masc. (E., P.); cf. 
le breton gwiheden, hïbe, fém. (S.-D.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE iqi 

Les guibets piquent les gens quand le temps 
est à la pluie; s'il est à l'orage, ils piquent plus 
dur; s'il est au sec, ils laissent le monde tranquille. 
Lorsqu'ils sont en troupe, s'ils volent haut, le 
temps est au sec; s'ils volent bas et près de 
terre, il fera de l'eau (P.)- 

Les hibes piquent de séer ; forons d'ia piée demain 
(S.-D.). 

LE FAUCHEUX (PHjaANGirai opilio) 
Nom patois* — Superstitions 

Faucheux (M., E., P.). 

On leur coupe les pattes et on les met dans sa 
main ; si, après avoir été détachées du tronc, elles 
remuent, c'est signe qu'on aura de la chance (E.). 

Cf. Rolland, p. 245 (Poitou) ; voir une superstition vosgienne 
dans Mil.f coL 498. 

Qiiand les faucheux montent sur l'épaule d'une 
personne, c'est signe qu'elle mourra dans peu de 
temps. On entend dire à quelqu'un qui a sur lui 
un faucheux : « Veut-i' me mener dans le 
cimetière? J'vas li casser une patte; i' périra 
avant ma » (E.). 

LA FOURMI (Foruicà) 
Noms patois. — Proverbes 
Fromty masc. (M., E., V,);frimtm (E., P.); 



292 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

fourgnon, petit barse (Plouvara); la fourmilière 
s'appelle /romt/t^r^ (M., E.); four minière (F. ^ Tré- 
veneuc). 

— r n*a pas la force d'un fromi (M.)* 

Cf. dans Rolland, p. 278, un proverbe similaire. 

— Qjiand on s'asseoit sur une fromiîièrc, on 
ne sait pas quel est \q fromi qui vous pique (E.). 

Croyances et Superstitions 

Plus la fourmi s'enfonce dans la terre, plus 
l'hiver sera rigoureux (E.). 

Si les abeilles ne veulent point sortir d'un tronc 
d'arbre, on met des fourmis dans le tronc, et elles 

sortent (P.). 

Pour faire les filles péter, on n'a qu'à prendre 
du pain de fourmi (ce sont les œufs) et à en 
mettre dans le manger ou dans la^ boisson de la 
personne à qui on veut faire cette farce. Sitôt le 
pain de fourmi avalé, la personne se met à péter 

(P.). 

Dans les contes, la fourmi joue en général un rôle secourable 
(cf. Le géant aux sept femmes, 1 '« série, n* ix ; Venfcnt qui va 
chercher des remèdes y 2« série, n* xxxiv).- 

LE FRELON (Vespa crabo, L.) 

Noms patois. — Superstitions 
Fragon (M., E.) ; fringon (P.) ; fréegon (S.-D., 



mmmmmmmmmm^m^ 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 293 

P.) ; frungon, frâlon (P.) ; frûlon, frugon (S.-D.). 
Le nid aux frelons s'appelle fragonnière (E.) ; fré- 
gonnière (P.). 

Quand le frelon mord, on dit qu'il emporte le 
morceau (E.-D.). Les paysans disent « qu'i' 
mord o la goule et i' pique o l'eu ». 

Il ne faut que sept frelons pour tuer un cheval, 
trois pour un homme. Les morsures du frelon 
sont, dit-on, mortelles (P.). 

LE GRILLON (Grillus) 

Noms patois, — Dictons 

GrésiJîon (M., E.); guer sillon (M., E., P.). 

Il a le ventre rond 
Comme un guersillon (P.). 

Le grillon d'amour est dans le foyer (D.): 
c'est une maison où il y a des amoureux. 

On appelle guer:(illon djoumeèse l'enfant qui 
aime trop le foyer (S.-D.). 

Croyances et Superstitions 

Quand on a un grésillon dans son foyer, il ne 
faut pas le tuer, car c'est la chance de la maison 

Cf. Rolland, p. 290 ; 2/é/., col. 457 (Vosges) ; A. Bosquet, 
p. 219; L. Desaivre, Croy., p. 30; Monnier, p. 669. 



294 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

On dit au grésillon : 
Guersilloii; 

Viens dans ma maison; 

Chante ta petite chanson, 

Et répands ta bénédiction (S.-C). 

Si le chant du grésillon vient à cesser, c'est 
un présage de mort ou de pertes (P.). 

Cf. Rolland, p. a^. 

Lorsqu'il meurt quelqu'un, le grillon, en signe 
de deuil, reste six mois sans chanter (P.). 

Si on met, sans les regarder, deux grésillons 
sous un chapeau, ils se battent, et il ne reste plus 
que les pattes (E.). 

LA GUÊPE (Vbspa vulgaris, L.) 

Noms patois. — Proverbe. — Croyance 

Gueèpe ; son nid se nomme guépinière (P.). 

— C'est une fine guêpe : une rusée. 

La guêpe hait l'homme qui lui a fait la chasse ; 
elle le reconnaît même au bout de plusieurs jours 
(E.). 



LE HANNETON (Mblolontha vulgaris) 

Noms patois 

Bruinent (M.) ; bruant (D.) ; hrundon (P.) ; 
hrunda (S.-D.); vacloe de chêne (E.); poule de 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 295 

Mne (Callac, Morbihan). Les hannetons blancs 
se nomment des monniers (meuniers) (M., E.). 
La larve du hanneton, locreux (E.) ; turc (M.). 
Brunder (P.); hrumenier (M.), désigne le bruit 
que les hannetons font avec leurs ailes. 

Proverbe, — Pronostics, — Formuîettes 

— Année de bruments, année de chiens 
enragés (S.-C). On prétend que si les chiens 
mangent des hannetons, ils enragent. 

Si les hannetons mangent les feuilles des 
chênes, il y a à craindre pour la récolte de 
Tannée suivante, parce qu'il y aura beaucoup de 
vers blancs (E.). 

Qiiand la larve ne sort point de terre. Tannée 
est mauvaise en sarrasin. 

Avant de s'envoler, les hannetons comptent 
leurs écus; ils en ont autant que de taches 
blanches sur le ventre. 

Cf. Rolland, p. 334. 

On les attache eu à eu plusieurs avec des 
moyettes (c'est un brin d'herbe pointu), pour les 
faire brunder (E., S.-D.). 

Cf. dans Rolland, p. 23 ; Souche, Prov.y des jeux similaires. 

On leur chante, pour les faire envoler : 

Brument, vole, vçle ; 
Mon grand-père Nicole 
T m'a dit qu'si tu n'allais pas à l'école, 



296 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

r fallait couper ta tête 

Avec ma grande serpette (S.-C). 

Petit chandelier doré. 

Petit paille en eu, 

Du cocu, cocu, cocu (D.). 

Sur les fonnniettes des hannetons, cf. Rolland, p> 33$ et suiv.;. 
Desaivre, Form., p. 6. 

LA MOUCHE (Musca) 

N(»ns patois 

Monche (P.); la mouche araignée se nomme 
hngousse, îangoute (E.); langourde (y&tsBéchçrél)^ 

Dictons et Proverbes 

— r bérouine (bruine) ; voilà les mouches qui: 
pissent (E.). 

— Les mouches pissent tout blanc (E.). 11 
neige. 

— Noir comme» une mouche dans un pot de 
lait (E.). 

Cf. Rolland, p. 307. 

A la Saint-Simon, 
Les mouches valent chapon (P.). 

Cf. dans Rolland, p. 30$, un dicton similaire. 

La procession de la Saint-Marc (2$ avril) a 
pour but de faire crever les langousses d'eau. 
Avant que cette procession eût été inventée» 



«1 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 297 

elles faisaient périr les chevaux et même les 
hommes; elles étaient grosses comme des têtes 
de cheval et pouvaient traîner des pierres. Depuis, 
elles sont revenues à la grosseur qu'elles ont main- 
tenant (environs de Bécherel). 

Cf. sur le Pardon des mouches d Quimper, qui a lieu le même 
jour, une note de Sauvé, ap. Rolland, p. 310. 

LA MOUCHE D*EAU (Gtoihxjs, L.) 

Noms patois. — Croyance 

Couturier (E., S.-D.). 

On prétend que ce sont les 'couturiers d'eau qui 
ont appris à coudre aux tailleurs (E.). On appelle 
aussi tailleurs les araignées d'eau. 

Les g3n*ins se nomment aussi couturières (cf. le 
bret. kemenerès). 

LE PAPILLON 

Nom patois 
Papion (E.) (assez peu employé). 

Pronostics, — Superstitions, — Formulettes 

Quand les pâtours voient les papillons, ils leur 

disent : 

Papillon jaune. 

Fais du feu et t'chauffe ; 



298 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Papillon blanc, 
Prends ta quenouille et va en champs. 

Les papillons jaunes paraissent avant les blancs. 

Cf. dans Rolland, p. 31;, un proverbe normand analogue. 

Q.uand on les voit pour la première fois, on 
leur chante : 

Papillon rouge 

Et papillon blanc, 

Voleras-tu cor ? (bis) 

Papillon rouge 

Et papillon blanc, 
Voleras-tu cor jusqu'à la Saint-Jean ? 

Voleras-tu cor {bis). 
Voleras-tu cor jusqu'à la Saint- Jean? (P.) 

Si on peut attraper le premier papillon blanc 
qu'on voit, on trouve un essaim dans Tannée 

Superstition analogue dans les Vosges (cf. Mélusim, col. 478) ; 
en Poitou (Desaivre, Croy., p. 50; Souche, Croy., p. 7). 

Noël du Fail constatait au xvi* siècle le rôle chanceux du 
papillon, t. I, p. 112 : « Qjai veult estre marié en l'an prenne 
le premier papillon qu'il verra ». 

Voir un papillon le soir, c'est signe que pro- 
chainement on aura des nouvelles. 

Q.uand on voit voltiger des papillons de nuit, 
on les tue, parce qu'on prétend qu'ils sont veni- 
meux (E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 299 

On dit aux papillons : 

Papillons, papillons. 

Allez à Bron (Broons) 

Nous chercher du son ; 
Quand vous serez arrivés chez nous. 
On vous donnera des choux. 

Si vous n'y allez pas, 
On vous écrasera à grands coups de bois (S.-C). 

La croyance que Tâme prend la forme de 
papillon est encore assez répandue à la campagne. 

Quand on voit le soir de petits papillons blancs 
voler dans la maison, cela annonce la mort de 
quelqu'un de ses habitants. Aussi quand il y en a 
beaucoup dans une maison, les gens en sont tout 
chagrins. Us pensent que ce sont des âmes de 
revenants qui viennent chercher quelqu'un pour 
l'emmener avec elles (P.). 

En Poitoa, cf. Souche, p. 15, un papillon passe aussi pour 
être l'âme d'un mort qui visite. Les Grecs appelaient le papillon 
Wv^ TfeTOyJyhy *me volante. Cf. A. Pictet, Orig. indo- 
européennes^ t. I, 661 : le papillon. 

Le conte qui suit est relatif à cette croyance. 

Le papillon et le pauvre 

Il y avait une fois un pauvre qui désirait, à ce 
qu'il disait, voir mourir quelqu'un, pour savoir 
comment on mourait. Un jour il arriva à une 
maison où un homme était sur le point de tré- 



3CX) TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

passer. Il y entra, et il lui sembla qu'aussitôt 
que l'homme eut rendu le dernier soupir, il sortit 
de sa bouche un papillon tout gris qui se posa 
sur la poitrine du défunt. 

Le pauvre ne le perdit pas de vue. Qpand on 
mit le mort dans le cercueil, le papillon se plaça 
sur le bout, et quand on déposa le cercueil en 
terre, il voltigea çà et là, puis il prit son vol. Le 
pauvre le suivit jusqu'à une lande où il le vit 
s'arrêter. Il dit au papillon : 

— Pourquoi es-tu venu jusqu'ici sans t'arrêter? 

— Ah I répondit le papillon, c'est que je n'ai 
trouvé que cet endroit pour me reposer, car 
depuis celui d'où je suis parti jusqu'ici, tout est 
couvert d'âmes qui sont à faire pénitence. 

— Et toi, petit papillon, dit le pauvre, en as-tu 
encore pour longtemps ? 

— Pour sept ans. 

— N'y aurait -il pas moyen d'abréger ce 
temps ? 

— Non, à moins que pendant un an tu ne 
veuilles jeûner au pain sec et à l'eau. 

— Je veux bien, dit le pauvre. 

— Eh bien 1 fais-le, et tu n'y perdras pas. 

Le pauvre s'en retourna, et pendant un an 
il jeûna au pain sec et à l'eau. L'année suivante, 
il revint sur la lande et demanda au papillon s'il 
était quitte. 



mm 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 3OI 

— Non, répondit le papillon, qui était presque 
blanc, mais encore gris, il faut que tu jeûnes 
encore une autre année pour que ma pénitence 
5oit accomplie. 

Le pauvre s*en retourna, et pendant un an il 
jeûna au pain sec et à Teau. Uannée terminée, il 
retourna sur la lande et vit le papillon qui, cette 
fois, était blanc comme la neige. 

Ce papillon blanc était Tâme du défunt que le 
pauvre avait vu mourir, et qui avait été délivrée 
grâce à lui ; mais de son côté il avait fait la péni- 
tence du pauvre, et il lui dit avant de s'envoler : 

— Je te remercie bien ; mais tu n'as pas perdu 
ton temps, car tu as une place préparée à côté de 
moi dans le ciel. 

Huit jours après, le pauvre mourut, mais, ainsi 
que le lui avait dit le papillon, il avait une place 
dans le paradis à côté de lui. 

(Conté en 188 z par Jeanne Hervé, du Gouray, ftgée de 
soixante ans.) 

Dans un autre conte qui est une variante de celui-ci, c'est un 
jeune garçon et non un mendiant qui voit le papillon s'envoler; 
il le suit et le voit s'asrèt^r à l'extrémité du champ d'ajoncs, 
parce qu'il n'y. avait pas d'autre place ponr lui. 

LE PERCE- OREILLE (Forficula auricolaris) 

Noms patois, — Croyance, — Superstition 
Cu' fourché (E.) ; cure-oreilles. 



302 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Si les perce-oreille pénétraient dans roreille 
d'une personne, ils la feraient mourir en mangeant 
sa cervelle pour sortir par Tautre oreille. 

Lorsqu'on trouve des perce-oreille dans un 
appartement, on les tue (E.). 

Cf. dans Souche, Prov.^ p. 23, une croyance poitevine ana- 
logue ; dans l'historiette qu'il raconte, le perce-oreille ayant 
mangé la cervelle d'une jeune fille était devenu énorme. 

LE POU (Pediculus CBuvioais) 

Noms patois 

P(mé, pi. pouées, berdin, loulou (terme enfaptin.) 
L'œuf de pou se nomme îende. Si on se trémousse 
parce qu*on a des poux, on dit qu'on se heîute 
(E.), qu'on se limorgne, ou qu'on les fait « chan- 
ger de pâturage » (S.-D.). 

Proverbes et Dictons 

— Il est de la race des pouèes^ qui ne hervent 
(crèvent) que quand on les tue (S.-C). 

— Gratter un pou pour en avoir la peau (M.), 
c'est-à-dire être extrêmement avare. 

Cf. Rolland, p. 2(4, proverbe similaire. 

— Faix d'pouées (S.-D.), terme injurieux. 

Croyances et Superstitions 

Quand on rêve dans les poux, c'est signe 
d'argent (S.-C): 



DE LA HAUTE-BRETAGNE $0^ 

On prétend à la campagne que les poux man- 
gent le mauvais sang. J'ai connu des fermières 
très-propres, qui peignaient régulièrement leurs 
enfants, mais avaient soin de leur laisser deux 
ou trois poux sur la tète (E.). 

Cf. Rolland, p. 255, et Desaivre, Croy.^ etc., p. 11. 

Qpand les petits enfants ne veulent pas * se 
laisser peigner, les mères leur racontent Thistoire 
d'enfants pouilleux que les poux ont traînés à la 
rivière par les cheveux pour les noyer (M., P.). 

Cf. dans Rolland, p. 2$$, deux dictons analogues (Lorient et 
Côte-d'Or) ; cf. aussi Souche, Proverbes^ p. 20 (Poitou). 

En Anjou, on croit qu'il y a des gens qui 
peuvent donner des poux par ensorcellement, 
sans qu'on puisse s'en débarrasser. Cette croyance 
existait jadis en Haute-Bretagne. 

Cf. Rolland, p. 256 (Champagne). 

D y a nombre de plaisanteries sur les poux. A 
Ercé, on appelle les résilles des cages à pouéeSy ce 
qui fait un calembour, poils et poux se pronon- 
çant presque de la même façon que poux. 

Avions cor des poue^^. — Vère, je n'en ai pas tant 
comme Van passé, mais V sont hen p'us biaux (M.). 

Dans ma Littérature orale, p. 398, j*ai raconté 
comment la ville de Collinée fut pavée avec des 
poux ramassés dans une commune voisine. 



304 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA PUCE (POLBX I&RITÀNS, L.) 

Proverbes et Dictons 

— Il n*y passerait pas une puce à genoux (M.). 

— Donner son cœur au bon Dieu et son eu es 
puces (E.) (aller se coucher). 

Cf. Rolland, p. 261. 

— r n'vaut pas les quat'e fers d'une puce. 

— Fort comme une puce. 

Cf. Rolland, p. 2 $8. 

— Garder une vannée de puces au soleil (M.) ; 
faire un ouvrage difficile. 

Cf. Rolland, p. 260 (pays basque, Corse). 

Croyances, -^ Conte 

Si on rêve de puces, c'est signe de dispute (S.-C). 

C2^and elles piquent dur, cela annonce la 
pluie. 

Lorsqu'on est piqué par les puces, on les 
maudit, et on dit : 

Va-t'en à la bonne sœur qui t'a inventée 1 

On raconte qu'une bonne sœur, qui n'avait 
rien à faire, inventa les puces pour se distraire 
<S.-C.). 

Dans Le grand Coquelicu (Contes des Marins^ 
09 xv), il est parlé du grand roi des puces, qui 
vire le soleil avec son chapeau. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 30S 

LE SCARABÉE (C&rasus) 

Nom patois, — Formulette 

Cdlosse (S.-C). 

On dit aux scarabées en les retournant avec un 
brin de paille : 

Câlosse, 
Si tu colosses bien, 
Tu auras du pain ; 
Si tu câlosses mal. 
Tu auras de la hallebarde. 

LE STAPHYUNX (Staphyunus) 

Noms patois. — Croyances. — Formulette 

Pique de v'iin, fém. (S.-C.) ; tancheîaie (E.). 

Qijand la tancheîaie se colère, sa queue devient 
blanche ; la vache piquée par elle crève (E.), 

En l'écrasant, on dit : 

Pique de v'iin. 

Tu cherches ton pain ; 
Tu es infernale dans mon jardin. 
Quand je te vois, tu me fais frémi' ; 
Pique de v*lin, j*vas t'faire mouri* (S.-C). 

Cf. dans RoUaad, p. 326, une légende irlandaise et les noms 
où le staphylinx est qualifié d'animal diabolique. 

n 20 



306 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LA. TIQ.UE (IxoDBS ucmus, Latreille) 

Noms patois. — Proverbes et Dictons 

Berhion (S.-D.); tarague (M.) ; taraque (S.-D.) ;, 
nauvette QA,); pass (S.-D.). 

— Plan ou rond comme une tarague (M,, 
S.-D.). 

— Raide (saoule) comme une taraque (S.-D»),. 
en parlant des vaches. 

— £la (cela) est foutu comme eun pass au eu 
d*un chien (S.-D.), c'est-à-dire mal fait. 

La nouvette se nourrit sur la fougère ; on dit 
d'un pays pauvre qu'on y fait des pâtés de nou- 
vettes (D.). 

LE VER DE TERRE (Lvmbricxts, L.) 

Noms patois 

Bu:^in (Tréveneuc) ; buyin (Plérin); dchée (E.). 

Les marins appellent par plaisanterie les labou- 
reurs des coupoux d'huT^ins (Tréveneuc). Cf. le 
breton trodher hu:(uk, 

VER LUISANT (Lamytris noctzluca) 

Noms patois 

Chandelle de nuit (E.) ; vie éclairaus (Saint- 
Aubin) ; luré (P.). 



UTE-BRETAG 



Sufeniitions 

Les vers luisants servent de chandelle, sans 
botiger de place, à l'Ëckirous. C'est un prêtre qui 
a perdu une hostie dans le ruisseau, d'où elle est 
allée dans un étang. Qijand on voit un feu follet, 
on dit ; VoUà encore le prêtre qui court après 

Cf. It iicpilH iv laïUns, l. I, p. i(0 du priseot 1>TR. 

On croit que ce sont les chenilles vertes et non 
les lampyres qui éclairent la nuit (P.), ' 

Les lurés font peur aux peurous (peureux), ce 
qui veut dire qu'ils ne sont pas bien redoutés (P .) . 



w 



CHAPITRE VIII 



LES ARBRES 




§ I. — GÉNÉRALITÉS 

ANS la première partie de cet ouvrage, j'ai 
déjà parlé du culte des arbres. Mais ils 
figurent aussi dans la superstition, dans 
les coutumes et dans les contes, ainsi qu'on le 
verra aux monographies. 

Voici quelques croyances relatives aux arbres en 
général. Ils meurent quand ils ont été piqués par 
un reptile. On peut aussi les faire périr en enter- 
rant au pied un chat crevé, en versant du sang 
menstruel de femme ou du lait baratté. 

En patois gallot, le mot arbre, comme le latin 
arbor dont il dérive, est la plupart du temps féminin. 




s IL — MONOGRAPHIES 

L'AJONC (Ulex, L.) 

Nortts patois 

Jan (M., S.-D., E.); piquets de jan (P.); 
hêdin (Morbihan, G. g.); Jande > (lisière du pays 
bretonnant). La pièce de terre semée d'ajoncs se 
nomme jdnnaie (M.) ; jaônée (S.-D.) ; jeannette 
(M.) ; jaônette (P.). 

Superstition et Cri^ance. — Contes 

. Si le manche du pilon de la baratte est d'ajonc, 
4es sorciers ne peuvent ensorceler le beurre (E.). 

Mieux fleurit l'ajonc, meilleur sera le blé noir 
dans l'année (P.). 

H est parlé d'ajonc dans deux de mes contes : 
Ceiuiqui coupa la tête d*un jan, n© xlix, 2^ série, 
et Le Pertus es Fêtes , no ix. 

LE BOULEAU (Betuia, L.) 

Noms patois. — Croyance 
Boula (M.) ; botûé, bouliau, pi. houliaoux (£.). 



310 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Q^and un enfant est faible, on met des feuilles 
de bouleau à dessécher dans le four, puis on les 
place dans son berceau (£.). 

LA BRUYÈRE (Erica, L.) 

Noms patois. — Pronostic 

Bruère (M.); hérière (S.-D.) ; béruère (E., 
P.); hricane (E.). 

Plus la hruyëre est rose, meilleure sera Tantiée 
en blé noir (P.). 

LE CERISIER (Cbkasvs, T»> 

Noms patois 

BadieTy hadiîier, hadolier (M., P.); hadusiery 
hadisUr (Saint-Briac, P.) ; hadinier (Tréveneuc) ; 
cerisier de gogue (E.). Le fruit de la cerise douce 
se nomme badieQA.y Saint-Brieuc) ; hadue^ badtises 
(Saint-Briac) ; badein (Tréveneuc). Cf. le breton 
bàbueriy pi. bàbue. 

Avec les cerises sauvages, on fait une sorte de 
confiture d'un noir violet, d'un goût assez 
agréable. Elle est connue sous le nom de badiolet 

(D.) ou lohon. 

Dictons 

— Peser des badies ; s'endormir. 

— C'est le panier aux cerises : les plus fins y 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 3IT 

:Sont pris (£.). Ce proverbe est appliqué aux 
gens qui essaient infructueusement de restreindre 
leur famille. 

LE CHÂTAIGinER (Ostaiiba, T.) 

Noms patois. — Proverbes 

Châtean-mer (M., E., P., Tréveneuc); chd- 
Unier (Tréveneuc) ; le fruit, chdtangne (M.) ; chan- 
tat^ne (S.-D.) ; Tenveloppe s'appelle h^ue (E.) ; 
We(P). 

— - Année de châtaignes, année de blé noir (E.). 

— Il a les yeux gros comme des bogues de 
diâtaignes (E.). 

Croyance 

Si on mange des châtaignes crues, on aura 
des poux (£.). 

Croyance analogue en Poitou cf. Souche, Cray., p. 30. 

Qjiand i' pleut le jour Sainte-Ânne, 
r n*vient point d'châtangnes (P.). 

LE CHÊKE (QnB&cus, L.) 
Noms patois, — Proverbes et Dictons 

ChUne (P., M.); chéno, petit chêne (E.). Qn 
nomme chênaie un lieu planté de chênes. 

— Abattre un chêne pour faire yne cuiller 
(£.). Être prodigue. 



312 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Année de glands. 
Année de pomm' en suivant (P.). 

— Haut comme un chêne (E., P.). 

On dit que le chêne est le roi des arbres, parce 
qu'il vit le plus vieux, d*où ce dicton : 
Cent ans à venir, 
Cent ans sur pied. 
Cent ans à s'en retourner (D.). 

Médecine champêtre. — Croyances 

On préserve les vaches de la cocotte en leur 
mettant au cou des colliers de chêne (E.); 

Q}iand on a mal au ventre, on rôtit des glands,, 
et on les prend comme du café (S.-C). 

Il y a un jeu qui s'appelle planter le chêne, faire 
le chêne fourché, ou le chêne piqué. Il consiste à se 
planter sur la tête et à s'y tenir le plus longtemps 
possible, en ayant les jambes écartées de manière 
à ce qu'elles forment un V. 

LE COUDRIER (Cortlus, T.) 

Noms patois. — Proverhes et Dictons 

Keudôy fém. (P.); heudre, fém. ; queute, fém^ 
(S.-D.); la noisette se nomme petite néoué (M.); 
no^ d*qmuU (S.-D.). 

— Année de noisettes, année de bâtardiaux: 
(bâtards) (E.). 

Cf. Souche (Poitoa), Crcyances, p. 6. 



MiPiM 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 313 

Le jour Saint- Jean, la pluie 
Rend la noisette pourrie (H.). 

Croyances et Superstitions 

Quand on brise avec le petit doigt de la main 
gauche une baguette de coudrier, on se marie 
dans Tannée. 

La baguette de coudrier est très-bonne pour 
conduire les vaches méchantes. 

Q.uand les ruches ont été frottées avec de la 
feuille de coudrier, les mouches y entrent plus 
volontiers (E.). 

Si on prend une baguette de coudrier en forme 
de fourche^ et qu'on la tourne du côté où Ton a 
sa bonne amie ou son bon ami, si on est aimé, 
elle baisse d'elle-même vers la terre (E.). 

Les sourcterSf ou gens qui ont le don de décou- 
vrir les sources, vont dans les champs couper 
une baguette de coudre, la placent sur le bout de 
leur petit doigt et la balancent ; à l'endroit où 
elle tombe, il y a une source (P.). 

Pendant la nuit de Noël, dans chaque troussée 
(buisson) de coudre il y a une branche qui se 
transforme en rameau d'or ; mais pour la cueillir, 
il faut pouvoir la couper avant que l'heure de 
minuit ait achevé d'être sonnée. Si on ne réussis- 
sait pas, on serait enlevé. Cette baguette égale, 
dit-on, en pouvoir celles des plus grandes fées (P.). 



314 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

L'ÉGLANTIER (Rosa cairma, L.) 

Noms patois. — Jeux 

Rose de chien (M., S.-D.); pisse de chien (S.- 
D.); ergancié (P.). 

La baie rouge de l'églantier s'appelle booif ou 
hceuy à cause de sa couleur. Les graines qui sont 
dedans sont» disent les enfants» des poux (S.-C.)- 
Bs s'amusent à en tirer les graines, qui sont 
armées de petites pointes, et à les introduire entre 
la chair et la chemise, pour faire les personnes 
se gratter (M.). 

Ils s'amusent aussi à les mettre en ligne et à 
se disputer à qui aura le plus de bœu£s (P.)- 

L*ÉPINE (CnATiBOus, L.) 

Croyances et Superstitions 

L'épine blanche préserve de la foudre. C2jiand 
il tonne, il faut se réfugier dessous (S.-C). Au 
moment où il commence à tonner, on va cueillir 
des branches qu'on porte dans la maison (P.). 

Cf. nne croyance analogue dans Laisnel de la Salle, 1. 1, p. 60. 

Qpand les vaches ont des pourritures aux pieds, 
il faut les conduire avant le lever du soleil devant 
une épine blanche (Plénée-Jugon). 

Cf. le tome I*', p. 63 du présent livre. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 315 

On mène aussi devant des épines blanches les 
personnes atteintes de la fièvre ^.)- 

Cf. Monnier, p. 389. 

Vipine dans les contes 

La méchante belle-mère d'Euphrosine (La fille 
mix bras coupés ^ i« série, no xv) force sa belle- 
fille à grimper dans une épine ; mais elle s'en- 
fonce dans le genou une épine. Elle s'alite, et 
l'épine croît et finit par traverser le toit de la 
maison, où elle fleurit. 

LE GENÊT (Gbnista, L). 

Noms patois 
L'enveloppe des graines de genêt s'appelle 
gueussiaux de gènes (P.) ; un lieu planté de genêt, 
gmetaie (M.) ; geneta (E.). La sève qui sort du 
genêt se nomme copié de coucou (P.) ; crache de 
coucou (S.-D., P.). On croit que c'est le coucou 
qui crache et la fait venir (P.). 

Proverhe. — Croyances et Superstitions 

— r n'frappent point es contre-hus (portes 
extérieures) de genêt (Ploubalay). Ce proverbe, 
qui s'applique aux prêtres, veut dire qu'ils visitent 
plus volontiers les riches que les pauvres. 

Les sorciers ne peuvent ensorceler le beurre 
quand le pied de la baratte est en genêt (E.). 



3l6 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

La pellicule du genêt la plus rapprochée du 
bois est bonne pour guérir les coupures (E.) ou 
pour étancher le sang (P.). 

Deux saints populaires en Haute-Bretagne ont 
maudit le genêt : saint Melaine, parce qu'il avait 
été fouetté avec par sa mère; saint Qiiay, après 
avoir été battu avec des bâtons de genêt. Aussi 
il n'en pousse plus ni à Brain, ni à Saint-Qjuay. 

Cf. Guillotin de Corson, Redon^ p. 19-20; Jollivet, t. I, 
p. 107. 

LE GUI (ViscuK, T.) 

Nom patois. — Superstitions et Coutumes 

Guen (Saint- Aubin-du-Cormier). 

Le gui qui croît sur les épines noires guérit 
ceux qui tombent d'un mal (les épileptiques). 

Le plus recherché est le gui de chêne. On dit 
qu'il se vend au poids de l'or (S.-C). Il y en a 
qui viennent de bien loin pour en chercher (P.). 

Le gui mélangé à la nourriture àts chèvres et 
des vaches leur fait donner du lait (E.). 

Cf. Pline, dté par Gaidoz, p. 8. 

Le gui d'épines blanches passe la fièvre (E.) ou 
la colique (P.). On le fait bouillir. 

En Haute-Bretagne, on met au-dessus de la 
porte des auberges une branche de gui de pom- 
mier ; il est d'usage en plusieurs pays de la renou- 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 317 

vêler à chaque tonneau de cidre nouvellement 
mis en perce. Si le cidre est nouveau, on met 
une pomme au milieu du gui. 

Le gui cueilli sur les épines passe le jaunisse* On 
le met à sécher au-dessus de la crémaillère et, quand 
il est complètement sec, la maladie est passée (£.). 

Sur le gui, on peut consulter H. Gaidoz, U Religion gauloise 
€t le gui de chêne. Paris, 1880. 

LE HOUX (Ilbx, L.) 

Noms patois. — Croyances 

Heussd (S.-D.); haussa (M.); houssard (P.). 

Le houx est consulté pour savoir si on se 
mariera ou non. On dit en touchant chacun des 
piquants : « Fille, femme, veuve, religieuse, » ou : 
« fils, homme, veuf, religieux ». C*est le dernier 
piquant qui donne la réponse (M.). 

Les enfants de la campagne s^amusent à cueillir 
des feuilles de houx ; ils disent que ce sont leurs 
vaches. Autant de feuilles, autant de vaches ; ils 
les attachent à la queue les unes des autres et les 
traînent (P.). 

LE LAURIER (Laurus, T.) 

Nom patois, — Superstitions 

On dit assez souvent rollier au lieu de laurier. 
Si, après avoir récité un Pater et un Avey on 



3l8 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

prend une feuille de laurier-palme, et qu'on la 
itaette sous son oreiller, on voit la nuit celui ou 
celle qu'on épousera; mais il ne faut parler à per- 
sonne (E.). 

Pour se guérir de la fièvre, il faut, le dimanche^ 
au moment où le prêtre se lève pour l'évangile, 
faire une croix avec du laurier et la mettre sur la 
poitrine de celui qui tremble 1^ fièvre (P.)* 

Pour préserver les bestiaux des maladies, on 
suspend à, la porte des étables une branche de 
laurier béni (P.). 

LE LIERRE (Hbdera, L.) 
Noms patois. — - Proverbe, — Médecine populaire 

LUri (P., E.); liri (P.); Uyère (P.); brou 
(E.) ; lieras, accumulation de lierre (E.). 

— Se coller comme un lierre. 

Q.uand une personne veut faire sortir le mau- 
vais sang, elle n'a qu'à prendre du lierre de 
muraille et à le mettre sécher dans un four. 
QjLiand il est bien sec, elle s'enveloppe dans un 
drap parmi les feuilles séchées (P., E.). 

LE NOYER (JvGLAMS, L.) 

Noms patois 

Nouyer (E., M., P.); certaines grosses noix se 
nomment cadrolks (M.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 319 

Superstitions et Croyances 

La feuille de noyer chasse les puces (E.). Si on 
en met dans son lit, les puces sont attirées par 
l'odeur ; mais dés qu'elles les ont touchées, elles 
meurent. 

Croyance analogue en Poitou (cf. Souche, Croy., p. 27, et 
Desaivre, Le Noyer et le Pommier, où Ton trouve de curieux dé- 
tails sur ces deux arbres). 

Sous les noyers il y a des sourds (E.). 

Les cochons dont les étables sont trop proches 
des noyers périssent ou ne profitent pas (P.). 

Si les noyers ne rapportent pas, on les gaule 
violemment quand ils sont en sève (E.). 

Q}iand les vaches sont caquineSy c'est-à-dire ont 
la courée (chorée) tachée, on les frotte avec des 
feuilles de noyer, et leur caquinerie n'est plus 
apparente (P.). 

Dans Jean des Merveilles (Contes des Marins^ 
no xn), une fée qu'il a protégée lui donne une 
coque de noix qui devient à volonté navire, coffre 
rempli d'or, etc. Misère (Litt, orale, p. 177) 
demande que son noyer soit à l'abri des pillards. 

LE POMMIER (Malus, Lamarck) 

Noms patois 

Pounùer, ente (£.)• Les pommes qui tombent 
les premières s'appellent chdtunes (M.). 



mmmamm 



320 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Proverbes 

Si rsoula ra la veille de Noué, 
Des pomm' à volonté. 

Année de glands. 
Année d'pomm* ensuivant. 

A la Saint- Jean, 
Qîii voit une pomme en voit cent (M.). 

Si pendant la procession des Rameaux le vent 
vient du bas, il n'y aura pas de pommes. 

Si le vent est dans le haut 

Le jou' des Ramiaux, 

Faut rincer les tonniaux ; 

S'il est soulair (sud), 

Faut baïre à plein verre ; 

Et s'il est dans l'bas. 

Fout' les tonnes dans n'un tas (E.). 

Superstitions 

Pour savoir de quel côté on a sa bonne amie, 
on met des pépins dans un chapeau ou dans sa 
main, et on les secoue ; le côté pointu du pépin 
indique où est la bonne amie ; on dit : 

Pépin, pépin, 
Tourne- toi, vire-toi. 
Par où le pépin tournera 
La bonne amie sera (S.-C). 

On le serre aussi entre le3 doigts, et on dit : 
Pépin ici, pépin-ilà. 



1 

I 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 32I 

Où que l'petit pépin -là ira 
Ta bonne amie y sera (P.). 

Si on mange des pommes vertes, on attrape 
•des poux (P.). 

Vers la mi-septembre, on cueille dans les 
champs une trouchée de cinq ou six pommes, et 
on les suspend dans le cellier pour qu'elles 
attirent à elles le venin. A mesure que les pommes 
^e détachent de la branche, on les jette dans le 
feu. Si quelqu'un en mangeait, il deviendrait 
malade, car elles sont venimouses (Plénée-Jugon). 

Ailleurs on ramasse une trochée de pommes. Si 
-elles se tiennent ensemble et ne tombent qu'à 
l'hiver, c'est signe qu'il n'y aura personne de 
malade à la maison (P.). 

Pour se guérir des verrues, on prend une 
pomme aigre; on la coupe en deux, puis on se 
frotte avec la main qui a des verrues. On jette les 
morceaux dans le fumier, et, à mesure qu'ils 
pourrissent, les verrues tombent (P.). 

Cf. Souche, Prov., p. 48. 

Le cidre fait dans le décours est le meilleur. 

Il y a des pommes qui font pousser des cornes, 
que d'autres détruisent (Les Cornes enchantées, 
jre série, n® v). Dans Le mariage de Jean le Dioty 
no XX, le roi remet à son petit-fils une pomme 
avec laquelle il doit découvrir son père. 

Plusieurs contes parlent de pommes difficiles à 

II 21 



322 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

cueillir; telle est la pomme qui chante, dans un 
conte inédit intitulé UOiseau de vérité, Jean le 
soldat (Contes des Marins^ n® xxi), doit aller cueillir 
des pommes dans un verger gardé par des géants. 

LA RONCE (RuBUs, L.) 

Noms patois, — Dicton 

Éronce (M., P.); les fruits se nomment mores 
(M.) ; moules (P.) 

Les moule' en au (août) 
Valent des pruneaux ; 
Les moule* en s'temb*e (septembre) 
Valent des irangnes. 
On n'en mange pas après août, car il y a des vers dedans. 

Superstitions et Croyances 

Si une ronce s'accroche à la robe d*une femme, 
c'est qu'un veuf pense à elle (D.). 

duand les premières moules ne valent rien, le 
blé fait après ne vaut rien non plus; si les 
deuxièmes sont bonnes, le blé fait la seconde 
fois sera bon (P.). 

Jadis les ronces tenaient auberge; mais elles 
firent crédit à tant de monde qu'elles ne purent 
payer leurs créanciers et furent obligées d'aller 
chercher leur pain. C'est depuis ce temps que les 
ronces accrochent les gens pour tâcher d'être 
payées (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 323 

LE ROSIER (RosA, L.) 

Le rosier dans les contes 

La Rose {Contes des MarinSy no ni) a dans une 
boîte d'argent une rose qui fait ressusciter les 
morts si on la leur passe sous le nez. 

Dans Blanche-Neige {Contes des Marins y no xiv), 
qui au début seulement ressemble au célèbre 
conte de Grimm, chacune àts jeunes filles a 
son rosier, et elles les transportent partout avec 
elles, même à bord des navires. 

LE SAULE (Salix, L.) 

Noms patois — Superstition 

Saudre, sa^id^e, fém., saute (V.); seude (S.-D.). 
Les chatons se nomment chats (Plouvara). 

Pour voir avec qui on se mariera, il faut 
mettre sous son oreiller un morceau de la seconde 
pelure du saule, la plus rapprochée du bois (E.). 

< 

LE SUREAU (Sambucus, T.) 
Noms patois 

Su (M.); seû (P.); haoâ bouée {S.-D,, P.). 

Superstitions 

Si on met des branches de sureau dans les 
endroits où les taupes boutent, cela les chasse 
(E., P.). 



324 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Le sureau planté autour des maisons les préserve 
des maléfices et écarte les serpents. Quand on fait 
une litière neuve, on met sur le sol, en dessous de 
la paille, des branches de sureau pour garantir le 
bétail des maladies et des sorcelleries (P.)- 

Si on frappait les bêtes avec des branches de 
sureau, elles ne feraient jamais bien après, et si 
l'on en frappait les cochons, ils crèveraient (P.)« 

En frottant les verrues avec de la graine de 
sureau, on les fait s'en aller (P.). 

Cest avec la tige de sureau dont la moelle a 
été préalablement enlevée que les enfants font 
des jouets qu'ils appellent taponnouèrCy taconnoire. 
Cet instrument, connu en beaucoup de pays, était 
populaire du temps de Rabelais, qui l'appelle une 
« sarbataine de seu ». 

LE TREMBLE (Populus tremula, L.) 

Nom patois. — Superstition 

Treniblier (P.). 

Si la feuille du tremble cessait de trembler, la 
fin du monde viendrait. 

Tant que le tremble tremblera, 
Le monde existera (E.). 




CHAPITRE IX 



LES PLANTES 



§ I. — GÉNÉRALITÉS 




£ ne crois pas que les paysans gallots 
connaissent par leur nom plus de trois 
cents plantes. Je n'ai pu me procurer 
que ceux de deux cents environ, dont une partie 
seulement est l'objet de superstitions ou est em- 
ployée pour la guérison des bêtes ou celle des 
gens. C'est en eflfet leur côté le plus important ; 
toutefois on tire des augures de plusieurs plantes, 
et même parfois on croit qu'elles peuvent aider 
ou gêner la sorcellerie. 
Si une personne a été tuée et que son sang ait 



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326 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

rougi la verdure, l'herbe ne repoussera plus à 
l'endroit où il a coulé. 

Cf. sur cette croyance le t. I^', p. 38^, du présent livre. 

Les plantes marines ne sont, à ma connaissance 
du moins, l'objet d'aucune superstition. 

Dans un conte (2« série, n© xvi), l'homme de 
mer est couvert de varechs verts et de libères 
(fucus). Le pilote de mer (Contes des marins ^ 
no xix) est aussi couvert de varechs. 

LES HERBES ItlAGiaUES 

Marcher sur l'herbe d'oubli ou d'ohîi est une 
locution fort employée à la campagne, pai connu 
plusieurs personnes qui affirmaient qu'elles s'étaient 
égarées pour avoir marché dessus. A Plévenon, 
l'herbe d'oubli se trouvait sur la lande du cap 
Fréhel. A Ercé, c'est dans l'épaisseur des forêts 
qu'elle est cachée. 

Cf. Revue germanique^ t. XV, 1861, p. 26, article de M. Ban- 
dry. Sur cette croyance, qui est très-rèpandue en Basse-Bre- 
tagne, cf. Le Men, p. 422 ; elle passe pour être la demeure 
d'un esprit malfaisant. En Normandie (cf. A. Bosquet, p. 386 ; 
Mélusiney col. 13, 46, 172); en Poitou (Souche, Pnw., p. 34); 
en Franche-Comté (M«/., col. 349), elle est aussi connue. 

D'autres font entendre le langage des bêtes. 

Les deux chiens 
Il y avait une fois deux métairies voisines qui 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 327 

chacune étaient gardées par un chien ; Tun des 
fermiers nourrissait bien le sien, au lieu que 
l'autre lui donnait plus de coups de bâton que de 
morceaux de pain. 

Un jour un homme qui s'était arrêté dans un 
champ avait pris une poignée d'herbes pour se 
torcher le derrière, et au moment où il la tenait 
<lans la main, il entendit les chiens qui se par- 
laient : 

— Ton maître, disait le chien qui était bien 
nourri, va être volé cette nuit. 

— Cela m'est bien égal, répondait celui qui ne 
recevait que des coups de bâton ; je ne le défen- 
drai pas : il ne m'a pas donné à souper. 

L'homme à ce moment jeta sa poignée d'herbes 
et, au lieu de comprendre ce que disaient les 
chiens, il n'entendit plus que leurs aboiements. 

Les voleurs survinrent dans la nuit, et comme le 
chien n'avertissait pas ses maîtres, ils furent volés. 

(Conté en x88o par François Jldarquer, dé Saint-Cast.) 

J*ai recueilli aux environs de Moncontonr une légende assez 
■semblable ; mais l'homme avait pris l'herbe d'oubli qui £ùt en- 
tendre le langage des animaux, si on ne sait pas qu'on en a pris. 
Il cessa de comprendre quand on lui eut dit qu'il avait touché 
l'herbe d'oubli. 




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§ n. — MONOGRAPHIES 




L'AIL (Allium, L. ) 

Médecine populaire 

iN met au cou des enfants un collier de 
gousses d'ail pour les préserver des vers. 
Si les vers « leur pissent au cœur »^ 
on leur fait manger de Tail (E.). 

L'ANIS (PlHPIMELLA ANISUM, L.) 

Croyances et Superstitions 

L'anis fait péter ceux qui en mangent ou qui le 
prennent infusé. 

L'anis a la vertu de couper le fer. Le pivert, qui 
a le bec si dur, va se frotter le picot sur cette 
herbe, et après il traverse facilement le bois(P.)^ 

Cf. Laisnel de k Salle, t. I, p. 207. 

L'AVOINE (AvEHA, L.) 

Noms patois. — Proverbe 

Avène, avoine, aveine. Lai folle avoine (avena 
steriîis, L.) se nomme havron (M.). 

A la Madeleine, 

La faucille à Taveine. 



TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 329 

SupersHtion 

Un sorcier, pour faire du mal aux hommes, 
avait demandé du lait de femme. On lui donna de 
la bouillie d'avoine ; il jeta le sort sur les avoines, 
et elles séchèrent sur pied cette année-là (E.). 

Cf. t. I, p. 336, un conte où cette sorcellerie est attribuée aux 
moines. 

LE BLÉ (TRiTictm, L.) / 

Noms patois 
Eté (t.) ; lieu (Plouvara). 

Superstitions 

En regardant un grain de blé, on y voit la 
figure de Jésus-Christ (E., D.). 

Pour savoir le prix du blé, on consulte la caille 
(voyez ce mot). On peut aussi le savoir le jour 
du premier de Tan en mettant du grain à chauffer 
sur la tournette qui sert à retourner les galettes. 
Si le grain saute, c'est qu'il sera cher Tannée qui 
vient (E.). 

Pour avoir du blé, les vieux allaient -arroser 
leurs champs avec des houteiîîées d'eau bénite. 
Cela ne se fait plus (P.). 

Avec les chaumes de blé vert ou d'avoine, les 
enfants de la campagne font une sorte de petite 
musique qu'ils appellent sonnette ou bouè:(e; ils 
lui disent : 



330 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Sonnette, sonnette. 
Si tu dis. 
Je te donnerai du pain et du kit. 

Si tu ne dis pas. 

Je te couperai 
Avec un grand couteau d'acier (S.-C.). 

Petite sonnette, 
Si tu ne sonnes pas. 
Je te couperai nette, nette, 
Par la moitié (P.). 

Sonne, ma petite sonnette ; 
Sonne, tu auras du beurre et du lait ; 
Si tu n'sonnes point, tu n* n'aras point (P.). 

Cf. dans Desaivre, p. 3 et 4, Formul., deax formulettes que les 
«nfants 'du Bas-Poitou récitent en frappant sur l'écorce de firène 
pour faire des sifiËets. 

2> lU dans les contes 

Dans un conte intitulé Vadoyer, i" série, 
no LXiv, un homme qui n'a qu'un grain de blé 
en tire un singulier profit. 

Dans un conte inédit de ma collection, les 
fées, pour dédommager un fermier du tort que 
leur troupeau lui a fait, font repousser le blé 
mangé en trois jours, et « sur le haut des épis 
viendront de nouvelles tiges qui porteront encore 
des épis. » 

Le blé joue aussi dans les usages de moisson un rôle dont je 
parlerai longuement dans mon livre des Coutumes. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 33I 

LE BLEUET (Cbntauxba ctamvs, L.) 

Noms patois. — Médecine populaire 

BUuvet (P.) ; hleu bleu (S.-C.) ; hluvet (Tré- 
veneuc). 

Si on fait boire à quelqu'un une infusion de 
bleuet) on lui donne la colique (£.). 

L'eau-de-vie où Ton a infusé du bleuet est 
bonne pour les yeux (D.). Une infusion de bleuet, 
de séneçon, de cresson,, de sauge, etc., renouvelle 
le sang (P.). 

LE CHAMPIGNON (Acuucus) 

Noms patois, — Proverbe. — Superstitions 

Potiron (M.) ; Jean-gorin (S.-D.). 

— Jaune comme un potiron (S.-C). 

On appelle les champignons des « ronds de 
sorcières » (E.). 

Sous les gros potirons se trouvent des cra- 
pauds (E.). 

LE CHANVRE (Cannabis, L.) 

Noms patois 

Chanv'ây fém. ; chambe, fém. (M., E.) ; fumelle 
(P.) ; c'est le chanvre qui fleurit et graine avant 



332 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

l'autre et qu'on arrache le premier. Le che- 
nevis se nomme chanuédy fém. (Tréveneuc); 
chanevé (G. g.) ; le lieu où l'on met le lin ou le 
chanvre à rouir rototié (S.-D.); rouitouère (M.). 

Superstitions 

Le chanvre fait enrager les gens qui ont été 
mordus par les chiens. 

Quand les poules ont mangé de la graine de 
chanvre, elles cessent de pondre et se mettent à 
couver. 

Il est d'usage de laisser le plus beau brin de 
chanvre pour l'oiseau Saint-Martin; c'est le 
martinet. 

D'après Florent Ricbomme, cité par A. Bosquet, p. 219-220, 
le premier qui cultiva du chanvre voyait les oiseaux le manger ; 
il implora saint Martin, qui enferma pendant les offices tons les 
oiseaux dans une grange, excepté le martinet, qui ne faisait 
point de mal. 

Il faut chanter en le cueillissant. 
On les filandières s'endorment en le filant. 

De même pour le lin; il y a des chansons 
qu'on chante en faisant cette besogne (E., S.-C). 

Si on mélange au cidre de la graine de chanvre, 
celui qui en boit « dort comme une motte ». 

Pour se faire passer le lait, les femmes boivent 
de l'eau dans laquelle on a mis du chenevis à 
infuser. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 333 

LE CHARDON (C:ua>uus, Gaertner) 

Noms patois. — Médecine populaire 

Chardron (M.); cherdon, chierdon, chierdron (P.). 

Les chardons bénis (ce sont ceiix qui ont la 
feuille blanche et verte), piles et mis sur les bras 
pendant neuf jours ou neuf nuits, coupent la fièvre 
<E.). 

LE CHOU (Brassica, L.) 

Nom patois — Dicton et Croyances 

Cheu (G. g.). 

On dit d'un homme qui est séparé de biens ou 
<iont la femme a la maîtrise sur la maison : « Il est 
coiffé de la feuille de chou » (E.). 

On prétend que les choux plantés après la 
Saint-Jean n^pomment point (E.). 

Qjiand une vache est passée en dommage, on 
dit par plaisanterie à celui à qui elle appartient : 
« Les choux vont manger ta vache » (P.). 

LA CITROUILLE (Cucurbita, L.) 

Croyances 

Les citrouilles piquées, c'est-à-dire mises en 
terre, le vei^redi saint deviennent grosses comme 
des ragoles (chênes d'émonde) (E.). Il en est de 
même du jour Saint-Georges (23 avril). 



354 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

On porte des citrouilles à l'autel de la Vierge, 
quand elles ont bien réussi (£.). 

La soupe faite avec les citrouilles se nomme 
soupe de jotte (£.). 

Il est parlé de citrouilles dans deux de mes 
contes, 2© série : La Citrouille^ n© XLVni, et 
Cendrousey nP xxxi (citrouille devenant carrosse). 

LE COQUELICOT (Papayer rbcas, L.) 

Noms patois, — Superstition 

Cocolicot (M.) ; feu sauvage (E.). 
Si on s*amuse à trop prendre des coquelicots 
dans sa main, on gagne le mal appelé feu sauvage. 

LE CRESSON (Mastvrtium, De Guidolle) 
Noms patois. — Croyance 

Crasson (E.) ; berle (Morbihan, G. g.)» 
Il y a des paysans qui croient que le cresson ne 
vient que dans les ruisseaux où Ton a roui du 
lin, et que c'est la graine de lin qui le produit. 

LA CUSCUTE (CuscuTA, L.) 

Noms patois, — Crcyance 

Ff d'alouette (S.-D.) ; fi en. diable (E.) ; fil de la 
Vierge, fi* de coucou, fi ^alouette (P.) ; teigw (E.). 

On prétend que c'est le diable qui a filé la 
cuscute pour perdre les trèfles (E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 335 

LA DIGITALE (Digitalis, T.) 

Noms patois. — Proverhe. — Croyance 

Gantelet (E.); cotiîhc (Bécherel); cotissoué, co- 
tissiau (E.); nunu, nounou (P.)} ^^h floquet 
(M.); berlu (S,'D,) (cf. le breton herhi)\ la fleur 
seule, coquion (vers Loudéac). 

— r chante comme un bourdon dan' un berlu 

(S.-D.). 

Les petits bergers s'amusent à faire cotir les 
fleurs des digitales ou à les enfiler dans des 
branches de fougère pour faire des croix (M.). 

Si on met deux gouttes de digitale dans la 
boisson de quelqu'un, on le fait mourir (E.). 

L'EUPHORBE (Euphorbia, L.) 

Nom patois. — Croyance 

Flanga (E.). 

Si on se frotte les yeux après^ avoir touché de 
l'euphorbe, on perd la vue (S.-D.). 

LA FÈVE (Faba, T.) 

Noms patois. — Proverhe 

Feuve (M., E., P.); la tige se nommQ fava. 

— Il a mangé de la soupe de fèves : il voit 
double (S.-C). 

En Poitou (cf. Sonché, Proverbes^ p. 2$), on dit d'une femme 
enceinte qu'elle a. mangé de la soupe aux fèves. 



336 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

La fève, c'est le grain du diable (S.-C). 

Dans les contes, il est; plusieurs fois question 
de fèves qui grimpent jusqu'au ciel (cf. La Fève^ 
ire série, no xii, et Litt. orahy p. 213). 

LA FOUGÈRE (Pteris aqjjilima, L.) 

Noms patois — Croyances 

Feugière (S.-D., M.); fougière (M.); feùgueère 
^Tréveneuc) ; feugière (P.). 

Si on étête avec les dents le premier brin de 
fougère qu'on voit pousser, cela préserve des 
fièvres (E.). 

Si l'on veut découvrir les trésors cachés, il faut 
la nuit de la Saint- Jean, vers minuit, ramasser de 
la graine de fougère. Le dimanche des Rameaux 
de l'année suivante, on répand cette graine dans 
l'endroit où l'on suppose que des trésors sont 
cachés (P.). 

' LA FRAISE (Fragaria, L.) 



Nom patois. — Médecine populaire 

Frase (M., E.). 

Si on se lave deux ou trois fois les mains avec 
du jus de fraise, on n'a plus d'engelures (D.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 337 

LA JARNOTTE ou TERRE NOIX (Bukium 

BVLBOCASTANCM, L.) 

Niyms patois. — Croyance 

Jednnoite QA.); jernotte (S.-D.). 
On dit aux petits enfants : « N'en mange pas 
trop, ou tu auras des poux » (M.). 

LA JOUBARBE (Sehpbrvivcm, U) 
Nom patois. — Croyances 

Joubarde (E.). 

Trois ou neuf feuilles de joubarbe données aux 
vaches à jeun, pendant trois matins de suite, les 
rendent amoureuses (E.). 

La joubarbe guérit les ampoules des pieds ; on la 
pile avec de la graisse douce ; on l'applique sur le 
mal, et on lui dit : 

Joubarbe, 
Guéris mes pieds du mal. 
Je te donnerai de la salade ; 
Si tu ne les guéris pas, 
Je te hacherai avec mon couteau 
En plus de mille petits morceaux (S.-C). 

Un jeune homme qui mettrait de la joubarbe 
dans sa poche, et la ferait sentir à une fille, la 
forcerait à courir après lui (Saint-Aubin-du- 
Cormier). 

Jadis la joubarbe était employée comme Aphrodisiaque, ainsi 
II 22 



338 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



que le constate Thiers, Traité des iupersHtionSy ch. xv : « On ne 
saurait exempter de péché... ceux qui mangent de la joubarbe ou 
joubarde, afin de rompre le nouëment de l'aiguillette dont ils 
sont affligez. » 



LA JUSQ.UIAME NOIRE (Htosctaitos hicer, L.) 

Noms patois. — Croyance 

Herbe chevaline ou herhe es chevaux. 

Pour faire les vaches se mettre en chasse, on 
n'a qu'à leur donner à manger de l'herbe cheva- 
line. Elle agit aussi sur les autres animaux (P.). 

LE LIN (LiNUM, L.) 

Dicton 

Si la plée (pluie) n'tombe pas 
Pendant les jours gras, 
Point de lin c't'année tu n'auras (E.), 

Croyances. — Conte 

Si on pile le lin sur le seuil de la porte, le 
cidre aigrit dans les celliers (S.-C). 

On laisse parfois une poignée de lin dans un. 
coin du champ, sans l'arracher : c'est pour la 
chance (£.)• 

Dans plusieurs contes des Jaguens, les Jaguens 
se baignent dans du lin qu'ils prennent pour la 
jner verte et bleue (cf. Litt. orale, p. 253). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 339 

LA MARGUERITE (Bellis pbrbnnis, L.) 

Nom patois. — Superstition 

Pdque (L.). 

On TefFeuille pour savoir son sort, et l'on dit : 

Fille, femme, veuve, religieuse ; 
Gars, homme, veuf, religieux. 

Suivant les sexes, c'est la dernière feuille qui 
donne la réponse (E.). 

LA MERCURIALE (Mercurialis aknua, L.) 

Noms patois. — Croyances 

Raniberge (M., E.) ; îamberge (P.). 

Si les pommes ont traîné sur la ramberge, le 
cidre ne vaut rien ; il en est de même si les pom- 
miers sont plantés dans un sol où il en vient 
beaucoup (E.). 

Quand les vaches mangent de la Iamberge, 
cela les fait pisser du sang (P.). 

LA MOUSSE (Till*a) 

Nom patois. — Médecine populaire 

Meûsse (P.). 

Lorsqu'une personne s'est blessée, qu'elle a 
fait une chute ou qu'elle est enflée, elle se guérit 
en appliquant sur la partie malade un cataplasme 
de mousse bouillie dans du lait (P.). 



340 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LE NAVET (BKA.SSICA kavus, L.) 

Noms patois. — Proverbe 
NaviaUy pi. des naviaoux (M., E., P.). 
— Pâle comme un navet. 

Jardinage, — Conte 

Le jour Saint-Barnabe (ii juin), on plante les 
navets de quarante jours (E.). A la Sainte-Anue 
(26 juillet), faut faire des naviaux; i* viennent 
gros comme on les demande (E.). 

Dans quelques contes gallots, il y est question 
de quatre-vingt-dix-neuf auberges qui se trouvent 
sur la route du paradis, et où Ton vend du poiré de 
mviaux à quatre sous le pot. Il est aussi parlé de 
cette plante dans le conte du Navet (jÂtt. orahy 

P- 135). 

L'ORTIE (Urtica, L.) 
Noms patois. — Médecine populaire 

Ourtie, ortrie (Tréveneuc). 

Quand on a des rhumatismes, on se frotte 
avec un paquet d'orties. De même pour empêcher 
les enfants de pisser au lit. 

Si on voit quelqu'un s'approcher des orties 
en prenant de grandes précautions, on lui crie : 
« Les orties ne piquent pas aujourd'hui ; elles 
piqueront demain » (E.). 

Si on a des ampoules au pied, on les frotte 
avec des orties pour les faire passer (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 341 

Le jus d*ortie mêlé au lait de vache présente du 
mal de ventre (S.-C). 

Pour calmer les maux de dents, on pile des 
orties, puis on y mélange du gros sel, et l'on 
applique ce cataplasme sur la dent malade (P.). 

LA PARELLE (Rumbx crispus, L.) 

Nom patois. — Médecine populaire 

Vinette (oseille) de crapaou (Tréveneuc). 

Si on a la gale, on pile de la parelle, du beurre 
frais, du sel, et l'on se frotte bien avec ce mé- 
lange. On guérit aussitôt; mais il paraît qu'il faut 
dire aussi une prière de conjuration (Saint- Aubin). 

LE PERSIL (Pbtrosblimuu sativum, Ho£f) 

Superstitions 

Le persil fait casser les verres. 
Planter du persil porte malheur; il faut le 
semer (P.). 

Superstition analogue en Poitou (cf. Souche, Proverlts^ p. 25). 

La graine de persil fait mourir les poux (P.). 

LE PISSENLIT (Taiuxacum, Jossien, ou Taraxacum 
OFFICINALE, Villars) 

Nom patois. — Proverbe. — Superstitions 
Pissmîet (M.). 



342 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

— Jaune comme un pissenlit. 

Qjiand le pissenlit est en graine, on en cueille 
un brin, et on souffle dessus pour savoir si on est 
aimé. Si toutes les graines s*envolent, c'est signe 
qu'on est très-aimé; s'il en reste quelques-unes, 
on l'est un peu moins; s'il en reste beaucoup, 
l'affection est faible (M., E.). 

On s'y prend de la même manière pour savoir 
combien on aura d'années à vivre : autant de 
graines qui restent sur le pied, autant on a 
d'années à vivre (M.). 

Pour savoir l'heure qu'il est, on souffle trois 
fois sur la graine du pissenlit; le nombre de 
graines qui restent donne la réponse ; s'il y en a 
de cassées, ce sont des demi-heures ou des quarts- 
d'heure (S.-C). 

Q.uand on ne se rappelle plus si on a dit ses 
prières le matin, on souffle sur la graine du 
pissenlit. Si on les enlève toutes, c'est qu'on les 
a dites (D.). 

LE PLANTAIN (Plamtago lamceolata, L.) 

Médecine populaire 

Pour guérir les plaies, on emploie le plantaia 
lancéolé, dit herbe aux cinq coutures. 
Si pendant trois matins de suite, étant à jeun> 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 345 

on pisse sur du plantain, on est guéri de la 
fièvre (E.). 

Q^and une personne a un dragon de sang sur 
un œil, elle doit, pour se guérir, piler du plan- 
tain mêlé à du gros sel, et s'en faire un cataplasme 
pour Toeil malade (P.). 

LE POIS (PiSSUM SàTIVUM, L.) 

Nom patois. — Dicton 

Pas (M.). 

Le jour de Sainte-Cécile, si on plante des pas y 
V vieiment comme des mâts (E.). 

Médecine superstitieuse 

Pour faire passer les verrues, on jette des pois 
•dans une fontaine au soleil levant. Quand les 
pois sont pourris, les verrues s'en vont (E.). 
Ailleurs, on prend une poignée de pois; on en 
frotte la verrue, puis, quand on ne voit personne, 
on va les jeter dans un puits en fermant les 
yeux (S.-C.)« 

Cf. un remède analogue dans Laisnel de la Salle, 1. 1, p. lyj. 
Cf. aussi Thiers, Supers., ch. xxx, p. 321. 

LE SAIGNE-NEZ (Achillea ioxlbfouum, L.) 

Jeu 

Les enfants se grattent l'intérieur des narines 



344 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

avec des feuilles de saigne-nez et produisent ainsi 
une sorte de saignement. Parfois aussi ils se 
frottent la langue avec le côté rugueux de la 
plante pour la faire rougir et saigner (M., E.). 

Ce jeu est connn en Poitou (cf. Souche, Proverbes^ p. 26), et 
sAnt dôme «iUeun. 

LE SARRASIN (Poltgomum fagoptkum, L.) 

Noms patois, — Dictons et Proverbes 
BU noir, blé na, bU né, bié na. Débris de blé 
noir vanné, freù. 

— Année de châtaignes, année de blé noir. 

— N*y a pas de bonne fouée sans freù (Plou- 
vara). 

Le blé noir fait dans le cressent ne réussit 
jamais. 

Sème ton blé noir quand tu voudras, 
En quat' nuis (mois) tu Vkeudras (cueilleras) (P.). 

LE SERPENTAIRE (Polygokum bistouta, L.) 

Noms patois, — Croyance 
Pain de càleuve (M.) ; mangeaiîîe au serpent (P.)- 
On croit que les couleuvres s'en nourrissent et 

qu'on trouve toujours dessous un reptile. 
Au pied du pain de couleuvre, il y a une espèce 

de navet avec lequel on se frotte quand on est 

atteint de la goutte ou de quelque autre affection 

semblable (P.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 34$ 

SERPOLET CTmrmn sbrvtllum, L.) 

Nom patois. — Croyanu 

CherpouUt (P.). 

Q^and une ménagère a du lait qui ne s*apprête 
pas comme elle veut, elle prend du serpolet et 
frotte la panne avec la feuille; aussitôt le lait 
s'apprête (P.). 

Le parfum du serpolet chasse les puces (D.). 

LE TRÈFLE (Twfoliom, L.) 
Superstition» — Croyances 

Le trèfle à quatre feuilles fait gagner à tous 
coups aux jeux de hasard ; mats il ne faut pas 
savoir qu*on Ta sur soi. 

Quand on en trouve, on se marie dans 
Tannée (E.). 

Cf. Guy<mva*chf p. 212. 

Si on a sur soi un trèfle à quatre, cinq ou sept 
feuilles, on est préservé des enchantements. 

Cf. Laisnel de la Salle, t. I, p. 384. 

Il ne faut pas semer la tremène (trifoUum 
repens, L., trèfle rose) un jour de la semaine où 
il y a un r, car elle ne viendrait pas (S.-C). 



34^ TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



LA VERVEINE (Vauiu, L.) 

La verveioe sert â attraper le poisson (E.)- 
Elle porte malheur (P.)- 

VIOLETTE (Viou, T.) 
Midtâiu populaire. — Conte 

La feuille de violette guérit les blessures (E.). 

Dans le Bœuf d'or, 2« série, n» XL, la jeune 
fille que son père veut épouser lui demande une 
robe en fleurs de violettes sans couture. 

Les chansons parlent assez souvent de la 
violette. 




CHAPITRE. X 



LES MÉTÉORES 



L'ARC-EN -CIEL 



Noms patois 

Arcancii (M., E.); ergancié (P.); carcanciê (S.- 
C); arcancidU^ fém. (Hénon). 

Proverbes et Pronostics 

S'il paraît plusieurs arcs-en-ciel au matin, la 
pluie continuera; s'ils se montrent le soir, le 
temps changera (E.)- 

L'arc-en-ciel du soir 

Met la pluie en retard (E.). 

Arc-en-ciel du matin, ^ 

Pèlerin, file ton chemin. 



348 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Arc-ea-ciel du sa (soir). 
Pèlerin, défie-U. 

L'arc-en-ciel du matin indique qu'il fera beatv 
temps ; celui du soir, au contraire, présage du 
mauvais temps et de la pluie (S.-C). 

Uarc-en-ciel du matin 

Met la paix en chemin. 

Celui du sa (soir) 

La met dans son bissa' (besace). 

Le sien du midi 

Fait combler la pluie (£.). 

Le lendemain du jour où Ton voit un arc-en- 
ciel, il y aura mauvais temps (P.). 

Superstitions et Croyances 

Quand on voit un arç-en-ciel, on le coupe; 
mais il faut que celui qui le coupe ne Tait pas vu 
ni qu'il ait été prévenu par un autre (S.-C, E.). 
Voici comment on s'y prend : 

On crache dans sa main ; on y met un petit brin 
d'herbe parallèle aux doigts ; on frappe sur lui 
de manière à ce que la main qui frappe forme une 
croix avec l'herbe, et on dit : 

Je te coupe en croix; 
Tu n'reviendras pas. 

A Saint-Cast, parfois on ne dit rien ; il faut 
que le crachat le plus près des doigts saute de la 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 349 



main. En lUe-et-Vilaine, on le coupe en frappant 
trois fois dans sa main gauche avec le coupant 
de la droite. 

Oa conpe l'arc-en-dei par des procédés analogues en Poitou 
■(cf. Souche, Croy.j p. 20), vers Saint-Brieuc, Sarzeau et Morlaix 
(ci. Mil. y col 502). 

Voici quelques formulettes que Ton récite pour 
couper Tarc-en-ciel : 

Carcancié, carcancié, 
Si ta mets tes vaches dans mon blé, 

J'te coupe par la moitié 
Avec mon grand couteau d'acier (S.-C). 

Arcanciel, 
Ne mets pas tes bœufs dans ma luzerne ; 

Je te donnerai du miel. 

Si tu les y mets, 
Tu auras des coups de fouet (S.-C). 

Ergancié, ergancîé, 
Si tu mets tes vaches dans mon blé, 
J*té couperai par la moitié (P.). 

Arc-en-ciel, 
Ta vache a passé dans mes choux. 
Si tu nVas pas la ramener. 
Je vais t'couper tes petits cochons par la moitié (P.). 

C'est quand il commence à se former qu'on 
lui dit cela. 

Sur les nuages assimilés aux vaches, cf. Gubematis, Myth. 
Xool., t. I, p. 1), 17, 8ï. 



350 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

- i - - -- -- -- — - — -- , ^ 

Arc -en-ciel. 

Descends du ciel. 
Les deux bouts dans une fontaine ; 
Si tu n'y descends pas. 
Je te couperai par la moitié 
Avec mon grand sabre d'acier. 

Et de vrai ça le coupe, si on ne Tapas vu (E.)» 

On prend un petit grain de blé dans sa main> 
et on dit : 

Arcanciel, arcanciel, 
Par la vertu de mon petit grain de blé. 
Je veux qi;e tu sois coupé (S.-C). 

On croit que c*est Tarc-en-ciel qui donne de 
Teau. Si Tune de ses extrémités est dans la 
direction d'un étang, et que l'autre y soit aussi, 
c'est signe certain de grande pluie : l'arc-en-ciel 
est allé boire. S'il ne prenait pas d'eau, les nues 
brûleraient; s'il boit, c'est pour calmer sa soif 
(Saint- Au bin-du-Cormier, E., etc.). 

En Poitou (cf. Souche, Croy., p. 28), on croit que les nuages 
vont puiser l'eau de la pluie dans la mer. D'après Tylor, Civili- 
sation primitive ^ p. 336, chez les Karens de Birmanie et chez 
les Zoulous, existe une croyance similaire. Les Latins disaient : 
Bibit arcus. 

LES AURORES BORÉALES 

Les aurores boréales, qui sont assez rares en 
Haute-Bretagne, passent pour annoncer une guerre 
ou un changement de gouvernement (E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE $$t 

LE BROUILLARD 

Noms patois 

Hare (Plouvara, P.); brime, hrimasserie (M.) 
quand il mouille un peu. 

On donne au brouillard le nom de temps au 
loup, parce qu'on prétend que c'est le moment 
que le loup choisit pour ses promenades (E.). 

LES COMÈTES 

Pronostics 

Elles pronostiquent une guerre ou un change- 
ment de gouvernement. Si la queue de la comète 
est tournée vers le couchant, le gouvernement 
ne tardera pas à changer; si elle est virée vers le 
levant, 11 durera encore longtemps (E.). 

Vers Moncontour, elles annoncent une guerre 
ou la fin du monde. 

Mime croyance en Poitou (cf. Desaivre, Croy., p. 37). 

LES ÉCUPSES 

Nom patois. — Présages et Pronostics 

Esclipe (Hénon, P.). 

Si la lune passait sur le soleil, de manière à le 
couvrir entièrement, elle se collerait dessus et Té- 
teindrait ; jamais on ne reverrait sa lumière (E.). 

En beaucoup de pays les éclipses annoncent des événements 
iiinestes (cf. Mil.^ col. 4$6). 



352 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

LES ÉTOILES 
Noms patois 
Ètdîe (E.); éUU (S.-D.); étatîe (M.). 

Devinettes 

a) Devine, devinaille, 

J'ai perdu mes mailles ; 

Je ne peux les retrouver 

Qiie quand le soleil est couché. 

h) Dans le chemin des quat' caillettes. 
J'ai perdu mes maillettes : 
J'y ai été le jour, 
Je ne les ai pas trouvées ; 
J'y ai été la nuit, 
Et je les ai trouvées. 

— Les étoiles. 

Cf. Mél.j coL 259, D. 72 ; Rolknd,.D. ii;. 

Gros comme une pomme qui n'est pas pomme 
Qjie cent mille hommes ne mettraient pas dans une tonne. 

— Une étoile. 

■ 

Croyances et Superstitions 

Une étoile filante indique la sortie du purga- 
toire de Tâme d'un mort (M., E.). 

Croyance analogue en Poitou (cf. Souche, Croy., p. 23); dans 
les Vosges (cf. Mis/., col. 457). 

Si on dit un Pater et un Ave quand passe ane 



V 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 353 

étoile filante, on sauve une âme du purgatoire 
(S.-C). A Monconiour, il suffit de faire le signe 
de la croix. Au Gouray, il faut avoir le temps de 
nommer trois saints avant que Tétoile ait dis- 
paru. 

La vue d'une étoile filante annonce la mort de 
-quelqu'un ; chaque homme a son étoile, qui a de 
l'influence sur sa destinée (voir le conte intitulé : 
La mauvaise étoile, no lxv, 2^ série) (P.). Tou- 
tefois, cette croyance fataliste n'est pas absolu- 
ment générale. 

La même croyance existe dans les Vosges (cf. Mél., coL 4 $7)* 

Quand les étoiles scintillent beaucoup, c'est 
signe de vent, généralement de nord-est. 

Si on voit la voie lactée, — appelée Chemin 
de Saint- Jacques, — c'est un présage de beau temps. 

On dit qu'au temps jadis, pour être pape, il 
fallait voir une étoile en plein midi ; pour être 
cardinal, une à onze heures du matin.. 

Actuellement, celui ou celle qui peut voir une 
étoile entre neuf et dix heures du matin se marie 
dans l'année (E.). 

LE FEU FOLLET, LE FEU SAINT-ELME 

Le feu follet — c'est le feu Saint-Elme — à 
bord des navires est un signe de naufi^age. 
Dans un conte de marins, Véquipage révolté^ 

II 23 



3S4 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

no XLV, le capitaine et un de ses matelots, qui 
ont été assassinés, poursuivent le navire sous la 
forme de deux feux follets. 

Sur le rôle des feux follets dans la superstition, 
cf. le chapitre des Lutins^ et spécialement les pages 
150 et suiv. du ler volume. 

LA LUNE 

Noms patois 

Leune (S.-D., E., M.); elle est dite lune perdue 
quand on ne la voit plus. Le croissant se n<Jmme 
crissent^ le décours décoû. 

Dictons et Pronostics 

Jamais cerne (cercle) à la lune 

N'abattit mât de hune ; 

Mais quand il est au soula. 

Il abat le mât et Téta (Plévenon). 

Si le cerne est dans le crêssent, 
C'est signe de beau temps ; 

Si c'est dans rdécoû, 
C'est d'ia plée sous tras joûs (S.-C), 

On dit que la lune mange les nuages (S.-C). 

Croyance analogue en Poitou (cf. Desaivre, Croy., p. i8). 

Si la lune porte des cornes en égouttant, |c'est 
signe de pluie prochaine (S.-C, M.). 

Même croyance en Poitou (cf. Desaivre, p. 18). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 355 

La lune a, disent les marins, une chaloupe ; 
c'est une étoile qui en est plus ou moins éloignée. 
Qiiand il doit faire mauvais temps, on ne voit 
plus la chaloupe de la lune (S.-C). 

La lune passe aussi pour manger les pierres. 

Superstitions et Croyances 

Les phases de la lune sont observées par les 
paysans qui, en général, ensemencent ou fument 
leur terre dans le décours. C'est aussi à cette 
époque qu'on fait le meilleur cidre. 

Cf. des superstitions similaires en Poitou (cf. Souche, Croy., 
p. 12 et 23) ; dans l'Orne (MéL, col. 9;) ; dans les Vosges 
(i«rf., col. 458). 

Si on coupe les ongles dans Tcrêssent, 

Faut les couper souvent. 

Coupez-les dans rdécoû, 
Vous ne les couperez pas beaucoup (S.-C). 

On coupe aussi les cheveux dans le créssent de 
la lune. 

Superstition analogue dans les Vosges (Mil., col. 453). 

Le pain est meilleur dans l'crêssent de la lune. 

Les verrues suivent les phases de la lune ; elles 
grossissent avec elle et disparaissent en lune 
perdue (E.). 

Pour voir en songe la personne que l'on doit 
épouser, il faut, le premier vendredi du créssent, 
dire cinq Pater et cinq Ave dans le premier en- 



356 IRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

droit venu, en regardant le crêssent, puis jeter 
sans regarder dans la direction du crêssent ce 
qu'on trouve sous sa main, en disant : 

Petit crêssent. 

Verbe blanc, 
Fais-moi voir en mon dormant 
Qjii j'aurai en mon vivant. 

On se met ensuite au lit en y entrant du pied 
gauche ; on se couche sur le côté gauche, et on 
récite, jusqu'à ce qu'on s'endorme, des prières 
pour les âmes du purgatoire (E.). 

Cf. dans Mél., col. 220, nne formtilette assez semblable de 
Saône-et-Loire. 

On montre aux petits enfants, lors de la pleine 
lune, l'homme qui porte sur ses épaules un fagot 
d'épines. C'est en punition de vols commis qu'il 
a été condamné à se promener ainsi jusqu'au 
jour du jugement. D'après certains récits, il aurait 
volé des faunilîes ou faguiîles (fagots de menu 
bois), du beurre, etc. 

Cf. L'homme dans la lune^ n» lxiv des ConUs des paysans el 
des pêcheurs; cf. aussi Bladé, Sei:^e sup., L'homme dans la lune, et 
les contes de Cerquand, Carnoy, portant le même titre. 

LA NEIGE 

Noms patois, — Devinettes 
Nage{E.,F.);nige(M..). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 357 

a) Qui est-ce qui couvère (couvre) ben la ville de Paris, 
Et qui n*sarait couvri' le haut d'un puits? (Trélivan.) 
Cf. Rolland, D. 12 ; Sauvé, D. 19. 

h) Qui couvère Paris et Nante 

Et qui n'peut pas couvri* Peau courante ? (E.) 

— La neige. 

Pronostics. — FormuUttes 

Quand on a/r«/ (froid) au talon, c'est signe de 
neige (E.). 

S'il neige, on dit : 

Voilà saint Nicolas 
Qui plume ses houâs. 

V^à la petite bonne femme 
Q}ii plume ses houâs (M.). 

Saint Thomas qui plume ses houâs, 

Saint Christophe 
Qui les met à la broche, 

Et saint Crépin 
Qui les mange au matin (D.). 

A Saint-Cast, on dit que c'est le bon Dieu qui 
plume SQS oies. Quand il tombe des marteaux 
ou martiaux (gros grêlons), on dit que ce sont 
leurs os que le bon Dieu jette. 

Cf. le breton maniçlioUf qui a le même sens. 

S'il neige beaucoup, on dit : « Ah l cela chet 
ben ; il a d 's ouvriers à li aider » (P.). 



358 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Les blancs vont gagner, i' couvèrent les arb'es. 

C'est une plaisanterie que Ton fait quand la 
neige tombe beaucoup (E.). On dit aussi : « Tous 
les diables sont habillés en blanc » (E.). 

Si la neige ne fond pas, on dit qu'elle attend 
celle qui doit venir (E.). 

L'ORAGE 

Nom patois, — Dicton 

Aurage, Le verbe ^aurager existe aussi (E.). 

Qpand il tonne ent' la Cateline et Noué, 
L'hivée e^t avorté (M.). 

Devinette 

Dans mon pré j'ai un puits, dans mon puits 
j'ai un seau, et dans mon seau j'ai un coq ; 
quand il chante, on l'entend par toute la France 

(P.). 

— C'est le tonnerre. 

Croyances et Superstitions 

On prétend qu'un orage d'été dure neuf jours. 

Quand le temps est à l'orage, les éphémères 
piquent plus dur (E.). 

Le tounaire est très-redouté des paysans ; aussi 
ont-ils pour s'en garantir nombre de préservatifs. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 359 

les uns Orthodoxes, d'autres d'origine préhis- 
torique. 

. Quand il tonne, on allume dans la maison un 
cierge bénit à la Chandeleur (M., D.). 

Même contame en Franche-Comté (cf. Mil,, col. 346). 

Le laurier ou le buis des /Rameaux préserve 
aussi du tonnerre (E.). 

Croyance analogne dans les Vosges (cf. Mil., col. 4$4). 

Les tisons ramassés dans les feux allumés à la 
Saint-Jean ou à la Saint-Pierre préservent aussi 
de la foudre. Qjaand il tonne, on leur dit : 

Tison de Saint-Jean et de Saint-Pierre, 
Garde-nous du tonnerre. 
Petit ti«)n, 
Tu seras orné de pavillon (S.-C.). 

On ramasse aussi un fragment de la bûche de 
Noël, qui a la même vertu préservatrice que les 
tisons de la Saint-Jean (P.). 

On prend aussi à la main une chandelle bénite 
qu'on allume en récitant la formulette de Sainte- 
Barbe, etc., et l'on met une feuille de laurier 
bénit sur le bénitier (Moncontour). 

Il existé contre la foudre des conjurations assez 
nombreuses : 

Sainte Barbe, sainte Fleur, 
La couronne de Notre-Seigneur, 
Quand le tonnerre tombera, 
Sainte Barbe nous gardera (S.«C.). 



360 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

Sainte Barbe, 
Sainte Claire, 
Préserve-moi du tonnerre (D.)« 

Sainte Barbe, sainte Fleur, 

La couronne de Notre-Seigneur, 

Qjaand le tonnerre tombera, 

Sainte Barbe me conduira 

 la porte du paradis. 

Pour avoir du pain bénit (Saint-Brieuc). 

Ce dernier vers est ajouté par quelques per- 
sonnes ; d'autres, après « quand le tonnerre tom- 
bera », se contentent de dire : « Sainte Barbe 
nous préservera ». 

Cf. Mil.f col. 569. 

Il y avait autrefois des gens qui mettaient dans 
leurs poches des pierres de tonnerre quand le 
temps était à Torage et qui récitaient, s'il tonnait^ 
une oraison en l'honneur de la pierre. £n voici 
deux qu'on leur adresse encore maintenant : 

Pierre, Pierre, 
Garde-moi du tonnerre (S.-C). 

Sainte Barbe, sainte Fleur 
A la croix de mon Sauveur, 
Partout où l'tonnerre ira 
Sainte Barbe nous gardera : 
Par la vertu de cette pierre, 
Que je sois gardé du tonnerre (E.). 
Cf. sur les pierres à tonnerre la p. 50 du t. I. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 361 

Le tonnerre ne tombe jamais sur une maison 
où se trouve une femme enceinte (M.). 

La soie préserve aussi de la foudre. Quand un 
paysan a une cravate de soie et qu'il tonne, les 
autres lui disent : « Le tonnerre ne va pas te 
frapper; tu as de la soie sur toi » (environs de 
Bécherel). 

Si on a sur son chapeau une branche de laurier 
bénit, on peut se promener sous Torage en toute 
sécurité (Hénon). 

Le tonnerre ne tombe pas sur l'épine blanche,, 
parce que c'est avec ses épines qu'a été faite la 
couronne de Notre-Seigneur (P., E.) ; c'est à cette 
circonstance que fait peut-être allusion l'oraison : 
a Sainte-Fleur à la Croix, etc. » 

Même croyance dans les Vosges (cf. Mil., col. 478). 

Lorsqu'il se trouve près d'un village une épine 
blanche placée à côté d'une croix, au commence- 
ment de l'orage les gens vont chercher une 
branche de l'épine qu'ils placent dans leur maison 
pour empêcher le tonnerre de tomber dessus (P.). 

LA PLUIE 

Noms patois 

Plée (M., E., P.); piée (P., S.-D.). 

On appelle cahée (P.) une ondée violente;. 



362 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 

£uiîii (M.), brimasseriey une petite pluie; une 
venée (yesse) de mère (P.), une pluie qui ne du- 
rera pas. 

Proverbes et Dictons 

Qjiand i' plent et que nordée vente, 
C'est un hasard si ça y étanche. 

Pléc en février 
Vaut du fumier. 

Pluie du n^atin 
N'empêche pas Tmoîne d'aller au grain (S.-C). 

Qpand il fait de la pluie et du soleil en même 
temps, on dit : « V'ià le diable qui bat sa femme » 
{M., S.-D.). Quand il pleut fort, on dit : « La 
pouche (le sac) est déliée ». 

Aux articles ÉphémèreSy Grenouilles, Crapauds^ 
Chats, Canards, Hirondelles, Merles, Corneilles, 
Araignées^ Piverts, Demoiselles, j*ai parlé des pro- 
nostics de pluie. 

Si on a ses poches, sa chemise ou. sa jupe à 
Tenvers, il faut se hâter de les retourner ; sans 
cela, il ne tarderait pas à pleuvoir (S.-C). Si le 
tabac sort de la pipe allumée, si Thorloge sonne 
d'un air enroué, la pluie est prochaine. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 365 



LE SOLEIL 

Noms patois 

SauîaQA.); souU (P.); sourè (S.-iD.); s'essou- 
reiîîery se chauffer au soleil (S.-D.). 

Dicton et Pronostics 

— Quand on parle du soleil, on en voit les 
rayons. 

Le soleil rouge signifie vent ; le soleil blanc, de 
la neige ; s'il a des jambes, c'est signe d'eau. 

On dit que le soleil a des jambes ou des tirants^ 
quand il y a en dessous des rayons qui semblent 
toucher la terre. 

LES VENTS 

Noms patois 

Nord, naure (S.-C.) ou mistrau\ Sud, su; Est, 
eèste ; Ouest, houaste^ du houaste ; Nord-Est, nordée ; 
Nord-Ouest, norouds ; Sud-Est, suée ou suète; Sud- 
Ouest, surouds ; à Ercé, ce vent s'appelle vent de 
galène. 

Devinette 

Qjii va de branche en branche 
Et de Paris en France ? (E.) 

— Le vent. 
Cf. Bkdé, D. 38-41. 



364 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Proverbes 

— Surouâs est charretier pour tous marins 
(S.-C). 

Qjiand le vent saute du sud au nord, 

Plie ta voile et dors ; 
Mais quand il saute du nord au su', 

Prends garde à lu (Plévenon). 

Qjiand i* pleut et qu'nordée (nord-est) vente, 
Cest un hasard si ça y étanche (S.-C, P.). 

— Sec comme le vent de nordée (nord-est) (E.)- 

Vent du nord perdu, 
Cherche-le dans le su (S.-C). 

— Le vent tourne le eu en galère ; i* fera vilain 
demain (£.). 

— Norouâs mange l'orage (S.-C). 

— Quand le vent vente, il faut venter (ventiler) 

(P.). 

Croyances et Superstitions 

On envoie les enfants chercher la corde à 
tourner le vent (E., M.). 

Le vent qui règne les douze premiers jours de 
Tannée est celui qui régnera pendant chacun des 
douze mois, janvier correspondant au le*", février 
au 2, etc. Il en est de même pour le brouillard 
(E.). 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 36$ 

En Normandie, ce sont les douze jours après Noël (cf. MU., 
■col. 14) ; mais dans la Suisse allemande (MH.^ col. 128), ce sont 
les douze premiers jours de l'année. 

A la Saint-Denis, là où le vent se couche le 
soir, les trois quarts de Tannée il est (E.). 

Le vent qui souffle le dimanche des Rameaux 
pendant Tévangile est celui qui dominera le reste 
de Tannée; aussi beaucoup de gens sortent à ce 
moment pour voir de quel côté est tourné le coq 
<iu clocher (S.-C, E.). 

Ailleurs le vent tourne au moment où Ton 
frappe les trois coups à la porte avec le bâton de 
croix. 

Quand on voit les oies battre des ailes et 
câquer (S.-C), si les cu-blancs rasent la terre 
(S.-C), quand les mouettes battent des ailes au- 
dessus des maisons (S.-C), on peut être sûr qu'il 
y aura du vent. 

Les trombes de vent sont Tœuvre du diable, qui 
les pousse avec ses cornes (P.). 

Les grands vents sont un présage de malheur. 

Dans mes contes de marins, il y a tout une 
série de légendes où figurent les vents personnifiés. 
Cest en général quelqu'un^ dont le vent a en- 
levé la récolte ou les filets, qui va trouver 
Tauteur du mal, et, en lui faisant peur, obtient 
de lui des présents. 

En 1880, les Terre-neuvats avaient vent debout 



pour revenir; depuis longtemps ils étaient en mer, 
et l'inquiétude était grande dans les ports de la 
Manche. J'ai vu des hommes cracher du càté ofi 
soufBidt le vent contraire, lui adresser les noms 
les plus injurieux et lui montrer leurs couteaiut 
en le menaçant de l'étriper. A l'exemple des 
hommes, les petits enfants en faisaient autant. 



ADDITIONS ET CORRECTIONS 



P. 6. Au lieu de : bardo^ fém.; bardochCf fèm.; lire : bardo 
lÊOisCf hardoche, bardùhe, fém. 

P. 21. Au Ueu de : conraie, lire : conraies. 

P. 26. Au lieu de : euhendery lire : enbeuder. 

P. 29. Au lieu de : heilkf lire : heille. 

P. 87. Kote, au lieu de : Nouvelles réalisieSy de M. Pouvillon, 
lire : Césefte. — M. Rolland, dont la monographie du cochon a 
paru pendant l'impression de ce livre, et que je n'ai pu utiliser 
pour mon commentaire comme celle du hceuf, dont j'avais eu 
les bonnes feuilles, dit aussi avoir entendu ce conte. 

P. 99. Loir est aussi un des noms du lérot. 

P. 148. Au lien de : elles deviennent, lire : ils deviennent. 

P. 179, 1. 10. Au lieu de : écoute:^ lire : Âvurfeç. 

P. 209, 1. 9. Lire : Quand l'homme est sur le point de se 
coucher, le rouge-gorge lui dit... 



P-^ 



TABLE DES MATIÈRES 

DU DEUXIÈME VOLUME 



DEUXIÈME PARTIE 

LES ANIMAUX, LES PLANTES ET LES MÉTÉORES 

'Chap. I. Les Mammifères domestiques 5 

Chap. n. Les Mammifères sauvages • • 88 

Chap. III. Les Oiseaux domestiques 124 

Chap. IV. Les Oiseaux sauvages 145 

■CuAP. V. Les Reptiles 216 

Chap. VI. Les Poissons 24; 

Chap. vil Les Insectes. ............. 277 

■Chap. VIII. Les Arbres 308 

Chap. IX. Les Plantes 32; 

Chap. X. Les Météores 347 

Additions et corrections 367 




II ~ 24 



PRINCIPAUX OUVRAGES CONSULTÉS 

POUR LES RÉFÉRENCES 



Adam (Lucien). Les patois lorrains. Maisonneuve, 1881, 
in-8. 

Amezeuil (Ch. d*). Légendes bretonnes, souvenirs du 
Morbihan. Dentu, 1863, in-i8. 

Babou (Hippolyte). Les pmens innocents. Charpentier, 
1878, in-i8. 

Barbet d'Aurevilly. L'Ensorcelée. Leraerre, 1879, petit 
in-i2. 

Baron Dutaya. Brocéliande, ses chevaliers et quelques 
légendes. Rennes, 1859, petit in-8. 

Bladé (J. F.). Contes populaires recueillis en Agenais.BsLcr, 
1874, in-8. 

— Sei^e superstitions populaires de la Gascogne. Agen, 188 1 . 
(Tiré à 50 exemplaires.) 

— Proverbes. Champion, 1880, in-8. 

Bosquet (Amélie). La Normandie romanesque et merveil- 
leuse. Techener, 1845, petit in-8. 

Calmet (Dom). Dissertation sur les apparitions^ les rame- 
nants et les vampires. De Bure, 1756, in-12. 

Cambry. Voyage dans le Finistère, éd. Fréminville. Brest, 
Lefournier, 1836, in-8. 



372 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Carxoy (Henry). Contes populaires picards, petites légendes 
et croyances populaires. (Dans Romania, n** 30, p. 233- 
263.) 

Cartailhac (Emile). L'âge de pierre dans les souvenirs 
et superstitions populaires. Reinwald, 1878, in-8. 

Cayla (J. M.). Le diable, sa graruUur et sa décadence, 
Dentu, 1864, in-i8. 

Cerny (Elvire de). Saint-Suliac et ses traditions. Dinan, 
Huart, 1861, in-8. 

Cerquand. Légendes et récits populaires du pays basque (en 
trois parties). Pau, 1874-1878. 

CoRDiER (Eugène). Les légendes des Hautes-Pyrénées. Ba- 
gnères, Cazenave, 1878, petit in-12. 

Daleau (F.). Observations sur les légendes des monuments 
préhistoriques. Congrès pour l'avancement des sciences, 
tenu au Havre, 1877. 

Danjou de la Garenne. Statistique des monuments cel- 
tiques de l'arrondissement de Fougères, dans Mém. de la 
Soc. arch. d'Ille-et- Vilaine). 1862. 

Desaivre (Léo). Sur les sorciers et les devins. — Croyances, 
présages et traditions, 1881. — Le Noyer et le Pommier, 
1880. — Formulettes, i88i. — Études de mythologie 
locale, 1880. Cinq brochures in-8. Niort, Clouzot, 

Ducrest de Villeneuve. Le château et la commune. 
Rennes, 1842, in-i8. 

Dcjlaurens de la Bar&e. Les veillées de VArmor. 
Vannes, Cauderan, 1857, in-12. 

— Fantômes bretons. Paris, Dillet, 1879, in-12. 

Duval (Louis). Esquisses marchoises. Champion, 1879, 
in-8. 

— Gargantua en Normandie. Alençon, 1880, in-8. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 573 



Ernoul de la Cheneuêre. Inventaire des monuments 
mégalithiques du département des Côtes-du^Nord, Saint- 
Brieuc, 1881, in-8. (Extrait des Mémoires de la Société 
d'émulation.) 

Évangile des quenouilles. Paris, Jannet, Bibliothèque 
elzévirienne, in-i6, i8<j-5. 

Féval (Paul). Les dernières fées. M. Lévy, in-12. 

FouQUET (D'). Légendes du Morbihan. Vannes, Cau- 
deran, 1857, in-12. 

— Des monuments celtiques dans le Morbihan. Vannes, 
1853, in-8. 

Galerie bretonne. Nantes, Charpentier, in-i8. 

GouDÉ (le chanoine). Histoires et légendes du pays de Châ- 
teauhriant. Châteaubriant , Drouart-Frémont , 1879, 
in-8. 

GuBERKATis (A. de). Mythologie T^oologique. Pedone-Lau- 
riel, 2 vol. in-8. 

Guionvac'h. Études sur la Bretagne, par L. Kerardven 
(L. Dufilhol). Ebrard, 1835, in-8. 

GuiLLOTiN iJe Corson. Récits historiques, traditions et 
légendes de la Haute-Bretagne. Redon, Guillet, 1870, 
in- 18. — Statistique historique et monumentale des can- 
tons de Bain, Redon, etc. (Mém. de la Société archéolo- 
gique d'IlU-et-Vilaine), 1866-78. 

Guyot-Jomard. Petite Géographie du Morbihan. Vannes, 
Galles, 1867, petit in-12. 

Habasque. Notions historiques sur les Côtes- du -Kord. 
Saint-Brieuc, Guyon, 1833-1837, in-8. 

JoujVET (B.).Les Câtes-du-Nord, histoire et géographie. 
Guingamp, B. Jollivet, 1854 et suiv., in-8. 



374 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Laisnel de la Salle. Légendes et Croyances du Centre. 
Cliaix, 1876, a vol. in -S. 

Légier. Superstitions de la Sologne. (Mém. de l'Académie 
celtique, t. II.) 

Le Men (R. F.). Traditiotts et superstitions de la Basse- 
Bretagne {Revue celtique) yt.l" {p. 226-242 et 414-435). 

Lespy. Proverbes de Séarn. Maisonneuve, 1876, in-8. 

LouANDRE (Ch.). La sorcellerie. Hachette, 1853, in-i8. 

Luzel. Chants populaires de la Basse-Bretagne, t. I". Lo- 
rient. Corfmat, 1868, in-8. 

— Veillées bretonnes. Champion, 1879, in-ï8. 

— Légendes chrétiennes de la Basse- Bretagne. Maison- 
neuve, 1882, 3 vol. petit m-8 écu. 

Martinet (L.). Légendes et superstitions du Berry. Bour- 
ges, 1879, in-i2. 

Matériaux pour V histoire primitive et naturelle de l'homme, 
Reinwald, 1865-188 1. 

Mélusine. Recueil de mythologie, littérature populaire, tra- 
ditions et usages, publié par H. Gaidoz et £. Rolland. 
Viaut, 1878^ in-4 à 2 colonnes. 

MoNNiER (Désiré) et Vingtrinier. Croyances et tradi- 
tions populaires recueillies dans la Franche-Comté, le 
Lyonnais, la Bresse et le Bugey. Lyon, G«org, 1874, 
in.8. 

MoRiN (A. S.). Le prêtre et le sorcier. Le Chevalier, 187a, 
in-i8. 

NoEL DU Fail. Œuvres facétieuses, éd. Assezat. Jannet, 
2 vol. in-i6, 1874. 

Ogée (J. B.). Dictionnaire géographique de la province de 
Bretagne. Nouvelle édition. Rennes, MoUiex, 1843- 
1853, 2 vol. grand în-8. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 375 



Perron ÇD'). Proverbes de la Franche-Comté. Champion, 
1876, in-8. 

Réalité de la magie et des apparitions ou contre-poison du 
Dictionnaire infernal. Brajeux, 1819^ in-8. 

Restif de la Bretonne. Les contemporaines par grada- 
tion, Lemerre, 1^75) in-i6. 

RoBioou (6.). Histoire et panorama d'un beau pays. 
Dinan, Bazouge, 1853, 2 vol. in-8. 

Rolland (Eugène). Faune populaire de hi France (t. I*', 
Les mammifères sauvages; t. II, Les oiseaux sauvages; 
t. III, Les reptiles, les poissons et les insectes; t. IVet V, 
Les mammifères domestiques). Maisdnneuve, 1878- 1882, 
in-8. 

— Devinettes. Franck, 1878, in-12. 

Salmon. Répertoire archéologique de l'Yonne (Mém. de la 
Société archéologique de l'Yonne). 

Sand (Georges). Légendes rustiques. Michel Lévy, in-12. 

Sarcaud. Contes et légendes du Bassigny-Cbampenois.]. B. 
Dumoulin, 1881, in- 18. 

Sébillot (Paul). Contes populaires de la Haute-Bretagne, 
1" série. Charpentier, 1880, in-i8. 

— Littérature orale de la Haute-Bretagne. Maisonneuve, 

1881, petit in-8 écu. 

— Contes des paysans et des pécheurs, 2* série des Contes 
populaires de la Haute-Bretagne. Charpentier, 1881, 
in-i8. 

— Contes de Marins, 3* série des Contes populaires de la 
Haute-Bretagne, Charpentier, 1882, in-i8. 

Souche (J. B.). Croyances, présages et superstitions diverses, 
1880. — Proverbes, traditions diverses et conjurations, 

1882. 2 broch. in-8. Niort, Clouzot. (Extrait des 



376 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



Bulletins de la Société de statistique, etc., des Deux- 
Sèvres.) 

SouvESTRE. Le foyer breton. M. Lévy, 2 vol. in-12. 

— Les derniers Bretons. M. Lévy, 2 vol. in-12. 

— Les derniers paysans. M. Lévy, in-12. 

Theuvenot. Notes sur quelques monuments ênciens de la 
Manche, de Vllle-et-Vilaine, ttc. (Extrait des Comptes- 
rendus de la Société française d'archéologie. Congrès du 
Mans et de Laval, 1878.) 

Thiers (J. B.). Traité des superstitions. Antoine Desso- 
liers, 1679, in-12. 

Webster (W.). Basque Legends. London, Griffith, 1877, 
in-8. 




TABLE ANALYTIdUE 

DES MATIÈRES CONTENUES DANS LES DEUX 

VOLUMES 



Introduction. 



PREMIÈRE PARTIE 

L*HOMME, LES ESPRITS ET LES DÉMONS 

Chapitre I. — Les monuments préhistoriques. 3-44 

5 I. Noms que portent les mégalithes S 

5 IL Les constructeurs des mégalithes. (Les fées. — Gar- 
gantua. — Les saints. — Le diable.) 9 

$ III. Légendes et croyances qui s'y rattachent. (Les 
géants. — Les fées. — Les lutins. — Les re- 
venants. — Personnages enterrés. — Pierres qui 
grossissent. — Il est dangereux de leii détruire. 
— La roche Saint-Guillaume. — Pierres qui vont 
boire certains jours. — Le diable et les méga- 
lithes. — Les trésors enfouis; quand et com- 
ment ils se découvrent.) 26^ 

Chapitre II. — Le culte des pierres, des 
arbres et des fontaines • . . 45-72 

5 !• Culte des pierres. (11 est clandestin ; pierres sur les- 
quelles on se laisse glisser pour se marier promp- 



378 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



tement. — Saints, tombeaux auxquels on se frotte 
ou sur lesquels on marche. — Les pierres à ton- 
nerre préservent des maladies et de la foudre.). . 48 

§ II. Culte des arbres. (Arbres vénérés; arbres dont 
i'écorce guérit; Le chhte rosi (i). — Arbres de la 
liberté. — Arbres qui, en raison de leur espèce, 
ont des vertus curatives ou prophylactiques. • $8 

§ III. Culte des fontaines. (Fontaines où on lave les en- 
fants; qui guérissent de la fièvre, etc.; qui sont 
consultées comme augures ; auxquelles on se rend 
pour obtenir de la pluie. — La fontaine prés de 
laquelle on élisait les chefs.) ^S 

Chapitre III. — Les fées 73-125 

Leurs noms, leur portrait, leur costume, leur race ; fées 
exorcisées ; à quelle époque elles ont disparu ; La 
bonne femnu qui a vu les fées ; quand elles reviendront. 73 

§ I. Les demeures des fées (les tertres, les mégalithes, 
lés gros blocs naturels, les eaux, les houles on 
grottes de la mer). 86 

5 II. Les travaux des fées (étang creusé, château et 

chapelle qu'elles ont bâtis) 86 

5 III. Les fées et les hommes. — A. Les fées des houles. 
(Importance de ce groupe ; résumé des contes qui 
s'y rattachent, montrant leur manière de vivre, 
les services qu'elles rendaient aux hommes, et 
comment elles punissaient ceux qui leur avaient 
manqué; raison de la conservation de ces lé- 
gendes. — Les fions qui vivaient avec elles. — 
Les fions du pont is Hommes nies. — Les fées de 

la mer et les sirènes.) 88 

6. Les Margot la fée. (Elles habitaient des grottes 
ou des mégalithes, venaient étaler leurs trésors, 
• 

(i) Les mots en italique désignent les cont9s et les eédts de 
«quelque importance. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 37^ 



danser la nuit, etc. — La fie et Us deux filies. — < 
Elles avaient besoin du secours des hommes; ce 
qu'on leur offrait. -— La filleule des Margot. — 
Elles étaient secourables et faisaient des présents ; 
elles punissaient ceux qui étaient trop avides. — 
Jean Sfnier et la fée. — L'homme qui Us vit vanner 
de l'ar. — La Fée lavandière, de nuit. — La fée d 
la maison. — Enlèvements d'enfants : L'enfant 
changé. — Les Bœu& des Margot.) 10$ 

C. Autres fées terrestres. (Fées accouchées. — La 
fée qui aide la fermière. — Les fées de Saint-Di- 
dier étaient secourables, mais ensorcelaient parfois 
les gens.) 120 

Chapithb IV. — Les lutins laé-i^ô 

Bien qu'ils n'aient pas entièrement disparu, on ne les 
voit plus guère ; leurs noms ; où ils se montrent, — Les 
lutins sont capricieux ; parfois ils rendent service à 
certaines conditions : Le lutin dont il faut deviner U 
nom. — Méfaits des lutins dans les maisons. — Les 
fdlets et Us vieilles filles. — Le lutin qui se chauffe. — 
Les follets qui enlèvent l'odorat. — LesfolUts et la vache. 
— Le paquet de fil lutin. — Les lutins voleurs de pommes 
de terre 116 

5 L Les diflt^rentes espèces de lutins. Le lutin des écu- 
ries ou Petit-Jean ; ses espiègleries ; il brouille les 
crins des chevaux et foule les garçons 141 

Le Faudoux se couche sur la poitrine des gens. 
Moyens de le chasser. <— Comment une honne femme 
s^en débarrassa. — Roulié et le Faudoux ^ etc. . . 144 

Le Houpoux se plait à attirer les gens par son cri. 148 

L*Êclaireur ou Éclairons ; c'est un prêtre qui a perdu 
son hostie; plus généralement un lutin qui se 
venge si <» ne lui parle pas poliment x$o 

Nicole ou le lutin de k mer, ancieii garde>pftche 
qui, après sa mort, se plaît à faire end&ver les pè- 



380 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



chenrs; où et comment il apparut; quelques-uns 

de ses tours» 15^ 

Lutins divers : le Ronjous, le Faux singe, le Veau 
blanc, la Bète blanche, la Guenne 157 

$ n. Les animaux lutins. (Ils peuvent, de même que ceux 
du pays breton, prendre une multitude de formes ; 
voir pour les détails les monographies des mam- 
mifères (a* vol.); Mourioche, lutin-protée. Contes 
où il figure : L'ivrogne et Mourioche. ~ Mourioche 
blessé, — Mourioche et le tailleur. — Mourioche et 
le fermier, etc. La Fausscrole, forme voisine de 
Mourioche. — La marie et les paysans. — L'homme 
de Calorguen et la bête blanche. — Malfaiteurs qui 
exploitent la croyance aux lutins.) 159 

$ III. Comment on se préserve du lutin (par l'eau bé- 
nite; en lui donnant un ouvrage qu'il ne peut 
accomplir avant le chaut du coq; en le brûlant; 
en lui montrant la fourche à charrue, etc.). . . 174 

Chapitre V. — Le diable 177-202 

Ses noms et surnoms ; sa bonne foi; ses déguisements; 
comment il s'en va ; contes cités . Il est dangereux de 
l'invoquer. 177 

§ I. Le diable parieur et lutteur; est trompé par saint 
Michel; mais dupe Gargantua. — Le diable et le 
charretier , i8x 

5 IL Les pactes; comment ils se font; comment le 
diable compte. — Le fermier qui promit impru- 
demment. — , Le diable qui doit porter dans l'air f ou 
transporter où l'on voudra. —- Le diable faucheur : les 
pactes sont rompus qiund le démon ne peut rem- 
plir une des conditions. — Le diable à la Garaye. 
Le diable et les marins 184 

$ III. Le diable et les danseurs. — Le diable et le rec- 
teur. — Lg diable à l'auberge, etc. ; quand il est 
exorcisé, il s'en va en vent ; ses ravages 192 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 381 



§ IV. Les descentes aux enfers. Contes cités. — Le mari 
qui alla voir sa femme en enfer. — La fiancée par- 
jure. — Le reçu cherché en enfer. — Les chanteuses 
enlevées. — Le mort emporté par le diable 197 

•Chapitre VI. — Les apparitions nocturnes. 203-220 

La crainte de la nuit; esprits qui s'y montrent ou qui 
parlent. — Le paysan et le poteau télégraphique. . . , 203 

§ I. Le char de la mort; par qui K est traîné; où il 
va et comment il se présente; la Grand' Cher- 
rée, la brouette de la mort 208 

5 II. Les châsses et les cierges errants. Ce que .présa- 
gent les châsses posées sur les échaliers. — La 
lavandière et la châsse. — Les châsses et les garçons. 
— Les cierges errants : Le cierge brisé 211 

5 IIL Les hommes blancs et les dames blanches. — La 

dame blanche de Moncontour 21$ 

§ IV. Les filandières de nuit. — Jeanne Malobe. — La 

fille qui veille trop tard 217 

§ V. Les chasses fantastiques : le chariot de David, la 

chasse Saint-Hubert, la chasse Arthu' 219 

Chapitre VII. — Les revenants 221-272 

Où ils apparaissent : prés des anciens châteaux, sur les 
champi de bataille, prés des croix. — L'homme qui est 
brûlé par les morts. — La nuit de la Toussaint : Celui 
qui frappa une châsse le jour des Morts 221 

5 I. Pourquoi et comment se présentent les revenants. 228 

A. Revenants qui viennent demander des messes ' 
ou l'accomplissement à leur place d'un vœu. {Le 
voeu à Sainte-Anne. — La neuvaine promise. — La 
messe demandée.') 230 

B. Revenants qui viennent demander qu'on paie 
une dette contractée par eux. (Le mort et la fille 

de saint Sulpice. — Le revenant à la messe). ... 235 



381 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



ludtiii 11 sipslnue. {Vu-fimi 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 3%. 



hfouée dé vent. — Moyen de se préserver des sorts ; 
d'en obtenir des avantages. — Les somnambules.) 274 
5 n. Les loups-garoirs et tes hommes transformés en 
bêtes. (Pourquoi et comment on devient loup' 
garou; comment on cesse de Tètre. — L'homme 
qui prend toutes sortes de formes. — Le Bouchier du 
Ptd. — Les gens qui vomissent des pattes de chien. 

— Le domestique loup-garou. — La truie noire. — 
Le coureur de guêrou. — Les meneurs de loups. — 
Les bouteilles qui transforment.) 2%^ 

§ IIL Les animaux sorciers 298- 

5 IV. Les livres des sorciers. (Le livre de Salomon. — 
Le Petit Albert. — La servante du recteur. — Le 
diable et le Petit Albert (deux récits). 7 50a 

Chapitre IX. — Dieu et la Vierge. . . 305-318 

Rôle de Dieu et de Jésus-Christ dans les contes; 
analyses du Mariage de Jean le Diot et de Saint 
Pierre en voyage. Contes analysés. — Légende de 
Rieux. — La Vierge a pris la place des fées; la 
substitution est plus ou moins apparente. •— Contes 
cités où sont montrés les degrés dans la manière 
dont les conteurs substituent la Vierge aux fées : 
Les deux frères, — Le pas de la Vierge. — La 
Vierge et les lavandières de Josselin 30$ 

Chapitre X. — Les saints et les moines. 319-344 

5 I. Les saints. (Il y a moins de saints populaires qu'en 
Basse-Bretagne; pourtant il circule des légendes 
à leur sujet. — Le fossé de saint Aaron ; la Légende 
de saint Mauron (extrait). — Saint Roux. — Le 
chemin de sainte Blanche, le chemin de saint 
Jacques. — Statues qui reviennent d'elles-mêmes. 

— Saint Michel et le diable. — Les vengeances des 
saints. — Saints canonisés par le peuple : saint 
Lénard, la sainte de Chasné, saint Carapibo, la 



384 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



tombe k la fille, la tombe de rémigrë. — Divinité 
païenne devenant un saint : Vénus et saint Vénier. 
*- Les empreintes de saints -{ saint Cast, saint Mi- 
chel, saint Cieux, etc.) f • • 319 

5 IL Les moines. (Ils sont représentés comme débauchés 
et impies. — Les moines de Bosquen. — Les moines 
et la jeune fille. — Trésors des moines.) .... 337 

Chapitre XI. — Les souvenirs historiques. 345-384 

Leur petit nombre ; leur confusion 34; 

§ I. Personnages populaires : Arthur, Gilles de Bre- 
tagne, Duguesclin, la duchesse Anne ; anecdotes 
relatives à cette princesse 347 

5 IL Anciens châteaux, anciens seigneurs. — Les trésors 
cachés; les souterrains énormes; revenants des 
châteaux ; souvenirs de seigneurs cruels : Le sire 
de l'Angevinais. — Le moine de Saint-Aubin. — 
Légende de Gourmalon. — Les droits féodaux , . 351 

5 IIL Villes englouties, cataclysmes, villes disparues. — 
^engloutissement de la forêt de Scissey. — Le Juif- 
Errant 361 

5 IV. Guerres avec l'étranger. — Souvenirs confus; la 
descente des Anglais en 1758. — La Vierge du 
Temple. — Les Prussiens. — Les corsaires : chan- 
son. — Les pontons ; les évasions. — Légende 
napoléonienne 367 

5 V. Guerres civiles. La Ligue. — Les Fondebonds; li- 
gueurs et huguenots. — La chouannerie ; récit. 
— Pétaud. — Montignè 381 

Les chouans. Prêtres fusillés; l'herbe ne pousse plus 
sur le lieu de l'exécution 381 



*84- 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 385 

DEUXIÈME PARTIE 

LE» ANIMAUX, LES PLANTES ET LES MÉTÉORES 

Chapitre I. — Les mammifères domestiques. 3-87 

5 I. GéMÉRAUTÉS 3 

5 II' Monographies. -^ L'âne. — Noms. Pixn'erbes. Su- 
perstitions. — L'âne dans les contes 6 

Le bélier. — Noms patois. Proverbes. Supersti- 
tions. — Les moutons lutins. — Le mouton errant. 

— Le mouton et l'eau bénite. — Mourioche-mouton. 

— Vieux loup et ses moutons ix 

Le bœuf. — Noms patois. Langage qu'on lui 
adresse. Noms propres. Proverbes. Devinettes. 
Superstitions et croj'ances. — Bœufs lutins. — La 
carrière de vaches. —Les bœufs et la nuit de Noël. 

— Le bœuf dans les contes , 20 

Le chat. — Noms patois. Proverbes. Devinettes. 
Superstitions. — Les chats sorciers : Renault est 
mort. •— Baltbasar est mort ! — Le. vin de Bordeaux. 

— La bataille des chats. — Contes de chats. , , 39 

Le cheval. — Noms patois et noms propres. Langage. 
L'attelage et ses noms. Proverbes. Devinettes. 

— Les chevaux malades ; les chevaux aux pardons. 

— Croyances. Le cheval et la nuit de Noël . . 5; 

Le mulet dans la littérature orale 81 

Le porc. — Noms patois. Proverbes. Croyances et 
superstitions. — - Le cochon lutin. — V homme 
changé en cochon • . . . • 82 

Chapitre II. — Les mammifères sauvages. 88-125 
§ I. GéMÉRAiiTÉs. — Les fauves dans les contes. « . 88 

II 25 



38^ TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



$ II. Monographies (i). — La baleine. — La belette. 

— Le blaireau. •— Le cerf. — La chanve-sooris. 

— L'écureuil. — La fouine. — Le furet. — Le 
hérisson. — L'hermine. — Le lapin. — Le lérot. 

— Le lièvre. Les lièvres sorciers. Le lièvre d 
CampUm. — Le lion. — Le loup. Le joueur de 
violon. Le meneur de loups. — La loutre. — ^Le 
mulot. — Le marsouin. — La musaraigne. — 
L'ours. — Le putois. — Le rat. — Le renard. Le re- 
nard ei son compère le loup, — La souris. — La taupe. 92 

Chapitre III. — Les oiseaux domestiques. 124-144 

§ I. Généralités «... 124 

§ II. Monographies. — Le- canard. — Le coq; son rôle 
important dans la superstition. — Le dindon. — 
L'oie. — Le paon. — Le pigeon 126 

Chapitre IV. — Le^ oiseaux sauvages . 145-215 

§ I. Généralités. — Les oiseaux dans les contes. . • 14^ 

5 IL Monographies. — L'aigle. — L'alouette. — La 
bécasse. — Le bouvreuil. — La caille. — Le ca- 
nard sauvage. La cane de Montfort, légende et 
chanson. ^-- Le caniard. — Le chardonneret. — Le 
chat-huant. — Le chevalier cn-blanc. — La 
chouette. — Corbeaux et corneilles. — Le cormo- 
ran. — Le coucou. Pourquoi il s'en va. facétie. — 
L'épervier. — L'étoumeau. — La fauvette. — Le 
geai. — Le goëland. — Le grèbe. — Le grimpe- 
reau. — La grive. — La huppe. La huppe et le 
pivert. — La lavandière. — La linotte. — Le mar- 
tinet. — Lé martin-pêcheur. — Le mauvis. — 

(i) Je donne systématiquement : i» le nom patois; 2° le lan- 
gage dès bètes ou celui qu'on leur adresse; 30 les proverbes; 
40 les devinettes; 50 les croyances et les superstitions; 6^ le 
rôle dans lés contes. Sauf pour les monographies importantes, 
je ne répéterai pas ces sommaires. 



DE LA HAUTE-BRETAGNE 387 



Le merle. — La mésange. — Le moineau. — Le 
mouchet. — La mouette. — L'oifmie. -* Le 
perroquet. Le pnroftut tt le curé. -^ Le perroquet 
de mer. ~ Le petit-duc. — Le pètreL — La pie. 
la pié et Ut dame. Ltt pie et la fié. — La pie- 
grièche. — Le pinson. — Le pivert. — La poule 
d'eau. — Le ramier. — Le rossignol. Le rtusignol 
et ton cbieu. — Le rouge-goi^e. Le nugê^gorge et 
le ehat-buant. — La tourterelle. La tourterelle et 
Ueoueou, — Le troglodyte. Le troglodyU et U chat- 
huant. Le troglodyU et l*aigle 149 

Chapitre V. — Les reptilks 216-244 

§ I. Générautés. — Crainte des reptiles. Croyances. — 
Les reptiles à Babylone. — Les reptiles préservent 
des charmes; leur rôle dans les contes 216 

5 IL MoNOGRAPHiBS. — La couleuvre. Superstitions et 
rôle dans les contes. — Le crapaud. Superstitions. 
Jeu. Vengeances du crapaud. Le crapaud gui 
parle. La fille maudite. — La grenouille : inter- 
prétations de son langage. Superstitions. Jeu^t. — 
Le lézard. Superstitions : rôle secourable. — 
L'orvet. -» La salamandre. Superstitions. I^ 
salamandre et le dormeur. — La tortue. — La 
vipère • . . 223 

Chapitre VL — Les poissons 245-276 

A. Les poissons de mer. — § I. Généralités. — Supers- 
titions et contes 24; 

^ II. Monographies. — L'anatife. — L'anémone. — 
L'Ane de mer. — Le bar. — Le bemard-l'hermite. 

— La bonite. — La brème. — Le calmar. -» Le 
capelan. — Le chien de mer. — Le cloporte de 
mer. •— Le congre. -^ La coquille Saint-Jacques. 

— Le crabe. Le crabe et le brigot. -<- La crevette. 

— La dorade. — Le grondin. — Le hareng. — 
Le homard. — L'huître. — Le lançon. — Le 



388 TRADITIONS ET SUPERSTITIONS 



nunche de couteau. — Le maquereau. — Le 
maquereau bâurd. — La méduse. — La morae. 
L'esprit de morue. — La moule. — L'ormier. — 
L'oursin. — Le pagel. — La patelle. — La plie. 

— Le poisson Saint-Pierre. Le bon Dieu et le 
poisson Saint-Pierre. — Le poulpe. Le poulpe d 
la sidie. — La raie. — Le roué. — Le rouget. — 
La sardine. — La sèche. — La sole. — Le talitre. 

— Le turbot. — La vieille. — Le vignot. — La 

vive 249 

B. Les poissons d'eau douce. ' — L'anguille. — Le 
brochet. — La carpe. — Le dard. ^ La sangsue. 274 

Chapitre VIL — Les insectes 277-307 

Ç I. GÉNÊRAXiTés. — Petit nombre de noms connus. . 277 

^ IL MoKOGRAPuiEs. — L'abeille. Superstitions. Les 

. ruches et les morts. — L'araignée. — Le 

bourdon. — Le bouzier. — Le cerf -volant. — 

La chenille. — La coccinelle. — Le colimaçon. 

— La demoiselle. — Le dytique. — L'éphémère. 

— Le faucheux.-— La fourmi. — Le frelon. — 
Le grillon. -«- La guêpe. •— Le hanneton. — La 
mouche. — La mouche d'eau. — Le papillon, ht 
papillon et le pauvre. — Le perce-oreille. — Le 
pou. — La puce. — Le scarabée. — Le staphylinx. 

— La tique. — Le ver de terre. — Le ver luisant. 278 

Chapitre VIIL — Les arbres 308-324 

§ I. GÉN&JUUTis. — > Moyens de les faire périr. . . . 308 

$ IL Monographies. — L'ajonc. — Le bouleau. — La 
bruyère. — Le cerisier. — Le châtaignier. — Le 
chêne. — Le coudrier. — L'églantier. — L'épine. 

— Le genêt. — Le gui. — Le houx. — Le lau- 
rier. — Le lierre. — Le noyer. — Le ponunier.» 
La ronce. — Le rosier. — Le saule. — Le sureau. 

— Le tremble 509 



DE LA HAUTE-BRETAGKE 389 



Chapitre IX. — Les plantes 325-346 

5 I. Génékautés. — Les herbes magiques. — Les deux 

chiens ^ • • 3^$ 

% IL MoMOGRAPHiBS. — L'aiL — L'anis. — L'avoine. 

— Le blé. — Le bleuet. — Le champignon. — 
Le chanvre. — Le chardon. — Le chou. — La 
citrouille. — Le coquelicot. ~ Le cresson. — La 
cuscute. — La digitale. — L*euphorbe. — La 
fève. — La fougère. — La fraise. — La jamotte. 

— La joubarbe. — La jusquiame noire. — Le lin. 

— La marguerite. — La mercuriale. — La mousse. 

— Le navet. — L'ortie. — La parelle. — Le 
persil. — Le pissenlit. — Le plantain. — Le pois. 

— Le saigne-nez. — Le sarrasin. — Le serpentaire. 

— Le serpolet. — Le trèfle. — La verveine. — 

La violette 328 

Chapitre X. — Les météores 347-366 

L*arc-en-ciel. Comment on le coupe. — Les aurores 
boréales. — Le brouillard. — Les comètes. — 
Les éclipses. — Les étoiles; les étoiles et les 
Ames. •— Le feu follet. — La lune ; son influence. 

— La neige. — L'orage : moyens de se pré- 
server de la foudre. — La pluie. — Le soleil. 

— Les vents 347 




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